Reconnaissance du bénévolat de sécurité civile
Mme la présidente. - L'ordre du jour appelle le débat sur la reconnaissance du bénévolat de sécurité civile, à la demande du groupe CRCE-K.
M. Jean-Pierre Corbisez, pour le groupe CRCE-K . - (Applaudissements) Ce sujet me tient particulièrement à coeur. Le Pas-de-Calais a connu une vague d'inondations d'ampleur à la fin 2023 et au début 2024, laissant les habitants dans des situations préoccupantes, même s'il n'y a pas eu de victimes. Chacun a pu noter l'engagement et l'utilité des associations agréées de sécurité civile, notamment la Protection civile. C'est aussi le cas à Mayotte, où dix bénévoles du Pas-de-Calais se sont rendus, ou encore à La Réunion, vers laquelle trois bénévoles du département s'envoleront demain.
Une proposition de loi déposée en avril 2023 par le député Yannick Chenevard, présent dans notre tribune, a été adoptée à l'unanimité par l'Assemblée nationale en mars 2024, mais n'a toujours pas été inscrite à l'ordre du jour du Sénat.
Le Président de la République déclarait en 2017 à ces bénévoles : « Vous incarnez toutes et tous le visage d'une France solidaire, ouverte, généreuse. Je suis fier de cette énergie que chacun de vous déploie en ces moments difficiles et éprouvants par le seul souci de l'autre et le seul intérêt de la France ».
J'ai participé à la mission commune d'information sur le sauvetage en mer organisée après la mort tragique de sauveteurs en Vendée. Les problématiques étaient proches : il fallait là encore mieux reconnaître les bénévoles pour sauvegarder le modèle de la Société nationale des sauveteurs en mer (SNSM).
Pas moins de 200 000 bénévoles oeuvrent au sein des associations agréées, assurent les secours pour les grands événements, font de la formation et agissent durant les crises aux côtés des pompiers. Dans le Pas-de-Calais, il y a 250 bénévoles et 10 salariés - 50 en période estivale pour la surveillance des plages. Ils totalisent 8 antennes, 150 000 heures de bénévolat en 2024, 2 700 personnes secourues et 1 800 personnes assistées, des postes de secours à l'Enduro du Touquet ou au Main Square Festival d'Arras, mais aussi dans 300 autres manifestations.
On compte 200 mobilisations par an par le préfet avec 64 véhicules dont 6 de premier secours, auxquelles s'ajoute la mission, sur le littoral du Pas-de-Calais, de la prise en charge des migrants, après l'intervention des forces de l'ordre. Les crises géopolitiques, sanitaires et climatiques s'intensifient.
Le texte adopté à l'Assemblée nationale, réclamé de longue date par les associations, comprend des avancées significatives pour la reconnaissance des bénévoles : amélioration de l'articulation avec leur activité professionnelle, prise en compte le temps de bénévolat au titre du compte personnel de formation, octroi de trimestres supplémentaires pour le calcul de leur retraite, distinctions. Je pense aussi à une réduction sur les prix de carburant.
Toutefois, la proposition de loi adoptée a éludé la question du renforcement des moyens des associations agréées. Différents articles ont été retirés du texte, en raison de l'état inquiétant de nos finances publiques, créant notamment un fonds de garantie et des avantages fiscaux. L'ambition du texte initial n'a pas été conservée.
Dans mon département, seuls six des dix postes de permanents sont financés par l'État. L'État ne finance pas autrement la Protection civile du Pas-de-Calais et tarde à rembourser les frais engagés : 150 000 euros de carburant et de consommables n'ont pas été remboursés depuis l'hiver 2023-2024.
Un Beauvau de la sécurité civile a été lancé, mais seul un chantier sur cinq a été ouvert. Nous aimerions avoir accès aux quatre autres, notamment celui relatif au financement.
La proposition de loi était déjà le fruit d'une concertation avec les acteurs de terrain. Combien de temps les bénévoles devront-ils attendre pour qu'elle soit votée ? La loi Matras de 2021 prévoyait déjà la consolidation de l'organisation des associations, mais n'a pas été véritablement suivie d'effets sur le terrain.
Que répondre aux associations confrontées aux difficultés financières ou aux carences de matériels ? Nous devons identifier les mécanismes pour les conforter : réduction du prix du carburant, mais aussi du malus écologique et de la taxe foncière... Quel calendrier pour la clôture des travaux du Beauvau ? Quels sont les résultats de l'enquête en ligne ouverte en juin 2024 et toujours ouverte à ce jour ? Il faut urgemment inscrire ce texte à l'ordre du jour. C'est le moins que l'on puisse faire pour tous ceux qui agissent de manière désintéressée pour nos concitoyens. (Applaudissements)
M. François-Noël Buffet, ministre auprès du ministre d'État, ministre de l'intérieur. - Sur le calendrier du Beauvau de la sécurité civile, la démarche a été engagée en 2024. Elle a repris dès janvier 2025, des déplacements ont été réalisés. Nous sommes en train d'analyser toutes les contributions issues des concertations, très riches.
Dans le courant du mois de mars, nous aurons une nouvelle concertation avec les associations départementales et les parlementaires intéressés, dans un format plus réduit. Ensuite, nous préparerons un projet de loi, pour qu'il soit près avant l'été. (Mme Émilienne Poumirol s'en réjouit.) Sera-t-il présenté à cette date au Parlement ? Je ne le sais pas. Il sera sans doute prêt à être débattu courant septembre.
Toutes les associations agréées sont parfaitement prises en compte au sein de ces discussions. Il existera un volet pour le monde bénévole : c'est une part essentielle de la stratégie.
