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Table des matières
Saisine du Conseil constitutionnel
Loi de finances pour 2010 (Deuxième partie - Suite)
Interventions des orateurs des groupes
Hommage à une personnalité étrangère
Loi de finances pour 2010 (Deuxième partie - Suite)
Examen des crédits des missions
Article additionnel après l'article 52 bis
Interventions des orateurs des groupes
SÉANCE
du mardi 1er décembre 2009
39e séance de la session ordinaire 2009-2010
présidence de M. Gérard Larcher
Secrétaires : M. Philippe Nachbar, M. Jean-Paul Virapoullé.
La séance est ouverte à 14 h 30.
Le procès-verbal de la précédente séance, constitué par le compte rendu analytique, est adopté sous les réserves d'usage.
Saisine du Conseil constitutionnel
M. le président. - J'ai été informé, par courrier en date du 30 novembre, par le président du Conseil constitutionnel que celui-ci a été saisi le 27 novembre 2009 d'une demande d'examen de la conformité à la Constitution par plus de 60 députés de la loi de financement de la sécurité sociale pour 2010.
Acte est donné de cette communication.
Loi de finances pour 2010 (Deuxième partie - Suite)
M. le président. - L'ordre du jour appelle la suite de l'examen du projet de loi de finances pour 2010. Nous entamons l'examen des crédits de la mission « Écologie, développement et aménagement durables », du budget annexe « Contrôle et exploitation aériens » ainsi que des comptes spéciaux « Contrôle et sanction automatisés des infractions au code de la route » et « Avances au fonds d'aide à l'acquisition de véhicules propres ».
Écologie, développement et aménagement durables Budget annexe « Contrôle et exploitation aériens » Compte spécial « Contrôle et sanction automatisés des infractions au code de la route » Compte spécial « Avances au fonds d'aide à l'acquisition de véhicules propres »
Interventions des rapporteurs
M. Alain Lambert, rapporteur spécial de la commission des finances. - Les crédits de la mission « Écologie, développement et aménagement durables » s'élèvent, pour 2010, à 10,29 milliards en autorisations d'engagement et 10,15 milliards en crédits de paiement, soit 0,7 % de plus qu'en 2009, évolution conforme à la loi de programmation. Le programme 203, majeur, couvre les infrastructures et services de transports. Il mobilise en 4,44 milliards en autorisations d'engagement et 4,35 milliards en crédits de paiement. Dans le cadre de la RGPP, les moyens en personnel seront réduits d'environ 300 emplois en 2010. Nous déplorons toujours que cette politique soit majoritairement financée par des crédits extérieurs ou extrabudgétaires -fonds de concours, crédits de I'Afitf (Agence de financement des infrastructures de transport de France) et des collectivités territoriales et dépenses fiscales pour 803 millions. Notre commission s'interroge sur le rôle de l'Afitf, dont les circuits de financement demeurent complexes. La Cour des comptes, dans son rapport public annuel, y voit un organisme aux ambitions limitées, privé de moyens, inutile, qui « voit circuler des crédits qui partent du budget général avant d'y retourner ». Elle n'est pas devenue l'instance d'évaluation et de décision qui aurait conforté sa légitimité. Son budget devrait être consacré aux transports non routiers pour près de 62 %, conformément au redéploiement modal prévu par le Grenelle. La subvention de l'État diminue de 6,7 % à périmètre constant mais demeure importante, avec 980 millions. Je redoute que cette subvention provisoire ne devienne durable, puisque la taxe poids lourds sera sans doute reportée à 2012 et ne prendra que partiellement le relais.
L'établissement public Réseau ferré de France (RFF) change de modèle économique, avec la réforme de la tarification qui affecte désormais les concours de l'État aux activités ferroviaires dont les péages ne couvrent pas le coût complet. Cette réforme permet de diminuer de 3,1 % la subvention, qui atteint malgré tout 2,37 milliards. La situation financière de RFF sort légèrement améliorée de la réforme mais demeure fragile puisque la dette a augmenté de 800 millions en 2008 pour atteindre 28,2 milliards, dette que la nécessaire rénovation du réseau ne pourra qu'alourdir. Est-on bien sûr, monsieur le ministre, que l'engagement national pour le fret ferroviaire sera autre chose qu'un énième et désespérant plan de relance ? Les priorités paraissent multiples et les financements peu clairs... Comment le Gouvernement accueille-t-il les propositions de la SNCF sur les trains d'aménagement du territoire, sachant qu'avec un déficit d'exploitation récurrent, les voies sont menacées d'obsolescence ? Doit-on, comme le souhaite la SNCF, mettre en place une société distincte pour les matériels roulants dédiés à ces dessertes et prévoir une compensation financière dans le cadre d'un contrat de service public ? Selon quelles modalités ? Enfin, le dernier rapport de la Cour des comptes sur les TER, sévère, suggère dans certains cas le remplacement des dessertes par un réseau d'autocars. Quelle est votre appréciation ?
La rationalisation de l'organisation de Voies navigables de France (VNF) se poursuit, avec un recentrage sur le réseau magistral. La subvention de l'État sera de 58,9 millions et inclura une dotation supplémentaire de 4 millions au titre du Grenelle de l'environnement, mais la situation financière de VNF demeure assez confortable.
Le soutien au transport combiné, qui est une priorité, devrait bénéficier d'une enveloppe supplémentaire de 8 millions au titre de l'engagement national pour le fret ferroviaire. Nous proposons d'augmenter ce montant d'environ 1,5 million par un amendement de transfert de crédits ; les crédits d'entretien et d'exploitation de grands ports maritimes seront augmentés de 5,85 millions ; le taux de renouvellement des couches de surface du réseau routier devrait redescendre à 6 % en 2010, ce qui demeure insuffisant pour garantir une durée de vie optimale des chaussées. La tendance générale à la dégradation du réseau routier national n'est donc pas encore enrayée.
Le programme 205 « Sécurité et affaires maritimes » est doté, en 2010, de 133 millions en autorisations d'engagement et 135,5 millions en crédits de paiement, soit une hausse de 0,7 %. Cette dotation est plus que doublée par la masse salariale des 3 228 équivalents temps pleins travaillés (ETPT). Les dépenses fiscales concourent également pour 244 millions. L'évaluation du système optionnel de taxe au tonnage reste approximative. La principale réforme, qui a trait à la réorganisation des services déconcentrés des affaires maritimes, vise des économies de gestion et une rationalisation des implantations. Je regrette que le ministère n'ait pas fourni une évaluation des bénéfices escomptés. Pourriez-vous nous en dire davantage, monsieur le ministre ? Les effectifs diminueront de 57 ETPT en 2010. Une réforme des écoles nationales de la marine marchande est en cours pour être confiée à un établissement public unique. J'approuve cette mesure de bonne gestion.
Trois priorités budgétaires seront mises en oeuvre : la poursuite de la modernisation des Cross (Centres régionaux opérationnels de surveillance et de sauvetage) et de leurs systèmes d'information ; la protection de l'emploi maritime, avec une augmentation des aides à la flotte de commerce sous pavillon français, qui comptait seulement 296 navires fin 2008 ; un dispositif de contrôle et de surveillance des pêches enfin revalorisé.
Le programme 113 « Urbanisme, paysages, eau et biodiversité » mobilise d'importantes ressources humaines -15 222 ETPT- et prend appui sur des opérateurs puissants aux ressources extrabudgétaires considérables. Ainsi des agences de l'eau, dont les ressources fiscales et propres atteignent 2,3 milliards, à comparer aux 350 millions du programme.
En 2010, celui-ci se résume en deux mots : Grenelle -61 millions y sont consacrés, soit 24 millions de plus qu'en 2009, dans le domaine de l'urbanisme, de l'eau et de la biodiversité- et RGPP, avec la cessation progressive des activités d'ingénierie publique concurrentielle exercées par les DDE et DDEA, réforme qui se traduit par un plan de suppression d'environ 3 300 ETP entre 2009 et 2011. L'économie en résultant peut être estimée à 48 millions en 2010. Se poursuit également la mutualisation des effectifs des polices de l'eau et de la nature. Enfin, pour 4 millions en 2010, des actions de formation des agents sont engagées pour la refonte de la fiscalité de l'urbanisme et du mode de traitement des actes d'urbanisme. Des gains de productivité équivalant à 1 000 ETPT en 2011 sont attendus ainsi qu'une économie budgétaire, à terme, de l'ordre de 40 millions par an.
Nous attendons à présent, monsieur le ministre, le vrai nirvana de ces débats : vos réponses. (Applaudissements à droite)
M. Yvon Collin, rapporteur spécial de la commission des finances. - Le programme 170 « Météorologie » n'appelle pas de longs développements. Sa dotation, de 190 millions, couvre la subvention pour frais d'exploitation. Les marges financières de l'opérateur se contractent, sous le double effet des contraintes financières imposées par l'État et de la crise économique, qui pèse sur ses recettes commerciales.
Météo France a donc conduit une série de réformes justifiées. La principale concerne la réduction du nombre de ses implantations territoriales qui a suscité, fin 2008, des tensions sociales aujourd'hui apaisées. Les fermetures de sites s'échelonneront de 2012 à 2017, pour aboutir, à l'horizon 2017, à un réseau de 55 implantations, soit un peu plus de la moitié des 108 implantations actuelles.
Nous souhaiterions en savoir plus sur cette réforme, monsieur le ministre.
J'en viens au programme 159 qui prévoit 73 millions pour l'Institut géographique national au titre de subventions pour charges de service public. Le budget 2009 de l'IGN s'exécute dans un contexte difficile : son chiffre d'affaires a diminué depuis l'automne 2008. Il en ira sans doute de même l'année prochaine. La situation de l'IGN est d'autant plus préoccupante que l'opérateur a fait l'objet, en 2009, d'observations particulièrement sévères de la Cour des comptes : stratégie de diversification « hasardeuse et mal maîtrisée », frontière mal définie entre les missions régaliennes et concurrentielles de l'IGN, gestion « dispendieuse » sont autant de griefs sur lesquels nous aimerions avoir votre avis, monsieur le ministre. Nous n'avons pas réduit les crédits de I'IGN car l'établissement fait face à une réduction de sa subvention et à une érosion sensible de ses recettes commerciales. Nous souhaitons néanmoins connaître la teneur et le calendrier des mesures que vous prendrez pour remédier aux graves insuffisances relevées par la Cour des comptes.
J'en viens au budget annexe « Contrôle et exploitation aériens » (Bacea) et aux nombreuses réformes au sein de la DGAC. Le secteur du transport aérien connaît actuellement d'importantes difficultés. L'Iata prévoit, sur l'année 2009, une baisse de 8 % du trafic aérien global et de 15 % du chiffre d'affaires. Pendant le premier semestre, Aéroports de Paris a connu une baisse de trafic de 6,4 %, et Air France-KLM a enregistré une baisse de son chiffre d'affaires de 20,5 %. Le Bacea doit donc répondre à de multiples défis en 2010, et son équilibre budgétaire repose sur une prévision d'augmentation du trafic de 1,5 %. Cet équilibre doit cependant être soutenable et ne pas reposer sur la hausse des redevances ni sur l'endettement.
La Direction générale de l'aviation civile (DGAC) est, quant à elle, engagée dans de nombreuses réformes, notamment la mutualisation et la modernisation des fonctions supports, qui devra se traduire dans le nouveau protocole négocié avec les organisations syndicales, la télédéclaration des recettes et la mutualisation des achats publics par site, le nouveau système d'information financière et de comptabilité analytique qui devrait être opérationnel en 2011.
En ce qui concerne le programme 612 relatif à la navigation aérienne, le projet « Espace 2011 » expérimentera les synergies entre les services d'approche d'Orly, de Roissy et d'Athis-Mons, qui devraient être regroupés dans un nouveau centre modernisé à partir de 2015. En outre, dans le cadre du renforcement de l'intégration de l'espace aérien européen, le projet européen Sesar devrait être mis en place et le traité Fabec avec cinq autres États européens serait finalisé l'année prochaine. Un nouveau système de régulation économique des services de navigation aérienne, fondé sur l'amélioration de la performance, devrait être finalisé et un deuxième contrat de régulation économique pour 2011-2016 avec Aéroports de Paris devrait être préparé. En ce qui concerne la formation aéronautique, un contrat d'objectifs, de moyens et de performances avec l'École nationale de l'aviation civile (Enac) est en cours d'élaboration. Le service d'exploitation de la formation aéronautique poursuivra son plan de modernisation et de réduction des coûts, l'objectif étant d'atteindre 350 équivalents temps pleins, contre 420 actuellement. Les synergies entre formations théorique et pratique devraient conduire à la fusion de ces deux écoles en 2011.
Au-delà de ces réformes, la DGAC pourrait devenir un établissement public. Il serait souhaitable que le ministre nous fasse part de sa position sur ce sujet sensible pour les personnels, qui intervient alors que le ciel unique européen se met en place.
Sur le plan financier, le budget annexe est dans une situation tendue. Le budget pour 2010 tient compte d'une baisse du trafic de 7 % en 2009. L'autorisation d'emprunt a été relevée de 100 millions par la loi de finances rectificative du 20 avril 2009 et 65 millions supplémentaires devraient être ouverts par un prochain décret d'avances. Cependant, la baisse des recettes de fonctionnement en 2009 pourrait être de 10 %, de sorte que les hypothèses de construction du budget 2010 me paraissent dépassées. Quoi qu'il en soit, l'équilibre prévisionnel du budget annexe en 2010 prévoit l'augmentation des recettes de fonctionnement. Le taux des redevances de navigation aérienne devrait être relevé de 4,9 %, tout comme les tarifs de la taxe d'aviation civile. De même, l'extension du périmètre des redevances de surveillance et de certification se poursuivra, même s'il est regrettable que le ministère ait renoncé à créer une redevance pour les manifestations aériennes. L'instauration d'une redevance de route océanique améliorera sensiblement le taux de couverture des coûts du contrôle aérien en outre-mer.
L'équilibre prévisionnel du budget prévoit également un plus grand recours à l'emprunt. Après une stabilisation entre 2006 et 2008, l'endettement net augmenterait ainsi de près d'un tiers par rapport à fin 2008 pour atteindre 1 174 millions. Cette évolution est inquiétante.
Enfin, ce budget prévoit un plan d'économies de 40 millions sur les dépenses qui est en partie lié à la révision générale des politiques publiques. Il se répartit de manière à peu près équivalente entre dépenses de fonctionnement et reports de projets d'investissement.
Le plafond d'emplois pour 2010 est également abaissé de 108 équivalents temps plein, ce qui correspond à la première tranche de mise en oeuvre de la RGPP. II n'est cependant pas évident que ce plan d'économies suffise à assurer l'équilibre du budget annexe. Il faudra sans doute tenir compte des observations formulées par la Cour des comptes, dans deux récents référés, sur la négociation d'un protocole social et sur le service d'exploitation de la formation aéronautique (Sefa). (Applaudissements au centre et sur les bancs de la commission)
Mme Fabienne Keller, rapporteur spécial de la commission des finances. - Je vais présenter les programmes « Prévention des risques », « Énergie et après-mines » et le fonds d'aide à l'acquisition de véhicules propres.
Le programme 181 connaît une incontestable montée en puissance puisque ses crédits augmentent de 30 %. Cette hausse intéresse tout particulièrement la prévention des risques technologiques et des pollutions, telle que le financement des plans de prévention des risques technologiques (PPRT). De plus, 60 millions supplémentaires seront consacrés à la mise en oeuvre des mesures du Grenelle de l'environnement, notamment dans les domaines du traitement des sites pollués, des déchets et de la santé-environnement. Nous voyons là les suites tangibles du Grenelle, qui se traduisent également dans les emplois : les crédits de personnel augmenteront de 11 % par rapport à 2009 afin de créer 144 postes « fléchés Grenelle » dans les régions.
Les sous-effectifs de l'inspection des installations classées seraient en voie de résorption : la commission aimerait vous entendre le confirmer, madame la ministre. Quand disposerons-nous enfin des effectifs nécessaires pour assurer l'établissement des PPRT et une bonne surveillance des sites, rendus d'autant plus nécessaires depuis la catastrophe d'AZF ?
Au-delà des crédits inscrits, ce programme mobilise des ressources extrabudgétaires. II en va ainsi des concours à l'Ademe, -20 millions pour les sites pollués, 30 millions pour la résorption des points noirs bruit et 83 millions pour les déchets- et des interventions du fonds de prévention des risques naturels majeurs, ou fonds Barnier, qui atteindront 153 millions en 2010. Après deux années d'augmentation des ressources du fonds, grâce aux initiatives prises par notre commission et le Gouvernement, les réponses au questionnaire budgétaire indiquent que les recettes pourraient être inférieures aux dépenses.
J'en viens au programme « Énergie et après-mines » qui, pour l'essentiel, garantit les droits des mineurs et de leurs ayants droit.
Je ne peux évoquer le programme 174 sans dire un mot d'une importante dépense fiscale qui lui est rattachée, à savoir le crédit d'impôt « développement durable ». Son coût est estimé à 2,8 milliards pour 2009 et il en ira sensiblement de même pour 2010, bien que ce montant risque de diminuer en raison de la crise. Ce crédit d'impôt est assez erratique d'une année sur l'autre : pourriez-vous nous donner les dernières estimations ?
Dans la mise en oeuvre du programme 174, l'Ademe occupe une place centrale. La commission des finances et la Cour des comptes feront une enquête sur cet organisme afin de suivre les ressources considérables qui lui sont affectées avec les 500 millions de TGAP.
J'en viens au fonds d'aide à l'acquisition de véhicules propres. La réussite du dispositif bonus-malus automobile, introduit en 2008, est tellement incontestable qu'il est déficitaire. Nous nous en réjouissons puisque la baisse des émissions moyennes du parc automobile a été, en vingt mois, équivalente aux dix dernières années. Le déficit s'est cependant élevé à 214 millions en 2008 et il devrait être bien plus élevé cette année. Pouvez-vous nous donner quelques indications, madame la ministre ? Vous souhaitez anticiper d'un an les exigences en termes d'émissions de CO2, pour tenir compte de l'amélioration du parc automobile.
J'en viens à deux dossiers d'une grande actualité : la taxe carbone, devenue au Sénat contribution carbone. Je forme le voeu qu'elle ne soit pas assortie de multiples exonérations en CMP. Ce dispositif doit fonder un nouvel équilibre fiscal et environnemental.
Lors du sommet de Copenhague, vous pourrez compter sur notre soutien, madame la ministre. Nous savons qu'avec M. Borloo, vous prenez cette mission à coeur. Le Sénat en débattra demain à l'initiative des commissions de l'économie et des affaires européennes afin de vous donner un mandat clair en ce domaine. (Applaudissements à droite)
M. Gérard Miquel, rapporteur spécial de la commission des finances. - L'enjeu humain, social et économique que représente la sécurité routière est tel que l'État est légitime à l'assumer. Elle mobilisera près de 2,6 milliards d'euros en 2010, soit une progression de 3,4 %. Les résultats de ces dernières années sont excellents et les comportements des automobilistes ont considérablement évolué. Si 4 443 personnes sont décédées sur les routes en 2008, les objectifs pour 2012 restent ambitieux : moins de 3 000 décès et une division de moitié des décès en deux-roues et dus à l'alcool. Sur les neuf premiers mois de 2009, le nombre de décès a toutefois augmenté de 2 %, et de 17,7 % pour le seul mois de septembre. Pouvez-vous faire le point, monsieur le ministre ? Comment comptez-vous limiter encore la mortalité des conducteurs de deux-roues ?
Le programme 207 « Sécurité et circulation routières » est modestement doté d'environ 62 millions d'euros, en hausse de 2,3 % ; il bénéficie essentiellement à l'éducation routière. Les personnels concourant à ce programme sont au nombre de 2 505 ETPT, soit 18 de plus qu'en 2009. La portée de la justification au premier euro de ce programme est fortement limitée par l'ampleur des coûts analytiques : la ventilation des crédits de soutien et de polyvalence conduit au quadruplement de ses crédits de paiement. La réforme du permis de conduire, dont les orientations ont été fixées en janvier 2009, est mise en oeuvre, avec pour objectifs la réduction des délais d'obtention, la simplification des démarches, la diminution du coût pour les candidats en difficulté et la rénovation des programmes de formation et de l'examen. Le dispositif du permis à un euro par jour sera étendu, l'État prenant à sa charge la caution de 20 000 prêts par an. Cette décision est opportune mais les hypothèses d'octroi de prêts et de taux de défaut semblent peu réalistes ; la commission proposera un amendement pour réduire le coût du dispositif, tout en conservant des hypothèses volontaristes.
J'en viens au compte d'affectation spéciale sur les radars. Les recettes des amendes forfaitaires y sont affectées dans la limite de 212 millions d'euros, puis aux collectivités territoriales dans la limite de 130 millions d'euros, enfin à l'Afitf. Elles sont, depuis deux ans, inférieures aux prévisions, celles-ci n'ayant pris que partiellement en considération l'amélioration du comportement des usagers. Elles devraient s'élever à environ 500 millions d'euros en 2009. Le comité interministériel de la sécurité routière du 13 février 2008 a annoncé le déploiement de 500 nouveaux radars chaque année à partir de 2008 ; mais l'objectif d'implanter 4 500 dispositifs d'environ d'ici fin 2012 sera difficile à atteindre. Le chiffre de 4 250 semble plus réaliste. Le même comité interministériel a confirmé la diversification des infractions relevées ; les dispositifs aux feux tricolores sont opérationnels depuis le 3 août 2009 et une expérimentation a été lancée fin août pour le contrôle des passages à niveaux ; des marchés sont à l'étude pour sécuriser certains tunnels. Aucun nouveau radar mobile ne devrait être installé en 2010. Le coût de maintenance des radars devrait être stable en 2010 et les dépenses liées au développement du Centre national de traitement baisseront de plus de 57 %, après les importants investissements de 2008 et 2009.
