XXVIIIème session ordinaire de l'APF
(Berne, 7 - 9 juillet 2002)
Discours de M. Jacques Legendre, secrétaire général parlementaire
C'est pour moi un plaisir toujours renouvelé d'intervenir devant notre Assemblée plénière pour lui présenter l'ensemble des travaux réalisés par notre institution depuis un an.
Cette année, ce plaisir se double de celui d'être à Berne, capitale de la Confédération helvétique, haut lieu de la démocratie où notre assemblée se devait de tenir un jour sa session. La Suisse, dont tout une partie du territoire est francophone nous accueille aujourd'hui et je veux à mon tour remercier notre section suisse pour l'excellence de son accueil et de son légendaire sens de l'organisation.
Notre session qui s'est souvent tenue en France, n'avait encore jamais eu la Suisse, pays voisin pour cadre. Nous nous sommes si souvent rencontrés dans le pays de Voltaire, il fallait bien qu'un jour nous nous retrouvions dans celui de Rousseau.
Il y a un an, notre session de Québec avait été une grande réussite tant par la qualité de ses intervenants que par l'importance des résolutions et recommandations adoptées. Elle avait été de plus marquée par la tenue simultanée du premier Parlement francophone des jeunes et tous ici, gardons un souvenir fort de la réunion conjointe qu'avait tenue notre Assemblée avec les jeunes représentants de ce Parlement et du dialogue fécond auquel elle avait donné lieu.
Je ne doute pas que le cru bernois de 2002 sera un millésime aussi exceptionnel que celui de Québec l'année dernière.
J'en veux d'abord pour preuve la présence de M. Boutros Boutros Ghali, Secrétaire général de la Francophonie qui, fidèle à un usage désormais bien établi a accepté de venir répondre aux questions que les parlementaires de notre Assemblée souhaitaient lui poser. Nous interrogeons donc l'exécutif de la francophonie de la même façon que nous interrogeons notre Gouvernement dans la plupart de nos Parlements. Par cette séance, le Secrétaire général nous montre que l'« esprit d'Hanoi » est toujours présent et que l'Assemblée parlementaire de la Francophonie joue pleinement le rôle qui lui est attribué au sein de la Francophonie institutionnelle.
Rôle de contrôle certes, mais aussi rôle d'organe consultatif des institutions de la Francophonie comme en témoigne les avis que nous présenterons lors du prochain Sommet de Beyrouth et les diverses recommandations et résolutions que nous examinerons au cours de cette session et qui ont déjà fait l'objet de riches débats devant nos quatre commissions permanentes.
Pour terminer ce long préambule, je voudrais revenir d'un mot sur les avatars qu'a connus le Sommet de Beyrouth. La décision de reporter le Sommet qu'a due prendre le Secrétaire général de la Francophonie fut certainement une décision difficile et douloureuse. Une décision douloureuse car il était impossible de biffer d'un trait de plume l'immense effort fait par nos amis libanais pour accueillir un Sommet souvent présenté comme la réunion la plus importante organisée à Beyrouth depuis l'indépendance du pays en 1943. Cet effort qui dépassait largement le simple cadre de l'organisation d'une conférence internationale et se traduisait par la construction ou la modernisation d'infrastructures lourdes, devait permettre au Liban de montrer aux yeux du monde que la page sanglante de quinze années de guerre civile était tournée.
A l'instar du Secrétaire général nous ne pouvions alors qu'exprimer notre gratitude au Liban pour son engagement.
C'est pour marquer fortement l'attachement de notre Assemblée au Liban que la commission des affaires parlementaire a tenu sa réunion intersessionnelle à Beyrouth en mai dernier.
Aujourd'hui tout ceci n'est, je veux l'espérer, qu'un mauvais souvenir et je me réjouis de voir la grande famille francophone à nouveau réunie et ce sur la terre du Liban au mois d'octobre prochain. Jamais le thème du dialogue des cultures n'aura été aussi pertinent et le Liban, constellation de cultures, de langues et de religions est sans conteste le théâtre idéal pour tenir ce débat.
