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Table des matières
Décisions du Conseil constitutionnel
Organisme extraparlementaire (Candidature)
Loi de finances pour 2010 (Deuxième partie - Suite)
Aide publique au développement
Engagements financiers de l'Etat
Sport, jeunesse et vie associative
Solidarité, insertion et égalité des chances
Article additionnel après l'article 59 quater
Articles additionnels après l'article 63
SÉANCE
du vendredi 4 décembre 2009
42e séance de la session ordinaire 2009-2010
présidence de M. Roland du Luart,vice-président
Secrétaires : Mme Christiane Demontès, M. Daniel Raoul
La séance est ouverte à 10 h 45.
Le procès-verbal de la précédente séance, constitué par le compte rendu analytique, est adopté sous les réserves d'usage.
Décisions du Conseil constitutionnel
M. le président. - M. le Président du Sénat a reçu de M. le Président du Conseil constitutionnel, par courrier en date du 3 décembre 2009, les textes de deux décisions rendues par le Conseil constitutionnel qui concernent la conformité à la Constitution de la loi organique relative à l'application de l'article 61-1 de la Constitution et de la loi relative à l'organisation et à la régulation des transports ferroviaires et portant diverses dispositions relatives aux transports.
Acte est donné de ces communications.
Organisme extraparlementaire (Candidature)
M. le président. - M. le Premier ministre a demandé au Sénat de désigner un sénateur appelé à siéger au sein de la Commission nationale des compétences et des talents, en application de l'article L. 315-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.
J'invite la commission des lois à présenter une candidature. La nomination au sein de cet organisme extraparlementaire aura lieu ultérieurement, dans les conditions prévues par l'article 9 du Règlement.
Loi de finances pour 2010 (Deuxième partie - Suite)
M. le président. - Le Sénat va examiner les crédits des missions « Aide publique au développement », « Compte spécial : accords monétaires internationaux » et « Compte spécial : prêts à des États étrangers ».
Aide publique au développement
Interventions des rapporteurs
M. Michel Charasse, rapporteur spécial de la commission des finances. - Notre aide publique au développement se porte un peu mieux. En 2008, elle atteint 7,6 milliards, soit 0,39 % du RNB contre 0,38 en 2007. Nous sommes au quatrième rang mondial en volume et au deuxième du G7 en valeur. La progression 2008 de l'aide française atteint près de 3 % en termes réels et plus de 11 % hors annulations de dettes. En 2009, grâce aux annulations reportées de 2008, nous pourrions être à 0,44 % du RNB, tout près du plus haut niveau enregistré en 2006 : 0,47 %. En 2010, nous serons entre 0,44 et 0,48 selon que les dettes du Congo et de la République démocratique du Congo seront annulées par le FMI.
Cet effort est méritoire dans le contexte contraint de nos finances publiques ; la chute de l'APD française en 2006 et 2007 tend à être aujourd'hui rattrapée. Et notre pays pourra honorer ses engagements internationaux sur ce point -en particulier ceux que le Président de la République a pris lors de la conférence de Doha fin 2008.
La conjoncture économique mondiale impose une solidarité accrue en faveur des pays en développement pour atteindre certains des « objectifs du millénaire » à l'horizon de 2015. Les pays donateurs l'ont compris : en 2008, les membres du comité d'aide au développement de l'OCDE ont augmenté leur aide de plus de 10 %, pour avoisiner les 120 milliards de dollars, montant historique jamais constaté auparavant.
Il faut pourtant relativiser cette satisfaction globale. D'abord, l'aide « de terrain », la plus visible donc la plus rentable politiquement, est toujours tragiquement minoritaire dans l'APD française. En 2008, 41 % de notre aide va au multilatéral et 9 % aux annulations de dettes. La France a obtenu une réduction de sa contribution au FED pour 2011-2013 : en 2011, nous tombons à 804 millions d'euros, soit 68 de moins que pour 2010.
Ensuite, certaines dépenses importantes figurent toujours dans l'APD car engagées sur notre territoire : fonds consacrés à Mayotte et à Wallis-et-Futuna, aides aux réfugiés originaires des pays en développement, frais d'écolage des étudiants étrangers en France. Notons un progrès : seuls les frais concernant les étudiants ressortissants de pays en développement sont décomptés. Mais la qualification de ces dépenses en APD reste sujette à caution.
A l'inverse, certaines dépenses qui contribuent au développement ne sont pas comptabilisées : les dépenses fiscales relatives aux dons faits aux organisations de solidarité internationale, les mécanismes de garanties, la sécurisation de l'aide alimentaire et l'essentiel de la coopération militaire et de défense. Aussi je vous demande, monsieur le ministre, de dresser un inventaire précis et chiffré de tous ces éléments afin d'avoir une vue plus exacte de l'effort national en faveur de l'APD.
Un dernier point pour tempérer l'enthousiasme : en 2011, on estime que cette aide pourrait tomber à 0,42 % du RNB, contre 0,44 au moins en 2010.
Certes, il y a toujours un décalage entre prévision et exécution du fait des aléas liés aux annulations de dettes et dépenses non programmables. Néanmoins, la France s'est engagée à atteindre 0,7 % de son RNB en 2015 et la réalisation de cet objectif suppose une croissance « miraculeuse » de notre APD de 17 % par an sur la période 2012-2015. Or, les contributions budgétaires dépendent de l'amélioration de la situation des finances publiques... et je me garderai bien de prendre des paris !
Je me félicite cependant de certains progrès. Ainsi du renforcement de l'efficacité de notre APD à la suite des décisions de juin dernier de concentrer l'aide française sur un champ prioritaire resserré. C'est une orientation conforme à la RGPP et à mes préconisations récurrentes.
D'abord, 60 % des ressources d'APD iront à l'Afrique subsaharienne, à quatre catégories de pays éligibles à l'APD relevant d'interventions adaptées. Une liste nominative de quatorze États a ainsi été arrêtée, regroupant les « pays pauvres prioritaires ». Cette concentration géographique de l'aide se substitue peu à peu à la notion de « partenariats différenciés ». Ensuite, l'aide française sera dirigée vers cinq secteurs prioritaires -santé, éducation, agriculture, développement durable et soutien à la croissance. Ces heureuses mesures offrent un soutien plus efficace aux pays et aux secteurs qui en ont le plus besoin.
La mission APD elle-même est dotée de 3,1 milliards en autorisations d'engagement et de 3,5 milliards en crédits de paiement. Cette mission ne constitue que le tiers de l'ensemble de l'APD nationale totale -8,6 milliards.
Par rapport à 2009, les autorisations d'engagement baissent d'environ 8 %, évolution pas trop préoccupante à court terme puisqu'elle vient du programme 110, relevant de Bercy : la moindre dotation en AE -moins 46 % par rapport à 2009- tend à préserver la « soutenabilité » du programme, et donc à éviter une « crise des paiements ». Au contraire, les AE du programme 209, qui concentre l'aide « de terrain » pilotée par le Quai d'Orsay, augmentent de 16 %. Je mets en garde contre toute tentation de combler, par une ponction sur le programme 209, les éventuelles insuffisances que l'exécution pourrait révéler sur le programme 110. J'appelle aussi l'attention sur les conséquences, en 2011-2012, de ce tassement des autorisations d'engagement du programme 110.
Les crédits de paiement de la mission, quant à eux, augmentent de 12 %, reflet de la croissance de l'APD générale L'effort de réduction des effectifs se poursuit : le plafond d'emploi est fixé à 2 667 équivalents temps plein, soit 122 postes de moins. La réduction nette d'effectifs publics reste cependant limitée à 87 ETP du fait des transferts vers d'autres administrations.
Pour conclure, quelques préconisations ponctuelles. Primo, la dépense fiscale de l'APD sera proche de zéro en 2010, faute de souscripteurs pour les dispositifs en cause, notamment le « compte épargne co-développement ». Le Gouvernement doit s'interroger sur l'opportunité de maintenir ce dispositif car quand on n'a pas de sous, on ne saurait épargner.
Deuzio, le pilotage stratégique de l'Agence française de développement a été renforcé en juin dernier. Mais nos ambassadeurs doivent disposer des moyens en compétences et effectifs pour porter une appréciation éclairée sur les projets et ne plus s'en tenir à un avis purement formel, style « RAS » que le conseil d'administration de l'AFD se borne à enregistrer avec scepticisme. Cette attitude ne favorise guère l'autorité des ambassadeurs, ni le prestige de la fonction alors qu'ils doivent avoir une vision politique, au sens noble du terme, sur les projets. Aussi, l'affectation en ambassade de sous-préfets en mobilité spécialement chargés du suivi des dossiers permettrait à nos ambassadeurs d'assumer pleinement leur rôle en la matière.
Nous pouvons nous appuyer sur ces fonctionnaires de terrain dont nous connaissons l'efficacité.
L'Office français de l'immigration et de l'intégration remplace l'Agence nationale de l'accueil des étrangers et des migrations. Il aide à la réalisation de projets économiques présentés par les migrants qui souhaitent retourner au pays. Je persiste à penser qu'il faut relever le montant de l'aide de 7 000 à 15 ou 20 000 euros, quitte à renforcer les conditions pour s'assurer du sérieux des projets.
Sans rouvrir le débat sur les frais de scolarité, je crois opportun, pour préserver l'équilibre financier des établissements d'enseignement à l'étranger et soutenir la francophonie, que l'État, les partenaires sociaux et les entreprises concluent une sorte d'accord de bonne conduite pour mieux partager la prise en charge des frais de scolarité des enfants de résidents français. Cela réduirait une charge budgétaire qui préoccupe chaque année la commission des finances.
Sous réserve des amendements que je vous présenterai et au bénéfice de ces observations, la commission des finances vous propose d'adopter les crédits de l'aide publique au développement. (Applaudissements au centre et à droite)
M. Edmond Hervé, rapporteur spécial de la commission des finances. - Le compte « Prêts à des États étrangers » est divisé en trois sections. La première comprend les prêts à des États étrangers au titre de la « réserve pays émergents » ; il s'agit d'accords bilatéraux destinés à faciliter la réalisation d'infrastructures lorsque celle-ci fait appel à des biens et services français. La deuxième section comprend des prêts à des États étrangers pour consolider leur dette envers la France et la troisième, des prêts à l'Agence française de développement (AFD). Ce compte est déficitaire car le montant des prêts excède les remboursements encaissés.
Le programme 851 contribue à soutenir l'expansion internationale des entreprises françaises. Même si les crédits de paiement s'élèvent à 300 millions contre 180 en 2009, nous déplorons sa modestie, malheureusement révélatrice de l'insuffisance de la présence industrielle française dans le monde. Nous avons pourtant des savoir-faire à rentabiliser ! Plus inquiétante encore est la diminution des autorisations d'engagements. Sur la période 1998-2008, le volume des prêts consentis au titre de la réserve pour pays émergents s'est élevé à 1,94 milliard d'euros. En 2010, les principaux décaissements concerneront la ligne à grande vitesse au Maroc, le tramway de Rabat, le métro du Caire et celui d'Hanoï, des projets touchant l'eau et l'environnement en Arménie et en Mongolie.
Le programme 852 reconduit celui de 2009. Les annulations de dettes consenties par la France s'inscrivent dans le cadre de l'initiative pour les pays pauvres très endettés (PPTE), lancée en 1996 et qui concerne 35 pays -sur 40 éligibles. La France est le premier contributeur en cumul depuis 1996 : 12,7 milliards d'euros, dont 7,7 milliards dans le cadre multilatéral et 5 dans le cadre bilatéral. Certains déplorent l'insuffisante individualisation de la participation de la France à l'effort d'annulation. J'ajoute que nos relations avec les pays pauvres très endettés ne sauraient se résumer à des annulations de dettes. Les pays développés et émergents ont des devoirs à l'égard des plus pauvres, qui souffrent du mal le plus dramatique : la faim. Ce fléau mondial concerne 963 millions de personnes, chiffre malheureusement en croissance. Cruel paradoxe, la moitié des sous-alimentés travaillent la terre. C'est là le principal défi lancé à l'humanité. La répartition inégale des matières premières agricoles engendre conflits et désastres : nous devons privilégier la construction d'infrastructures de transports, la production d'énergie hydraulique et solaire, etc. La sécurité alimentaire dans les pays pauvres ne peut relever ni d'un libre échange mondial -la volatilité des cours du blé ou du pétrole le prouve- ni d'un repli à l'intérieur de frontières incertaines et démunies. Appliquons mieux le principe de régionalisation, à l'instar de la PAC européenne : c'est ce que M. Michel Barnier, à la suite d'Edgar Pisani, a défendu lors du G8 en Italie au mois d'avril dernier. Mais songez qu'au dernier sommet de la FAO à Rome, hormis M. Berlusconi, aucun chef d'État n'était présent...
Vous ne serez pas surpris si je mentionne ici le respect des engagements du paquet climat-énergie : nous avons une dette écologique à l'égard des pays en voie de développement, dette d'autant plus facile à évaluer que nous prétendons connaître le prix du carbone. L'AFD n'est pas insensible à ce sujet... Il faut faire prévaloir une justice climatique : les paradis fiscaux ne pourraient-ils être sollicités ? Au nom de la sécurité alimentaire, il faut instaurer une transparence minimale dans les contrats de location ou de vente de terre à des étrangers. II y a là un champ enthousiasmant pour nos diplomates, qui savent par exemple que le Mali et le Sénégal ne sont pas dans des situations identiques. Nous avons à soutenir une expertise française d'accompagnement, pour tirer un maximum de notre aide. Les créanciers des pays africains doivent respecter des règles de transparence et de justice !
Les prêts AFD sont des prêts à trente ans à un taux de 0,25 %. L'enveloppe demeure modeste : 208 millions d'euros. L'AFD a mis en place un nouveau « prêt très concessionnel contra-cyclique » qui adapte les remboursements aux circonstances économiques dans le pays emprunteur. Lorsque celui-ci exporte un petit nombre de produits aux cours fluctuants, l'instrument est fort utile ! La France est seule à l'avoir expérimenté ; plaidons pour son extension.
Le compte « Accords monétaires internationaux » retrace la coopération monétaire avec les pays de la zone franc. Comme en 2009, il n'est doté d'aucun crédit. La coopération garantit la parité du taux de change et la convertibilité, la liberté de transfert, la centralisation des réserves de change des États membres. Le ministère se réjouit de constater que dans la crise actuelle, les mécanismes de la zone franc ont contribué à stabiliser la situation monétaire et financière des pays concernés. Certains d'entre eux n'en connaissent pas moins une baisse de recettes, une progression des dépenses et une chute de la production des matières premières. Autant de facteurs d'inquiétude : un rapport d'étape serait bienvenu. Avec M. Gouteyron, nous pouvons nous interroger sur la présence française dans le monde. Je vous propose d'adopter sans modification les crédits du compte « Prêts et du compte accords monétaires ». (Applaudissements)
M. André Vantomme, rapporteur pour avis de la commission des affaires étrangères. - J'interviens ici en tant que rapporteur et m'exprimerai tout à l'heure au nom du groupe socialiste. Ce léger dédoublement ne m'empêchera pas d'aborder maintenant les sujets qui fâchent ; je laisserai les autres sujets au co-rapporteur, M. Cambon. L'année 2009 a été marquée par la diffusion dans les pays en développement de la crise financière née dans les pays occidentaux. Selon la Banque mondiale, du fait de la crise, ce sont 53 millions de personnes supplémentaires qui vivent aujourd'hui avec moins de 1,25 dollar par jour.
La communauté internationale a répondu à cette situation sans tarder. Les interventions de la Banque mondiale ont augmenté de 50 %, l'aide publique internationale a augmenté jusqu'à un niveau jamais atteint. La France a-t-elle pris sa part dans cet effort collectif ? Je crois que oui. Elle a augmenté de façon très significative ses lignes de crédit à la disposition du FMI et de la Banque mondiale et demeure le quatrième donateur de l'OCDE en volume. La France se met-elle en mesure d'honorer ses engagements en matière d'aide au développement ? Il me semble que non. Nous nous étions engagés à porter notre effort à 0,51 % en 2010 : il se situera entre 0,44 % et 0,48 %.
M. Michel Charasse, rapporteur spécial. - Exact !
M. André Vantomme, rapporteur pour avis. - Atteindrons-nous l'objectif de 0,7 % du revenu national en 2015 ? C'est peu probable. Cela supposerait une croissance de 17 % de ces crédits : ils ont crû de 2,1 % cette année. La commission des affaires étrangères vous invite à ne pas baisser les bras. La France, qui a porté haut et fort sa politique de coopération, doit maintenir le cap. Les tentations de modifier les critères de définition de l'aide sont fortes actuellement. Résistons à la tentation de gonfler artificiellement nos chiffres. Du reste, le Gouvernement a, conformément aux recommandations de l'OCDE, minoré les crédits d'écolage et d'accueil des réfugiés qu'il déclarait comme aide publique au développement.
Il est vrai que vous avez intégré la taxe sur les billets d'avion. C'est peu conforme aux engagements pris à la création de cette taxe mais cela ne manque pas de cohérence avec l'objet de l'Unitaid, qui relève bien de l'aide au développement.
L'aide programmable est pour 55 % multilatérale ; la proportion n'était que de 30 % il y a dix ans. Notre politique de coopération se décide désormais autant à Paris qu'à Bruxelles et à Washington. Ce n'est pas forcément une critique : l'échelon européen ou multinational est souvent le seul efficace, ce qui est l'unique critère pertinent. Les projets de coopération ne devraient être portés au niveau communautaire ou multilatéral que s'ils sont mieux réalisés à ces niveaux. C'est la logique de subsidiarité.
Il faut toutefois s'interroger sur le pilotage et l'évaluation de nos contributions multilatérales. Y a-t-il en face de chacune de nos contributions des objectifs et des évaluations ? Nous n'en sommes pas sûrs. Y a-t-il à Paris et sur le terrain, au Niger ou au Mali, une coordination suffisante des différents opérateurs ? Fait-t-on assez pour améliorer la cohérence des actions menées ? Qu'en est-il de notre influence dans ces fonds multilatéraux ? Nous ne disposions que d'un demi-siège au conseil d'administration du fonds Sida alors que nous sommes le deuxième contributeur... Dans les institutions où nos contributions sont marginales, parvenons-nous à faire valoir nos priorités pour l'Afrique ? Qu'en est-il, enfin, de la visibilité de notre aide ? Qui sait que le quart du budget du FED est assumé par la France ?
Quand on voit leur taille et leur compétence, on mesure l'importance du rôle joué par les ONG anglo-saxonnes dans l'influence de leur pays d'origine. Dans ce domaine, la France a pris du retard : les fonds transitant par les ONG s'élèvent à 1,14 % contre 5 % en moyenne dans l'OCDE. Le Gouvernement s'est engagé à redresser la barre. Nous l'y encourageons.
M. André Ferrand. - Très bien !
M. André Vantomme, rapporteur spécial. - Je laisse à M. Cambon le soin de vous donner l'avis de notre commission. (Applaudissements)
M. Christian Cambon, rapporteur pour avis de la commission des affaires étrangères. - La politique d'aide au développement exige de la persévérance, du bon sens et de l'initiative. Ces qualités, monsieur le ministre, ne vous font pas défaut. Vous manquerait-il des crédits ? Sans doute votre budget n'est-il pas tout à fait à la hauteur des ambitions de la France dans ce domaine mais les crédits de la mission sont préservés dans un contexte budgétaire difficile.
Le Gouvernement a décidé, lors du Cicid du 5 juin, de consacrer plus de 60 % de ce budget à l'Afrique subsaharienne. Notre commission s'en félicite, tout en observant que cette priorité n'a pas été suivie d'effet ces dernières années. L'Afrique subsaharienne représentait 53 % de notre APD en 2005, elle n'en reçoit plus que 42 % en 2008. Et le 12 novembre dernier, le conseil stratégique de l'AFD autorisait l'extension des interventions vers les Philippines, le Mexique et la Colombie. N'y a-t-il pas là une contradiction ? Avons-nous les moyens de couvrir cinq continents ? Je peux comprendre la volonté de ne pas être absent de continents prometteurs mais quand on voit les progrès de l'influence américaine et chinoise en Afrique, on se demande s'il ne faudrait pas concentrer nos efforts dans notre zone d'influence traditionnelle, qui est aussi le continent qui a le plus besoin d'aide.
Ma deuxième observation portera sur le Fonds européen de développement. Avec 22,6 milliards, le dixième FED est un enjeu considérable comparé aux 3,5 milliards de la mission APD sur lesquels nous allons nous prononcer ce matin. L'année 2010 va être marquée par la renégociation des perspectives budgétaires du FED et par la rédaction d'un document cadre définissant la stratégie de la France en son sein. Comment comptez-vous nous associer à ces deux événements ? La modification de la clé de répartition va dégager une marge de manoeuvre de 100 à 150 millions ; comment comptez-vous les utiliser ? N'est-ce pas l'occasion de renforcer notre aide bilatérale à l'Afrique ?
La coopération décentralisée est de plus en plus importante. En 2008, 72 millions ont été consacrés à des projets concrets que votre ministère recense grâce, notamment, à l'excellent portail de la coopération décentralisée. L'État accompagne ce mouvement pour soutenir financièrement les initiatives des collectivités et pour renforcer la cohérence des actions menées. Il y consacre 8 millions, avec un effet de levier considérable puisqu'à chaque euro dépensé par l'État correspondent près de 5 euros abondés par les collectivités territoriales. Mais ces 8 millions ne permettront de toucher que la moitié des projets demandeurs.
Si j'en avais le temps, j'aborderais beaucoup d'autres sujets : le bilan des opérateurs, l'AFD, la Banque mondiale, le fonds Sida, les priorités sectorielles de la France, la nouvelle organisation de la politique européenne de développement. Je vous interrogerais sur les chances de succès de la contribution solidaire internationale. J'évoquerais la réforme de votre administration et les efforts considérables de la direction générale de la mondialisation pour moderniser ses méthodes.
Faute de temps, je vous renvoie à notre rapport écrit mais j'émets le souhait que ce dialogue trop bref se prolonge par un grand débat d'orientation en 2010.
Mme Monique Cerisier-ben Guiga. - Très bien !
M. Christian Cambon, rapporteur pour avis. - J'ai lu dans un journal de ce matin que vous étiez le ministre « le plus économe des moyens ». Je vous en félicite.
M. Jean Arthuis, président de la commission des finances. - Très bien !
M. Christian Cambon, rapporteur pour avis. - Approuvant les priorités de ce budget et l'effort du ministère pour se moderniser, la commission des affaires étrangères est favorable à l'adoption de ces crédits. (Applaudissements à droite et au centre)
M. Louis Duvernois, rapporteur pour avis de la commission de la culture. - Au sein du programme 209, les crédits consacrés à notre influence culturelle et linguistique diminuent de 6 %. Les subventions aux Alliances françaises sont réduites de 25 % alors que celles-ci constituent notre meilleur outil de rayonnement linguistique.
M. Jean-Pierre Plancade. - Tout à fait !
M. Louis Duvernois, rapporteur pour avis. - Concernant notre réseau culturel à l'étranger, les chiffres sont donc préoccupants. La participation totale de la France au financement de la francophonie multilatérale s'établit à 53 millions contre 58 en 2009. Nos contributions à l'Organisation internationale de la francophonie et à ses opérateurs restent cependant substantielles. Si l'on compte aussi les 72 millions de participation majoritaire au financement de TV5 Monde, et les 4 millions de participation au loyer de la Maison de la francophonie, le budget de la francophonie, géré dans sa dimension politique et institutionnelle, atteint 142 millions.
Le pilier culturel sur lequel s'appuie également notre politique en faveur de la francophonie dispose d'un budget évalué à 256 millions, voire 782 si l'on y inclut l'Agence pour l'enseignement français à l'étranger, dont l'État finance 60 % du budget total. Nos établissements culturels à l'étranger et nos établissements scolaires d'enseignement français à l'étranger représentent numériquement la plus grande académie hors de France.
M. Jacques Legendre. - C'est vrai !
M. Michel Charasse, rapporteur spécial. - Et celle qui obtient les meilleurs résultats au bac parce que là-bas, on sait lire et compter !
M. Louis Duvernois, rapporteur pour avis. - Ils participent naturellement à la diffusion de notre langue.
En considérant les choses ainsi, on peut évaluer à 925 millions l'effort financier total consenti par l'État à une politique francophone ambitieuse, chiffre qui inclut bien évidemment le budget significatif de l'AEFE.
J'ai commenté, lors de mon intervention sur la mission « Médias », l'évolution des ressources affectées à la holding Audiovisuel extérieur de la France, qui augmentent de 6 %. Des incertitudes pèsent néanmoins sur la répartition de la dotation publique entre RFI, France 24 et TV5 Monde, ainsi que sur la signature du contrat d'objectifs et de moyens liant la holding à la puissance publique pour la période 2009-2013. Cette difficulté n'est pas étrangère à la situation sociale délicate que connaît aujourd'hui RFI ; le pilotage stratégique de cette société pâtit de l'absence de concertation interministérielle opérationnelle.
Sous le bénéfice de ces observations, la commission de la culture a émis un avis favorable à l'adoption des crédits de la mission « Aide publique au développement ».
Je vous demanderai, monsieur le ministre, des éléments d'information sur deux points. Pouvez-vous nous décrire l'effort du ministère en matière d'évaluation et de suivi des dotations publiques consenties à l'Organisation internationale de la francophonie et à ses opérateurs, lesquelles doivent abonder des programmes dont on peut attendre un retour sur investissement ?
Dans quelle mesure votre ministère s'appuie-t-il sur la promotion et l'enseignement de la langue française comme leviers de développement économique et d'intégration régionale ? Au sein du programme 209, un certain nombre de projets financés par le fonds de solidarité prioritaire et l'AFD comportent un volet culturel et linguistique significatif : des montages financiers innovants ne pourraient--ils être imaginés entre l'AFD et notre réseau d'enseignement français à l'étranger ? (Applaudissements à droite et au et au banc des commissions)
Interventions des orateurs
M. Robert Hue. - Le budget de l'aide au développement constitue l'un des piliers de l'action internationale de la France. Comme chaque année, on nous annonce une augmentation significative de l'effort de la France, mais tous les doutes sont permis... Je regrette que l'on banalise le retard de notre pays à honorer ses engagements, à la différence des autres pays occidentaux. Selon le sondage annuel de l'AFD, deux Français sur trois estiment que malgré la crise, la France doit poursuivre son aide. Seuls 10 % estiment qu'il faut la stopper. En tête des préoccupations viennent la lutte contre la pauvreté et le réchauffement climatique.
En dépit des accords du millénaire fixés par l'ONU, qui entend réduire de moitié la pauvreté d'ici à 2015, le compte n'y est pas. La France s'est engagée à consacrer 0,7 % de son PIB à terme et 0,51 % en 2010, à l'aide au développement. Il ne dépassera pourtant pas 0,44 à 0,48 % et M. Charasse prédit le chiffre de 0,42 % en 2011. Notre budget baisse inexorablement ; au mieux, il stagne. Que ceux qui y voient une augmentation m'expliquent comment ils s'y prennent, sauf à prendre en compte les annulations de dette qui rendent les chiffres tout simplement insincères. Pourtant, le Royaume-Uni ou l'Espagne, pays aussi durement touchés que nous par la crise financière internationale, atteignent leur objectif de 0,6 % de leur richesse nationale en 2010.
Les pays pauvres ont le sentiment de payer pour la crise, quand les nations développées sont si promptes à recapitaliser leurs banques et à aider les grands patrons à garder leurs stock-options.
Je suis curieux, monsieur le ministre, de connaître la position que va adopter le Gouvernement lors du prochain sommet sur les objectifs du millénaire, soit cinq ans seulement avant la clause de rendez-vous de 2015.
L'aide au développement, née de la décolonisation, est faite pour parvenir à un rééquilibrage des niveaux de développement, qui doit mettre fin la pauvreté dans le monde. Faut-il rappeler que 1,4 milliard de personnes vivent sous le seuil de pauvreté dans le monde, avec moins de 1,25 dollar par jour ? Qu'un enfant meurt du paludisme toutes les trente secondes ? Que 6 millions de personnes attendent, dans ces pays, un traitement contre le Sida ? Qu'en Afrique, plus particulièrement, 800 000 personnes souffrent de la faim, que des milliers d'enfants exécutent un travail harassant ? Ce continent sera le premier continent touché, si l'on en croit le directeur de l'AFD qui déclare lui-même qu'il faudra « s'accommoder d'une coupe radicale ». Constat d'autant plus alarmant que nos faibles moyens, de moins en moins utilisés pour lutter contre la pauvreté et les inégalités, vont de plus en plus à la lutte contre l'immigration et à la promotion des entreprises françaises. L'humanitaire est en quelque sorte désormais « sous-traité » aux ONG. Où est la promesse du Président Sarkozy, à Doha, de faire de l'Afrique une priorité ? Car le choix est fait : aider les pays émergents sous forme d'aides publiques pour y accompagner la présence de nos entreprises et écraser l'Afrique de prêts, qu'elle ne pourra d'ailleurs jamais rembourser.
Dans le 9e fonds européen de développement, l'Union européenne n'a consacré que 4,5 % à l'agriculture des pays ACP. L'échec est aujourd'hui patent. L'abaissement des droits de douane et l'ouverture des marchés n'ont évidemment pas enrichi l'Afrique, ainsi que nous l'avions prévu.
L'agriculture sera un enjeu majeur dans les décennies à venir. Jacques Diouf, directeur général de l'Agence de l'ONU pour le secteur alimentaire, ne cesse de répéter qu'il faut produire là où les gens en ont besoin. Nous devons réorienter nos aides pour l'agriculture. Les engagements pris lors du dernier G8 sont appréciables mais les efforts financiers doivent être plus soutenus et les engagements tenus.
Les crédits consacrés à la lutte contre le réchauffement climatique, quant à eux, sont loin des 100 milliards de dollars annuels nécessaires, selon le secrétaire général de l'ONU que nous avons rencontré, pour enrayer la dégradation -chiffre à comparer aux plus de 1 500 milliards de dépenses militaires annuelles dans le monde...
Que dire, enfin, du lamentable attelage par lequel vous liez immigration et co-développement. La Cimade a alerté sur l'évolution de notre coopération, soumise à une obligation de résultat en matière de régulation des flux migratoires. Car cette condition, monsieur le ministre, figure bien dans l'une des conclusions du comité interministériel.
Le décalage entre les discours et la réalité déconcerte et décrédibilise la France dans le monde, et surtout auprès de ses partenaires, en Afrique.
Le groupe CRC-SPG, vous l'aurez compris, ne votera pas ce budget. (Applaudissements à gauche et au banc des commissions)
M. André Ferrand. - L'aide publique au développement est un élément central des relations internationales et, en vertu de notre histoire, une composante essentielle de notre diplomatie. Cependant, le changement climatique, la mondialisation sont autant de nouveaux enjeux.
La crise qui frappe depuis un an pénalise lourdement les pays pauvres. En 2008, les flux de capitaux privés vers les pays en développement ont accusé une baisse singulière de plus de 700 milliards de dollars et, selon les estimations de la Banque mondiale, les apports nets seront probablement négatifs en 2009.
Cependant, malgré un contexte budgétaire très contraignant, le montant de notre aide publique au développement augmente. Les crédits du programme « Solidarité avec les pays en développement » progressent de 16 %. L'aide de la France envers les pays pauvres, en augmentation constante, représente 0,44 à 0,48 % de son revenu national brut, progressant ainsi vers l'objectif de 0,7 % que le Président de la République s'est engagé à atteindre.
L'aide publique au développement reste donc une priorité et la France confirme sa place de quatrième plus généreux donateur de la planète. Ne serait-il pas cependant souhaitable, monsieur le ministre, de réévaluer notre contribution via les canaux multilatéraux, notamment au sein du Fonds européen de développement où notre quote-part devrait être indexée sur notre contribution au budget de l'Union européenne. Quelle sera, sur ce point, notre marge de manoeuvre dans les négociations à venir ?
Notre participation au FED traduit la priorité accordée aux pays ACP, mais nous avons heureusement aussi, avec ces pays des programmes bilatéraux : ils nous donnent une réelle visibilité ; il faut les promouvoir.
Le Cicid du 5 juin a décidé d'une politique plus concentrée, géographiquement et sectoriellement. Quatorze pays pauvres d'Afrique bénéficieront de programmes d'aide, notamment en matière d'agriculture et de sécurité alimentaire. Alors que la hausse des prix des denrées de première nécessité a fait éclater des émeutes de la faim, quelle est la stratégie du comité interministériel en ce dernier domaine ?
Nous travaillons chaque année à élever notre contribution, mais les vecteurs ont évolué. Nous devons désormais appréhender les chose sous la perspective globale des opérateurs multilatéraux et des acteurs non étatiques que sont les ONG et les collectivités territoriales -et le vaste chantier de la coopération décentralisée a besoin de coordination.
Il faut également se soucier de l'efficacité : les habitants des pays pauvres souffrent trop pour que nous nous satisfassions de voir une partie de l'aide gaspillée, sans utilité réelle pour le développement. Il faut donc mettre en place des outils d'évaluation, moderniser les leviers de l'aide au développement et y associer des acteurs privés. La présence ce matin, au banc du Gouvernement, de Mme la secrétaire d'État chargée du commerce extérieur est tout un symbole. Il faut établir des partenariats solides avec les entreprises, qui peuvent faire bénéficier les industries des pays les moins avancés de leur expertise et de leurs réseaux.
Plusieurs pays d'Afrique occidentale et centrale, anciennes colonies françaises, fêteront l'an prochain le cinquantième anniversaire de leur indépendance. La France les a depuis lors accompagnés par une aide bilatérale massive et multiforme. Veillons à ce que ces célébrations ne soient pas polluées par des polémiques portant sur notre passé.
Le groupe UMP votera ce budget. (Applaudissements sur les bancs UMP et au banc des commissions ; M. Jean-Pierre Plancade applaudit aussi)
M. André Vantomme. - Le montant de l'aide publique au développement stagnera en 2010 à hauteur de 0,44 % du revenu national brut, alors que la France s'était engagée à le porter à 0,51 % cette année et à 0,7 % en 2015. M. Chirac nous avait assigné ce dernier objectif pour 2012 ; M. Sarkozy a repoussé l'échéance jusqu'en 2015, mais il faudra sans doute la reporter encore...
Nos partenaires européens ne sont pas tous non plus à la hauteur de leurs promesses. La tentation est grande de casser le thermomètre afin de masquer la médiocrité des résultats. La notion d'« approche globale de l'aide » m'inquiète : est-ce une manière détournée de renoncer à nos engagements ?
Je remarque aussi que l'on privilégie, au détriment des dons, les prêts aux pays à revenus intermédiaires et émergents, qui s'accompagnent d'un soutien aux entreprises françaises. S'agit-il d'une politique de coopération ou de commerce extérieur ?
Certes, le Président de la République a promis de consacrer à l'Afrique la moitié de l'aide publique bilatérale. Mais quels seront les pays bénéficiaires et quelles formes prendra cette aide ? La faiblesse des crédits d'aide-projet, c'est-à-dire des subventions, empêche l'aide au développement de secteurs non rentables comme l'éducation, les transports ou la santé.
Quant à l'Agence française de développement (AFD), plusieurs observateurs regrettent de voir son rôle réduit à celui d'un banquier, qui prête principalement aux pays émergents, alors que sa fonction initiale est d'être le principal opérateur de l'aide au développement. Quelles missions lui assignez-vous, monsieur le ministre ? Comment peut-elle agir efficacement en Afrique subsaharienne ?
Le Gouvernement a fait un effort pour rendre le budget plus sincère. Souvent critiquée pour sa complexité, voire son opacité, l'aide publique de la France gagnerait encore à se passer de méthodes comptables peu orthodoxes, qui permettent de majorer les chiffres et de masquer les déficiences.
Il faut trouver un meilleur équilibre entre aide bilatérale et multilatérale. Le Gouvernement veut stabiliser la proportion entre les deux, ce qui est en effet souhaitable. Mais j'insiste sur la nécessité de contrôler et d'évaluer les contributions françaises aux organismes multilatéraux. Il faut préserver nos capacités d'action bilatérale : je sais, monsieur le ministre, que vous en êtes d'accord, mais comment faire à présent que les services de coopération et d'action culturelle (Scac) ont été réduits, voire supprimés ?
Un mot sur le sommet de Copenhague, qui s'ouvrira dans quelques jours : l'avenir du monde est en jeu. Le sommet doit aboutir à des décisions précises, contraignantes et dont l'effet soit vérifiable. Les pays riches, qui ont une grande part de responsabilité dans la dégradation de l'environnement, doivent s'assigner des objectifs ambitieux pour réduire de 40 % leurs émissions de gaz à effet de serre en 2030 par rapport à 1990 et faire preuve de solidarité avec les pays pauvres. Il faudra être créatif pour trouver les financements appropriés. Après le sommet, la France devra réorienter son aide au développement en fonction des engagements qui y auront été contractés.
L'aide publique au développement doit être un des principaux axes de la politique étrangère de la France. Mais aujourd'hui le co-développement est devenu le parent pauvre de la politique d'identité nationale et d'immigration : cela augure mal de son avenir... Une application implacable de la RGPP, des caisses désespérément vides, une dette colossale : tels sont les écueils auxquels vous vous heurterez, monsieur le ministre. Malgré quelques améliorations, ce budget est encore loin d'être parfaitement transparent, et la sincérité globale du PLF peut être mise en doute... C'est pourquoi le groupe socialiste votera contre les crédits de cette mission. (Applaudissements à gauche ; M. Michel Charasse, rapporteur spécial, applaudit également)
M. Jean-Pierre Plancade. - A l'heure où le monde traverse une grave crise économique, l'aide publique au développement revêt une importance accrue. Les pays pauvres sont plus durement touchés que les riches : M. Jacques Diouf, directeur général de la FAO, soulignait, lors du sommet de Rome, que le nombre de personnes souffrant de la faim s'élevait à 1,2 milliard... Au plan sanitaire, le Sida, qui touche plus de 33 millions de personnes dont les deux tiers en Afrique subsaharienne, et le paludisme, qui tue un enfant toutes les trente secondes, continuent à faire des ravages. Quant à l'éducation, 75 millions d'enfants ne sont pas scolarisés et 776 millions de personnes savent à peine lire et écrire.
Le combat en faveur du développement semble parfois vain, mais les chantiers sont immenses. La communauté internationale s'est mobilisée depuis quelques années : je pense aux objectifs pour le millénaire de l'ONU et à la promesse des pays de l'OCDE de porter à 0,7 % de leur RNB le montant de leur aide publique au développement. Mais nous sommes encore loin du compte : la France n'y consacrera en 2010 que 0,34 % de son RNB.
L'aide publique manque de transparence, pour nous comme pour nos partenaires. Pas moins de quatorze ministères sont concernés. Je me réjouis que le comité interministériel de la coopération internationale et du développement (Cicid) ait décidé, le 5 juin, de mesures améliorant la lisibilité et l'évaluation de nos actions.
Cette mission, qui représente la moitié de l'effort de l'État envers l'aide au développement, est consolidée avec une augmentation de ses crédits de 5 % par rapport à l'an passé. En revanche, en tant que membre de la commission de la culture, je déplore, après M. Duvernois, la consternante diminution des crédits consacrés à la francophonie : moins 6 % pour l'influence culturelle et linguistique française, que ce soit dans les pays émergents, les pays de la zone de solidarité prioritaire ou les pays moins avancés ; moins 25 % pour les alliances françaises ; moins 13 % pour la politique de rayonnement de la langue française au sein des pays de l'OCDE, après une chute de 23 % l'an dernier ; enfin, diminution des crédits alloués au volet politique et institutionnel de la francophonie et des contributions de la France à l'Organisation internationale de la francophonie. Il faut réagir, répondre au désir de France de nos partenaires ! La demande d'apprentissage du français est en progression constante, témoignent les sénateurs représentant les Français de l'étranger. Quand la francophonie ressort à l'évidence de notre diplomatie d'influence, il est d'autant plus dommage de ne pas être entendus !
On ne refuse pas à la France les moyens de politique étrangère, disait notre illustre devancier, François Mitterrand. Le groupe RDSE, attentif aux réponses que le Gouvernement lui apportera sur la francophonie, appliquera son conseil ! (Applaudissements à droite et au centre)
M. Alain Joyandet, secrétaire d'État chargé de la coopération et de la francophonie. - (Applaudissements sur quelques bancs UMP) Sans revenir en détail sur les chiffres de cette mission, je veux simplement rappeler que notre effort budgétaire en faveur de l'APD progresse pour se situer entre 0,44 et 0,48 du revenu national brut, selon les annulations de crédits des deux Congo. Le programme « Solidarité à l'égard des pays en développement » augmente incontestablement. Nous avons donc tenu les engagements pris par le Président de la République.
Monsieur Charasse, il est effectivement temps de dresser un bilan sur la dépense fiscale. Je m'engage à le faire, en collaboration avec M. Besson. L'affectation de sous-préfets dans les ambassades pour coordonner la politique de coopération peut être une bonne idée, j'en discuterai avec nos postes. Laissons le temps au nouvel Office français de l'immigration et de l'intégration de faire ses preuves avant d'étudier les moyens de renforcer son efficacité.
M. Michel Charasse, rapporteur spécial. - Avoir modifié le nom de cet établissement ne change rien au fait qu'une aide de 7 000 euros, c'est trop peu !
M. Alain Joyandet, secrétaire d'État. - Je suis ouvert à vos propositions.
Je laisse Mme Idrac répondre à M. Hervé.
Monsieur Vantomme, chaque organisation internationale est évaluée par un organisme indépendant, ce qui nous permet de connaître l'utilisation de nos contributions que nous engageons et leur efficacité.
Au sein du comité interministériel de la coopération internationale et du développement a été décidé de mieux formaliser notre stratégie de coopération. Le Parlement est parfaitement associé à cette démarche : après la transmission d'un document en octobre concernant la banque mondiale, nous vous remettrons en février prochain une note sur notre aide européenne.