Deux tendances affectent le programme 752 « Fichier national du permis de conduire » : une hausse des crédits de 55 %, malgré l'utilisation de reports importants, due à la progression attendue du nombre de lettres envoyées aux contrevenants pour le retrait ou la restitution de points et pour les invalidations de permis, et le retard du projet Faeton, lancé en 2006 pour moderniser l'application informatique de gestion des permis de conduire. Un directeur de projet a été nommé le 10 juin dernier. Le dispositif sera-t-il achevé dans les délais ?
Le programme « Conduite et pilotage des politiques de l'écologie, de l'énergie, du développement durable et de la mer » regroupe la quasi-totalité des moyens de personnel de la mission, ainsi que l'ensemble des crédits de support. Nous avons déjà souligné le caractère peu satisfaisant, au regard de la Lolf, de ce type de programme. Les services l'admettent mais font valoir que cette centralisation permet une gestion plus souple et plus efficace du plafond d'emploi et la mutualisation qu'encourage la RGPP. Nous prenons acte de ce choix et sommes impatients d'en constater les effets.
Le plafond d'emplois du programme est en diminution de 879 ETPT en 2010, sous l'effet conjugué de la décentralisation des personnels chargés de l'entretien et l'exploitation des infrastructures, de l'intégration de l'essentiel des effectifs du programme « Développement et amélioration de l'offre de logement » de la mission « Ville et logement » et des suppressions d'emplois nettes intervenues en 2009 ou en 2010. Je relève que la règle du non-remplacement d'un départ en retraite sur deux est appliquée dans le ministère. Il faut noter également la hausse des dépenses immobilières due à l'élargissement du périmètre des loyers budgétaires et la création du fonds « État exemplaire », qui n'est doté d'aucun crédit mais sera abondé en gestion par l'application d'un « sur-gel » au sein de chaque mission du budget de l'État. Ce fonds, dont les crédits seront redistribués aux ministères en fonction de leurs performances environnementales, a attisé la curiosité de la commission. Si cette initiative paraît de nature à encourager les comportements écologiquement vertueux, la complexité du dispositif retenu suscite notre perplexité. Une simple taxation interministérielle produirait probablement les mêmes effets pour des coûts de gestion moindres. Il vous appartiendra, monsieur le ministre, de nous convaincre du bien-fondé du mécanisme retenu. (Applaudissements sur les bancs socialistes)
M. Jean-Paul Émorine, en remplacement de M. Jean Bizet, rapporteur pour avis de la commission de l'économie. - Je supplée M. Jean Bizet, qui participe aujourd'hui à Genève à une réunion de l'OMC. Le rapporteur se félicite de l'augmentation des crédits consacrés à l'environnement, notamment ceux du programme « Prévention des risques » qui progressent de plus de 30 %. Cette évolution est conforme aux décisions du Grenelle de l'environnement que le Parlement a validées dans la loi de programme.
Je vous interrogerai, monsieur le ministre, sur trois points, et d'abord sur l'aide aux collectivités locales pour l'élaboration de leurs documents d'urbanisme. Notre commission avait, l'an dernier, déposé un amendement pour rétablir le dispositif spécifique d'aide à l'élaboration des Scot, le mécanisme « un euro par habitant » ayant pris fin en janvier 2008. Nous avons obtenu en partie satisfaction en 2009, puisque douze projets de Scot innovants sur le plan environnemental ont été aidés. Mais il n'y a pas de dispositif global, alors que 230 secteurs ont manifesté en 2009 l'intention de lancer un Scot. L'extension du dispositif de soutien est d'autant plus nécessaire que le Sénat a adopté, dans le Grenelle II, un amendement visant à la généralisation des Scot, outils essentiels de planification. Le budget 2010 prévoit par ailleurs une aide pour 20 PLU intercommunaux, alors que celui de l'an dernier avait prévu une enveloppe de 1,5 million d'euros pour en financer 30, aucun n'a été financé, semble-t-il faute de demande. Ne pourrait-on envisager d'augmenter le nombre de projets de Scot aidés ?
La deuxième interrogation concerne les subventions accordées par le ministère aux principales associations nationales de protection de l'environnement qui, entre 2007 et 2008, ont augmenté de plus de 30 %. Nous en prenons acte, en relevant que le ministère souhaite impliquer davantage ces associations dans les décisions, tant au niveau national que local. Mais le corollaire de l'aide publique doit être la responsabilisation ; or les associations sont trop souvent à l'origine, au niveau local, de recours systématiques et parfois abusifs contre des projets de développement. (M. Jean-Louis Carrère approuve) L'une d'elles affiche ainsi, sur sa page internet, le nombre de recours contentieux engagés en 2005, comme s'il s'agissait d'une fin en soi. Comment les fonds supplémentaires ont-ils été utilisés ? Et quelles mesures le ministère compte-t-il prendre pour limiter les recours abusifs ?
Ma dernière question concerne les subventions accordées par l'Ademe. Nos concitoyens refusent de plus en plus l'implantation d'unités d'incinération, évolution dont s'inquiète l'Ademe dans son rapport sur les déchets en notant que, si aucune nouvelle unité n'est créée, 30 départements perdront leur autonomie à moyen terme dans le traitement de leurs déchets. Des aides financières sont-elles prévues pour ce type de projet, notamment pour soutenir la concertation ?
Sous réserve de ces observations et interrogations, la commission a émis un avis favorable à l'adoption des crédits des programmes consacrés à l'environnement. (Applaudissements à droite)
M. Jean-François Le Grand, rapporteur pour avis de la commission de l'économie. - Je salue d'abord la remise par le ministère de son rapport d'activité.
Je me réjouis que la DGAC prenne la forme d'un établissement public administratif et non d'une administration ; cela favorisera les partenariats.
Le budget annexe « Contrôle et exploitation aériens » retrace les activités de la DGAC, pour 2 milliards. Or la chute du trafic aérien fait exploser l'endettement du budget annexe qui va passer de 116 à 250 millions, malgré un effort d'économies de 40 millions. En 2009, on compte 180 millions de passagers en moins et une chute de 20 % du fret au niveau mondial ; en France, une baisse de 5 % du trafic passagers au cours des huit premiers mois de l'année. Les entreprises font des efforts, à l'instar de British Airways et Iberia, mais le compte n'y est pas.
En matière de desserte, je me réjouis que l'État envisage de faire profiter de nouvelles lignes du dispositif des liaisons d'aménagement du territoire.
Le produit de la taxe d'aviation civile, payée par les transporteurs aériens, revient pour 20 % au budget général et pour 80 % aux entreprises du secteur. Celles-ci n'ayant pas bénéficié du plan de relance, je forme le voeu -est-ce un voeu pieux ?- que la totalité de la recette de la taxe soit affectée au budget annexe.
En matière de contrôle aérien, il y a en Europe autant de systèmes que de pays. Dix-sept syndicats de six États membres, dont la France, proposent un système de navigation aérienne optimisé, qui, en réduisant les temps de parcours, économiserait 4,7 millions de tonnes de CO2 par an et 2,2 milliards d'euros. A nous d'accompagner cette démarche, le plus vite possible.
La commission de l'économie propose d'approuver les crédits du budget annexe « Contrôle et exploitation aériens » ainsi que ceux de la mission relatifs au secteur du transport aérien. (Applaudissements à droite)
M. Francis Grignon, rapporteur pour avis de la commission de l'économie. - L'avenir de l'Afitf, bras armé de l'État en matière d'investissements, est assuré. L'agence recevra une subvention d'équilibre d'environ 1,3 milliard si l'on cumule les crédits du programme « Infrastructures et services de transport » et ceux du plan de relance. Menacée de suppression l'an dernier, elle a vu ses missions renforcées et finance désormais 50 projets de transports urbains durables ; le rapport Gressier pourrait conduire à lui donner de nouvelles compétences. Toutefois, l'actuel circuit de financement ne pourra perdurer au-delà de 2012, lorsque la taxe poids lourds sera opérationnelle.
Malgré le Grenelle de la mer, le programme « Sécurité et affaires maritimes » stagne. Il faut pourtant réformer l'enseignement maritime, renforcer les contrôles des navires de pêche... Mme Herviaux suggère qu'un jaune budgétaire retrace l'effort de l'ensemble des ministères qui participent à la sécurité des marins. Pourquoi pas un document d'ensemble retraçant l'effort de la Nation en faveur de la mer ?
Pour 2010, 530 nouveaux radars sont prévus ; certains pourront contrôler, outre la vitesse, le respect des feux rouges ou des passages à niveau. Je ne doute pas qu'ils auront la sécurité pour unique objectif.
M. Jean-Louis Carrère. - Ce serait bien.
M. Francis Grignon, rapporteur pour avis. - Les réparations pour vandalisme sur les radars fixes devraient coûter 14,7 millions l'an prochain : lamentable ! Enfin, le ralentissement de la dynamique vertueuse en matière de mortalité sur les routes doit conduire le Gouvernement à redoubler d'efforts, sachant que plus on réduit le nombre de victimes, plus il est difficile de le réduire encore...
Le compte de concours financiers « Avances au fonds d'aide à l'acquisition de véhicules propres » retrace les crédits affectés au bonus-malus automobile. Ce remarquable outil écologique, qui a réellement modifié les comportements, pourrait toutefois coûter au contribuable la bagatelle d'un demi-milliard ! Il faudra à terme réduire ce déficit mais sans bouleverser le calendrier des constructeurs.
Enfin, notre commission envisage de se pencher, en 2010, sur la compétitivité de nos transporteurs routiers de marchandises, qui vont être soumis à ce que certains ont appelé une « véritable pandémie fiscale » -taxe poids lourds, contribution carbone, certificats d'énergie- et à l'ouverture du cabotage international.
Les transports demeurent une priorité. Certes, le plan fret comme le Grenelle de la mer n'ont pas encore eu de traduction budgétaire, mais on raisonne sur une longue période. L'ambition du Gouvernement pour développer les transports demeure intacte et les moyens sont au rendez-vous. La commission a donné un avis favorable à l'adoption de ces crédits, sous réserve de ces remarques. (Applaudissements à droite)
M. Roland Courteau, rapporteur pour avis de la commission de l'économie. - Le programme « Énergie et après-mines » s'élève, pour 2010, à 815,7 millions en crédits de paiement ; l'action 04, « Gestion économique et sociale de l'après-mines », consacrée aux prestations sociales servies aux anciens mineurs et à leurs ayants droit, représente 92 % du total. Vu l'évolution démographique de cette population, les crédits diminuent de près de 5 %.
Des moyens nouveaux ont ainsi pu être dégagés pour la mise en oeuvre du Grenelle de l'environnement, avec notamment la création du fonds de soutien au développement de la chaleur renouvelable, doté de 110 millions, et du fonds démonstrateur de recherche consacré aux technologies émergentes, doté de 41 millions.
De même, les moyens consacrés à la lutte contre l'effet de serre bondissent à plus de 4 millions en 2010, qui financeront des études et la mise en place des schémas régionaux du climat, de l'air et de l'énergie (SRCAE). Je vous proposerai d'abonder de 600 000 euros le programme « Prévention des risques » afin de financer les commissions locales d'information (CLI) à proximité des installations nucléaires, dont les dépenses n'ont pas à être à la charge des seules collectivités territoriales. C'est une solution transitoire, en attendant l'instauration du prélèvement sur le produit de la taxe sur les installations nucléaires de base.
La France s'est engagée à atteindre 23 % d'énergies renouvelables dans sa consommation totale en 2020. Sachant que le potentiel hydraulique est déjà pleinement exploité et que le photovoltaïque n'en est qu'à ses débuts, ce sont la biomasse et l'éolien qui permettront d'atteindre cet objectif. La France est déjà le premier producteur européen de bois énergie, qui représentait 5 % de la consommation finale énergétique en 2007, mais la biomasse est encore largement inexploitée.
La technologie de l'éolien est la plus mature et la moins chère, mais les éoliennes sont parfois contestées. Trop longtemps, le secteur a souffert d'un défaut d'encadrement par l'État, qui n'y croyait pas... J'espère que les choses rentreront dans l'ordre avec les SRCAE. On pourrait déroger à l'obligation de s'inscrire dans une zone de développement de l'éolien pour les petites éoliennes de moins de 36 kW : c'était le sens d'un amendement que j'avais fait adopter lors de la première lecture du Grenelle I, mais qui n'a pas survécu à la navette. Le passage des éoliennes sous le régime des installations classées pour la protection de l'environnement, prévu par le Gouvernement dans le cadre du Grenelle II, ne me paraît pas une bonne idée.
A titre personnel, je ne donne pas un avis favorable à l'adoption des crédits de cette mission. (Applaudissements à gauche)
M. Jean-Louis Carrère. - Pas trop d'éoliennes, tout de même !
M. Ambroise Dupont, rapporteur pour avis de la commission de la culture. - Je commencerai par quelques observations sur les crédits du programme 113, « Urbanisme, paysages, eau et biodiversité ». La présentation du budget offre une réelle traçabilité des objectifs du Grenelle de l'environnement et de la loi du 3 août 2009. Nous ne pouvons que nous féliciter de l'augmentation de près de 60 % des crédits qui y sont affectés : ils atteignent 61 millions d'euros. En ce qui concerne la gestion des milieux et de la biodiversité, je me réjouis que les actions en faveur des espaces protégées soient poursuivies et les moyens des parcs nationaux augmentés. Enfin, j'ai pris connaissance avec beaucoup d'intérêt des dotations prévues pour l'action « Urbanisme, aménagements et sites » au sein de laquelle des crédits sont destinés à favoriser les démarches expérimentales d'élaboration de documents d'urbanisme exemplaires ainsi que le financement de plans de formation des agents du ministère, dont les compétences doivent être adaptées aux modifications institutionnelles et réglementaires. Bon nombre de projets de PLU sont aujourd'hui en suspens, dans l'attente d'un financement provenant de la dotation générale de décentralisation pour les documents d'urbanisme.
J'aimerais voir dans ce budget l'amorce d'une dynamique qui amènera les pouvoirs publics à mieux prendre en compte le paysage et l'architecture dans leurs décisions. Ces deux dimensions ne me paraissent pas occuper la place qu'elles méritent. Aussi ai-je souhaité, en marge de cet avis budgétaire, mener une réflexion en auditionnant quelques professionnels.
Le paysage souffre en effet d'une image réductrice : on l'associe toujours à une organisation de la verdure qui vient en addition du reste. Le même constat vaut pour l'architecture : il suffit pour s'en convaincre de contempler les entrées de ville, les zones commerciales et industrielles, les lotissements, les banlieues ou le paysage rural.
Il m'a paru nécessaire de proposer des pistes de réflexion tenant compte des nouveaux enjeux du développement durable, dans la continuité du rapport d'information publié en 2004 par M. Yves Dauge. Il est nécessaire d'associer à nos projets des paysagistes et des architectes afin de définir des stratégies collectives et pluridisciplinaires de valorisation du paysage et de l'architecture. Cela implique la revalorisation du métier des professionnels du paysage et peut-être la révision de la réglementation relative à l'utilisation du titre de paysagiste et l'inscription des cursus dans le modèle européen « licence master doctorat ». Il convient également de consulter ces professionnels avant d'élaborer les documents d'urbanisme. Tout cela aurait une incidence financière, mais nous sommes face à un choix de société. Je souhaite donc, en vue de la prochaine discussion budgétaire, que l'on puisse évaluer les besoins de financements liés à la rémunération des paysagistes-conseils et architectes-conseils de l'État qui ne peuvent aujourd'hui intervenir que sporadiquement.
Il est urgent de diffuser une culture du paysage et de l'architecture. La formation continue des professionnels et des élus doit être enrichie dans ce domaine : on pourrait faire appel aux écoles de paysagistes et d'architecture et à leurs ministères de tutelle, à l'école de Chaillot, à l'ordre des architectes et aux conseils d'architecture, d'urbanisme et d'environnement (CAUE).
Mon souhait n'est pas d'imposer de nouvelles contraintes mais de donner aux pouvoirs publics les moyens de définir des projets collectifs redonnant au paysage et à l'architecture la place qu'ils méritent. Il faut des règles vivantes pour définir le cadre de vie. Le grand architecte Frank Lloyd Wright disait : « L'heure est venue pour l'architecture de reconnaître sa propre nature, de comprendre qu'elle dérive de la vie ».
La commission de la culture a donné un avis favorable à l'adoption des crédits. (Applaudissements à droite et au banc des commissions)
Interventions des orateurs des groupes
Mme Évelyne Didier. - Compte tenu du peu de temps qui m'est imparti, je ne ferai que quelques observations. Tout d'abord, je dois souligner la forte augmentation des crédits affectés à la protection de la biodiversité, un enjeu majeur jusqu'ici négligé. La France bénéficie d'une biodiversité exceptionnelle parmi les pays industrialisés du fait de la dispersion de ses territoires d'outre-mer et de la richesse de son territoire métropolitain. A l'heure des premières études sur la valeur économique des systèmes écologiques, cette prise de conscience était nécessaire. La France est en effet au quatrième rang mondial pour les espèces animales menacées et au neuvième rang pour les plantes, selon le Livre rouge de l'Union internationale pour la conservation de la nature. Le défi est de taille. Espérons que l'effort budgétaire sera poursuivi, notamment pour ce qui est de la recherche et de la formation, car l'expertise dans ce domaine est loin d'avoir atteint le niveau requis.
En tant que sénatrice de Meurthe-et-Moselle, je déplore en revanche la baisse tendancielle des dépenses de gestion économique et sociale de l'après-mines. La baisse du nombre d'ayants droit ne saurait justifier la diminution de l'offre, notamment dans le domaine de la santé.
Des dépenses fiscales très importantes sont engagées pour encourager l'équipement des habitations et les économies d'énergie. Mais ces dispositions profitent surtout aux ménages les plus aisés qui ont les moyens de s'engager dans des travaux coûteux. A l'heure de la contribution carbone, il serait bon d'adapter ces mesures en faveur des ménages moins favorisés. Je voudrais vous alerter plus particulièrement sur la situation des locataires, qui n'ont aucune maîtrise de leur consommation d'énergie fossile. Si leur logement est mal isolé, ils n'auront d'autre choix que d'avoir froid s'ils ne veulent pas acquitter une contribution carbone démesurée par rapport à leurs revenus. Lorsque ma collègue députée Martine Billard l'a interrogé à ce sujet à l'Assemblée nationale, M. le ministre du budget a eu cette réponse laconique : « Le dialogue entre le propriétaire et le locataire doit exister ». Une telle méconnaissance des rapports de force entre locataires et propriétaires laisse pantois ; elle est symptomatique de la difficulté, pour certains, de comprendre les réalités sociales.
La commission de l'économie a adopté, dans le cadre de la loi Grenelle II, un amendement du président Emorine qui généralisait les Scot, ces importants outils de planification. En 2009, 12 projets de Scot innovants au plan environnemental ont été financés à raison de 100 000 euros par projet. Mais aucune aide globale n'est prévue pour les autres projets, alors que 230 secteurs ont manifesté en 2009 l'intention d'élaborer un Scot. Il faudrait sans doute mieux répartir les crédits disponibles. Dans un contexte tendu et incertain pour les ressources des collectivités territoriales, il est indispensable que celles-ci reçoivent une aide de l'État pour pouvoir produire des documents de qualité.
En ce qui concerne la gestion des déchets, l'Ademe constate une perte d'autonomie des départements faute de nouvelles unités de traitement. La responsabilité de cette situation incombe d'abord aux industriels, dont les pratiques ont longtemps manqué de transparence. Un effort s'impose pour que chaque département dispose de ses propres centres de traitement et qu'aucun n'accueille des déchets venus de l'autre bout de la France, ce qui est une aberration du point de vue écologique.
J'aurais voulu aborder d'autres sujets, mais M. le Président et le chronomètre étant intraitables, je laisse à Mme Schurch le soin de vous parler des transports. (Sourires et applaudissements à gauche)
M. le président. - Le Président n'est pas intraitable mais il souhaite que notre débat se tienne dans les délais prévus.
M. Roland Ries. - Nous examinons aujourd'hui le volet « Transport urbain » du projet de loi de finances dans un contexte assez favorable, comme l'ont constaté les participants des rencontres nationales du transport public à Nice la semaine dernière. Ce secteur résiste mieux que d'autres à la crise économique. Les importants investissements réalisés par les collectivités territoriales sont un parfait exemple de cette « croissante verte » que nous appelons de nos voeux : ils ont rempli les carnets de commande des industriels, créé des emplois non délocalisables, accru la qualité du service rendu aux usagers et encouragé les particuliers à délaisser leur voiture pour prendre les transports collectifs.