Mme Patricia Schillinger . - (Applaudissements sur les travées du groupe UC) Notre modèle de sécurité civile unique en Europe repose sur une complémentarité entre professionnels et bénévoles. Il nous protège lors de crises climatiques notamment.
Aux 200 000 sapeurs-pompiers volontaires s'ajoutent 200 000 bénévoles de sécurité civile qui font le choix de consacrer leur temps à la protection des autres.
La sécurité civile française est l'une des plus efficaces au monde, reposant sur un maillage territorial important. Mais le modèle est fragilisé. Il faut garantir la pérennité du volontariat. La jurisprudence Matzak, qui assimile les sapeurs-pompiers volontaires à des travailleurs, représente une menace pour tous les bénévoles de la sécurité civile. Si elle s'imposait, elle découragerait des vocations.
Notre assemblée s'est déjà prononcée : elle plaide pour une directive européenne spécifique pour éviter toute requalification par le droit du travail. Qu'en pense le Gouvernement ?
Ces associations jouent un rôle fondamental pour secourir les populations sinistrées, faire de la formation ou encadrer de grands événements. Il faut renforcer leur rôle complémentaire de celui des sapeurs-pompiers. Le Gouvernement veut-il améliorer leur coordination avec ces derniers ?
Comme eux, elles rencontrent des difficultés de recrutement, en raison des difficultés à lier vie professionnelle, familiale et bénévolat. La loi Matras et le projet de loi de finances rectificative pour 2023 ont permis une valorisation de l'engagement des sapeurs-pompiers en matière de retraite ou de formation. Le Gouvernement entend-il étendre ces mesures aux bénévoles ? Ne faudrait-il pas créer un véritable statut du bénévole de la sécurité civile ?
Enfin, il faut un financement stable et durable. Le système repose sur des dons et mécénats précaires.
Yannick Chenevard proposait un fonds de garantie pour assurer un financement pérenne, des incitations fiscales et l'exonération des locaux de taxe foncière. Le Gouvernement y est-il favorable ?
Le Beauvau de la sécurité civile, en concertation avec les acteurs concernés, a-t-il permis d'identifier des solutions concrètes ?
La sécurité civile est un pilier de notre résilience. Nous devons être à la hauteur. (Applaudissements)
M. François-Noël Buffet, ministre. - Effectivement, notre modèle de sécurité civile est l'un des plus performants en Europe, reposant sur une complémentarité entre sapeurs-pompiers et autres bénévoles. Mais le modèle est fragile : son financement doit être pérennisé et l'augmentation des risques climatiques influe sur ses missions. Ensuite, nous devons aussi renouveler les moyens, à l'image des Canadair.
Le Gouvernement soutiendrait-il une directive européenne spécifique ? Oui. Les choses sont claires.
Le statut fait partie des débats en cours dans le Beauvau de la sécurité civile.
Concernant l'attractivité de cette activité, la question est fondamentale. Notre système repose sur le volontariat et le bénévolat.
Mme Mireille Jouve . - (Applaudissements) Merci au groupe CRCE-K pour ce débat. Selon le code de la sécurité intérieure, la sécurité civile a pour objet la prévention des risques de toute nature, l'information et l'alerte de la population, auxquelles s'ajoute la protection des personnes, des animaux, des biens et de l'environnement contre les accidents, les sinistres et les catastrophes. Il faut donc des moyens appropriés, qui relèvent de l'État et des collectivités.
Professionnels et bénévoles coexistent : 250 000 sapeurs-pompiers volontaires, 13 000 pompiers militaires, 1 500 sauveteurs pilotes d'avions et d'hélicoptères coexistent avec 200 000 bénévoles qui ont effectué 4 millions d'heures de bénévolat en 2023. Ils sont un pilier incontournable.
Mais la fatigue se fait sentir, car la pression augmente : jeux Olympiques et Paralympiques (JOP), attentats, crise sanitaire, effets violents du dérèglement climatique, avec les feux de 2022 - je pense, dans les Bouches-du-Rhône, aux incendies de la Montagnette dans les Alpilles et des Pennes-Mirabeau.
Comment ne pas saluer la mobilisation des bénévoles lors des inondations dans le Nord ou des cyclones à Mayotte et à La Réunion ?
Cet essoufflement est le résultat d'une crise du sens, une crise du « à quoi bon ? » face au relâchement de certains comportements. Et puis les bénévoles nous disent combien il est difficile de concilier le bénévolat avec la vie professionnelle et la vie familiale. Le don de soi ne va plus de soi...
Nous devons donc fidéliser les bénévoles et mieux les reconnaître. La proposition de loi du député du Var Yannick Chenevard, adoptée en mars 2024, est bienvenue. Seule ombre : elle alignerait les bénévoles sur les sapeurs-pompiers alors qu'ils n'ont pas les mêmes obligations. Il ne faudrait pas que ces droits deviennent un cadeau empoisonné, après l'arrêt Matzak. (Applaudissements)
M. François-Noël Buffet, ministre. - La sécurité civile compte 100 000 bénévoles, dont 30 000 secouristes.
Madame Schillinger, la coordination des services est une préoccupation. Les réponses sont différentes selon les départements.
Certains départements fonctionnent très bien, comme la Haute-Savoie, qui gère un plateau de concentration des appels - cela coûte cher, mais fonctionne très bien. Dans d'autres départements, les choses vont moins bien. Nous devons harmoniser, mais chacun doit pouvoir disposer de moyens appropriés.
M. Olivier Bitz . - (Applaudissements) Ce débat nous permet de donner un coup de projecteur sur les 200 000 concitoyens engagés dans des associations de sécurité civile.
