D. LA TRANSFORMATION DE LA VILLE DE LENS
M. Michael BISMUTH, modérateur
La ville de Lens a un passé ouvrier. Une nouvelle dynamique a été lancée avec l'installation du Louvre-Lens, qui se veut le Louvre autrement. Que pouvez-vous nous dire de l'impact de l'ouverture du Louvre-Lens sur la transformation de la centralité lensoise et sur son rayonnement national et international ?
M. Sylvain ROBERT, maire de Lens
Avant de commencer, je tiens à remercier M. David Assouline d'avoir associé la ville de Lens à ce colloque, et je souligne que le musée qui a transformé notre ville a été dessiné par un cabinet d'architectes japonais.
Le musée du Louvre, la plus grande marque culturelle du monde, a souhaité, dans une opération de décentralisation culturelle, s'implanter sur notre territoire. Comme vous le voyez sur cette image, le musée s'est implanté dans un tissu urbain très diffus. Ouvert il y a dix mois, le musée a déjà reçu 800 000 visiteurs. En termes de développement social, il a été décidé d'assurer la gratuité des visites des collections pour accueillir le public le plus large possible.
Ma présentation vise à vous montrer comment nous avons fait évoluer notre projet de ville à partir d'une initiative de décentralisation culturelle. La ville de Lens était retenue au titre des quartiers ANRU (Agence nationale pour la rénovation urbaine), marqués par un renouvellement urbain assez fort.
Lens est située à 200 kilomètres au nord de Paris, dans un territoire très industriel du début du siècle, lié à l'exploitation charbonnière, et au coeur d'une Euro-région entre la Belgique, la Grande-Bretagne, l'Allemagne et la région nord de la France. La géographie urbaine de Lens est assez atypique, issue de l'exploitation charbonnière et des corons. Le Louvre-Lens a donc été construit au coeur du tissu urbain des cités de mineurs. Dès lors, il s'est agi, pour la ville et les différentes collectivités associées au projet, de construire un projet cohérent pour que la ville puisse se retrouver autour du musée. Au-delà de la ville, l'ambition était de faire percevoir la ville de façon différente à l'extérieur.
Lens est une ville assez concentrée, d'une surface assez réduite. Elle compte 37 000 habitants. En revanche, elle se trouve au coeur d'une agglomération de 250 000 habitants. Cette imbrication des villes par rapport aux autres nous a incités à nous demander comment partir de ces atouts pour construire notre projet urbain.
Les atouts actuels de la ville de Lens ont été identifiés par un cabinet de paysagistes. L'agglomération est un tissu mixte, avec des villes très petites. La centralité se trouve au centre-ville de Lens, et dans une moindre mesure au niveau du centre-ville de Liévin, un peu plus diffus. L'objectif était de relier les avantages de ces centres pour en faire un véritable tissu cohérent, au travers de quatre axes : le paysage, l'identification des pôles d'attractivité, la mobilité et la présence de l'élément de l'eau.
Le sénateur, M. Daniel Percheron a comparé le Louvre-Lens au musée Guggenheim de Bilbao. Avec l'arrivée de ce dernier, la ville de Bilbao s'est reconstruite autour d'un élément fédérateur : le fleuve. À Lens, en l'absence de fleuve, il s'agit de tisser un lien de mobilité à travers les transports en commun de grande capacité.
L'enjeu, à partir du Louvre-Lens, consiste à créer un « archipel vert » reliant les structures présentes sur le territoire les unes aux autres, en suivant un mouvement concentrique. Le premier cercle correspond aux abords du Louvre. Le dispositif s'élargit ensuite à l'ensemble de l'agglomération. L'objectif est de proposer une nouvelle lecture urbaine, plus large que le périmètre des cités minières.
Parmi les éléments marquants du territoire, il convient de citer le club de football, qui a connu des heures glorieuses et, nous l'espérons, rejoindra l'élite à l'avenir. Le stade Bollaert était ainsi un élément symbolique qui fédérait la population autour d'un site une à deux fois par mois. Le Louvre fédère un autre type de population, complémentaire, et permet de disposer d'autres vecteurs porteurs pour le territoire. Des corridors boisés ont été créés pour relier l'ensemble de ces espaces micro-urbains. Il importe de créer ces liaisons afin de conférer à la ville une taille critique, pour créer une véritable métropole.
Depuis l'ouverture du musée, le premier défi a été relevé, avec une fréquentation élevée. 71 nationalités se sont rendues au Louvre, et 400 000 visiteurs régionaux. Nous assistons donc à une appropriation culturelle inédite. Les visiteurs du musée se rendent également dans la ville de Lens. Il s'agit là d'un potentiel touristique sur lequel nous souhaitons capitaliser. Notre ambition est de faire évoluer notre ville, de changer son image. Le nord de la France a longtemps été associé à des paysages noirs. Nous espérons qu'il évoquera désormais un « espace vert », et nous souhaitons poursuivre ces développements culturels, paysagers et économiques dans les années à venir.