Ce budget accompagnera-t-il le changement des comportements ? Les pouvoirs publics doivent faire preuve de courage et de volontarisme. Les besoins de financement des autorités organisatrices de transports ont été évalués à plus de 43 milliards d'euros à l'horizon 2020 pour les seuls transports en commun en site propre (TCSP), sans parler de la régénération du réseau ferroviaire, des travaux d'accessibilité des véhicules et des infrastructures terrestres ou de l'aménagement des gares. De ce point de vue, le programme 203 « Infrastructures et services de transports » appelle deux remarques. Je me suis réjoui, monsieur le ministre, en vous entendant annoncer pour le printemps prochain un nouvel appel à projets de TCSP doté d'une enveloppe à peu près égale à la précédente, soit environ 800 millions d'euros. Mais si « le financement des appels à projets lancés dans le cadre du Grenelle de l'environnement pour les projets de TCSP des grandes agglomérations » entre dans les missions de l'Aftif, le bleu budgétaire ne fait pas mention de cette somme. A y regarder de près, on se demande comment l'agence pourra remplir ses missions avec des ressources moindres, la totalité du produit de la vente des sociétés d'autoroutes ayant été consommée.
Doit-on considérer que la subvention d'équilibre de 980 millions lui servira à financer les missions de l'Aftif en 2010 ? En clair, monsieur le ministre, avez-vous prévu un financement budgétaire de l'appel à projet que vous avez lancé ?
J'en viens à la question du financement du matériel roulant. Après vingt ans de développement des transports en commun en site propre, nombre de réseaux arrivent à saturation. Pour augmenter l'offre, il faut augmenter les fréquences. Or, pour l'heure, l'État s'est toujours refusé à apporter son aide à l'achat de matériel roulant supplémentaire, se limitant aux infrastructures. Revenir sur cette position serait le signe d'un encouragement à la politique de report modal, promue par le Grenelle et mise en oeuvre par les collectivités territoriales, et du soutien de l'État à une filière fortement créatrice d'emplois, point qui devrait intéresser le ministre de l'industrie qui nous accueillait en temps que maire à Nice.
Mais il y a plus à dire en matière de transports collectifs que simplement déplorer la stagnation budgétaire des crédits dans ce budget. La part des transports dans le budget des agglomérations et intercommunalités, aujourd'hui de 40 %, voire plus, ne saurait augmenter indéfiniment sans compromettre les autres actions des collectivités. En outre, les autorités organisatrices s'inquiètent de la réduction des recettes locales, notamment du versement transport, qui résulte mécaniquement de la crise et de l'augmentation du chômage, et de la suppression de la taxe professionnelle, principale ressource des intercommunalités. Comment les intercommunalités, privées de visibilité budgétaire à moyen et long termes avec cette réforme, pourront-elles décider des investissements lourds ? La suppression de la taxe professionnelle pèsera indirectement sur l'activité économique de notre pays, les collectivités réalisant l'essentiel des investissements publics.
En conclusion, monsieur le ministre, l'incertaine pérennité des ressources des autorités organisatrices de transport risque d'entraver les politiques de mobilité durable que mènent, avec volontarisme, les collectivités. Je crains que les garanties apportées par le Premier ministre à l'occasion du Congrès des maires, essentiellement de court terme, ne rassurent pas les responsables locaux des autorités organisatrices ! (Applaudissements sur les bancs socialistes)
M. François Fortassin. - (M. Jacques Mézard applaudit) Deux mois après l'examen du Grenelle II, quelques jours avant le sommet de Copenhague et quelques jours après nos débats sur la contribution carbone, toute la question est de savoir si ce budget est à la hauteur des enjeux. Depuis deux ans, l'environnement s'est imposé dans les médias, le discours politique, les stratégies d'entreprise, les cours des universités, les conversations en famille et entre amis ; un élan qu'il serait dangereux de briser. Nous souhaiterions un budget de rupture. Or nous ne le trouvons pas ! Il s'agit seulement d'une confirmation des politiques décidées en ce domaine. Plus qu'un processus, le Grenelle de l'environnement est un phénomène de société. Nous avons un devoir d'enthousiasme envers le Grenelle de l'environnement ! Sans naïveté, nous avons le devoir de poursuivre encore et encore cet effort en faveur d'une écologie humaniste. Je vous sais gré, madame la ministre, d'avoir donné à l'écologie cette tonalité humaniste de bon aloi sans laquelle il n'y pas de véritable écologie. Vous avez contribué à sortir l'écologie de sa gangue de tristesse, à déchirer les vieux oripeaux du sectarisme de l'écologie (vives marques d'intérêt) pour la revêtir des habits neufs de l'espérance et de la joie de vivre ! (Exclamations admiratives sur de nombreux bancs ; M. Dominique Bussereau, secrétaire d'État, apprécie également)
M. Daniel Raoul. - C'est notre poète des Pyrénées ! (Sourires)
M. Jean Desessard. - La couleur de l'espérance, c'est le vert !
M. François Fortassin. - Cher ami, nous n'avons pas le même vert quelquefois...
M. le président. - Verre ? (Sourires) Poursuivons...
M. François Fortassin. - Dans le domaine des transports, l'enjeu est de favoriser les transports alternatifs. On peut se féliciter que les crédits atteignent 4 800 millions, mais comment occulter que seule l'augmentation des péages permettra de faire face aux indispensables dépenses ? Peut-être faut-il également se tourner vers le grand emprunt...
M. Jean Desessard. - Oh !
M. François Fortassin. - Pas moins d'un milliard serait alloué aux transports. Cela suffira-t-il ?
Ce débat doit être également l'occasion d'en revenir au bon sens, à l'intelligence du coeur. Permettez-moi de prendre quelques exemples des ruptures qu'il faudrait introduire. Le billet d'avion entre Aurillac et Paris (exclamations stimulantes à gauche) coûte 500 euros, contre 60 pour aller à Londres et 400 pour se rendre aux États-Unis !
M. Pierre Bernard-Reymond. - Très bien !
M. François Fortassin. - Pourquoi ne pas taxer les compagnies low cost au titre de la réduction des gaz à effet de serre ? Soit, cela déplairait peut-être à quelques touristes en mal d'Asie du sud-est mais notre pays y gagnerait ! Comment penser que nous progressons quand le train reliait Aurillac à Paris en 5 heures et demie, contre 6 heures aujourd'hui ! (Rires)
M. Jacques Mézard. - Il est formidable !
M. François Fortassin. - Quand les salades cultivées dans le Roussillon sont envoyées à Rungis pour être vendues à Béziers, Montpellier et Perpignan !
M. Jean Desessard. - La faute à qui !
M. François Fortassin. - En France, la France veut faire figure de bon élève de l'Europe lors du prochain sommet, mais je me demande parfois si elle n'a pas fait beaucoup d'impasses avant de se présenter à l'examen de Copenhague ! (Applaudissements sur les bancs RDSE et sur les bancs socialistes)
présidence de M. Jean-Claude Gaudin,vice-président
M. Louis Nègre. - Avec le Grenelle de l'environnement, le Gouvernement a su, dès 2007, mobiliser la nation et faire de la France une référence incontestable en matière de développement durable. Qu'on en juge : 268 engagements ont été pris, 800 actions ont été définies et déjà plus d'une centaine ont été réalisées ! Ajoutons-y 44 dispositions fiscales dans le collectif pour 2008 et la loi de finances pour 2099, sans compter les nouvelles dispositions pour 2010, l'adoption du Grenelle I à l'unanimité, l'adoption du Grenelle II au Sénat. Ce dernier texte a permis de grandes avancées environnementales : son titre II sur les transports, que j'avais l'honneur de rapporter, prévoit la taxation des plus-values immobilières ou l'expérimentation des péages urbains, mesures fiscales propres à développer les transports collectifs urbains et périurbains.
L'augmentation forte et pérenne des crédits alloués à la biodiversité -+ 25% en 2007, + 30% en 2008, + 10% en 2009 et 2010- s'accompagne de décisions et programmes stratégiques tels que la taxe carbone, le programme en faveur des véhicules décarbonés ou l'engagement national pour le fret ferroviaire qui place la France dans une position exceptionnelle pour fêter l'année de la biodiversité dans le monde en 2010. A cette occasion, madame le ministre, je salue votre volonté de créer un réseau international d'aires marines protégées et de créer de nouveaux parcs marins d'ici 2011. J'ai, d'ailleurs, avec l'aide du président du conseil général des Alpes-Maritimes, contribué modestement à cette action en créant, ces derniers jours, une réserve sous-marine de 9 ha dans ma commune de Cagnes-sur-mer.
Enfin, dernière remarque générale, le plan national pour le développement des véhicules électriques et hybrides rechargeables, lancé récemment par MM. Borloo et Estrosi, bénéficie d'un financement de 100 millions dans ce budget, auquel s'ajoute une participation de l'État via le fonds stratégique d'investissement -125 millions sur 625 millions au total- pour la création d'une filière française de batteries lithium-ion et 900 millions via le grand emprunt pour financer le déploiement des bornes de recharge pour les infrastructures publiques, qui nous faisaient jusqu'alors défaut. Enfin, il faut maintenir le super bonus de 5 000 euros pour tout achat de véhicule décarboné, qui constitue un signal fort de soutien à une filière hautement stratégique pour la France, exposée à une féroce compétition internationale.
L'ensemble de ces orientations politiques répondent aux enjeux majeurs auxquels notre pays doit faire face, à commencer par l'impérieuse nécessité de préserver son environnement et de renforcer sa compétitivité internationale.
Au-delà de cette vision globale, très favorable à la protection de l'environnement, je voudrais évoquer le programme concernant les infrastructures et services de transports. Ce secteur représente 26,5 % des émissions nationales de gaz à effet de serre, pour l'essentiel à cause du mode routier. Le transfert modal ou l'utilisation de véhicules moins polluants est donc un enjeu de première importance.
La stratégie du Gouvernement repose sur plusieurs orientations : développement d'une offre plurimodale basée sur la complémentarité des modes de la chaine de transports ; optimisation des infrastructures existantes ; priorité aux transports autres que routiers. Cette orientation vertueuse ne peut que recueillir notre soutien ; elle confirme que le discours politique se traduit par des actes concrets et des moyens budgétaires significatifs.
Le Gouvernement confirme en 2010 l'augmentation déjà hors norme de 2009. Le programme 203, qui regroupe l'ensemble des moyens dévolus aux infrastructures et services de transports, est doté, hors fonds de concours, de 4,4 milliards en autorisations d'engagement et 4,35 milliards en crédits de paiement, dont 83,6 % sont imputés à l'action 10 « Infrastructures de transports collectifs et ferroviaires ». Les fonds de concours, d'un montant de 1 855 millions en autorisations d'engagement et 1 904 millions en crédits de paiement, complètent les crédits budgétaires ; ils proviennent en grande partie de l'agence de financement des infrastructures de transport de France.
On pourra ainsi concrétiser l'article 13 de la loi Grenelle I qui prévoit de développer les transports collectifs en site propre afin de les porter en quinze ans de 329 à 1 800 kilomètres, hors Ile-de-France. Grâce aux 800 millions portés par l'Afift, le premier appel à projets pour les transports collectifs qui a été bouclé en 2009 générera près de 6 milliards de travaux qui seront engagés pour la réalisation de 365 kilomètres de nouvelles lignes. On va ainsi réaliser en trois ans l'équivalent de ce qui auparavant aurait demandé près d'une génération. RFF recevra les crédits nécessaires pour renouveler 900 kilomètres de voies.
Suite à l'évaluation du réseau ferré national par l'école polytechnique de Lausanne, le Gouvernement a fait passer les crédits de 900 millions en 2005 à 1,7 milliard en 2010. En vertu du contrat de performance signé le 3 novembre 2008 entre l'État et RFF, ces crédits devraient être portés à 2,1 milliards en 2012 afin que soient renouvelés d'ici là 3 900 kilomètres de voies et 1 430 appareils de voies. Ce renouvellement concernera en priorité le réseau principal tandis que les volets ferroviaires des contrats de projet État-région serviront à la rénovation des petites lignes.
Ce programme finance également la réforme des grands ports maritimes. L'action « Infrastructures fluviales portuaires et aéroportuaires » voit ses moyens augmenter de plus de 50 %, ce qui confirme la priorité accordée au report modal. Ce soutien financier accompagnera le développement de la compétitivité de nos ports qui ont représenté, en 2006, 38,5 % en tonnage de l'acheminement de notre commerce extérieur. Nous apprécions aussi le soutien apporté au transport fluvial, dont le bilan énergétique est particulièrement favorable. Même si la part modale est encore faible, le trafic de marchandises conteneurisées a doublé en cinq ans. Selon le calendrier prévu, les travaux canal à grand gabarit Seine-Nord-Europe doivent débuter en 2011 pour une mise en service en 2015.
Tout serait donc pour le mieux dans le meilleur des mondes, si je n'avais quelques interrogations.
Après les critiques de la Cour des comptes, l'Afift risque de souffrir d'un effet de ciseau entre le besoin de financement et les recettes effectives, notamment au vu de l'écotaxe appliquée aux poids lourds qui n'entrera pas en vigueur, au mieux, avant 2012 et de l'absence d'augmentation de la redevance domaniale sur les autoroutes. Le rapport Gressier m'a convaincu qu'une réforme de la mission de l'agence s'imposait.
Le schéma national des infrastructures de transports n'a pas encore été publié.
Le deuxième appel à projet sera-t-il bien lancé en 2010 avec un montant de crédits au moins équivalent au premier appel ?
Il ne faut pas avoir peur de la concurrence dans le domaine ferroviaire car elle est à la base d'une diminution des coûts, et donc d'une moindre dépense des deniers publics avec un meilleur service rendu à l'usager.
Malgré ces interrogations, le budget qui nous est présenté est tout à fait positif et je souhaite qu'il soit approuvé sur tous ces bancs. (Applaudissements à droite)
M. Michel Teston. - Tout particulièrement depuis quelques mois, nous subissons un grand battage médiatique sur les investissements pour développer le transport ferroviaire. Citons le plan de renouvellement des voies mis en place après l'audit de l'école polytechnique de Lausanne ou le contrat de performance, signé par l'État et RFF, pour un montant de 13 milliards en cinq ans. Le Gouvernement a insisté sur le développement du transport ferroviaire dans la loi Grenelle I ainsi que sur la place consacrée au mode ferroviaire dans le plan de relance. Comment ne pas citer encore l'engagement national pour le fret annoncé en septembre 2009 ou le plan d'actions et d'investissements de 7 milliards ?
Au-delà de ces annonces, qu'en est-il réellement de l'engagement en faveur du ferroviaire ? Et en particulier en matière de régénération du réseau ?
Les enveloppes financières supplémentaires votées lors des précédentes lois de finances ne respectaient pas totalement les objectifs du plan, qui se situaient déjà en deçà du scénario préconisé par le rapport Rivier. Si les crédits correspondants ont ainsi progressé pour atteindre 1 464 millions en 2008, il est, depuis 2009, très difficile de les chiffrer avec précision en raison de la réforme de la tarification de l'usage des infrastructures. En effet, les concours de l'État à RFF ne sont plus désormais attachés à l'utilisation qui en est faite mais à l'équilibre économique pour le gestionnaire d'infrastructures de l'utilisation du réseau par les différents types de services ferroviaires.
Si les concours pour les TER progressent, ceux pour les trains classiques nationaux baissent de 76,5 millions, ce qui est en contradiction avec les orientations du Grenelle, qui prévoyait un système de péréquation. Même constat pour l'activité fret. Si le nombre de kilomètres de voies renouvelées a sensiblement augmenté, cela est certes dû à un effort plus important de l'État mais aussi à un effort sans précédent des régions, contraintes pour des raisons de sécurité de financer la régénération des lignes utilisées par leur matériel roulant. Elles l'ont fait dans le cadre des contrats de projet État-régions mais aussi parfois de plans rail spécifiques, pour accélérer la rénovation de petites lignes.
Outre que les concours de l'État à RFF sont en baisse pour le fret, le soutien au transport combiné se situe très en dessous de son niveau budgétaire de la période 1999-2002. Le transport combiné est pourtant présenté comme une priorité dans l'engagement national pour le fret ferroviaire ! La seule véritable concrétisation de cet engagement en faveur du fret émane de la SNCF, qui a décidé de répartir sur cinq ans un milliard d'euros pour développer son activité fret.
Le plan de relance s'est traduit par quelques accélérations de projets ferroviaires engagés mais pas par une réelle augmentation du volume des investissements ferroviaires. La subvention d'équilibre de l'État à l'Afitf est ramenée de 1,2 milliard en 2009 à 980 millions. L'État déduit ainsi de sa subvention les avances consenties en 2009 au titre du plan de relance mais aussi la partie des dépenses de régénération de voies prises en charge par les régions dans le cadre des contrats de projet et des plans rail spécifiques.
Où en est la rédaction du rapport proposant des solutions pour le remboursement de la dette de RFF ? Le projet de loi relatif aux transports ferroviaires adopté il y a quelques semaines prévoit le dépôt de ce document avant la fin 2009...
Comment ne pas regretter le décalage entre les annonces du Gouvernement et le manque d'ambition de ce programme, qui n'est pas à la hauteur du Grenelle ni de l'engagement national pour le fret ferroviaire ? Le groupe socialiste votera contre ces crédits. (Applaudissements à gauche)
Mme Anne-Marie Escoffier. - Cette loi de finances intervient dans une période cruciale pour le développement durable, avec le Grenelle de l'environnement et le prochain sommet de Copenhague. Malgré la volonté de traçabilité affichée par le Gouvernement, certains secteurs restent extrêmement obscurs, comme celui des circuits de financement des transports. Je demeure sceptique lorsque le Gouvernement affirme que les objectifs dudit Grenelle seront atteints en 2011 et ce, en raison même de ce budget qui nous est présenté. Les 10,5 milliards de crédits de paiement seront-ils suffisants pour remplir les objectifs prévus, si vastes et si variés ? Mieux vaut évaluer exactement les mesures qu'on entend mettre en oeuvre avant de les faire voter, sous peine de limiter son action à des effets d'annonce.
Les rapporteurs spéciaux -je rends hommage à leur pertinence- ont émis des réserves sur certains points, parmi lesquels l'insuffisante qualité du service ferroviaire ou le taux de contrôle des transports routiers des matières dangereuses, exemples choisis parmi d'autres, ce qui laisse douter de la « soutenabilité budgétaire » de cette mission, pour reprendre l'expression d'un de nos collègues ; d'où aussi les modifications apportés par notre commission des finances. Certes, les crédits mobilisés pour l'application du Grenelle en matière de biodiversité augmentent de 60 % et offrent l'aspect le plus novateur de ce budget, avec sa volonté d'aménagement équilibré des territoires, sa gestion de la ressource en eau et sa préservation du littoral. Mais d'autres secteurs ne sont pas aussi bien aidés et sur un budget aussi considérable, les crédits liés au Grenelle ne passent que de 30 à 60 millions, ce qui est modeste, en particulier dans le domaine ferroviaire.
Plus inquiétant encore me semble l'illisibilité de ce budget, son aspect obscur et peu fléché, dans lequel on se perd et dont la logique, de ce fait, nous échappe. Que veut-on exactement ? Où va-t-on ? Et pour quoi faire ? Est-ce parce que le nombre de missions est trop grand ? Ou parce qu'on les cerne mal ? Est-ce parce qu'il est difficile de trancher entre ce qui appartient à l'aménagement du territoire et ce qui relève de l'écologie ? Je ne sais. Toujours est-il que, si le Réseau ferré de France semble s'améliorer et les voies navigables offrir une situation satisfaisante, la dégradation du réseau routier n'est pas enrayée, de même que celle des affaires maritimes, de Météo France, de l'IGN ou du contrôle aérien, exemples parmi d'autres choisis dans les domaines d'un grand ministère qui paraît parfois dépassé par la taille et le nombre de ses missions. Une bonne politique écologique, comme une bonne politique budgétaire, ne consiste pas à déshabiller Jean pour habiller Pierre. Certains objectifs, de ce fait, semblent d'ores et déjà impossibles à être atteints, comme ceux relatifs au contrôle et à la sanction automatisés des infractions au code de la route ou l'autofinancement pour l'acquisition des véhicules propres. Tout cela manque de cohérence et je le regrette puisque, si nous sommes attachés à une véritable politique écologique, nous sommes aussi soucieux d'une bonne politique d'aménagement du territoire, conforme à la tradition républicaine. Il y a un équilibre à trouver entre l'économie et l'écologie. Cet équilibre, je ne l'ai pas trouvé dans ce budget et, après tant d'heures passées à étudier, ici, le Grenelle I et le Grenelle II, je n'en ai retrouvé ni le souffle, ni l'audace, ni l'ambition.
Avec mon groupe, j'aurais voulu apporter mon soutien à ce budget mais, vu nos réticences, nous nous abstiendrons. (Applaudissements à gauche)
Mme Mireille Schurch. - Du fait des engagements pris lors du Grenelle de l'environnement et des annonces dans les médias sur les milliards octroyés au réseau ferroviaire, au plan de relance et au plan fret d'avenir, nous nous attendions à une mission « Transport » aux crédits renforcés. Quelle déception ! Ces crédits sont en baisse de 3 % alors même qu'ils recourent plus que jamais aux ressources extrabudgétaires telles que les taxes, les redevances, et les péages. La subvention budgétaire à l'Afitf diminue et nous nous inquiétons pour la pérennité des financements de cette agence. Nous continuons de déplorer le choix fait par votre majorité de céder aux investisseurs privés les très rentables concessions d'autoroutes dont les recettes devaient financer initialement cette agence et donc, la régénération du réseau. D'autre part, la taxe poids lourd, qui ne rentrera en vigueur qu'en 2012 mais qu'on présente comme la solution miracle pour le financement de cette agence, ne garantira pas un niveau de recette suffisante.