Venons en maintenant au coeur même de mon propos, à savoir la présentation des activités de notre Assemblée. Les douze mois qui nous séparent de la session de Québec furent à mon sens extrêmement importants dans l'histoire de notre Assemblée car il confirmèrent la montée en puissance de notre Assemblée au sein de l'univers institutionnel francophone.
Désormais, notre Assemblée apparaît de plus en plus comme un élément déterminant de l'activité internationale de la Francophonie, entité qui elle aussi se plaît à découvrir les vertus de la diplomatie parlementaire.
En effet dès le lendemain du Bureau de Paris tenu fin janvier 2002, M. Boutros Boutros Ghali, Secrétaire général de la Francophonie, prenait contact avec votre secrétaire général parlementaire pour étudier les conditions d'envoi d'une mission d'amitié à Madagascar au moment où les événements faisant suite à la proclamation des résultats controversés du premier tour de l'élection présidentielle se précipitaient.
Après avoir évalué diverses hypothèses, M. Boutros Boutros Ghali a proposé d'envoyer une mission exclusivement composée de parlementaires de l'APF sur la grande île. Nous nous trouvions donc face à une situation inédite puisque habituellement l'envoi de missions de ce type résulte d'une décision de notre Bureau. En l'espèce, le cas était différent. L'OIF avait décidé d'envoyer une mission de la Francophonie à Antananarivo et d'en confier la conduite exclusive à des parlementaires.
Composée dans l'urgence, une mission composée de M. Louis-Philippe Tsitsol, Chargé de mission Afrique à l'APF et député du Cameroun, M. Saleck Ould Abdel Jelil, Premier Vice-Président du Sénat de Mauritanie et deux sénateurs français, M. Guy Penne, Vice-Président de la commission des affaires parlementaires et M. Louis Duvernois s'est donc rendue à Madagascar.
Après diverses péripéties dont je vous épargnerai le détail, la mission est parvenue à atteindre la grande île où elle fut accueillie par les Présidents des deux chambres. Elle a rencontré pendant les 48 heures où elle demeura sur place, les principaux protagonistes de la crise à savoir les deux candidats à l'élection présidentielle, MM. Didier Ratsiraka, Président de la République sortant et Marc Ravalomanana, maire d'Antananarivo entre lesquels elle multiplia les médiations afin de tenter de les faire se rencontrer pour la première fois. Elle eut aussi des contacts avec le Premier ministre, les représentants du Corps diplomatique et des églises et les responsables du consortium d'observateurs des élections.
Vous trouverez en annexe à mon rapport les conclusions de la mission. Je ne veux y revenir ici dans le détail ne serait-ce que parce que beaucoup d'événements ont secoué Madagascar depuis le mois de février dernier rendant partiellement obsolètes certaines considérations. Il importe toutefois de tirer divers enseignements de cette mission.
Certes la mission n'est pas parvenue à établir le premier contact entre les deux candidats à l'élection présidentielle malgré ses efforts répétés. Mais il ne faut pas pour autant en tirer hâtivement un constat d'échec. La mission conduite par les parlementaires de l'APF a « ouvert la voie » à d'autres médiations. Je pense à celles successivement conduites par M. Amara Essy, Secrétaire général de l'Organisation de l'Unité africaine et par le Président du Sénégal, M. Abdoulaye Wade.
Mais plus durablement, avec l'envoi de cette mission, l'Assemblée parlementaire de la Francophonie a montré qu'elle était un médiateur crédible. Comme ses membres appartiennent au pouvoir législatif, elle constitue un organe qui entretient de fait des liens plus lâches avec les pouvoirs exécutifs. Or, ceux-ci sont dans la plupart des cas parties prenantes aux contentieux politiques ou diplomatiques surgissant dans l'espace francophone.
La mission de bons offices envoyée en Centrafrique répond à un schéma plus classique d'application d'une décision de nos instances.
