Questions d'actualité (Suite)
Taux de mercure dans le thon en conserve
Mme Élisabeth Doineau . - (Applaudissements sur des travées du groupe UC) Consommatrices et consommateurs, nous sommes inquiets des résultats de l'enquête sur la présence de mercure dans le thon. Chacun d'entre nous en consomme, en moyenne, 4,9 kg par an. Qui n'a jamais ouvert une boîte de thon ?
L'ONG Bloom en a ouvert 148 boîtes, dans cinq pays différents : toutes contiennent du méthylmercure et 10 % présentent une teneur supérieure au seuil limite.
Or le méthylmercure est très toxique : cancérigène, il peut aussi altérer les reins et entraîner des conséquences cardiovasculaires. Selon l'OMS, le mercure consommé par les femmes enceintes a des effets préjudiciables sur le cerveau en développement du foetus.
Nous devons protéger les consommateurs.
M. le président. - Il faut conclure.
Mme Élisabeth Doineau. - Comment le Gouvernement compte-t-il agir ? (Applaudissements sur les travées du groupe UC ainsi que sur de nombreuses travées du GEST et du groupe INDEP)
Mme Laurence Garnier, secrétaire d'État chargée de la consommation . - Vous vous faites l'écho des préoccupations des consommateurs français après la parution de l'enquête de Bloom et de Foodwatch. Ma collègue Annie Genevard a pris cette question à bras-le-corps dès la parution des résultats.
Deux questions, en réalité, se posent. La première, sur les contrôles sanitaires. Les services du ministère de l'agriculture s'assurent du respect des plans de maîtrise sanitaire et de la mise en oeuvre des mesures de correction éventuellement nécessaires.
La question se pose ensuite de la réglementation. Pour chaque espèce de poisson, les teneurs maximales en mercure sont fixées au niveau européen, sur la base de données scientifiques et pour assurer la sécurité des consommateurs.
Lorsque les deux ONG nous auront remis leurs résultats, nous examinerons ce qu'il y a lieu de faire sur ces deux plans.
Simplification et réduction du nombre des agences de l'État
Mme Pauline Martin . - (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains) Quel bonheur de prendre la parole en ayant quasiment l'assurance de faire l'unanimité...
Ademe, Anact, Anah, ANCT, Anru, ANSP, Anses, agences de l'eau, Afpa, ARS, EPFI et autres comités Théodule - il y en aurait jusqu'à 1 200 - emploient plus de 450 000 personnes et ont coûté 80 milliards d'euros en 2023, contre 50 en 2012, tout en excellant dans l'engraissement des cabinets d'études. (Applaudissements à droite ; Mme Kristina Pluchet renchérit.) Ce constat vaut aussi pour les collectivités, friandes de Gips, Sem et autres agences de développement.
Réfléchir aux agences, c'est réfléchir à l'État, d'après le rapport annuel du Conseil d'État pour 2012. Douze ans plus tard, réfléchir ne suffit plus.
Au moins cinq agences sont chargées de l'agriculture et de l'alimentation. De même pour la biodiversité et l'environnement. Des entités différentes opèrent souvent indépendamment sur les mêmes sujets. Si vous êtes perdus dans les acronymes, vous reconnaîtrez le Cerema à son cahier des charges coûteux et inapplicable. (On renchérit à droite ; protestations sur les travées du GEST)
Mais nous entrevoyons une lueur d'espoir avec le ministère de la simplification et de la transformation de l'action publique. Un état des lieux est urgent, pour rationaliser cette débauche de bonnes volontés à l'aune de la sobriété budgétaire.
Nous avons entendu les engagements du Premier ministre et les vôtres, monsieur le ministre. Comment comptez-vous faire bouger les lignes ? (Vifs applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains et sur des travées du groupe UC ; murmures désapprobateurs sur de nombreuses travées à gauche)
M. Guillaume Kasbarian, ministre de la fonction publique, de la simplification et de la transformation de l'action publique . - Il y a quelques jours, vous avez largement adopté le projet de loi de simplification de la vie économique, qui a vocation à prospérer à l'Assemblée nationale. Il contient une accroche qui permettra d'aller plus loin dans la suppression des comités dits parfois Théodule.
M. Didier Marie. - L'Ademe n'est pas un comité Théodule !
M. Guillaume Kasbarian, ministre. - Vous pouvez compter sur moi pour avancer le plus possible dans la rationalisation de ces structures, mais aussi, sur la base d'un travail de fond, des agences.