Nous déplorons également votre volonté inébranlable d'affaiblir les opérateurs publics, que ce soit la SNCF ou RFF. Cette année encore, la subvention à RFF est en baisse alors même que l'audit de l'École de Lausanne préconisait un engagement de la puissance publique sans précédant. C'est donc plus de la moitié de notre réseau qui sera obsolète d'ici peu. Vous continuez donc de contraindre RFF à augmenter les péages ferroviaires ainsi que le niveau de la convention de gestion que la lie à la SNCF. Par là même, vous contraignez cette dernière à reporter sur les usagers ces hausses de tarifs. Ce sont donc bien toujours les mêmes qui payent les conséquences du désengagement de l'État.
RFF est également censée se financer grâce à la cession de son patrimoine : une nouvelle fois, on cède un patrimoine public d'une richesse inestimable. La loi relative à l'organisation et à la régulation des transports ferroviaires prévoit la remise d'un rapport fin 2009 sur les perspectives de désendettement de RFF. Sa dette a encore augmenté cette année, et se monte à 28 milliards... Nous serons attentifs à ce rapport...
Sur le fond, vous affaiblissez les opérateurs publics afin de faire de la place pour les nouveaux entrants sur les tronçons rentables, abandonnant toute ambition d'aménagement du territoire. Les conséquences du plan fret sur les territoires sont donc désastreuses. Une telle option est contradictoire avec un développement durable et la réduction des émissions de gaz à effet de serre.
Même chose pour la faiblesse de votre engagement pour le fret. Suite à un long déclin, la part modale du transport ferroviaire atteint péniblement 10,7 % en 2009. Votre objectif pour 2010, 10,9 %, est bien peu ambitieux ! Au rythme de 0,2 % par an, il nous faudra soixante dix ans pour atteindre l'objectif fixé par le Grenelle.
Le secteur routier est une nouvelle fois privilégié, notamment grâce aux 330 millions d'exonérations fiscales, contre 30 millions pour le transport combiné. Est-ce cela votre rééquilibrage modal ?
Pour toutes ces raisons, le groupe CRC-SPG ne votera pas ces crédits grâce auxquels, comme le fait la droite au pouvoir depuis 2002, on privatise les profits et on socialise les pertes. Le développement durable est incompatible avec une vision qui fait de la rentabilité économique le seul critère d'intervention et de la mise en concurrence le seul mode d'organisation possible des services publics. Il faut au contraire renforcer la maîtrise publique dans le secteur des transports, par une action déterminée et des investissements massifs en faveur du rail, levier stratégique pour le respect de l'environnement. (Applaudissements à gauche)
M. Paul Raoult. - Ce budget est marqué par la volonté de soutenir les objectifs du Grenelle en faveur de la biodiversité. Dans le contexte de crise actuel, j'y suis sensible, d'autant qu'il y va de la vie même de l'homme sur notre planète. Personnellement, j'apprécie les efforts faits pour les parcs nationaux et régionaux, pour les aires des espèces protégées ainsi que les dispositions financières au profit de la trame bleue et de la trame verte.
Je m'inquiète cependant sur l'insuffisance des moyens humains. L'étape préalable des inventaires scientifiques nécessitera un énorme travail parce qu'il y a beaucoup de retard à rattraper et que la qualité environnementale des PLU et des SCOT dépend de cette mise à jour de nos connaissances scientifiques.
Notre objectif va aussi à assurer les continuités écologiques. L'État doit être au rendez-vous, aux côtés des collectivités. La mise en place des bandes enherbées le long des rivières et bassins progresse lentement. Quelles plantes doivent être autorisées ? Quelle compensation pour les agriculteurs quand il n'y a pas de DPU ? Même chose pour les petits barrages de moins de 5 mètres.
Des logiques transversales doivent se mettre en place entre ministères et, à l'intérieur de votre ministère, entre les services. Car ce ne sont pas deux trames distinctes qu'il s'agit de tisser, mais bien une seule : la trame verte et bleue. Cela suppose que les directions régionales et les agences de l'eau travaillent main dans la main, dans un dialogue permanent avec les régions, les départements et les intercommunalités. Seule une véritable révolution culturelle produira des résultats.
Autre préoccupation, la gestion de l'eau. L'assiette des nouvelles redevances acquittées par les usagers domestiques se réduit chaque année -puisque la consommation baisse de 1 à 1,5 %- avec des répercussions sur les recettes des agences et des distributeurs qui les conduisent à augmenter les taux pour compenser. Il faut sortir de ce cercle vicieux : il reste des investissements très importants à réaliser en matière d'eau potable et de traitement des eaux usées. La presse nationale s'est fait l'écho des problèmes de fuites sur les réseaux : certes, la situation est sérieuse mais les chiffres sont parfois biaisés du fait que l'on y inclut ce qui sert à éteindre les incendies ! Reste qu'il faut se soucier de l'eutrophisation de nombreux plans d'eau.
Il y a aussi urgence pour les 500 captages les plus menacés : délimitation précise des zones de protection, diagnostic sur les pressions agricoles, définition de programmes d'action (Maet, agriculture biologique), bien des efforts restent à faire. La lutte contre les pollutions diffuses est en panne. Le plan de développement rural hexagonal et le plan végétal souffrent de difficultés de mise en oeuvre : il serait bon, monsieur le ministre, que les mesures agro-environnementales territorialisées, qui restent souvent très limitées, gagnent en dynamisme.
Je vous sais très attachée, madame la ministre, à la protection des zones humides, mais les résistances sont rudes. La défense de ces zones conditionne pourtant le ravitaillement en eau potable de bien des territoires entiers.
Nombreux sont les élus qui veulent aller plus vite sur l'assainissement non collectif. Les décrets de septembre 2009 constituent une avancée dont il faut se féliciter : c'est un enjeu majeur dans les zones d'habitat dispersé.
L'enjeu écologique est désormais fondamental dans nos sociétés. Les choses, je le reconnais, avancent mais au-delà de la réglementation et des moyens, seul l'assentiment changera les comportements individuels. Il ne saurait se fortifier que dans une société plus juste et je crains que les mesures fiscales prises depuis deux ans n'y contribuent pas.
Pour parvenir à une gestion plus économe de nos ressources naturelles, il faut avoir le courage politique de bousculer les situations acquises. Sauf à s'en tenir à des incantations, il faut un système de contrôle et de sanction, qui sera, au-delà de l'objectif de réduction des gaz à effet de serre, l'enjeu majeur du sommet de Copenhague. Il subsiste beaucoup d'interrogations sur votre budget. Si nous avons un regard positif, nous demeurons critiques tant sont grandes les incertitudes sur les résultats de la nouvelle politique environnementale.
M. Jean Desessard. - La situation, gravissime, du fret ferroviaire, justifie que je centre sur lui mon intervention.
Depuis plusieurs semaines, nous assistons à un grand plan de communication de la direction de la SNCF sur le thème « Et si les marchandises prenaient le train ? » M. Borloo a présenté il y a quelques semaines le plan « Fret d'avenir », qui nous promet une nouvelle politique environnementale des transports, favorisant le report modal sur le rail. Le texte que nous examinons prévoit une augmentation de 25 % de la part modale du fret non routier d'ici à 2012.
Qu'en est-il réellement, au-delà de ces déclarations d'intention ? La réalité, c'est bien que la SNCF a fait le choix de l'abandon du wagon isolé. Elle veut des trains complets du départ à l'arrivée
M. Louis Nègre. - Et c'est très bien.
M. Jean Desessard. - Très bien ? Cela signifie concrètement qu'elle ne veut plus aller chercher deux ou trois wagons dans une zone industrielle, les regrouper avec d'autres wagons pour faire un train complet qu'elle acheminera à destination. Comment cela se traduira-t-il ? Par le report sur la route de un à deux millions de camions par an ; par la suppression de 5 000 emplois de cheminots ; par la détérioration des conditions de travail donc de la sécurité ferroviaire. C'est donc cela le fret d'avenir ?
Cela signifie aussi la disparition d'un outil industriel, sans possibilité de revenir en arrière : on aura fermé trop de gares de triages, abandonné trop de lignes secondaires -qui n'est pas désolé au spectacle de ces rails gagnés par la rouille ?-, gâché sans retour les compétences des cheminots. Pour favoriser l'ouverture à la concurrence, on a déjà sectorisé les métiers : certains ne conduisent plus que des TER, d'autres que des trains de grandes lignes. C'est comme cela que l'on détruit la polyvalence et les savoir-faire. C'est comme cela que des lignes de fret ont été supprimées faute de personnel alors que certains conducteurs de TER étaient dans le même temps sous-employés. C'est comme cela que l'on détruit le maillage du territoire, irrémédiablement, car que fera Réseau ferré de France de ses gares de triage abandonnées ? Elle vendra le foncier...
Que fera-t-on, dans quinze ou vingt ans, quand les carburants seront devenus trop coûteux ? Le tout routier a ses limites. Gouverner, monsieur le ministre, c'est prévoir. (Mme Évelyne Didier approuve) Gardons-nous de transformer en déserts les territoires jugés peu rentables.
Les Verts ont une alternative à proposer : la baisse des tarifs des péages ferroviaires pour le fret, qui lui fera gagner en compétitivité sur la route. Pour compenser la perte de revenus, l'État devra abonder le budget de RFF de 150 millions par an. Nous aurions aimé les voir, dès cette année, apparaître dans le budget.
Alors que le sommet de Copenhague doit s'ouvrir dans quelques jours, on ne peut pas laisser tomber le rail : l'intérêt général et environnemental doit nous guider. Le transport ferroviaire est un bien public indispensable à une politique des transports sobre en carbone. Il aurait mérité un coup de pouce : ce budget le lui refuse, nous ne pourrons pas le voter. (Applaudissements à gauche)
M. Dominique Bussereau, secrétaire d'État chargé des transports. - Le budget 2010 est marqué par l'accélération sans précédent des investissements : jamais on n'aura construit en France autant de grandes infrastructures alternatives à la route : 2009 avait déjà été une année importante ; nous avions signé avec Jean-Louis Borloo le protocole d'intentions pour le canal Seine-Nord-Europe et lancé la deuxième phase de la LGV est : je remercie d'ailleurs les collectivités qui ont signé avec nous la convention de financement. Nous avons également lancé le dernier tour de l'appel d'offres pour Bretagne-Pays de Loire, Le Mans-Rennes, avec une petite antenne vers Angers, et Tours-Bordeaux : il s'agit d'un grand chantier de près de 7,5 milliards et qui créera 40 000 emplois.
MM. Ries et Nègre ont évoqué les transports en commun en site propre (TCSP). Nous étions ensemble à Nice la semaine dernière avec M. Estrosi : 365 kms sont prévus au terme du premier appel à projet lancé en 2009, soit plus en trois ans que ce qui avait été fait par les collectivités en trente ans ! Nous lancerons, dès 2010, un deuxième appel à projet.
L'année prochaine, les grands travaux débuteront. Ainsi, les premiers coups de pioche, si j'ose dire, seront donnés pour la deuxième phase de la LGV est. De plus, des travaux préparatoires seront conduits pour les autres grands projets qui débuteront en 2011. Le Rhin-Rhône poursuit sa construction entre Mulhouse et Besançon.
MM. Grignon, Lambert, Ries et Nègre ont évoqué le budget de l'Afitf qui s'établira à 2,7 milliards en 2010, dont 331 millions au titre du plan de relance. Nous aurons ainsi les moyens de notre politique. A la suite du rapport Gressier, nous allons renforcer les moyens de l'Afitf en attendant que la redevance poids lourds et que les autres recettes complémentaires prennent le relais.
Nous faisons d'importants efforts pour réorienter le fret vers les transports durables. La réforme portuaire se poursuit, avec 34 millions d'investissements nouveaux.
MM. Lambert et Desessard ont évoqué l'engagement national pour le fret ferroviaire, qui prévoit une montée en puissance du transport combiné, l'augmentation des cadences des autoroutes ferroviaires et la création d'opérateurs de proximité.
Nous allons également supprimer les goulets d'étranglement du réseau, notamment Nîmes-Montpellier et l'agglomération lyonnaise. Ce plan aura un impact majeur. J'aurai auprès de moi un comité de suivi : nous ne voulons pas faire une énième réforme du fret mais disposer d'un tableau de bord trimestriel pour voir comment les choses se déroulent. Nous y consacrerons, durant toute cette période, 7 milliards pour les infrastructures et pour le transport combiné.
L'équilibre financier des lignes d'aménagement du territoire a été évoqué. Il est tout à fait exact que les liaisons Corail connaissent des difficultés : il faudra trouver une compensation spécifique.
Chacun a entendu parler du rapport de la Cour des comptes sur les TER : il est sévère mais pas forcément injuste. J'ai confié à M. Grignon la direction d'une « commission des parties prenantes » chargée de réfléchir d'ici le printemps aux conditions dans lesquelles les régions pourraient, après appel d'offres, confier les TER à d'autres opérateurs que la SNCF. Je dis souvent aux présidents de région qu'il vaut mieux, à certaines heures, un autocar plein qu'un TER aux trois quarts vide qui consomme des sillons fret.
M. Jean Desessard. - Ce n'est pas sûr !
M. Dominique Bussereau, secrétaire d'État. - En ce qui concerne le transport routier de marchandises, il est vrai que la fiscalité augmente, mais c'est la traduction de notre politique de report modal.
M. Jean-Paul Emorine. - Très bien !
M. Dominique Bussereau, secrétaire d'État. - En outre, nous nous sommes engagés à alléger cette fiscalité en prévoyant un abattement de 36 % de la taxe carbone en 2010, un allégement des charges de personnels dans le cadre de l'harmonisation européenne des conditions de travail et la suppression de la taxe professionnelle qui bénéficiera également au secteur. Les syndicats de salariés des transports routiers et les organisations professionnelles doivent se rencontrer pour ne pas engager une grève qui, en plein milieu des fêtes, grèverait notre économie et le bien-être de nos concitoyens.
Nous poursuivons nos efforts pour la sécurité en mer, dans les airs et sur rail. En ce qui concerne la sécurité routière, nous installerons 530 nouveaux radars sur les routes, en visant particulièrement les feux rouges et les passages à niveau.
MM. Miquel et Grigon ont évoqué les résultats exceptionnels en matière de réduction de la mortalité. Hélas, nous redoutons pour 2009 de mauvais chiffres par rapport à 2008. Les problèmes restent les mêmes : vitesse, alcool et surmortalité des deux-roues motorisés. J'ai proposé au Premier ministre de réunir le comité interministériel de la sécurité routière (CISR) afin de prévoir de nouvelles sanctions pour les grands délinquants et de mieux communiquer sur les limitations de vitesse. Quant aux deux-roues, nous avons engagé une concertation depuis plusieurs mois et nous allons proposer des mesures très importantes pour améliorer leur sécurité.
S'agissant du projet Faeton, la mise en place s'effectuera selon un calendrier conforme à celui de la directive européenne, monsieur Miquel. Malgré des investissements très importants, nous maîtrisons le budget transports puisque même si la dotation du programme « Infrastructures et services de transports » baisse de 3 %, cette diminution est compensée par les recettes de RFF et de l'Afitf, ce qui permet de réduire les subventions à ces deux organismes, sans toucher à notre marge de manoeuvre.
S'agissant du budget annexe de l'aviation civile, la baisse des trafics, liée à la crise économique, a eu des conséquences sensibles sur les recettes. Un plan d'économies a été engagé et il sera poursuivi en 2010. Les tarifs des taxes et des redevances doivent augmenter de façon raisonnable pour conjuguer équilibre budgétaire et soutien à un secteur en difficulté. M. Le Grand a eu raison de rappeler que le secteur aérien n'a pas bénéficié du plan de relance mais d'avances au budget annexe afin de poursuivre les investissements stratégiques sans conduire à une hausse excessive des taxes et redevances.
En ce qui concerne la quote-part de la taxe de l'aviation civile au budget annexe, les conditions d'équilibre du budget général ne permettront pas de la faire évoluer mais nous en reparlerons dans les prochaines années. Nous travaillons à la création d'une entité unique de contrôleurs aériens européens. La France n'est pas opposée, dans le cadre du ciel unique européen, à prévoir des alliances poussées avec ses partenaires européens, pouvant aller jusqu'à l'intégration de certains services et la création d'entités internationales. Mais nous devrons négocier avec nos partenaires européens et avec les personnels qui sont inquiets.
Nous venons de remettre au Parlement un rapport sur les évolutions statutaires de la DGAC afin de tenir compte du ciel unique européen et des projets Fabec, Sesar. La création d'un établissement public administratif (EPA) fait l'objet de discussions avec les personnels, monsieur Collin.
S'agissant des lignes aériennes d'aménagement du territoire, monsieur Fortassin, la taxation du transport aérien n'est pas le meilleur moyen de faire baisser son coût. L'État finance en revanche à plus de 50 % de nombreuses lignes d'aménagement du territoire.
S'agissant de l'IGN, nous préparons un nouveau contrat d'objectifs.
Enfin, le nouveau régulateur du secteur ferroviaire, dont vous avez voté la création, sera financé par le secteur via un droit spécifique.
Nous poursuivons nos investissements, nous maîtrisons les dépenses courantes et les effectifs de notre ministère et nous redéployons nos agents vers des missions liées à la mise en oeuvre du Grenelle.
Notre budget traduit bien les ambitions élevées que le Gouvernement s'est fixé en matière de développement des infrastructures de transport. En 2010, quatre grands projets de LGV devraient être menés de front : c'est un moment unique dans notre histoire des transports et il symbolise bien les orientations du Grenelle en faveur du développement durable. (Applaudissements à droite)
Mme Fabienne Keller, rapporteur spécial. - Bravo !
Mme Chantal Jouanno, secrétaire d'État chargée de l'écologie. - Nous sommes tous comptables des engagements du Grenelle. Il nous faut donc réunir les conditions d'une future croissance verte : 2009 a été l'année du lancement de différents programmes.
Grâce à l'éco-prêt à taux zéro, nous sommes déjà à plus de 50 000 chantiers de rénovation alors que, d'habitude, nous en comptons à peine 40 000.
Le fonds de soutien à la chaleur d'origine renouvelable a été mis en place l'année dernière et il a été doté d'un milliard : or, nous avons dépassé nos objectifs de plus de 50 %.
En six mois, nous avons plus que doublé le nombre d'installations solaires. M. Courteau a eu raison d'évoquer les difficultés du troisième régime ICPE. Ce sont les recours qui ralentissent le déploiement des éoliennes. Nous devons donc sécuriser les conditions juridiques en ce domaine.
Nous avons également mis en place un plan pour la rénovation des friches industrielles, plan extrêmement rentable tant sur au niveau écologique qu'économique. Mme Keller m'a interrogé sur le fonds Barnier. Les moyens sont désormais suffisants par rapport à la demande. A l'avenir, la programmation du fonds s'adaptera aux besoins.
En 2010, notre action va encore s'accélérer grâce au Grenelle. Le rapport Stiglitz a été remis le 14 septembre : il démontre que nous devons compléter l'indicateur du PIB afin de prendre en considération l'état de notre patrimoine naturel et humain. Le Président de la République a saisi l'Insee de cette question.
Nous devrons également modifier nos comportements : Mme Keller a rappelé que le bonus-malus avait largement dépassé nos espoirs. Le rythme de baisse des émissions des véhicules neufs vendus est bien supérieur à ce que nous attendions. C'est pourquoi nous confirmons la baisse prévue en 2010 de 5 grammes et nous anticipons la future diminution de 5 grammes prévue en 2012 pour l'appliquer dès 2011.
Dès le 1er janvier, la contribution carbone entrera en application. Ce sera une véritable révolution et, comme l'a dit Mme Keller, il faut éviter les exonérations. Mme Didier a évoqué la question des plus démunis : le mécanisme de redistribution permet de garantir à la majorité de nos concitoyens une redistribution supérieure au coût de la taxe carbone. Le Président de la République souhaite également mettre en place une avance sur le crédit d'impôt pour les ménages les plus défavorisés. M. Borloo a demandé à Mme Létard de prévoir un plan contre la précarité énergétique pour répondre à vos préoccupations.
L'année 2010 verra le verdissement de notre fiscalité, notamment dans le domaine de la construction dont vous allez bientôt débattre.
Différents plans seront mis en oeuvre dès l'année prochaine : le fonds chaleur verra sa dotation multipliée par deux. Une centrale solaire par région sera sélectionnée afin de multiplier par trois notre production en énergie solaire.
On compte aujourd'hui 50 000 éco-prêts à taux zéro, l'objectif pour 2010 est de 200 000 et le rythme de croisière de 400 000. Le crédit d'impôt « développement durable », madame Keller, devrait coûter 2 milliards d'euros l'année prochaine.