Je vous rappelle qu'à Québec, notre Assemblée avait adopté, sur proposition de la commission politique, une résolution condamnant avec fermeté la tentative de coup d'État survenue à Bangui dans la nuit du 27 au 28 mai 2001 mais déplorant également les exactions commises en représailles à ce coup d'État . Elle exigeait enfin que toute la lumière soit faite sur l'assassinat de notre collègue Théophile Touba et que ses assassins soient recherchés, jugés et punis.
Le secrétaire général parlementaire et les instances compétentes de l'APF étaient chargés par cette résolution « de suivre de près l'évolution de la situation et de proposer les démarches appropriées, y compris l'envoi sur place d'une mission d'information et de bons offices » .
Depuis le mois de juillet, l'Assemblée parlementaire de la Francophonie avait été conviée avec insistance par plusieurs personnalités centrafricaines à enquêter sur place. Dans un premier temps, je n'ai pas donné suite à ces demandes répétées, jugeant que les conditions de sécurité et de sérénité indispensables pour mener à bien une mission de ce type, n'étaient pas réunies, comme en ont témoigné les évènements graves survenus en Centrafrique au début du mois de novembre 2001. L'UIP également conviée par les autorités centrafricaines à venir enquêter sur place, a adopté la même attitude de prudente réserve.
A partir du printemps 2002, la situation générale m'a paru plus favorable pour envoyer une mission de bons offices à Bangui. J'ai donc demandé à deux de nos collègues, M. Louis-Philippe Tsitsol, député du Cameroun et Chargé de mission Afrique à l'APF et M. Ibrahima Bah, député de la Guinée et rapporteur de la commission politique sur les situations de crise dans l'espace francophone de se rendre en Centrafrique.
Après avoir entendu à Paris, divers représentants de l'opposition centrafricaine en exil, MM. Tsitsol et Bah ont conduit la mission à Bangui du 21 au 28 avril 2002. Ils y ont rencontré de très nombreuses personnalités du monde politique, judiciaire, administratif, diplomatique et militaire au premier rang desquelles, M. Ange-Félix Patassé, Président de la République centrafricaine. Ils ont également eu de fructueux entretiens avec diverses ONG.
Des conclusions de la mission que m'a présentées M. Ibrahima Bah que j'ai longuement reçu à Paris à son retour de Bangui, conclusions que vous trouverez également en annexe de mon rapport, il ressort que la situation économique et sociale de la Centrafrique apparaît très instable et marquée par l'insécurité, la corruption, la désorganisation de l'Armée et le retard de paiement des salaires de la fonction publique. Quant à la situation politique de la Centrafrique, elle se caractérise par une atmosphère de suspicion, par la poursuite des procédures judiciaires où les droits de la défense ne sont pas garantis et par l'instabilité de la majorité présidentielle.
S'agissant du cas particulier de notre regretté collègue Théophile Touba, je vous rappelle que j'avais déposé dès le 18 juin 2001, auprès de l'Union interparlementaire, une plainte formelle relative à son assassinat. Cette plainte fut immédiatement soumise au Comité des droits de l'homme des parlementaires de l'UIP qui n'a pas à ce jour, achevé l'examen du cas de Théophile Touba.
Quant aux conditions de son assassinat, je vous invite pour en savoir plus à vous reporter au rapport de la mission de bons offices que vous trouverez en annexe de mon propre rapport.
La participation aux missions d'observation des élections constitue une autre facette de l'activité de notre Assemblée sur la scène politique internationale. Elle constitue également un témoignage fort et visible de son engagement en faveur de la démocratie et de l'état de droit.
La « gestion » de notre participation à ces missions est un exercice difficile car il est soumis à de nombreux aléas. Nous ne maîtrisons en effet ni la procédure de saisine de l'OIF ni les implications budgétaires de l'envoi de missions. Nous ne maîtrisons pas plus les calendriers électoraux qui subissent fréquemment des bouleversements de dernière minute ; l'exemple du report à répétition des élections au Togo illustre les difficultés que nous pouvons rencontrer.