Concernant l'articulation des différents types d'aides multilatérales dans les pays ACP et d'Afrique subsaharienne, je rappelle que l'essentiel de l'effort transite par le FED. Concrètement, nos ambassades sont associées à la définition du plan indicatif national qui fixe les orientations de la politique européenne dans chaque pays bénéficiaire. Des pôles développement ont été récemment installés dans chacune de nos ambassades situées dans les pays bénéficiaires. Ils réunissent la chancellerie politique, la mission économique, le service de coopération et l'AFD.
La France est le premier contributeur européen du Fonds mondial Sida, le deuxième au niveau mondial après les États-Unis, avec une contribution actuelle de 300 millions de 2008 à 2010. Nous sommes très présents dans cette organisation qui comprend 65 Français sur 400 personnes. Nous consacrons beaucoup d'efforts pour mieux y associer les ONG françaises et francophones, mais leur dimension est parfois insuffisante pour mener des projets.
Je rencontre les ONG très souvent, notamment Coordination Sud et son président, Jean-Louis Vielajus. La France a pris du retard, il est vrai, concernant le transit de l'aide par les ONG : 1,1 à 1,2 %, contre 5 % en moyenne dans l'OCDE. Le Gouvernement s'est engagé à porter ce chiffre à 2 % en fin de quinquennat ; les crédits sont budgétés à cet effet en 2010, comme l'an passé.
Monsieur Cambon, nous participerons avec plaisir à un débat d'orientation sur notre politique de coopération au Parlement. Nous soutenons les projets de coopération décentralisée à hauteur de 8 millions en cofinancement avec les collectivités. Je mène d'ailleurs, actuellement, un tour de France pour mobiliser les collectivités intéressées. Nous sommes particulièrement intéressés par les projets de développement économique, seule solution durable contre la pauvreté. Les acteurs locaux sont le prolongement de l'action de l'État.
Monsieur Duvernois, l'utilisation des crédits de la francophonie...
M. Michel Charasse, rapporteur spécial. - ...sert à traduire des livres français en anglais ! C'est honteux !
M. Alain Joyandet, secrétaire d'État. - ...est évaluée. Par exemple, via les rapports du commissaire au compte pour l'OIF, actuellement la Cour des comptes française. Nous sommes présents dans le conseil d'administration de nombreux organismes tels que l'agence universitaire de la francophonie, l'université Senghor d'Alexandrie. Nous avons une convention d'objectifs et de moyens avec l'Association internationale des maires francophones.
La promotion de la langue française doit être un outil de développement économique : il s'agit de faire émerger de la main-d'oeuvre qualifiée francophone. Chaque fois que nous finançons des programmes francophones de formation professionnelle, nous contribuons à créer de la richesse et à lutter contre la pauvreté.
Le cercle vertueux est toujours le même.
Monsieur Hue, nous avons toujours fait ce que nous avions dit. Les chiffres que nous annonçons seront tenus. Évidemment, quand il s'agit de développement, les crédits sont toujours insuffisants, mais après quelques années difficiles, nous sommes à nouveau sur une pente vertueuse.
Un mot sur les commémorations, monsieur Ferrand : avec Jacques Toubon, nous travaillons sur le sujet et nous ferons très attention, dans le cadre de ces commémorations, à éviter les polémiques et les surcoûts car nous avons besoin de tous les crédits disponibles pour l'aide publique sur le terrain.
M. Vantomme a repris la parole au nom de son groupe : certes, nous devrons revoir notre façon de comptabiliser l'aide publique au développement. Beaucoup de crédits ne sont pas pris en compte tandis que M. Charasse a mis le doigt, à juste titre, sur des actions qui se trouvent dans le budget et qui ne devraient pas y être : il faudra donc procéder à un toilettage pour ajouter et retirer ce qui doit l'être.
Oui, monsieur Plancade, il y a bien un désir de France. Mme Idrac et moi-même nous déplaçons sur les cinq continents et nous avons pu le constater. Nous faisons le maximum pour répondre à ce désir de France et faire en sorte que notre action fasse durablement reculer la pauvreté. (Applaudissements à droite et au centre)
Mme Anne-Marie Idrac, secrétaire d'État chargée du commerce extérieur. - Compte tenu de la grande qualité des rapports et des informations que vient de vous communiquer mon collègue Joyandet, je vais me contenter de donner quelques coups de projecteurs sur des points particuliers.
Même s'ils ne souffrent pas directement de la crise financière, les pays africains en connaissent malheureusement les répercussions économiques. La demande extérieure a diminué de 12 % en 2009, contre une hausse de 3 % en 2008, le prix des matières premières a baissé et les flux des investissements étrangers s'est ralenti : moins 50 % dans les pays émergents en 2008 et encore moins 50 % pour 2009. Ce phénomène sera sans doute le plus marquant : alors que les investissements en Afrique se montaient à 53 milliards de dollars en 2007, contre 29 milliards en 2000, ils ont chuté à 29 milliards en 2008. Nous ne sommes pas très loin d'une diminution par deux des volumes d'investissements directs étrangers. C'est considérable, notamment quand on les compare au volume d'aide publique au développement.
Dans le même ordre d'idée, les transferts de fonds des migrants, qui représentent une contribution essentielle au revenu des ménages dans les pays en développement, et donc à leur consommation, accusent d'ores et déjà une baisse significative. M. Charasse s'est interrogé sur l'épargne des migrants et sur les incitations fiscales : nous souhaitons favoriser la baisse du coût des transferts des fonds des migrants qui représentent 300 milliards de dollars dans le monde, c'est-à-dire trois fois l'aide publique au développement. En outre, nous cherchons à encourager l'épargne des migrants avec le compte d'épargne co-développement qui bénéficie d'une aide fiscale mais qui s'est révélé décevant. Nous avons lancé une réflexion interministérielle qui sera confiée prochainement à une personnalité compétente et qui portera sur deux volets : la baisse du coût des transferts, qui sont particulièrement élevés en France car nous n'avons pas réussi à passer suffisamment de conventions avec les banques, et les raisons de l'échec du dispositif de soutien à l'épargne des migrants.
Au total, la croissance en Afrique, qui était de 6 % avant la crise, devrait être légèrement supérieure à 1 % cette année, alors que la croissance démographique demeure bien supérieure. La lutte contre la pauvreté a donc marqué le pas. Pourtant, nous sommes frappés par la capacité des Africains à résister aux difficultés économiques.
Avec cette crise, nous devons penser à un nouvel équilibre entre aide bilatérale et aide multilatérale. Sous l'impulsion du G20, dynamisé par les propositions du Président de la République, des mesures contra-cycliques ont été prises pour lutter contre la crise. Des moyens financiers supplémentaires ont été fournis par le FMI aux pays les plus pauvres. Il a prévu d'augmenter de 8 milliards de dollars ses prêts sans intérêt pour les pays à faibles revenus, grâce à la vente de son or, ce qui est une décision historique. La France a accordé à cette occasion un nouveau prêt d'un milliard de dollars au FMI.
La France a largement contribué à ce que le FMI refonde son modèle de prêts pour les pays à faibles revenus afin de mieux répondre à leurs besoins. M. Hervé a rappelé que nous avons été très en avance en matière de prêts bilatéraux mais nous avons aussi beaucoup oeuvré pour que les instruments financiers du FMI profitent aux pays à revenus intermédiaires mais aussi aux pays les plus en difficulté.
Le projet de loi de finances prévoit des ouvertures de crédits permettant de couvrir l'intervention de la France au titre du FMI : 20 millions permettront de bonifier les prêts que notre pays accorde au FMI.
Pour remédier à la crise, la France a demandé l'accélération des décaissements des banques multilatérales et l'augmentation de leurs engagements. Le G20 a fixé un objectif d'augmentation de 100 milliards des financements des banques multilatérales sur trois ans. Nous serons sans doute amenés à accompagner certaines augmentations de capital de ces banques lors du projet de loi de finances pour 2011. La première recapitalisation qui est intervenue est celle de la banque asiatique de développement avec un triplement du capital acté lors du G20 à Londres. La France participera à hauteur de 54 millions.
Le comité interministériel, présidé par M. Fillon il y a quelques mois, a retenu deux priorités. La sécurité alimentaire : le Gouvernement vous demande d'autoriser l'engagement de 35 millions au profit du fonds international de développement agricole et nous avons demandé à l'agence française de développement (AFD) de doubler ses engagements, qui atteindront 1,5 milliard sur cinq ans. L'environnement sera la deuxième priorité : nous confirmons nos engagements auprès du fonds pour l'environnement mondial. Au plan bilatéral, nous soutenons une approche identique via le fonds français pour l'environnement mondial, qui est plus particulièrement ciblé sur l'Afrique et qui permet à nos entreprises d'apporter leur soutien à divers projets.
Le Parlement est associé à la réflexion sur la stratégie de la Banque mondiale. Le document qui est soumis à votre appréciation développe deux axes : le renforcement de notre rôle en tant qu'actionnaire et le renforcement des partenariats opérationnels entre nos propres actions bilatérales et les projets financés par la banque.
M. Hervé est intervenu sur le compte spécial « Prêts aux États étrangers ». Effectivement, nous devons intervenir sur le secteur urbain. Avec la Chine, l'Inde et les pays du Maghreb, nous développons d'ailleurs divers projets relatifs à l'eau, aux déchets et à l'efficacité énergétique.
En 2009, les pays bénéficiaires des crédits que vous aviez accepté d'augmenter fortement ont été l'Égypte, la Tunisie, le Maroc, le Vietnam, le Pakistan, le Sri Lanka et la Serbie. Nos engagements portent sur le financement de onze nouveaux projets et sur des compléments de financement, dont le métro de Hanoï et du Caire.
Les 400 millions d'autorisation d'engagement prévus pour 2010 ne permettront pas de satisfaire la totalité des demandes. En revanche, les 300 millions de crédits de paiement permettront de financer le démarrage des projets les plus importants, notamment la ligne à grande vitesse Tanger-Casablanca.
J'en viens aux prêts aux États étrangers : ce deuxième compte de prêts relate la participation de la France aux efforts de la communauté internationale pour réduire le poids de la dette. Notre pays assure la présidence et le secrétariat du Club de Paris.
Les annulations de dettes sont imputées sur le programme 110.
Les rééchelonnements de dettes sont imputés sur le programme 852, « Consolidation des dettes ».
Je suis consciente de la question des relations entre les différents dispositifs et l'intérêt des entreprises françaises. Nous avons fait en sorte que les échanges d'information entre l'AFD et Ubifrance leur permettent de répondre aux appels d'offres.
Nous avons souhaité que la France développe les prêts souverains, y compris en Afrique subsaharienne, afin de contribuer à soulager le problème financier. Nous sommes très clairs, cette évolution ne doit en aucun cas menacer la soutenabilité de la dette. Nous privilégions ailleurs les prêts concessionnels. Le développement significatif de l'activité de prêts non souverains concerne au premier chef l'Afrique subsaharienne où les engagements AFD vont doubler d'ici 2012.
Des interrogations se sont fait jour sur les interventions hors Afrique mais les prêts non concessionnels déploient les interventions de la France et en diversifient les modalités : on voit l'intérêt qui y est porté dans le monde entier. (Applaudissements à droite et au centre)
Examen des crédits
M. le président. - Amendement n°II-4, présenté par M. Charasse, au nom de la commission des finances.
Modifier comme suit les crédits des programmes :
(en euros)
Programmes |
Autorisations d'engagement |
Crédits de paiement |
||
|
+ |
- |
+ |
- |
Aide économique et financière au développement |
|
29.000.000 |
|
12.350.000 |
Solidarité à l'égard des pays en développement Dont titre 2 |
|
|
|
|
Développement solidaire et migrations |
|
|
|
|
TOTAL |
29.000.000 |
|
12.350.000 |
|
SOLDE |
- 29.000.000 |
- 12.350.000 |
M. Michel Charasse, rapporteur spécial. - La commission des finances est la gardienne de l'application de la loi organique. Voilà de nombreuses années qu'elle demande que certaines missions, dont l'aide publique au développement, reçoivent bien les crédits qui les concernent mais qu'elles ne conservent pas ceux qui n'ont rien à voir avec leur objet. Cette situation rend en effet les choses très difficiles ; par exemple, pour aller à l'OCDE regrouper les crédits et constater que, malgré les critiques, l'on est toujours l'un des plus généreux et plus forts donateurs.
On n'a pas insisté la première année d'application de la Lolf mais les années ont passé, d'où cet amendement qui vise non à annuler mais à sortir des crédits de la mission « Aide publique au développement » où ils n'ont rien à faire, et qui laisse le soin au Gouvernement de les reprendre par amendement dans les bonnes missions ; la commission s'est bien gardé de dire où.
Au titre de l'aide au développement, nous trouvons en effet 15 millions pour l'enfermement du réacteur de Tchernobyl...
M. Robert del Picchia. - C'est important !
M. Michel Charasse, rapporteur spécial. - ...14 millions pour réduire à néant le combustible de cette centrale et 3,5 millions pour aller dans la mer de Barents récupérer des sous-marins nucléaires russes pourris.
Pourquoi est-ce là ? Je n'ai jamais obtenu d'explications mais j'ai fini par comprendre : le ministère des finances considère que la Berd est le monopole de la maison. C'est le confort des bureaux, il ne faut rien leur enlever, même si c'est stupide. Nous ne sommes pas là pour le confort de la direction du Trésor ! Va-t-elle s'occuper de briques, de crayons Bic, de moutarde de Dijon, de chipolatas, de chapeaux pour la Sainte-Catherine ou de sapins de Noël ? (Sourires) On enlève donc tout ce qui ne relève pas de la mission -le Conseil constitutionnel finira d'ailleurs par s'y intéresser. On ne demande pas de renoncer à des engagements internationaux mais de les placer au bon endroit.
M. Jean-Pierre Fourcade. - Très bien !
Mme Anne-Marie Idrac, secrétaire d'État. - J'ai été étonnée que vous n'ayez pas cité les produits auvergnats. (Sourires)
M. Michel Charasse, rapporteur spécial. - J'y ai pensé.
Mme Anne-Marie Idrac, secrétaire d'État. - La situation peut paraître bizarre mais il se trouve que les crédits pour l'Ukraine font, dans le cadre de l'OCDE, partie de la stratégie de développement de l'Ukraine : elle est éligible à l'APD et les dépenses de démantèlement des centrales font partie du mandat des organisations internationales.
Je le reconnais, la Russie n'est pas éligible.
M. Michel Charasse, rapporteur spécial. - On peut la mettre si ça arrange les bureaux.
Mme Anne-Marie Idrac, secrétaire d'État. - Il n'y en a plus que pour un an et les crédits sont gérés par la Berd : pourquoi se compliquer la vie ? Au-delà du confort des chefs de bureau...
M. Michel Charasse, rapporteur spécial. - Je les connais bien et je les aime beaucoup.
Mme Anne-Marie Idrac, secrétaire d'État. - Moi aussi ! La possibilité de jouer sur des effets de trésorerie n'est pas forcément idiote. Cela peut paraître bizarre pour l'Ukraine mais nous sommes d'équerre et il n'y en a plus que pour un an pour que le problème de la Russie soit réglé. Un retrait de l'amendement éviterait de donner un mauvais signe sur la sûreté nucléaire.
M. Jean Arthuis, président de la commission des finances. - L'amendement que vient de défendre M. Charasse ne remet pas en cause les crédits et leur affectation. Nous estimons qu'ils sont plutôt mal placés par rapport à la loi organique mais celle-ci ne donne pas au Parlement la possibilité de transférer les crédits d'une mission à l'autre : nous sommes contraints de rester à l'intérieur des missions. Si le Sénat acceptait de suivre la commission, le Gouvernement pourrait prendre un engagement. Il y aura sans doute une seconde délibération. Le Gouvernement pourrait utiliser les crédits ainsi libérés pour les affecter, par exemple, à l'écologie et au développement durable. Le Gouvernement pourrait imaginer ce transfert ; la commission des finances appuierait alors...
M. Michel Charasse, rapporteur spécial. - ...très favorablement...
M. Jean Arthuis, président de la commission des finances. - ...cette initiative. Le deuxième amendement que présentera M. Charasse procède de la même philosophie.
M. Alain Joyandet, secrétaire d'État. - Je veux renforcer ce qu'a dit Mme Idrac. La partie la plus importante des crédits est éligible à l'aide publique au développement et l'on nous demande en permanence de rassembler les crédits à l'APD, si possible dans la mission APD. Ne vient-on pas de dire qu'elle ne comptabilise que trois milliards sur huit, soit le tiers de notre aide publique au développement ? Le problème de la Russie sera réglé l'an prochain.
Le danger collatéral de cet amendement, c'est que des crédits éligibles à l'aide publique au développement seraient comptabilisés ailleurs et que la dispersion serait encore plus grande. On pourrait en discuter au fond mais, pour le moment, c'est de l'APD. Sur la Russie, M. Charasse a raison mais il ne reste plus qu'un an.
M. Michel Charasse, rapporteur spécial. - Cela fait plusieurs années, depuis la Lolf précisément, que la commission des finances appelle l'attention sur ce genre d'anomalies. Par cet amendement -et je parle sous le contrôle de son président-, elle a voulu dire : « Ça suffit ! ». Pour une partie des crédits, il n'y en a plus que pour un an -mais je ne le savais pas en déposant l'amendement. Pour l'autre partie, c'est de l'APD, mais dans d'autres missions. Monsieur le ministre, votre ministère doit se mettre d'accord avec les autres pour que tout tombe dans l'APD et soit sous le pilotage des affaires étrangères qui dépendent du Président de la République, du Premier ministre, du Quai d'Orsay et de personne d'autre ! Les autres ministères font du travail à façon, cela leur plait mais rien n'est pire pour un État que d'être divisé entre plusieurs acteurs et que les interlocuteurs étrangers ne sachent plus à qui ils ont affaire. Tout cela devrait donc être regroupé au sein d'une seule mission sans aller se balader dans un ministère du ravitaillement ou un ministère des sports. Avec l'accord du président Arthuis, je veux bien, pour cette année, renoncer à cet amendement puisqu'un des programmes n'a plus qu'un an à vivre mais, pour le reste, il nous faut un reclassement général l'an prochain. Si nous l'obtenons, nous aurons joué notre rôle de gardiens de la loi organique. (Applaudissements à droite)
L'amendement n°II-4 est retiré.
M. le président. - Amendement n°II-5, présenté par M. Charasse au nom de la commission des finances.
Modifier comme suit les crédits des programmes :
(en euros)
Programmes |
Autorisations d'engagement |
Crédits de paiement |
||
|
+ |
- |
+ |
- |
Aide économique et financière au développement |
25 000 000 |
|||
Solidarité à l'égard des pays en développement Dont titre 2 |
25 000 000 |
|||
Développement solidaire et migrations |
||||
TOTAL |
25 000 000 |
25 000 000 |
||
SOLDE |
0 |
M. Michel Charasse, rapporteur spécial. - Cet amendement opère un transfert à l'intérieur d'une mission. Pour des raisons qui m'ont toujours échappé, les crédits du fonds français pour l'environnement mondial (FFEM) sont gérés dans le programme 110, par Bercy -qui, c'est bien connu, sait tout faire-, alors qu'il s'agit d'actions qui ressemblent fort à celles du programme 209. Pour cette raison, ces crédits sont difficiles à mettre en oeuvre et ils font souvent doublon avec ceux du fonds pour l'environnement mondial (FEM). J'ai donc proposé à la commission des finances, qui l'a accepté, que les crédits du fonds français soient rattachés au programme 209 qui coordonnera mieux ses actions ; il s'agit de seulement 25 millions...
Mme Anne-Marie Idrac, secrétaire d'État. - Mon avis est défavorable, et non par corporatisme, croyez-le bien. Le FFEM a été mis en oeuvre collectivement avec le Quai d'Orsay, l'Agence française de développement et des entreprises françaises spécialisées, par exemple, dans l'eau ou l'électrification. Il fonctionne très bien, il a un réel rôle de catalyseur et nous veillons à ce qu'il ne fasse pas doublon avec le fonds mondial.
Mme Monique Cerisier-ben Guiga. - Je soutiens l'amendement car les affaires étrangères, avec leur nouvelle direction générale de la mondialisation, sont mieux à même de gérer ces crédits.
M. Michel Charasse, rapporteur spécial. - Compte tenu des enjeux diplomatiques bilatéraux qui s'attachent au FFEM, la gestion de ce fonds paraît relever davantage des missions du ministère chargé des affaires étrangères que de celles du ministère chargé de l'économie.
M. Alain Joyandet, secrétaire d'État. - Je vais faire une proposition, valable aussi pour l'amendement suivant. A la faveur du retrait de ces amendements, nous pourrions nous engager à procéder rapidement, entre la commission des finances et nos ministères, à un toilettage sur ces différents points et cela, d'une manière plus posée et plus globale. Pouvez-vous nous faire ce crédit ? Car finalement, d'une année sur l'autre, nous tenons compte de vos réclamations et arrivons ainsi progressivement à une meilleure conformité avec la Lolf. Vos propositions sont tout à fait opportunes. Le rapporteur spécial nous les égrène petit à petit chaque année pour ne pas nous effrayer mais il est vrai qu'il reste sept à huit points à discuter et à toiletter avec les deux commissions.
M. Michel Charasse, rapporteur spécial. - Le souci de la commission des finances, c'est que notre politique étrangère soit cohérente. Notre identité nationale c'est aussi cela, c'est aussi l'unité des autorités et de la politique françaises. Et si nous transigions autour de 10 millions, pour amorcer la pompe dès cette année ?
M. le président. - La séance est-elle le lieu idéal pour ce marchandage ?
M. Michel Charasse, rapporteur spécial. - Ce n'est pas un marchandage !
M. Jean Arthuis, président de la commission des finances - Cette rectification serait déjà un jalon par lequel le Sénat marquerait sa détermination. L'APD se monte à 4 milliards, alors que d'autres missions y contribuent à hauteur de 2 milliards ! Nous sommes d'accord avec votre proposition d'y travailler globalement ensemble mais, en attendant, la commission maintient son amendement en le rectifiant.
M. Alain Joyandet, secrétaire d'État. - En accord avec Mme Idrac, je m'en remets à la sagesse du Sénat.
L'amendement n°II-5 rectifié est adopté.
M. le président. - Amendement n°II-92 rectifié, présenté par M. Cambon au nom de la commission des affaires étrangères.
Modifier comme suit les crédits des programmes :
(en euros)
Programmes |
Autorisations d'engagement |
Crédits de paiement |
||
|
+ |
- |
+ |
- |
Aide économique et financière au développement |
1 500 000 |
1 500 000 |
||
Solidarité à l'égard des pays en développementDont Titre 2 |
1 500 000 |
1 500 000 |
||
Développement solidaire et migrations |
||||
TOTAL |
1 500 000 |
1 500 000 |
1 500 000 |
1 500 000 |
SOLDE |
0 |
0 |
M. Christian Cambon, rapporteur pour avis. - Cet amendement a été adopté à l'unanimité par la commission des affaires étrangères. Il tend à rétablir la contribution de la France au fonds central d'intervention d'urgence de l'ONU, le « Cerf ». Celui-ci, dirigé par le secrétaire général adjoint de l'ONU, finance des opérations de secours en cas de catastrophes naturelles ou d'urgences humanitaires. Avant d'interrompre son versement en 2009, la France était, avec 1,5 million d'euros, le 17e contributeur, loin derrière le Royaume-Uni qui verse 80 millions de dollars par an. En tant que membre permanent du conseil de sécurité et promoteur du droit humanitaire, notre pays se doit de participer au financement du Cerf : ses actions minimisent les pertes en vies humaines lors de crises.
Le secrétaire général de l'ONU lui-même, devant une délégation conduite par M. de Rohan, a déploré que la France ait interrompu ses versements, déjà infimes dans le total des contributions. La commission comprend que le Gouvernement cherche à réduire les dépenses et à rationaliser ses contributions aux fonds d'intervention multilatérale, mais M. Chirac avait aussi annoncé un doublement des contributions, or celles-ci sont en chute drastique. Nous avons conscience des contraintes budgétaires mais estimons que le choix opéré au détriment du Cerf n'est pas bienvenu.
L'adoption de notre amendement serait un signe positif, à quelques jours de la rencontre entre le secrétaire général de l'ONU et notre ministre des affaires étrangères. Ils s'entretiendront du devenir de la CSI. Les règles budgétaires nous font obligation de prélever le montant correspondant sur un autre programme, donc le 110, et plus précisément sur le fonds pour l'environnement mondial, seul poste qui puisse supporter une ponction de 1,5 million d'euros. Bien sûr, le symbole n'est pas excellent non plus, à la veille du sommet de Copenhague. Nous souhaiterions plutôt que le Gouvernement procède par redéploiements au sein du programme 209, mais il est seul habilité à le faire. La commission unanime m'a donné mandat pour obtenir une réponse claire sur la contribution au fonds en 2010.
M. Michel Charasse, rapporteur spécial. - La commission des finances n'ayant pas été saisie, nous nous en remettons, comme il est d'usage, à l'avis du Gouvernement.
M. Alain Joyandet, secrétaire d'État. - J'ai compris l'importance que votre commission des affaires étrangères attache au règlement de cette affaire. Le président M. de Rohan a récemment attiré mon attention sur la nécessité de continuer à abonder de fonds. Mais ôter des crédits à un fonds en faveur de l'environnement ne me paraît pas de bonne méthode.
Je m'engage à rétablir les crédits par redéploiement au sein des crédits multilatéraux, mais ne retirons pas des crédits à un fonds pour l'environnement dirigé, qui plus est, par une Française ! (Sourires) Retrait ou rejet.
M. Christian Cambon, rapporteur pour avis. - Si l'engagement est solennellement pris devant la Haute assemblée de réabonder le Cerf dés 2010 (M. le ministre fait signe que oui) et si M. de Rohan peut écrire en ce sens à M. Ban Ki-moon, qui lui a demandé de le tenir informé de l'affaire, je retire mon amendement. Nous serons très attentifs à la suite !
L'amendement n°II-92 rectifié est retiré.
Les crédits de la mission sont adoptés.
La séance est suspendue à 13 h 10.
présidence de M. Roland du Luart,vice-président
La séance reprend à 15 h 15.
M. le président. - Le Sénat va examiner les crédits de la mission « Plan de relance de l'économie ».
Plan de relance de l'économie
Interventions des rapporteurs
M. Jean Arthuis, président de la commission des finances, rapporteur spécial. - Le Premier ministre a annoncé que la croissance du produit intérieur brut sera, l'année prochaine, sans doute supérieure au 0,75 % retenu pour préparer la loi de finances pour 2010. Le tome I du rapport général de la commission des finances s'intitule « Entre crise et reprise » : nous ne sommes pas tirés d'affaire mais le pire est sans doute derrière nous.
II y a un an étaient mis en place, en France et ailleurs, des dispositifs destinés rien moins qu'à sauver l'économie mondiale. Aujourd'hui, nous en dressons le bilan. Alors que la récession a été, en 2009, de 4 % dans l'Union européenne et dans la zone euro, voire de 4,5 à 5 % en Allemagne, au Royaume-Uni ou en Italie, le PIB de la France n'a décru que de 2 %. Ce n'est pas faire trop d'honneur au Gouvernement que de constater que sa politique a été la bonne. Le crédit a continué d'être distribué, au prix de discussions parfois franches avec les banques, et grâce au médiateur du crédit. La relance a joué autant sur le pouvoir d'achat que sur l'aide aux entreprises. Le soutien à l'investissement des collectivités territoriales a aidé à remplir les carnets de commandes.
Toutefois, il me semble que René Ricol, le médiateur du crédit, est parti un peu rapidement. Je voudrais être sûr que le fonds enfin constitué pour venir en aide aux entreprises est administré avec suffisamment de pragmatisme. (M. Charles Revet approuve) Quelques cas particuliers me laissent à penser qu'il est géré comme s'il s'agissait d'obtenir des rendements hyper satisfaisants. Je mets en garde l'équipe qui en est chargée et vous en dirai plus en aparté, monsieur le ministre.
Je me félicite de l'adoption par le Sénat, lors de la discussion de la première partie de ce texte, d'amendements présentés par Charles Guené et Christian Cambon relatifs au versement anticipé des attributions au titre du fonds de compensation de la taxe sur la valeur ajoutée (FCTVA). Ainsi, les collectivités territoriales, dont les investissements ont cru de près de 50 %, pourront poursuivre leur effort en faveur de la relance de l'économie.
Il est assez difficile de comprendre ce que recouvre, sur le plan budgétaire, la notion de plan de relance. Au plan macro-économique, le Gouvernement attribue à ce dernier 39,1 milliards d'euros sur les 141 milliards de déficit budgétaire en 2009. Les crédits de la mission « Plan de relance de l'économie » s'élevant à 12,6 milliards, ils représentent donc près de 30 % du déficit budgétaire. Il est incongru d'y avoir inscrit en 2009 la dotation de l'État au fonds stratégique d'investissement (FSI). Ces crédits seront-ils intégralement transférés avant la fin de l'année au compte d'affectation spéciale des participations financières de l'État, qui les versera ensuite au FSI ?
Avec 7,1 milliards, soit 6 % du déficit, le plan de relance est cinq fois moins important pour 2010 qu'en 2009. Grâce à la concentration de l'effort sur cette année, il a pu pleinement jouer son rôle d'amortisseur de crise. Les crédits de cette mission, dont la commission recommande l'adoption, sont de 4,1 milliards. Ils se répartissent entre la poursuite du financement des opérations engagées en 2009, la reconduction de mesures de soutien à la consommation et à l'emploi -prime à la casse, aide à l'embauche dans les TPE et revenu supplémentaire temporaire d'activité outre-mer (RTSA)- et les dépenses du fonds d'investissement social (Fiso). Maintenant que la machine économique fonctionne à nouveau, il importe de traiter les conséquences de la crise sur l'emploi et la situation sociale. Toutefois, pouvez-vous nous expliquer comment les crédits du Fiso pourront être consommés en 2010 alors qu'ils ont tant de mal à l'être en 2009 ?
Il n'y aura plus de plan de relance en 2011. Cette mission aura disparu et la PME que constitue votre ministère aura été dissoute. Les crédits correspondants ne participeront plus au déficit budgétaire, mais les 40 à 47 milliards dépensés pèseront toujours sur la dette de l'État. Une question se pose, qui reviendra également lorsque nous débattrons du grand emprunt en début d'année prochaine. Ce plan de relance aura-t-il été uniquement un amortisseur de crise ou aura-t-il aussi préparé l'avenir ? En quoi aura-t-il contribué à la reconstitution de notre croissance potentielle ? Qu'en restera-t-il une fois la crise passée ? Je veux croire que son apport a été décisif et j'espère que la France retrouvera sa croissance potentielle. (Applaudissements à droite et au centre)
M. Charles Revet, rapporteur pour avis de la commission de l'économie. - La France n'est pas le seul pays à avoir élaboré un plan de relance mais elle l'a fait de manière relativement originale, en privilégiant quelques principes simples. En 2009, elle s'en sort plutôt moins mal que ses principaux partenaires puisque le recul du PIB et la détérioration de l'emploi y sont moins marqués qu'ailleurs.
Premier principe, aucune dépense pérenne n'a été créée : chaque mesure obéit à ce critère de réversibilité. Ensuite, le plan ne s'est pas limité à une stricte logique keynésienne de stimulation de la demande globale mais il a également consisté en une politique de soutien aux entreprises. Il comprend donc deux blocs d'importance à peu près équivalente. Le premier rassemble les dépenses de soutien à la consommation et à l'investissement, avec une enveloppe de plus de 12 milliards en 2009 : un tiers est consacré au pouvoir d'achat, le reste sert à l'effort d'investissement de l'État et des collectivités.
Le second bloc rassemble les mesures de soutien aux entreprises, soit 13,5 milliards sous forme de remboursement anticipé de dettes fiscales, de subventions ou d'appui d'Oséo. Ces mesures, qui relèvent d'une politique de l'offre, étaient tout aussi nécessaires que les actions de relance keynésienne. Que les entreprises ferment par manque de clients ou par manque de trésorerie, l'effet est le même pour la croissance et l'emploi. L'équilibre trouvé entre les deux aspects de la politique de soutien à l'économie me semble bon.
A ceux qui estiment que les 12 milliards consacrés au pouvoir d'achat et à l'investissement sont insuffisants, je dirai que ces dépenses ne constituent que la partie visible de la relance keynésienne car les stabilisateurs automatiques liés à notre système de protection sociale ont joué à plein. En réalité, ce sont plus de 40 milliards d'euros qui ont servi à soutenir la demande globale, équivalant à plus de 2 % du PIB.
Le troisième choix fondamental qui a caractérisé le plan de relance français est son tempo, car il a été conçu pour agir massivement dès 2009. En additionnant les actions retracées par cette mission, le versement anticipé du FCTVA et les mesures fiscales à destination des entreprises et des ménages, l'effort financier représente près de 26 milliards pour 2009. Encore fallait-il que l'exécution soit à la hauteur des ambitions. Les retards constituent la principale difficulté rencontrée par les politiques de relance, qui interviennent souvent quand la reprise est déjà enclenchée. Le plan de relance français a échappé à ce défaut : le calendrier a été tenu. 80 % des dépenses prévues pour 2009 ont été mises en oeuvre à ce jour et la totalité aura été injectée dans l'économie à la fin de l'année.
L'exécution du plan de relance est donc un succès, dont il faut féliciter le ministre mais aussi une administration qui a su se mobiliser et se montrer réactive.
Je ne doute pas que le pragmatisme et le souci d'efficacité perdureront en 2010, année qui verra un désengagement de l'État moins marqué que prévu au départ ; en témoignent les 2,5 milliards d'euros inscrits à la mission « Plan de relance » et la reconduction des dispositifs de remboursement anticipé du crédit d'impôt recherche et du FCTVA. Les 35 milliards d'euros du grand emprunt viendront renforcer le soutien à la reprise. Après une relance massive en 2009, l'accompagnement de l'économie sera très soutenu en 2010.
Je souhaite que l'esprit de relance se maintienne après la crise. L'effort des pouvoirs publics pour accompagner les entreprises, les ménages et les collectivités ne doit pas rester exceptionnel. La vraie relance, celle qui mettra la France sur le chemin de la croissance et du plein emploi, passe par une évolution des rapports entre les citoyens et une administration trop souvent centrée sur le contrôle et la sanction au lieu du conseil et de l'accompagnement. La crise peut être l'occasion d'accélérer les mutations structurelles. La France est une, chacun doit apporter son concours pour contribuer à la croissance et à l'emploi. (Applaudissements à droite)
Interventions des orateurs
Mme Odette Terrade. - Le Gouvernement ne cesse de se féliciter de l'excellence de sa politique économique face à la crise. « Notre but est d'éliminer tous les obstacles à la création d'emplois et au maintien d'activités économiques sur notre territoire », a dit ici Mme Lagarde. C'est l'argument dont a usé le Gouvernement avant même la crise pour justifier le bouclier fiscal, l'allégement de l'ISF, les exonérations de cotisations sociales, les cadeaux fiscaux et les mesures inégalitaires de la loi Tepa. Caricature, direz-vous ; c'est votre politique qui est caricaturale. Le plan de relance, après le plan en faveur des banques, l'illustre parfaitement.
Cette mission, comme nous l'avions craint, est une compilation de dispositions disparates à l'efficacité desquelles on voudrait nous faire croire. Les crédits du programme exceptionnel d'investissement public ne sont que des autorisations de paiement gelées et non consommées sur lesquelles le Gouvernement a apposé le label « Plan de relance ». Le choix politique a été fait de conforter la prédominance financière. Le plan de relance se limite à accélérer des projets déjà engagés, soldant pour 2010, à hauteur de 371 millions, le financement des opérations débutées en 2009. Alors que le Gouvernement annonçait un plan de régénération du réseau ferroviaire de 13 milliards et un plan fret de 7 milliards, le budget transport baisse de 137,7 millions d'euros. Et les crédits du plan de relance à destination des transports durables sont bien minces au regard des 12 milliards de la suppression de la taxe professionnelle, des 15 milliards du bouclier fiscal et des 42,5 milliards que les financiers vont empocher au titre des intérêts de la dette de l'État.
Le programme 316 « Soutien exceptionnel à l'activité économique et à l'emploi » porte très mal son nom au regard des résultats, le Gouvernement ayant fait le choix de mesures qui ont déjà montré leur inefficacité. Le chômage a augmenté de 2 % en octobre, soit 52 400 demandeurs d'emploi supplémentaires ; et le fonds stratégique d'investissement (FSI), l'arme anticrise du Président de la République, s'est transformé en bombe contre l'emploi. On lit dans le bleu qu'il « pourrait aider des entreprises structurellement saines mais confrontées à des difficultés conjoncturelles afin de les accompagner dans leurs projets ». Mais on sait que certaines ne jouent pas le jeu. Que penser du comportement criminel de la multinationale Nexans qui a reçu 60 millions d'euros mais laissé sur le carreau 387 chômeurs ?
Vous avez souhaité desserrer la contrainte de financement pour les PME et les entreprises artisanales. Mais les résultats ne sont pas au rendez-vous, si l'on en juge par le nombre sans précédent de procédures collectives et, singulièrement, de liquidations judiciaires. Les dispositifs de soutien aux banques leur ont largement profité, bien moins aux entreprises qu'elles étaient censées aider. Le dispositif de médiation du crédit n'a pas eu les effets escomptés ; il ne saurait résoudre à lui seul, de toute façon, les problèmes des entreprises. L'action « Aide à l'embauche dans les très petites entreprises » présente les allégements de charges sociales comme la solution miracle ; c'est dire que l'accès au crédit n'est pas ce qu'il devrait être.
Le Gouvernement a annoncé que 22 milliards d'euros supplémentaires seraient mis à la disposition d'Oséo et que la Banque européenne d'investissement en distribuerait 30 ; mais aucun engagement ferme n'a été pris et on n'en trouve nulle trace dans le budget de l'État.
Quant au fonds d'investissement social, il paraît bien léger face à l'ampleur de la crise et à la faiblesse du budget de l'emploi. Il est certes essentiel de soutenir l'emploi des jeunes et de lutter contre la précarisation mais les crédits, 1,9 milliard, sont très insuffisants, ce que dénonçaient déjà les syndicats lorsque le Président de la République a installé le fonds. Ce montant n'a pas été relevé depuis. Nous estimons que son action est vouée à l'échec tant que la politique du Gouvernement ne sera pas réorientée. « Notre société ne peut accepter de laisser des jeunes sur le bord de la route » a dit le Président de la République. Comment ne pas être d'accord ? Mais comment aussi ne pas confronter ces belles paroles aux actions passées ? Le temps du contrat première embauche n'est pas si loin et les droits des salariés ne cessent d'être remis en cause. L'élargissement du revenu du RSA aux jeunes de moins de 25 ans est la mesure phare du plan Jeunes annoncé le 29 septembre dernier ; mais cette mesure ne bénéficiera pas aux plus précaires puisqu'il faudra avoir travaillé sans interruption deux ans à temps plein ou quatre ans à mi-temps pour y avoir droit -alors que 20 % des 18-25 ans vivent sous le seuil de pauvreté !
Le plan de relance ne répond pas à la crise sociale que traverse notre pays. Il coûte cher à l'État sans servir l'intérêt général. Nous voterons contre les crédits de cette mission.
Mme Annie Jarraud-Vergnolle. - « La France n'a pas besoin de plan de relance économique mais de réformes et d'une gestion rigoureuse » déclarait la ministre de l'économie il y a dix-huit mois. Il y a un an, à la suite de la faillite de Lehmann Brothers, le Président de la République présentait son arme anticrise, le plan de relance, et appelait à « refonder le capitalisme ». En déplacement dans le Var il y a peu, il a dressé un bilan flatteur de son action économique. S'il est vrai que l'on n'est jamais mieux servi que par soi-même, la confrontation avec la réalité s'impose.
En octobre, la consommation a progressé de 1,1 %, ce qui confirme sa bonne résistance. Elle a augmenté de 3,5 % sur un an et n'a pas été tirée uniquement par l'automobile. N'en déplaise au Président de la République pour qui soutenir la demande reviendrait « à verser de l'eau dans le sable » et qui juge que « si cela marchait, cela se saurait », les chiffres démontrent le contraire. Loin de produire mécaniquement de la dette, le soutien à la consommation provoque un choc de confiance chez les consommateurs et les chefs d'entreprise. Nous en avons d'autant plus besoin que le pouvoir d'achat, pénalisé par la remontée de l'inflation, devrait marquer le pas ce semestre. Avec un chômage élevé, des prestations sociales qui augmentent faiblement et des baisses d'impôts qui n'auront plus d'effet sur le comportement des ménages, c'est bien la consommation qui souffrira en 2010.
Les industriels, quant à eux, font preuve de la plus grande prudence et leur moral s'est dégradé en novembre. La prime à la casse a dopé le marché automobile. Mais qu'en sera-t-il une fois qu'elle aura disparu ? Que deviendront nos exportations en Allemagne lorsque Berlin aura mis fin à son dispositif de soutien ?
On ne peut que s'interroger sur la cohérence de la politique du Gouvernement qui, d'un côté, prévoit des baisses d'impôt dans son plan de relance et, de l'autre, gèle la prime pour l'emploi pour la seconde année consécutive. Il fait ainsi plus d'un milliard d'euros d'économies sur le dos des plus modestes, mais assèche une des rares sources de croissance, la consommation.