Les crédits alloués à la prévention des risques augmenteront de 35 %, afin notamment d'accélérer la mise en oeuvre des plans de prévention des risques technologiques ; la moitié d'entre eux ont été prescrits, notre objectif est de 95 % de plans prescrits et 40 % de plans approuvés. Les fonds gérés par l'Ademe augmentent en moyenne de 20 %. Le nombre d'inspecteurs des installations classées, madame Keller, augmentera de 300 unités entre 2008 et 2012 ; les difficultés de recrutement sont en passe d'être résorbées. L'objectif de 1 700 inspecteurs en 2015 est confirmé.
L'enveloppe allouée à la protection de la biodiversité augmente de 12 %, après une hausse de 8 % en 2009. L'année 2010, comme l'a relevé M. Nègre, sera celle de la biodiversité ; je compte sur vous pour mener dans ce cadre des opérations sur tout le territoire. La mise en oeuvre du programme du Grenelle de l'environnement sera amplifiée, je pense aux trames chères à M. Raoult ; l'idée d'une agence dédiée n'a pas été abandonnée. Je pense aussi aux aires protégées et aux trois parcs, dont un en zone humide et à la contractualisation Natura 2000.
Il est exact, monsieur Emorine, qu'une aide a été apportée à l'élaboration d'une quinzaine de Scot ; je suis prête à doubler l'enveloppe si nécessaire, notamment en direction des territoires ruraux. Je sais l'engagement de M. Ambroise Dupont pour la préservation de nos entrées de ville ; nous devrons revivifier les métiers du paysage. L'année 2010 sera aussi celle du Grenelle de la mer ; nous tiendrons nos engagements et je suis prête, monsieur Nègre, à défendre votre parc.
Enfin, le fonds démonstrateur de l'Ademe, qui a déjà sélectionné 13 projets, voit ses crédits progresser fortement. Il financera de nouveaux projets de recherche et d'innovation dans les domaines des véhicules électriques, de l'énergie solaire ou de la mobilité urbaine.
Je vous remercie encore de votre engagement à tous. (Applaudissements au centre et à droite)
Questions et réponses
M. Daniel Soulage. - A l'initiative du groupe de l'Union centriste, le Sénat a créé une mission commune d'information sur le traitement des déchets, présidée par M. Braye et que j'ai l'honneur de rapporter. Elle doit examiner l'efficacité des différents modes de traitement et la pertinence des aides de l'Ademe.
Le rapport que le Gouvernement devait remettre le 10 octobre au Parlement sur la TGAP n'a pas été transmis ; il semble cependant qu'il soit finalisé. Pouvez-vous nous en donner les principales conclusions, qui éclaireraient utilement le travail de notre mission ? Pouvez-vous également m'indiquer quels modes de traitement l'Ademe compte subventionner, et sur quels critères ? L'attribution des subventions doit être l'occasion d'informer sur les conséquences des différentes méthodes afin d'éviter des catastrophes financières dont les contribuables feraient les frais. Le choix n'est-il pas conditionné par le milieu, rural ou urbain ?
Je vous remercie de vos réponses et du concours que vous voudrez bien apporter aux travaux de notre mission.
Mme Chantal Jouanno, secrétaire d'État. - Nous avons décidé de rendre plus chers l'incinération et le stockage. Le rapport est finalisé et est en cours de validation interministérielle ; il vous sera transmis dans les meilleurs délais. Le produit de la TGAP sur le stockage est évalué entre 40 et 45 millions d'euros ; celui de la nouvelle TGAP, qui abondera le fonds de l'Ademe, est de l'ordre de 570 millions sur trois ans. J'ai pris l'engagement que la hausse de la TGAP serait redistribuée via ce fonds aux collectivités, pas un euro ne sera perdu. Le rapport conclut que la modulation actuelle, qui favorise la valorisation du biogaz, est justifiée.
M. Daniel Soulage. - Je vous remercie. J'aurais aimé avoir une réponse sur le deuxième point que j'ai abordé...
M. Martial Bourquin. - Près de 10 % de la population active vit de l'industrie automobile, une industrie en pleine mutation. En octobre, M. Borloo a annoncé un plan « véhicules propres» en quatorze points. Le Gouvernement fait le pari de la production et de l'achat de 2 millions de véhicules électriques ou hybrides d'ici 2012 ; il a mis en place des dispositifs de prime à la casse et de bonus-malus.
Mais les habitudes de consommation ne se décrètent pas ; je crains un décalage entre les intentions et la réalité. Réalité sociale d'abord : super bonus ou pas, nombre de nos concitoyens devront conserver leur voiture, même polluante, faute de pouvoir d'achat et d'accès au crédit. Réalité du marché ensuite : super bonus et prime à la casse disparaîtront en 2012, tandis que le lancement de la première voiture électrique est prévu fin 2010 et celui du véhicule hybride rechargeable en 2012... Réalité économique enfin : le secteur de la construction et les communes seront sollicités pour l'installation des prises de recharge, et cela risque de leur coûter cher. Le Gouvernement a annoncé une concertation d'ici la fin de l'année : où en est-on ? La standardisation des prises -on sait ce qu'il en est pour les téléphones mobiles- est-elle prévue dès leur conception ?
La filière automobile connaît une mutation indispensable. Les grands constructeurs feront face mais beaucoup de PME risquent de se trouver en grande difficulté. Il faut les accompagner et les aider à innover ; on risque, sinon, des drames économiques et sociaux. Or ce qui est aujourd'hui prévu est insuffisant. Comptez-vous faire plus ? Nous devons faire de la voiture décarbonée une excellence française et européenne.
Mme Chantal Jouanno, secrétaire d'État. - L'objectif du plan, c'est 2 millions de véhicules propres en 2020 et 4 millions en 2025. Nous entendons jouer de tous les leviers, notamment la recherche avec le fonds démonstrateur qui a alloué 57 millions d'euros l'an dernier et lancera un nouvel appel à projets en 2010. Le fonds stratégique d'investissement a été mobilisé au secours de la filière, 350 000 batteries seront produites à Flins. La demande sera stimulée grâce aux bonus et surtout au super bonus de 5 000 euros pour les premiers véhicules électriques ; nous avons mobilisé un certain nombre d'opérateurs, qui achèteront 50 000 de ces véhicules pour faire baisser les prix. Le Gouvernement est contraint par la programmation triennale et ne peut s'engager au-delà de 2012. Les infrastructures de recharge ont manqué dans les plans des années 1980.
Nous avons signé un accord avec l'Allemagne sur la standardisation des prises et nous oeuvrerons ensemble pour une standardisation européenne.
Les immeubles neufs devront être systématiquement pourvus de prises. Il en sera également installé au fur et à mesure sur la voie publique, mais l'essentiel reste de pouvoir recharger sa voiture à son domicile ou sur son lieu de travail.
Les premières mesures d'accompagnement des communes seront présentées dès 2010, et les assises nationales se tiendront mi-2010.
Nous étudions avec Électricité réseau distribution France (ERDF) la création d'une filiale dédiée aux infrastructures de recharge. Enfin, d'éventuels arbitrages pourront être rendus dans le cadre du grand emprunt.
M. Martial Bourquin. - Attention à ne pas passer du tout pétrole au tout électrique. (Mme la secrétaire d'État approuve) Il faut préserver le spectre des possibilités. Le lobby électrique est très actif...
Il y a aujourd'hui une inégalité au sein de la filière entre, d'une part, les grands constructeurs, et de l'autre, les PME artisanales, familiales, qui peinent à intégrer l'innovation et être présentes au grand rendez-vous de la voiture décarbonée. La filière doit être préservée : l'excellence est gage de notre avenir.
M. François Fortassin. - Les pompes à chaleur de nouvelle génération ont un rendement énergétique attractif qui explique leur succès, d'autant que leur installation ne nécessite ni autorisation ni déclaration. Toutefois, leur mise en route provoque un pic d'intensité de 15 à 20 secondes, avec un appel de puissance énergétique quinze à vingt fois supérieur à la normale. Résultat, des quartiers entiers sont plongés dans le noir, sans chauffage ! Maires et présidents de syndicats départementaux d'électricité sont en première ligne. Comment comptez-vous régler ce problème ?
Par ailleurs, ne pourrait-on équiper les bâtiments agricoles, souvent vastes et peu esthétiques, de panneaux photovoltaïques ?
Mme Chantal Jouanno, secrétaire d'État. - Le Grenelle prévoit d'équiper deux millions de foyers en pompes à chaleur de nouvelle génération d'ici 2020. J'ai saisi ERDF de la question du pic de consommation. Un boîtier intelligent suffirait-il à régler le problème ? Ces pompes à chaleur se développeront avec les normes de construction basse consommation.
Nous avons en effet un plan énergétique pour utiliser les toits des bâtiments agricoles.
M. François Fortassin. - Vos réponses me satisfont. Mais comprenez l'incompréhension de nos concitoyens qui se retrouvent dans le noir quand les pompes sont mises en route vers 19 ou 20 heures, alors que vers 15 heures, tout se passe bien...
M. Gérard Bailly. - La « croissance verte » n'est pas sans causer quelques soucis à certains... L'étiquetage obligatoire du coût carbone des produits et de leur emballage à compter du 1er janvier 2011 est de nature à orienter le choix des consommateurs, mais les PME auront-elles les moyens humains et financiers pour l'appliquer ? Un petit producteur de fromages ou de fruits pourra-t-il faire face, sans coût supplémentaire, à ces contraintes ? La compétition économique ne sera-t-elle pas faussée, sachant que tous les pays n'imposent pas les mêmes exigences à leurs producteurs, loin s'en faut ? Les fruits espagnols, l'agneau néo-zélandais sur nos étals afficheront-ils un prix carbone ?
Par ailleurs, dans des collectivités qui font depuis longtemps des efforts importants en matière de tri, l'augmentation de la TGAP risque de décourager nos concitoyens qui voient augmenter sans cesse le prix de leur poubelle, alors qu'ils trient de plus en plus !
Mme Chantal Jouanno, secrétaire d'État. - Vous avez adopté, dans la loi Grenelle II, un amendement précisant que l'étiquetage carbone devait tenir compte des spécificités des très petites entreprises. Nous installons, dans le cadre d'une plate-forme Ademe-Afnor, des outils « clés en main », notamment une base de données carbone accessible à tous. Les expériences sont concluantes. Les produits importés seront bien entendu soumis aux mêmes exigences. Nous ne sommes pas seuls à nous lancer dans le prix écologique : le Royaume-Uni, l'Allemagne et la Hongrie en font autant. Nous travaillons au niveau européen à une normalisation du prix écologique.
Sur la TGAP, le fonds Ademe favorisera les collectivités locales qui se sont dotées d'objectifs volontaires car la redistribution sera fonction du niveau de réduction des déchets et de recyclage.
M. Gérard Bailly. - Je reste dubitatif : quid des produits venant de Chine ou d'ailleurs ? N'allons pas encore fâcher les producteurs français !
Vous n'avez répondu que partiellement à ma deuxième question : le prix de la poubelle s'envole, et je crains que nos concitoyens ne se découragent.
Mme Évelyne Didier. - Les politiques de gestion des déchets ne s'attachent pas assez à réduire le problème à la source, par l'éco-conception. La récente campagne de communication de l'Ademe préconise de réduire les emballages en préférant les produits grand format aux portions individualisées. Or l'offre en la matière est très limitée, voire inexistante, alors que les portions individualisées, entourées de moult emballages, foisonnent dans les rayons. Elles offrent une marge bien supérieure, d'autant que les suremballages incitent le client à acheter trois tablettes de chocolat plutôt qu'une...
On ne peut se contenter de ces injonctions culpabilisantes, alors qu'aucune alternative sérieuse n'est proposée, car la grande distribution n'a pas intérêt à réduire les emballages ! Quelles mesures, fiscales ou autres, envisagez-vous pour développer l'éco-conception et limiter les emballages ?
Mme Chantal Jouanno, secrétaire d'État. - Le prix carbone des produits tient compte de l'emballage, très discriminant, et favorise les produits français.
Nous sommes en train de revoir la convention signée avec la Fédération du commerce et de la distribution pour inciter au développement des emballages familiaux. Les produits les moins suremballés seraient moins attractifs ; il faut donc un accord entre l'ensemble des producteurs pour que cela fonctionne.
La réflexion sur un dispositif de type bonus-malus est en cours, mais il ne faudrait pas se retrouver avec un bonus pour un public aisé et un malus pour un public plus défavorisé !
Mme Évelyne Didier. - Merci des ces précisions intéressantes. Le « prix carbone » sera-t-il suffisamment incitatif pour modifier la conception même des produits ? C'est tout l'enjeu du travail qui nous reste à accomplir.
M. Marcel Deneux. - Compte tenu des objectifs du Grenelle de l'environnement et l'engagement de la France à réduire ses émissions de gaz à effet de serre, il faut prêter une attention toute particulière au secteur automobile. Les fluctuations du cours du pétrole ont amené depuis plusieurs années les constructeurs, principalement étrangers, à développer des modèles hybrides. Les mesures de soutien à l'innovation ont conduit les industriels français à investir eux aussi dans les véhicules propres, notamment électriques : La Poste utilise depuis plusieurs années 500 automobiles de ce type.
Mais l'État n'a jamais encouragé la commercialisation de ces véhicules auprès du grand public. On estime aujourd'hui à 5 ou 10 % la part des véhicules électriques en France en 2020. Certes M. Bailly, le président de La Poste, a reçu une lettre de mission facilitant l'achat par les administrations et services publics de 50 000 véhicules de ce genre. Un appel d'offres devrait être lancé au début de l'année prochaine. Aujourd'hui, tous les constructeurs installés en France commencent à développer des prototypes. Une politique active de bonus-malus et de subventions bien relayée par les constructeurs a montré que l'on peut faire baisser le niveau moyen de CO2 des véhicules vendus.
Mais tout cela ne suffira pas, car la plupart des véhicules continueront longtemps encore à consommer des énergies fossiles. Pour gagner la bataille du véhicule propre, il faut agir sur tout le parc automobile et pas seulement sur les engins les plus en pointe. Comment le Gouvernement entend-il favoriser le développement des véhicules propres et des hybrides, atteindre les objectifs d'incorporation de biocarburants, parvenir comme promis à réduire les émissions moyennes à hauteur de 95 grammes de CO2 par kilomètre et lutter plus généralement contre l'ensemble des gaz à effets de serre ?
Mme Chantal Jouanno, secrétaire d'État. - Notre politique n'est plus orientée spécifiquement vers certaines filières, comme c'était le cas auparavant : nous nous sommes fixés un objectif en terme d'émissions de gaz à effet de serres et nous tentons de l'atteindre par tous les moyens, c'est-à-dire à la fois en encourageant la recherche pour améliorer les moteurs thermiques grâce au fonds démonstrateur, en instituant un bonus-malus fondé sur le grammage de CO2 et non sur les technologies utilisées, en favorisant le renouvellement du parc existant et en appliquant les nouvelles normes européennes qui fixent un niveau maximal de gaz à effet de serre émis.
M. Marcel Deneux. - Merci de cette réponse. Je souhaitais mettre en valeur cet aspect de la politique gouvernementale. (Rires sur les bancs socialistes)
M. Daniel Raoul. - On parlait depuis longtemps de la fusion de l'Agence française de sécurité sanitaire des aliments (Afssa) et de l'Agence française de sécurité sanitaire de l'environnement et du travail (Afsset). La décision a été prise lors de l'adoption de la loi Hôpital, santé, patients et territoires : la nouvelle Agence de sécurité sanitaire (A2S) verra le jour le 1er juillet 2010.
Les inquiétudes sont vives au sein des agences : c'est bien naturel à l'annonce d'une réorganisation, d'autant plus que la logique de la RGPP devrait conduire à des réductions d'effectifs.
En outre, les syndicats, ainsi que les associations de protection de l'environnement et de défense des victimes de l'amiante et des accidentés du travail, s'interrogent sur l'indépendance de la future entité, qui sera soumise à la tutelle de cinq ministères : pensez au nombre de représentants de l'État au conseil d'administration ! Le budget de l'A2S sera-t-il l'addition de ceux des deux agences précédentes ? L'expertise de l'Afsset est précieuse, notamment dans le domaine des champs électromagnétiques ; la nouvelle agence aura-t-elle les moyens de remplir des missions de plus en plus vastes, qui concernent par exemple la sécurité au travail ? Pouvez-vous, madame la ministre, rassurer le personnel des agences et les acteurs du monde socio-économique ?
Mme Chantal Jouanno, secrétaire d'État. - M. Marc Mortureux, directeur général de l'Afssa, a préfiguré ce projet. Les missions des deux agences seront préservées et garderont leur spécificité ; nous tenons tout particulièrement à l'autonomie et à la visibilité de la mission environnementale. En revanche, les deux conseils d'administration seront agrégés, de manière à ce que chacune des deux entités soit convenablement représentée. M. Thierry Thuot, conseiller d'État, prépare un projet d'ordonnance qui garantira la visibilité des missions et des moyens de la nouvelle agence ainsi que son indépendance. L'indépendance d'une agence de sécurité sanitaire repose d'abord sur son organisation et sur sa capacité à faire entendre une expertise pluraliste.
M. Daniel Raoul. - J'attends de voir ce qu'il en sera. L'indépendance des autorités que nous créons presque dans chaque loi n'est pas toujours bien assurée. J'aimerais d'ailleurs que les compétences de l'Afsset, ou de l'organisme qui la remplacera, soient étendues aux questions socio-économiques. Nous avons pu constater, lors du Grenelle des ondes, que les problèmes scientifiques et techniques n'occupaient pas toute la place : il fallait également prendre en compte les problèmes liés aux rapports entre science et société.
Hommage à une personnalité étrangère
M. le président. - Notre collègue M. Michel Bécot a reçu aujourd'hui, en notre nom, M. l'ambassadeur du Pakistan, qui se trouve actuellement dans la tribune officielle. Nous saluons M. l'ambassadeur et lui témoignons notre haute considération. (Mmes et MM. les sénateurs et les ministres se lèvent)
Loi de finances pour 2010 (Deuxième partie - Suite)
Écologie, développement et aménagement durables Budget annexe « Contrôle et exploitation aériens » Compte spécial « Contrôle et sanction automatisés des infractions au code de la route » Compte spécial « Avances au fonds d'aide à l'acquisition de véhicules propres » (Suite)
Questions et réponses (Suite)
Mme Anne-Marie Escoffier. - Après que les spécialistes nous eurent maintes fois mis en garde sur les dangers des champs électromagnétiques, l'État s'est enfin engagé par la loi portant engagement national pour l'environnement à mettre en place un dispositif de surveillance et de mesure par des organismes indépendants, financé par un fonds alimenté par la contribution des opérateurs. Il incombe à l'Agence française de sécurité sanitaire de l'environnement et du travail et à l'Agence nationale des fréquences d'en publier les résultats. Le Gouvernement doit remettre au Parlement avant la fin 2009 une synthèse des études scientifiques relatives aux effets des champs électromagnétiques. En outre, le deuxième plan national santé-environnement portant sur la connaissance, l'anticipation, la prévention et la réduction des risques sanitaires liés à l'environnement doit être élaboré au plus tard à la fin de cette année.
Mais il apparaît dans le budget que les crédits nécessaires au financement de ce plan et du dispositif de surveillance et de mesure des ondes sont modiques, pour ne pas dire nuls. Il me semblait pourtant que par sa détermination à faire adopter rapidement la loi Grenelle, le Gouvernement s'était implicitement engagé à doter les organismes compétents des moyens financiers, matériels, humains et techniques nécessaires à une véritable politique de santé-environnement !
C'est pourquoi, madame la ministre, je souhaite que vous nous précisiez quelles sommes seront consacrées au plan national santé-environnement, quelles seront les modalités de recouvrement des fonds nécessaires à la création et au fonctionnement du dispositif de surveillance et de mesure des effets des ondes électromagnétiques, et comment le Gouvernement compte s'y prendre pour présenter la synthèse des études et engager le plan national d'ici la fin de l'année, comme il s'y est engagé. (Applaudissements à gauche et sur les bancs du RDSE)
Mme Chantal Jouanno, secrétaire d'État. - Nous avons présenté les conclusions du rapport de l'Afsset selon lesquelles les antennes ne présentent aucun risque identifié pour la santé. En revanche, certaines études tendent à montrer que le téléphone mobile est dangereux pour les enfants.
Nous tiendrons les objectifs fixés d'ici la fin d'année, soit décembre. A la suite de la table ronde sur les antennes et les ondes, nous avons pris l'engagement d'expérimenter de nouvelles modalités de concertation et la réduction des antennes dans certaines villes. Nous choisirons 30 villes au maximum sur les 280 qui ont postulé. Cette expérimentation est financée conjointement par notre ministère, à hauteur d'un million, le ministère de la santé et le secrétariat d'État à l'économie numérique.
Le plan national santé-environnement 2 est de 480 millions, 110 millions y sont consacrés à la recherche et une toute petite partie aux sujets que vous évoquez.
Mme Anne-Marie Escoffier. - Merci de ces indications.