Je me suis par le passé régulièrement plaint du fait que trop souvent, le Secrétariat général était averti à la dernière minute de l'envoi d'une mission, ne pouvant trouver dans de telles conditions des parlementaires prêts à bouleverser leur agenda pour se rendre à plusieurs milliers de kilomètres de chez eux.
Il semble toutefois que ces habitudes soient heureusement en train de changer car au cours des derniers mois, les pays demandeurs ont, en règle générale, saisi l'OIF dans des délais raisonnables nous permettant de trouver un ou plusieurs membres de notre Assemblée acceptant de participer à la mission. La saisine très tardive du Tchad pour le premier tour des élections législatives du 21 avril contraignant l'OIF à renoncer à l'envoi d'observateurs peut à cet égard être regardée comme l'exception confirmant la règle observée en 2002.
Depuis notre session de Québec, notre Assemblée a participé à six missions d'observation.
Elle a d'abord participé à l'observation des deux tours des élections législatives au Gabon, deux parlementaires représentant l'APF ont participé à cette mission : M. Badel Ndanga Ndinga, député camerounais, participait à la mission envoyée pour le premier tour, conduite par M. Antonio Mascarenhas Monteiro, ancien Président de la République du Cap-Vert. La mission constituée pour le second tour était conduite par M. Badel Ndanga Ndinga, et y participait également M. Robert Gaïa, député français.
Je tiens à signaler que cette mission a oeuvré conjointement avec une mission de l'Organisation de l'Unité Africaine lors du premier tour.
De manière générale, les membres de la mission ont relevé l'esprit de concertation et de dialogue dont a fait montre la classe politique gabonaise, en vue de parvenir à un consensus pour la conduite des élections la volonté de tous les acteurs de poursuivre et d'améliorer le processus démocratique ; ils ont en revanche également mis l'accent sur la nécessité d'améliorer la fiabilité des listes électorales et quelques problèmes d'organisation qui eurent pour effet de compliquer le déroulement du scrutin.
Notre Assemblée a ensuite été partie prenante à l'observation du référendum constitutionnel du 23 décembre 2001 aux Comores.
Ce référendum important car je vous le rappelle, il tendait à l'approbation de la Constitution de l'Union des Comores, perçue comme une étape essentielle dans le processus de réconciliation nationale initié par l'Accord de Fomboni du 17 février 2001.
La mission francophone était conduite par M. Saleck Ould Abdel Jelil, Premier Vice-Président du Sénat de Mauritanie, et comprenait deux représentants de l'APF : Mme Zalifa Bente Salim et M. Bernard Anselme Ravelonjato, députés à l'Assemblée nationale de Madagascar.
Les observateurs ont apporté un jugement favorable à l'organisation générale du scrutin et ont noté avec satisfaction le sérieux des personnels des bureaux de vote et le calme des électeurs. Ils ont toutefois signalé quelques points faibles portant sur des erreurs sans les listes électorales ou sur le manque d'organisation dans le dépouillement :
Ils ont recommandé une vérification systématique des listes électorales, une amélioration de la formation des personnes intervenant dans les bureaux de vote et le perfectionnement du matériel desdits bureaux.
En conclusion, la mission a considéré que le vote du 23 décembre 2001 avait « répondu aux critères d'un scrutin démocratique, libre et transparent » .
Le 28 avril et le 12 mai 2002, une mission de l'OIF conduite par notre collègue du Jura, M. Claude Schluchter et composée en particulier de M. Marcel Beaubien, député de l'Ontario et de M. Abdou Saley, député du Niger a observé les deux tours de l'élection présidentielle au Mali.