En reposant essentiellement sur des mesures de soutien à la trésorerie des entreprises -pour 11,5 milliards- et des investissements publics -pour 10,5 milliards- tout en ignorant la consommation, votre plan de relance aboutit à une logique de déséquilibre et de fragilisation. Cette politique néglige le présent au profit de la formation d'actifs et de revenus futurs. Ce choix a des conséquences immédiates en termes de dépôts de bilan et d'emplois : 500 000 demandeurs d'emplois supplémentaires. Dans un environnement déprécié où l'endettement atteint des records, on va mécaniquement vers de nouveaux prélèvements, comme le sont les baisses de remboursements sur médicaments.
Les collectivités effectuent 71 % de l'investissement public alors que le poids de leur dette dans le PIB, en recul de 0,7 %, n'est que de 6,9 %. Via le remboursement anticipé du FCTVA, elles ont engagé 54 milliards. Comme le dit le président Arthuis, cela aura constitué « un puissant levier en direction des entreprises locales ». Grace à Mme Bricq, le Gouvernement a pris conscience du risque qui pèserait sur les collectivités ayant souscrit une convention avec l'État qui ne réaliseraient pas leurs investissements dans les temps impartis. En loi de finances, ces dernières ont obtenu gain de cause, comme l'avait promis le Premier ministre devant le Congrès des maires. Ce dispositif est donc reconduit pour 2010.
Cependant, contrairement à ce qu'a dit le ministre devant la commission des finances, le Gouvernement refuse d'unifier le remboursement sur le mode le plus favorable. C'est extrêmement dommageable car la récente intégration du fonds dans l'enveloppe fermée des dotations contribue à l'asphyxie financière des collectivités territoriales en minorant artificiellement l'évolution de la DGF. Cela explique la tendance au reflux qui marque les investissements des collectivités territoriales.
S'y ajoute le manque à gagner de 2 milliards pour les départements du fait du recul de 9,5 % des droits de mutation, conjugué aux réformes en cours et aux menaces qu'elles font peser sur le devenir des finances des collectivités territoriales. Ces dernières appliquent donc le principe de précaution. L'inquiétude des élus est palpable. Certains d'entre eux ont suspendu les discussions budgétaires, d'autres attendent que les perspectives soient plus lisibles, certains ont dores et déjà renoncé à des projets.
Comment expliquer que ce plan de relance ne comporte aucune disposition relative à l'emploi, malgré les 500 000 nouveaux demandeurs d'emplois en un an ? Et ces chiffres sont sous-estimés car de nombreux chômeurs renoncent à chercher du travail. Les radiations pour défaut d'actualisation représentent 42,2 % des sorties de Pôle emploi.
Voilà en quoi ce plan de relance tant vanté par le Président de la République est insuffisant. Il est plus que temps que le Gouvernement prenne la mesure de son échec en matière de travail et d'emploi. Nous ne faisons pas de la valorisation du travail un simple slogan, nous voulons une politique clairement axée vers la croissance de l'emploi. Pour les chômeurs, il faut prolonger de six mois la durée d'indemnisation sur la base de 80 % du salaire ; étendre les contrats de transition professionnelle à l'ensemble des bassins d'emploi et porter la durée d'indemnisation à deux ans ; augmenter le coût des licenciements pour les entreprises qui versent des dividendes ou rachètent leurs propres actions. Tel pourrait être le socle d'un plan de relance visant le soutien de l'emploi. La crise n'est pas derrière nous ; une croissance de 0,3 % ne suffira pas à endiguer la hausse du chômage et de la précarité.
Si le Gouvernement ne s'engage pas dans une politique de soutien marquée à la consommation des ménages et des collectivités, s'il ne s'engage pas dans la bataille de l'emploi, les moteurs essentiels de notre économie risquent d'être mis à mal. (Applaudissements sur les bancs socialistes)
M. Jean-Pierre Plancade. - Je remplace au pied levé M. Collin.
La mission « Plan de relance » rassemble les moyens d'intervention et de soutien aux entreprises, au développement de leur activité et de l'emploi. Ses crédits, qui s'établiront à 4,1 milliards, sont en nette diminution par rapport à 2009.
Les chiffres de la croissance et du chômage ne cessent de s'aggraver, et je ne parlerai pas du nombre d'impayés de crédits à la consommation, du boom des dossiers de surendettement et des crédits revolving, multiplicateurs de pauvreté. Pourtant, certains signes récents tendent à montrer que la France voit le bout du tunnel : le PIB a augmenté de 0,3 % au deuxième trimestre, après avoir baissé de 1,4 % au premier. Pour autant, si la récession semble s'atténuer, nous n'en voyons pas les effets et la situation économique reste difficile pour les entreprises et très difficile pour les ménages. Néanmoins, il faut préparer l'après-crise et imaginer la croissance de demain, et donc engager des réformes structurelles en soutenant le développement des petites et moyennes entreprises, qui jouent un rôle important pour le maintien et de la création d'emploi. Elles représentent 97,3 % des entreprises et emploient 7 millions de salariés. C'est un secteur stratégique sur lequel l'État doit veiller et dont il convient d'accompagner le développement.
Pour lutter contre la tentation des délocalisations, il est urgent de créer un environnement, notamment par la remise de notre industrie au coeur de la politique économique de la France.
Le secteur automobile est touché par la crise depuis deux ans malgré le soutien dont il a bénéficié. II est menacé par la perte de compétitivité du site de production national du fait de la surévaluation de l'euro, de l'atonie de la demande en Allemagne et en Italie, du processus continu de délocalisation au bénéfice des pays à bas coûts salariaux et de l'absence de protection du marché européen. En 1992, le niveau moyen des droits de douane était de 14 %, contre 1 % à peine aujourd'hui. Le sauvetage de notre industrie automobile doit devenir une priorité absolue. L'enjeu est de taille : l'emploi de 3 millions de personnes est directement ou indirectement en cause, pour 10 % de notre PIB si l'on inclut les activités de commerce et de réparation. La construction automobile française rencontre des difficultés croissantes en Europe. Elle y est dominée par l'Allemagne pour les produits haut de gamme et doit faire face à une concurrence redoutable sur les gammes basses et moyennes. La logique libre-échangiste absolue, en l'absence de toute protection, peut conduire à la disparition potentielle des sites de production français : toute la production française pourrait être réalisée en Europe centrale et orientale ou en Asie, faute de protection du marché européen. Nous serions deux fois perdants, à l'exportation et à l'importation. Je regrette donc l'absence de taxe anti-dumping social et d'écotaxe pour égaliser les conditions de concurrence.
Le plan de relance s'applique également à l'aéronautique. Pour soutenir ses ventes, l'État a déboursé 5 milliards en 2009. Cette aide devait profiter à Airbus et à ses sous-traitants. Ces derniers sont, par nature, dépendants des grands groupes qui, eux-mêmes, dépendent de la générosité de l'État. Cependant, il est flagrant que plus une entreprise est petite, plus le maquis des aides semble inextricable, si bien que les PME ont beaucoup de mal à accéder aux financements régionaux, nationaux et européens. Rappelons que l'industrie aéronautique dans le sud-ouest, c'est 22 000 emplois directs, voire 50 000 si l'on compte les nombreux emplois induits par l'électronique, les composants, la métallurgie ou la mécanique. Près d'un emploi sur huit est lié à cette activité. Pourtant, les effets sur l'emploi et l'activité du plan de relance dans ce secteur ne sont pas à la hauteur des espoirs qu'il avait suscités. Les chiffres du chômage s'aggravent, les commandes ne sont toujours pas au rendez-vous et les entreprises subissent l'incertitude sur leur avenir.
Le RDSE ayant voté pour le plan de relance, il lui faut bien voter les crédits afférents... même s'il se montre très réservé sur ce que vous proposez aujourd'hui. (Applaudissements à droite et au centre)
M. Jacques Gautier. - Le 4 décembre 2008, alors que notre pays venait d'être frappé par la crise bancaire et financière mondiale, le Président de la République présentait un audacieux plan de relance de l'économie, de 26 milliards, résolument orienté vers l'investissement public et privé. Grâce à quoi, la France a mieux résisté à la crise que les autres pays occidentaux. C'est à mettre au crédit de la rapidité des décisions et de la justesse des choix du Gouvernement. Si ce plan devait permettre à la France de traverser la crise, il était également prévu qu'il se prolonge en 2010 afin d'accompagner la reprise économique. Ce projet de loi de finances contient donc des crédits supplémentaires afin de poursuivre certaines mesures engagées en 2009.
L'effort en faveur de la relance n'est pas que budgétaire. Il faut rappeler le rôle décisif du Fonds stratégique d'investissement, qui investit dans des entreprises stratégiques ou innovantes ; le rôle de la médiation du crédit ainsi que celui d'Oséo.
Plusieurs objectifs fixés pour 2009 ont été atteints. Les collectivités locales ont reçu plus de 3,8 milliards au titre du FCTVA, en contrepartie de leur engagement d'investir et de contribuer elles-mêmes à la dynamique du plan de relance.
Je peux témoigner que dans le département qui nous est commun, monsieur le ministre, plus de 85 % des communes ont accompagné le plan de relance et la récupération du Fonds de compensation de la TVA à l'année n-1 a permis à ma commune d'injecter 550 000 euros supplémentaires en faveur des entreprises et de l'emploi.
M. Charles Revet, rapporteur pour avis. - Voilà !
M. Jacques Gautier. - Le groupe UMP approuve donc sans réserve la reconduction de la mesure en 2010.
Au-delà, les entreprises ont bénéficié de nombreuses formes de soutien en même temps que les ménages les plus modestes se voyaient consentir des réductions d'impôt et des allocations spécifiques. Cet effort particulier du plan de relance en faveur de l'emploi sera prolongé en 2010 à hauteur de 12 milliards.
L'aide à l'emploi sera bien l'enjeu principal du plan 2010. Les politiques d'investissement en font aussi partie. Ainsi de l'équipement en matière de défense nationale, avec le lancement du troisième bâtiment de projection et de combat dont la marine avait besoin qui a assuré plus de 25 % du plan de charge des Chantiers de l'Atlantique.
Les choix du Gouvernement sont les bons et je salue l'action efficace du ministre (M. Jean Arthuis, président de la commission des finances, et M. Charles Revet, rapporteur spécial, approuvent) qui nous a chaque trimestre fait parvenir un rapport détaillé sur la mise en oeuvre du plan, dans une transparence totale qui mérite d'être saluée.
Il faut se féliciter doublement, de l'exécution des mesures en 2009 et du prolongement 2010, outil utile à la reprise. Notre groupe votera donc sans réserve ces crédits. (Applaudissements à droite et au banc des commissions des commissions)
M. Patrick Devedjian, ministre chargé de la mise en oeuvre du plan de relance. - Je remercie vos deux rapporteurs pour leur travail très fouillé. Je suis d'autant plus sensible à un soutien que je sais sans complaisance.
C'est la première fois que les mesures du plan de relance figurent au projet de loi de finances initial, qui donne la traduction budgétaire de l'annonce faite par le Président de la République, à Douai, il y exactement un an.
Le plan de relance est une initiative à la fois pragmatique et fédératrice, massive dans son financement et rapide dans son exécution, ciblée sur les secteurs ayant la meilleure capacité d'entraînement et temporaire pour ne pas créer de nouvelles charges structurelles.
Il ne s'agit pas non plus d'une action isolée. Elle s'inscrit dans une politique économique cohérente de sortie de crise et de rattrapage de la croissance potentielle.
C'est l'occasion de mettre en oeuvre une méthode de gouvernance inédite, marquée par le souci de la transparence, ainsi qu'a bien voulu le rappeler M. Jacques Gautier. Il importait que l'action menée soit parfaitement lisible.
Le plan de relance tourne à plein régime : 27,6 milliards ont été injectés dans l'économie, soit plus de 80 % des sommes mobilisées. S'il est légitime de se poser la question de la part qu'elles prennent dans le déficit, il est juste aussi de rappeler qu'il s'agit de dépenses utiles, créatrices d'activité, source d'emplois et de rentrées fiscales.
La crise nous condamnait de toute façon au déficit. Notre seul choix était de sa nature : nous avons fait celui du déficit d'investissement, qui produit un retour, et banni le déficit de fonctionnement.
Les pouvoirs publics ont agi sur tous les leviers : investissement public de soutien aux dépenses d'infrastructure des collectivités locales et des entreprises publiques, mesures de financement et d'aide à la trésorerie des entreprises pour éviter les faillites, mesures fiscales, interventions d'Oséo et, à plus long terme, prises de participation du FSI. Je confirme au président Arthuis que 2,94 milliards du fonds proviennent du plan de relance. Ensuite, et ceci pour répondre aussi à Mme Jarraud-Vergnolle, le FSI est fait pour éviter les délocalisations. Quand des PME innovantes, parfois leader mondial dans leur domaine, sont fragilisées par la crise, elles font l'objet de tentatives de prise de contrôle par des fonds internationaux qui se traduisent, si elles aboutissent, par la liquidation, le chômage et le captage de l'innovation, transférée à l'étranger : on perd sur tous les tableaux. Le FSI n'est pas un fonds social d'investissement mais un fonds stratégique d'investissement, destiné à maintenir sur le territoire national les entreprises porteuses d'avenir que la crise risque de balayer.
Certains nous reprochent de ne rien faire pour soutenir la consommation. C'est faux. Soutenir l'investissement, c'est soutenir les entreprises, donc l'emploi, donc la consommation via les salaires. Sans oublier les mesures de soutien direct aux publics les plus exposés, comme la prime de 200 euros distribuée à plus de 4 millions de foyers au titre du RSA, l'allocation spécifique de rentrée scolaire ou l'action du fonds d'investissement social, le Fiso, sur le fonctionnement duquel le président Arthuis a été sévère : il est vrai, monsieur le président, qu'il y a eu retard au démarrage mais c'est que le fonds a été créé par décret du 18 février 2009 tandis que le plan Jeunes n'était mis en place qu'à la mi-avril. (M. le président Arthuis le concède) Aujourd'hui, il fonctionne à plein et les crédits reportés seront bien consommés en 2010.
Je m'étonne que certains, au nombre desquels je ne compte pas M. Plancade car une critique constructive est toujours bienvenue, aient tout simplement passé par pertes et profits les vingt mesures du Fiso, parmi lesquelles celles relatives à l'activité partielle -que d'aucuns appellent chômage partiel-, aux CTP, à l'indemnisation du chômage, au plan Jeunes, notamment pour le développement de l'alternance. Au total, 1,9 milliard sont consacrés à ces mesures en 2009, et 1,4 en 2010. Dire que nous n'avons rien fait relève donc un peu de la caricature.
La hausse du chômage en octobre -52 400 chômeurs de plus- fut exceptionnelle par rapport aux mois précédents et principalement due à l'arrivée sur le marché du travail des jeunes issus du système scolaire. Souvenons-nous que le nombre de demandeurs d'emplois augmentait de 90 000 par mois en décembre et en janvier derniers ! Cette décélération considérable n'est pas l'effet du hasard.
Je remercie M. Gautier de son soutien sans faille et lucide.
Que restera-t-il du plan de relance après la crise ? Tout d'abord, il restera tout ce que la crise n'aura pas détruit, grâce aux interventions du médiateur du crédit et d'Oséo, grâce aussi aux mesures de soutien à la trésorerie des entreprises. De nombreux savoir-faire ont ainsi été préservés. Certains ont jugé intempestive la dotation de 100 millions d'euros destinée à la restauration des monuments historiques mais cette mesure a permis de maintenir au travail des ouvriers hautement qualifiés travaillant dans de très petites entreprises, comme les sculpteurs de pierre dont l'art aurait sinon été perdu. (M. Jean-Pierre Fourcade le confirme) C'est vrai aussi de certains métiers très spécialisés dans l'industrie automobile.
Grâce aux initiatives prises par le Président de la République au plan international, le système bancaire a été sauvé. On oublie trop que les épargnants envisagèrent un temps de retirer leurs avoirs des banques !
L'industrie automobile a été sauvée de l'effondrement grâce aux enveloppes de crédits allouées par le Gouvernement. Il est vrai qu'elle n'est pas tirée d'affaire, mais l'essentiel est préservé. L'État ne peut pas prendre la place des entreprises ! Je ne citerai aucun nom pour ne pas provoquer de polémique inutile mais les constructeurs qui ont su innover et diversifier leur offre se portent mieux que les autres. C'est bien le lieu de dire : « Aide-toi, et le ciel -ou plutôt le Gouvernement- t'aidera ! ».
L'État a également soutenu le secteur du bâtiment, qui occupe une place centrale dans l'économie française, en finançant près de 120 000 logements en 2009.
Les 1 000 chantiers ouverts par le Gouvernement ont permis de financer des projets d'avenir restés jusque-là en souffrance, faute de crédits. Les travaux réalisés pour améliorer l'accessibilité de la gare Saint-Jean de Bordeaux et l'extension des lignes TGV auront une utilité durable une fois la crise finie !
Les résultats sont là : la France est le pays d'Europe qui se porte le moins mal. (M. le président de la commission le reconnaît) Elle connaîtra une récession de 2 % cette année, contre 4 % en moyenne dans l'Union européenne et 5 % en Allemagne. Si nous avions suivi la politique préconisée par l'opposition, nous connaîtrions peut-être le sort de la Grande-Bretagne, qui privilégia la consommation et se trouva fort dépourvue quand la bise fut venue... (Marques d'admiration sarcastique à gauche) Nous sommes les seuls à avoir concentré nos efforts pendant l'année 2009 : 75 % des crédits du plan de relance ont été consommés cette année. Ce fut un choix cartésien car c'est en 2009 que la crise se fit sentir le plus durement.
Les mesures en faveur des collectivités locales produiront tous leurs effets en 2010. Elles sont destinées à être perpétuées : la réduction de deux à un an du délai de remboursement de la TVA est définitive, ainsi que diverses mesures de simplification.
Il s'agit donc d'un plan de circonstance, destiné à lutter contre la crise et à en amortir les effets, mais aussi d'un plan porteur d'avenir. (Applaudissements sur les bancs UMP et RDSE ainsi qu'au banc des commissions)
Les crédits de la mission sont adoptés.
M. le président. - Nous allons examiner la mission « Provisions ».
Provisions
M. Jean-Pierre Demerliat, rapporteur spécial de la commission des finances. - La mission « Provisions » est destinée à couvrir des dépenses indéterminées au moment du vote de la loi de finances, réparties en tant que de besoin en cours d'exercice et par voie réglementaire entre les autres missions. En vertu de la Lolf, elle ne comprend aucun objectif de performance. C'est la mission la moins dotée du budget général.
Conformément au rapport annexé à la loi de programmation des finances publiques pour 2009-2012, la réserve de budgétisation de 600 millions d'euros intégrée à la dotation pour dépenses accidentelles et imprévisibles et destinée à abonder exceptionnellement les crédits des missions en 2010 et 2011 a été répartie a priori à hauteur de 479 millions d'euros. Cette somme a permis de couvrir des besoins non programmés lors de l'élaboration du budget triennal, apparus notamment lors de la crise financière.
Le programme « Dépenses accidentelles et imprévisibles » est destiné à couvrir les frais occasionnés par exemple par des catastrophes naturelles survenues en France ou à l'étranger ou par des événements extérieurs nécessitant le rapatriement de Français. Il comprend 120 millions d'euros d'autorisations d'engagement et de crédits de paiement, ce qui correspond au reliquat de l'enveloppe de 479 millions d'euros.
Le programme « Provision relative aux rémunérations publiques » a vocation à financer les dépenses de rémunération des agents du secteur public dont la répartition par programme ne pourrait être déterminée à l'avance. Aucun crédit n'est demandé pour 2010 dans la mesure où l'ensemble des rémunérations ont été réparties a priori entre les programmes des autres missions. Dans la perspective d'une rationalisation des crédits et d'une meilleure lisibilité budgétaire, votre rapporteur spécial s'en félicite.
Sous le bénéfice de ces observations, la commission des finances recommande l'adoption des crédits de la mission. (Applaudissements sur les bancs UMP et RDSE ; M. Jean Arthuis, président de la commission des finances, applaudit aussi)
Mme Anne-Marie Escoffier. - La mission « Provisions » nous emmène bien loin des démarches budgétaires traditionnelles et des analyses prévisionnelles rigoureuses qui fondent les autres missions, et c'est bien normal puisqu'elle vise à couvrir des dépenses imprévisibles et exceptionnelles.
Elles recouvrent les crédits destinés à couvrir des dépenses dont on ignore totalement ce qu'elles pourront être au moment du vote de la loi de finances.
Des deux dotations qui composent cette mission, seule est abondée la dotation « Dépenses accidentelles et imprévisibles », celle relative aux rémunérations publiques ne faisant l'objet d'aucun crédit. Cette présentation traduit une saine gestion des dépenses de personnel au sein d'administrations attachées à arrêter très précisément les enveloppes budgétaires nécessaires à cette fonction.
Le programme 552 participe le plus souvent au financement d'opérations relevant de la solidarité nationale : catastrophes naturelles, rapatriement de ressortissants français. Sur ce programme avait été imputée une réserve de 600 millions pour abonder exceptionnellement les crédits des missions du budget général : 479 millions ayant été répartis, il reste 120 millions qui sont affectés au programme 552. Rien ne dit que cette provision sera nécessaire dans sa totalité. Ni en 2007, ni en 2008, l'enveloppe n'avait été consommée intégralement. En 2009, le taux de consommation devrait approcher 46 % sous l'effet de la vaccination de la grippe A. S'il s'agit bien là d'une dépense imprévisible, il conviendra à la loi de règlement pour 2009 de porter un avis sur l'utilisation des fonds affectés à ce programme et d'en vérifier le caractère imprévisible, accidentel ou exceptionnel.
Dans l'immédiat, il nous revient seulement d'entériner le niveau de la provision proposée. Notre groupe votera donc ce budget. (Applaudissements au centre et à droite)
Mme Anne-Marie Idrac, secrétaire d'État chargée du commerce extérieur. - En l'absence de M. Woerth, il me revient de commenter cette mission. Les propos de M. Demerliat et de Mme Escoffier ont été clairs : je ne serai donc pas longue.
Cette mission regroupe les crédits de deux dotations : il s'agit d'une part de faire face aux dépenses accidentelles et imprévisibles, et nous espérons tous que ces crédits ne seront pas nécessaires. En revanche, s'ils ont besoin d'être répartis, ce sera par décret pris par le ministre du budget. La vigilance du Parlement sera nécessaire et légitime.
La deuxième dotation est destinée aux mesures générales en matière de rémunérations : les administrations ont mieux travaillé cette année puisque nous avons été capables de répartir entre les missions les crédits en amont alors que l'année dernière, il avait fallu provisionner des crédits.
Enfin, je tiens à saluer la qualité du travail parlementaire sur cette mission. (Applaudissements à droite et au centre)
M. Jean Arthuis, président de la commission des finances. - Très bien !
Les crédits de la mission sont adoptés
Engagements financiers de l'Etat
M. le président. - Le Sénat va examiner les crédits de la mission « Engagements financiers de l'État » et le compte spécial « Participations financières de l'État ».
Interventions des rapporteurs
M. Jean-Pierre Fourcade, rapporteur spécial de la commission des finances. - Mon intervention porte à la fois sur la mission « Engagements financiers de l'État » et sur le compte d'affectation spéciale « Participations financières de l'État » qui représentent 49 milliards : je ne dispose que de cinq minutes pour vous présenter des observations sur une dépense considérable !
M. Robert del Picchia. - Cela fait cher de l'heure !
M. Jean-Pierre Fourcade, rapporteur spécial. - Ces crédits sont regroupés en quatre programmes : le programme « Charges de la dette et trésorerie de l'État » représente 96 % du total. J'abrège le suspense en vous indiquant que la commission des finances vous propose d'adopter ces crédits sans modification.
Je ne reviendrai pas sur la question de la dette, nous l'avons largement évoquée lors de notre débat du 25 novembre à l'occasion du vote de l'article d'équilibre. Nous en reparlerons longuement avec l'examen de la loi de finances rectificative relative au grand emprunt.
La dette de l'État est devenue perpétuelle depuis 2008 et les études économiques s'accordent sur le fait qu'elle aura beaucoup de mal à retrouver un niveau raisonnable par rapport au PIB.
Les crédits de la charge de la dette représenteront, l'année prochaine, 42,5 milliards. Or, ce budget contient à la fois une forte baisse du besoin de financement de l'État, qui passera de 253 milliards en 2009 à 212 milliards en 2010, et, paradoxalement, une hausse du plafond de variation de la dette négociable à plus d'un an qui va passer de 165 à 175 milliards, soit une variation relativement modeste. Tout le monde craint une augmentation des taux d'intérêt : il a donc été décidé de modifier la politique qui avait cours en 2009 et qui consistait à ralentir les émissions sur le marché international pour les émissions à moyen et long termes et à accélérer les émissions de bons du trésor à moins d'un an, qui représentent aujourd'hui une masse de 210 milliards.
Quelques observations sur les autres programmes : la dette garantie constitue une composante significative du hors bilan de l'État. Les crédits budgétaires sont faibles, 250 millions, mais le montant des garanties données par l'État a triplé entre 2005 et 2008 et dépasse aujourd'hui 75 milliards. Lorsque l'État n'a plus les moyens de dépenser, il garantit les emprunts des autres institutions. Ainsi vont les finances publiques en période de disette budgétaire...
Deuxième observation sur le financement des primes d'épargne logement, pour lesquels les crédits prévus par l'État sont insuffisants : les primes ne peuvent être payées que grâce aux avances du Crédit foncier.
M. Jean Arthuis, président de la commission des finances. - Hélas !
M. Jean-Pierre Fourcade, rapporteur spécial. - Le calibrage prévu pour 2010 permettra-t-il d'éviter ce recours contraire à tous les principes budgétaires et à la Lolf ? Nous n'avons trouvé ni dans le budget ni dans le collectif des données suffisamment précises. Je rappelle que la Cour des comptes fait de longs développements sur cette curieuse pratique chaque année.
J'en viens au compte d'affectation spéciale des participations financières de l'État. Avec la révision constitutionnelle, le Parlement va devenir un acteur plus important du dispositif de l'État actionnaire parfaitement géré par l'Agence des participations de l'État. Nous devrons émettre un avis sur les nominations à la tête des entreprises publiques. Il nous faudra utiliser pleinement ces nouvelles prérogatives.
Si l'on essaie de raisonner sur un plan patrimonial, il n'y a désormais plus de rapport entre le montant des actifs cotés de l'État, 100 milliards, et celui de sa dette, qui se monte à 1 250 milliards. Je regrette que ce ratio ait si profondément changé en quelques années. Une partie des participations financières de l'État est désormais détenue par un nouvel acteur, le Fonds stratégique d'investissement (FSI). La recherche de la cohérence de l'action publique en faveur des entreprises ne nous parait pas parfaitement organisée. Je souhaiterais vous entendre, madame la ministre, sur les rôles respectifs de la Caisse des dépôts et consignations, d'Oséo et du FSI.
J'en viens au plan Campus : le Gouvernement a fait vendre, il y a quelques années, une petite partie du capital d'EDF pour financer des opérations intéressant les universités et les nouveaux campus. Jusqu'à présent, cette somme n'a pas été dépensée. Quand envisagez-vous de le faire ?
L'Agence des participations a fait de la rémunération des dirigeants d'entreprise publique un axe important de son action. Quelle est la ligne du Gouvernement ?
Enfin, on nous dit chaque année que ce compte financera les opérations de désendettement de l'État. Entre 1997 et 2008, 35 milliards de recettes diverses ont permis d'y participer mais, depuis 2008, peu ou pas de crédits y ont été consacrés. Le chiffre prévu pour 2010 est-il vraiment fiable ?
Ma conclusion sera commune aux deux missions : il est essentiel que, dès l'année prochaine, une fois passé le débat sur le grand emprunt, la France adresse à ses partenaires et aux marchés des signaux tangibles de sa détermination à redresser ses finances publiques. Les déclarations récentes du Premier ministre et du ministre du budget vont dans le bon sens. Nous serons à vos côtés lorsque vous passerez aux travaux pratiques. (Applaudissements à droite)
Mme Bariza Khiari, en remplacement de M. François Patriat, rapporteur pour avis de la commission de l'économie. - - Cette année, mon collègue François Patriat a souhaité examiner le rôle réel de l'État dans la stratégie des entreprises dans lesquelles ce dernier détient une participation. Au terme de son analyse, il souligne que la mission de cet actionnaire est caractérisée par certaines spécificités.
Sur le compte d'affectation spécial, il est regrettable que l'information du Parlement reste limitée. Les élus sont mal informés des projets d'évolution de la structure du capital d'entreprises qui constituent pourtant des fleurons de notre industrie. Cette exigence de transparence est limitée par la nature même des opérations réalisées dans le cadre de ce compte. L'architecture du compte pour 2010 reste inchangée, celui-ci étant toujours piloté par l'agence des participations de l'État. Les priorités budgétaires demeurent elles aussi inchangées, 80 % des crédits, soit 5 milliards, étant consacrés au désendettement public. Je doute que ces sommes résolvent le problème de la dette de notre pays.
L'État actionnaire dispose d'un portefeuille très diversifié, d'un total de 539 milliards. S'agissant des sociétés cotées en bourse, le bilan est en demi-teinte puisque la valeur des participations de l'État dans ces entreprises a chuté et ne représente plus que 14,8 % de la capitalisation du CAC 40 en septembre 2009 contre 17 % un an auparavant. Heureusement, ses dividendes résistent puisqu'ils devraient s'établir en 2009 à 4,9 milliards contre 5,6 en 2008. Il faut tenir compte du pragmatisme de l'État qui a accepté des dividendes sous forme d'actions de certaines entreprises qui souhaitaient préserver leur trésorerie et leurs fonds propres. Malgré la baisse en valeur de dividendes, le taux de distribution est de l'ordre de 60 %, contre 40 % en 2008. Le Gouvernement soutient qu'« il s'agit d'un taux en ligne avec celui observé sur le CAC 40 ». Il s'agit surtout d'un taux record, jamais atteint depuis 2003 et en décalage avec la volonté affichée du Président de la République de minorer la rémunération des actionnaires au profit de l'investissement et des salariés.
J'aimerais attirer l'attention du Gouvernement sur les nombreuses carences qui subsistent dans la gouvernance des entreprises à participation publique. D'abord, dans la composition des conseils d'administration, comment accepter, madame le ministre, la sous-représentation des femmes ? Les entreprises du périmètre public comptent seulement 101 femmes contre 789 hommes, alors que l'État devrait être exemplaire. Depuis la dernière révision constitutionnelle, il est possible de légiférer sur ce point : une proposition de loi a été déposée par la présidente de la délégation aux droits des femmes de l'Assemblée nationale ; j'espère que le Gouvernement la soutiendra.
Quant à la rémunération des dirigeants des entreprises relevant du portefeuille de l'État, on ne peut passer sous silence le malaise qu'elle provoque dans l'opinion publique. Nous sommes nombreux à nous être étonnés des conditions posées par M. Henri Proglio pour assurer la présidence d'EDF, à savoir le doublement du salaire attaché à cette fonction. M. Proglio est un homme d'une grande qualité mais, en tant qu'élus, nous ne pouvons nous abstenir de relayer l'émoi de nos concitoyens quant à la rémunération de ces patrons. Le président de la commission des finances s'en est ému et le président Larcher a reconnu que « cette question devait être mise sur la table ». Il serait utile qu'une mission d'information du Sénat se saisisse de cette question globale de la gouvernance des grandes entreprises.
L'impératif de bonne gestion n'est en rien opposé à celui du développement industriel des entreprises dont l'État est actionnaire. Je pense notamment à la SNCF, aujourd'hui confrontée à la redéfinition de ses objectifs stratégiques dans le cadre de l'ouverture à la concurrence. Mais la création du fonds stratégique d'investissement peut-elle y suffire ? Ainsi, en matière de participation de l'État, si l'objectif est bien de préparer l'avenir en opérant les révolutions industrielles qui s'imposent, on ne peut qu'y souscrire. En revanche, s'il s'agit de multiplier les participations minoritaires -car il s'agit bien de la vocation du FSI aujourd'hui- sans vision d'ensemble de l'État propriétaire, alors nous faisons les plus grandes réserves. Vous ne serez donc pas surpris que François Patriat ait proposé à la commission de l'économie de s'abstenir sur l'adoption des crédits inscrits au compte d'affectation spéciale « Participations financières de l'État » et vous ne serez pas surpris non plus d'apprendre que cette même commission les a votés. (Applaudissements à gauche)
Interventions des orateurs
Mme Isabelle Pasquet. - Le débat sur la dette publique a commencé à occuper l'espace politique, notamment après l'annonce du grand emprunt, lequel, paré de toutes les vertus, servirait notamment à financer des investissements particulièrement utiles. L'État s'apprêterait à engager dans ce grand emprunt environ 36 milliards dont un gros tiers issu des remboursements anticipés des aides du plan de sauvetage des banques, les deux tiers restants étant levés sur les marchés financiers. Par ailleurs, on attend de certains investisseurs privés qu'ils portent à 60 milliards les sommes engagées dans les investissements stratégiques du grand emprunt. Et c'est là que les choses se gâtent. D'abord parce qu'associer fonds publics et fonds privés dans des investissements préjuge que ces investissements seront probablement soumis aux règles du partenariat public-privé, formule de financement pourtant critiquée, notamment par la Cour des comptes, et qui n'est pas nécessairement source d'économies. Ensuite, parce qu'on aurait pu s'éviter d'avoir à emprunter une somme trop importante si, au lieu des titres sans droit de vote que l'État a souscrit dans les banques, il avait acquis des actions en bonne et due forme, avec faculté, par conséquent, de peser sur les choix de gestion desdites banques. Le simple fait d'avoir accepté des titres à valeur figée au moment du plan de sauvetage aura coûté de 14 à 15 milliards à l'État, compte tenu du relèvement de la valeur des actions des banques recapitalisées.
Enfin, le grand emprunt est aussi destiné à faire disparaître du solde budgétaire l'essentiel des dépenses d'équipement civil qui y figuraient encore. C'est donc un nouvel outil de débudgétisation offert au Gouvernement pour « arranger » le solde budgétaire global, en réduisant -ou plutôt en déplaçant- certaines dépenses.
Reste la critique essentielle de quelques vertueux spécialistes qui ne voient dans ce grand emprunt qu'une nouvelle source d'endettement d'un État déjà fortement endetté. A la vérité, que pèsent les 36 milliards du grand emprunt au regard des 1 200 milliards que la dette publique atteindra en fin d'année ? Vous qui êtes si sourcilleux de l'état de notre dette publique, vous votez, avec constance et conscience, depuis des années et des années des décisions politiques, sociales et fiscales qui creusent les déficits publics. Combien ont coûté à l'État les différents ajustements de la taxe professionnelle depuis 1976 et quelle a été leur efficacité en matière d'emplois ? En 2007, vous avez voté un paquet fiscal de 15 milliards dont on se demande, deux ans après, ce qu'il a effectivement apporté en termes de croissance. Ces 15 milliards que vous avez votés ont bel et bien été utilisés et l'État emprunte pour faire face à ces moins-values ! Depuis vingt ans, toutes les politiques qui ont endetté l'État pour désendetter les entreprises ont nourri cette progression de la dette. C'est par une révision des dépenses fiscales existantes qu'on réduira l'endettement de l'État. Plus de dépense fiscale sans évaluation ! Plus de dépense fiscale lorsque l'emploi n'est pas développé et le chômage restreint ! C'est de cette manière, que nous réduirons les déficits. (Applaudissements à gauche)
Mme Anne-Marie Escoffier. - La mission « Engagements financiers de l'État » constitue, en volume, la troisième de cette loi de finances : 96 % de ses crédits sont consacrés à la charge de la dette et à la trésorerie de l'État, le reste portant sur les appels en garantie, l'épargne et le financement des primes épargne logement et, enfin, la majoration des rentes. Je me contenterai de traiter de cette mission pour souligner combien est préoccupant le financement de la dette publique. L'endettement de l'État représente 80 % de la dette des administrations publiques, qui s'établissait à 68 % du PIB en 2008 et qui devrait en atteindre 91 % en 2013. La charge de la dette est estimée à 42,5 milliards dans ce projet de loi de finances mais cette prévision reste aléatoire car trop d'éléments peuvent la faire varier, notamment le taux d'inflation et le niveau des taux d'intérêt. Comment la représentation nationale pourrait-elle se désintéresser de la croissance de cette dette abyssale -1 254 milliards, soit, en 2008, 28 000 euros par foyer fiscal ?
Je ne voudrais pas comparer la situation actuelle à la fin de l'Ancien Régime... Et je n'évoque pas le projet de grand emprunt qui, selon beaucoup, apporte de la confusion à la confusion et fait que le tableau de financement de l'État est « périmé avant d'être voté », comme le dit notre rapporteur. Perpétuelle fuite en avant vers la prochaine loi de finances rectificative ! Comment, dès lors, se faire une opinion ? Le groupe RDSE s'abstiendra. (Applaudissements sur les bancs socialistes)
Mme Anne-Marie Idrac, secrétaire d'État chargée du commerce extérieur. - Sur la dette, d'abord, je salue l'excellente présentation faite par M. Fourcade. J'en suis d'accord, il y a un paradoxe entre le niveau de la dette et celui de sa charge, les deux évoluant en ciseau. Exprimée en pourcentage du PIB, notre dette est comparable à celle de nos voisins. Nous sommes dans la moyenne et cela nous assure de bonnes conditions de financement sur les marchés. La crise a bien sûr un impact considérable : sur 116 milliards d'euros de déficit prévisionnel, 45 milliards sont structurels, le reste étant lié aux difficultés conjoncturelles.
M. Fourcade a évoqué le financement de l'épargne ogement. En 2010, la hausse des primes que devra verser le Crédit foncier de France s'explique par l'arrivée à maturité des plans d'épargne logement de 2000 et la clôture de ceux de 1999. Les moyens nécessaires sont prévus pour y faire face, 1,250 milliard d'euros. Il est vrai qu'il existe un décalage entre l'ouverture des crédits et le versement effectif des primes par le CFF ; il en résulte un découvert permanent de l'État auprès de cette institution. La situation s'est déjà améliorée durant l'exécution 2009 ; et en 2010, les crédits ouverts en loi de finances initiale seront, pour la première fois, supérieurs aux appels en provisions.
M. Jean-Pierre Fourcade, rapporteur spécial. - Parfait !
Mme Anne-Marie Idrac, secrétaire d'État. - Quant aux placements en titres EDF, je rappelle que le capital est réservé aux universités et à la dizaine de projets du plan Campus. Mme Pécresse négocie avec les collectivités et les universités la mise en oeuvre de ce plan. Pas un euro de capital n'a donc été encore consommé et les intérêts d'emprunt ne sont pas non plus entamés. Ils iront en totalité aux universités.
Je ne puis anticiper les décisions qu'annoncera le Président de la République dans les prochains jours à propos du grand emprunt. Celui-ci sera levé sur les marchés financiers et les 13 milliards d'euros prêtés aux banques et remboursés pourraient servir aussi à financer les opérations d'avenir. S'agissant de la gouvernance, nous respecterons les recommandations de MM. les anciens Premiers ministres Juppé et Rocard.
Dans les entreprises publiques, l'État exerce son rôle d'actionnaire de façon active. Je rappelle qu'Oséo n'a rien à voir avec les interventions en capital. L'agence des participations de l'État et le fonds stratégique d'investissement ont des objectifs voisins mais des missions distinctes. L'agence gère le portefeuille des participations historiques -et majoritaires- de l'État. Le FSI a été créé pour prendre des participations dans le capital d'entreprises stratégiques pour l'économie française et qui ont besoin de fonds propres. Ces investissements sont minoritaires et temporaires, ils concernent aussi bien des PME de croissance que des entreprises de taille moyenne, ou des grandes dont le capital doit être stabilisé.
Vous m'avez interrogée sur le calcul et le versement des dividendes. Le taux de distribution est d'environ 60 % pour les entreprises du CAC 40. Le total des dividendes perçus par l'État actionnaire en 2009 devrait s'établir à 4,9 milliards d'euros, en recul par rapport à 2008, 5,6 milliards. L'État a accepté de percevoir en 2009 une partie des dividendes en actions. Les entreprises publiques ont continué à investir massivement en 2008, 37 milliards d'euros contre 23 l'année précédente.
Au titre des recettes de privatisation, 5 milliards d'euros sont inscrits, comme les années précédentes. Il s'agit bien sûr d'un montant notionnel puisque nous n'avons pas l'intention de donner aux marchés un quelconque signal. Nous préservons ainsi les intérêts patrimoniaux de l'État. En outre, le montant des recettes est difficile à prévoir.
Concernant les dirigeants d'entreprise, je partage l'analyse de Mme le rapporteur sur le taux de féminisation. Les entreprises publiques font légèrement mieux que les groupes du CAC 40 mais des progrès sont encore à accomplir et l'État se doit de donner l'exemple. Nous serons également vigilants sur les rémunérations. L'agence a mis en place dans les entreprises dont elle a la charge des parts variables, fonction des performances, à la fois pour attirer les talents, tenir compte des responsabilités exercées et éviter certains excès du secteur privé. Enfin, Mme Lagarde a pris des initiatives afin que les dirigeants des entreprises publiques soient vigilants dans l'accompagnement du changement -je songe plus particulièrement au respect des salariés. (Applaudissements au centre et à droite)
Les crédits de la mission sont adoptés.
M. le président. - Le Sénat va examiner les crédits de la mission « Sport, jeunesse et vie associative » et articles 60, 60 bis et 60 ter.
Sport, jeunesse et vie associative
Interventions des rapporteurs
M. Michel Sergent, rapporteur spécial de la commission des finances. - Une fois n'est pas coutume, les crédits de la mission affichent globalement une nette progression : 1,1 % pour les autorisations d'engagement et 7,1 % pour les crédits de paiement. Toutefois, les crédits alloués au sport baissent de 7,6 % quand ceux de la jeunesse et de la vie associative augmentent de 60,5 %, tandis que ceux du programme « Soutien » restent stables.