M. Michel Doublet. - Ma question porte sur les crédits des agences de l'eau à destination des collectivités rurales. Les schémas directeurs d'aménagement et de gestion des eaux 2010-2015 poursuivent l'objectif d'atteindre le bon état écologique des masses d'eau en 2015, conformément à la directive cadre sur l'eau. D'où une mobilisation très substantielle des crédits pour la reconquête des cours d'eau, la protection des habitats et la lutte contre les pollutions diffuses d'origine agricole dans les projets de Sdage des bassins Adour-Garonne et Loire-Bretagne. Mais, passé le cap du respect de la directive cadre sur l'eau, la dépollution domestique devient secondaire, elle ne représente que 7 % de l'enveloppe du bassin versant de la Charente. Depuis deux ans, la réalisation des équipements d'assainissement -réseaux de collecte, stations d'épuration- se heurte à l'insuffisance des crédits disponibles. Résultat, le syndicat des eaux de Charente-Maritime, que je préside, a plus de 120 millions de travaux d'assainissement collectif en attente, sans compter les investissements autofinancés liés à la gestion patrimoniale du parc existant et les besoins de réhabilitation des dispositifs d'assainissement autonome pour une somme de 200 à 300 millions d'ici 2017. Les enveloppes du programme de solidarité urbain rural sont très loin de répondre à ces besoins. Les conséquences économiques sont très lourdes non seulement pour ces collectivités mais aussi pour les entreprises de travaux publics spécialisées dans la pose de canalisations. Depuis le début de l'année 2008, beaucoup d'emplois intérimaires n'ont pas été renouvelés et des plans de licenciement sont en cours. M. Devedjian a fait état, dans un courrier de février 2009, d'un prêt bonifié de 1,5 milliard pour les agences de l'eau de 2009 à 2012. Mais on peut s'interroger sur la capacité de ces dernières à mobiliser ces fonds qu'elles devront de toute façon rembourser par des hausses de redevance et sur la brutalité avec laquelle les agences ont modifié leur politique de soutien aux équipements dans les territoires ruraux. Dans cette situation, il serait utile de dégager des financements pour répondre aux exigences de la directive. Que compte faire le Gouvernement à ce sujet ?
Mme Chantal Jouanno, secrétaire d'État. - Après cinq ans de discussion, les Sdage ont tous été signés, sauf deux en outre-mer. Ils traduisent les engagements d'atteinte de bon état écologique des eaux de la directive cadre sur l'eau aux deux tiers. L'évaluation des besoins de financement pour les Sdage est de 26 milliards pour la période 2010-2015. Les petites communes rurales bénéficient d'aides spécifiques via le dispositif prévu dans la loi sur l'eau, qui viennent en sus des programmes d'intervention classiques des agences de l'eau. Certes, il faut vérifier que le dispositif est appliqué. L'enveloppe réservée à ce dispositif de solidarité est d'un milliard.
M. Michel Doublet. - Madame la ministre, les agences de l'eau n'aident plus les communes de moins de 2 000 habitants pour l'assainissement collectif. (On le confirme à droite) Seules les stations d'épuration qui ne sont pas aux normes sont aidées. Et les bons élèves, comme la Charente-Maritime, passent à côté des financements. Actuellement, tout est bloqué dans ma région, ce qui est préoccupant quand, à défaut de financements, les eaux usées de ces petites communes sont rejetées dans le milieu, à proximité de zones humides. Ce n'est pas une bonne solution écologique...
Mme Mireille Schurch. - La révolution verte est annoncée à grand renfort médiatique avec le plan de relance et le plan « fret d'avenir ». Le Grenelle I, qui fixe d'ambitieux objectifs de rééquilibrage modal, aurait pu être l'occasion déclarer l'activité de wagon isolé d'intérêt général. Le Gouvernement s'y est refusé. Ce budget confirme la faiblesse des crédits affectés au transport combiné au regard des 90 millions dégagés entre 1999 et 2002. Monsieur le ministre, vous appellerez de vos voeux à Copenhague la réduction des émissions de gaz à effet de serre. Soit, mais nous attendons de vous une politique courageuse pour mettre fin à l'avantage concurrentiel dont bénéficie la route, le secteur le plus fortement émetteur de gaz polluants, sur le rail ; avantage que vous avez maintenu, de manière stupéfiante, en compensant l'instauration de la contribution carbone par une hausse du remboursement sur la Tipp aux transporteurs routiers. Le plan « fret d'avenir » revient à jeter un à deux millions de camions supplémentaires sur les routes au motif de la rétractation du réseau jugé non rentable. Pourtant, le wagon isolé représente 42 % du volume du fret ferroviaire et a un important potentiel de développement. Monsieur le ministre, nous demandons très solennellement un moratoire sur l'abandon par la SNCF des trafics diffus. Comment comptez-vous prendre l'impératif écologique et économique lié au rééquilibrage modal qui passe par le wagon isolé ? Il en va de l'avenir de nos territoires les plus fragiles et les plus éloignés !
M. Dominique Bussereau, secrétaire d'État. - Le ferroviaire a la particularité d'être extrêmement écologique sur le transport de masse, non sur le type de transport que vous évoquez. Comme dans les autres pays européens qui soutiennent le fret ferroviaire, nous mettons donc l'accent sur le développement du transport de masse. La construction de quatre lignes TGV permettra de débloquer des sillons sur les lignes classiques en faveur du fret, de même que le contournement ferroviaire de l'agglomération lyonnaise, de Nîmes et de Montpellier. Nous développons les autoroutes ferroviaires : après avoir renforcé celle entre la région lyonnaise et l'Italie, nous travaillons à la construction d'une nouvelle autoroute entre le nord de la France et l'Espagne l'an prochain. Les opérateurs ferroviaires de proximité sont une réponse aux besoins de trafics diffus, auxquels les opérateurs historiques ne peuvent plus faire face. J'en mettrai un en place à La Rochelle et au Havre dans les jours suivants, d'autres se créent un peu partout en France. Nous faisons le pari du fret ferroviaire mais non d'un fret à l'ancienne. L'Europe des 27 redonne des perspectives au ferroviaire. Lorsque j'étais en Russie la semaine dernière, j'ai travaillé à un projet de ligne qui relierait l'Europe à l'Asie en quinze jours de moins que le transport maritime. Vous pouvez constater que nous sommes mobilisés !
Mme Mireille Schurch. - Monsieur le ministre, vous allez bientôt vous rendre dans l'Allier : vous devrez prendre un train corail, puis un TER qui, ne dépassant pas les 100 km/h, vous donnera tout loisir de voir les camions transporter les billes de bois venant de la Creuse sur des petites routes tortueuses de petite montagne ! Si l'on mettait le paquet sur le wagon isolé, on pourrait reporter ces transports sur le rail. Hélas, la ligne Montluçon-Ussel est fermée, malgré nos efforts pour la rouvrir. La laine de roche, autrefois transportée par le rail, est aujourd'hui acheminée dans toute la France par camion de Saint-Éloy-les-Mines. Les autoroutes ferroviaires, certes. Mais comment seront-elles alimentées ? Comment irriguer les territoires autrement que par les camions ?
M. Michel Teston. - Le Gouvernement a présenté, le 16 septembre 2009, un plan d'actions de 7 milliards en faveur du fret ferroviaire articulé autour de huit priorités : créer un véritable réseau d'autoroutes ferroviaires cadencées, doubler le transport combiné de marchandises, créer des opérateurs ferroviaires de proximité, développer le fret à grande vitesse entre les aéroports, créer un réseau orienté fret, supprimer les goulots d'étranglement, favoriser la desserte ferroviaire des ports et améliorer le service offert aux transporteurs.
Or la ventilation des crédits annoncés n'intègre pas la sécurisation des lignes classiques retenues pour compléter le réseau orienté fret. Rien n'est prévu non plus pour la protection phonique de ces lignes ; je pense en particulier à celle de la rive droite du Rhône.
Faute d'une réponse claire à plusieurs questions que je vous ai posées, je vous demande de recevoir une délégation du collectif constitué le 23 novembre, qui regroupe tous les élus concernés.
M. Dominique Bussereau, secrétaire d'État. - Je recevrai naturellement ce collectif ; votre collègue Michel Mercier, président du conseil général du Rhône, m'en a également fait la demande.
Il est vrai que nous avons un problème de bruit avec ces lignes de contournement. Nous devons faire deux choses : prendre des mesures environnementales et faire progresser la technologie des wagons destinés au transport du fret, qui n'ont pas été modernisés comme ceux destinés aux voyageurs. Il faut que nous arrivions à diminuer la pollution sonore produite par les trains de marchandise, sous peine qu'ils soient victimes du même rejet que les camions.
M. Michel Teston. - Je vous remercie d'accepter de recevoir les élus membres de ce collectif. En tant que coordinateur, je souhaite prendre rendez-vous au plus tôt. (Sourires)
M. Dominique Bussereau, secrétaire d'État. - A votre disposition dès maintenant.
M. Dominique de Legge. - L'approvisionnement en énergie pose toujours des problèmes en Bretagne. Le 6 janvier 2009, entre 17 et 20 heures, la Bretagne a failli être plongée dans le noir. Nous avions connu le même problème en 2007. Si nous avons miraculeusement réussi à passer le cap, ce fameux 6 janvier, c'est grâce au dispositif d'alerte Ouest-éco-watt, qui permet à des abonnés de réduire instantanément leur consommation électrique. Ce dispositif remarquable de responsabilisation des citoyens ne saurait à lui seul tenir lieu de solution pérenne.
Notre région produit moins de 5 % de ses besoins, avec une démographie en pleine croissance. La part de l'électricité dans la consommation énergétique est de 23 %, contre 20 % de moyenne nationale, avec une progression de 15 % ces cinq dernières années, soit trois fois plus que la moyenne nationale. L'habitat breton, composé de nombreuses maisons individuelles, consomme 36 % de l'énergie, pour une moyenne nationale de 28 %. La Bretagne est donc exposée en permanence à des coupures d'électricité.
C'est pourquoi le projet de création d'une centrale thermique a été lancé à Ploufragan. Avancé puis repoussé, il n'a toujours pas vu le jour, alors qu'aucune autre solution raisonnable et crédible n'existe. Je n'ignore pas les oppositions locales suscitées par ce projet, fondées sur des arguments plus ou moins sérieux que l'on doit certes examiner. Il y a cependant un moment ou l'intérêt général doit primer sur les intérêts particuliers. Je peine à comprendre que l'on puisse à la fois déplorer la situation actuelle et refuser la construction d'unités de production nouvelles et de lignes d'approvisionnement. Certes, les collectivités bretonnes investissent beaucoup dans les énergies renouvelables, mais le parc éolien actuel ne peut suffire ni pour l'usage domestique ni pour l'usage industriel.
Une réunion s'est tenue à votre cabinet au printemps dernier. Des arbitrages devaient être rendus en juin. Je souhaite connaître votre position, sachant que, dans le meilleur des cas, cette unité de production ne pourrait être opérationnelle qu'en 2012 et ne résoudrait que partiellement nos problèmes. Votre décision sur la création d'une unité de production dans notre région, à Ploufragan ou ailleurs, est attendue par les Bretons.
Mme Chantal Jouanno, secrétaire d'État. - Vous avez raison d'insister sur la situation particulière de la Bretagne, qui ne produit qu'une très faible part de l'électricité qu'elle consomme. L'appel d'offres pour la centrale de Ploufragan a été remporté, avec l'engagement que la centrale soit mise en marche en 2012. D'ici là, on ne pourra agir que sur la maîtrise de la demande.
M. Dominique de Legge. - Je constate avec satisfaction que le dossier est en de bonnes mains au ministère.
Mme Odette Herviaux. - Nous n'avons pas connu de catastrophe maritime depuis le Prestige en 2002 et l'Erika en 1999 mais les épisodes de pollution des eaux et des plages sont récurrents. Vendredi dernier, les plages de Vendée et de Loire-Atlantique ont été souillées par une grande quantité de galettes de fioul dont l'origine est encore mystérieuse. Notre pays possède l'un des plus grands domaines maritimes du monde. Ces espaces particulièrement fragiles appellent des engagements forts de l'État en matière de prévention, de contrôle et de sanction.
C'est dans un cadre régulé que les collectivités territoriales ont voulu, avec le procès Erika, faire progresser la sécurité du transport maritime, en amont d'un cadre juridique clair pour la reconnaissance du préjudice écologique consécutif à une pollution maritime, du problème des indemnisations et de la réparation des dommages, de l'implication des professionnels dans la lutte.
Nous ne pouvons nous résoudre aux réductions d'effectifs dans les centres régionaux opérationnels de surveillance et de sauvetage, les Cross. Or certains indicateurs laissent présager de telles difficultés. En effet, les autorisations d'engagement comme les crédits de paiement de l'action « sécurité et sûreté maritimes » du programme 205 subissent une diminution de plus de 9 %. Même si l'importance accordée dans le budget à « la rénovation des outils radar des Cross et à la modernisation de leurs systèmes d'informations » est conforme à l'engagement 88a du Grenelle de la mer, nous n'avons aucune précision en termes de personnel. La dotation pour les centres de sécurité des navires reste stable alors qu'il est indiqué que des missions nouvelles en matière de sûreté maritime leur ont été confiées.
Nous craignons donc une rationalisation purement comptable de la gestion, qui oublierait que la sécurité dépend avant tout de l'attention, de la compétence et de la disponibilité des hommes. Sacrifier l'intelligence humaine sur l'autel du seul contrôle technologique constituerait une faute majeure.
Nous attendons de l'État des mesures fortes et efficaces pour empêcher que notre littoral soit sans cesse victime des comportements irresponsables de quelques-uns. Or, comme le reconnaît un député de la majorité dans son rapport, l'ambition maritime de la France n'a pas de traduction financière sur la période 2009-2011. Le Grenelle de la mer a rappelé un objectif de tolérance zéro. Cela requiert des moyens matériels, technologiques et humains qu'il faut déployer le plus rapidement possible et pérenniser. Quelles sont vos intentions précises ?
M. Dominique Bussereau, secrétaire d'État. - Ces galettes de fioul provenaient sans doute d?un dégazage sauvage dans l'Atlantique... Nous ne désarmons pas. Je rends hommage à l'action obstinée de l'eurodéputé Gilles Savary qui a beaucoup oeuvré pour que l'Union européenne adopte le paquet sur la question, contre beaucoup d'oppositions.
Notre politique de la mer dépend de nombreuses autorités, entre les Sdis, la gendarmerie, les douanes, le ministère de l'agriculture et de la pêche... Le Grenelle est un moyen de rationaliser tout cela.
Nous modernisons les Cross, nous améliorons la surveillance en mer. Il n'est pas question de réduire l'effort : nous nous donnons les moyens d'agir et sommes à l'avant-garde européenne. Une bonne illustration de notre volonté commune serait la création d'un corps de gardes-côtes européen, qui serait particulièrement utile en Méditerranée.
Mme Odette Herviaux. - Je réitère notre demande d'une vision consolidée. L'engagement 88b du Grenelle de la mer mentionnait « une expertise sans préalable, impliquant les salariés des services maritimes afin d'évaluer l'organisation des services maritimes et leurs capacités en effectifs et en moyens matériels ». Cela n'a a pas été fait, ni pour la réorganisation des directions des affaires maritimes, ni pour les Cross. Qu'advient-il des promesses faites au Havre par le Président de la République ?
Les élus et habitants des régions côtières qui ont encore en mémoire les catastrophes du Torrey Canyon, du Prestige, de l'Erika -et j'en passe- sont nombreux à le regretter.
M. Pierre Bernard-Reymond. - Si mes informations sont exactes, le Gouvernement a l'intention de réaliser l'inventaire d'une soixantaine des plus grands projets routiers ou autoroutiers prévus en France depuis plusieurs années, de les confronter à une grille multicritères et, à partir de cette analyse, de statuer sur leur sort après consultation du Parlement. Pouvez-vous, monsieur le ministre, me confirmer ces intentions du Gouvernement, m'indiquer si la liste de ces projets est aujourd'hui arrêtée, si la grille multicritères a été élaborée et si l'on peut en connaître le contenu, si les porteurs de projets pourront s'exprimer devant le groupe de travail de votre ministère avant qu'il propose une décision ? De quelle nature sera la consultation du Parlement, le dossier sera-t-il présenté devant une commission ? Sera-t-il évoqué en séance publique ? Sanctionné par un vote ? Si oui, s'agira-t-il d'un vote groupé ou d'un vote sur chaque projet ?
M. Dominique Bussereau, secrétaire d'État. - Dans le Grenelle I, nous avons prévu un schéma avec des échéances. Le Grenelle II a traité des transports, à quoi s'ajoute la décision annoncée par le Président de la République au Havre en juillet dernier de rajouter un TGV en Normandie. D'où l'idée d'élaborer un schéma en regardant tous les projets routiers et autoroutiers et en les passant au crible de critères environnementaux. Ensuite, nous ferons des propositions concernant les routes et autoroutes, dont l'A51 que vous soutenez, et nous les présenterons au Parlement au cours d'un débat sans vote, analogue à ce que nous avions fait avec Gilles de Robien. Et je me souviens de la capacité du Sénat à débattre et à influer sur les décisions nationales, dès lors qu'il s'agit d'infrastructures, puisque, ce jour-là la discussion, commencée à 21 h 30, s'était terminée à 6 heures le lendemain matin...
M. Pierre Bernard-Reymond. - Merci de ces informations mais je regrette qu'un vote ne sanctionne pas le débat. Le Sénat avait déjà voté un amendement que j'avais présenté et qui fut entériné par les députés. Je suis heureux de cette perspective de nous revoir et suis sûr qu'il y aura du pastis 51 à l'apéritif. (Sourires)
M. Paul Raoult. - Bruxelles assigne la France en justice pour son retard dans l'application de la directive « Eaux résiduaires urbaines » qui aurait dû être effective avant le 31 décembre 2000. Où en sommes-nous quant aux traitements des eaux usées des 160 communes concernées ? Vis-à-vis des Grenelle I et II, la condamnation de la France fait un peu désordre...
De même pour l'assainissement non collectif qui concerne 5 millions d'installations et 11 millions de Français. Comment accélérer le mouvement car le réseau du service public d'assainissement non collectif est insuffisant. Il faut former les agents, les élus, fournir un agrément des matériels, organiser une filière d'élimination des matières de vidange. Certaines zones de captage sont en habitat dispersé où le non collectif est indispensable. C'est là une urgence écologique à laquelle il faut répondre.
Mme Chantal Jouanno, secrétaire d'État. - En 2002, nous avons hérité de 146 stations d'épuration hors normes. Jean-Louis Borloo a mobilisé des moyens, notamment de la Caisse des dépôts et consignations, pour 1,5 milliard. Aujourd'hui, il ne reste plus que 11 de ces stations et il n'y en aura plus que 3 à la fin de l'année. Nous sommes donc en bonne voie.
Quant à l'assainissement non collectif, nous en avons longuement débattu lors du Grenelle II, qui devrait régler définitivement la question.
M. Alain Vasselle. - Madame la ministre, je voudrais vous sensibiliser aux difficultés de certaines intercommunalités qui ont la compétence de la collecte et du traitement des déchets ménagers et dont l'avis sur la question diverge de celui des conseils généraux. C'est le cas dans l'Oise où les uns et les autres n'ont pas la même appréciation sur le mode de traitement des déchets. Je regrette ce partage de compétences. Je comprends bien l'utilité du plan départemental mais les intercommunalités doivent pouvoir choisir entre différents modes de traitement, même si le conseil général ne veut entendre parler que de méthanisation. Dans la loi Grenelle II, j'avais déposé un amendement en ce sens. Confirmez-vous que, du fait de cette loi, on doit éviter toute tutelle d'une collectivité sur une autre ?
Mme Chantal Jouanno, secrétaire d'État. - L'article 78 de la loi Grenelle II dispose que les délibérations des personnes morales responsables du traitement des déchets sont automatiquement partie intégrante des plans départementaux dès lors qu'il y a compatibilité avec le Grenelle I.
M. Alain Vasselle. - Je vous remercie mais je voudrais que le Gouvernement obtienne des députés qu'ils votent conforme cet article 78 lorsqu'ils examineront la loi Grenelle II.
Examen des crédits des missions
M. le président. - Amendement n°II-150, présenté par le Gouvernement.
Modifier comme suit les crédits des programmes :
(en euros)
Programmes |
Autorisations d'engagement |
Crédits de paiement |
||
|
+ |
- |
+ |
- |
Infrastructures et services de transports |
||||
Sécurité et circulation routières |
||||
Sécurité et affaires maritimes |
||||
Météorologie |
||||
Urbanisme, paysages, eau et biodiversité |
||||
Information géographique et cartographique |
||||
Prévention des risques Dont Titre 2 |
||||
Énergie et après-mines |
70 000 000 |
20 000 000 |
||
Conduite et pilotage des politiques de l'écologie, de l'énergie, du développement durable et de la mer Dont Titre 2 |
||||
TOTAL |
70 000 000 |
20 000 000 |
||
SOLDE |
+ 70 000 000 |
+ 20 000 000 |
Mme Chantal Jouanno, secrétaire d'État. - Vous avez rebaptisé la taxe carbone et regretté que ne soit pas prévue de compensation pour les collectivités locales. Le Premier ministre a annoncé, au Congrès des maires de France, la création d'un fonds, auprès de l'Ademe, destiné à financer les investissements des collectivités territoriales en matière d'économies d'énergie et de développement durable. Ce fonds sera doté d'un montant correspondant au produit de la taxe carbone acquittée par les collectivités territoriales afin d'accompagner ces dernières dans des démarches de développement durable. Les emplois du fonds seront définis après avis d'une commission comprenant des représentants des collectivités territoriales. Le coût de la taxe carbone à la charge des collectivités locales est estimé à 70 millions d'euros en tenant compte de l'exonération dont elles bénéficient sur les transports en commun. Cet amendement ouvre, en conséquence, les crédits nécessaires à la mise en place du fonds en 2010, soit 70 millions d'euros en autorisations d'engagement et 20 millions d'euros en crédits de paiement.