M. Hussein Bourgi. - McKinsey les remplacera !
M. Guillaume Kasbarian, ministre. - Notre objectif est de réduire de 10 % le nombre d'opérateurs en quatre ans.
La loi Asap, dont j'ai été le rapporteur à l'Assemblée nationale, prévoyait déjà certaines mesures, comme la fusion du Conseil supérieur de l'égalité professionnelle et du Haut Conseil à l'égalité ou la suppression du Conseil supérieur de la mutualité, de la Commission chargée d'apprécier l'aptitude à exercer les fonctions d'inspecteur général ou encore de l'Observatoire des récidives.
Mme Audrey Linkenheld. - Tout ça ne fait pas une politique publique...
M. Guillaume Kasbarian, ministre. - Vous pouvez compter sur moi et tous mes collègues pour avancer dans cette direction, dans le projet de loi de simplification mais aussi par voie réglementaire. Il s'agit de donner de la clarté à l'action publique et de simplifier la vie des Français. (Applaudissements sur les travées du groupe INDEP et sur quelques travées des groupes UC et Les Républicains)
Mercosur (II)
M. Serge Mérillou . - (Applaudissements sur les travées du groupe SER) L'accord entre l'Union européenne et le Mercosur, qui pourrait être entériné dès novembre, ce sont des milliers de tonnes de viande bovine, de volaille, de maïs, de sucre, produits avec des produits phytosanitaires interdits chez nous, par la déforestation, le dumping social et le non-respect de nos critères qualité.
Ce traité, qui soulève une opposition quasi-unanime depuis 1999, menace notre économie agricole déjà fragile, notre souveraineté alimentaire, nos principes environnementaux. Sans réciprocité, sans clauses miroir, les conséquences seraient désastreuses.
Nos agriculteurs ne peuvent payer le prix de l'affaiblissement du Président de la République sur la scène internationale. Le fonds d'indemnisation annoncé n'est qu'un cache-misère.
La France ne peut accepter les manigances de la Commission européenne, qui tente de scinder l'accord pour en faciliter l'adoption. Quelles mesures allez-vous prendre pour faire entendre la voix de la France ? Le Gouvernement usera-t-il de son droit de veto ? Comptez-vous lancer le débat au Parlement, et dans quel délai ? (Applaudissements sur les travées des groupes SER et CRCE-K)
Mme Sophie Primas, ministre déléguée chargée du commerce extérieur et des Français de l'étranger . - Ce sujet préoccupe sur tous les bancs. Nous sommes déterminés à ne pas accepter l'accord dans les conditions actuelles, car il ne respecte pas l'accord de Paris. Le règlement européen sur la déforestation sera applicable fin 2025 - ce serait un comble qu'il ne s'applique pas à cet accord.
Nous voulons un accord en phase avec la politique européenne de développement durable et du commerce ; nous voulons que soient respectées la parole et la compétence des États, donc que l'accord ne soit pas scindé.
Nous avons besoin de l'expression forte de tous les parlementaires, députés, sénateurs, parlementaires européens. Le ministère multiplie les contacts avec nos homologues ; je reviens du Brésil où j'ai expliqué, avec humilité mais détermination, notre position. Nous aurons aussi besoin de la société civile, agriculteurs d'Europe ou ONG, pour nous opposer à cet accord. Nous vous demandons votre aide. (Applaudissements sur des travées du groupe Les Républicains)
M. Serge Mérillou. - Ouvrez le débat au Sénat ! Négociez des accords bilatéraux autour du changement climatique, de la durabilité des modes de production et du commerce gagnant-gagnant. Et surtout, ne ratifiez pas le Mercosur : ne sacrifiez pas nos filières sur l'autel d'un libre-échange dérégulé ! (Applaudissements à gauche et sur des travées du RDSE)
Hijab dans le sport
M. Stéphane Piednoir . - (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains) Des experts indépendants de l'ONU jugent discriminatoire l'interdiction du hijab en France dans les compétitions sportives et appellent à l'annuler. Cette exigence, qui fait fi de la protection des jeunes musulmanes contre l'emprise religieuse, va à l'encontre de nos principes républicains de neutralité et de laïcité, consacrés dans la loi de 1905.
En juin dernier, votre prédécesseur rappelait que le port de signes ou tenues à caractère religieux était proscrit pour les athlètes de l'équipe de France lors des jeux Olympiques et Paralympiques de Paris. Un an plus tôt, le Conseil d'État jugeait que les règlements des fédérations de football et de basketball relatifs à la neutralité vestimentaire étaient proportionnés et adaptés au contexte.