Les bénévoles de la sécurité civile ne sont pas les plus visibles, mais jouent un rôle essentiel, dans les missions d'assistance sur la voie publique. Ils permettent le bon déroulement des manifestations - ce fut le cas pendant les JOP. Ils participent aussi au sauvetage en mer et à la surveillance des plages et jouent un rôle fondamental en période de crise.
Les bénévoles répondent présent à chaque fois. Nous aurons encore besoin d'eux demain avec la multiplication des risques. Les difficultés du secteur sanitaire ne peuvent se reporter sur les sapeurs-pompiers et les associations agréées.
Le coût de l'intervention des bénévoles est sans commune mesure avec celui des autres forces de sécurité civile : s'appuyer sur leur compétence est donc dans l'intérêt de nos finances publiques.
Notre modèle économique fait appel au bénévolat, à la générosité du public et à la facturation de prestations. Ce modèle ne pourra rester pérenne. L'engagement financier de l'État et des collectivités est modeste financièrement - il faut bien le reconnaître.
Nous connaissons une crise de l'engagement : nous devons nous emparer de ce sujet afin de susciter et de pérenniser les vocations.
La loi Matras de 2021 a permis une première avancée, mais il faut aller plus loin. Monsieur le ministre, j'en profite pour vous interpeller sur la bonification des retraites des sapeurs-pompiers volontaires, adoptée par le Parlement : nous attendons toujours le décret d'application.
Je salue le travail du député Chenevard, présent dans notre tribune, dont la proposition de loi a été votée à l'unanimité à l'Assemblée nationale. Celle-ci va dans le bon sens, en reconnaissant l'engagement du bénévole et de son employeur. Il faut mieux valoriser le rôle de ce dernier : la création d'un label employeur partenaire des associations agréées y contribuerait.
Se pose également la question du droit à la formation ou de la bonification au titre de la retraite.
Faisons en sorte que le Sénat se saisisse de ce sujet en inscrivant à son ordre du jour la proposition de loi Chenevard, qui pourrait d'ailleurs être enrichie par les conclusions du Beauvau de la sécurité civile. (Applaudissements)
M. François-Noël Buffet, ministre. - Le budget global de la sécurité civile s'élève à 6,8 milliards d'euros ; la participation de l'État représente 831 millions d'euros.
Sur la retraite des sapeurs-pompiers, les travaux interministériels reprennent à l'occasion du débat national en cours sur les retraites. Le ministre de l'intérieur souhaite valoriser l'engagement dans le calcul de la retraite ; le sujet est complexe.
Nous nous inspirons des mesures de la proposition de loi Chenevard : libérer les bénévoles de leur activité professionnelle, créer un label employeur, travailler sur le compte personnel de formation. Nous pourrions les intégrer au dispositif issu du Beauvau de la sécurité civile.
M. Gérard Lahellec . - (Applaudissements) Je remercie notre collègue Jean-Pierre Corbisez, à l'initiative de ce débat.
Je salue les 250 000 bénévoles participant à la sécurité civile, qu'ils soient bénévoles, professionnels, militaires.
Je relève toutefois une contradiction : faire de la sécurité une priorité et diminuer les crédits de l'État alloués à la sécurité civile. Résultat : les associations sont encore plus sollicitées.
Les événements extrêmes que nous avons connus accentuent nos besoins en sécurité civile. S'y ajoute la politique de régulation des urgences dans nos hôpitaux. Tout cela déstabilise l'ensemble de la chaîne de la sécurité civile.
Les associations sont fragilisées. C'est pourquoi je salue l'adoption de la proposition de loi Chenevard à l'Assemblée nationale. Il faut discuter des modalités d'un tel renforcement législatif. Il ne s'agit pas de donner un blanc-seing : si cette proposition de loi est inscrite à l'ordre du jour du Sénat - je le souhaite -, nous devrons prendre garde à soutenir correctement ces associations et ces bénévoles.
Le financement actuel du bénévolat est fragile. Nous ne répondrons pas à ce défi uniquement avec des allègements d'impôts. Non, la solidarité nationale doit jouer son rôle. Nous regrettons qu'un fonds de garantie des associations de la sécurité civile ait été supprimé par l'Assemblée nationale. Par exemple, une contribution assise sur les contrats d'assurance habitation pourrait financer ces associations.
La sécurité de tous ne peut reposer sur le choix personnel d'individus de faire un don. Le financement du bénévolat doit être géré avec sérieux. Cela vaut aussi pour les enjeux humains ; les associations de sécurité civile peinent à recruter.
Je suis très réservé sur la mise à disposition de congés pour les bénévoles de sécurité civile : à première vue, cela peut sembler généreux, mais cela peut aussi avoir des effets sur l'engagement des personnes elles-mêmes. Faire reposer le bénévolat sur la solidarité individuelle pourrait les culpabiliser.
Il est urgent d'agir en faveur du bénévolat de la sécurité civile, mais agissons bien. Cette proposition de loi pourrait nous en donner l'occasion ; je souhaite que nous en débattions rapidement. (Applaudissements)
M. François-Noël Buffet, ministre. - Vous ouvrez un débat sur le financement du dispositif, dont on sait qu'il est fragile.
Comment faire aussi bien avec moins de moyens ? Il faut mutualiser et gagner en efficacité financière sur certains postes. Les pistes existent ; il convient de les évaluer afin de ne pas diminuer la qualité du service rendu.
Des pistes existent aussi pour augmenter les ressources ; vous avez ainsi évoqué une contribution assise sur les assurances. Ne l'évacuons pas d'un revers de main et prenons le temps d'expertiser cette proposition.
Un point essentiel à ne pas perdre de vue : ne faisons pas de nos bénévoles des professionnels. Ce serait contraire à leur engagement citoyen. Cela dit, nous pouvons réfléchir à quelques avancées pour ces personnes qui s'engagent.
