Maurice BOURGÈS-MAUNOURY

Maurice BOURGÈS-MAUNOURY, Président du Conseil, rappelle que l'instauration du marché commun intervient dans un contexte où « l'Europe a d'abord été amputée de sa moitié orientale passée sous domination soviétique » et qu'« elle a ensuite vu contestée sa vocation traditionnelle outre-mer ». Dans ces conditions, il convient d'« établir durablement les fondements d'une coopération, sans laquelle ni l'Europe ni la France ne trouveront dans le monde la place qui leur est due », cette coopération ne pouvant « se fonder sans un rapprochement franco-allemand ». Il ajoute : « depuis la fin de la guerre, il est apparu qu'il était impossible de rechercher un accroissement rapide et sensible des niveaux de vie dans le cadre étroit des seuls marchés nationaux ».

Guy MOLLETAprès avoir rendu hommage à l'action du président Guy MOLLET - « L'histoire retiendra que l'Europe lui doit beaucoup » -, Maurice FAURE, secrétaire d'Etat aux affaires étrangères, s'exprime sur l'architecture institutionnelle retenue : « c'est incontestablement toute une conception de politique étrangère qui est engagée (...) Pourquoi tournons-nous le dos à cette conception d'organes ne fonctionnant qu'à l'unanimité ? Je le dis très franchement : parce que l'unanimité, c'est le droit de veto et c'est la paralysie du système ou bien son éclatement ». Il qualifie de « compromis » l'institution d'un exécutif « bicéphale » avec la commission européenne et le Conseil des ministres.

Maurice FAUREFAURE considère que les dispositions relatives à l'outre-mer sont la « partie sans doute la plus originale et peut-être la plus constructive de l'ensemble des traités européens ». Il indique que l'« argument de base qui a déterminé nos partenaires » est qu'« aujourd'hui de cet autre côté de la Méditerranée , ce n'étaient pas des profits qu'il fallait aller chercher mais beaucoup plus des sacrifices qu'il fallait aller y partager ».

Christian PINEAUChristian PINEAU, ministre des affaires étrangères, estime pour sa part que « l'organisme principal (...) n'est pas la Commission européenne mais le Conseil des ministres ». Il affirme que « les projets des six, loin de faire obstacle à la réalisation d'une entreprise plus vaste, ont relancé, au contraire, l'idée de la grande Europe ». Il soutient que les « dispositions du traité préservent l'unité économique et politique de la zone franc et sont fondées sur sa cohésion ». S'agissant de la cohésion au sein des six, il souligne que «  la Banque européenne d'investissement et le fonds social européen donnent à la communauté, en faveur des régions sous développées, des moyens d'action que l'on aurait tort de sous estimer ».

PINEAU résume ainsi l'objet du traité : « Il permet à la France de conserver ses chances dans la compétition économique mondiale, de renforcer la position des démocraties occidentales, dont la faiblesse, causée avant tout par la division, a été démontrée, notamment à l'Organisation des Nations Unies.

« Le traité permet aussi d'établir sur des bases durables, la nécessaire entente franco-allemande et de créer entre l'Allemagne et le monde occidental des liens indissolubles. N'est-ce pas la meilleure façon de rassurer ceux qui craignent ou qui affectent de croire inévitable un nouveau rapprochement germano-russe qui sonnerait le glas de l'indépendance européenne ?

« Le traité permet, enfin, de donner force et cohésion à la participation active de l'Europe en faveur des pays sous-développés - problème fondamental de notre époque - en particulier ceux de l'Afrique ».