Mme Fabienne Keller, rapporteur spécial. - Ce dispositif correspond à l'engagement pris par le Premier ministre. C'est un retour aux fondamentaux de l'éco-fiscalité : on fiscalise la consommation d'énergie productrice de CO2 et on donne la ressource ainsi collectée à ceux qui investissent dans le « moins carboné ». La commission est tout à fait favorable à ce cercle vertueux mais elle s'étonne du faible montant des crédits accordés à ce fonds. Mais il est vrai que, sur le montant payé par les collectivités locales, on est encore dans le flou.
Mme Nicole Bricq. - Les collectivités locales étaient les seules à ne pas avoir de compensation pour leur contribution carbone. Les socialistes n'ont pas approuvé celle des ménages qui ne tient pas du tout compte de leurs revenus. Selon l'estimation de la commission des finances, les collectivités paieraient 140 millions de contribution. La moitié disparaît donc...
Nous sommes sceptiques quant à la hauteur du produit attendu et au contrôle qui sera exercé sur l'affectation de ces fonds. J'observe d'ailleurs que des amendements de ce type, prévoyant de réinjecter le produit de taxes dans un fonds au bénéfice des collectivités, ont été présentés par le passé et que le Gouvernement les a toujours rejetés... (Applaudissements sur les bancs socialistes)
M. Éric Doligé. - Je ne suis pas très à l'aise sur cet amendement. Il est normal que les collectivités qui devront mettre la main à la poche puissent bénéficier d'un retour. J'avais déposé des amendements, qui n'ont pas franchi la barre de la commission, sur cette question, visant en particulier le problème des Sdis, les services départementaux d'incendie et de secours, qui vont devoir payer plus pour remplir simplement leurs obligations. A celui de mon département, dont la flotte est de 1 000 véhicules, cela coûtera tout bonnement un million.
Mais que nous proposez-vous ici ? De créer une nouvelle commission, devant laquelle il faudra aller, pour la redistribution des sommes versées au fonds : si ce n'est une usine à gaz, c'est une usine à carbone...
Mme Nicole Bricq. - Un piège à carbone !
M. Éric Doligé. - C'est la seule solution qui nous est pour l'heure proposée, il faudra donc bien nous y rallier, mais avouez qu'elle est bien complexe.
M. Alain Vasselle. - Voilà un amendement intéressant et qui honore les engagements du Premier ministre devant le Congrès des maires. Mais on ne sait rien de la façon dont tournera la machine. M. Doligé a raison de s'interroger : est-il bien opportun de créer encore une nouvelle commission ? Nous avons déjà des commissions départementales chargées de déterminer les domaines et les taux des aides attribuées au titre de la DGE, ne pourraient-elles assumer cette compétence supplémentaire ?
Mme Bricq parle de besoins évalués à 140 millions. Il faudra veiller à la juste répartition des crédits entre les communes rurales et les villes de quelque importance : il est clair que les besoins y seront supérieurs ; il ne faudrait pas que les communes rurales paient sans assurance de retour. Surtout que leurs initiatives seront compliquées par le fait qu'elles doivent compter sur la participation du conseil général -sauf, bien sûr, si le fonds est suffisamment doté pour leur éviter les financements croisés...
Mme Évelyne Didier. - Il est clair que nous sommes devant un amendement pare-feu. Il fallait bien que le Premier ministre annonce quelque chose au Congrès des maires...
Qui pourrait s'opposer à un amendement prévoyant de redistribuer de l'argent aux collectivités ? Mais comment éviter le clientélisme, sachant qu'il n'y aura pas assez d'argent ? Quels critères seront retenus ? Qui seront les premiers servis ? Il y a bien des chances que ce soit les collectivités qui disposent de l'ingénierie nécessaire pour boucler les dossiers ; les autres ne pourront pas, en partie aussi à cause des financements croisés. Mais l'essentiel, après tout, n'était-il pas de calmer, par une annonce, la grogne des maires ? (Applaudissements sur les bancs socialistes)
Mme Chantal Jouanno, secrétaire d'État. - Nous ne pouvons par définition prévoir qu'une estimation des sommes dont disposera le fonds. Nous avons mis en place une commission verte pour suivre la contribution carbone, qui pourra se saisir au plus près de la question.
Le Gouvernement souhaite bien évidemment que les collectivités soient parties prenantes de la décision, pour éviter tout clientélisme. Je fais toute confiance à l'Ademe pour gérer les choses en toute transparence, avec son conseil d'administration.
L'amendement n°II-150 est adopté.
M. le président. - Amendement n°II-152, présenté par le Gouvernement.
Modifier comme suit les crédits des programmes :
(en euros)
Programmes |
Autorisations d'engagement |
Crédits de paiement |
||
|
+ |
- |
+ |
- |
Infrastructures et services de transports |
||||
Sécurité et circulation routières |
||||
Sécurité et affaires maritimes |
||||
Météorologie |
||||
Urbanisme, paysages, eau et biodiversité |
||||
Information géographique et cartographique |
||||
Prévention des risques Dont Titre 2 |
||||
Énergie et après-mines |
10.000.000 |
10.000.000 |
||
Conduite et pilotage des politiques de l'écologie, de l'énergie, du développement durable et de la mer Dont Titre 2 |
||||
TOTAL |
10.000.000 |
10.000.000 |
||
SOLDE |
+ 10.000.000 |
+ 10.000.000 |
Mme Chantal Jouanno, secrétaire d'État. - Cet amendement traduit une recommandation de votre rapporteur général, qui estime souhaitable, pour ne pas déroger au principe d'universalité budgétaire, que le fonds soit abondé non par des recettes affectées, mais par le budget de l'État.
Mme Fabienne Keller, rapporteur spécial. - Favorable à cet amendement de coordination.
L'amendement n°II-152 est adopté.
M. le président. - Amendement n°II-149, présenté par le Gouvernement.
Modifier comme suit les crédits des programmes :
(en euros)
Programmes |
Autorisations d'engagement |
Crédits de paiement |
||
|
+ |
- |
+ |
- |
Infrastructures et services de transports |
||||
Sécurité et circulation routières |
||||
Sécurité et affaires maritimes |
||||
Météorologie |
||||
Urbanisme, paysages, eau et biodiversité |
||||
Information géographique et cartographique |
||||
Prévention des risques Dont Titre 2 |
||||
Énergie et après-mines |
||||
Conduite et pilotage des politiques de l'écologie, de l'énergie, du développement durable et de la mer Dont Titre 2 |
512.789 436.337 |
512.789 436.337 |
||
TOTAL |
512.789 |
512.789 |
||
SOLDE |
- 512.789 |
- 512.789 |
M. Dominique Bussereau, secrétaire d'État. - Cet amendement tire les conséquences sur les crédits de la mission « Écologie, développement et aménagement durables » de l'ajustement des compensations dues aux collectivités territoriales au titre de certains transferts.
M. Gérard Miquel, rapporteur spécial. - Ces ajustements résultent de deux transferts de compétences : le transfert de l'État au syndicat des transports d'Ile-de-France des services qui participent à l'exercice des compétences transférées en matière de plan de déplacements urbains, d'organisation et de fonctionnement des transports scolaires ainsi que de remboursement des frais de déplacement des élèves et le transfert au maire de Paris de la faculté de délivrer les autorisations préalables de changement d'usage des locaux destinés à l'habitation. Favorable.
L'amendement n°II-149 est adopté
M. le président. - Amendement n°II-95 rectifié, présenté par M. Bailly.
Modifier comme suit les crédits des programmes :
(en euros)
Programmes |
Autorisations d'engagement |
Crédits de paiement |
||
|
+ |
- |
+ |
- |
Infrastructures et services de transports |
||||
Sécurité et circulation routières |
||||
Sécurité et affaires maritimes |
||||
Météorologie |
||||
Urbanisme, paysages, eau et biodiversité |
500 000 |
500 000 |
||
Information géographique et cartographique |
||||
Prévention des risques Dont Titre 2 |
||||
Énergie et après-mines |
||||
Conduite et pilotage des politiques de l'écologie, de l'énergie, du développement durable et de la mer Dont Titre 2 |
||||
TOTAL |
500 000 |
500 000 |
||
SOLDE |
- 500 000 |
- 500 000 |
M. Gérard Bailly. - Le groupe d'étude sur l'élevage, que j'ai l'honneur de présider, est préoccupé des dégâts croissants que provoque, pour les éleveurs, la réintroduction des grands prédateurs -loups, ours, lynx. Sans doute le Gouvernement a-t-il prévu des crédits pour l'indemnisation et la prévention. Mais la prévention demande un travail considérable aux bergers.
Alors que l'Europe sensibilise les éleveurs au bien-être animal, que tous ont reçu la plaquette éditée par l'Union européenne, que je tiens entre les mains et qui se présente comme une véritable déclaration des droits des animaux, ils ne comprennent pas, à ce compte, que l'on laisser égorger des ovins qui agonisent pendant des heures.
L'amendement propose donc de réduire les crédits consacrés à la préservation des grands prédateurs, qui vont d'ailleurs aux associations de défense que nous connaissons. Cette réduction reste progressive, sur trois ans, soit seulement 10 à 15 % la première année.
Chaque année, entre 1 000 et 3 000 animaux sont égorgés par des loups.
Le vote de cet amendement serait profitable à ce budget, permettrait de répondre à l'attente des éleveurs et éviterait la mort de tant d'agneaux. J'espère que vous n'y serez pas plus insensibles que moi, mes chers collègues. (Applaudissements à droite)
Mme Fabienne Keller, rapporteur spécial. - Nous parlons de cette question difficile tous les ans, mais il s'agit d'une directive européenne pour la protection des animaux. M. Miquel me disait qu'il préférait voir des brebis dans la montagne plutôt que des loups. Certes, les bergers sont indemnisés, mais cela ne compense pas les préjudices qu'ils subissent. Néanmoins, la préservation à très long terme de la biodiversité nous impose de protéger toutes les espèces, des plus grandes aux plus petites. Je souhaite donc le retrait de cet amendement, sinon nous serions en infraction avec les textes européens qui protègent l'habitat et les espèces.
M. Gérard Bailly. - Je ne vais pas retirer cet amendement : avec M. Fortassin, nous avons fait une étude qui démontre que le cheptel ovin a diminué de 3 millions de têtes. Lorsqu'on se plaindra que des territoires entiers brûlent et que des avalanches se déclenchent parce qu'il n'y a plus d'ovins, il sera trop tard pour pleurer et pour reprocher au Parlement de ne pas avoir pris ses responsabilités : il faut certes des loups et des ours, mais pas trop pour ne pas détruire les troupeaux de moutons. (Applaudissements à droite)
Mme Chantal Jouanno, secrétaire d'État. - Comme l'a dit Mme Keller, nous sommes tenus par deux textes : la convention de Berne et la directive habitat.
Tel qu'il est rédigé, cet amendement supprimerait une grande partie des crédits destinés à l'indemnisation et à l'accompagnement des éleveurs parce que les crédits qui vont directement à des missions de suivi ou de valorisation de la biodiversité ne représentent que 14 % du montant global.
Le plan loup, qui prévoit des tirs de prélèvements en cas de difficultés, n'a jusqu'à présent pas été appliqué du fait de sa complexité. Un arrêté a été pris en mai pour déconcentrer la décision : désormais, ce seront les préfets qui décideront des tirs de prélèvements, même en dehors des saisons de pâturage. En outre, les chiens Patou seront considérés comme des moyens d'effarouchement.
Nous travaillons avec M. Le Maire sur la question du pastoralisme qui est aussi mis en difficulté par les chiens errants.
Ce n'est pas en supprimant des crédits que vous parviendrez à résoudre ce problème puisque vous iriez à l'encontre des intérêts des éleveurs. Je demande donc le retrait de cet amendement.
M. Alain Vasselle. - Je voudrais donner pour partie raison à Mme la ministre sur sa demande de retrait. En fait, M. Bailly appelle au secours : les éleveurs voient leurs troupeaux décimés. Mais il y a aussi le problème des chiens errants : dans mon département, nous n'avons pas de loups, Dieu merci, mais des chiens errants qui égorgent des moutons. Mais si nous votons cet amendement, les éleveurs ne bénéficieront plus d'indemnisations.
Mme la ministre nous a dit que des tirs permettraient de réguler cette espèce. Encore faudra-t-il que des instructions précises soient données aux préfets pour que cette régulation se traduise dans les faits. Il faudra plus que des mots pour calmer l'ire des parlementaires et des éleveurs !
En outre, il serait souhaitable d'étendre la régulation à d'autres prédateurs. Il y a aujourd'hui plusieurs espèces qui sont menacées et je suis convaincu que figureront bientôt sur la liste des espèces à protéger la perdrix grise, victime de prédateurs ailés ou à quatre pattes tels que le renard.
L'amendement n°II-95 rectifié est adopté.
(Applaudissements sur divers bancs à droite)
M. le président. - Amendement n°II-129, présenté par M. Sueur, Mme Bricq et M. Frécon.
Modifier comme suit les crédits des programmes :
(en euros)
Programmes |
Autorisations d'engagement |
Crédits de paiement |
||
|
+ |
- |
+ |
- |
Infrastructures et services de transports |
||||
Sécurité et circulation routières |
||||
Sécurité et affaires maritimes |
||||
Météorologie |
||||
Urbanisme, paysages, eau et biodiversité |
||||
Information géographique et cartographique |
||||
Prévention des risques Dont Titre 2 |
180 000 000 |
180 000 000 |
||
Énergie et après-mines |
||||
Conduite et pilotage des politiques de l'écologie, de l'énergie, du développement durable et de la mer Dont Titre 2 |
180 000 000 |
180 000 000 |
||
TOTAL |
180 000 000 |
180 000 000 |
180 000 000 |
180 000 000 |
SOLDE |
0 |
0 |
M. Jean-Pierre Sueur. - Chaque année, nous parlons des sinistrés de la sècheresse de 2003 car de nombreux bâtiments ont été endommagés. Il y a eu une procédure de catastrophe naturelle mais elle a donné lieu à d'importantes injustices. Dans certains départements, quasiment toutes les communes ont été prises en compte, alors que dans d'autres, seules quelques-unes l'ont été sans que l'on puisse bien distinguer les critères retenus. En 2006, nous avons obtenu une dotation exceptionnelle mais certaines associations ont fait valoir que ces crédits étaient insuffisants et nombre de personnes ne parviennent toujours pas à faire face aux conséquences de cette catastrophe. L'année dernière, le Sénat a décidé, à l'initiative de la commission des finances, de constituer un groupe de travail. Sous la présidence de notre collègue Doligé, ce groupe a fort bien travaillé. Avec Mme Bricq et M. Frécon, nous vous proposons trois amendements qui reprennent plusieurs conclusions du rapport de Mme Keller et de M. Frécon.
Ce premier amendement reprend la dixième proposition du rapport : « le groupe de travail demande au Gouvernement de mettre en oeuvre une vague complémentaire d'indemnisation ». Ce qui a été fait en 2006 est positif, mais largement insuffisant. La commission des finances a en effet constaté qu'une dotation complémentaire était indispensable.
J'espère que la réponse apportée par le Gouvernement sera différente de celles des années passées : à chaque fois, on nous a dit qu'il y avait un vrai problème mais qu'il fallait une étude approfondie. Elle a été faite : j'espère qu'une réponse favorable nous sera donnée. (M. Michel Teston applaudit)
Mme Fabienne Keller, rapporteur spécial. - La sécheresse a eu des conséquences très difficiles à évaluer. Malgré les vagues successives d'indemnisations, elles n'ont pas complètement répondu aux sinistres subis par les habitants. C'est pourquoi nous avons constitué un groupe de travail composé de dix collègues.
L'intervention de M. Sueur se fonde sur notre travail. Pour décider du montant à dégager, un travail d'expertise complémentaire semble toutefois nécessaire.
présidence de Mme Monique Papon,vice-présidente
Mme Chantal Jouanno, secrétaire d'État. - Le programme « Prévention des risques » finance les mesures destinées à limiter l'exposition des populations. L'indemnisation des victimes relève, elle, du ministère de l'intérieur qui, je le rappelle, a agi puisque 4 300 communes ont été reconnues en état de catastrophe naturelle -l'application des critères classiques aurait conduit à n'en reconnaître que 200. C'est ce ministère qui doit être saisi si vous estimez qu'un complément d'indemnisation est nécessaire.
M. Éric Doligé. - Il est toujours désagréable, lorsqu'on fait un travail qu'on estime de qualité et qui a été approuvé sur tous les bancs de cette assemblée, de constater les difficultés de sa mise en application. Il faut pourtant avancer pour répondre à ce qui est une injustice et prévenir les catastrophes futures. Je ne sais pas s'il faut retenir les 180 millions proposés ; je sais en revanche qu'ils sont prélevés sur les crédits de fonctionnement du ministère, qu'ils amputent de moitié ...
Vous dites à juste titre, madame la ministre, que le dossier est de la compétence du ministère de l'intérieur. Pour sortir de la difficulté, peut-être pourrions-nous organiser début 2010 un débat d'initiative sénatoriale avec vous et les deux autres ministres concernés, vos collègues de l'intérieur et du budget. Je souhaite en tout cas que vous puissiez répondre favorablement à un des deux amendements qui suivent...
Mme Nicole Bricq. - Il n'est de bataille perdue que celles qui ne sont pas menées... Notre combat dure depuis 2004. Le titre du rapport du groupe de travail dit tout : « un passé qui ne passe pas ». Mme la ministre nous oppose un argument technique ; la Lolf étant ce qu'elle est, nous faisons ce que nous pouvons... Il suffirait d'un accord entre le ministère de l'environnement, celui de l'intérieur et celui du budget pour faire avancer le dossier. Il faut solder le passif, nous le voulons tous et sur tous les bancs. Quant à la somme de 180 millions, c'est celle de l'aide exceptionnelle qu'avait au départ proposée le Gouvernement, avant que la navette ne la porte à 218 millions. J'ajoute que de toutes nos auditions, nous avons tiré la conclusion que les critères étaient opaques et variables d'un département à l'autre, ce qui est insupportable pour les victimes. (M. Jean-Pierre Sueur applaudit)
M. Marc Daunis. - Permettez-moi un cas concret. Certaines communes de mon département des Alpes-Maritimes ont été indemnisées, tandis que deux autres, situées pourtant de façon certaine sur la même langue d'argile, mais dépendant d'une station météo du Var, ne l'ont pas été. Des familles ont pourtant dû quitter leur maison menacée de péril. Il faut entendre la souffrance des victimes. Il est temps de solder ce passé qui ne passe pas. (Applaudissements sur les bancs socialistes)
L'amendement n°II-129 n'est pas adopté.
Mme la présidente. - Amendement n°II-128, présenté par M. Sueur, Mme Bricq et M. Frécon.
Modifier comme suit les crédits des programmes :
(en euros)
Programmes |
Autorisations d'engagement |
Crédits de paiement |
||
|
+ |
- |
+ |
- |
Infrastructures et services de transports |
|
|
|
|
Sécurité et circulation routières |
|
|
|
|
Sécurité et affaires maritimes |
|
|
|
|
Météorologie |
|
|
|
|
Urbanisme, paysages, eau et biodiversité |
|
|
|
|
Information géographique et cartographique |
|
|
|
|
Prévention des risques Dont Titre 2 |
10 000 000 |
|
10 000 000 |
|
Énergie et après-mines |
|
|
|
|
Conduite et pilotage des politiques de l'écologie, de l'énergie, du développement durable et de la mer Dont Titre 2 |
|
10 000 000 |
|
10 000 000 |
TOTAL |
10 000 000 |
10 000 000 |
10 000 000 |
10 000 000 |
SOLDE |
0 |
0 |
M. Jean-Pierre Sueur. - Nous sommes toujours preneurs d'un débat comme celui que suggère M. Doligé, nous avions d'ailleurs déposé, avec Mme Bricq, une proposition de loi en 2004 ; et nous revenons sur le sujet à chaque loi de finances. Mais il faut maintenant des décisions concrètes. Ne serait-il pas opportun, monsieur le président de la commission des finances, que nous tentions de trouver une solution d'ici la fin du débat budgétaire ? Le dossier concerne trois ministères ; nous examinons demain les crédits de celui de l'intérieur, mais le délai-limite de dépôt des amendements est dépassé... Le Gouvernement peut toujours nous faire des propositions. Je redis que le rapport du groupe de travail a été approuvé par tous les groupes et que les victimes se comptent dans tous les départements.
L'amendement n°II-128 est moins coûteux que le précédent. Il s'appuie sur la recommandation n°13 du rapport et propose la mise en place en 2010 d'une procédure d'alerte spécifique des maires des communes situées en zone d'aléa argileux. Si on veut qu'elle soit effective, il faut y mettre quelques crédits.