Les associations peuvent facturer les heures de formation qu'elles dispensent. Le panel de ressources est large, mettons-y un peu d'ordre.
M. Grégory Blanc . - (Applaudissements sur les travées du GEST, du groupe SER et du RDSE) Je remercie le groupe CRCE-K pour ce débat. Il faut intégrer les dispositions de la proposition de loi Chenevard dans le Beauvau de la sécurité civile.
Le 8 mai 2024, Parnay, paisible commune rurale de Maine-et-Loire, voit 10 000 ravers débarquer pour une rave party sauvage. Face à un territoire dépassé, la préfecture s'organise et réquisitionne en urgence les associations agréées de sécurité civile. Le bilan est lourd : un décès, quatre gendarmes blessés. Le reste à charge s'élève à plus de 25 000 euros pour l'association, qui attend toujours des remboursements. (On renchérit sur les travées du groupe CRCE-K.) Ensuite, ces associations n'arrivent plus à assurer leur équilibre financier pour mener à bien leurs missions.
Je distingue trois axes.
Premier axe : en matière de formation, il faut réfléchir à un grand plan visant à augmenter la formation des Français aux gestes de premier secours ; seuls 40 % des Français sont qualifiés, contre 80 % des Allemands.
Deuxième axe : l'activité de secourisme doit être facturée aux organisateurs de grands événements. Il faut mieux accompagner les associations, qui ne disposent pas toujours des compétences nécessaires pour établir une facturation au plus juste.
Troisième axe : les indemnisations ne sont pas à la hauteur des mobilisations en urgence. L'État doit compenser le coût de ces interventions via un fonds créé à cet effet.
Selon la Fédération nationale de protection civile (FNPC), les recettes moyennes d'une association s'élèvent à 150 000 euros, avec un excédent disponible moyen de 15 000 euros. Ces chiffres sont valables seulement lorsque les formations sont au rendez-vous, mais ce n'était pas le cas durant les années covid. Résultat : le déficit de ces années pas si lointaines n'est toujours pas apuré.
Les opérations d'urgence, avec le dérèglement climatique, se multiplieront. Il nous faut nous préparer à un monde qui dépassera très vite les 2 degrés, avec un horizon à plus 4 degrés. Des réformes structurelles s'imposent : une meilleure coordination, un meilleur financement.
Dans la loi de finances pour 2025, le budget de la police de l'immigration progresse, tandis que celui de la sécurité civile baisse. Nous considérons pour notre part que la priorité devrait aller au secours des victimes avant la chasse aux étrangers.
Si nous voulons encourager les bénévoles et leur démontrer notre reconnaissance, permettons-leur d'évoluer dans un cadre pérenne. (Applaudissements sur les travées du GEST, ainsi que sur les travées des groupes CRCE-K, SER et du RDSE)
M. François-Noël Buffet, ministre. - Oui, des réformes structurelles sont nécessaires.
La sécurité civile a bénéficié d'investissements importants dans le cadre du pacte capacitaire : cela a rendu des moyens aux Sdis et a permis l'achat de 8 Dash. Cette année, le PLF marque un rééquilibrage des crédits en faveur de la police, qui avait besoin de matériel. Mais nous n'oublions pas la sécurité civile : notre flotte de Canadair devra être renouvelée d'ici à 2030 ou 2031.
L'axe 5 du Beauvau de la sécurité civile prévoit une formation aux premiers secours dès l'école primaire. Il faut poursuivre les efforts à l'âge adulte, notamment grâce à une application « Tous préparés, mieux protégés ». C'est en sensibilisant les jeunes que nous avons le plus de chances d'atteindre l'objectif de 80 % de la population formée, comme en Allemagne.
M. Grégory Blanc. - Merci pour votre réponse. Il est vrai que les moyens des pompiers ont augmenté grâce au pacte capacitaire. Mais nous avons besoin d'un pacte capacitaire pour prévenir les inondations : il y a urgence.
M. Hussein Bourgi . - (Applaudissements sur les travées du groupe SER, du GEST, du RDSE et du groupe UC) Je salue nos collègues qui ont inscrit ce débat à l'ordre du jour. Notre modèle de sécurité civile est singulier, avec 212 000 sapeurs-pompiers volontaires et 43 000 sapeurs-pompiers professionnels.
Ce débat nous permet de saluer ces femmes et ces hommes qui s'engagent pour sauver des vies, combattre les incendies et lutter contre les inondations.
Je saisis l'occasion pour saluer également les 200 000 bénévoles engagés dans les associations. Ces personnes forcent l'admiration pour leur dévouement. Elles sont des relais, des sentinelles, des gardiens et des acteurs de la sécurité civile : nous leur devons des compliments et des éloges.
L'enjeu de la formation est essentiel. Comment faire pour passer de 70 000 à 100 000 les bénévoles concernés ? Se former, c'est être en mesure d'accomplir les bons gestes en intervention tout en se protégeant soi-même. Se former, c'est monter en compétence et bénéficier d'une meilleure reconnaissance tant des acteurs institutionnels que des employeurs.
Je salue Yannick Chenevard, présent ce soir. Sa proposition de loi a été transmise au Sénat le 27 mars dernier. Quand le Gouvernement envisage-t-il d'inscrire ce texte à l'ordre du jour du Sénat ?
Tout en préservant la distinction entre les bénévoles de sécurité civile et les sapeurs-pompiers volontaires, il convient de faire partager aux uns et aux autres une culture commune.
Notre sécurité civile doit faire face à de nombreux défis.
Premièrement, la directive européenne sur le temps de travail, véritable épée de Damoclès, troublant la sérénité des soldats du feu. Quelle indication pouvez-vous nous donner en la matière ?