A l'issue du deuxième tour, la mission de l'OIF a constaté que le scrutin s'était déroulé librement et sans incidents majeurs, que la loi électorale était scrupuleusement respectée et que les opérations de dépouillement s'étaient passées normalement. Elle s'est félicitée de la présence dans chaque bureau de vote de délégués de la Cour constitutionnelle et de la commission électorale nationale indépendante. En revanche, elle a relevé que la Cour constitutionnelle avaient pointé diverses irrégularité et a déploré que la campagne électorale soit réduite à sa plus simple expression et la faiblesse du taux de participation des électeurs. En conclusion, la mission a jugé cette consultation électorale, « libre, fiable et transparente » .
Les élections législatives au Burkina Faso ont également donné lieu à l'envoi d'une mission d'observateurs francophones présidée par M. Isaac Nguemadu Gabon, ancien Président de la commission des droits de l'Homme et des peuples de l'OUA. L'APF y était représentée par M. Nathaniel Bah du Bénin, M. Maïfada Bonkano du Niger et Mme Line Beauchamp du Québec.
Les conclusions de cette mission sont proches de celles de la mission d'observation présente au Mali, le scrutin étant là aussi qualifié de « libre, fiable et transparent ». A l'exception de quelques difficultés mineures d'organisation matérielle des opérations de vote, le scrutin s'est parfaitement bien déroulé.
Enfin, le 26 mai dernier, l'OIF a observé le premier tour des élections législatives au Congo.
La mission était conduite par M. Luan Rama (Albanie), ancien Ambassadeur, ancien représentant du Chef de l'État au CPF ; elle a rencontré les autorités politiques et administratives, les institutions impliquées dans l'organisation, la supervision et le contrôle de la régularité des opérations électorales : ministère de l'intérieur, commission nationale d'organisation des élections, Cour suprême, des candidats à l'élection législative, dont des membres du Gouvernement, des responsables de formations politiques toutes tendances confondues, parties prenantes au scrutin, des organisations de la société civile, des chefs de missions diplomatiques, des partenaires au développement et des professionnels des médias.
Les représentants de l'APF étaient M. Philippe Charlier de la Communauté française de Belgique et M. Badel Ndanga Ndinga du Cameroun. M. Pierre Scharff de la Communauté française de Belgique a pour sa part, accompagné la mission présente à Brazzaville le 23 juin dernier lors du second tour des élections.
Je veux rappeler ici qu'il me paraît particulièrement important de participer aux missions se déroulant chez les sections suspendues. En effet, les élections me semblent être un bon révélateur de l'état de la démocratie dans un pays et ces missions peuvent apporter un lot d'informations intéressantes pour notre Assemblée et utiles pour les décisions qu'elle pourra être amenée à prendre envers la section intéressée.
Leurs conclusions sont contrastées. Plusieurs points positifs ont été relevés : sérieux et sérénité des bureaux de vote, présence des délégués des candidats, sens civique de la population. Mais d'autres informations sont plus préoccupantes : impossibilité d'organiser les élections dans une partie de la région du Pool en raison des troubles, listes électorales peu fiables car résultant d'un recensement administratif incomplet, fraudes dans certaines circonscription, faible participation des électeurs.
Enfin, l'Assemblée parlementaire de la Francophonie devait participer à l'observation des élections législatives au Cameroun le 23 juin dernier par la présence du député gabonais M. Simon Boulamatari et du sénateur français M. André Ferrand mais celles-ci ont été reportées.
J'en viens maintenant au suivi de divers textes adoptés par notre Assemblée lors de notre session de Québec.
Je vous rappelle que nous avions adopté l'an dernier, sur proposition de la commission politique, une recommandation visant à permettre une mise en oeuvre effective et rapide de la Déclaration de Bamako par les instances de la francophonie.
Mettre en oeuvre de la déclaration de Bamako est un exercice délicat ce qui explique largement le fait que la francophonie avance à la fois avec résolution et prudence sur ce chemin.
Mais si cette lenteur peut finir un jour par devenir préoccupante, il faut aussi se réjouir du fait que les suggestions faites par notre assemblée semblent être prises en compte.