Le projet initial du programme « Sport » faisait apparaître une division de plus en plus marquée entre les crédits dédiés au sport de haut niveau -plus de 80 % des 231,6 millions d'euros de crédits de paiement du programme- et à ceux du Centre national de développement du sport (CNDS), acteur du « sport pour tous ». Or, depuis l'examen de la mission par la commission des finances a été votée la suppression, à compter du 30 juin 2010, du droit à l'image collective (DIC). Que va devenir la ligne budgétaire correspondante, d'un montant de 26 millions ? Existe-t-il une marge ou ces crédits ne serviront-ils qu'à régler les non-perçus de l'Acoss en 2010 ? Quel sera le niveau de la dette de l'État à l'égard de cette dernière, compte tenu de l'ouverture de 20,6 millions d'autorisations d'engagement et de 16,5 millions de crédits de paiement à ce titre dans le collectif budgétaire ?
En outre, le plan de financement du CNDS ne me paraît pas tout à fait assuré car il intègre des recettes au titre des prélèvements sur les jeux en ligne pour une année pleine, soit 30 millions. Or le projet de loi libéralisant cette activité ne devrait entrer en vigueur qu'au milieu de 2010. Le compte n'y est pas !
Le coût des travaux de rénovation de l'Insep semble de nouveau déraper bien que je n'en aie pas été informé lors de mon récent contrôle : 5,5 millions d'autorisations d'engagement et 15,8 millions de crédits de paiement sont demandés. Les tarifs pratiqués par cet institut ont augmenté de plus de 40 % entre 2006 et 2010, ce que certaines petites fédérations auront du mal à supporter. A quoi servirait ce bel outil s'il n'accueillait pas les champions de demain, les petites fédérations étant de grandes pourvoyeuses de médailles lors des Jeux olympiques ?
Les crédits du programme « Jeunesse et vie associative » augmentent fortement en raison de la création du fonds d'expérimentation jeunesse (FEJ). A la dotation initiale de 45 millions s'ajoutent l'article 60 ter, adopté par l'Assemblée nationale, qui donne également pour mission au fonds de verser certaines allocations d'autonomie, et le service civique, objet d'une proposition de loi d'Yvon Collin actuellement en navette entre les deux assemblées. En revanche, les actions classiques du programme n'augmentent pas, bien au contraire, tels les crédits du fonds de coopération de la jeunesse et de l'éducation populaire (Fonjep) et des projets éducatifs locaux. Il faut laisser les innovations exister avant de les évaluer, mais que deviendront les expérimentations du FEJ ? Préparent-elles de nouvelles charges publiques ? Les projets doivent-ils être, à terme, autofinancés ? Quelle est la pérennité du fonds lui-même ?
Le recentrage sur la recherche des missions de l'Institut national de la jeunesse et de l'éducation populaire (Injep) se traduit par une forte réduction de ses emplois : 93 en 2008, 58 en 2010, 38 ensuite. Monsieur le haut-commissaire, pouvez-vous nous informer sur le reclassement de ces personnels et sur la perte de substance qui peut en résulter pour cet opérateur ?
Pour ce qui est du programme soutien « Conduite et pilotage... », le plafond d'effectifs pour 2010 s'élève à 6 401 ETPT, soit 413 de moins par rapport à 2009. Le nombre de véritables suppressions d'emplois s'élève à 122 avec la non-compensation de 53 % des départs à la retraite. Le rapprochement des structures « Jeunesse et sport » et « Santé-solidarité » se poursuit. Je souhaite que puisse toutefois perdurer la spécificité des missions « Jeunesse et sport », appréciées dans les collectivités territoriales.
Au bénéfice de ces observations et de l'adoption de ses amendements, la commission des finances a donné un avis favorable aux crédits de la mission « Sport, jeunesse et vie associative ».
M. Pierre Martin, rapporteur pour avis de la commission de la culture. - Le budget du programme « Sport » s'inscrit dans un cadre budgétaire contraint. Ses crédits passent apparemment de 224 à 227 millions d'euros mais à structure constante, ils baissent de 8 %. Les crédits consacrés au sport amateur s'élèvent à 10,1 millions, soit une baisse apparente de plus de 50 %, mais cette diminution s'explique par une redéfinition des rôles respectifs du ministère et du CNDS. Le premier se concentrera sur le soutien aux fédérations sportives et aux pôles ressources nationaux, le second deviendra l'opérateur exclusif pour le soutien aux actions territoriales en faveur du sport pour tous. Je suis favorable à ce partage des responsabilités et le renforcement du rôle du CNDS ne m'inquiète pas a priori. Toutefois, des informations plus précises sur le contrat de performance passé entre le CNDS et l'État nous convaincraient davantage de la pertinence de ce choix et éviterait la critique récurrente sur le désengagement de l'État dans le développement du sport amateur.
Le budget du sport de haut niveau est stable : 64 millions sont destinés à soutenir les fédérations sportives dans le cadre de conventions d'objectifs. C'est essentiel pour l'image de la France et la vitalité du sport amateur parce que les exploits des champions alimentent la passion des jeunes. La dotation de I'Insep est légèrement supérieure aux prévisions. Il me semble que l'incendie du centre nautique n'a pas été trop préjudiciable à l'entraînement des équipes de France, et je m'en félicite.
La suppression du DIC est une erreur et la méthode utilisée m'attriste : un amendement adopté en projet de loi de financement de la sécurité sociale a remis en cause un dispositif revu lors du dernier projet de loi de finances et non encore appliqué. La bataille n'est pas terminée pour les clubs professionnels. Le cinéma, considéré comme une économie fragile, est très protégé en France et les salaires énormes de ses stars ne sont pas critiqués. Le sport fait lui aussi partie de la culture populaire, on l'oublie trop, et il s'inscrit également dans un contexte économique concurrentiel. Nous trouverons à l'avenir d'autres pistes pour le soutenir et lui montrer la voie de la rentabilité.
Pour ce qui est de la lutte contre le dopage, l'évolution principale réside dans la transformation du financement de l'agence française de lutte contre le dopage : elle bénéficiera d'une partie de la taxe Buffet, dont le taux est augmenté. Je suis très favorable à l'attribution d'une ressource affectée à l'agence car cette autorité indépendante doit disposer d'une ressource propre et d'une dotation de l'État. Ce choix me paraît en outre plus judicieux que la création d'une taxe sur les licences sportives, qui aurait pesé sur la pratique amateur. Toutefois, l'entrée en vigueur dès le 1er janvier d'un dispositif qui met à nouveau à contribution les ligues professionnelles me paraît relever de l'acharnement. L'élargissement de l'assiette de cette taxe par le projet de loi de finances pour 2008 n'était devenu applicable qu'au 1er juillet suivant. Je vous proposerai un amendement allégeant un peu la contribution du sport professionnel grâce à une augmentation infime de la taxe sur la Française des jeux.
La commission de la culture a donné un avis favorable à l'adoption des crédits de cette mission. (Applaudissements sur les bancs UMP)
M. Jean-Jacques Lozach, rapporteur pour avis de la commission de la culture. - L'an dernier, j'ai déploré la baisse des crédits destinés à la jeunesse et à la vie associative et je me suis inquiété du fait que la loi de programmation des finances publiques prévoie un montant si bas pour les programmes de cette mission.
Avec une baisse de 10 %, l'impact aurait été catastrophique sur les associations et les collectivités territoriales auraient été inévitablement appelées à la rescousse, sans pouvoir toujours répondre. Ce scénario a heureusement été évité grâce à la prise de conscience du Gouvernement ; mieux vaut tard que jamais. La politique de la jeunesse ne méritait pas un tel dédain. Que M. Hirsch en soit remercié, qui lui a donné un nouveau souffle.
Le plafond de financement a été relevé de 85 millions -45 pour le Fonds d'appui aux expérimentations et 40 pour le service civique- dont 11 proviennent d'une nouvelle répartition des crédits au sein de la mission. C'est là que le bât blesse. Qui a-t-on déshabillé ? Les victimes collatérales sont les subventions aux fédérations, les projets éducatifs locaux et les programmes « Parcours animation sport ». Les subventions en faveur des fédérations nationales et régionales au titre des projets relatifs à la vie associative vont baisser de plus de 8 % en raison, semble-t-il, de la division par trois des conventions annuelles passées entre l'État et les fédérations. Quelles en sont les justifications ? Les crédits consacrés au dispositif « Envie d'agir » baissent fortement depuis 2008. Pourquoi ? Le ministère a-t-il réduit, en 2009, le nombre de projets soutenus ou a-t-il diminué le soutien apporté à chaque projet ? Qu'en sera-t-il en 2010 ?
Les crédits finançant les projets éducatifs locaux régressent de 4,8 % ; la baisse est tendancielle, qui ne sera pas sans conséquence au niveau local. J'avais souhaité l'an dernier que l'inspection générale de la jeunesse et des sports évalue l'impact de ces projets et leur effet de levier ; je réitère ce souhait. Les crédits consacrés à l'Injep sont en forte baisse du fait du recentrage de l'institut sur ces missions. Pouvez-vous nous en dire plus, notamment dans la perspective du pilotage du service civique ? Enfin, les sommes consacrées au « Parcours animation sport » dans le programme « Jeunesse et vie associative » subissent une diminution drastique de 40 %. Le dispositif est-il inefficace ? Comment expliquer le maintien de crédits constants pour le même parcours dans le programme « Sport » ? (Applaudissements sur les bancs socialistes)
Interventions des orateurs
Mme Anne-Marie Escoffier. - Tout le monde reconnaît la fonction fédératrice et socialisante des associations, les valeurs, si nécessaires en ces temps de crise, du sport et du monde associatif, la cohésion, la mixité, la fraternité. Chacun se souvient de la Coupe du monde de football et de la consécration de l'équipe de France en 1998, exemples d'une unité nationale fraternelle ; chacun de souvient de la liesse de tout un peuple qui ne se préoccupait pas, alors, d'identité nationale...
Au premier abord, cette mission qui, avec 849,4 millions d'euros, progresse globalement de 7 %, semble satisfaisante. Mais, à y regarder de plus près, on note une diminution des crédits du programme « Sport » de 7 % en crédits de paiement au détriment du sport pour tous tandis que le sport de haut niveau reste privilégié. L'État conserve le pilotage national et le soutien aux fédérations et laisse au CNDS le pilotage territorial et le sport pour tous. A l'État, 182 millions d'euros, en progression de 11 % ; au CNDS... 10,2 millions, il est vrai sans compter ses autres ressources. La vision élitiste perdure. Les ressources affectées au CNDS sont plutôt aléatoires -ce sera aussi le cas de la probable contribution de 1,3 % sur les mises des paris sportifs de la Française des jeux. Il serait utile de procéder à une évaluation approfondie de tous les dispositifs concourant à la promotion du sport ; sport professionnel et sport amateur auraient tout à y gagner.
Le programme « Jeunesse et vie associative » voit ses crédits progresser de 60 % ; il est composé de trois actions toutes essentielles au développement d'une politique participant pleinement à l'effort de solidarité nationale. Comme vous le savez, le groupe RDSE est très attaché au service civique ; sa proposition de loi a récemment été adoptée à l'unanimité par le Sénat. L'action disposera de 40 millions d'euros en autorisations d'engagement. Les esprits chagrins diront que le texte n'est toujours pas inscrit à l'ordre du jour de l'Assemblée nationale et qu'il est peu probable que l'enveloppe soit consommée. Le dispositif n'en suscite pas moins un vif intérêt. Conjuguée à celle du Parlement, la détermination du Gouvernement devrait permettre de recruter 10 000 volontaires en 2010.
Je souligne la nécessité de maintenir au même niveau les crédits du Fonds de coopération de la jeunesse et de l'éducation populaire, seule ressource dont disposent bien souvent les associations pour employer des salariés. Comment comprendre leur baisse alors qu'est conforté le Fonds d'appui aux expérimentations, qui est animé par ces salariés des associations ? Au moment où les collectivités territoriales s'inquiètent de la baisse de leur budget, elles auront du mal à se substituer à l'État...
Face à une politique qui se cherche, le groupe du RDSE, même s'il comprend les contraintes budgétaires, aurait souhaité un budget à la hauteur des ambitions qu'il nourrit pour le sport et la vie associative. Il ne pourra que s'abstenir.
M. Jean-François Voguet. - Depuis la mise en oeuvre de la Lolf, les modifications de périmètre masquent régulièrement les évolutions de cette mission. Une chose est sûre, cependant : la hausse des crédits, de 790 à 849 millions d'euros, n'est qu'apparente ; 85 millions y sont en effet inscrits pour le service civique et le Fonds d'expérimentation jeunesse, qui seront financés sur le compte des autres actions -dont les crédits baissent de 26 millions. En 2007, le budget de la mission était encore de 780 millions ; il sera en 2010, à périmètre constant, de 764 millions...
Ce budget est celui d'une mission dévaluée et d'une administration en voie de démantèlement. Les restrictions budgétaires touchent tous les programmes, certaines actions subissant même des baisses de plus de 50 % en trois ans. Les deux nouvelles actions du programme « Jeunesse » ne sont que des expérimentations à l'avenir, par définition, incertain. Nous sommes donc loin des envolées lyriques et des promesses de campagne... Ce budget, qui touche à la vie quotidienne de millions de nos concitoyens et concerne tous les jeunes de notre pays, ne porte pas la marque d'une volonté politique.
Dans le domaine du sport, le désengagement de l'État s'accélère. A périmètre constant, le budget du programme « Sport » baisse de 8 %. Il est vrai qu'il faut aussi prendre en compte les recettes affectées au CNDS ; mais la hausse incertaine de ses ressources ne compense pas la baisse de 17 millions du programme, ni les missions supplémentaires qui lui sont désormais confiées -le financement de l'Agence française de lutte contre le dopage pour 4 millions et le soutien aux événements sportifs pour 4 autres millions, sans compter le financement de l'accompagnement éducatif qu'il assume depuis l'an dernier. Chacun sait que le centre manque de moyens ; iI ne subventionne qu'environ 50 % des dossiers et sa participation n'est en moyenne que de 9 %. C'est pourquoi nous avons défendu, en première partie, un amendement portant le prélèvement sur la Française des jeux à 2,9 %, comme cela était le cas en 2005 ; nous défendrons un amendement pour augmenter la taxe Buffet à son profit.
Par quelque côté qu'on prenne ce budget, il manque une bonne trentaine de millions pour poursuivre les actions engagées.
Dans ces conditions difficiles pour tout le mouvement sportif, nous condamnons particulièrement la disparition des financements d'État en faveur du sport pour tous. En 2007, après une baisse de 20 millions, les montants disponibles pour cette action s'élevaient encore à 35 millions ; ils seront de 10 millions cette année. Voila votre bilan.
Ce choix est socialement injuste ; il est sportivement dangereux. Il y a encore trois ans, 8 millions d'euros servaient à favoriser l'accès à une activité sportive pour les handicapés, les jeunes, les femmes et les familles en difficulté. Cette action ministérielle a disparu, ce qui nous fait encore plus regretter que des sommes très importantes grèvent ce trop faible budget pour aller dans des poches déjà pleines. Je veux parler ici du DIC, que nous avons toujours combattu, et des 7 millions que nous offrons aux actionnaires du Consortium Stade de France, au détriment des clubs et de ceux qui en auraient vraiment besoin. La convention qui nous lie à ce Consortium étant une loi, il nous revient de revenir dessus. La décision de supprimer le DIC, qui a été prise dans la loi de financement de la sécurité sociale, doit trouver une première application avec la diminution des provisions prévues dans ce budget ; les sommes dégagées pourraient renforcer l'action 1 en faveur du sport pour tous.
Le désengagement de l'État fait aussi des ravages du côté de la jeunesse et de la vie associative. A périmètre constant, la baisse y est de 10 %. En trois ans, depuis que vous êtes aux affaires, le budget de ce programme aura baissé de 20 %. Il y a certes 85 millions pour le service civique et des expérimentations mais pour toutes les autres actions, l'heure est aux restrictions. Pour les actions favorisant la participation des jeunes, la baisse est de 16 %. Pour leur accès aux loisirs, la baisse est de 19 %. Pour les échanges internationaux, la baisse est de 4 %. Pour l'Injep, la baisse est de 23 % alors que cet organisme devra s'occuper, en plus, du service civique. Pour la protection de la jeunesse, la baisse est de 10 %. Les premières victimes seront les jeunes. Des 8 millions qui, en 2007, étaient provisionnée pour l'action « Envie d'agir », il n'en reste plus que 2,7.
Les associations aussi vont souffrir. Les aides attribuées dans le cadre des plans éducatifs et des partenariats locaux auront baissé de 22 % en trois ans. Dans le cadre de l'action en faveur du soutien à l'emploi, à la formation et au fonctionnement des associations nationales, la baisse est de 7 % en un an et de 14 % en trois ans.
Avec tout cela, vous ne vous étonnerez pas de notre décision de voter contre ce budget. (Applaudissements sur les bancs CRC-SPG)
M. Jean-Jacques Lozach. - Au fil des années, le fossé se creuse entre la place qu'occupe le sport dans la vie quotidienne de nos concitoyens et le sort que l'État lui réserve. Toujours aussi éloigné des promesses de 2007, ce budget 2010 ne réduira pas cette fracture. Madame la secrétaire d'État, je vois une distorsion préoccupante entre cette réalité budgétaire et votre discours offensif et ambitieux du 6 octobre.
L'évolution du sport et des activités physiques se structure autour de quatre fonctions sociales : un loisir, une pratique éducative, une activité compétitive et une économie, voire une industrie. Le rôle de l'État doit être de favoriser l'accès de tous à toutes ces dimensions d'un sport devenu un incontournable phénomène de société. Or, avec les objectifs assignés au CNDS, vous officialisez une priorité écrasante pour le seul sport de haut niveau. Nous ne le négligeons pas, ni son effet d'entraînement sur la jeunesse ; et nous ne nous satisfaisons pas de constater, à chaque olympiade, le recul de la France dans la hiérarchie sportive mondiale. Mais l'implication de la sphère privée dans le financement du sport ne doit pas occulter le fait que le mouvement sportif puise ses forces dans les missions de service public assumées par les clubs et leurs bénévoles.
Les associations, depuis plus d'un siècle, jouent un rôle fondamental. Les Français les placent en tête des organisations auxquelles ils font confiance. Nous semblent dramatiquement insuffisants les crédits consacrés au développement des pratiques sportives pour tous, à l'activité et au fonctionnement du mouvement sportif national ainsi qu'à la promotion des métiers du sport.
Le retard pris par la modernisation de l'Insep va engendrer de nouvelles dépenses. Il va falloir remédier aux carences en personnel technique de la part du partenaire privé, malgré les termes de son contrat.
Malgré la loi du 5 avril 2006 contre le dopage, les crédits de cette action atteignent seulement 15,9 millions en 2010, après avoir régressé en 2009 et stagné lors des exercices précédents. Il aura fallu vingt ans pour que les États et le mouvement sportif se dotent d'une vision et de règles communes, et l'on en est encore à s'inquiéter, lors de chaque exercice budgétaire, des moyens bénéficiant à l'Agence française de lutte contre le dopage !
Un mot sur les paris en ligne. A travers la reconnaissance du droit d'exploitation pour les organisateurs d'événements sportifs, le football et le tennis seront les sports gagnants de la répartition des mises. On va rater l'occasion de réduire les disparités abyssales existant entre les sports les plus médiatiques et les sports les plus démunis mais de valeur éducative non moindre. Comment alors progresser vers l'unité du sport, justement vantée par le président du CNOSF ? Je crains qu'à brève échéance, le sport ne se retrouve au centre de tractations entre chaînes de télévision et opérateurs de jeux et paris.
Les parlementaires socialistes n'avaient pas voté l'institution du DIC en 2004, dispositif vivement critiqué par la Cour des comptes qui le présente comme un simple effet d'aubaine pour les employeurs de 1 444 contribuables aux revenus très élevés. La compétitivité des clubs français ne passe pas par des avantages fiscaux exceptionnels mais par l'adoption de règles européennes mettant nos clubs à égalité de chance avec leurs homologues ainsi que par la rénovation de stades. Nous trouvons cependant inélégantes les conditions de sa suppression, en cours de saison. Si le DIC coûte à l'État 32 millions, le déficit de la sécurité sociale devrait dépasser les 30 milliards. S'attaquer à d'autres niches eût été plus pertinent.
Les crédits inscrits au CNDS comportent 15 millions provenant des mises sur les paris en ligne, et cela sans aucune assurance. Il serait même aventureux d'affirmer que le vote de la loi concernée interviendra avant la prochaine coupe du monde de football. Après la déconvenue de la candidature de Paris aux Jeux olympiques 2012, il importe de créer les conditions favorables à la candidature de la France à Euro 2016. Vu la vétusté de nos infrastructures, le défi n'est pas mince. L'État s'engage à hauteur de 150 millions ; il faudrait se montrer plus ambitieux car les financements privés seront freinés par la crise. En souhaitant, que la main frauduleuse de Thierry Henry ne nuise pas à la candidature française...
L'État mise sur les collectivités locales pour financer le sport, en contradiction avec le sort institutionnel, financier et fiscal que la suppression de la TP et la réforme des collectivités locales leur réservent. Privée du recours à la clause de compétence générale, régions et départements ne seraient plus en mesure de soutenir les associations et de financer les équipements alors qu'ils investissent chaque année un milliard dans le sport, soit cinq à six fois le montant du CNDS. Nous voyons là un risque sérieux d'aggravation des disparités territoriales en matière d'animation sportive, risque accru par la revue générale des politiques publiques qui va éloigner les services déconcentrés de l'État du mouvement sportif.
Je termine sur deux questions. Quelle est votre ligne de conduite face aux Creps ? Quel rôle va jouer l'Insep dans leur pilotage ?
M. Christian Demuynck. - Je ne peux que me féliciter de l'engagement pris par le Président de la République et le Gouvernement en faveur des jeunes. C'est la première fois depuis très longtemps, en fait depuis l'époque d'un autre haut-commissaire, Maurice Herzog, que l'on a la volonté de mettre en oeuvre une véritable politique de la jeunesse. L'annonce du plan « Agir pour la jeunesse » en est l'illustration. Je tiens également, monsieur le haut-commissaire, à saluer votre implication et votre ténacité à défendre l'intérêt des jeunes. Votre engagement conduit à mieux les respecter et ainsi redistribuer les cartes pour leur donner des atouts dans une perspective d'intérêt général. Ce sont vos principes qui ont guidé les réflexions de la mission d'information sénatoriale sur la politique en faveur des jeunes, présidée par Raymonde Le Texier et dont j'étais le rapporteur.
Nous devrions tous nous réjouir que le programme « Jeunesse et vie associative » augmente de 61 %, passant de 120 à 193 millions d'euros. Cela traduit les engagements du Président de la République et votre combativité, monsieur le haut-commissaire. Le programme bénéficie de l'intégration de deux nouvelles lignes de crédit : les 45 millions du fonds d'expérimentation pour la jeunesse et les 40 millions du service civique. Malgré l'état très dégradé des finances publiques, c'est une évolution concrète très favorable. Il est facile de dire que la jeunesse d'un pays est son avenir, son capital, qu'elle est confrontée au défi d'un monde en crise. Il est plus difficile d'agir. C'est le rôle du Gouvernement et du Parlement de mettre en place une politique de la jeunesse qui ne soit pas de l'assistanat.
Trop longtemps, la France n'a pas offert à sa jeunesse les perspectives d'avenir auxquelles elle pouvait prétendre. J'en veux pour preuve le nombre de jeunes chômeurs, qui est l'un des plus élevé d'Europe. Rien d'étonnant qu'ils ne croient pas en l'avenir, ni aux femmes et aux hommes politiques. Nous devons tourner cette page et bâtir une politique qui leur donnera à tous une chance, quels que soient leurs origines, leurs talents, leurs aspirations.
La mission sénatoriale a défendu l'idée d'une politique qui facilite leur insertion sociale et professionnelle, ainsi que leur autonomie. Le Sénat a voulu un service civique ambitieux qui sera consacré à des activités d'intérêt général. Je souhaite qu'il devienne une étape indispensable dans leur parcours de vie. Cohésion sociale et mixité sont ses deux maîtres mots. L'action n°1 du programme relatif au développement de la vie associative et à la promotion de l'engagement citoyen est dotée de 51,6 millions contre 16 en loi de finances initiale pour 2006 !
Existe déjà un dispositif relatif au service civil volontaire, qui concerne principalement des volontaires associatifs -à 90 %- mais aussi le volontariat civil de cohésion sociale et de solidarité, le volontariat civil à l'aide technique ou encore le volontariat de prévention, sécurité et défense civile. La dotation de 40 millions au service civique n'est pas un chiffre établi à la légère, elle correspond au coût réel du dispositif. La réforme du service civique doit rassembler les principaux dispositifs actuels de volontariat sous un statut homogène pour les rendre plus lisibles, et donc plus attractif.
Il s'agit, en somme, de rationaliser les fonctions du volontariat, de valoriser le service civique dans le parcours des jeunes et de faire monter le dispositif en puissance pour qu'il concerne davantage d'entre eux.
Le soutien financier de l'État est là mais le dispositif n'est pas encore au rendez-vous. J'ai l'espoir, monsieur le haut-commissaire, qu'au lieu de demander une réduction des crédits, vous pressiez l'Assemblée nationale de mettre le texte à son ordre du jour. Nous avons les moyens d'agir, saisissons-en l'opportunité.
En matière sportive, le Gouvernement a déposé un amendement de suppression de l'article 60. Il me semble de bon sens, en effet, dès lors que l'initiative parlementaire a supprimé le droit à l'image collective, de ne pas maintenir le dispositif initialement prévu de majoration de la taxe sur les retransmissions d'événements sportifs : le contraire ressemblerait à de l'acharnement et menacerait les équilibres économiques des clubs. Comment sera financée, cependant, l'agence française de lutte contre le dopage ? Il me semble qu'elle devrait pouvoir bénéficier d'une partie des 26 millions d'économies liées à la suppression du droit à l'image collective. Les versements pourraient être étalés pour éviter le décalage dans le temps.
Je voterai les crédits de cette mission qui prennent en compte les besoins de notre jeunesse. (Applaudissements à droite)
Mme Bernadette Bourzai. - Je ne partage pas l'enthousiasme de M. Demuynck, pas plus que les acteurs du secteur jeunesse et vie associative, dont l'état d'esprit est à la morosité.
Ce ne sont pas les crédits « Jeunesse et vie associative » qui vont aggraver le déficit : ils reculent de 7,2 % malgré l'effet d'optique que crée leur présence dans un programme gonflé de 60 % par l'introduction de crédits affectés à la mise en place du fonds d'expérimentation jeunesse et du service civique.
Les bénéfices sociaux des nouvelles mesures annoncées compenseront-ils cette réduction des moyens consacrés au monde associatif de la jeunesse et de l'éducation populaire ? J'ai bien peur que non. D'autant que la réforme des collectivités locales qui se profile laisse craindre le pire.
Il n'est pas inutile de rétablir quelques chiffres dans leur vérité, c'est-à-dire à périmètre constant. Ce sont 12 millions que l'État économise, par rapport à 2009, sur le dos des associations. Après une diminution de 12 % en 2009, les crédits consacrés au développement de la vie associative reculent de 4 %. Quant au désengagement en matière de formation des bénévoles, il est préoccupant. Alors que les besoins sont criants et que les coûts des stages sont de 36 euros par jour dans la fonction publique territoriale et de 50 à 150 euros dans le privé, l'État octroie généreusement 23 euros.
L'action des associations se construit dans la durée. Arrêter un financement n'est pas économiser mais gaspiller les efforts antérieurs. Le Gouvernement doit assumer son partenariat historique avec les associations. Leurs projets sont souvent développés dans la durée grâce à des programmations pluriannuelles et l'on ne saurait prendre prétexte d'une pseudo mise en conformité avec la réglementation européenne pour précariser les conventions pluriannuelles d'objectifs ou les supprimer purement et simplement.
L'inquiétude des associations proches de l'éducation nationale est particulièrement vive, en milieu rural et dans les zones urbaines défavorisées. Vous nous dites qu'avec le développement du service civique, elles s'y retrouveront. Mais la réorganisation déterminera tout : des moyens sont nécessaires pour la soutenir.
Votre vision des politiques en faveur de la jeunesse se fonde sur une approche très sociale, certes nécessaire en cette période de crise, mais la remédiation sociale et l'insertion ne doivent pas reléguer au second plan la citoyenneté, la culture, les loisirs. Or, la rhétorique officielle inquiète. Le chef de l'État multiplie des interventions qui sont autant de contresens sur l'engagement d'hommes comme Guy Moquet, Marc Bloch ou Albert Camus, mis au service d'une propagande bien loin de l'engagement altruiste et désintéressé, valeurs qui fondent l'esprit associatif. Le temps libre est stigmatisé par des slogans simplistes sur le modèle du « travailler plus pour gagner plus », qui marchandisent le quotidien. La diminution de 10 % des crédits « Accès à des loisirs de qualité » et « Protection des jeunes » est symptomatique.
Vous faites pire, vous mettez les associations en concurrence avec le privé. La ligue de l'enseignement considère que c'est là le plus grave. Monsieur le haut-commissaire, comment pouvez-vous rassurer les associations qui s'interrogent sur les intentions du Gouvernement à leur égard ?
La suppression progressive des mises à dispositions des personnels détachés de l'éducation nationale ajoute à la difficulté.
La menace, enfin, de suppression de la clause de compétence générale des collectivités, M. Lozach l'a rappelé, est extrêmement sérieuse pour les associations. Je connais votre attachement, monsieur le haut-commissaire, aux missions locales. Comment pourra-t-on continuer de les financer ?
M. Martin Hirsch, haut-commissaire aux solidarités actives contre la pauvreté, haut-commissaire à la jeunesse. - Je vous répondrai.
Mme Bernadette Bourzai. - Nous ne pouvons accepter des mesures qui mettent à mal le maillage essentiel assuré par le monde associatif et voterons l'amendement déposé par la commission des finances qui vise à abonder les crédits du Fonjep et ceux destinés aux projets éducatifs locaux. (Applaudissements sur les bancs socialistes)
Mme Maryvonne Blondin. - Je m'associe aux préoccupations exprimées par M. Lozach, notre rapporteur pour avis. Si augmentation des crédits il y a, elle est liée au fonds d'appui aux expérimentations en faveur des jeunes et au service civique.
Qu'en est-il d'une dimension importante de cette mission, qui doit favoriser l'égal accès des enfants aux loisirs, aux vacances et de l'éducation populaire ? Ce projet de loi de finances aurait pu être l'occasion de donner écho à la proposition de loi déposée en juillet 2008 par notre collègue député M. Juanico. Ce n'est, hélas, pas le cas.
Et que dire de la convention européenne des droits de l'enfant, qui, dans son article 31, lui reconnaît le droit au repos et aux loisirs et celui de participer à la vie culturelle et artistique ? Pourtant, en France, 3 millions d'enfants, chaque année, ne partent pas en vacances et 2 millions de ces jeunes de 5 à 19 ans n'ont jamais même l'occasion de s'évader du quotidien le temps d'un week-end. J'ai rappelé, lors des débats sur le budget « Culture », combien l'éducation artistique et culturelle était gage d'ouverture d'esprit : le même constat vaut pour les vacances, qui ouvrent au monde et aux autres, favorisent la compréhension mutuelle et empêchent le repli sur soi.
Les associations d'éducation populaire comme Jeunesse au plein air réalisent un travail précieux, identifiant au cas par cas les besoins des enfants sur tous les territoires et bâtissent des formules adaptées à la situation de l'enfant et de sa famille. Et pour les en remercier, vous réduisez leurs crédits !
En élaborant des formules adaptées à la situation de chaque enfant, on cible mieux les dépenses qu'avec des chèques-vacances et l'on favorise l'aménagement du territoire. Dans le Finistère, 153 enfants ont bénéficié de ce dispositif en 2009. Nul besoin de formules dispendieuses : plus de la moitié des bénéficiaires sont restés dans le département. Les vacances ne sont pas synonymes d'éloignement géographique !
Depuis longtemps, ces associations conviennent avec l'État et les collectivités territoriales de projets territoriaux pour l'enfance et la jeunesse : elles contribuent ainsi à l'action publique dans ce domaine. Leur savoir-faire est indispensable.
Mais ce budget décharne, voire décapite les actions partenariales d'éducation populaire : les crédits qui y sont affectés sont passés de 6,4 millions d'euros en 2006 à 5 millions en 2009 et à 4,5 millions en 2010. Ces coupes budgétaires menacent la qualité de l'action publique en faveur des jeunes et génèrent un appel d'air inacceptable en direction des finances locales, qui fondent comme neige au soleil...
Votre nomination au haut-commissariat à la jeunesse a suscité beaucoup d'espoirs, monsieur Hirsch, car ce domaine relevait jusqu'à présent de plusieurs ministères et était le plus souvent négligé. Mais qui paiera, une fois supprimée la clause de compétence générale des collectivités ? Qu'adviendra-t-il, par exemple, des projets éducatifs locaux, soutenus conjointement par les villes, les départements et les CAF ? L'État mène une politique de la terre brûlée, retirant ses deniers et privant les collectivités des moyens de financement dont elles disposent.
Tout cela traduit un manque de considération pour les associations, qui jouent pourtant un rôle essentiel dans le dialogue civique. Vous vous apprêtez à tenir, le 17 décembre prochain, une conférence de la vie associative (M. le haut-commissaire le confirme), pour dire quoi ? Qu'il faut faire davantage avec moins d'argent ? Ou que vous êtes prêt à reconnaître et à valoriser l'engagement des participants ? Vous qui connaissez bien le monde associatif, ne le décevez pas ! (Applaudissements à gauche et sur les bancs RDSE)
M. Martin Hirsch, haut-commissaire. - On essaiera !
Mme Rama Yade, secrétaire d'État chargée des sports. - (Applaudissements sur les bancs UMP) Je remercie Mmes et MM. les rapporteurs et les orateurs d'avoir soulevé quelques points très importants. Je laisserai M. Hirsch répondre sur la jeunesse.
Pour apprécier l'évolution du budget des sports, il faut prendre en compte non seulement les crédits du programme « Sport » mais aussi les 228 millions d'euros affectés au CNDS et les dépenses de personnel du programme « Conduite et pilotage de la politique du sport, de la jeunesse et de la vie associative ». Au total, l'État consacrera au sport cette année 666 millions d'euros en autorisations d'engagement et 679 millions d'euros en crédits de paiement, sommes respectivement en hausse de 3,5 % et 2 %.
Mon principal objectif, c'est le sport pour tous. Je m'attache principalement à renforcer la pratique sportive des personnes handicapées, des femmes et des habitants des territoires défavorisés comme les zones rurales et l'outre-mer. Les moyens consacrés au sport pour tous sont en augmentation de plus de 3 % : ils s'élèvent à 229 millions d'euros dont 26 millions de subventions aux fédérations sportives.
Nous poursuivons la clarification des compétences de l'État et du CNDS afin d'éviter les financements croisés. L'action du CNDS sera recentrée sur ses compétences premières, parmi lesquelles le développement du sport pour tous au niveau territorial. L'État se consacrera au pilotage national de cette politique.
Je voudrais vous rassurer complètement, cher monsieur Sergent, sur les moyens du CNDS. Les ressources affectées à l'établissement s'élèveront cette année à 227 millions d'euros, dont 96 % consacrés au sport pour tous. L'instauration d'un fonds de concours du CNDS au budget de l'État de 16 millions d'euros est rendue possible par les recettes nouvelles dont bénéficiera le centre, 30 millions d'euros provenant de la taxe sur les paris sportifs. Même si les nouvelles dispositions n'entrent en vigueur qu'au milieu de l'année, le CNDS bénéficiera d'un surplus de recettes de 20 millions d'euros.
Nous poursuivons aussi nos efforts pour maintenir la France parmi les nations les plus compétitives dans le domaine du sport de haut niveau, en vue des Jeux olympiques de Londres et de Rio de Janeiro. Les moyens consacrés au sport de haut niveau s'élèveront à 178 millions d'euros en 2010, en augmentation de 18 %. Cette hausse permettra de maintenir les financements des fédérations sportives au titre de la participation des équipes de France aux compétitions internationales et d'accompagner le déploiement des parcours d'excellence sportive, en particulier dans les établissements du ministère. Enfin, un important programme de rénovation des écoles et des centres régionaux d'éducation et de promotion du sport sera mis en oeuvre pour un montant de 18 millions d'euros.
MM. Sergent et Lozach se sont émus de la hausse du coût des travaux de rénovation de l'Institut national du sport et de l'éducation physique (Insep). L'Insep, lieu de préparation des athlètes, est l'un des éléments d'une politique du sport de haut niveau rénovée et conquérante. Son statut doit être rénové, mais aussi son organisation et ses bâtiments. Le coût global des travaux du pôle sportif a enregistré des dépassements importants qui s'expliquent par la reconstruction du centre aquatique détruit en 2008 et par les nouvelles ambitions du projet : il s'agit non plus de rénover sommairement les équipements existants mais d'améliorer les conditions d'entraînement de tous les sportifs présents sur le site, qui représentent 60 % de nos espoirs de médailles aux Jeux olympiques d'été. Cher monsieur Sergent, votre amendement, qui tend à prélever un million d'euros sur le budget des travaux, n'aurait aucun impact sur le coût total du projet mais en rendrait seulement le financement plus difficile : j'espère que mes explications vous conduiront à le retirer. (Hésitations amusées au banc des commissions)
Vous vous interrogez aussi sur le moyen de compenser pour les petites fédérations sportives la hausse attendue des tarifs de l'Insep. L'évolution tarifaire de l'Insep est nécessaire pour plusieurs raisons : l'ancienne grille était complexe, voire incohérente ; l'externalisation de certaines prestations permet un recentrage de l'Insep sur son coeur de métier ; les travaux de la partie sud ont permis d'améliorer grandement les prestations ; enfin, l'Insep a besoin de recettes pour poursuivre sa transformation. Je comprends les préoccupations des fédérations, dont vous vous faites l'écho par votre amendement. Mais je rappelle que les prestations de l'Insep ne sont pas facturées au prix coûtant : si c'était le cas, les tarifs seraient multipliés par dix.
Le coût de fonctionnement de l'Insep sera peut-être élevé, 45 millions par an, mais la participation des fédérations sportive ne s'élèvera qu'à 4 millions, soit 8,8 % des coûts de fonctionnement. L'État maintient donc son effort financier.
Si nous voulons transformer l'Insep en grand établissement, c'est pour soutenir la filière du sport de haut niveau. C'est d'ailleurs pourquoi les fédérations participeront à la gouvernance de cet établissement, ce qui n'était pas le cas auparavant.
J'en viens à ma troisième priorité : la lutte contre le dopage, dont a parlé M. Martin. Les subventions aux fédérations sportives pour le suivi médical réglementaire des sportifs de haut niveau et l'encadrement sanitaire des équipes de France seront maintenues à hauteur de 7 millions. Les crédits consacrés à la recherche, à la prévention, à la lutte contre le trafic et à la lutte contre les violences et les incivilités sont également reconduites à hauteur de 5,1 millions.
M. Martin s'est dit favorable à l'attribution d'une ressource affectée à l'Agence française de lutte contre le dopage. Le contexte a évolué depuis notre rencontre du 4 novembre : nous devons maintenant tenir compte de la suppression du DIC, décidée par le Parlement et qui a suscité de larges débats. Certains clubs connaîtront des difficultés. Nous devrons trouver des solutions pour éviter de déstabiliser le sport professionnel. La suppression du DIC a été repoussée au 30 juin pour éviter qu'elle ne s'applique avant le terme de la saison en cours.
En ce qui concerne la rénovation des enceintes sportives, nous allons consacrer plus de 150 millions dans le cadre de l'organisation de l'Euro de football en 2016. Nous allons améliorer la compétitivité du sport professionnel, conformément à la demande du Président de la République et en dépit de la suppression du DIC. Le Gouvernement a déposé un amendement pour supprimer la hausse de la taxe Buffet prévue par l'article 60. Peut-être faudra-t-il envisager un redéploiement au sein du programme sport, comme l'a souhaité M. Demuynck.
Pour répondre à M. Sergent, les arbitrages rendus par le Premier ministre vont dans le sens d'un apurement des dettes de l'État vis-à-vis de la sécurité sociale : nous connaitrons le coût réel du DIC l'année prochaine. Des ouvertures exceptionnelles sont prévues dans le collectif de fin d'année. Il s'agira d'apurer la dette antérieure au titre du DIC pour un montant un peu supérieur à 20 millions. (Applaudissements au centre et à droite ; Mme Escoffier applaudit aussi)
M. Martin Hirsch, haut-commissaire aux solidarités actives contre la pauvreté, haut-commissaire à la jeunesse. - Si même la benjamine du Gouvernement prend du temps de parole sur les crédits destinés aux jeunes, il va falloir se défendre ! (Sourires) Elle a mangé 60 % de mon temps de parole mais comme mes crédits augmentent de plus de 60 %, je préfère un peu moins de temps de parole et un peu plus de crédits pour les jeunes ! (Applaudissements et rires à droite)
Nous sommes dans une situation exceptionnelle dans la mesure où la politique de la jeunesse a vu le jour dans cet hémicycle -service civique, proposition Collin, rapport Demuynck. Certes, les crédits destinés à la jeunesse augmentent de 60 % et il ne s'agit que de la partie visible car, dans bien d'autres missions, les crédits pour les jeunes sont également en forte progression. Comme la politique de la jeunesse est transversale, nous augmentons divers crédits, notamment ceux destinés aux missions locales et au RSA jeunes.
M. Sergent a noté certaines diminutions de crédits, notamment ceux destinés à l'Institut national de la jeunesse et de l'éducation populaire. Cet institut consacrait une partie de ses crédits et de ses effectifs à une activité hôtelière d'hébergement. Nous avons recentré ses missions sur la jeunesse et nous avons utilisé le site en question pour y loger des étudiants, après avoir signé une convention avec le Crous. Désormais, cet établissement public se consacrera aux études et à la recherche au profit de la politique de la jeunesse.