Deuxièmement, le renouvellement et la massification de nos forces de sécurité civiles, face au vieillissement de la population et au changement climatique.
Comment assurer un maillage territorial serré ? Alors que le maillage territorial Sdis avait été sanctuarisé, 2 000 centres de secours ont disparu en dix ans, d'où une dégradation de la couverture opérationnelle.
Troisièmement, la disponibilité des sapeurs-pompiers.
Quatrièmement, la montée des agressions contre les forces de sécurité civile. Il faut des équipements de protection individuelle pour chacun.
Pour conclure, je souhaite témoigner ma considération à ces hommes et à ces femmes, quelle que soit la couleur de leur uniforme.
M. François-Noël Buffet, ministre. - Les discussions sont en cours sur la directive européenne relative au temps de travail. Nous essayons de faire prévaloir l'idée que des bénévoles n'ont pas à être soumis aux mêmes règles qu'un salarié, dans la mesure où ils agissent dans le cadre d'un engagement citoyen. Nous avons bon espoir d'être entendus.
Sur la formation, nous réfléchissons, dans le cadre du Beauvau, à la création d'une Académie de sécurité civile, en renforçant le rôle de l'École nationale supérieure des officiers sapeurs-pompiers (Ensosp).
M. Joshua Hochart . - Merci pour ce débat sur un sujet qui me tient particulièrement à coeur.
Nos sapeurs-pompiers sont le pilier incontournable de la sécurité civile. À cet égard, je vous alerte sur la situation difficile au sein du Sdis 59, qui reste sourd aux souhaits des élus de tous bords, obligeant l'agglomération de la porte du Hainaut à suspendre un financement de 8 millions d'euros.
Mais on oublie trop souvent les 200 000 bénévoles de la sécurité civile. Bénévole moi-même depuis mes 16 ans, je sais que nous leur devons beaucoup. Emmanuel Macron lui-même leur a rendu hommage, parlant du visage d'une France solidaire, généreuse et qui n'a pas peur. Ce soir même, certains contribuent à la sécurisation du match PSG-Liverpool. C'est en partie grâce à eux que les JOP se sont bien passés. Je me souviens aussi du rôle qu'ils ont joué lors des récentes inondations dans le Nord.
Quid de l'harmonisation des agréments ? Les disparités entre départements sont trop fortes. Et quelle reconnaissance de l'engagement ? La proposition de loi de M. Chenevard, que j'ai connu autrefois comme bénévole, propose des réponses en matière de formation et de retraite. Comment améliorer l'attractivité des associations de sécurité civile ? Envisagez-vous de faciliter leur participation aux opérations de secours du quotidien, comme c'est déjà le cas, notamment, en région parisienne ?
Quant à la formation aux premiers secours à l'école primaire, elle existe déjà : c'est le programme « Apprendre à porter secours », hélas peu appliqué. Une proposition de loi avait été déposée pour l'inclure dans la formation au permis de conduire : qu'en pense le Gouvernement ?
Enfin, des reconnaissances mutuelles des formations dispensées par les différentes structures sont-elles à l'étude ?
Monsieur le ministre, serez-vous, concrètement, aux côtés de ces bénévoles qui donnent beaucoup de leur temps libre ?
M. François-Noël Buffet, ministre. - Une harmonisation en matière d'agréments est nécessaire.
Pour l'intervention des associations agréées en matière de secours aux personnes, elle est possible depuis 2021. Mais les pratiques varient beaucoup selon les départements. Là aussi, nous travaillons à une harmonisation.
Notre dispositif de sécurité civile est remarqué à l'étranger, singulièrement en Europe. On vient de nombreux autres pays se former à l'Ensosp. Si nous voulons conserver ce leadership, nous devons créer des structures pérennes et uniformiser l'action menée.
Mme Marie-Claude Lermytte . - Hommage, respect et gratitude aux 250 000 bénévoles de la sécurité civile, qui font preuve d'un engagement sans faille au service des populations. Nous savons pouvoir compter sur eux au quotidien pour protéger, soigner, réconforter. Lors de la crise de la covid, ils ont organisé les dépistages et les vaccinations. Ils ont aidé les départements du Nord et du Pas-de-Calais lors des inondations de 2023. Ils étaient présents, l'été dernier, sur la majorité des sites des JOP. Notre nation leur doit beaucoup.
Nous devons mieux reconnaître l'engagement de tous les acteurs de la communauté du secours, dont le tissu est dense. Je pense à la Croix-Rouge, à la FNPC, à la SNSM et à d'autres encore. La loi Matras a déjà amélioré la reconnaissance de leur engagement et fait évoluer leurs missions, mais il faut aller plus loin.
Merci à M. Corbisez d'avoir suscité ce débat et au député Chenevard pour la proposition de loi qu'il a déposée. Nous devons encourager l'engagement et mieux reconnaître le rôle de chacun. Envisagez-vous d'accorder à tous les bénévoles de la sécurité civile la possibilité d'acquérir des droits en euros sur leur compte personnel de formation (CPF) ? Comptez-vous améliorer leur retraite par l'attribution de trimestres complémentaires, une mesure qu'il est urgent d'appliquer pour les sapeurs-pompiers volontaires ?
M. François-Noël Buffet, ministre. - L'abondement du CPF est une piste très sérieuse. Il fait partie des petites compensations qui peuvent accompagner l'engagement bénévole.
Les risques changent, les missions doivent changer aussi. Les pompiers n'interviennent que dans 6 % des cas pour éteindre des incendies. Ils interviennent beaucoup pour le secours aux personnes, mais, parfois, il ne s'agit que de transport. Il faut optimiser la coordination des interventions. En la matière, je mise beaucoup sur les plateformes de gestion des appels, qui me semblent des outils efficaces.