Ainsi, notre recommandation adoptée à Québec proposait « de mettre rapidement en place, en s'appuyant notamment sur la Délégation aux droits de l'Homme et à la démocratie, un dispositif d'examen des communications et une procédure de traitement des requêtes ainsi que des instruments d'observation et d'analyse de la situation de la démocratie, des droits et des libertés dans l'espace francophone, et de se doter, à l'instar du Groupe Ministériel d'Action du Commonwealth sur la Déclaration de Harare, d'un groupe restreint de ministres des Affaires étrangères ou de leurs représentants, qu'il pourra saisir et consulter dans les situations d'urgence. »
Or une note du Secrétaire général de l'Organisation internationale de la Francophonie relative à la mise en oeuvre de Bamako se fonde sur un mécanisme de contrôle s'articulant autour de quatre points (collecte d'informations émanant entre autres de l'APF, élaboration de rapports périodiques par la délégation aux droits de l'Homme et à la démocratie, mise en place d'un comité consultatif restreint composés de représentants personnels et d'ambassadeurs, inscription à l'ordre du jour des sessions ordinaires du CPF d'un point consacré aux pratiques de la démocratie, des droits et des libertés dans l'espace francophone).
Le lien avec le texte adopté par notre assemblée est clair ; il montre que notre recommandation n'est pas restée lettre morte.
De plus l'APF, ses parlementaires et son Secrétariat général participent régulièrement à la réflexion engagée par la Délégation à la Démocratie et aux Droits de l'Homme de l'OIF.
Ainsi, les 12 et 13 mars 2002 s'est réuni pour la première fois à Paris de manière informelle, le Réseau d'information et de concertation pour l'observation des pratiques de la démocratie, des droits et des libertés dans l'espace francophone. Cette rencontre importante organisée par l'OIF visait à faire le point sur les mécanismes et instruments d'observation et d'évaluation existant dans le domaine de la démocratie et des droits de l'Homme et à réfléchir à la mise en place du mécanisme francophone de suivi. Il importait donc, au regard des valeurs que nous défendons que l'APF fût présente à cette réunion. A l'invitation de l'OIF, les deux rapporteurs de la commission politique MM. Ibrahima Bah, rapporteur sur les situations de crise politique dans l'espace francophone et M. Jean-Pierre Perdieu député du Parlement de la Communauté française de Belgique et rapporteur sur le suivi de la Déclaration de Bamako, nous représentèrent lors de ce débat essentiel.
La résolution sur la protection et la valorisation du patrimoine culturel menacé, adoptée l'an dernier sur proposition de la commission de l'éducation, de la communication et des Affaires culturelles a également donné lieu à des suites intéressantes prenant la formes de deux tables rondes
La première s'est tenue le 30 janvier 2002 dans les locaux du Secrétariat général de l'APF. Elle a porté en particulier sur les moyens et méthodes permettant de « matérialiser », recenser et protéger le patrimoine de civilisations marquées par l'oralité.
Ces travaux se sont poursuivis le 12 février dernier lors d'une seconde table ronde, organisée par la commission de l'éducation, de la communication et des Affaires culturelles à l'Université Senghor d'Alexandrie.
J'en viens maintenant aux actions de coopération menée par notre Assemblée.
Vous pourrez constater que la diplomatie parlementaire n'a pas seulement été au coeur de notre action au cours des six derniers mois mais a aussi nourri notre réflexion comme en témoigne l'organisation à Dakar du 19 au 21 mars dernier d'un séminaire portant, à la demande de l'Assemblée nationale du Sénégal, sur le thème du « Parlement et des relations internationales ». Ce séminaire, signalons le, a constitué l'un des nombreux événements organisés dans le cadre de la Journée de Francophonie.
Au cours de ces trois jours ont été traitées en séance plénière et en ateliers, les questions relatives aux pouvoirs du Parlement en matière de relations internationales, celles portant sur la diplomatie parlementaire et celles concernant les liens et articulations entre Parlements nationaux et Parlements supra-nationaux, en se fondant sur les exemples comparés de la construction européenne et de l'unité africaine.