Mme Escoffier a estimé que les crédits du Fonjep devaient être maintenus. En 2010, il disposera des mêmes moyens grâce aux réserves dont il dispose. Certes, le service civique doit être une priorité : je tiens à rendre hommage au travail accompli dans cette enceinte et qui a été qualifié de petit miracle républicain. Nous devons maintenant passer du miracle à la réalité citoyenne : je suis sûr que vos collègues de l'Assemblée nationale auront à coeur d'examiner cette proposition de loi dès janvier.
M. Voguet s'est interrogé sur la pérennité du fonds d'expérimentation sociale en semblant estimer que les expérimentations ne font pas partie de la politique en faveur des jeunes. Ces crédits sont destinés à tester de nouvelles politiques : quand les projets sont bons, les fonds d'expérimentation se traduisent en crédits permanents. Quand tel n'est pas le cas, il ne faut pas utiliser l'argent des contribuables pour des projets qui ne fonctionnent pas. Le fonds d'expérimentation peut donc être considéré comme un fonds d'amorçage. Ainsi, je vous ai demandé, il y a déjà quelque temps, 25 millions pour une expérimentation sur le RSA et, l'année d'après, j'ai obtenu 1,5 milliard !
M. Demuynck estime qu'une politique de la jeunesse devait être globale. C'est totalement vrai et c'est ce que traduit ce budget.
Mmes Bourzai et Blondin ont rappelé les inquiétudes des associations et des mouvements de l'éducation populaire. Dans treize jours, la Conférence de la vie associative aura lieu, alors qu'elle ne s'était pas réunie depuis trois ans. Oui, nous avons des choses à leur dire : nous sécuriserons les relations financières entre l'État et les collectivités territoriales. Nous avons proposé aux communes, aux départements et aux régions un seul modèle de convention d'objectifs pour offrir la même sécurité à toutes les associations et tous les mouvements d'éducation populaire.
Nous avons des ambitions larges pour la jeunesse et pour la vie associative : nous ne pouvons pas les décevoir. Nous vous rendrons compte régulièrement de l'utilisation de ces crédits et des progrès réalisés. (Applaudissements à droite)
Examen des crédits
M. le président. - Amendement n°II-26, présenté par M. Sergent, au nom de la commission des finances.
Modifier comme suit les crédits des programmes :
(en euros)
Programmes |
Autorisations d'engagement |
Crédits de paiement |
||
|
+ |
- |
+ |
- |
Sport |
2.000.000 |
|
2.000.000 |
|
Jeunesse et vie associative |
|
2.000.000 |
|
2.000.000 |
Conduite et pilotage de la politique du sport, de la jeunesse et de la vie associativeDont titre 2 |
|
|
|
|
TOTAL |
2.000.000 |
2.000.000 |
2.000.000 |
2.000.000 |
SOLDE |
0 |
0 |
M. Michel Sergent, rapporteur spécial. - Je voudrais dissiper un doute sur cet amendement : la commission n'est pas hostile au principe du service civique, bien au contraire. Nous espérons le succès de ce dispositif qui devra être jugé, comme l'a dit M. le haut-commissaire, avec le temps. Mais une ligne de 40 millions est inscrite afin de financer, en année pleine, le dispositif, soit 10 000 volontaires, ce qui implique une multiplication par 3,5 des effectifs par rapport à aujourd'hui. Or, ils ne devraient pas s'envoler dès le 1er janvier, d'autant que la proposition de loi de M. Collin ne sera pas promulguée à cette date puisque nos collègues de l'Assemblée nationale ne l'examineront que fin janvier et qu'elle fera sans doute l'objet d'une seconde lecture, ce qui nous amènera à la fin du premier trimestre. La consommation des crédits que vous nous soumettez suppose donc une multiplication par six du nombre de volontaires en 2010 par rapport à 2009 afin que la moyenne annuelle soit bien de 10 000 volontaires. Je doute un peu du réalisme de cette hypothèse.
De même que le principe de sincérité budgétaire amène la commission des finances à dénoncer les sous-budgétisations manifestes, il en va de même des surbudgétisations qui ne doivent pas permettre de constituer une cagnotte, surtout en ces temps budgétaires difficiles. Nous pourrions donc sans dommage prélever 2 millions de crédits sur le service civique, ce qui vous laisserait une excellente marge de progression. J'espère d'ailleurs que vous pourrez nous indiquer le coût d'un jeune en service civique.
Ce montant pourrait utilement être utilisé pour financer les petites fédérations sportives qui auront du mal à suivre la hausse des tarifs pratiqués par l'Insep.
Madame la ministre, vous avez dit qu'il n'y aurait aucun problème à ce sujet. Nous avons cependant rencontré des présidents de petites fédérations qui s'inquiétaient de l'augmentation des coûts pratiqués par l'Insep. Or, ces petites fédérations sont nos meilleures pourvoyeuses de médailles aux Jeux olympiques, bien plus que les sports médiatisés, des médailles qui, l'une après l'autre, font notre beau et grand pays sportif.
M. Martin Hirsch, haut-commissaire. - Il y a quelques semaines, le Gouvernement a répondu à l'initiative du Sénat de mettre à l'ordre du jour le texte sur le service civique et, à ce moment-là, je vous ai entendu dire que 40 millions ne seraient pas suffisants pour financer 10 000 volontaires. Je vous avais répondu que ce serait suffisant car, du fait du passage à l'Assemblée nationale et d'une éventuelle deuxième lecture, le texte ne serait pas appliqué dès le 1er janvier. Mais nous avons besoin de ces 40 millions : toutes les associations nous expliquent qu'elles refusent des volontaires, faute de crédits. Nous ne pouvons pas commencer à rogner sur ces crédits alors que nous ambitionnons d'aller même jusqu'à 80 000 volontaires, comme le Président de la République s'y est engagé. Ces 40 millions seront dépensés jusqu'au dernier euro pour le plus grand bien des jeunes ! Il ne faut pas réduire la voilure avant même de commencer. Et je vais convaincre Jean-François Copé d'inscrire ce texte dans la niche parlementaire de l'UMP. Retrait, sinon ferme opposition. (Applaudissements à droite et sur les bancs du RDSE)
M. Jean Arthuis, président de la commission des finances. - Vous n'avez que partiellement répondu. Nous souhaitons connaître le coût d'un jeune engagé dans le service civique. Nous n'avons aucun élément d'appréciation. Nous ne remettons pas en cause le texte qui été voté ici mais il nous faut une évaluation rigoureuse de sa montée en puissance. Personnellement, je ferais volontiers l'économie de cet amendement mais si le Sénat le votait, ce ne serait pas dramatique : la ministre des sports ne s'en plaindrait pas et cela pousserait votre équipe à s'atteler au travail d'évaluation d'ici la CMP.
M. Jean-François Voguet. - J'ai voté contre la mise en place du service civique mais ce n'est pas la raison de mon soutien à cet amendement. Le montant de ces crédits a été calculé en année pleine : or, après la navette, il y aura encore un délai de mise en oeuvre de plusieurs mois. Aussi, compte tenu de la faiblesse des crédits du programme « Sport », je suis favorable à ce prélèvement de 2 millions. Ce genre de manipulation budgétaire me pose toujours problème car j'ai l'impression de déshabiller Paul pour habiller Pierre, alors que tous les deux auraient besoin de nouveaux habits. Les deux programmes manquent de moyens. Mais la Lolf nous interdit les changements d'affectation à l'intérieur des programmes. Pour diminuer les crédits d'une action, il faut en transférer une partie à un autre programme et on ne peut réduire une action au profit d'une autre action d'un même programme. J'aurais souhaité prélever au moins 5 millions sur le DIC pour les donner à l'action « Sport pour tous » et réduire au moins de moitié les crédits en faveur du consortium de gestion du Stade de France, toujours au profit de la même action. Je ne le peux pas. Même si je souhaiterais plutôt que les sommes prélevées sur le service civique se retrouvent sur l'action 1 du programme « Sport », je voterai cet amendement.
M. Christian Demuynck. - Cette assemblée s'est intéressée au service civique. Nous en avons évalué le coût à 7 000 euros par jeune. Ces 40 millions ne sont qu'une étape car ils suffiront pour 5 714 jeunes seulement : on est loin du compte. Nous nous sommes engagés auprès des présidents d'associations et auprès des jeunes qui étaient nombreux dans les tribunes. Nous leur avons promis 40 millions. Ne trahissons pas nos engagements ! La jeunesse croit que les hommes politiques ne s'occupent pas d'elle. Prouvons-lui le contraire ! (Applaudissements à droite, sur les bancs RDSE et sur certains bancs socialistes)
M. Martin Hirsch, haut-commissaire. - J'abonde dans le sens de M. Demuynck et je vous demande de peser votre vote. Monsieur le président de la commission des finances, vous demandez des évaluations. Mais nous les avons, vous les avez ! Nous avons déjà un service civil : il coûte 1 000 euros par mois et par jeune, soit 6 000 euros pour six mois. Avec 40 millions nous n'aurons pas assez ! Nous n'avons aucun excédent de crédits ! On ne peut pas refaire le même coup aux jeunes deux fois de suite. Il y a trois ans, nous nous sommes engagés sur le service civil ; nous les avons déçus. Grâce au Sénat, nous avons remonté la pente et les avons convaincus qu'il y avait dorénavant une volonté politique et que nous tiendrions nos promesses. Nous ne pouvons donc pas transformer ces 40 millions en 38 millions !
M. Jean Arthuis, président de la commission des finances. - Certes, des promesses ont été faites et nous veillons à ce qu'il n'y ait pas décalage entre les annonces et la réalité. Et nous partageons votre impatience, monsieur Demuynck. Mais quand cette loi sera-t-elle enfin votée ? En janvier à l'Assemblée nationale ? Peut-être... Votée conforme ? Sinon, elle devra revenir devant le Sénat. (Marques d'impatience à droite)
M. Charles Pasqua. - Au vote !
M. Jean Arthuis, président de la commission des finances. - Nous retirons l'amendement mais, au moins, aurons-nous fait le point sur un dispositif auquel nous sommes tous attachés. (Applaudissements à droite et au centre)
M. le président. - J'ai le devoir de prévenir le Sénat que la nuit sera longue. Et encore plus longue si nous maintenons ce « train de sénateur ». (Sourires las)
L'amendement n°II-26 est retiré.
M. le président. - Amendement n°II-25, présenté par M. Sergent au nom de la commission des finances.
Modifier comme suit les crédits des programmes :
(en euros)
Programmes |
Autorisations d'engagement |
Crédits de paiement |
||
|
+ |
- |
+ |
- |
Sport |
1 000 000 |
1 000 000 |
||
Jeunesse et vie associative |
1 000 000 |
1 000 000 |
||
Conduite et pilotage de la politique du sport, de la jeunesse et de la vie associativeDont titre 2 |
||||
TOTAL |
1 000 000 |
1 000 000 |
1.000.000 |
1 000 000 |
SOLDE |
0 |
0 |
M. Michel Sergent, rapporteur spécial. - Ce programme intègre des crédits supplémentaires pour la rénovation de l'Insep. Or, nous n'avons pas été informés de la dérive du coût de ce chantier. Le Parlement doit faire savoir que l'approbation d'un chantier ne vaut pas chèque en blanc. Une diminution d'un million permettrait de faire passer ce message.
Mais l'amendement a également un autre objet. Les crédits du programme « Jeunesse et vie associative » affichent globalement une belle croissance. Mais ce n'est pas le cas d'actions aussi utiles que les postes Fonjep, destinés à soutenir l'emploi d'animateurs dans le secteur associatif, ou que les projets éducatifs locaux, aide précieuse pour maintenir le tissu associatif. Les maires y sont très attachés. (Applaudissements à gauche)
M. Charles Pasqua. - Le Gouvernement est contre.
Mme Rama Yade, secrétaire d'État. - Je ne comprends pas. Votre précédent amendement visait à me faire plaisir et à présent vous prélevez un million d'euros sur le budget du sport ! Le coût du chantier de l'Insep s'explique par l'incendie qui a ravagé la piscine. Le programme « Sport » a besoin de ses crédits. Défavorable.
M. Jean-François Voguet. - J'approuve l'amendement ; c'est à juste titre que notre collègue parle de « dérive ». Et il faudrait que la représentation nationale soit informée de l'ensemble des comptes, coût total du chantier, bilan des pertes en emplois publics. Et combien coûte le placement d'un athlète à l'Insep, pour la fédération et pour l'intéressé ? Cette partie de l'Insep a été totalement privatisée sans que nous ayons eu notre mot à dire. L'État a un loyer important à payer, les athlètes et leurs fédérations les moins fortunés sont dans la difficulté... Je soutiendrai l'amendement, d'autant que les postes Fonjep et les projets éducatifs locaux ont bien besoin de crédits.
M. Michel Sergent, rapporteur spécial. - Je maintiens l'amendement et vous rappelle, madame la ministre, que la Lolf nous interdit les redéploiements au sein d'un même programme : nous sommes bien obligés de prélever les sommes sur un autre !
Mme Rama Yade, secrétaire d'État. - La hausse des crédits de l'Insep sont liés à l'incendie et à une sous-évaluation initiale dans les premiers devis. Vous regrettez que les crédits du sport ne soient pas plus élevés mais vous les ponctionnez encore ! En outre, l'Insep est à la tête de l'ensemble des Creps, c'est donc le financement de tout ce réseau solidaire que vous remettez en cause, portant atteinte à l'animation régionale et sportive.
L'amendement n°II-25 n'est pas adopté.
Les crédits de la mission sont adoptés.
Article 60
I. - Au sixième alinéa de l'article 302 bis ZE du code général des impôts, le taux : « 5 % » est remplacé par le taux : « 5,5 % ».
II. - Le II de l'article 59 de la loi de finances pour 2000 (n°99-1172 du 30 décembre 1999) est complété par une phrase ainsi rédigée :
« Toutefois, une fraction de 10 % de cette contribution est affectée, dans la limite de 4 millions d'euros, à l'Agence française de lutte contre le dopage. »
III. - A la première phrase de l'article L. 411-2 du code du sport, après les mots : « est affectée », sont insérés les mots : «, pour partie, ».
IV. - Le présent article est applicable à compter du 1er janvier 2010.
Mme Rama Yade, secrétaire d'État. - Le Gouvernement avait prévu une majoration de la taxe des droits de retransmission des manifestations sportives, dite taxe Buffet. Entretemps, une initiative du Parlement a, en loi de financement de la sécurité sociale, supprimé le régime du droit à l'image collectif (DIC). Le cumul des deux mesures pourrait donner l'impression d'un acharnement à l'égard du sport professionnel et affecterait l'économie du secteur. Le Gouvernement renonce donc à sa proposition fiscale. La majoration devait fournir une ressource de 4 millions d'euros à l'agence française de lutte contre le dopage : le financement de l'agence reposera entièrement sur le budget du ministère. Une des solutions envisageables serait de réaffecter une partie des ressources rendues disponibles par la suppression du DIC.
M. Michel Sergent, rapporteur spécial. - Le régime du DIC ayant été supprimé, il est préférable en effet de ne pas charger la barque. Vous nous rassurez sur l'AFLD ; quant au CNDS, vous nous avez dit tout à l'heure qu'un fonds de roulement de 56 millions d'euros était encore disponible. Par conséquent, avis favorable.
M. Pierre Martin, rapporteur pour avis. - Vous n'avez pas voulu ajouter une mesure pénalisante, je m'en réjouis. Je souligne que le sport professionnel, ce n'est pas seulement le football. Il y a de nombreux autres sports. La majoration aurait fourni à l'agence des ressources propres ; je veux être certain que cette autorité indépendante aura les financements dont elle a besoin. Si le Gouvernement confirme son engagement, je reviendrai peut-être sur mon amendement...
L'amendement n°II-305 est adopté et l''article 60 est supprimé.
Les autres amendements à l'article 60 deviennent sans objet.
Les articles 60 bis et 60 ter sont adoptés.
M. Jean Arthuis, président de la commission des finances. - Le 25 novembre dernier, la Conférence des Présidents a décidé que nous commencerions demain samedi 5 décembre en séance publique l'examen des articles non rattachés, plus particulièrement les amendements de la commission des finances qui tendent à répartir le produit de la nouvelle contribution économique territoriale entre les collectivités locales à partir de 2011. Il s'agit du second volet de la suppression de la taxe professionnelle.
La commission vous présentera trois amendements, nosII-199, II-200 et II-201, introduisant des articles additionnels avant l'article 43 et un amendement n°II-201 relatif aux ressources des chambres de commerce et d'industrie.
Conformément à l'article 49, alinéa 2 de notre Règlement, je vous propose que nous limitions la discussion commune à ceux des sous-amendements qui sont directement en concurrence avec les amendements. Ainsi, notre discussion sera claire et compréhensible. Chacun pourra mesurer les enjeux exacts des dispositions que nous présentons.
Il en est ainsi décidé.
M. le président. - Nous allons examiner les crédits de la mission « Solidarité, insertion et égalité des chances ».
Solidarité, insertion et égalité des chances
Interventions des rapporteurs
M. Auguste Cazalet, rapporteur spécial de la commission des finances. - La mission « Solidarité, insertion et égalité des chances » rassemble près de 12,37 milliards d'euros en crédits de paiement et 12,36 milliards d'euros en autorisations d'engagement, en augmentation de près de 11 % par rapport à 2009. Elle est partagée en cinq programmes de poids très différents. Le plus petit, consacré à l'égalité entre les hommes et les femmes, mobilise 29,5 millions alors que le programme « Handicap et dépendance » représente plus de 9,1 milliards. Le périmètre de la mission n'évolue pratiquement pas mais d'importants mouvements de crédits affectent les programmes.
Les crédits du programme « Lutte contre la pauvreté : revenu de solidarité active et expérimentations sociales » passent de 555,4 millions en 2009 à 1 684,5 millions en 2010 en raison de la généralisation du revenu de solidarité active (RSA) depuis le 1er juin 2009. Lors de l'examen de ce texte à l'Assemblée nationale, cette dotation a cependant été réduite de près de 76 millions.
Le programme « Actions en faveur des familles vulnérables » passe de 836 millions en 2009 à 407,6 millions en 2010, l'allocation parent isolé (API) étant intégrée dans le dispositif du RSA. Compte tenu de cette évolution, nous nous interrogeons sur la pérennité de la maquette budgétaire à partir de 2011. Ce programme portant désormais essentiellement les crédits de la protection juridique des majeurs, son libellé est-il toujours justifié ? Quels vont être les impacts budgétaires de la RGPP, du fait notamment de la création de la direction générale de la cohésion sociale ?
Le programme « Conduite et soutien des politiques sanitaires et sociales », qui rassemble les crédits de personnel et de fonctionnement, est profondément remodelé avec la création des agences régionales de santé (ARS) qui regrouperont, à terme, les services des directions régionales et départementales des affaires sanitaires et sociales et des agences régionales de l'hospitalisation.
L'autre priorité budgétaire de cette mission est l'allocation aux adultes handicapés (AAH), qui sera revalorisée de 25 % sur cinq ans. En contrepartie, des crédits jugés moins essentiels stagnent ou diminuent.
Les crédits budgétaires ne donnent pas une vision exhaustive de la politique de solidarité. L'ampleur des 31 dépenses fiscales associées est quasiment équivalente, avec 11,88 milliards en 2010 : il est regrettable que leurs effets ne soient pas mieux analysés au regard des objectifs recherchés.
Je conclurai en évoquant la sincérité des documents budgétaires transmis au Parlement. Ainsi, le chiffrage du solde excédentaire du fonds national des solidarités actives (FNSA) pour 2009 est apparu plus qu'incertain. Selon le projet annuel de performances annexé au projet de loi de finances, ce solde devrait atteindre 165 millions d'euros, mais il serait de 750 millions d'euros selon les calculs de la commission des finances. Devant nos collègues de la commission des affaires sociales, vous avez, monsieur le haut-commissaire, admis que nos calculs étaient très proches de la réalité.
M. Jean Arthuis, président de la commission des finances. - Bel aveu !
M. Auguste Cazalet, rapporteur spécial. - Finalement, grâce au versement d'une prime de Noël exceptionnelle, le solde du FNSA atteindrait environ 410 millions d'euros. L'autorisation budgétaire du Parlement n'a de sens que si elle se fonde sur des données exactes et précises, en un mot sincères. (Applaudissements sur les bancs UMP)
M. Albéric de Montgolfier, rapporteur spécial de la commission des finances. - Les crédits du programme « Actions en faveur des familles vulnérables » connaissent une baisse sensible du fait de l'intégration de l'API dans le RSA. Ils couvrent de nombreuses actions sans pour autant que l'on puisse parler d'une véritable politique en faveur des familles. En revanche, je salue l'effort budgétaire qui devrait permettre de résorber, à la fin de l'année, les dettes accumulées au fil des exercices.
Depuis la loi de 2007 réformant la protection de l'enfance, les départements supportent la plus grande partie de la politique de l'enfance en danger. Le fonds national de la protection de l'enfance devait les soutenir mais le Premier ministre a souhaité ne pas le financer, sans pour autant proposer de solution de rechange. Du fait de l'article 40, il n'est pas possible à la représentation nationale d'intervenir. Madame la ministre, nous attendons de votre part une action déterminée pour sortir de cette situation et nous vous écouterons avec la plus grande attention.
Le programme « Handicap et dépendance » porte les crédits de l'allocation aux adultes handicapés (AAH), soit plus de 6,2 milliards. Un fort dérapage a eu lieu pour l'exercice 2009 et le Gouvernement prévoit une dotation complémentaire de 300 millions dans le cadre du prochain collectif budgétaire. Pour 2010, le Premier ministre a autorisé un dépassement de 260 millions par rapport à la loi de programmation des finances publiques, mais la budgétisation de cette allocation nous laisse sceptiques. Le Gouvernement semblant ignorer les causes de ce dérapage, toute prévision devient hasardeuse. Nous suivrons donc avec la plus grande vigilance l'exécution de ce programme l'année prochaine.
Le programme « Égalité entre les hommes et les femmes » ne compte que 29,5 millions d'euros. Notre commission s'est souvent interrogée sur l'efficacité de certaines dépenses compte tenu de la faiblesse des sommes prévues par rapport aux enjeux. Selon le document de politique transversale dont nous disposons depuis cette année, plus de vingt programmes sont concernés par cet objectif. Les crédits d'intervention demeureront stables en 2010 mais ils seront cette année encore dispersés entre près de 1 150 associations qui reçoivent en moyenne une subvention d'environ 12 500 euros, mais le plus souvent d'à peine 5 000 euros. Les subventions des associations d'envergure nationale sont, quant à elles, maintenues à des niveaux élevés.
Le programme « Conduite et soutien des politiques sanitaires et sociales » est quelque peu bouleversé par la création des ARS. Les dotations de plusieurs services sont dorénavant regroupées en une nouvelle action qui totalise près de 271 millions de crédits. 260 millions sont destinés au fonctionnement de ces agences et correspondent aux charges des personnels transférés -environ 7 500 ETPT en année pleine. Hors transferts, la baisse nette des emplois permet une économie de 6,6 millions.
Le programme « Lutte contre la pauvreté : revenu de solidarité active et expérimentations sociales », constitué à plus de 99 % par la dotation de l'État au FNSA, a tout particulièrement retenu notre attention. Les crédits prévus s'élèvent à 1 674,5 millions, dont l'Assemblée nationale a déduit 76 millions. Au regard des prévisions retenues dans le précédent projet de loi de finances, la montée en charge du RSA a été plus lente que prévu. Le FNSA dégage donc fin 2009 un solde bien supérieur aux prévisions, ce qui permet de réduire d'autant la contribution de l'État au FNSA pour 2010. En outre, selon la tendance actuelle, la dépense en 2010 devrait être également inférieure aux prévisions.
La dotation de l'État au FNSA pourrait dont être réduite de plus de 800 millions. Nous avons déposé un amendement, adopté à l'unanimité par la commission des finances, la diminuant de 500 millions. Afin de ne pas risquer de mettre le fonds en péril, nous ne sommes pas allés jusqu'à proposer de supprimer la totalité du surplus mais des éléments nouveaux ont été portés depuis à notre connaissance. Tout d'abord, le haut-commissaire a annoncé que, du fait du versement d'une prime de Noël exceptionnelle, le solde excédentaire ne serait plus que d'environ 410 millions d'euros.
Vous avez indiqué ensuite à la commission des affaires sociales que le RSA jeunes n'entrerait au mieux en vigueur qu'en juin 2010, et plus probablement au 1er septembre ; 125 millions d'euros seraient ainsi dépensés. D'après nos calculs, et après ces deux annonces, la dotation demandée reste supérieure de plus de 500 millions d'euros à ce qui paraît nécessaire. La commission des finances a donc décidé de maintenir son amendement. Vous nous éclairerez certainement sur le niveau probable de la dépense. Hors RSA jeunes, 2,3 milliards d'euros sont prévus sur la base d'un montant moyen de 109 euros, montant retenu dans le projet de loi de finances pour 2009 ; il semble qu'on serait plus proche aujourd'hui, sur le fondement de données récentes, de 2,6 milliards. L'estimation doit être affinée, sachant toutefois qu'une marge de sécurité est nécessaire. Nous attendons également des précisions sur l'extension du RSA dans les départements d'outre-mer.
C'est l'article 59 quater qui étend le bénéfice du RSA aux jeunes actifs de moins de 25 ans. Nous soutenons résolument cette extension, qui encouragera les plus jeunes de nos travailleurs qui sont aussi, bien souvent, les moins favorisés. Le bénéfice du RSA jeunes est conditionné à une activité préalable dont les modalités sont renvoyées au Règlement. C'est la condition de l'équilibre du dispositif.
Ces observations ne remettent pas en cause le remarquable travail accompli. Nous soutenons cette innovation majeure qu'est le RSA, sans doute l'avancée sociale la plus importante de ces dernières années. La commission des finances a émis un avis favorable à l'adoption des crédits de la mission.
M. Paul Blanc, rapporteur pour avis de la commission des affaires sociales. - La progression exceptionnelle de 10,8 % des crédits de cette mission est un signal fort dans cette période de crise. Avec les dépenses fiscales, ce sont 24,3 milliards qui seront consacrés aux familles à revenus modestes et aux personnes âgées ou handicapées, sans oublier la contribution de 27 milliards des départements, chefs de file de l'action sociale.
Le RSA est financé par une dotation de l'État au FNSA, établie en 2010 à 1,67 milliard d'euros. Ce montant semble sur-calibré au regard du rythme de montée en charge du RSA activité ; il a été évalué comme si tous les bénéficiaires potentiels entraient immédiatement dans le dispositif. Les dépenses 2009-2010 dégageront sans doute une marge de manoeuvre substantielle. Comme la commission des finances, je proposerai de réduire les crédits et d'en redéployer une partie vers des programmes moins bien dotés.
La commission approuve pleinement l'extension du RSA aux jeunes dès lors qu'on l'assortit d'une condition d'activité préalable. Pouvez-vous garantir, monsieur le haut-commissaire, cette condition n'étant pas explicitée, que les dépenses n'excéderont pas les 250 millions prévus ? Comment sera financée, à partir de 2011, la partie socle du RSA qui relève des départements ?
Les crédits consacrés aux familles vulnérables, qui avaient baissé de 33 % en 2009, diminueront encore de 6,5 % en 2010. Quelles en sont les raisons ? Et quelles sont les priorités du Gouvernement en la matière ?
Le bilan de la politique du handicap est plutôt positif. Les crédits traduisent les promesses présidentielles en faveur de la revalorisation de l'AAH, de la création de places nouvelles et du soutien aux entreprises adaptées. Si la commission partage le double souci de favoriser l'emploi des personnes handicapées en mesure de travailler et de garantir la dignité de celles qui sont durablement éloignées de l'emploi, j'ai quelques inquiétudes et regrets. Je regrette que l'allocation supplémentaire d'invalidité n'ait pas été revalorisée, que l'écart se creuse entre ceux qui la perçoivent et les allocataires de l'AAH, que la réforme de l'AAH n'ait pu être mise en oeuvre dans les temps. Le succès modeste de la prestation de compensation du handicap (PCH) me conduit à suggérer une nouvelle fois, d'une part, que la contribution de la CNSA soit modulée en fonction de la dépense de chaque département, certains conseils généraux ayant pratiquement épuisé leurs provisions budgétaires ; d'autre part, que soit intégrée à la PCH une part forfaitaire pour les aides ménagères. Cela paraît d'autant plus nécessaire que les fonds départementaux de compensation n'ont pas été abondés depuis 2007. Je proposerai un redéploiement de crédits à leur profit.
Autre sujet d'inquiétude, les maisons départementales des personnes handicapées (MDPH). Leurs difficultés sont liées en particulier au statut des personnels mis à disposition par l'État et à la compensation partielle des postes non pourvus. Il est urgent de solder cette dette, de l'ordre de 34 millions d'euros, qui pèse sur les conseils généraux. Je proposerai un redéploiement de crédits à cette fin. J'avais souhaité que les MDPH fussent exonérées de la taxe sur les salaires, mais la commission des finances ne m'a pas suivi...
S'agissant de l'emploi en milieu ordinaire, les résultats sont mitigés : avec 4,4 % de personnes handicapées employées dans le secteur public, l'action du fonds « Fonction publique » mérite d'être saluée ; à l'inverse, les 2,8 % du secteur privé ne sont pas à mettre au crédit de l'Agefiph...
La présentation budgétaire des mesures en faveur de l'égalité entre les hommes et les femmes reste trop dispersée. Je souligne l'utilité du plan de lutte contre les violences faites aux femmes, grande cause nationale en 2010.
Je souhaite enfin que la restructuration des administrations sanitaires et sociales permette des économies dès 2010. Au regard des incertitudes qui pèsent sur le montant nécessaire à la mise en place des ARS, notre commission souhaite être informée des évolutions en cours de gestion.
Sous réserve de ces observations et des amendements qu'elle présentera, la commission des affaires sociales a émis un avis favorable à l'adoption des crédits de cette mission.
Interventions des orateurs
Mme Gisèle Printz. - Je remarque que notre hémicycle est féminin ce soir et que seules des sénatrices sont inscrites dans le débat. Peut-être cette mission n'intéresse-t-elle pas les hommes ...
M. le président. - Les rapporteurs sont des hommes.
Mme Raymonde Le Texier. - Les postes nobles ! CQFD...
Mme Gisèle Printz. - Je déplorais l'an dernier l'insuffisance des crédits accordés aux actions en faveur de l'égalité entre les femmes et les hommes ; ils sont stables en 2010, ce qui prouve que l'État ne se donne pas les moyens de parvenir à une réelle égalité entre les deux sexes. Les inégalités perdurent sur le marché du travail, alors que les femmes représentent 48 % de la population active ; si les filles réussissent mieux dans leurs études que les garçons, les emplois non qualifiés sont occupés à 60 % par des femmes et 30 % d'entre elles n'ont aucune qualification. A cette déqualification correspond souvent du temps partiel non choisi. En cette période de crise, les femmes sont en outre les premières touchées par les fins de contrat, les réductions d'horaires et le sous-emploi. D'après une récente étude du Secours catholique, elles sont plus exposées à la pauvreté que les hommes et demeurent pauvres parmi les pauvres.
Il faut ajouter à cela un écart persistant entre les salaires, malgré cinq textes de loi dont le dernier, en date du 23 mars 2006, est resté lettre morte faute de mesures coercitives à l'égard des entreprises. Nous espérons que de telles mesures figureront dans la sixième loi qu'on nous annonce. Les mêmes discriminations se retrouvent à la retraite, celle des femmes étant de 38 % inférieure à celle des hommes. Nous regrettons la remise en cause de la majoration de la durée d'assurance.
Certains droits fondamentaux pourraient en outre être remis en cause. Le Planning familial a récemment lancé une pétition nationale contre les effets pervers de la loi HPST. La logique de rentabilité à l'hôpital va entraîner le démantèlement des structures non rentables et dévalorisées, comme celles en charge des IVG. Les associations déplorent déjà la fermeture de structures pratiquant des IVG dans les hôpitaux publics Tenon, à Paris, et Jean Rostand, à Ivry ; sont également menacés le centre IVG d'Avicenne, à Bobigny, et l'unité fonctionnelle planification-IVG des Bluets. L'activité des centres IVG doit être considérée comme une obligation de santé publique.
La parité risque aussi d'être remise en cause par le projet de réforme des collectivités territoriales. Le mode d'élection des conseillers territoriaux ne favorisera pas l'égal accès des hommes et des femmes à ce nouveau mandat. Nous nous battrons pour que la Constitution soit respectée.
L'an dernier, nous soutenions l'appel du mouvement Ni putes ni soumises pour que la lutte contre les violences faites aux femmes soit décrétée grande cause nationale en 2009. Nous en prenons le chemin pour 2010 et nous nous en réjouissons. Nous souhaitons qu'une meilleure formation soit dispensée au personnel assistant les femmes victimes de violence ; nous souhaitons aussi qu'une information sur le respect mutuel et l'égalité soit donnée dans les écoles.
Les crédits du programme « Handicap et dépendance » affichent certes une augmentation de 5,5 % mais ils sont encore loin de garantir un réel accès aux droits fondamentaux à toutes les personnes en situation de handicap, comme le voulait la loi du 11 février 2005.
Si les ressources d'existence augmentent de 6,76 %, elles n'en demeurent pas moins en dessous du seuil de pauvreté. Peut-on parler de vie digne dans ces conditions ? L'allocation adulte handicapé maintient bon nombre de personnes handicapées dans la précarité. Depuis plusieurs années, nous demandons qu'elle soit augmentée afin de parvenir à la parité avec le Smic. Nous en sommes encore loin !
L'association des paralysés de France vient de lancer une grande enquête de satisfaction auprès des usagers des maisons départementales des personnes handicapées. Le Gouvernement devrait en tirer les enseignements.
Selon l'observatoire des inégalités, 19 % des personnes handicapées sont au chômage. Après avoir eu du mal à trouver une activité professionnelle, elles ont beaucoup de difficultés à accéder à la formation professionnelle. Je rappelle qu'en septembre, nous avions proposé un amendement au projet de loi relatif à l'orientation et la formation professionnelle tout au long de la vie visant à ce que ces problèmes ne soient pas ignorés. Nous regrettons encore qu'il n'ait pas été adopté.
Trop nombreuses sont les entreprises qui préfèrent payer une amende si elles embauchent moins de 6 % de handicapés. Il faut faire respecter les obligations légales d'embauche et montrer l'exemple dans la fonction publique où le quota de 6 % n'est pas encore atteint. Le Gouvernement a annoncé que chaque ministère devrait atteindre cet objectif défini par la loi, sous peine de voir ses effectifs gelés. Nous prenons acte de cet engagement.
Je veux évoquer les entreprises adaptées qui bénéficient d'une aide au poste représentant 80 % du Smic ainsi que d'une subvention d'accompagnement et de développement. Depuis le 1er janvier 2006, le nombre annuel d'aides au poste est fixé par le ministère, ce qui contraint les entreprises adaptées à lier leur activité à l'aide accordée. Elles ne peuvent donc plus embaucher de handicapés comme elles le souhaitent. Comment le Gouvernement entend-il résoudre ce problème ? (Applaudissements sur les bancs socialistes)
Mme Françoise Henneron. - Je souhaite tout d'abord saluer les efforts consentis par le Gouvernement en matière de dépenses sociales dans le contexte de crise actuelle. Les crédits de paiement de la mission « Solidarité, insertion et égalité des chances » augmentent de 10,6 %, ce qui est considérable. Le budget du programme « Handicap et dépendance » augmente de 5,6 %, conformément aux orientations fixées par le Président de la République dans son discours du 10 juin 2008. L'allocation aux adultes handicapés sera revalorisée de 25 % entre 2007 et 2012. L'insertion professionnelle des personnes handicapée est favorisée, avec la création de 1 400 places en établissements et services d'aide par le travail (Esat).
Les champs de la mission « Solidarité, insertion et égalité des chances » sont vastes. J'évoquerai plus particulièrement la lutte contre la pauvreté, avec la création du RSA. On compte 7,9 millions de personnes qui vivent au-dessous du seuil de pauvreté. En 2008, une mission sénatoriale d'information a constaté que le visage de la pauvreté s'était transformé avec l'émergence de la pauvreté au travail.
Aboutissement de nombreuses réflexions, le RSA introduit une rupture majeure dans la mesure où il fait des revenus du travail le socle des ressources des individus et le principal rempart contre la pauvreté. Il est donc ouvert à tous ceux dont les revenus sont inférieurs au seuil de pauvreté. Grâce à lui, chaque heure travaillée se traduira effectivement par un accroissement du revenu. En outre, tout avantage social sera désormais accordé en fonction des revenus et de la composition du foyer et non du seul statut d'allocataire d'un minimum social. Cette nouvelle approche rend le système de solidarité plus équitable et évite que l'allocataire perde ses avantages lors de la reprise d'un emploi. Je salue le travail remarquable réalisé par le haut-commissaire aux solidarités actives dans la conception, l'expérimentation et la généralisation du projet.
La mise en place de la loi a été exemplaire : sept décrets d'application ont été pris dans les délais prévus. Cependant, la montée en charge du dispositif est trop lente. De ce fait, les dépenses prévues au titre du RSA pour 2010 paraissent surestimées. Le RSA devrait à terme concerner plus de 3 millions de personnes. Au 30 août dernier, 1 467 000 personnes percevaient le RSA. Vous avez décidé, monsieur le haut-commissaire, de faire en sorte d'atteindre 90 % de la cible en juillet prochain. Quels sont les derniers chiffres ?
Je souligne l'urgence d'un déploiement du RSA dans les départements d'outre-mer. A la Réunion, le taux de chômage dépasse 27 % et a augmenté de 21 % en un an. Le chômage des jeunes touche 50 % des hommes de moins de 25 ans et 53 % des femmes du même âge. Le RSA devrait être étendu aux départements d'outre-mer au plus tard le 1er janvier 2011. Quelles sont vos intentions ?
La situation des jeunes est également difficile en métropole. Selon la commission de concertation sur la politique de la jeunesse, la pauvreté touche plus de 20 % de la classe d'âge des 18 à 25 ans. Le taux de chômage des moins de 25 ans est passé en un an de 18,7 à 23,9 %.
Lors de son discours du 29 septembre, le Président de la République a annoncé l'extension du RSA aux moins de 25 ans qui ont exercé une activité professionnelle. A l'Assemblée nationale, le Gouvernement a déposé un amendement en ce sens. Je me réjouis de ce geste. Quand cette mesure doit-elle entrer en vigueur ?
Le plan d'urgence pour l'emploi des jeunes a mis l'accent sur la relance de l'apprentissage, sur l'aide aux contrats de professionnalisation et sur le développement des contrats aidés. Les entrées en apprentissage se sont stabilisées et les entreprises ont pu s'ouvrir aux jeunes.
Ces mesures d'urgence ont été complétées par le plan « Agir pour la jeunesse » annoncé par le Président le 29 septembre. Ce plan propose une approche globale de la formation, de la lutte contre le décrochage scolaire, de l'insertion. Ainsi, 135 millions seront consacrés aux jeunes en difficulté contre 55 en 2009. J'approuve cette démarche d'ensemble.
Ce budget témoigne d'une réelle constance dans la mise en oeuvre de la politique de solidarité. Nous saluons le courage du Gouvernement, qui poursuit ses efforts malgré la crise. Notre groupe lui apportera évidemment tout son soutien. (Applaudissements à droite)
La séance est suspendue à 20 heures.
présidence de M. Roger Romani,vice-président
La séance reprend à 22 heures.
M. le président. - Avant de donner la parole à Mme Pasquet, je veux rappeler que nous avons pris beaucoup de retard. Je demande donc à chacun, avec une certaine solennité, de respecter son temps de parole pour ne pas ajouter à la fatigue des parlementaires, des ministres et du personnel.
M. Robert del Picchia. - On pourrait même raccourcir un peu !
Mme Isabelle Pasquet. - La hausse de plus de 11 % des crédits de cette mission est un trompe-l'oeil : elle correspond à la seule mise en oeuvre du RSA. Vous réduisez de 29 % la politique de soutien aux familles monoparentales au moment où elles en ont le plus besoin avec la crise ! Un paradoxe quand le ministre de l'intérieur parle d'imposer un couvre-feu pour les mineurs, autrement dit évoque des sanctions contre ces familles. L'an dernier, déjà, vous diminuiez les moyens des réseaux d'écoute, d'appui et d'accompagnement des parents, créés en mars 1999, si effaces pour la prévention. Nous déplorons également le recul de 6 % du budget réservé à l'action « Accès des femmes aux responsabilités et à la prise de décision » alors que les femmes représentent 60 % des emplois non qualifiés et que leur rémunération reste, en moyenne, inférieure de 27 % à celle des hommes. Cette inégalité justifiait le dispositif de la majoration de durées d'assurance que vous avez prétendument réformé au nom de l'équité au détriment des femmes. Nous demandons au Gouvernement de renforcer les sanctions à l'encontre des 95 % d'entreprises qui n'ont pas signé d'accord sur l'égalité salariale avant le 31 décembre 2010, pourtant prévu dans la loi du 23 mars 2006. Madame Morano, vous avez déclaré : « on voit bien que ça ne marche pas. Il faut mettre en place un dispositif qui soit beaucoup plus coercitif ». Il faut maintenant passer aux actes ! Enfin, la hausse de 1,6 % des crédits, insuffisante pour compenser l'inflation, ne permettra pas de soutenir les efforts du secteur social et médico-social en faveur de la formation et de la reconnaissance des personnels. Résultat, les établissements renonceront à créer des places, ce qui est pourtant nécessaire. Votre politique de rigueur budgétaire porte incontestablement atteinte aux populations qui ont besoin de toute la solidarité nationale.