Mme Françoise Dumont . - Cette initiative du groupe CRCE-K est fort opportune. Nous devons protéger le bénévolat, un pilier essentiel du modèle français de sécurité civile. L'abnégation, le courage et le sens du service de nos bénévoles sont dignes d'éloges.
Les 250 000 bénévoles des associations agréées constituent un maillon souvent méconnu, bien qu'essentiel, de la chaîne de sécurité civile. Alliant bénévolat et spécialisation, ces associations diffusent la culture du risque dans la société et renforcent sa résilience.
L'amélioration de leur reconnaissance est défendue depuis longtemps par la Fédération nationale des sapeurs-pompiers de France dans le cadre d'une approche ouverte aux citoyens sauveteurs, collaborateurs occasionnels du service public. La Fédération appelle aussi à mieux valoriser les anciens sapeurs-pompiers en les incitant à rejoindre les réserves citoyennes des Sdis et à systématiser les réserves communales de sécurité civile.
Améliorer la reconnaissance des associations agréées est au coeur de la proposition de loi de mon collègue varois, le député Yannick Chenevard, adoptée par l'Assemblée nationale le 27 mars dernier, et que la Haute Assemblée s'honorerait à inscrire rapidement à son ordre du jour. Elle prévoit notamment de faciliter les absences professionnelles, d'instaurer un label à destination des employeurs et de mieux valoriser l'engagement bénévole.
J'ai travaillé dans le même sens comme animatrice du groupe de travail interne au groupe Les Républicains du Sénat sur la sécurité civile. Nous avons notamment préconisé de renforcer les efforts de reconnaissance honorifique et symbolique des sapeurs-pompiers comme des bénévoles, d'améliorer la visibilité des formations au premier secours, de renforcer la formation des élèves du secondaire et de mieux sensibiliser les décideurs publics au rôle des associations. (Applaudissements)
M. François-Noël Buffet, ministre. - Je constate une présence puissante du Var...
Mme Françoise Dumont. - Absolument !
M. François-Noël Buffet, ministre. - Vous avez commis un rapport en mai 2024, dont vous présenterez les conclusions dans le cadre du Beauvau. Au-delà du matériel, les distinctions symboliques sont essentielles : cela participe de ce qui fait nation. Nous connaissons tous l'importance dans nos villes ou nos villages des sapeurs-pompiers et de tous les acteurs de la société civile. S'agissant de la formation au premier secours, je le répète : plus tôt elle démarrera, mieux ce sera.
Mme Anne-Sophie Patru . - Je ne puis commencer cette intervention sans saluer les 250 000 bénévoles de la sécurité civile. Qu'ils oeuvrent au sein de la Croix-Rouge, de la Protection civile ou de la SNSM, ils jouent un rôle indispensable. Je l'ai constaté lors des récentes inondations en Ille-et-Vilaine et tout dernièrement lors de la mise en place de centres de vaccination contre la méningite à Rennes.
Entre autres initiatives, la proposition de loi du député Chenevard, présent dans nos tribunes, vise à renouveler et mieux valoriser le volontariat. Mais le mieux est souvent l'ennemi du bien. Prenons garde à ne pas mettre en concurrence les différentes formes d'engagement. (M. François-Noël Buffet approuve.) L'extension aux bénévoles des droits dont bénéficient les sapeurs-pompiers volontaires depuis la loi Matras ne doit pas créer cette concurrence, dont tout notre modèle pâtirait. Il y a en la matière une alchimie à préserver.
Il est essentiel de faciliter l'engagement au quotidien, en agissant d'abord dans le milieu professionnel. C'est le cas pour les sapeurs-pompiers, mais aussi les élus. Nous pourrions notamment créer une charte de déontologie, un label « employeur partenaire » et faciliter les absences.
L'octroi de trimestres de retraite supplémentaires est certainement aussi un levier à envisager, toujours dans le respect de l'alchimie délicate sur laquelle repose notre modèle.
Comme souvent, il faut simplifier, simplifier encore, et toujours simplifier. Le récent décret qui simplifie les modalités d'habilitation, allège l'instruction des demandes par les préfectures et rend plus lisible la réglementation des acteurs du secourisme va dans le bon sens.
Veillons à l'équilibre entre acteurs et valorisons chacun comme il se doit pour permettre une action efficace sur tout le territoire, au quotidien comme en temps de crise. (Applaudissements)
M. François-Noël Buffet, ministre. - À Rennes, lors des inondations, nous avons en effet constaté que le nombre de bénévoles présents a facilité la gestion de la situation.
Nous sommes très favorables à la création d'un label employeur.
Enfin, je vous rejoins sans réserve lorsque vous dites : pas de concurrence entre acteurs. L'enjeu du continuum de la sécurité civile, c'est la complémentarité des interventions.
Mme Émilienne Poumirol . - Les hommes et les femmes dont nous parlons ce soir incarnent au quotidien les valeurs de civisme, de solidarité et d'altruisme. Nous devons mieux reconnaître leur engagement.
Notre système hybride est reconnu. Les 200 000 sapeurs-pompiers volontaires représentent 78 % des effectifs des sapeurs-pompiers et assurent 75 % des opérations de secours. C'est le premier service d'urgence de notre pays.
Les 200 000 bénévoles de la sécurité civile jouent un rôle complémentaire, également essentiel.
Mais ce système connaît des tensions, du fait notamment d'une activité opérationnelle en hausse de 30 % en vingt ans, sous l'effet du délitement de nos services publics. La Cour des comptes l'a constaté en 2019 : les sapeurs-pompiers compensent la désertification médicale dans les territoires ruraux. Par ailleurs, le dérèglement climatique fait que les événements climatiques augmentent, tandis que les effectifs stagnent.