Reste que cet édifice juridique mérite d'être consolidé face à la multiplication des faits communautaires et des dérives séparatistes.
Rapporteur de la proposition de loi Savin sur la laïcité dans le sport - victime de la dissolution -, j'ai soutenu l'extension de l'interdiction aux compétitions départementales, régionales et nationales.
Dans sa déclaration de politique générale, le Premier ministre a affirmé qu'il n'y aurait « aucun accommodement sur la défense de la laïcité. » Comment prévenir toute remise en compte de ce principe fondamental, y compris par des experts déconnectés des fondements de notre République ? (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains)
M. Gil Avérous, ministre des sports, de la jeunesse et de la vie associative . - La loi de 1905 prévoit un principe de neutralité, qui se traduit par l'interdiction de manifester des convictions et opinions religieuses pour les agents de l'État, des collectivités et de toute personne morale chargée d'une mission de service public.
Le Conseil d'État considère que les fédérations sportives délégataires sont chargées d'une mission de service public et que, à ce titre, les équipes de France sont soumises au principe de neutralité.
Hors équipe de France, chaque fédération fixe ses règles, sous le contrôle du ministère. Certaines fédérations ont adopté des règlements limitant le port de signes politiques et religieux pour certaines compétitions. C'est le cas des règlements de la Fédération française de basketball et de la Fédération française de football, qui ont été jugés adaptés et proportionnés par le Conseil d'État dans sa décision du 29 juin 2024.
En l'état du droit, il revient donc aux fédérations de déterminer leurs règles pour faire primer les principes de la République. Je propose d'engager un travail avec le mouvement sportif et les acteurs institutionnels sur les suites à donner à la proposition de loi Savin. (M. Laurent Burgoa applaudit.)
Intempéries dans le Var
Mme Françoise Dumont . - (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains) Les récents événements climatiques ont fait de nombreuses victimes et dégâts. Dans le Var, plus de 25 communes ont été frappées, plusieurs centaines d'habitations et de commerces touchés, plus de 500 foyers sans électricité.
Vendredi dernier, le Premier ministre a annoncé 75 millions d'euros supplémentaires pour le fonds Barnier, ainsi porté à 300 millions d'euros, malgré le contexte budgétaire.
Souvent, les lois environnementales ne prennent pas en compte les réalités du terrain. Il faut plus de prévention et d'anticipation du risque. Nous savons le faire, mais les contraintes normatives nous freinent. Il faut donner la priorité à ce qui vise la survie de l'homme !
Irez-vous au-delà des 75 millions d'euros, si le coût des dégâts devait être supérieur ? Les règles d'éligibilité au fonds Barnier seront-elles assouplies ? Quelles mesures de simplification pour aider les élus locaux à amplifier la prévention dans la gestion des cours d'eau et des forêts ? Enfin, ne pourrait-on départementaliser les services de la Dreal, comme certains préfets le demandent, pour une gestion au plus près du terrain ? (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains)
Mme Catherine Vautrin, ministre du partenariat avec les territoires et de la décentralisation . - Je vous prie d'excuser Agnès Pannier-Runacher, qui est à Cali pour la COP16 biodiversité.
Je réitère le soutien du Gouvernement aux sinistrés et nos remerciements aux services mobilisés ainsi qu'aux élus locaux, qui répondent chaque fois présent pour accompagner les populations.
Vendredi dernier, le Premier ministre a présenté un troisième plan national d'adaptation aux changements climatiques (Pnacc). C'est un plan systémique, car il faut désormais accélérer pour limiter les conséquences du changement climatique. C'est un plan ciblé et opérationnel, avec 51 mesures. Les 75 millions d'euros supplémentaires pour le fonds Barnier viendront renforcer la protection. Dans le contexte budgétaire actuel, c'est considérable. Nous donnons la priorité au fonds Vert et à l'accompagnement des collectivités via la mission d'adaptation. C'est enfin un plan fédérateur.
Nous étudierons les régionalisations que vous évoquez. Vous parlez Dreal, je vous réponds Ademe. Il faut explorer toutes les solutions possibles. Travaillons ensemble pour apporter des réponses efficaces.
La séance est suspendue à 16 h 30.
Présidence de Mme Sylvie Vermeillet, vice-présidente
La séance reprend à 16 h 40.