Enfin, le RSA, dépourvu de la vocation d'insertion du RMI, est une nouvelle aubaine pour les employeurs puisque les bénéficiaires, contraints d'accepter tout emploi proposé, ne peuvent faire valoir leurs droits, notamment en termes de rémunération. D'ailleurs, seuls 9 % des bénéficiaires du RSA ont retrouvé le chemin de l'emploi, dont moins d'un tiers a eu accès à un emploi stable, soit un CDI ou un CDD de plus de six mois. En outre, son mode de financement est injuste : malgré vos assurances, monsieur Hirsch, les revenus de l'épargne des plus riches ne sont pas les seuls taxés, les bénéficiaires du RSA eux-mêmes sont mis à contribution. Selon Politis, de très nombreux bénéficiaires se sont émus de cette taxation si bien, monsieur le ministre, que vous avez été contraint de la reconnaître récemment. (M. Martin Hirsch, haut-commissaire, s'étonne) En fait, livret d'épargne populaire, livret A, livret de développement durable et même livret enfant sont pris en compte. Et Politis de citer un exemple éclairant : « cette taxation consiste par exemple à déduire du RSA 3 % du montant de l'indemnité de licenciement que vient de percevoir une personne au chômage ». « Si cette somme a été déposée, par exemple, sur un livret A, 4 % seront déduits ». Cette situation est d'autant plus inacceptable que la création du RSA a entraîné la suppression des droits connexes, notamment de la CMU-c aujourd'hui soumise à condition de ressources, de la suppression de la prime pour l'emploi, de la suppression de l'exonération de la taxe d'habitation et de la redevance audiovisuelle pour ceux qui réussissent à retrouver un petit boulot. Les faits nous donnent donc raison. Lors des débats, nous avions soutenu que les salariés privés d'emplois ne sont pas responsables de leur propre situation.
M. Martin Hirsch, haut-commissaire aux solidarités actives contre la pauvreté, haut-commissaire à la jeunesse. - C'est un fait !
Mme Isabelle Pasquet. - La faible utilisation du dispositif du RSA complément montre qu'il ne fallait pas agir sur les salariés, qui n'ont pas besoin d'incitation pour reprendre un emploi, mais sur les entreprises. Quant au RSA jeunes, les conditions d'accès sont très restrictives -j'y reviendrai à l'article 59 quater. Enfin, les collectivités doivent supporter les désengagements répétés de l'État : seules 80 % des dépenses de RSA sont réellement compensées. Pour toutes ces raisons, nous voterons contre les crédits de cette mission.
Mme Muguette Dini. - Les rapporteurs s'interrogent sur la nouvelle baisse des crédits alloués à l'accompagnement des familles. Moi, je m'en inquiète car une politique d'appui à la parentalité me semble un enjeu important pour notre société d'aujourd'hui et de demain. « Après une baisse de 33 % en 2009, les crédits alloués à cette action diminueront encore de 6,5 % en 2010, sans qu'il soit véritablement possible d'en expliquer les raisons » explique M. Paul Blanc, dans son rapport pour avis au nom des affaires sociales. Les rapporteurs spéciaux des finances parlent, quant à eux, d'une probable sous-budgétisation, d'approximations du Gouvernement et d'incertitudes.
Or, madame la ministre, accompagner les parents dans leur rôle et dans leur responsabilité éducative, favoriser la qualité et la continuité des relations parents-enfants ne peut souffrir d'approximations et d'incertitudes !
Depuis quarante ans, la famille s'est profondément transformée. La vie conjugale se vit à durée limitée et devient plurielle. Le nombre des mariages baisse, quand augmente celui des divorces, des naissances hors mariage, des familles recomposées et des familles monoparentales. Moins institutionnalisée, la vie familiale suscite davantage de questionnements. Les rapports entre parents et enfants ont aussi beaucoup évolué et certains parents ont besoin de nouveaux repères pour donner sens à leur rôle éducatif.
Le soutien à la parentalité fait partie des politiques familiales depuis la fin des années 1990. Il faut poursuivre et accentuer nos efforts en ce sens, conformément aux recommandations du Conseil de l'Europe, qui parle de « parentalité positive ».
Je citerai trois formes d'aide publique très opportunes. Les réseaux d'écoute, d'appui et d'accompagnement de la parentalité s'adressent à toutes les familles car chacune peut, un jour, en avoir besoin. Ils sont destinés à aider les parents dans les phases charnières du développement des enfants, quand l'exercice de l'autorité parentale peut être mis à l'épreuve.
La médiation familiale offre un temps d'écoute, d'échange et de négociation qui permet d'évoquer un conflit familial, de prendre en compte les besoins de chaque membre de la famille, de reconstruire le lien familial lors de ruptures ou de séparations, grâce à l'intervention d'un tiers indépendant, qualifié et sans pouvoir de décision.
Les établissements d'information et de conseil conjugal et familial, parmi lesquels ceux du Mouvement français pour le planning familial, sont chargés de l'accueil, de l'information, de la formation et de l'éducation à la sexualité, mais aussi de la préparation à la vie de couple ou de la gestion des dysfonctionnements familiaux. Les élus locaux que nous sommes connaissent leur importance. Lors de votre audition devant la commission des affaires sociales, vous avez fait part, madame la ministre, de votre volonté de développer l'éducation sexuelle dans les établissements scolaires ; je vous encourage à faire appel à l'expertise du Mouvement français pour le planning familial.
Hélas, ce budget est très en deçà des besoins. La présidente de la commission des affaires sociales que je suis est extrêmement consciente de la situation dégradée des finances publiques mais elle est également convaincue de l'importance des actions de soutien aux familles. M. le rapporteur pour avis évoque une augmentation de la contribution de la Caisse nationale d'allocations familiales dans le cadre du fonds d'action sociale, qui expliquerait la résorption progressive des crédits de l'État. Pouvez-vous nous confirmer cette information ?
En espérant que vous apaiserez mes inquiétudes, je vous annonce que la majorité de mon groupe votera ce budget. (Applaudissements au banc des commissions)
Mme Anne-Marie Escoffier. - Le budget de la solidarité, de l'insertion et de l'égalité des chances revêt une importance particulière en cette période de crise économique et sociale. Il offre à la représentation nationale l'occasion de redire son souci du sort des plus démunis et de souligner qu'il ne saurait y avoir de bonne politique, y compris budgétaire, sans humanisme. Je me félicite donc de la hausse de plus 10 % de ce budget. Les cinq programmes correspondent, hélas, à des besoins bien réels liés au chômage, à la pauvreté et, malgré l'évolution du droit et des moeurs, à la précarité que connaissent les handicapés et les femmes. Je me réjouis de la hausse de 25 % de l'allocation adulte handicapé, tout en regrettant qu'elle ne doive intervenir qu'en 2012. Quant à l'égalité des sexes, pour laquelle nous nous battons depuis tant d'années, elle est loin d'être acquise et le budget qui y est consacré reste bien modeste. En ce début du XXIe siècle, la condition des femmes se dégrade de manière alarmante, comme le montrent les discriminations professionnelles, les violences conjugales ou la multiplication du nombre de femmes qui élèvent seules leurs enfants.
Le principal poste budgétaire de cette mission concerne la lutte contre la pauvreté, et particulièrement le RSA. Les crédits alloués au fonds national de sécurité active qui gère le RSA activité -les départements ayant la charge du RSA socle, l'ancien RMI- augmentent de 189 % pour se monter à 1,7 milliard d'euros. Je m'étonne de la proposition des rapporteurs de diminuer de 500 millions d'euros ces crédits au motif qu'ils auraient été surévalués. Si la reprise économique était vérifiée et la baisse du chômage entamée, je serais la première à m'en féliciter. Mais tel n'est pas le cas. Vous pouvez être assurés de l'hostilité du groupe RDSE à cette mesure.
Je note que le nombre de bénéficiaires du RSA socle a augmenté de 4,4 % entre juin et septembre : les départements sont inquiets car c'est sur eux que repose cette charge. A l'heure où la suppression de la taxe professionnelle jette les collectivités locales dans un grand désarroi, prenons garde à ne pas charger une nouvelle fois leur barque en élargissant leurs missions sans compensation financière.
Cette remarque vaut aussi pour l'aide aux personnes âgées : je pense en particulier au maintien à domicile ou au placement en établissement spécialisé. La question des aînés sera incontestablement au coeur des discussions budgétaires à venir, en raison de l'allongement de la durée de la vie et de l'augmentation du nombre de personnes âgées dépendantes qui sont, aujourd'hui, 795 000 et qui seront 1,1 million en 2040. Nous devons préparer la nation à cette échéance et assurer à ces personnes une vie digne et décente. Leur pouvoir d'achat s'est nettement dégradé et certaines d'entre elles doivent se tourner vers des associations caritatives. Le nouveau régime de la protection juridique des majeurs, entré en vigueur cette année, a modifié substantiellement les charges de l'État mais il reste bien des incertitudes sur son financement.
Ce budget réserve une place trop mince à nos aînés, dont la plupart touchent une retraite insuffisante. Les légitimes revendications des conjoints survivants restent insatisfaites : ils se plaignent des conditions limitant l'augmentation du taux de réversion et des menaces pesant sur la bonification de deux ans par enfant et sur l'attribution d'une demi-part fiscale supplémentaire.
Ce budget est-il à la hauteur des ambitions affichées ? Non, car il comporte trop de zones d'ombre et d'insuffisances. C'est pourquoi la majorité du groupe RDSE ne le votera pas. (Applaudissements sur les bancs socialistes)
Mme Annie Jarraud-Vergnolle. - La France de Nicolas Sarkozy ne ménage pas ses indigents. Je vous épargnerai un couplet de plus sur l'égalité des chances, sujet qui se passe désormais de commentaire, dans cette enceinte comme à la Défense... Mais la solidarité, pas plus que l'insertion, ne fait partie du bagage idéologique de la majorité, qui débloque plus facilement des crédits d'urgence pour sauver les banques de la faillite que pour financer les structures et programmes nécessaires à l'endiguement de la pauvreté. C'est sans doute pour cette raison, monsieur le haut-commissaire, qu'il a fallu compter sur l'ouverture pour y pourvoir !
Les cadeaux fiscaux associés à un discours sur le mérite confinent à l'indécence lorsque des millions de Français vivent dans la pauvreté. En France, on encourage les plus riches, qui rechignent à partager leurs gains mais n'hésitent pas, le cas échéant, à socialiser leurs pertes. On leur fournit un bouclier prétendument mérité tandis que l'on demande aux bénéficiaires des minima sociaux de prouver leur éligibilité tous les trois mois ! L'idée sous-jacente à ce discours sur le mérite, c'est que si les plus riches ont mérité leur fortune, les plus pauvres méritent aussi leur sort...
Il est délicat de se prononcer sur la mission « Solidarité », qui sert à financer des mesures sûrement insuffisantes mais pourtant nécessaires. Comme l'eau s'insinue partout, la pauvreté gagne en France des catégories de personnes toujours plus nombreuses.
Seize millions de connexions sur le site de test d'éligibilité au RSA enregistrées par la Cnaf depuis juin ! Près de 8 millions de personnes vivent en dessous du seuil de pauvreté ! Le chômage a augmenté de plus de 20 % en un an, sans compter les personnes radiées ou non comptabilisées qui n'en sont pas moins précaires ! Et selon les chiffres mêmes du haut-commissariat aux solidarités actives, le nombre d'allocataires RSA socle pourrait augmenter de 10 % d'ici la fin de l'année. Ajoutons les 370 000 travailleurs pauvres contraints au RSA chapeau en complément de revenu. Si la montée en puissance du RSA est relativement faible, c'est sans doute à cause de la complexité des démarches et du caractère intrusif du formulaire.
Compte tenu de l'ampleur de la crise, la progression des crédits dédiés au RSA nous rassure à peine. Le financement de ce dispositif n'est en effet pas sécurisé et risque de peser d'avantage sur les départements, qui plus est à la veille de la réforme des collectivités territoriales. Ensuite, un certain nombre de demandeurs d'emploi en fin de droit vont demander à bénéficier du RSA. Pourtant, nos rapporteurs estiment que la dotation de 1,67 milliard est sur-calibrée. D'ailleurs, l'Assemblée nationale a déjà amputé les crédits de 80 millions. Sur la base de prévisions qu'il juge réalistes, notre rapporteur va nous proposer une diminution de 500 millions, avec un redéploiement de 40 millions vers les maisons départementales des personnes handicapées (MDPH) et les fonds départementaux de compensation. Si je souhaite que le sort des MDPH s'améliore, je ne suis pas convaincue qu'il faille déshabiller l'un pour habiller l'autre.
Mme Raymonde Le Texier. - Très bien !
Mme Annie Jarraud-Vergnolle. - C'est d'autant plus vrai que l'État doit toujours 34,3 millions aux MDPH. Cette dette résulte des non-compensations de postes de fonctionnaires initialement prévus par la loi Handicap du 11 février 2005. Paul Blanc et moi-même avions déjà alerté le Gouvernement avec notre rapport d'information sur la mise en oeuvre des MDPH depuis 2006. Nous avons constaté une très grande disparité de situations selon les départements, la participation de l'État pouvant varier de 12 à 67 %, les conseils généraux devant compenser le manque financier. Mais de nombreux départements ne peuvent plus payer. Ainsi, l'État doit un million à mon département. Quand apurerez-vous cette dette afin que les MDPH repartent sur de nouvelles bases et qu'elles puissent, sereinement, remplir leur mission ?
Nous regrettons également que les pensions d'invalidité ne soient pas réévaluées comme l'allocation aux adultes handicapés (AAH). Même si l'État ne participe pas directement, la prestation de compensation du handicap (PCH) est financée par les départements et la CNSA. A l'instar de l'allocation personnalisée d'autonomie (APA), le taux de couverture de la CNSA, s'il était de 100 % en 2008, sera ramené à 91 % en 2009 et à 76,8 % en 2010. Cette politique se fait au détriment des conseils généraux, ceux-ci étant pris en tenaille par l'État. On ne peut que constater l'insuffisance des transferts de l'État aux départements et un amoindrissement de leurs ressources propres. Nous déplorons ce désengagement progressif de l'État à l'égard de ses citoyens les plus fragiles ou les plus pauvres. (Applaudissements socialistes)
Mme Maryvonne Blondin. - Je remplace Mme Campion qui a souhaité que je vous transmette les éléments de son intervention.
C'est en période de crise que la solidarité doit trouver toute sa signification. Malheureusement, les écarts entre les Français se creusent. Le nombre de nos concitoyens en situation d'exclusion ne cesse de progresser.
Si cette mission abonde les crédits du RSA, les crédits alloués au titre des actions en faveur des familles vulnérables, de l'égalité entre les hommes et les femmes et de la conduite et du soutien des politiques sanitaires et sociales ne connaissent pas la même progression, loin s'en faut. Une lecture plus approfondie démontre le peu d'ambition du Gouvernement.
Alors que la convention internationale des droits de l'enfant a fêté ses vingt ans, le programme qui regroupe les moyens de fonctionnement des administrations sanitaires et sociales permet d'identifier les faibles moyens dévolus au Défenseur des enfants : 3,18 millions ! La raison en est certainement sa suppression programmée par le Gouvernement. Ce nouveau dérapage ne va pas améliorer les droits de l'enfant. Quelle sera la visibilité de la mission d'un adjoint à un Défenseur des droits ? Comment pourront être préservés les modes d'intervention spécifiques alors que cette institution avait trouvé toute sa légitimité et sa crédibilité auprès des jeunes : plus de 20 000 requêtes ont été traitées depuis 2000. Vous anéantissez la confiance et le dialogue qui s'étaient instaurés.
La France a déjà été pointée du doigt par l'ONU, en mai, qui s'est inquiétée d'une régression en matière de droits des enfants ces dernières années. Le bilan est donc peu glorieux pour un pays qui ne manque jamais de rappeler qu'il est la patrie des droits de l'homme.
La suppression de cette institution démontre le peu d'intérêt du Gouvernement pour la protection de l'enfance: D'un côté, les conseils généraux sont devenus chefs de file de la protection de l'enfance et sont poussés par l'État à faire toujours plus. De l'autre, les projets gouvernementaux actuels relatifs à la réforme des collectivités territoriales tendent à les asphyxier financièrement.
Nous avons déjà évoqué le financement très insuffisant du fonds dédié à la protection de l'enfance. M. le Premier ministre s'est expliqué sur ce désengagement : le Gouvernement voulait privilégier le financement des maisons départementales des personnes handicapées. Or, le désengagement auprès des MDPH est tout aussi réel !
Notre collègue Paul Blanc nous proposera d'y remédier en redéployant des crédits destinés au RSA. On déshabille Pierre pour habiller Paul !
M. Paul Blanc, rapporteur pour avis. - Eh oui !
Mme Maryvonne Blondin. - Avouez que ce procédé n'est pas satisfaisant !
Ce décalage entre les discours et la réalité est tout aussi sensible à la lecture du programme « Actions en faveur des familles vulnérables ». Ainsi, les crédits déconcentrés d'accompagnement des familles diminuent de 6,5 % et passent de 25 millions en 2007 à 12,6 millions pour 2010 ! En 2009, une enveloppe de 2,5 millions était prévue pour créer 19 maisons des adolescents. Le budget 2010 en prévoit 25 nouvelles pour une enveloppe de 2 millions ! Quelle logique !
Enfin, la même déconvenue est observée par les réseaux d'écoute et d'appui et d'accompagnement des parents, mais nous avons déjà évoqué cette question avec Mme Pasquet.
Le programme relatif à l'égalité entre les hommes et les femmes progresse de 1,3 % pour atteindre 29,5 millions : il reste le programme le plus modeste alors qu'il concerne la moitié de notre société. Cette augmentation reste largement insuffisante pour suivre les préconisations de la mission d'évaluation de la politique de prévention et de lutte contre les violences faites aux femmes.
Je voudrais maintenant dire un mot plus personnel, les autres points de l'intervention de Mme Campion ayant été abordés par d'autres oratrices. Nous, les femmes, nous n'aimons pas répéter ce que d'autres ont dit.
Je regrette que le Gouvernement ne montre pas le même empressement à prendre des mesures efficaces à l'encontre des entreprises qui pratiquent l'inégalité à l'embauche, l'inégalité salariale et l'inégalité dans la promotion et la responsabilité professionnelle.
Ce qui me révolte, aussi, c'est l'attaque sournoise et anticonstitutionnelle faite par le Gouvernement quant à la parité dans les fonctions électives.
Mme Raymonde Le Texier. - Très bien !
Mme Maryvonne Blondin. - Le mode de scrutin des futurs conseillers territoriaux est inacceptable. J'en appelle à toutes les sénatrices pour réagir très vivement auprès de leurs groupes respectifs.
Vous nous annoncez des modifications législatives pour améliorer l'égalité entre les hommes et les femmes : encore faut-il que ces lois puissent être mises en oeuvre. Or l'action 4, relative à l'articulation des temps de vie entre vie professionnelle et vie familiale, n'est dotée que de 160 000 euros ! Nous nous inquiétons donc de la volonté du Gouvernement en la matière. (Applaudissements sur les bancs socialistes)
Mme Nadine Morano, secrétaire d'État chargée de la famille et de la solidarité. - Malgré la crise et malgré les contraintes budgétaires, ce projet de loi de finances montre que la France demeure fidèle à ses valeurs de solidarité et de générosité envers les plus fragiles d'entre nous.
Qu'il s'agisse de la politique familiale, de notre action envers les personnes handicapées ou encore de notre ambition pour promouvoir l'égalité, j'ai l'honneur d'avoir la charge d'un ministère qui témoigne, jour après jour, de l'engagement du Gouvernement à protéger les plus faibles et à préparer la France de demain.
Le programme « Handicap dépendance » marque la volonté du Gouvernement d'accompagner les promesses du Président de la République et de garantir à tous nos concitoyens de vivre dignement. Nous consacrerons 9,1 milliards aux personnes handicapées, soit une augmentation de 5,6 %.
Les crédits de l'allocation adulte handicapé augmentent de 6,5 %. Le Président de la République avait annoncé qu'elle serait revalorisée tous les ans à partir de 2008 pour atteindre 25 % d'augmentation en 2012, ce qui représente un effort inédit et exceptionnel. Ce projet de loi de finances consacre une nouvelle fois cette promesse : l'AAH sera augmentée de 4,4 % l'année prochaine après l'avoir été de 9,7 % depuis début 2008.
Vos deux commissions ont souligné que les prévisions du Gouvernement en matière de dépenses d'AAH étaient trop optimistes. Elles tiennent compte de l'évolution de l'emploi, des prévisions de croissance et des réformes que nous mettrons en oeuvre en 2010. Et le collectif pour 2009 tient compte des dépenses AAH et API (allocation de parent isolé) 2009, supérieures aux prévisions, afin de ne pas alourdir la charge financière supportée par la caisse nationale d'allocations familiales.
Nous travaillons en effet à concrétiser les promesses du Président de la République : le groupe d'experts missionné sur l'employabilité des demandeurs d'AAH a demandé une semaine supplémentaire pour mettre en forme son rapport, je les recevrai le 9 décembre. Nous travaillons avec la Cnaf et les services pour mettre en oeuvre la trimestrialisation et la simplification des modalités de cumul entre l'AAH et les revenus d'activité le plus tôt possible en 2010.
Aider les personnes handicapées à être pleinement des citoyens, c'est aussi leur offrir la possibilité d'intégrer une structure médico-sociale d'aide par le travail. Là encore, c'est une promesse du Président de la République que nous mettons en oeuvre. Madame Pasquet, 1 400 places d'établissements et services d'aide par le travail (Esat) seront créées l'année prochaine et nous assurerons le financement des 117 400 places créées à ce jour. L'État finance également l'aide au poste pour garantir la rémunération des travailleurs d'Esat. Les crédits de cette action augmentent de 2 %.
Concernant l'accès aux droits, le Gouvernement souhaite garantir aux maisons départementales des personnes handicapées (MDPH) tous les moyens de fonctionnement, qu'il apporte en qualité de membre du groupement d'intérêt public. Ce sont d'abord des moyens financiers : nous reconduisons la dotation de 14 millions que l'État apporte chaque année. Le programme 157 prévoit 7,1 millions nécessaires à la compensation des postes de l'État qui n'ont pu être mis à disposition. Cela représente une augmentation de 54 % de ces crédits.
Je rappelle, madame Jarraud-Vergnolle, qu'en 2009, nous avons délégué aux départements 16,8 millions pour la compensation des postes vacants en MDPH.
Mme Maryvonne Blondin. - Insuffisant.
Mme Nadine Morano, secrétaire d'État. - Ces crédits se sont ajoutés aux crédits de la CNSA : 45 millions de dotation pérenne de fonctionnement et 15 millions supplémentaires versés en 2009 en compensation des missions nouvelles des MDPH, sur I'AAH et la prestation de compensation pour les enfants.
Je vous confirme, messieurs Cazalet et Blanc, que nous travaillons dans deux directions complémentaires : établir des règles de compensation pour 2010 qui soient claires, complètes et comprises de tous, et réaliser un état des lieux des engagements qui n'auraient pas été tenus par l'État vis-à-vis des conseils généraux pour le fonctionnement des MDPH. C'est dans ce sens que nous avons demandé qu'une mission d'appui de l'Igas établisse un diagnostic partagé sur cette question.
Nous travaillons à une solution qui permette à l'avenir de garantir les moyens de l'État dans les MDPH et qui préserve la gouvernance locale de cette politique qui, je le rappelle, associe étroitement l'État, les conseils généraux, les caisses de sécurité sociale et les associations représentant les usagers.
Plusieurs d'entre vous ont abordé les orientations pour 2010 du programme 137 qui a pour objectif de faire coïncider l'égalité de droits, désormais acquise en France, avec l'égalité réelle. Avec des crédits de 29,5 millions, ce programme permet les politiques nécessaires à la reconnaissance des droits des femmes.
Conformément aux engagements du Président de la République, une discussion avec les partenaires sociaux, membres de la commission nationale de la négociation collective, a été engagée sur la base d'un document d'orientation définissant les axes que le Gouvernement souhaite voir traités en matière d'égalité professionnelle.
La lutte contre les stéréotypes sera également poursuivie en renforçant les actions, en partenariat avec l'éducation nationale, pour sensibiliser les élèves au respect mutuel entre les sexes, qui s'apprend dès le plus jeune âge. Cette problématique sera développée de la cadre de la commission « Image des femmes » afin de lutter contre les stéréotypes diffusés par les médias.
Le volet concernant l'égalité en droit et en dignité porte prioritairement sur la mise en oeuvre du second plan interministériel de lutte contre les violences faites aux femmes. J'ai annoncé de nouvelles orientations du plan à l'occasion de la journée internationale de lutte contre les violences faites aux femmes, le 25 novembre dernier, qui portent à la fois sur la protection des femmes victimes de violences, la prévention de la récidive, une meilleure prise en charge des victimes et la sensibilisation de l'opinion publique. Le Premier ministre a annoncé qu'en 2010, la lutte contre les violences faites aux femmes sera une grande cause nationale et nous expérimenterons le bracelet électronique qui a donné de bons résultats en Espagne.
Le Parlement a pu disposer cette année du document de politique transversale « Politique de l'égalité entre les hommes et les femmes », qui comprend 25 programmes. Ce document, perfectible, mesure l'action interministérielle en faveur de l'égalité entre les femmes et les hommes et vise, à terme, à améliorer cette politique.
Comme vous le soulignez, monsieur Blanc, compte tenu des faibles montants de crédits des différentes actions du programme, il me semble effectivement pertinent de regrouper ces actions, notamment celle concernant l'égalité professionnelle avec celle relative à l'articulation des temps de vie.
Enfin, j'ai conscience que le programme se subdivise en un nombre excessif d'unités opérationnelles, les 62 unités nuisent à sa transparence et à son efficacité. Je m'engage donc à lancer une concertation pour restructurer ce programme pour 2010.
Le programme 106 « Actions en faveur des familles vulnérables » démontre le fort soutien que l'État apporte aux familles les plus fragiles. Ce sont 14,6 millions qui sont consacrés à l'accompagnement des familles dans leur rôle de parents. Les actions de prévention en faveur des parents en difficulté sont déterminantes pour étayer la fonction parentale. J'ai par ailleurs obtenu, dans le cadre de la convention d'objectifs et de gestion État-Cnaf 2009-2012, une augmentation de 15,5 % de ces crédits et nous avons créé le comité national de soutien à la parentalité qui aura des déclinaisons départementales.
Les maisons des adolescents ont été créées afin d'offrir dans un lieu unique un ensemble de services aux adolescents et à leur famille, en fonction de leurs besoins, notamment en matière d'offre thérapeutique et d'aide au développement d'un projet de vie. A ce jour, 76 projets de maisons des adolescents ont été financés.
Ce sont 164 millions qui sont destinés au soutien des familles monoparentales. L'allocation de parent isolé a été intégrée au revenu de solidarité active (RSA) et a donc été supprimée en tant que prestation distincte, ce qui explique la baisse des crédits inscrits sur cette action.
Les crédits inscrits en 2010 au titre de l'API couvrent les dépenses liées aux dispositions transitoires de la loi de décembre 2008 généralisant le RSA : cela concerne le maintien de la législation sur l'API dans les DOM, les primes forfaitaires aux bénéficiaires de l'API éligibles au mois de mai 2009, le RSA expérimental -qui a été tenté dans une trentaine de départements- et les contrats aidés dont bénéficiaient les allocataires de l'API en mai 2009 jusqu'à leur date d'expiration.
Ce sont enfin 228,8 millions qui vont à la protection de l'enfance et des familles.
Vous avez posé, monsieur Cazalet, la question du libellé du programme « Actions en faveur des familles vulnérables » en évoquant notamment les crédits inscrits en faveur de la protection juridique des majeurs. Il est vrai que, désormais, la part la plus importante de cette action est consacrée au financement des mesures « lourdes » -tutelle, curatelle, sauvegarde de justice-, pour des personnes vulnérables qui ne perçoivent pas de prestation sociale ou qui bénéficient d'une prestation sociale servie par le département. Cela correspond à la réforme très attendue sur la protection juridique, entrée en vigueur au 1er janvier 2009. En 2010, l'État financera 190 000 mesures, soit 40 % du total des mesures de protection juridique des majeurs.
Cette action permet aussi de contribuer au financement du Giped (Groupement d'intérêt public pour l'enfance en danger), à hauteur de plus de 2,1 millions. Ce groupement est chargé du service national d'accueil téléphonique de l'enfance en danger et de l'observatoire national de l'enfance en danger. II s'agit d'un financement à parité avec les conseils généraux et qui marque le volontarisme du Gouvernement en faveur de la protection de l'enfance.
Je veux également répondre à votre légitime interrogation sur le fonds national de protection de l'enfance. Le Président de la République a organisé, lors du 20e anniversaire de la convention internationale des droits de l'enfant, le 20 novembre dernier, une rencontre avec les principales associations de protection de l'enfance. A cette occasion, il m'a confié la conduite d'états généraux de l'enfance que je mènerai dès le premier semestre 2010. II m'a également demandé d'étudier les formules permettant d'atteindre les objectifs du fonds prévu dans la loi du 5 mars 2007, dont la faisabilité s'était heurté à d'importantes difficultés juridiques. Le but serait d'améliorer les procédures de signalement pour éviter le renouvellement de drames comme celui de la petite Marina et de venir en aide à l'enfance pauvre et fragilisée.
S'agissant de la défenseure des enfants, je précise que ce qui nous importe, c'est la défense des droits des enfants ; les pays européens qui se sont assignés cet objectif ont obtenu de bons résultats. La défenseure des enfants n'avait aucun pouvoir d'injonction... Notre nouvelle démarche donnera à ces droits une valeur constitutionnelle. (Applaudissements à droite et au centre)
M. Martin Hirsch, haut-commissaire aux solidarités actives contre la pauvreté, haut-commissaire à la jeunesse. - (Applaudissements à droite) Je rends hommage aux rapporteurs (applaudissements sur les bancs UMP) qui ont examiné avec soin les crédits, analysant leurs montants mais aussi leur signification. Nous avons travaillé à une réforme qui a pris sa source ici, dans le rapport sur les effets de seuils et les minima sociaux. J'étais venu devant vous pour vous demander l'autorisation d'expérimenter le RSA. La Mayenne de M. Arthuis fut l'un des premiers départements à appliquer le dispositif et c'est là que le Président de la République est venu en annoncer la généralisation. Je vous ai donc présenté un projet de loi il y a un an.
M. Charles Pasqua. - Très bien.
M. Martin Hirsch, haut-commissaire. - Et c'est au Sénat que, par amendements, un financement solide, à la charge de l'État et des départements, a été défini.
M. Jean-Claude Carle. - Très bien !
M. Martin Hirsch, haut-commissaire. - Certains s'inquiétaient : prévoyait-on assez d'argent ? Les promesses seraient-elles honorées ? La loyauté à l'égard des bénéficiaires comme à l'égard des départements était-elle assurée ? Ce soir, je suis venu vous dire que oui ! Au point que vous vous demandez à présent si nous ne sommes pas trop prudents.
M. Charles Pasqua. - La commission des finances est ainsi !
M. Martin Hirsch, haut-commissaire. - Je crois pour ma part qu'en période de crise, la prudence s'impose. Nos financements préservent l'avenir. Merci à Mme Henneron d'avoir parlé de courage à engager une telle réforme, à Mme Escoffier d'avoir souligné l'importance du volet emploi dans le nouveau dispositif. Du reste, dans les départements d'expérimentation du RSA, le taux de retour à l'emploi était plus élevé que dans les zones de RMI.
Le montant moyen de RSA pour ceux qui ont déjà un travail se monte à 187 euros. Nous l'avions estimé l'an dernier à 110, il a été de 187 les premiers mois, 157 actuellement et nous prévoyons une stabilisation autour de 130. MM. de Montgolfier et Arthuis ont calculé recettes et dépenses et ont estimé qu'il était possible de dégager 500 millions d'euros.
M. Jean Arthuis, président de la commission des finances. - Eh oui...
M. Martin Hirsch, haut-commissaire. - En septembre, dernier mois connu, il y a eu 78 000 entrants. Les dépenses du RSA complémentaire l'an prochain, compte tenu du rythme de montée en charge, devraient atteindre 2,6 milliards d'euros ; l'aide personnalisée, que nous avons voulu individualiser, se monte à 150 millions. Il faut ajouter à cela 77 millions d'euros pour le fonctionnement du service dans les CAF -des marges de progrès subsistent- et les 125 millions d'euros du RSA pour les jeunes. Soit un total de 2,95 milliards environ.
La contribution sur revenus financiers, contrairement à ce qu'affirme Mme Pasquet, touche les patrimoines élevés. Je rappelle que le livret A en est exonéré. Le produit de cette taxe a résisté à la crise mais sera, l'an prochain, inférieur : 1,1 milliard environ. Après annulation de crédits de 82 millions d'euros à l'Assemblée nationale et en tenant compte des reports de 2009, les ressources sont de 3,2 milliards d'euros et les dépenses prévisionnelles, de 3 milliards. Nous avons une marge de sécurité de 200 millions. Vous avez donc été entendus.
Il faut maintenir cette marge car dans une période comme celle-ci, tout peut changer très vite. Préservons aussi le fonds de la tentation qui pourrait saisir l'État, celle de faire participer un peu plus les départements, par exemple pour prendre en charge la prime de Noël. Nous ne voulons pas de cela ! Et il me serait bien déplaisant d'avoir à revenir ici pour augmenter le taux de la taxe ou la part prise en charge par les conseils généraux. Vous avez accompagné d'un oeil critique et bienveillant la réconciliation de la solidarité et du travail : c'est l'une des plus hautes aspirations de votre Haute assemblée. (Applaudissements à droite et au centre ; Mme Raymonde Le Texier applaudit également)
Examen des crédits
M. le président. - Amendement n°II-113 rectifié, présenté par M. Cazalet au nom de la commission des finances.
Modifier ainsi les crédits des programmes :
(en euros)
Programmes |
Autorisations d'engagement |
Crédits de paiement |
||
|
+ |
- |
+ |
- |
Lutte contre la pauvreté : revenu de solidarité active et expérimentations sociales |
100 000 000 |
100 000 000 |
||
Actions en faveur des familles vulnérables |
||||
Handicap et dépendance |
40 000 000 |
40 000 000 |
||
Égalité entre les hommes et les femmesDont titre 2 |
||||
Conduite et soutien des politiques sanitaires et socialesDont titre 2 |
||||
TOTAL |
40 000 000 |
100 000 000 |
40 000 000 |
100 000 000 |
SOLDE |
- 60 000 000 |
- 60 000 000 |
M. Albéric de Montgolfier, rapporteur spécial. - Nous avions à l'origine estimé à 800 millions d'euros la surestimation des dépenses. En conservant une marge de sécurité de 300 millions, nous jugions possible de réduire ces crédits de 500 millions d'euros. Des éléments nouveaux sont intervenus, concernant le versement de la prime de Noël et le RSA jeunes, sans oublier que l'Assemblée nationale a annulé des crédits. Au total, ces mouvements représentent 286 millions d'euros de moindres recettes.
Le rythme de montée en charge est difficile à évaluer, mais il est rapide selon le M. le haut-commissaire ; les montants unitaires, a-t-il également indiqué, sont supérieurs à ce qui était prévu. J'ai été, pour ma part, échaudé par d'autres expériences qui se sont faites au détriment des conseils généraux, je songe par exemple à l'APA. Je souhaite que le haut-commissaire prenne l'engagement que la prime de Noël ne sera pas financée par des artifices, comme elle l'a été l'an dernier, mais par les crédits du RSA. Finalement, en reconsidérant nos calculs à la lumière de ces éléments nouveaux, nous estimons plus sage de ne proposer que 100 millions d'euros de réduction de crédits.
Mme Raymonde Le Texier. - Retirez donc l'amendement...
M. Albéric de Montgolfier, rapporteur spécial. - Mais le ministre nous apportera peut-être de plus amples précisions sur les chiffres, et notamment le montant moyen par bénéficiaire ?
Nous ajoutons une autre rectification concernant l'affectation de 40 000 euros au handicap.
M. le président. - Amendement identique n°II-186 rectifié, présenté par M. Paul Blanc, au nom de la commission des affaires sociales.
M. Paul Blanc, rapporteur pour avis. - Nous avons rectifié notre amendement dans le même sens que la commission des finances. Nous nous rallions au n°II-113 rectifié.
Notre amendement initial proposait de consacrer 40 millions au financement des maisons départementales des personnes handicapées et des fonds départementaux de compensation. Cela donnerait une bouffée d'oxygène aux départements, nombre d'entre eux ayant été sollicités par les MDPH pour équilibrer leur exercice. L'État a une dette à solder au titre des exercices précédents : ne perdons pas l'occasion de le faire aujourd'hui. Quant aux fonds départementaux de compensation, ils n'ont reçu aucun crédit de l'État depuis trois ans.
M. Martin Hirsch, haut-commissaire. - Depuis quelques jours, nous discutons beaucoup de cette question avec les commissions. Vous avez certainement compris pourquoi nous défendons ces crédits. Quant au désaccord dans leur estimation, il me semble relativement faible.
Le montant moyen du RSA complémentaire versé aux personnes qui travaillent a été évalué initialement à 109 euros par mois. En août, il a été réévalué à 185 euros. Selon nos derniers calculs, il représente 157 euros. Une modélisation a été réalisée avec la direction du Trésor : le RSA activité devrait se stabiliser à 130 euros par mois en mai 2010. C'est le résultat de l'entrée progressive dans le dispositif de personnes moins intéressées au départ parce qu'elles disposaient d'un petit peu plus de revenus. Nous sommes donc plus proches de notre estimation de 2,6 milliards que de la vôtre, de 2,3 milliards.
Lors du vote de la loi créant le RMI, en 1988, les discussions avaient englobé les départements d'outre-mer. Pour le RSA, la décision n'a pas été prise et le rendez-vous a été fixé en 2010. Nous devons garder des marges de manoeuvre, ce qui ne serait pas possible si nous réduisions les crédits de 100 millions d'euros.
Comme vous l'avez remarqué, messieurs les rapporteurs, cette réforme a été menée dans une complète transparence, tout comme la prime de Noël. Pour la première fois, nous avons pu verser celle-ci à des mères isolées. Il serait difficile de revenir l'an prochain sur cette mesure ! Albéric de Montgolfier m'a demandé si le versement de cette prime serait aussi transparent l'an prochain. Si nous votons ces amendements, même rectifiés, cela ne sera pas possible. Sinon, nous disposons des ressources nécessaires.
Il serait mal venu de revenir sur les engagements pris vis-à-vis des bénéficiaires du RSA en puisant dans ce budget, même si Paul Blanc est un redoutable défenseur de la cause des personnes handicapées... A ce sujet, vous disposerez bientôt d'un rapport qui vous précisera les montants éventuellement dus aux départements.
La représentation nationale a voté le financement de cette prestation pour les plus modestes, qui ont besoin de sécurité dans un contexte difficile. On ne peut la remettre en question chaque année au profit d'une cause plus urgente. Il faut aussi rassurer les conseils généraux sur le fait qu'on ne leur demandera pas de combler un déficit dans le financement du fonds. En retirant vos amendements, vous confirmerez les garanties que vous avez introduites dans la loi l'année dernière et nous pourrons mener cette réforme dans la confiance. Nous rendrons des comptes sur l'utilisation de cet argent. Si vous maintenez ces amendements, avis défavorable.
M. Jean Arthuis, président de la commission des finances. - M. le haut-commissaire est très convaincant : il nous a déjà amenés à réduire notre proposition de 500 à 100 millions d'euros ! Nous avions peut-être placé la barre un peu haut mais, de votre côté, vous appliquez largement le principe constitutionnel de précaution. Dans le secteur social, les inscriptions budgétaires se situent souvent en deçà des besoins, mais ce fonds est substantiellement doté... Avec la prime de Noël, qui n'était pas programmée, vous avez en quelque sorte organisé votre insolvabilité.
Notre amendement est extrêmement raisonnable, et il répond à l'attente de la commission des affaires sociales qui propose d'attribuer 32 millions aux MDPH et 8 millions aux fonds départementaux de compensation. La commission maintient son amendement rectifié. (Mme Raymonde Le Texier s'indigne) Nous avons bien noté que vous nous rendrez des comptes, mais cette obligation incombe à tout ministre. Quant à nous, il nous revient de contrôler l'action du Gouvernement et d'évaluer les politiques publiques.
Mme Raymonde Le Texier. - Vous préférez aider les restaurateurs. C'est honteux.
M. Paul Blanc, rapporteur pour avis. - J'ai entendu aujourd'hui le philosophe Luc Ferry dire que le principe de précaution, poussé à l'extrême, annihile toute possibilité d'agir dans certains domaines. Ce principe est ici poussé à l'extrême. (Mme Raymonde Le Texier proteste) Je ne voudrais pas qu'il nous empêche de transférer 40 millions vers l'aide aux handicapés.
Vous nous annoncez un rapport sur le financement des MDPH, mais nous avons déjà fait ce diagnostic, Annie Jarraud-Vergnolle et moi, dans un rapport déjà disponible : il est temps de passer au traitement !
Mme Annie Jarraud-Vergnolle. - Il est un peu inhabituel pour les socialistes de défendre la politique du Gouvernement mais j'ai calculé que la réserve prévue par le haut-commissaire lui assure une marge de sécurité de 6,25 % sur son budget global. J'ai dirigé des entreprises, comme d'autres parmi nous, et je sais que cette prévision est très raisonnable. En outre, Christine Lagarde est persuadée que l'emploi ne repartira pas en 2010, même si la conjoncture s'améliore. Compte tenu de l'augmentation du nombre de demandeurs d'emploi en 2009, le RSA devrait alors enregistrer des demandes supplémentaires.