La loi Matras a permis un certain nombre de progrès, mais des chantiers restent à mener. La jurisprudence Matzak est source de risques, car elle assimile les bénévoles à des travailleurs. J'avais déjà interpellé Mme Schiappa sur le sujet. La France doit non seulement soutenir une nouvelle directive, mais en être à l'initiative, car son modèle est en jeu.
Sur le décret d'application pour les trimestres supplémentaires des sapeurs-pompiers volontaires, une mesure très attendue, le gouvernement Borne voulait vider le dispositif de sa substance en le réservant à ceux qui n'avaient pas d'activité professionnelle. Ce détricotage a entraîné une vive réaction des sapeurs-pompiers. Le décret devait paraître fin 2023, mais on attend toujours... Quand sera-t-il publié ? (Applaudissements)
M. François-Noël Buffet, ministre. - Le décret est lié au débat national sur les retraites. Si un accord intervient à l'issue du « conclave », il sera pris rapidement. C'est un peu comme le refroidissement du fût du canon... (Mme Poumirol s'amuse.) Au mieux, ce sera avant l'été, sinon, ce sera au début de l'automne.
Nous devons être proactifs sur la directive européenne.
Les missions de nos sapeurs-pompiers changent profondément : 6 % de lutte contre les incendies seulement pour 86 % d'aide à la personne. Il faut retrouver un équilibre et plus d'efficacité.
Mme Marie-Claire Carrère-Gée . - Il est des vies consacrées à des causes plus grandes que soi ; l'engagement des 250 000 bénévoles de la sécurité civile, ces femmes et hommes qui répondent présents quand l'urgence l'impose, en est une illustration incontestable. Inondations, incendies, crises sanitaires, ils sont toujours là.
Ils sont là aussi lors des épreuves de la vie ; j'ai participé à des maraudes assistant des personnes à la rue : j'ai vu leur expertise pour la prise en charge des blessures physiques et psychiques des plus fragiles.
Chido puis Garance nous interpellent sur le manque de culture du risque dans nos populations. Je parle de vulnérabilité géographique, sociale et culturelle. Il faut faire confiance à l'expertise de terrain des bénévoles, qui leur fait vivre la solidarité en action.
La proposition de loi de Yannick Chenevard, que je salue, marque des avancées décisives en matière de reconnaissance des bénévoles et de leurs employeurs, avancées qui ne relèvent pas du privilège, mais de la justice.
Nous devrons revenir aux dispositions non adoptées à l'Assemblée nationale, améliorant notamment le modèle économique des associations de sécurité civile. Le Beauvau de la sécurité civile doit s'en saisir, de même qu'il devra prévoir des progrès en matière d'implication citoyenne.
La loi du 13 août 2004, voulue avec Jacques Chirac, affirmait un principe essentiel : la sécurité civile est l'affaire de tous. Vingt ans après, nous n'y sommes pas du tout. Les rares outils technologiques mis en place sont destinés uniquement à l'information de la population. Chaque citoyen peut être un acteur et sauver des vies à proximité. De même que l'application Staying alive permet d'être alerté qu'une personne en arrêt cardiaque à proximité a besoin d'aide, pourquoi ne disposerions-nous pas sur nos smartphones d'une application pour nous former et nous guider en cas de catastrophe naturelle ?
Faisons de chaque citoyen un acteur de la sécurité civile. Loin de la désorganiser, nous en multiplierons ainsi la puissance. Mettons en place une application pour sauver des vies ! (MM. Jean-Pierre Corbisez et Christian Bilhac applaudissent.)
M. François-Noël Buffet, ministre. - La formation la plus large de nos concitoyens est un sujet considérable. Il doit faire partie des réflexions du Beauvau. Il faut former les collégiens, mais la majorité des adultes ne sait pas comment réagir. Je pense au risque technologique : dans la vallée du Rhône d'où je viens, je suis certain que la majorité de la population ne saurait pas quoi faire.
Une application pratique visant à indiquer les premiers comportements à avoir en cas de pollution ou de risque climatique pourrait être utile. Toutes les contributions sont les bienvenues.
Nous avons conscience que ce Beauvau de la sécurité civile se tient à un moment stratégique. L'appropriation par le grand public des gestes de premier secours est fondamentale ; nous devons l'aborder, sans quoi nous raterons notre objectif.
Mme Sabine Drexler . - Le contexte impose de mieux reconnaître le bénévolat. La pression opérationnelle va s'accentuer et les besoins de secours à la personne seront croissants avec le vieillissement de la population.
J'espère que la proposition de loi adoptée à l'Assemblée nationale sera bientôt étudiée, à moins que le Gouvernement dépose un projet de loi.
La proposition de loi Chenevard est très complète. De ce que je connais du Haut-Rhin, où le tissu associatif est dynamique, la reconnaissance est essentielle pour motiver et éviter l'épuisement.
Formation, bonification de la retraite, indemnités peuvent être utiles, mais aussi la reconnaissance honorifique.
Comme nos forces de l'ordre, les bénévoles pourraient recevoir une décoration. Depuis 2012, votre ministère remet la médaille de la sécurité intérieure, trop peu connue et qui mériterait d'être démocratisée. Sur les 2 400 récipiendaires de la promotion du 1er janvier 2024, seuls trois portaient les agrafes « Sécurité civile » ou « Engagement citoyen ». Au regard des dizaines de milliers de bénévoles, c'est insignifiant.