Six conférenciers parlementaires venant des trois grandes régions représentées au sein de l'APF : Afrique, Amérique et Europe, ont fait un exposé et ont échangé leurs points de vues avec leurs collègues députés sénégalais.
Il s'agissait de MM. Marcel Eloi Rahandi Chambrier (Gabon), ancien Président de l'APF, Idy Bore (Mali), Robert Del Picchia (France), Rudi Marguerettaz (Val d'Aoste), Roger Paquin (Québec) et Claude Wiseler (Luxembourg) ; Louis-Philippe Tsitsol, député camerounais et chargé de mission de la région Afrique de l'APF, était également présent et a pu apporter un témoignage intéressant en matière de diplomatie parlementaire puisque c'est lui, je vous le rappelle, qui conduisait la mission de notre Assemblée à Madagascar.
Notons qu'un tiers du coût de ce séminaire a été financé par le Grand Duché du Luxembourg, qui entretient une coopération étroite avec le Sénégal. Que nos amis luxembourgeois soient remerciés pour cette initiative intéressante et originale, conciliant l'inconciliable à savoir le multilatéral et le bilatéral, et qui constitue un précédent intéressant pour notre Assemblée.
En marge du séminaire, je tiens à vous signaler que la délégation de l'APF a déposé une gerbe de fleurs et s'est recueillie sur la tombe du Président Léopold Sédar Senghor.
L'APF devrait organiser deux autres séminaires en 2002, l'un en Moldavie en octobre et l'autre au Cameroun en décembre, séminaire qui sera pour la première fois jumelé avec un stage pour fonctionnaires.
S'agissant des stages pour fonctionnaires, je vous rappelle que l'APF continue à financer la participation au stage de l'Institut international d'administration publique de Paris, de fonctionnaires de nos Parlements. Cette année, ce sont quatre fonctionnaires issus des Assemblées nationales de Hongrie, du Sénégal et du Tchad et du Sénat du Gabon, qui ont suivi à Paris du 4 au 29 mars 2002, le stage de l'IIAP.
Quant au programme Pardoc, il est mort de sa « belle mort » puisque je vous rappelle que le Sommet de Chaillot de 1991 l'avait créé pour dix ans. Mais je ne veux pas laisser place à une quelconque consternation que je pourrais sentir poindre ici ou là à cette annonce. Pardoc est mort mais vive Noria ! Programme plus vaste et plus ambitieux car portant sur toute l'information et la communication des Assemblées parlementaires et programme plus richement doté et dont la mise en oeuvre commencera dès la fin de cette session.
Mais je ne puis achever mon intervention sans rendre un hommage appuyé et sincère à diverses personnalités qui auront marqué l'histoire de l'Assemblée parlementaire de la Francophonie et qui ont connu récemment des fortunes diverses.
Je pense d'abord à notre ancien Président Jean-Pierre Charbonneau désormais ministre délégué dans le Gouvernement québécois ; je pense aussi à nos ex vice-présidents M. Maurice Melegue Traoré du Burkina Faso et M. Louis Mexandeau de la section française ; je pense encore au Président El hadj Boubacar Biro Diallo qui était une des consciences de l'APF et à notre Chargé de mission Afrique, le si disponible Louis-Philippe Tsitsol ; je pense enfin au nouveau ministre français de la Francophonie et de la coopération, M. Pierre-André Wiltzer qui dut avoir ces jours-ci, une pensée émue pour notre Assemblée car je crois que c'est la première session qu'il manque depuis plus de quinze ans. Qu'il soit rassuré, je suis convaincu qu'il sera souvent amené à nous croiser au cours des prochaines années.
Que tous soient remerciés pour l'action qu'ils ont conduite en faveur de la Francophonie parlementaire et de notre institution. Que tous sachent que nous poursuivrons le combat engagé à leurs côtés, en faveur de la démocratie et du respect de l'État de droit.
Je vous remercie.