Soyons raisonnables. Ne privons pas le fonds de ces 100 millions. Si ce budget est trop optimiste, nous pourrons y revenir après l'été prochain et, éventuellement, geler une partie de cette somme -sans pour autant la retirer du budget du haut-commissariat. (MM. Robert del Picchia et Jacques Gautier. applaudissent)
M. Martin Hirsch, haut-commissaire. - Monsieur Arthuis, dans votre département, les bénéficiaires du RSA complément d'activité ont augmenté de 56 %. Le nombre de personnes à revenu du travail faible et ayant besoin du RSA d'activité s'est accru de 86 %.
Je sais que votre département n'est pas représentatif dans la mesure où la politique d'insertion y est déjà bien développée, mais si j'extrapole ces statistiques à l'ensemble du territoire, je me retrouve un peu au-delà de la prévision... On disait, il y encore quelques jours, qu'il fallait fermer des centres de vaccination ; on sait ce qu'il en est aujourd'hui. Je crois qu'il faut laisser les vannes un peu ouvertes. Quant au principe de précaution évoqué par M. Paul Blanc, la commission des finances me demande dans son rapport de respecter un impératif de prudence, qu'elle évalue elle-même à 300 millions d'euros ; nous l'avons évalué, nous, à 230 millions...
Mme Isabelle Pasquet. - Ces amendements ne sont pour nous qu'une affaire d'écritures comptables. La question se pose de la lenteur de la montée en charge du RSA, dont on sait pourtant, au regard du nombre de connexions sur le site dédié, qu'il a suscité un certain intérêt. La lourdeur des démarches y est peut-être pour quelque chose. En outre, l'obligation d'insertion, ajoutée à la crainte des contrôles, peut freiner les personnes les plus éloignées de l'emploi. Les discours récurrents qui opposent ceux qui vivent de leur travail et les « assistés » peuvent décourager les travailleurs pauvres -qui n'en restent pas moins des exclus. J'ajoute que le processus d'insertion est complexe et ne passe pas nécessairement par l'emploi.
Comme nous ne sommes pas favorables au RSA dans sa forme actuelle, nous nous abstiendrons.
Les amendements identiques nosII-113 rectifié et II-186 rectifié ne sont pas adoptés.
M. le président. - Amendement n°II-187, présenté par M. Paul Blanc au nom de la commission des affaires sociales.
Modifier comme suit les crédits des programmes :
(en euros)
Programmes |
Autorisations d'engagement |
Crédits de paiement |
||
|
+ |
- |
+ |
- |
Lutte contre la pauvreté : revenu de solidarité active et expérimentations sociales |
40 000 000 |
40 000 000 |
||
Actions en faveur des familles vulnérables |
||||
Handicap et dépendance |
40 000 000 |
40 000 000 |
||
Égalité entre les hommes et les femmesDont Titre 2 |
||||
Conduite et soutien des politiques sanitaires et socialesDont Titre 2 |
||||
TOTAL |
40 000 000 |
40 000 000 |
40 000 000 |
40 000 000 |
SOLDE |
0 |
0 |
M. Paul Blanc, rapporteur pour avis. - Je ne pensais pas avoir à présenter cet amendement... Il s'agit de redéployer 40 millions d'euros. Sur cette enveloppe, 32 millions viennent compléter la contribution de l'État au fonctionnement des MDPH. Si les crédits inscrits pour 2010 paraissent suffisants, ils ne règlent pas la question des dettes accumulées par l'État, en particulier au titre de la compensation des postes non mis à disposition, estimées à 34,3 millions d'euros par un récent rapport de l'association des directeurs. Le complément de 8 millions abondera les fonds départementaux qui contribuent à compenser les charges liées au handicap, en complément de la PCH, afin que le reste à charge n'excède pas 10 % pour les personnes handicapées. Or les crédits destinés à abonder ces fonds n'ont pas été reconduits depuis trois ans. Il est essentiel que l'État tienne ses engagements.
M. Martin Hirsch, haut-commissaire. - C'est une variation sur l'amendement précédent... Avis défavorable pour les mêmes raisons.
L'amendement n°II-187 n'est pas adopté.
Les crédits de la mission sont adoptés.
L'article 59 quater est adopté.
Article additionnel après l'article 59 quater
M. le président. - Amendement n°II-127, présenté par Mme Pasquet et les membres du groupe CRC-SPG.
Après l'article 59 quater, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Le Gouvernement remet au parlement un rapport portant sur l'application de l'article 39 de la loi n°2005-102 du 11 février 2005 pour l'égalité des droits et des chances, la participation et citoyenneté des personnes handicapées, portant à la fois sur les conséquences financières et juridiques pour les établissements ou services d'aide par le travail, et sur les évolutions prévisibles de ce dispositif, notamment au regard des demandes déjà formulées.
Mme Isabelle Pasquet. - Les associations qui représentent les gestionnaires d'établissements et les familles s'inquiètent de l'application de l'article L. 344-2-5 du code de l'action sociale et des familles. Cet article, qui résulte de l'article 39 de la loi du 11 février 2005, prévoit qu'en « cas de rupture de contrat de travail ou lorsqu'elle n'est pas définitivement recrutée par l'employeur au terme de celui-ci, la personne handicapée est réintégrée de plein droit dans les établissements ou le service d'aide par le travail d'origine ».
Nous comprenons la logique de cet article ; personne ne doit en effet être laissé au bord de la route. Mais les établissements sur lesquels pèse cette obligation légale ne sont pas en mesure de la respecter. Chacun sait qu'ils connaissent d'importantes difficultés financières. Les gestionnaires demandent à bénéficier de l'aide à la contractualisation et des crédits à l'investissement « plan d'action immédiate » dont ils sont actuellement exclus. En raison de leur mode de financement, les Esat doivent atteindre la capacité totale d'accueil, ce qui n'est pas difficile vu les demandes ; à défaut, ils perdent de l'argent. C'est le cas s'ils conservent ne serait-ce que deux places libres pour accueillir d'éventuels retours. Ce qui est de toute façon impossible, puisque la tendance est plutôt à la suppression de places. On voit même des établissements recevoir des fonds pour créer des places... et en fermer, faute de moyens pour maintenir les places existantes. Le bruit court que 450 emplois pourraient disparaître.
Il importe donc de faire un bilan. C'est le sens de cet amendement.
M. Albéric de Montgolfier, rapporteur spécial. - Le nombre de cas concernés semble limité ; faut-il vraiment un rapport ? Le Gouvernement va nous éclairer. La commission est plutôt défavorable.
Mme Nadine Morano, secrétaire d'État. - Défavorable pour les mêmes raisons.
L'amendement n°II-127 n'est pas adopté.
Article 59 quinquies
Le Gouvernement met en oeuvre, avant le 31 décembre 2010, un dispositif de suivi des établissements et services visés au a du 5° et au 7° du I de l'article L. 312-1 du code de l'action sociale et des familles, qui accueillent ou dont bénéficient les personnes handicapées de quarante ans ou plus.
Ce dispositif rend compte chaque année de l'évolution des sources de financement de ces structures, de leur nombre et du nombre de places qu'elles offrent, selon les types de déficience des personnes handicapées.
Les résultats sont portés à la connaissance du Parlement.
M. le président. - Amendement n°II-188, présenté par M. Paul Blanc au nom de la commission des affaires sociales.
Supprimer cet article.
M. Paul Blanc, rapporteur pour avis. - Cet article a été introduit par l'Assemblée nationale à l'initiative de M. Jeanneteau, rapporteur de sa commission des affaires sociales. Si nous convenons de la nécessité de disposer de données précises sur les capacités d'accueil des établissements pour les personnes handicapées vieillissantes -j'ai moi-même fait un rapport sur le sujet en 2006-, nous nous interrogeons sur l'opportunité de mettre en place un dispositif de suivi réservé aux seules personnes handicapées de plus de 40 ans et à un type particulier de handicap. Cette démarche va à l'encontre de celle retenue dans la loi Handicap : une appréhension globale des besoins du système sanitaire et médico-social et la confirmation du rôle des programmes interdépartementaux d'accompagnement des handicaps et de la perte d'autonomie. Ces programmes contribuent à l'élaboration annuelle de l'Ondam « Personnes handicapées » et à la définition des plans exceptionnels de création de places. Selon la programmation 2008-2014, 1 710 places devraient être créées pour les personnes handicapées intellectuellement déficientes.
Il semble dès lors que les dispositifs existants soient suffisants pour prendre en compte les besoins non satisfaits, quels que soient l'âge et le type de handicap. Le Gouvernement s'est en outre engagé à confier à la Drees une étude sur ce sujet. L'agence nationale d'évaluation des établissements sociaux et médico-sociaux formulera de son côté des recommandations de bonnes pratiques. Nous préparons en outre une proposition de loi, à l'élaboration de laquelle je me propose d'associer notre collègue député M. Jeanneteau.
Mme Nadine Morano, secrétaire d'État. - Les données dont nous disposons permettent d'évaluer le nombre de personnes handicapées vieillissantes, mais non l'offre existante ni son évolution. Raison pour laquelle l'initiative de M. Jeanneteau avait semblé intéressante.
Vous vous plaigniez du manque d'informations ; en voici !
M. Albéric de Montgolfier, rapporteur spécial. - Comme le Gouvernement, la commission est très réservée sur cet amendement.
M. Paul Blanc, rapporteur pour avis. - Eh bien, je le retire et vous aurez encore un rapport de plus ! Ce n'est pas ainsi qu'on avance !
L'amendement n°II-188 est retiré.
M. le président. - Amendement n°II-93, présenté par Mme Pasquet et les membres du groupe CRC-SPG.
Après l'alinéa 2,
Insérer un alinéa ainsi rédigé :
Il met en rapport l'offre en structures proposées et l'évolution, au plan national, du nombre des personnes de quarante ans ou plus, selon le type de déficiences qu'elles présentent. Il retrace chaque année l'évolution de ce rapport sur les cinq années à venir ainsi que l'évolution des besoins en établissements ou en services, selon les types de déficiences.
Mme Isabelle Pasquet. - Nous entendons compléter l'article 59 quinquies. Ou plutôt le rétablir dans sa version originale, avant l'amputation de son troisième alinéa avec l'adoption d'un sous-amendement du Gouvernement.
L'article 59 quinquies met en place un dispositif de suivi des établissements, Esat et établissements d'accueil de jour, rendant compte chaque année des sources de financement et du nombre de places, ainsi que des personnes accueillies. C'est positif mais il manque un élément fondamental, la connaissance des besoins. Les estimations sont souvent faites à la louche et les études de la Dress sont tellement espacées dans le temps quelles sont dépassées à peine publiées. Cela conduit à une inadéquation chronique entre les offres d'accueil et les besoins.
Pour plaire au Sénat, notre amendement n'est pas strictement identique à sa version initiale : nous avons fait disparaître un « notamment ».
M. Albéric de Montgolfier, rapporteur spécial. - Défavorable : cela aurait un coût trop élevé pour le service rendu.
Mme Nadine Morano, secrétaire d'État. - Même avis.
L'amendement n°II-93 n'est pas adopté.
L'article 59 quinquies est adopté.
Mme Isabelle Pasquet. - Je voulais expliquer mon vote sur cet article !
M. le président. - Le vote était déjà commencé.
Mme Isabelle Pasquet. - C'est scandaleux !
M. le président. - Mais non !
Article 59 sexies
A titre expérimental, jusqu'au 31 décembre 2011, dans des départements dont la liste est fixée par voie réglementaire, le directeur général de l'agence régionale de santé, le représentant de l'État dans le département, le président du conseil général et, le cas échéant, les établissements et services visés au a du 5° et au 7° du I de l'article L. 312-1 du code de l'action sociale et des familles, peuvent conclure des conventions d'objectifs.
Ces conventions fixent les objectifs suivants :
- l'établissement de critères déterminant les modalités de mise en oeuvre d'une mutualisation des moyens mis à la disposition des différents établissements ;
- l'institution d'indicateurs chiffrés communs concernant l'évolution de l'accueil des personnes handicapées, selon le type de déficience et selon l'âge des personnes accueillies ;
- la mise en oeuvre de parcours spécifiques destinés à l'accueil des personnes de quarante ans et plus qui présentent une déficience intellectuelle.
Ces conventions peuvent aussi définir des objectifs qualitatifs destinés à favoriser la mise en oeuvre de schémas d'organisation des structures d'accueil départementaux, consacrés de manière simultanée à l'action gérontologique et à l'action en faveur du handicap.
Un rapport évalue, avant le 30 juin 2011, les modalités de mise en oeuvre de cette expérimentation.
M. le président. - Amendement n°II-114, présenté par M. Cazalet au nom de la commission des finances.
Supprimer cet article.
M. Albéric de Montgolfier, rapporteur spécial. - Cet article ne relève pas d'une loi de finances, ni même de la loi.
M. le président. - Amendement identique n°II-189, présenté par M. Paul Blanc au nom de la commission des affaires sociales.
M. Paul Blanc, rapporteur pour avis. - Même chose.
Mme Nadine Morano, secrétaire d'État. - Sagesse.
Les amendements identiques nosII-114 et II-189 sont adoptés et l'article 59 sexies est supprimé.
Article 59 septies
Le Gouvernement remet au Parlement, avant le 31 décembre 2010, un rapport évaluant les effets des dispositions et pratiques selon lesquelles les établissements et services visés au a du 5° et au 7° du I de l'article L. 312-1 du code de l'action sociale et des familles fixent des limites d'âge maximales pour la prise en charge des personnes qui présentent une déficience, notamment intellectuelle.
Ce rapport rend aussi compte de la manière dont l'offre de structures est coordonnée à l'échelon des différents départements et s'adapte à l'évolution de la moyenne d'âge des personnes handicapées.
M. le président. - Amendement n°II-115, présenté par M. Cazalet au nom de la commission des finances.
Supprimer cet article.
M. Albéric de Montgolfier, rapporteur spécial. - Cela ne relève pas d'une loi de finances.
Mme Nadine Morano, secrétaire d'État. - Sagesse.
L'amendement n°II-115 est adopté et l'article 59 septies est supprimé.
L'amendement n°II-190 devient sans objet.
Articles additionnels
L'amendement n°II-215 a été retiré.
M. le président. - Amendement n°II-214, présenté par Mme Jarraud-Vergnolle et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés.
Après l'article 59 septies, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. - Le paragraphe III bis de l'article L. 241-10 du code de la sécurité sociale est ainsi rédigé :
« III bis. - Les rémunérations des salariés qui, employés par des personnes agréées dans les conditions fixées à l'article L. 129-1 du code du travail, assurent une activité mentionnée à cet article, sont exonérées des cotisations patronales d'assurances sociales, notamment dues au régime visé au 2 de l'article R. 711-1 du présent code, et d'allocations familiales, dans la limite, lorsqu'elles ne sont pas éligibles à une autre exonération mentionnée au présent article, d'un plafond déterminé par décret. »
II. - La perte de recettes résultant pour les organismes de sécurité sociale du présent article est compensée à due concurrence par la création d'une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
Mme Annie Jarraud-Vergnolle. - Les associations et entreprises de services à la personne bénéficient d'une exonération des cotisations sociales hors accidents du travail. Les centres communaux ou intercommunaux d'action sociale (CCAS/CIAS) ne bénéficient pas, pour leurs agents titulaires, des exonérations sur les cotisations au titre de la retraite, alors qu'ils peuvent en bénéficier pour les agents contractuels cotisant au régime général. En effet, la CNRACL a une lecture restrictive de l'article L. 241-10 du code de la sécurité sociale : le paragraphe III bis ne faisant pas référence de manière explicite au régime de retraite des agents territoriaux, le bénéfice de l'exonération de cotisations sociales est refusé.
Il en résulte une rupture d'égalité entre opérateurs publics et privés alors qu'ils gèrent les mêmes activités, soumises aux mêmes contraintes, auprès des mêmes personnes, dans un champ concurrentiel depuis la loi de 2005 relative au développement des services à la personne.
Cette interprétation menace le secteur public de services à la personne qui se trouve ainsi plus coûteux pour les usagers. En outre, au regard du droit européen, ce mécanisme d'exonération étant réservé à certains opérateurs pourrait être considéré comme une aide illégale d'État.
M. Albéric de Montgolfier, rapporteur spécial. - Qu'en pense le Gouvernement ? Cela nous semble déjà partiellement satisfait par l'article 23 et, pour le reste, les statistiques manquent.
Mme Nadine Morano, secrétaire d'État. - Défavorable.
Mme Isabelle Pasquet. - La façon dont est mené ce débat est inadmissible. Je comprends que tout le monde veuille aller le plus vite possible à cette heure tardive de la fin de la semaine. Mais cette mission n'est pas moins importante que d'autres et nous ne sommes pas responsables du retard pris dans les débats précédents ; en voulant faire au plus vite, vous m'avez privée d'explication de vote sur plusieurs articles.
M. Charles Pasqua. - Mais non !
M. Laurent Béteille. - Il y a des règles !
M. le président. - Il n'y a pas d'explication de vote sur les missions. Sur les articles, il faut s'inscrire la veille. C'est le Règlement.
M. Robert del Picchia. - Moi aussi, on m'a refusé la parole dans ces conditions !
M. le président. - En revanche, je puis vous donner la parole sur cet amendement.
Mme Isabelle Pasquet. - Les sénatrices et sénateurs du groupe CRC-SPG voteront contre cet amendement du groupe socialiste. Non que nous n'en comprenions pas les motivations mais nous considérons que son adoption ne serait pas de nature à résoudre les problèmes récurrents rencontrés par les CCAS.
Nous l'avons dit à l'occasion de l'examen de la proposition de loi de notre collègue Domeizel et à propos de l'article 27 de ce projet de loi de finances pour 2010, il n'est pas normal que la caisse nationale de retraite des agents des collectivités locales ait à supporter les conséquences financières de l'exonération de cotisations sociales accordée aux CCAS pour les aider face à leurs propres difficultés financières. Le Gouvernement ne doit pas disposer comme il l'entend des cotisations sociales, fussent-elles patronales, car elles sont la propriété des salariés, non de l'État.
D'une manière générale, l'État doit cesser de considérer les cotisations et les comptes sociaux comme un supplétif à son propre budget. La question fondamentale est celle de la soumission aux règles de la concurrence de ces services à la personne, autorisée en 2005, et qui correspond à une certaine logique libérale de dérégulation, laquelle s'accompagne d'ailleurs, dans le privé, de l'imposition aux salariés de conditions de travail très dures, avec des temps partiels imposés et de trop faibles rémunérations.
La solution est plus à un nivellement par le haut que par le bas. En lieu et place de la pérennisation ou d'une extension des cotisations sociales, il conviendrait de conditionner les exonérations de cotisations sociales à une amélioration salariale notable.
Adopter cet amendement serait voter contre une mesure que nous avons soutenue il y a peu et accepter la logique d'opposition entre les CCAS et la CNRACL. C'est pourquoi, bien que partageant la préoccupation de nos collègues socialistes qui renvoient l'État à ses responsabilités, nous voterons contre cet amendement.
L'amendement n°II-214 n'est pas adopté.
La séance, suspendue à minuit, reprend à minuit cinq.
Ville et logement
M. le président. - Le Sénat va examiner les crédits de la mission « Ville et logement ».
Intervention des rapporteurs
M. Philippe Dallier, rapporteur spécial de la commission des finances. - Après les nombreuses turbulences qu'a connues cette mission en 2009, qui touchaient tant à sa structure qu'à son administration et à son financement, nous espérons que le Gouvernement, par les réponses qu'il apportera à nos questions, saura nous convaincre que nous en revenons à la stabilité, ce qui rassurera les acteurs de la politique de la ville et du logement.
L'intégration du programme « Prévention de l'exclusion et insertion des personnes vulnérables » -conséquence de la mise en oeuvre du droit au logement opposable-, la création du programme « Politique de la ville » -résultat de la disparition des crédits budgétaires destinés à l'Agence nationale pour la rénovation urbaine en 2009- étaient, pour notre commission, synonyme d'une plus grande cohérence, d'autant que la mission conservait son statut de mission ministérielle. Patatras ! Avec le remaniement de juin dernier, la mission est éclatée entre deux ministères, ce qui n'est pas véritablement source d'efficacité et de revalorisation de ces politiques étroitement liées. Monsieur le ministre, pouvez-vous me confirmer que cette architecture budgétaire ne sera pas une nouvelle fois modifiée et que le programme « Prévention de l'exclusion et insertion des personnes vulnérables » sera maintenu au sein de la mission, contrairement à la recommandation du comité interministériel d'audit des programmes ?
Ensuite, permettez-moi d'insister sur la nécessité de réduire l'écart entre les engagements et leur mise en oeuvre. En la matière, nous avons encore des marges de progression importantes. Je pense à la laborieuse mise en place de la garantie universelle des risques locatifs, considérés par d'aucuns comme une usine à gaz, après plus de deux ans de négociations, mais aussi au droit au logement opposable. Sur ce dernier point, les commissions départementales n'ont toujours pas été doublées, bien que le Parlement ait voté les crédits pour. Monsieur le ministre, l'argument de la distorsion de décision d'une commission à l'autre est tout simplement absurde puisque nous avons adopté le principe de la régionalisation de la demande en Ile-de-France. Il faut donc, sans plus attendre, faire appliquer les décisions du Parlement pour accélérer le traitement des demandes sans quoi nous pouvons redouter le pire pour la seconde phase de généralisation en 2012. Je pense également à la réflexion inaboutie sur la géographie prioritaire, que notre commission avait pourtant engagée en faisant adopter le principe d'une actualisation du zonage prioritaire tous les cinq ans à partir de 2009. Certes, il y a eu une concertation durant le premier semestre de cette année, le Livre vert du comité interministériel des villes, le rapport de MM. André et Hamel. Mais que reste-t-il en fin d'année ? Une controverse sur la suppression des zones urbaines sensibles. Enfin, le nouveau report de la réforme de la DSU, heureusement compensé par l'allocation de 70 millions supplémentaires aux 250 villes les plus pauvres. Autant de débats non tranchés et de polémiques qui jettent le doute sur l'engagement du Gouvernement à mener une politique ambitieuse de rééquilibrage au profit des zones urbaines les plus en difficultés.
Madame Amara, monsieur Apparu, votre charge est lourde, les politiques de la ville et du logement complexes et les résultats difficiles à obtenir. Il est donc particulièrement dommageable que l'on ne souligne pas davantage les efforts budgétaires de ces huit dernières années. Hier, le maire de Paris a parlé de désengagement ignoble de l'État en matière d'hébergements d'urgence. Mais les collectivités locales doivent aussi assumer leurs responsabilités et, grâce à une augmentation très sensible des crédits ces dernières années, l'État a globalement respecté le plan d'action renforcé en direction des personnes sans abri, sauf en matière de construction de logements financés en Plai. Sur des sujets aussi sensibles, il faut donc faire, et bien faire -c'est le rôle premier des politiques-, mais aussi faire savoir. Encore faut-il des objectifs clairs et des politiques lisibles, c'est ce à quoi le Parlement vous invite.
Les dotations de la mission connaissent une heureuse progression de 3,5 % en autorisations d'engagement et de 4,5 % en crédits de paiement par rapport à l'an passé. Pour autant, il faut nuancer cette évaluation positive en constatant que, d'une part, cette évolution est largement imputable à la progression des aides personnelles au logement liée à la crise et, d'autre part, que le plan de relance, une ressource par nature non permanente, a été mis à contribution pour financer les aides à la construction à hauteur de 80 millions, la rénovation urbaine pour 150 millions et l'Agence nationale de l'habitat pour 67 millions et parfois d'autres dépenses que celles d'investissement, notamment l'intermédiation locative ou l'aide alimentaire.
M. Benoist Apparu, secrétaire d'État chargé du logement et de l'urbanisme. - Hélas ! C'est vrai !
M. Philippe Dallier, rapporteur spécial. - Notons également que le programme « Développement et amélioration de l'offre de logements » prévoit le financement de 110 000 logements sociaux, avec 130 millions d'euros supérieurs en autorisations d'engagement par rapport au budget prévisionnel triennal 2009-2011, et que les crédits d'intervention de l'Agence nationale pour la cohésion sociale et l'égalité, inscrits dans le programme « Politique de la ville », accusent une baisse qui, compte tenu de l'exécution budgétaire 2008 et du prévisionnel pour 2009, relève plutôt de la quasi-stabilité.
Les contrats urbains de cohésion sociale ayant été prolongés d'une année dans l'attente de la refonte de la géographie prioritaire, collectivités locales et associations voient leurs moyens reconduits pour 2010, mais quid des années suivantes ? Madame la ministre, pourriez-vous éclaircir ce point ?
Enfin, la mission reste marquée par des sous-budgétisations, ce qui porte atteinte au principe de sincérité budgétaire. Sont principalement touchés en 2010 le programme « Prévention de l'exclusion et insertion des personnes vulnérables »...
M. Benoist Apparu, secrétaire d'État. - C'est exact.
M. Philippe Dallier, rapporteur spécial. - ...et le programme « Aide à l'accès au logement ».
Pour le premier programme, la simple comparaison du montant des crédits consommés en 2008 et des crédits inscrits au projet de loi de finances 2010 fait apparaître, à structure constante, un écart de 131 millions d'euros, soit 12 % du montant des crédits. Ces prévisions à la baisse pour l'hébergement d'urgence et l'aide alimentaire nous paraissent fort peu réalistes compte tenu de la crise, de l'accroissement des frais de fonctionnement correspondant aux nouvelles places d'hébergement et des engagements pris pour humaniser les centres d'hébergement d'urgence. A l'évidence, il ne s'agit pas là d'un désengagement de l'État mais bien de sous-budgétisations qui apparaîtront d'autant plus visiblement en 2010 que les actions du programme ne seront pas abondées, comme en 2009, par les crédits de plan de relance.
En ce qui concerne les aides personnelles au logement, les effets de la crise et les simplifications administratives ont été pris en compte : la subvention d'équilibre versée par l'État au Fonds national d'aide au logement (Fnal) augmentera de 423 millions d'euros. Les reports de charges étaient devenus systématiques ces dernières années et les prévisions d'exécution actualisées faisaient apparaître un défaut de financement de plus de 550 millions d'euros pour 2009. Il était donc indispensable que le programme 109 fasse l'objet d'une rallonge budgétaire : c'est chose faite dans le projet de loi de finances rectificative pour 2009, qui procède à une ouverture de crédits de 558,7 millions d'euros. Ce complément permettra de couvrir les besoins de l'année en cours et de rembourser la dette de l'État vis-à-vis des organismes sociaux au titre des années antérieures. Il vous appartiendra, monsieur le ministre, de veiller à ce qu'une nouvelle dette ne se reconstitue pas. Nous aurons besoin de beaucoup d'argent l'an prochain pour répondre aux besoins liés à la montée en puissance des projets de rénovation urbaine.
J'évoquerai pour finir un lourd chantier que nous devrons mener à bien l'année prochaine pour en finir avec un pis-aller budgétaire. Pour la période triennale 2009-2011, le financement de pans entiers de la politique du logement et de la ville a été transféré à la charge du 1 % logement, à hauteur de 480 millions d'euros pour l'Anah et de 770 millions d'euros pour l'Anru, auxquels il faut rajouter 150 millions pour le financement du PNRQAD. Mais aucune réponse pérenne n'a été apportée au problème de financement des opérateurs.
Le changement de mode de financement fut si brutal pour l'Anah que sa situation financière fut mise en péril. Fin 2008, l'agence dut clôturer l'exercice en novembre, faute de trésorerie, et négocier avec l'agence France Trésor une convention d'avance de trésorerie d'un montant maximal de 240 millions d'euros. Dans le même temps, l'État a transféré à l'Anah sa compétence pour résorber l'habitat insalubre, mais aussi un reliquat de « dettes » d'engagements dépassant 50 millions d'euros ; au total, le montant des engagements restant à couvrir à la fin de l'année 2009 s'élève à un milliard d'euros, ce qui n'est pas rien...
La situation de l'Anru n'est pas meilleure et deviendra tout simplement intenable à compter de la fin 2010. Le programme national de rénovation urbaine (PNRU) entre en effet dans une phase active : les opérations prévues dans les conventions vont être réalisées. Fin 2010, la trésorerie de l'Anru sera définitivement asséchée et il faudra prévoir dès 2011 des ressources annuelles de l'ordre de 1,6 milliard d'euros, largement supérieures à la contribution du 1 % logement.
Le système de financement de l'Anah et de l'Anru mis en place en 2008 n'est donc pas viable. Il conduit en outre inexorablement à l'épuisement des ressources du 1 % logement.
M. Benoist Apparu, secrétaire d'État. - C'est faux !
M. Philippe Dallier. - Non, monsieur le ministre, puisqu'on remplace des prêts à l'Anru par des subventions ! L'année 2010 doit donc être mise à profit pour mettre en place un mode financement réaliste et pérenne.
Sous réserve de ces observations et de l'amendement à caractère budgétaire qu'elle vous présentera, la commission des finances vous demande d'adopter les crédits de la mission. (M. Jean Arthuis, président de la commission des finances, applaudit)
M. Gérard Cornu, en remplacement de M. Pierre André, rapporteur pour avis de la commission de l'économie. - Je m'exprimerai au nom de notre collègue M. Pierre André qui n'a pas pu être présent ce soir.
La politique de la ville a pour objet de réduire les écarts entre les quartiers urbains en difficulté et les autres. Comme le rappelait le Président de la République dans son discours du 8 février 2009, elle « a été conçue pour intervenir de manière spécifique, comme effet levier, dès lors que les politiques de droit commun de l'État et des collectivités territoriales se sont pleinement exercées ».
Plus de 8 millions de nos concitoyens vivent dans un quartier éligible à la politique de la ville : c'est dire l'enjeu pour la cohésion nationale. Pourtant, c'est sans doute l'action publique qui suscite les plus vifs débats. Les uns doutent de son utilité, surtout quand les médias relatent les faits divers survenus dans les quartiers « sensibles ». Les autres considèrent que la politique de la ville fonctionne plutôt bien et craignent qu'une réforme ne provoque le désengagement financier des différents partenaires.
Votre rapporteur estime que cette politique est plus que jamais pertinente. Ce budget présente peu de changements. L'Agence nationale pour la cohésion sociale et l'égalité des chances reste le principal opérateur de la politique de la ville. La nouvelle gouvernance est désormais bien établie et repose sur le secrétariat général du comité interministériel des villes, l'instance de pilotage et de décision présidée par le Premier ministre. En revanche, l'avenir des zones franches urbaines est incertain, alors même que leurs effets sur l'emploi ont été démontrés par l'Observatoire national des zones urbaines sensibles. Il faut enfin saluer les efforts de l'agence nationale pour la rénovation urbaine, qui participe à la fois aux programmes nationaux de requalification des quartiers anciens dégradés et de rénovation urbaine. Toutefois, le financement de cette agence deviendra problématique à partir de 2012. Qu'en pense le Gouvernement ?
Malgré la stabilité de la maquette budgétaire, on peut s'interroger sur les modalités d'intervention de la politique de la ville. M. André s'est vu confier, en avril, une mission par le Premier ministre pour définir une méthode de révision de la géographie des zones urbaines sensibles et des contrats urbains de cohésion sociale. Son constat est simple : « l'action par zonage n'a pas fait la preuve de son efficacité ». Selon lui, malgré les nombreuses actions conduites dans les territoires prioritaires, les écarts avec le reste de la ville ne se sont pas réduits, notamment dans le domaine de l'emploi. Le zonage trop strict a même produit des effets pervers. M. André propose de remplacer le contrat urbain de cohésion social et les nombreux dispositifs associés par un contrat unique signé entre le maire et le préfet pour la durée du mandat municipal. Les crédits devront être répartis suivant de nouveaux critères, de telle sorte que les communes les plus pauvres soient aidées en priorité. Notre collègue suggère donc de redonner un véritable rôle au maire.
Madame le ministre, nous savons que vous êtes loin de partager toutes ces options mais nous sommes d'accord sur les constats et nous espérons que le Gouvernement fera preuve de sagesse en suivant les recommandations d'élus locaux concernés au premier chef par cette politique.
Sous le bénéfice des ces observations, la commission de l'économie vous propose d'adopter les crédits de la mission. (Applaudissements à droite)
Mme Bariza Khiari, en remplacement de M. Thierry Repentin, rapporteur pour avis de la commission de l'économie. - J'interviens au nom de M. Thierry Repentin, empêché.
La crise économique n'est pas sans conséquence sur le logement : seuls 340 000 logements ont été mis en chantier au cours des douze derniers mois, soit 20 % de moins qu'au cours des douze mois précédents.
M. Benoist Apparu, secrétaire d'État. - C'est vrai.
Mme Bariza Khiari, rapporteur pour avis. - Or 270 000 ménages arrivent chaque année sur un marché qui accuse déjà un déficit de 800 000 logements. La France manque de logements, surtout là où elle en aurait le plus besoin puisque c'est là où les besoins sont les plus importants que la construction coûte le plus cher.
L'augmentation de 6 % du budget du logement s'explique non pas par un effort supplémentaire du Gouvernement mais par la hausse mécanique des aides personnalisées au logement sous l'effet de la montée du chômage et de la dégradation de la situation financière des ménages. Le financement de ces aides provenant en partie des cotisations des employeurs, amenées à décroitre sous l'effet de la crise, on peut légitimement être inquiet.
Le logement est devenu un bon indicateur des inégalités de conditions de vie. Les ménages y consacraient 14 % de leurs revenus en 1988 ; cette proportion se monte aujourd'hui à 30 %.
J'en viens à présent à la prévention de l'exclusion et à l'insertion des personnes vulnérables. Je dois vous dire mon étonnement lorsque j'ai découvert, le 20 novembre dernier, que 56 % des Français estiment qu'ils pourraient un jour se retrouver sans abri. Près de 8 millions de personnes en France sont confrontées à la pauvreté. Je m'étonne donc de la diminution des crédits consacrés à cette politique alors que la situation sociale se dégrade.
S'agissant du développement et de l'amélioration de l'offre de logements, comment expliquer que les crédits accusent une baisse de plus de 15 % alors que ces dotations sont indispensables à la construction de logements sociaux et à la réhabilitation du parc privé ?
Je doute de l'efficacité de la réforme du 1 % logement. Celui-ci doit normalement contribuer au financement de l'Anah à hauteur de 480 millions d'euros par an entre 2009 et 2011 ; or ce versement accuse déjà un retard en 2009.
Je remarque que 480 millions d'euros sont prévus cette année pour produire 110 000 logements sociaux. C'est bien, mais c'est insuffisant pour répondre aux besoins car 60 % des ménages sont éligibles. En outre cette enveloppe est en diminution de 70 millions d'euros : n'y a-t-il pas un paradoxe à voir l'État réduire sa participation alors qu'il prétend développer le logement social ?
Pour finir, je voudrais aborder un sujet qui touche particulièrement notre commission : la promotion de l'habitat durable. J'ai la conviction que le secteur du logement peut apporter sa contribution à la lutte contre le changement climatique car il est responsable de 40 % de la consommation d'énergie finale dans notre pays.
Près de sept millions de logements demeurent énergivores. Or, les propriétaires concernés sont souvent modestes et la rénovation est très coûteuse. C'est pourquoi notre commission soutient le verdissement de la législation fiscale dans ce domaine.
En définitive, la crise actuelle doit être l'occasion de refonder la politique du logement pour l'adapter aux besoins des personnes et l'orienter résolument vers l'édification d'un habitat durable. Répondre à cette exigence permettrait d'assurer la pérennité d'un parc respectueux de l'environnement, de réduire la facture de nos concitoyens et de créer des emplois.
A titre personnel, le rapporteur a appelé à voter contre ce budget mais la commission de l'économie a émis un avis favorable à son adoption. (Applaudissements à gauche)
Mme Muguette Dini, présidente de la commission des affaires sociales, en remplacement de M. Jean-Marie Vanlerenberghe, rapporteur pour avis de la commission des affaires sociales. - Notre rapporteur, retenu dans son département, m'a confié la lourde tâche de vous présenter la position de la commission sur cette mission.
Je concentrerai mes propos sur les points qui nous ont paru essentiels.
Tout d'abord, nous approuvons la réorientation des politiques publiques en matière d'hébergement des personnes sans abri afin d'organiser une véritable « filière » du logement : l'accueil d'urgence ne doit être qu'un passage pour que les personnes qui ont retrouvé une certaine stabilité puissent obtenir un logement durable. Le budget pour 2010 conforte cet objectif. Pour autant, il ne faut pas fragiliser le tissu associatif par des évolutions trop brutales. De plus, les crédits du plan de relance en faveur de l'hébergement et des structures d'accueil, qui ont été importants en 2009, ne sont pas reconduits en 2010, malgré le caractère récurrent de certaines dépenses.
De plus, la loi permet désormais une meilleure coordination des capacités d'accueil des personnes sans abri. Il faut poursuivre en ce sens, notamment en région parisienne où se concentre une grande part des difficultés en matière d'hébergement ou de logement.
2010 sera l'année européenne de lutte contre la pauvreté et les exclusions : souhaitons que l'État complète les dotations si certains crédits s'avèrent insuffisants, notamment pour l'aide alimentaire.
En ce qui concerne la construction de logements locatifs sociaux, les crédits de paiement progressent alors que les autorisations d'engagement régressent. Bien sûr, le plan de relance a produit ses effets dans le secteur du logement et il continuera de le faire en 2010. Pour autant, cette baisse des nouvelles opérations ne peut pas être un signal positif pour les opérateurs. Peut-on au moins espérer qu'elle s'accompagnera d'une meilleure concentration des opérations sur les territoires où l'offre et la demande sont les plus déséquilibrées ?
J'en viens au financement de la rénovation urbaine. L'Anru a quasiment achevé la phase de contractualisation avec les collectivités territoriales. Elle a engagé la presque totalité de ses moyens financiers. Les paiements commencent à atteindre un volume élevé et, à partir de 2011, ils seront compris entre 1,3 et 1,6 milliard par an, pendant au moins quatre années. Or, il manquera à l'Anru entre 140 et 400 millions en 2011, selon le rythme d'avancement des travaux. La réforme de 2009, qui mobilise les fonds du 1 % logement, ne prévoit rien après 2011. Comment le Gouvernement entend-il financer la montée en charge des subventions versées par l'Anru ?
En ce qui concerne la politique de la ville, les crédits sont en légère diminution. Pourtant, les problèmes persistent dans les quartiers défavorisés, comme le confirme le récent rapport de l'Observatoire national des zones urbaines sensibles.
Quelles mesures le Gouvernement envisage-t-il de prendre pour mobiliser enfin les différents ministères en faveur de ces quartiers ? Comment entend-il réformer la géographie prioritaire de la politique de la ville ? De ce point de vue, les orientations des parlementaires en mission, dont notre collègue Pierre André, nous ont semblé très positives : elles préconisent de globaliser les crédits au niveau d'un territoire, dans un cadre contractuel entre l'État et les élus locaux, ce qui permettrait une plus grande souplesse de gestion. Qu'en pensez-vous, madame la ministre ?
Avant de conclure, voici deux questions de M. Vasselle. La Caisse des dépôts a-t-elle l'intention de modifier ses financements en faveur des bailleurs sociaux qui rachètent leur logement à des ménages surendettés pour leur permettre de rester chez eux ?
Certains foyers logements sont aujourd'hui sous-occupés, en raison de la politique de maintien à domicile des personnes âgées : des aides de l'État peuvent-elles être accordées pour des opérations de transformation de ces foyers ?
De nombreuses questions restent posées mais les axes prioritaires de ce budget ont reçu le soutien de la commission des affaires sociales. (Applaudissements au centre et à droite)
Interventions des orateurs
Mme Anne-Marie Escoffier. - Les crédits de cette mission, à laquelle je suis particulièrement attachée parce qu'elle défend la dignité de l'homme, connaissent une hausse modeste imputable à la progression des aides personnelles au logement.
Avec 3,5 millions de personnes non ou mal logées, la situation est toujours aussi difficile. Sous l'effet de la crise, les personnes vulnérables sont de plus en plus nombreuses et c'est bien la faillite de tout un système dont elles témoignent. A nous d'en inventer un autre qui veillera plus efficacement sur les plus faibles.
Le programme « Prévention de l'exclusion et insertion des personnes vulnérables » est doté de 1,1 milliard, dont 900 millions financeront des structures d'accueil, d'hébergement et de logement adapté pour les personnes sans abri. Cette somme ne sera sans doute pas suffisante.
Je ne pense pas non plus que l'on ait prévu les inévitables victimes que feront l'augmentation du chômage puisque, malgré l'optimisme de certains, la crise n'est pas encore derrière nous. La représentation nationale ne saurait se contenter de bonnes paroles lorsqu'il s'agit de la précarité et elle doit affirmer que la sous-budgétisation de ce programme, de même que celle du programme « Aide à l'accès au Logement », n'est pas acceptable. Certes, les crédits de ce dernier ont été augmentés pour faire face à la progression du nombre de familles en difficulté, mais aucune augmentation des allocations n'a été prévue. Avec la baisse des plafonds de ressources pour accéder au parc social et le relèvement du montant des surloyers, toute une frange de la population a été exclue du logement social.
M. Benoist Apparu, secrétaire d'État. - Ce sont quand même des personnes qui gagnent plus de 5 000 euros par mois !
Mme Anne-Marie Escoffier. - En dépit des avancées législatives de ces dernières années, les politiques publiques en faveur du logement ne se sont pas montrées à la hauteur des défis, soit par le désengagement financier de l'État, soit parce que le droit au logement opposable s'est révélé décevant, soit parce que les incitations fiscales ont favorisé le développement anarchique de l'offre, tandis que le parc locatif social continue d'être incompatible avec les besoins et le parc privé hors d'atteinte des plus modestes.
Que dire aussi de l'engorgement des dispositifs d'hébergement, de l'existence des discriminations sociales et ethniques dans l'accès au logement, de l'assignation à résidence des plus démunis dans des quartiers en difficulté et de la totale pénurie d'offres dans certaines zones ?