Dans mon département, le président de la section de la Croix-Rouge des Trois Frontières est un bénévole actif depuis quarante-sept ans... C'est presque autant qu'une vie de travail. Un tel engagement ne mériterait-il pas d'être publiquement reconnu ?
Paulo Coelho écrit que les choses simples sont les plus extraordinaires. Nous avons un moyen simple pour reconnaître cet engagement. Seriez-vous prêts à inciter les préfets à proposer des dossiers de bénévoles de la sécurité civile pour bénéficier de ces décorations ? (Applaudissements)
M. François-Noël Buffet, ministre auprès du ministre d'État, ministre de l'intérieur . - Madame Drexler, nous avons déjà fait cette démarche auprès des préfets. Ils doivent nous faire remonter l'information.
Je remercie le sénateur Corbisez d'avoir suscité ce débat. L'Assemblée nationale a adopté la proposition de loi Chenevard ; les initiatives se croiseront peut-être pour aboutir à un beau texte - j'entends par là un texte instaurant des solutions pragmatiques dans la durée.
La question fondamentale reste celle des moyens : tout promettre serait une folie, ne rien faire en serait une autre. Trouvons un chemin entre les deux.
Dans quelques semaines, nous ferons des propositions. C'est un enjeu pour la nation et nos compatriotes. Il faut apporter des réponses adaptées aux territoires. Le défi majeur est celui des sapeurs-pompiers : les départements doivent pouvoir tenir dans la durée. Cet équilibre est aussi fragile que fondamental. Nous travaillons avec beaucoup de minutie. Tels des horlogers suisses, nous devrons faire en sorte que ce modèle dure.
Il y a quelques semaines, lors d'une réunion européenne, j'ai mesuré à quel point nos partenaires européens considéraient la sécurité civile française comme un modèle à suivre.
C'est une fierté nationale, pour nous mais aussi pour les professionnels et les bénévoles qui interviennent. C'est pourquoi nous devons réussir cette réforme. Merci pour cette soirée de débat : nous nous reverrons lors de l'examen du projet de loi, lorsque celui-ci aura été déposé.
M. Jean-Pierre Corbisez, pour le groupe CRCE-K . - Il y a dix ans, la sécurité civile du Pas-de-Calais avait un bel hélicoptère rouge et jaune - un Dragon - mais une ancienne députée de Guyane, devenue ministre, l'a pour ainsi dire détourné !
C'est désormais un vieux Dauphin de la Marine nationale, aux sièges défoncés et sans caméra thermique, qui intervient pour sauver les migrants en mer, mais il serait envisagé d'y affecter un Guépard d'ici à 2028 - les promesses n'engagent que ceux qui y croient...
Vous parlez d'investissement, de Canadair canadiens... Pourrait-on glisser dans les commandes un hélicoptère Eurocopter pour le Pas-de-Calais ?
Les bénévoles de la sécurité civile jouent un rôle essentiel d'assistance auprès de la population en situation de crise. L'actualité récente en fournit des exemples ; nous l'avons vu dans le Pas-de-Calais.
Nous avons exploré ce soir différentes facettes de la reconnaissance de la sécurité civile. Certains prétendent qu'une reconnaissance trop institutionnelle pourrait altérer le désintéressement. Je n'y crois pas !
Encourageons une meilleure prise en compte des compétences acquises. Il ne s'agit pas de remettre en question le caractère altruiste des bénévoles, mais de reconnaître leur rôle clé et de faire en sorte qu'ils disposent des moyens nécessaires. Les mesures évoquées ce soir, par exemple pour la retraite, sont des mesures de reconnaissance légitimes. Même chose pour les distinctions honorifiques. J'ai demandé au préfet du Pas-de-Calais d'honorer des bénévoles - si vous êtes disponible, monsieur le ministre, je vous accueillerai à Arras.
Il est indispensable d'encourager la participation de la population à la sécurité civile.
Monsieur le ministre, nous attendons rapidement votre texte. Nous connaissons votre pugnacité sénatoriale ; aussi sommes-nous impatients de vous retrouver pour en débattre ! (Applaudissements)
Prochaine séance demain, jeudi 6 mars 2025, à 10 h 30.
La séance est levée à 23 h 40.
Pour le Directeur des Comptes rendus du Sénat,
Rosalie Delpech
Chef de publication
Ordre du jour du jeudi 6 mars 2025
Séance publique
De 10 h 30 à 13 heures et de 14 h 30 à 16 heures, à l'issue de l'espace réservé au groupe UC et au plus tard de 16 heures à 20 heures
Présidence : Mme Sylvie Robert, vice-présidente, M. Pierre Ouzoulias, vice-président
Secrétaires : Mme Marie-Pierre Richer, M. Guy Benarroche
1. Proposition de loi visant à protéger l'école de la République et les personnels qui y travaillent, présentée par M. Laurent Lafon et plusieurs de ses collègues (texte de la commission, n°366, 2024-2025)
2. Proposition de loi visant à renforcer la prévention et la lutte contre le risque incendie lié aux batteries au lithium et aux cartouches de protoxyde d'azote dans les installations de collecte, de tri et de recyclage, présentée par MM. Jean-François Longeot, Cyril Pellevat et plusieurs de leurs collègues (procédure accélérée) (texte de la commission, n°368, 2024-2025)
3. Proposition de loi visant à soutenir les collectivités territoriales dans la prévention et la gestion des inondations, présentée par MM. Jean?Yves Roux, Jean-François Rapin et plusieurs de leurs collègues (procédure accélérée) (texte de la commission, n°362, 2024-2025)
4. Proposition de loi visant à renforcer la lutte contre les usages détournés du protoxyde d'azote, présentée par M. Ahmed Laouedj et plusieurs de ses collègues (texte de la commission, n°360, 2024-2025)