Depuis que l'abbé Pierre a lancé son appel, il y a plus de cinquante ans, il ne saurait y avoir de réelle politique de lutte contre l'exclusion sans politique du logement.
Certes, les crédits de la mission « Ville et Logement » augmentent mais je m'inquiète de la part sans cesse croissante des dépenses fiscales et des financements extra budgétaires, comme le 1 % logement, pour financer l'agence nationale de l'habitat (ANAH), le programme national de rénovation urbaine (PNRU) et le programme national de requalification des quartiers anciens dégradés (PNRQAD). D'après nos rapporteurs, d'inévitables tensions apparaîtront dès 2011 sur la trésorerie de l'Anru, tandis que certains s'interrogent sur le maintien du 1 % qui, devenant une ressource quasi fiscale, est en train de perdre son sens.
Nous écouterons avec intérêt vos réponses, madame et monsieur les ministres, réponses qui pourraient permettre au groupe RDSE de ne pas émettre un avis défavorable à l'adoption de ce budget. (Applaudissements au centre et à droite)
Mme Odette Terrade. - La France manque cruellement de logements : il y a plus de 1,4 million de demandeurs de logements HLM, 500 00 sans domicile, 2 millions de personnes mal logées et 860 000 précaires. Plus de 3,5 millions de personnes sont donc en situation de mal logement.
M. Benoist Apparu, secrétaire d'État. - Mais d'où sortez-vous tous ces chiffres ? N'importe quoi !
Mme Odette Terrade. - Vous ne lisez pas les rapports de la fondation Abbé Pierre ?
M. Benoist Apparu, secrétaire d'État. - Je comprends mieux ! Ces chiffres sont fantaisistes !
Mme Odette Terrade. - Voyez aussi les statistiques de votre ministère, monsieur le ministre !
Depuis le milieu des années 1970, le logement n'est plus considéré comme un bien devant répondre à des besoins sociaux et humains mais comme une marchandise susceptible de générer des pertes ou des profits. Cette évolution s'est traduite par un glissement des aides de l'État en faveur de la construction de logements sociaux vers un système de financement de la construction poussant à la spéculation. L'aide personnalisée au logement (APL) permettait de solvabiliser les locataires du parc social dont les loyers devaient s'aligner sur ceux du privé. En outre, vous avez multiplié les aides aux propriétaires pour qu'ils investissent dans l'immobilier.
M. Benoist Apparu, secrétaire d'État. - Il fallait changer tout cela pendant les quatorze ans où vous avez été au pouvoir !
Mme Odette Terrade. - Vous ne pouvez contester toutes ces lois, monsieur le ministre !
M. Benoist Apparu, secrétaire d'État. - Qu'avez-vous fait ?
Mme Odette Terrade. - Je vous prie de m'écouter ! Vous me répondrez tout à l'heure.
M. Benoist Apparu, secrétaire d'État. - Pardonnez-moi.
Mme Odette Terrade. - Dans ce contexte, Nicolas Sarkozy a dit son espoir d'une « France de propriétaires ». On connaît la suite ! Les aides de l'État sont en diminution constante et n'assurent pas la priorité au logement pour les plus modestes. Quant aux classes moyennes, elles n'ont plus les moyens d'accéder à la propriété mais elles ne bénéficient pas non plus du logement social. C'est donc une impasse.
Depuis de nombreuses années, nous déplorons le manque d'ambition de l'État dans ce secteur. Nous sommes passés de 210 000 logements locatifs sociaux en 2000 à 153 000 en 2007.
M. Benoist Apparu, secrétaire d'État. - C'est quand même impensable de mentir à ce point !
Mme Odette Terrade. - Aujourd'hui, votre Gouvernement annonce la mise en chantier de 110 000 logements alors qu'il faudrait en construire 450 000 pour commencer à répondre aux besoins.
Ce budget se situe donc dans la continuité du désengagement de l'État de ce secteur. Si les crédits globaux augmentent, cela cache des disparités contestables : c'est un budget en trompe-l'oeil.
Le programme « Prévention de l'exclusion et insertion des personnes vulnérables »devrait être la priorité pour 2010, année européenne de lutte contre l'exclusion, mais il est en nette diminution, et notamment en ce qui concerne la prévention de l'exclusion, en baisse de 23 %. Selon le rapporteur, « la sous-budgétisation chronique de ce programme est d'autant plus criante que pas un euro n'est prévu à ce titre dans le plan de relance. »
Les autorisations d'engagement du programme 135, qui correspond notamment aux aides à la pierre, diminue de 15 % et on note une sévère diminution de la subvention moyenne par Plus : 1 000 euros contre 2 700 en 2009. D'autre part, le nombre de Plus programmés est en diminution de 10 000 unités. La conclusion est nette : on construira moins avec moins d'argent.
En diminuant ses crédits, l'État reporte les besoins de financement des opérations sur les autres intervenants. Pourtant, les collectivités, du fait de la suppression de la taxe professionnelle, ne pourront pas maintenir un tel effort.
La lutte contre l'habitat indigne est désormais de la compétence de l'Anah. Cependant, vu la situation déplorable de cette agence, nous doutons de la pérennité de cette action. Il en est de même de l'Anru qui pourrait se trouver en cessation de paiement dès 2011. Pour la période 2009-2011, les deux agences de l'État chargées de la rénovation urbaine sont quasi exclusivement financées par le 1 % logement, ce qui permet à l'État de se désengager.
Parallèlement, nous ne disposons pas d'éléments permettant d'apprécier l'efficacité de la dépense fiscale. Nous pouvons simplement constater son « verdissement », destiné à en renforcer la légitimité. Pourtant, le montant total de ces exonérations atteint des sommets -11,3 milliards dont seulement 1,5 pour le logement social. Cette politique fiscale se donne d'autres priorités que la nécessaire construction de logement sociaux et elle privilégie les investissements fonciers de ceux qui disposent déjà d'un toit.
Quant aux aides personnelles, le rapporteur note très justement que les indicateurs liés au taux d'effort des ménages font apparaître des résultats médiocres, en régression par rapport à 2008. Ils illustrent, selon lui, « la diminution de l'effet solvabilisateur des aides personnelles malgré l'importance des volumes financiers ». La hausse effective des crédits consacrés aux aides personnelles résulte uniquement de la situation économique déplorable du pays. De ce fait, elle reste insuffisante alors que, en 2009, les loyers et les charges locatives ont davantage augmenté que les salaires. Nous demandons une revalorisation de 20 % de l'APL depuis de nombreuses années. Le rapporteur va même jusqu'à parler de l'insincérité de ce programme au regard des grandes difficultés financières du Fnal.
Parallèlement à un budget peu ambitieux, tout un arsenal législatif est mis en place pour réformer et dévoyer les prescriptions appliquées au logement. Ainsi, la loi Boutin, et les fameuses « Conventions d'utilité sociale » dont elle institue l'obligation -faute de se donner les moyens de construire et d'assurer le droit au logement-, impose d'éjecter les locataires dépassant les plafonds. En abaissant en même temps les plafonds de ressources, cette loi réduit le nombre des demandeurs en attente et exclut du logement social de nombreux salariés. Elle contraint également les organismes HLM à vendre une partie de leur parc -la bagatelle de 40 000 logements représentant 2 milliards !- afin de dégager de la trésorerie face à la baisse des concours de l'État. La Caisse des dépôts et consignations a été invitée à se défaire de ses filiales logement. Dans ce contexte, la loi Dalo n'offre aucun débouché concret puisqu'on continue à ne pas construire assez de logements. Le comité de suivi du Dalo indique que, sur toute la France, 7 250 ménages prioritaires n'ont pas reçu une offre dans le délai légal, dont 6 500 sont en Ile-de-France.
A ce triste bilan, il faudrait ajouter la banalisation du livret A et la mise en concurrence des réseaux bancaires qui fragilisent les ressources du logement social. Nous déplorons la disparition, depuis mai dernier, de 6,49 milliards des livrets A. Il faudrait également mentionner le pillage du 1 % logement à travers la loi Molle. Tout cela sans compter le retard à l'allumage dans l'application de la loi SRU qui impose 20 % de logements locatifs sociaux et qui est régulièrement remise en cause par votre majorité. Pour finir, la Commission européenne remet en cause -au nom de la libre concurrence- la possibilité pour les pouvoirs publics locaux ou nationaux de soutenir financièrement les opérateurs du logement social. Nous assistons donc sans doute à la phase ultime de l'attaque contre le droit au logement pour tous et à la tentative délibérée de marchandisation complète du logement.
Face à cette situation exceptionnelle, et à la faiblesse de ce budget, nous demandons solennellement la relance d'une grande politique de construction, adossée à la constitution d'un grand pôle public de financement du logement locatif. Nous demandons aussi que, face à l'urgente nécessité de construire, le budget de l'État pour le logement soit élevé à 2 % du PIB. Pour toutes ces raisons, et parce que ces crédits ne permettent pas un grand service public de l'habitat, nous ne voterons pas les crédits de cette mission.
M. Serge Dassault. - Voici quelques remarques et propositions que j'ai déjà présentées ici, sans succès jusqu'à présent, et qui concernent tous les maires. Il faudrait changer la répartition des contingents de logements sociaux de façon que les maires disposent d'au moins 50 % des logements construits sur leur territoire, au lieu de 20 % actuellement. Aujourd'hui, les logements sociaux sont à 50 % pour le1 %, à 30 % pour le préfet et à 20 % pour le maire. Comme souvent, le 1 % ne remplit pas son contingent ; ce sont les bailleurs sociaux qui les utilisent sans en informer le maire. Or, celui-ci doit faire face à de nombreuses demandes de ses administrés qui le harcèlent pour obtenir un nouveau logement. Il doit en supporter les conséquences, y compris électorales... De plus, les bailleurs, le 1% et le préfet font venir des locataires d'autres communes aux dépens des administrés. La mairie pourrait prendre dans son contingent des familles répondant au critère des 1 %. Mais cette opération est aussi liée aux garanties d'emprunt imposées aux communes pour bénéficier des actuels 20 % de logements. Cette obligation est profondément injuste et dangereuse. D'une part parce que les communes ne disposent d'aucune réserve financière pour couvrir cette garantie, d'autre part parce que les autres bénéficiaires des contingents ne sont pas soumis à cette garantie. Je vous demande, monsieur le ministre, de revoir ces dispositions. Ou bien les municipalités ne conservent que 20 % des logements et ne garantissent plus que 20 % des emprunts, ou elles obtiennent 50 % des logements et garantissent 50 % des emprunts. La meilleure solution serait que la garantie d'emprunt soit supportée par le bailleur, qui se garantirait auprès d'une société spécialisée.
Je voudrais évoquer une autre disposition qui, jusqu'à présent, a échappé à tout le monde. Lorsque l'on impose de déménager aux locataires d'une tour à démolir, les bailleurs leur garantissent que leur futur loyer sera identique à l'actuel. Mais on oublie la taxe d'habitation, calculée sur les éléments de confort du nouveau logement et qui est beaucoup plus importante que la précédente. Le nouveau locataire, incapable de la payer, est souvent obligé de quitter ce logement.
Il faudrait décider qu'en cas d'opération de démolition et de reconstruction, les habitants ne paient pas dans leurs nouveaux logements sociaux une taxe d'habitation supérieure à celle qu'ils acquittaient dans les anciens. Car ils ne le peuvent pas ! Le problème, que personne n'avait anticipé, est apparu sur le terrain. La solution entraîne un manque à gagner pour les communes et les départements mais il faut que les maires soient d'accord.
On ne s'occupe pas suffisamment des familles monoparentales. Elles ne trouvent pas de logements et ne figurent pas dans la liste des catégories prioritaires dans l'accès aux logements sociaux. Il me semblerait normal qu'elles le soient.
Il faudrait allouer des crédits supplémentaires à l'Anru. La rénovation a été une excellente opération sociale et politique dans les communes qui en ont profité mais les coûts de rénovation ont augmenté et aujourd'hui, l'argent manque. Conformément au projet de Mme Boutin, les quartiers délaissés, en centre-ville par exemple, doivent être eux aussi reconstruits, faute de quoi cela entraîne des conséquences politiques que j'ai moi-même subies. Car les habitants voient les quartiers sensibles rénovés, dotés de parcs et de beaux bâtiments, tandis que rien ne se passe en centre-ville. Ils sont mécontents et ne votent pas pour le maire sortant : cela m'est arrivé et a bien failli me coûter la mairie.
C'est pourquoi je vous présente ces propositions, de bon sens. Je ne présenterai pas d'amendements, car je sais la difficulté à les faire adopter, mais je souhaiterais que le Gouvernement s'en inspire. (Applaudissements au centre et à droite)
Mme Bariza Khiari. - « Comment peut-on parler de République quand la réussite scolaire et l'avenir professionnel dépendent non de l'intelligence, non du courage, non de l'ardeur au travail, non du mérite mais d'abord du milieu social d'où l'on vient, du quartier où l'on habite, du nom que l'on porte, de la couleur de sa peau ? Le plus grand danger qui menace notre modèle républicain, c'est que la République devienne une idéologie désincarnée. » C'est en ces termes que s'exprimait... le Président Sarkozy. Mais dans les politiques concrètes et dans les arbitrages ministériels, il en va autrement ! Les décisions présidentielles contreviennent aux discours élyséens. Les frontières de la République s'arrêtent-elles là où la question sociale est la plus aiguë ? Plus encore qu'en 2005, année marquée par des semaines d'affrontements violents, les quartiers dégradés sont les grands oubliés, les « territoires perdus » de la République. Le Gouvernement détourne le regard et néglige le sort de 8 millions de nos concitoyens qui vivent dans des territoires éligibles à la politique de la ville et, le plus souvent, aiment leur quartier.
Les grandes promesses du plan « Espoir banlieue » n'ont pas de traduction concrète. Le Président de la République annonçait une « mobilisation sans précédent pour casser les ghettos ». Or l'écart entre les zones urbaines sensibles et le reste du territoire ne s'est pas réduit depuis 2005. L'insécurité n'a pas reculé. La suppression de la police de proximité répondait à un parti pris idéologique du ministre de l'intérieur Sarkozy et elle a eu les effets néfastes que l'on sait. Le rétablissement des unités territoriales de quartier est intervenu bien tardivement. La sécurité, pour vous, c'est la vidéosurveillance, le taser, les contrôles au faciès, les innombrables procédures pour outrage. La tâche des policiers est difficile dans ces quartiers mais les fautes doivent être sanctionnées car sinon, les dérapages de quelques-uns font oublier le professionnalisme de tous les autres. Il faut soutenir les policiers, reconnaître leur rôle, renforcer leurs effectifs.
Le chômage frappe durement les habitants des zones sensibles : un jeune sur quatre contre un sur huit dans le reste de la France. Une personne sur trois vit en dessous du seuil de pauvreté. Le taux de chômage s'établit à presque 17 %, moitié plus qu'ailleurs. En dépit de ce tableau très sombre, le Gouvernement a, dans un premier temps, refusé de réserver une partie de la dotation de solidarité urbaine aux villes les plus pauvres. Pourtant, de l'avis de M. Dilain, maire de Clichy-sous-Bois, comme de la ministre Mme Amara, il faut concentrer la DSU sur les villes les plus pauvres, non la saupoudrer sur les 750 ZUS. Et la mobilisation de tous les ministères s'impose pour s'attaquer à ce que Jean-Louis Borloo avait qualifié de « cancer de la République ». Le diagnostic existe ; les conséquences sont connues ; les moyens, notoirement insuffisants.
Le Gouvernement se satisfait fort bien de l'existence de ces ghettos et ne fait rien pour eux : il y a non-assistance à population en danger. L'an passé, le Gouvernement avait fait voter contre l'avis des commissions concernées la limitation des avantages fiscaux et sociaux consentis aux zones franches urbaines, pourtant efficaces puisque le taux d'activité y progresse de 20 % par an. Le budget de l'État peut absorber un manque à gagner de 3 milliards d'euros en faveur des restaurateurs, un paquet fiscal de 15 milliards pour les plus favorisées ; mais impossible de trouver 65 millions pour l'emploi dans les quartiers difficiles...
Les crédits de la politique de la ville reculent et le changement de périmètre n'explique pas toute la baisse. Les financements de l'Anru ne sont pas acquis pour l'avenir et déjà les collectivités ont du mal à obtenir les fonds. Et surtout, le comité interministériel qui devait se réunir en octobre pour coordonner le plan d'action a été repoussé sine die. Sans dynamique interministérielle, la politique de la ville se réduit comme peau de chagrin. Revient-il au groupe socialiste de dénoncer la très grande solitude de Mme Amara ? Nous avons le sentiment que ses collègues du Gouvernement ne jouent pas le jeu.
Pour implanter, dans le cadre du Grand Paris, un métro souterrain en forme de grand huit, les moyens ne manquent pas. On trouve 25 milliards d'euros pour relier Roissy, Orly, la Défense et Saclay pour quelques privilégiés, mais rien pour les autres, les plus nombreux. La région et le Stif proposent, eux, des liaisons de banlieue à banlieue pour favoriser la circulation de tous et non de quelques-uns seulement. Nous voulons une agglomération durable qui ne fasse pas de tri sélectif parmi les Franciliens.
L'énergie et le temps dépensés dans le débat sur l'identité nationale auraient été mieux employés à l'amélioration des conditions de vie de nos concitoyens les plus fragiles. Dites à M. André Valentin, maire UMP à la célébrité éphémère, que « les 10 millions que l'on paie à rien foutre », dont je fais partie, contribuent à la vitalité de la France. Les habitants des quartiers populaires souffrent d'être les otages des campagnes électorales. Ils veulent être des citoyens à part entière et non des citoyens à part. Il ne faudra pas s'étonner si une « journée sans immigrés » vient à être célébrée, tous ceux qui se sentent injustement traités et stigmatisés cessent toute activité et toute consommation. Il est toujours déplaisant de jouer les Cassandre mais je demande au Premier ministre de réunir le comité interministériel et de mettre un terme au débat sur l'identité nationale, opération politicienne qui vire au nauséabond, ouvrant grand les vannes du racisme et de la bêtise.
Les crédits diminuent, l'incertitude plane sur le financement de l'Anru, la suppression de la taxe professionnelle suscite le doute sur l'avenir des zones franches. C'est aussi la fin de la clause de compétence générale des départements et régions. L'avenir est sombre et les maires de droite comme de gauche s'inquiètent. Le groupe socialiste votera contre les crédits. (Applaudissements à gauche)
M. Gérard Cornu. - J'évoquerai le dispositif Scellier ou, plus exactement, la discrimination qu'il institue entre les zones éligibles et celles qui en sont exclues. C'est une véritable question d'aménagement du territoire. Aujourd'hui, dans certaines zones rurales ou périurbaines, on observe un phénomène d'inversion : certaines communes voient leurs programmes entièrement gelés à cause de l'effet d'aspiration du dispositif Scellier.
Or ces territoires occupent parfois une position stratégique pour le développement harmonieux d'une agglomération. Classés en zone C, ils seront, après l'arrêt du Robien et du Borloo, privés d'outils pour le locatif privé. Or une politique du logement efficace allie locatif et accession à la propriété. Nous ne pouvons pas avoir un pays coupé en deux parties, dont l'une concentrerait l'essentiel de l'offre locative privée. Il faut trouver un zonage cohérent.
Monsieur le ministre, j'ai une proposition à vous faire par le biais d'un amendement à un article non rattaché de ce projet de loi de finances. L'article 44 bis, introduit par l'Assemblée nationale, permet une certaine souplesse d'agrément après une procédure un peu lourde se terminant par une décision du ministre. Je propose d'alléger la procédure lorsque des outils d'urbanisme et d'aménagement du territoire existent, tel un schéma de cohérence territoriale (Scot) ou un programme local de l'habitat (PLH). Il est inconcevable que, dans ce cas, les communes se trouvent dans des zonages différents, surtout lorsque les élus locaux, qui connaissent leur territoire mieux que personne, ont décidé de répartir harmonieusement les logements locatifs en s'appuyant sur des études approfondies.
Je prendrai un exemple dans mon département, car c'est en se référant à des expériences concrètes, de terrain, que l'on légifère le mieux. L'Eure-et-Loir -comme la Marne, monsieur le ministre- se situe en frange francilienne. Certaines communes sont éligibles au dispositif Scellier, dont Chartres et son agglomération, au contraire des communes périphériques, régies par un Scot. C'est dans les communes de banlieue, où se trouvent déjà beaucoup de logements locatifs publics sociaux, que l'on rajoute du Scellier. Nous avons cherché à encourager un développement harmonieux afin de prévoir des logements locatifs dans les petites communes et répartir judicieusement les logements locatifs dans le cadre du Scot.
Monsieur le ministre, je souhaite avoir votre avis sur cette proposition. C'est le rôle des parlementaires de terrain que d'apporter leur contribution à un système qui fonctionne mais dont il faut améliorer le zonage. (Applaudissements sur les bancs UMP)
Mme Fadela Amara, secrétaire d'État chargée de la politique de la ville. - Je me réjouis de constater votre intérêt pour la politique de la ville. Les actuelles ZUS comprennent environ 4 millions d'habitants. Avec les quartiers situés en contrat de cohésion sociale, ce sont 8 millions d'habitants concernés par les actions menées au titre de la politique de la ville. La Dynamique Espoir Banlieues mobilise tous les acteurs concernés pour répondre aux exigences et aux besoins des habitants des quartiers. Le contexte budgétaire est difficile, mais, compte tenu des enjeux, les crédits de la politique de la ville doivent non seulement être maintenus mais renforcés. La sécurisation de ce budget est une de mes priorités. Le dernier rapport de l'observatoire national des zones urbaines sensibles (Onzus) a mesuré l'ampleur de la précarité, qui a augmenté sous l'effet de la crise économique, comme l'a signalé Bariza Khiari. Plus que jamais, nous devons redoubler d'efforts pour réduire cette fracture sociale.
Dans cette perspective, une de mes priorités est la rénovation urbaine. Depuis 2007, le chemin parcouru par l'Anru est considérable. Avec 375 projets dans 475 villes, ce sont près de 42 milliards d'euros de travaux générés par les 12 milliards apportés par l'Anru, et une véritable force d'entraînement pour notre économie. La forte augmentation du volume d'opérations, ou « bosse de l'Anru », sur la période 2009-2011 suscite des inquiétudes mais le financement de l'agence sur cette période est assuré et une concertation avec les partenaires sociaux débutera dès l'année prochaine pour l'après 2012. Le succès de l'agence est salué par tous les élus. Il faut terminer le travail et c'est pourquoi je milite pour un deuxième programme national de rénovation urbaine.
Les 350 millions alloués à l'Anru par le plan de relance, rapidement consommés, ont permis la montée en puissance d'opérations qui ont généré 4,4 milliards d'euros de travaux. Un projet de rénovation urbaine ne peut être réussi que lorsqu'il rejoint la préoccupation première des habitants : l'emploi. Les clauses d'insertion vers l'emploi introduites dans les marchés publics de l'Anru ont déjà bénéficié à près de 7 000 personnes des quartiers populaires. Afin de poursuivre cette action, j'ai demandé à l'agence nationale pour la cohésion sociale et l'égalité des chances de consacrer 10 millions à des actions renforçant celles menées par les régies de quartier ou les structures d'insertion par l'activité économique au bénéfice de l'emploi.
S'y ajouteront les mesures annoncées par le Président de la République afin de faire reculer le chômage des jeunes. Le contrat d'autonomie s'adresse aux plus éloignés de l'emploi : 500 contrats sont signés chaque semaine, 18 000 jeunes en bénéficient et 46 % des jeunes ayant ainsi reçu une formation profitent d'une sortie positive, dans l'emploi ou dans une formation qualifiante. Ces résultats sont très encourageants mais il faut aller plus loin. Une évaluation, menée par l'Onzus et par un cabinet indépendant, présentera bientôt des résultats statistiques détaillés sur ce dispositif.
Je souhaite que la République soit présente dans nos quartiers. A défaut, nous ne pouvons bâtir un pacte républicain solide. La mise en place de délégués du préfet dans les quartiers prioritaires est un levier nouveau de la politique de la ville. Au 30 novembre, 301 délégués ont été recrutés, soit 85 % de l'objectif fixé pour 2008-2010. Les deux tiers sont affectés dans les régions comportant les plus fortes concentrations de quartiers en difficulté. Les ministères -surtout l'intérieur et la justice- ainsi que les établissements publics, les associations, la fonction publique hospitalière et territoriale ont participé au recrutement. Près de 5 % des délégués sont issus de la société civile et des associations.
La politique de la ville ne peut se penser sans une vision claire des enjeux, et des zones d'intervention. Une réforme de la géographie prioritaire s'impose, conformément au souhait de la représentation nationale lors de l'examen du dernier projet de loi de finances. En janvier 2010, un comité interministériel des villes validera le calendrier de cette révision ainsi que ses grands principes afin de disposer d'une nouvelle carte des ZUS avant l'été 2010. Les contrats urbains de nouvelle génération devront être opérationnels en janvier 2011. Ainsi que l'a rappelé le Président de la République, il faut donner plus à ceux qui ont moins et concentrer l'action sur les territoires les plus en difficulté. La réduction des écarts territoriaux, base du pacte républicain, répond aussi aux impératifs de la lutte contre les discriminations et de la promotion de la diversité.
« Je n'ai jamais séparé la République des idées de justice sociale, sans laquelle elle n'est qu'un mot », a dit Jean Jaurès. C'est l'essence même de la Dynamique Espoir Banlieues. Il faut continuer à désenclaver, à lutter contre la pauvreté et le chômage, à favoriser la diversité, à promouvoir l'excellence et à réduire la fracture sociale. Je peux vous assurer ce soir de ma totale et ferme détermination pour y parvenir. (Applaudissements sur les bancs UMP)
M. Benoist Apparu, secrétaire d'État chargé du logement et de l'urbanisme. - Ce budget, que j'ai l'honneur de vous présenter pour la première fois, a pour ambition d'intervenir sur l'ensemble de la chaîne du logement afin d'agir pour les plus fragiles d'entre nous. II a également pour objectif de renforcer la production des logements locatifs sociaux. Enfin, grâce aux aides personnelles au logement, il aidera les ménages modestes à assumer leurs dépenses de logement. Les autorisations de programme de ce budget augmentent de 4,7 % pour atteindre près de 7 milliards d'euros. Avec la contribution du 1 % logement, ce sont 8 milliards qui sont consacrés à cette politique.
Plus d'un milliard d'euros sont destinés à la prévention de l'exclusion et à l'insertion des personnes les plus vulnérables. La légère diminution par rapport à 2009 s'explique par la baisse des crédits pour le traitement des dossiers de désendettement des rapatriés et l'allocation aux orphelins.
L'essentiel des dépenses, soit 980 millions d'euros, est consacré aux dispositifs d'accueil, d'hébergement et de logement adapté des personnes sans abri, avec trois priorité : l'accompagnement du passage de la rue à l'hébergement, la sanctuarisation de l'enveloppe des CHRS, qui progresse de 39 millions d'euros, et le doublement de l'enveloppe finançant le logement adapté. Le rapporteur a évoqué une sous-budgétisation. Le programme 177 est étroitement corrélé au contexte économique et social ; il est logique qu'une partie des dépenses soit constatée en fin d'exercice. La prévision est d'autant plus difficile que le programme subit d'importants déports d'autres politiques, dont celle de l'asile -les demandes d'asile augmentent fortement, ce qui n'est évidemment pas sans conséquences budgétaires. Encore faut-il aussi pouvoir apprécier les coûts des opérateurs subventionnés. La réforme annoncée le 10 novembre s'appuiera sur trois leviers : un système d'accueil et d'orientation dans chaque département, une planification territoriale et une harmonisation des prestations et des coûts -en un mot, l'établissement d'un référentiel. C'est sur cette base que pourra être élaboré le budget 2011. Une enquête va être lancée auprès de 2 000 structures associatives qui interviennent auprès des personnes sans abri. J'ai la volonté de repositionner l'État comme le vrai pilote de cette politique, de créer un vrai service public du logement adapté.
L'année 2010 verra la poursuite du plan de relance dans le domaine de la construction ; 2009 a été historique, avec 125 000 à 130 000 logements sociaux, trois fois plus qu'en 2000, dont 24 500 Plai. Nous en construirons 27 000 en 2010, soit un chiffre très supérieur aux 20 000 prévus dans la loi Dalo. Je remercie les élus locaux pour leur engagement et tous les intervenants de la chaîne du logement qui ont permis ces résultats.
Mme Khiari a déploré la baisse des aides à la pierre. Les 480 millions d'euros prévus pour 2010 dépassent de 130 millions les prévisions de la loi de programmation triennale. Il faut ensuite prendre en compte les 120 millions de la deuxième tranche du plan de relance et les 300 millions du 1 % logement en investissements directs -225 en 2009. Nous souhaitons surtout réorienter la production de logements locatifs sociaux. On peut toujours battre des records dans ce domaine mais si on en produit pour 60 % dans des zones non tendues, on crée de la vacance d'un côté et on allonge les listes d'attente de l'autre.
Il faut voir au-delà de la ligne « Aide à la pierre » et prendre en compte la TVA à 5,5 %, les exonérations de foncier bâti et les aides aux taux. Les 480 millions d'euros ne représentent que 8 % des dépenses de l'État en faveur du logement social ; il faut se souvenir que, sur 100 euros d'aide au logement social, 66 viennent de l'État. J'ai entendu des critiques sur les ventes de logements par les organismes HLM. Pour le Gouvernement, c'est une façon de faire vivre la mixité sociale ; il n'y a pas de raison que les locataires ne puissent accéder à la propriété.
Mme Raymonde Le Texier. - Ça donne Clichy-sous-Bois !
Mme Odette Terrade. - Des copropriétés dégradées !
M. Benoist Apparu, secrétaire d'État. - J'ajoute que la remontée de fonds propres des organismes des zones les moins tendues vers les zones les plus tendues dégagera potentiellement 2 milliards d'euros supplémentaires. Je tiens à vous rassurer : si le Gouvernement souhaite accompagner les organismes pour qu'ils mutualisent leurs moyens et qu'ils se constituent en groupes plus importants, il n'entend pas les y obliger. Il n'est pas question qu'il contraigne les organismes de moins de 10 000 logements à fusionner. C'est avec tous ces outils que nous financerons, en 2010, 140 000 logements sociaux.
Je veux répondre aussi aux interrogations de M. Dassault. La garantie d'emprunt des collectivités territoriales n'est jamais appelée par la Caisse des dépôts. La Caisse de garantie du logement locatif social peut intervenir en cas de difficulté et établir des plans de redressement avant que les collectivités territoriales ne soient sollicitées. Quant aux contingents, c'est le principe « qui paye décide » qui s'applique ; ils sont attribués en fonction de la contribution de chacun au financement des opérations. Je note que l'État finance 47 % du logement social et dispose d'un contingent de 30 %, que je souhaite voir utilisé à plein ce qui est loin d'être le cas, notamment en Ile-de-France.
Je regrette, comme le rapporteur spécial, que les dépenses fiscales ne figurent pas dans cette mission. En 2009, le plan de relance avait prévu une mesure de soutien provisoire au secteur de la construction, le doublement du prêt à taux zéro pour l'accession populaire à la propriété. Cette mesure sera maintenue au premier semestre 2010, puis dégradée de 50 % au second. Je pense aussi au verdissement des aides fiscales à la construction. Je ne veux pas anticiper sur vos débats de la semaine prochaine sur le dispositif Scellier, qui trancheront la différence d'appréciation entre les deux chambres.
Le Gouvernement, monsieur Cornu, ne souhaite pas qu'on renouvelle les erreurs du dispositif Robien. Sans zonage, ce qui est un dispositif d'investissement devient une niche fiscale. Et on se retrouve avec des logements vides un peu partout. Le Gouvernement, en accord avec l'Assemblée nationale et le Sénat, a décidé de réserver le Scellier aux zones les plus tendues, qu'il reste maintenant à définir. Il existe un autre dispositif pour aider les investisseurs privés : le PLS privé, certes moins avantageux que le Scellier, offre néanmoins une possibilité de déduction fiscale intéressante. Et il est ouvert sur tout le territoire.
J'évoquerai également l'avenir du 1 % logement. La réforme de 2009 en a revu en profondeur le fonctionnement et la gouvernance. Début 2010, nous n'aurons plus que 23 collecteurs contre 103 aujourd'hui. Transparence et efficacité y gagneront. La réforme permet également de réorienter les ressources : au-delà de l'effort de l'État, ce sont près de 1,4 milliard d'euros qui seront affectés au logement, principalement sous forme de subventions à l'Anru, à l'Anah ou au programme national de requalification des quartiers anciens dégradés.
Je suis attaché à la pérennité de l'Anah mais les financements actuels ne sont prévus que pour trois ans. Nous verrons à ce moment-là comment les pérenniser.
Dès le début de l'année, nous allons uniformiser l'ensemble des procédés de garantie des risques locatifs, qui sont actuellement inefficaces. Les décrets sont au Conseil d'État. Nous allons mettre en place un produit très simple pour les assureurs et pour les propriétaires ; ce sera aussi un bon outil de prévention des expulsions.
Voici donc un budget ambitieux, pragmatique et efficace. (Applaudissements à droite et au centre)
Examen des crédits
M. le président. - Amendement n°II-18, présenté par M. Dallier, au nom de la commission des finances.
Modifier comme suit les crédits des programmes :
(en euros)
Programmes |
Autorisations d'engagement |
Crédits de paiement |
||
|
+ |
- |
+ |
- |
Prévention de l'exclusion et insertion des personnes vulnérables |
300.000 |
|
300.000 |
|
Aide à l'accès au logement |
|
|
|
|
Développement et amélioration de l'offre de logement |
|
|
|
|
Politique de la ville |
|
300.000 |
|
300.000 |
TOTAL |
300.000 |
300.000 |
300.000 |
300.000 |
SOLDE |
0 |
0 |
M. Philippe Dallier, rapporteur spécial. - Le comité de suivi et d'évaluation de l'Anru devait être une vraie « vigie républicaine », selon M. Borloo. Il a été très utile à l'origine de l'agence mais désormais, celle-ci fonctionne bien, avec un conseil d'administration où nous sommes représentés ainsi que des personnalités qualifiées. Le travail d'évaluation s'effectue désormais là ainsi qu'à la Cour des comptes. Le recours à des cabinets extérieurs peut donc être évité. Nous proposons en conséquence de déplacer ces 300 000 euros vers une autre action de Mme Amara, le programme « Prévention de l'exclusion et insertion des personnes vulnérables » pour ajuster les dotations de l'aide alimentaire inscrites à l'action 2 « Actions en faveur des plus vulnérables ».
Mme Fadela Amara, secrétaire d'État. - Ce rééquilibrage sera utile ; j'y suis favorable.
Mme Raymonde Le Texier. - Alors que les maires des banlieues les plus défavorisées ne cessent d'alerter sur la transformation de leurs quartiers en ghettos et que les inégalités entre territoires ne cessent de s'accroître, la baisse de 6 % du programme « Politique de la ville » est incompréhensible. Cette diminution consacre un abandon. Les banlieues ne sont décidément pas la priorité du Gouvernement. Le ghetto a ceci de commode qu'il permet de concentrer la pauvreté sur des territoires déjà considérés comme sinistrés, de façon à ce que les autres continuent à vivre comme si de rien n'était. Ancien maire de Villiers-le-Bel, élue de ce territoire depuis plus de trente ans, je connais bien la réalité des quartiers.
On n'en est plus à se battre pour restaurer la mixité sociale. Cette bataille-là est déjà perdue. Les maires demandent avant tout les moyens de tirer vers le haut les habitants de ces quartiers. Rien n'est plus difficile pour un élu que de constater la détresse des habitants et de voir les difficultés s'enkyster. Qu'il s'agisse de chômage, de pauvreté ou d'éducation, les inégalités continuent de se cumuler sur ces territoires.
L'Observatoire national des zones urbaines sensibles constate que 33 % des habitants des ZUS vivent en dessous du seuil de pauvreté contre 12 % pour le reste du territoire. Les difficultés d'accès à l'emploi y sont toujours aussi importantes et le décrochage entre territoires ne cesse de s'accentuer. Le chômage y est d'autant plus enraciné que 66 % des actifs de moins de 25 ans n'ont aucun diplôme et que ceux qui en ont un sont confrontés à la discrimination. Et ces statistiques ne tiennent pas compte des effets de la crise, que ces quartiers fragiles ont encaissés de plein fouet. Dans le Val d'Oise, le chômage des jeunes a augmenté de 42 % sur l'année 2009. Le plan « Espoir banlieue » n'a pas seulement échoué, il a installé un sentiment de trahison, que partagent les élus.
L'épisode de la répartition de la DSU lors de la discussion de cette mission à l'Assemblée nationale l'atteste. Alors que les maires demandaient que les 60 millions supplémentaires de DSU soient concentrés sur les villes les plus pauvres plutôt que saupoudrés, le Gouvernement a refusé tout aménagement, malgré le souhait de Mme Amara. Même si l'alliance informelle d'élus de banlieue issus de droite et de gauche a fini par décrocher un vote favorable, les maires ont mesuré à quel point ils ne pouvaient compter que sur eux-mêmes. Ils ont dit leurs inquiétudes face aux réformes permanentes de la politique de la ville. « Tous les ans, on est obligé de se battre pour sauver les crédits de la politique de la ville, rien n'est jamais acquis, tout est toujours remis en cause », soulignait le maire de Clichy-sous-Bois. « La politique de la ville reste brouillonne, on n'arrive pas à imposer une solidarité financière minimale entre communes pour éviter qu'il y ait des ghettos de riches et des ghettos de pauvres », s'alarme le maire de Drancy.
L'écart entre les territoires qui se délitent et ceux qui ont les capacités de rebondir devraient encore se creuser, d'autant que le Gouvernement réduit les moyens consacrés à la politique de la ville.
La France ne peut tolérer que subsistent autant de quartiers qui sont devenus de véritables ghettos. Ou alors il faudra accepter de vivre avec le spectre permanent de nouvelles crises urbaines. La population de ces quartiers se sent isolée et rejetée pour des raisons indissociablement sociales et ethniques. Didier Lapeyronnie, sociologue spécialisé sur ces questions l'exprime très bien : face à cette situation s'est élaborée une véritable contre-société, le ghetto, lequel fonctionne comme une cage, on est forcé d'y vivre du fait de la pauvreté et la discrimination ; c'est comme un cocon au sein duquel on se replie et dont on connaît au moins les règles.
S'affirmer comme individu revient à rompre toutes les solidarités et devient impossible. Ce que nous dit cette population, c'est : « Puisque vous ne voyez en moi que ma différence et non pas ce qui nous rassemble, et bien, ma différence, je l'exhibe ». Quant l'intégration à la société devient impossible, c'est sur sa seule différence que l'on construit son identité.
M. Laurent Béteille. - Vous l'avez déjà dit !
Mme Raymonde Le Texier. - Il faut le redire ! Votre dédain est responsable du désespoir de ces populations et sera responsable, demain, de l'enfermement communautaire et de ses conséquences.
L'absence de volonté politique que traduit ce budget, alors que vous ne pouvez ignorer la gravité de la situation, nous met en colère. Lorsque de nouveaux événements graves se produiront dans les banlieues, gardez pour vous vos larmes de crocodile ! (Applaudissements à gauche)
L'amendement n°II-18 est adopté, Les crédits de la mission sont adoptés.
Articles additionnels après l'article 63
M. le président. - Amendement n°II-19, présenté par M. Dallier, au nom de la commission des finances.
I.- Après l'article 63, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Le compte général de l'État, annexé au projet de loi de règlement des comptes et rapport de gestion, inscrit la provision au titre des litiges résultant de la mise en jeu de la responsabilité de l'État en application de la loi n°2007-290 du 5 mars 2007 instituant le droit au logement opposable et portant diverses mesures en faveur de la cohésion sociale.
II.- En conséquence, faire précéder cet article de l'intitulé :
Ville et logement
M. Philippe Dallier, rapporteur spécial. - Nous précisons que l'État fait figurer la provision pour risque contentieux lié au droit au logement opposable dans le compte général annexé au projet de loi de règlement. C'est un amendement que nous aurions dû faire adopter l'an dernier.
M. Benoist Apparu, secrétaire d'État. - Sagesse.
L'amendement n°II-19 est adopté et devient un article additionnel.
M. le président. - Amendement n°II-20, présenté par M. Dallier au nom de la commission des finances.
I.- Après l'article 63, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
A la fin du II de l'article 101 de la loi n°2006-872 du 13 juillet 2006 portant engagement national pour le logement, l'année : « 2009 » est remplacée par l'année : « 2011 ».
II.- En conséquence, faire précéder cet article de l'intitulé :
Ville et logement
M. Philippe Dallier, rapporteur spécial. - Le concours 1 % relance ayant été prorogé jusqu'en 2011, il paraît logique de maintenir jusqu'à cette échéance le dispositif prévu dans la loi portant engagement national pour le logement, selon lequel les deux tiers des sommes collectées l'année précédente par les collecteurs non associés de l'Union d'économie sociale pour le logement sont reversés aux collecteurs associés de l'UESL.
L'amendement n°II-20, accepté par le Gouvernement, est adopté et devient article additionnel.
Prochaine séance aujourd'hui, samedi 5 décembre 2009, à 14 h 30.
La séance est levée à 2 heures.
Le Directeur du service du compte rendu analytique :
René-André Fabre
ORDRE DU JOUR
du samedi 5 décembre 2009
Séance publique
A 14 HEURES 30 ET LE SOIR
Suite de la discussion du projet de loi de finances pour 2010, adopté par l'Assemblée nationale (n°100, 2009-2010).
Discussion des articles de la seconde partie, non rattachés aux crédits : incidences de la suppression de la taxe professionnelle sur l'année 2011.
Rapport (n°101, 2009-2010) de M. Philippe Marini, rapporteur général de la commission des finances.