Mme Fabienne Keller, rapporteur spécial. - La commission a constaté que tous les enseignements de 2003 n'avaient pas été tirés et que des mesures de prévention avaient manqué, alors que le problème était connu, au moins dans la mémoire collective des habitants. Comme pour l'amendement précédent, la pertinence de la somme proposée est incertaine.
Sur le fond, madame la ministre, que prévoyez-vous pour que l'on ne donne plus d'autorisations de construire sur des sols dont on connaît l'instabilité ?
Mme Chantal Jouanno, secrétaire d'État. - C'est une excellente proposition. Nous avons déjà établi 65 cartes d'aléa argileux, disponibles sur internet, ainsi qu'un guide. Sur le dispositif d'alerte, nous travaillons avec Météo France pour mettre en place un système d'information. Nous vous tiendrons informés de ces travaux, les choses avancent. A priori, il n'est pas nécessaire de prévoir des crédits spécifiques.
Mme Nicole Bricq. - Nous voudrions que vous vous engagiez sur un calendrier. Cette affaire ne semble pas avancer bien vite...
M. Éric Doligé. - Je rejoins Mme Bricq. Je me suis abstenu sur l'amendement précédent mais si nous n'avons toujours pas de chiffrage d'ici trois mois, je le voterai à la prochaine occasion. Nous ne pouvons pas continuer à ne pas suivre nos propres rapports, à nous parjurer de la sorte !
M. Marc Daunis. - Très bien.
M. Éric Doligé. - Il faut répondre aux drames sur le terrain.
Mme Chantal Jouanno, secrétaire d'État. - Nous produisons environ 20 cartes d'aléas par an. C'est vrai que l'État ne suit pas toujours les recommandations des rapports. Je m'engage à vous faire dans trois mois un rapport complet de nos travaux, comprenant un calendrier, notamment sur le dispositif d'alerte élaboré avec Météo France.
M. Éric Doligé. - Quid des 180 millions ? Sans réponse précise, je voterai cet amendement la prochaine fois...
Mme Nicole Bricq. - Puisque la ministre s'engage à produire un état des lieux dans trois mois, nous retirons l'amendement.
L'amendement n°II-128 est retiré.
Mme la présidente. - Amendement n°II-151, présenté par le Gouvernement.
Modifier comme suit les crédits des programmes :
(en euros)
Programmes |
Autorisations d'engagement |
Crédits de paiement |
||
|
+ |
- |
+ |
- |
Infrastructures et services de transports |
7 172 821 |
7 172 821 |
||
Sécurité et circulation routières |
||||
Sécurité et affaires maritimes |
||||
Météorologie |
||||
Urbanisme, paysages, eau et biodiversité |
||||
Information géographique et cartographique |
||||
Prévention des risques Dont Titre 2 |
||||
Énergie et après-mines |
||||
Conduite et pilotage des politiques de l'écologie, de l'énergie, du développement durable et de la mer Dont Titre 2 |
7 172 821 7 172 821 |
7 172 821 7 172 821 |
||
TOTAL |
7 172 821 |
7 172 821 |
7 172 821 |
7 172 821 |
SOLDE |
0 |
0 |
M. Dominique Bussereau, secrétaire d'État. - Cet amendement tire les conséquences de la loi transférant les parcs de l'équipement aux départements. La plupart des départements auront fait ces transferts avant le 15 décembre, mais environ 170 ouvriers n'auront pas été transférés au 1er janvier. Cet amendement permet de continuer à les payer.
M. Gérard Miquel, rapporteur spécial. - Les 170 ouvriers des parcs non transférés aux départements seront affectés à d'autres services du ministère. Avis favorable.
M. Gérard Bailly. - Dans mon département du Jura, la direction régionale de l'industrie, de la recherche et de l'environnement (Drire) ne veut pas s'engager au-delà de 2010 sur les travaux qui seront confiés aux parcs de l'équipement. Comment un département peut-il s'engager à reprendre la totalité des hommes et du matériel du parc sans la garantie de l'État ? Comptez-vous donner des consignes aux Drire pour clarifier la situation ?
M. Dominique Bussereau, secrétaire d'État. - L'exemple du Jura est intéressant. Les directions interdépartementales des routes utiliseront les personnels des parcs de l'équipement. Certains personnels peuvent aussi envisager une deuxième carrière dans les Sdis. Nous achevons le décret d'homologie pour que ces ouvriers très particuliers puissent intégrer la fonction publique territoriale. Les difficultés seront réglées au coup par coup.
L'amendement n°II-151 est adopté.
Mme la présidente. - Amendement n°II-13, présenté par M. Lambert au nom de la commission des finances.
Modifier comme suit les crédits des programmes :
(en euros)
Programmes |
Autorisations d'engagement |
Crédits de paiement |
||
|
+ |
- |
+ |
- |
Infrastructures et services de transports |
1.562.100 |
|
1.562.100 |
|
Sécurité et circulation routières |
|
1.562.100 |
|
1.562.100 |
Sécurité et affaires maritimes
|
|
|
|
|
Météorologie
|
|
|
|
|
Urbanisme, paysages, eau et biodiversité
|
|
|
|
|
Information géographique et cartographique
|
|
|
|
|
Prévention des risques Dont titre 2 |
|
|
|
|
Energie et après-mines |
|
|
|
|
Conduite et pilotage des politiques de l'écologie, de l'énergie, du développement durable et de la mer Dont titre 2 |
|
|
|
|
TOTAL |
1.562.100 |
1.562.100 |
1.562.100 |
1.562.100 |
SOLDE |
0 |
0 |
M. Gérard Miquel, rapporteur spécial. - Cet amendement réduit le coût du « permis à un euro par jour » et affecte la somme correspondante au soutien au transport combiné de marchandises.
En 2010, l'État prendra directement en charge le cautionnement de 20 000 nouveaux prêts afin de mieux le cibler sur les familles défavorisées. Le coût estimé de 10,05 millions est toutefois optimiste : il repose sur une prévision d'octroi de 92 000 prêts non cautionnés par l'État, alors que les projections pour 2009 tablent sur 75 000 prêts, et un taux prévisionnel d'appel de la caution de l'État de 12,5 %. Or le prêt étudiant garanti par l'État repose sur un taux de défaut de 5 %, alors que son plafond est sensiblement supérieur au montant moyen des prêts pour le permis de conduire.
Il est donc proposé de retenir les hypothèses suivantes, qui demeurent volontaristes : 85 000 prêts non cautionnés, soit un coût de 6 689 500 euros, et un taux de provision du cautionnement de 8 %, soit un coût de 1 798 400 euros.
M. Dominique Bussereau, secrétaire d'État. - Le « permis à un euro » reposait sur un système de cautionnement qui excluait les familles les plus modestes de son bénéfice : c'était absurde ! Nous avons donc prévu un cautionnement avec la CDC pour démocratiser l'accès au permis.
Avec 92 000 prêts à cautionner, un taux de provisionnement de 8 % est toutefois suffisant : je propose donc de rectifier l'amendement de la commission pour prévoir un coût global de 1 011 600 euros.
M. Gérard Miquel, rapporteur spécial. - Favorable, mais vous faites une erreur de calcul : c'est 1 011 200 euros.
M. Dominique Bussereau, secrétaire d'État. - Je fais toujours confiance à la commission des finances du Sénat !
L'amendement n°II-13 rectifié est adopté.
Mme la présidente. - Amendement n°II-119, présenté par M. Courteau, au nom de la commission de l'économie.
Modifier comme suit les crédits des programmes :
(en euros)
Programmes |
Autorisations d'engagement |
Crédits de paiement |
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+ |
- |
+ |
- |
Infrastructures et services de transports |
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Sécurité et circulation routières |
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Sécurité et affaires maritimes |
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Météorologie |
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Urbanisme, paysages, eau et biodiversité |
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Information géographique et cartographique |
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Prévention des risques Dont Titre 2 |
600 000 |
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600 000 |
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Énergie et après-mines |
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600 000 |
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600 000 |
Conduite et pilotage des politiques de l'écologie, de l'énergie, du développement durable et de la mer Dont Titre 2 |
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TOTAL |
600 000 |
600 000 |
600 000 |
600 000 |
SOLDE |
0 |
0 |
M. Roland Courteau, rapporteur pour avis. - Cet amendement a pour objet d'abonder de 600 000 euros les crédits de l'action n°9 « Contrôle de la sûreté nucléaire et de la radioprotection » au sein du programme 181 « Prévention des risques », afin de financer les dépenses de rémunération du personnel des commissions locales d'information, les CLI, constituées sous forme d'association, parmi celles qui sont instituées auprès des sites accueillant des installations nucléaires de base. L'article 22 de la loi du 13 juin 2006 relative à la transparence et à la sécurité en matière nucléaire prévoit que les commissions dotées de la personnalité juridique peuvent recevoir une partie du produit de la taxe sur les installations nucléaires de base. En attendant que cette mesure soit prise, nous proposons une subvention budgétaire à hauteur des besoins de la douzaine de commissions aujourd'hui dotées de la personnalité juridique.
Cette mesure est gagée par une réduction à due concurrence des crédits du programme 174 « Énergie et après-mines », répartie entre les actions du programme au prorata de leur poids budgétaire respectif, à l'exclusion de l'action n°4 « Gestion économique et sociale de l'après-mines ».
Mme Fabienne Keller, rapporteur spécial. - Les commissions locales d'information voient leur activité se développer, ce dont nous nous réjouissons. Elles nous semblent suffisamment financées par l'Autorité de sûreté nucléaire. Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Chantal Jouanno, secrétaire d'État. - Il faut en effet assurer aux commissions locales d'information des ressources pérennes adaptées à leurs besoins. Pour l'année 2010, l'Autorité de sûreté nucléaire dispose de fonds suffisants pour les financer. Mais vous pouvez compter sur moi : dès le printemps prochain, je vous soumettrai un plan de financement triennal.
Le gage que vous proposez conduit à amputer les crédits dont disposent l'Ademe et l'Agence nationale pour la gestion des déchets radioactifs (Andra) afin de lutter contre le changement climatique. Or ces agences ont dû faire face à des dépenses imprévues, liées notamment à la fermeture des cokeries de Carling. Retrait, sinon rejet.
M. Roland Courteau, rapporteur pour avis. - Je n'ai pas pu consulter la commission de l'économie, mais je prends la responsabilité de retirer l'amendement.
L'amendement n°II-119 est retiré.
Les crédits de la mission, modifiés, sont adoptés, ainsi que les crédits du budget annexe « Contrôle et exploitation aérien », du compte spécial « Contrôle et sanction automatisés des infractions au code de la route » et du compte spécial « Avances du fonds d'aide à l'acquisition des véhicules propres ».
Article additionnel après l'article 52 bis
Mme la présidente. - Amendement n°II-130, présenté par M. Sueur, Mme Bricq et M. Frécon.
I. - Après l'article 52 bis, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Le reliquat des crédits votés dans le cadre de la loi n°2005-1719 du 30 décembre 2005 de finances pour 2006 afin de créer une dotation exceptionnelle supplémentaire pour indemniser les victimes de la sécheresse de 2003 sera exclusivement consacré à apporter des aides à ces victimes.
II. - En conséquence, faire précéder cet article de l'intitulé :
« Mission écologie, développement et aménagement durables »
M. Jean-Pierre Sueur. - Il reste 1,833 million d'euros sur le montant des crédits destinés à indemniser les victimes de la sécheresse de 2003 : c'est une somme très limitée, et le reliquat d'un fonds existant : Mme la ministre ne pourra donc pas nous répondre que l'amendement est excessivement coûteux... Dans leur rapport de 2009, Mme Keller et M. Frécon préconisaient que le reliquat du fonds soit intégralement affecté à l'aide aux victimes, ce qui est bien naturel. Nous ne faisons que reprendre cette recommandation.
Mme Fabienne Keller, rapporteur spécial. - Ce reliquat est inscrit à la ligne budgétaire consacrée à l'indemnisation des victimes. L'amendement est donc techniquement superflu. Mais peut-être Mme la ministre pourra-t-elle rassurer notre collègue et confirmer que cette somme servira exclusivement à indemniser les victimes de la sécheresse ?
Mme Chantal Jouanno, secrétaire d'État. - La mesure proposée par M. Sueur ne relève pas du domaine législatif. Mais je m'engage à ce que le reliquat du fonds soit intégralement affecté à l'indemnisation des victimes.
Mme Nicole Bricq. - C'est tout ce que nous souhaitons. Les critères d'indemnisation ne nous satisfont pas, mais c'est un autre problème. Force est de constater que toutes les victimes n'ont pas été logées à la même enseigne. Nous accordons foi aux promesses de Mme la ministre, mais il est temps de passer aux actes.
L'amendement n°II-130 est retiré.
M. Jean Arthuis, président de la commission. - La commission des finances a examiné ce matin un projet de décret d'avance pour le budget annexe « Contrôle et exploitation aériens ». Ce projet de décret prévoit un emprunt de 65 millions d'euros sur huit ans, pour faire face à un besoin de trésorerie d'une huitaine de jours. La commission y a donné un avis défavorable afin d'inciter le Gouvernement à trouver une autre solution de financement. Il est inadmissible qu'en raison de lourdeurs administratives, l'État contracte des emprunts à moyen terme pour boucler ses fins de mois !
La séance est suspendue à 19 h 40.
présidence de M. Guy Fischer,vice-président
La séance reprend à 21 h 40.
Enseignement scolaire
M. le président. - Nous allons examiner les crédits de la mission « Enseignement scolaire » ainsi que l'article 54 ter.
Intervention des rapporteurs
M. Gérard Longuet, rapporteur spécial de la commission des finances. - Je me réjouis de la présence des deux ministres en charge de cette mission « Enseignement scolaire » au banc du Gouvernement, la rue de Grenelle mais aussi la rue de Varenne, pour rester dans le VIIe arrondissement... Mon intervention au nom de la commission des finances sera sobre. Elle s'articulera autour de trois réflexions à commencer, cher Luc Chatel, par la politique d'enseignement personnalisée que vous avez poursuivie. Cette politique qu'avait fait voter en 2005 notre actuel Premier ministre, alors ministre de l'éducation, consistant à mobiliser les moyens de l'éducation nationale vers la réussite individuelle des élèves témoigne de la volonté de votre administration et des enseignants français de s'intéresser d'abord et avant tout aux élèves dont il a la charge. Les programmes d'enseignement personnalisé de réussite éducative sont désormais appliqués à l'école primaire et au collège. Cette réforme a été menée à moyens constants, ce qui n'est pas une mince performance. Avec l'aide personnalisée en CM1 et en CM2, réalisée grâce à un redéploiement des heures supprimées le samedi matin, les cas sensibles peuvent surmonter les obstacles qui freinent leur acquisition du socle de connaissance. Les élèves de l'éducation prioritaire bénéficient de l'accompagnement éducatif dans le primaire et, surtout, au collège, période particulièrement sensible.
Vous avez réussi cela avec des moyens importants : 280 millions d'euros pour les heures supplémentaires. Je vous félicite aussi pour la réussite des stages de mise à niveau pour les CM1 et CM2, financés eux aussi par des heures supplémentaires. Ces deux mesures reposent sur le volontariat. J'attire l'attention là-dessus, non parce que ce serait une limite mais pour en faire un axe de réflexion, dans la perspective d'une extension vers les élèves aussi.
La prise en charge des enfants handicapés coûte à votre ministère 300 millions, dont la commission des finances se demande s'ils ne devraient pas plutôt être, au moins partiellement, à la charge de la mission « Solidarité ».
Je vous félicite aussi pour ce que vous avez fait, dans le cadre de la réforme générale du lycée, pour l'aide personnalisée. Cela se double d'une politique beaucoup plus difficile que vous avez su mener sans compromettre le principe de la présence des adultes devant les élèves : le non-remplacement d'un retraité sur deux. Les chiffres sont spectaculaires : 8 512 suppressions en 2007 ! Vous vous êtes attaché à diminuer le nombre de surnuméraires, ces enseignants qui n'ont pas d'élèves en face d'eux. En 2008, le nombre de suppressions a atteint les 11 200 ; vous avez poursuivi la réduction des surnuméraires et mené une action drastique contre les détachements et mises à disposition. Votre administration s'est en outre attachée à la réforme des remplacements et 13 000 emplois sont maintenant supprimés sans qu'ait encore été mise en place de l'agence nationale qui avait d'abord été évoquée pour les remplacements. Pourquoi, d'ailleurs ?
Vous avez décidé de limiter la diminution des effectifs des Rased ; vous avez eu raison car ces réseaux vont dans le sens de votre politique de personnalisation. Vous prévoyez pour cette année la suppression de 16 000 emplois par la réforme des concours de recrutement, c'est-à-dire par un pur jeu comptable qui tire les conséquences administratives d'une modification des statuts.
Comment avez-vous pu poursuivre une telle diminution des effectifs sans réduire le nombre d'adultes face aux élèves ? Par des heures supplémentaires, par la diminution du nombre des surnuméraires -ceux-ci ne sont pas fictifs, c'est une friction indispensable. Désormais, il vous revient de jouer plutôt sur des effectifs qui ne figurent pas dans vos effectifs budgétaires bien qu'ils soient présents dans les établissements : les auxiliaires éducatifs, qui sont rémunérés sur les crédits de fonctionnement.
La commission des finances a le sentiment que l'on touche maintenant au bout de l'exercice. Il faudra désormais réformer l'offre éducative elle-même, en ayant à l'esprit que, selon l'OCDE, la France compte à la fois le plus grand nombre d'heures de cours et le plus petit nombre de jours. Le nombre de départs en retraite prévus est de 30 000 en 2011 et d'un peu moins en 2012. Vous ne pourrez faire face à l'obligation de ne pas remplacer 30 000 emplois sans réforme profonde de l'offre. On pourrait ainsi utiliser le Centre national d'enseignement à distance pour délivrer des enseignements dispersés. On pourrait aussi procéder à des recoupements de filières dans des disciplines technologiques en recourant à l'internat. On pourrait également relancer la bivalence des enseignants pour optimiser les moyens.
Je conclurai en évoquant trois sujets récurrents : les établissements publics d'enseignement primaire, prévu par la loi et toujours pas mis en place ; le principe de l'expérimentation pour la direction des lycées, toujours pas mise en oeuvre ; enfin -mais la présence de deux ministres me rassure et me réjouit-, une bonne coopération pour l'enseignement technologique agricole, où les promesses ont été tenues lentement, tardivement et incomplètement. C'est ce qui motive l'amendement que je défendrai. (Applaudissements à droite)
M. Thierry Foucaud, rapporteur spécial de la commission des finances. - C'est peu dire que la mission « Enseignement scolaire » constitue un bon instrument de mesure des choix politiques d'un gouvernement : l'école est le vécu quotidien de 12 millions de jeunes et c'est à l'aune de la qualité d'un système éducatif qu'on mesure la réalité du progrès social. Si l'on sait faire pour la santé, pour l'école, pour le logement, pour répondre aux besoins des plus vulnérables, eh bien, on mène une politique de progrès et de développement social.
Je ne peux partager la logique comptable qui préside à la définition de la politique éducative du pays, une logique comptable dont nous trouvons la traduction brutale avec la suppression de 16 000 emplois et la précarisation de la formation initiale des enseignants. La recherche incessante d'économies, dont témoigne le débat sur le bac professionnel en trois ans, tend à comprimer autant que possible la dépense d'éducation. En étant cantonné sous les 60 milliards d'euros, ce budget n'échappe pas à la règle imposée : l'école publique doit payer sa part dans l'effort de réduction des déficits, et tant pis pour nos jeunes.
On ne peut, pourtant, réduire la demande sociale d'apprentissage, d'enseignement, d'éducation, à quelque moyenne, statistique ou donnée chiffrée quelconque. Une classe de 25 élèves dans une école du VIe arrondissement, ce n'est pas pareil que 25 élèves dans une école du Val Fourré ou même 20 élèves dans la classe de niveau d'une école de campagne fonctionnant en regroupement pédagogique des enfants de plusieurs communes d'un même canton. Il faut partir du terrain et ne pas se contenter de la règle à calcul.
Les quelques secteurs où vont augmenter les effectifs des équipes éducatives n'auront pas ce qui est nécessaire pour la mise à niveau de leurs moyens, tandis que les secteurs victimes des ajustements à la baisse se retrouveront dangereusement dépourvus. Pour les postes qu'il faut créer dans les académies d'outre-mer ou dans celle de Montpellier, on est loin du compte. Là où l'on ferme des écoles, où l'on réduit l'offre éducative dans les collèges et les lycées, les dégâts risquent fort d'être irréversibles, notamment en zone urbaine sensible où jouent à plein les effets d'éviction découlant des politiques menées depuis 2007.
Comment ne pas être inquiet en voyant la suppression progressive de la carte scolaire et les aménagements des rythmes scolaires, avec la suppression de l'école le samedi ? Comme on pouvait s'y attendre, la suppression progressive de la carte scolaire a produit ses effets d'éviction dès l'annonce de l'expérimentation.
Déjà, des rapports montrent que les établissements présumés les plus «difficiles » ont perdu leurs élèves les plus brillants ou les mieux intégrés, ce qui permet à quelques établissements plus réputés de se donner bonne conscience et ghettoïse un peu plus encore les établissements d'origine de ces élèves. Même la Cour des comptes le met en évidence ! La mobilité des élèves, que la suppression de la carte scolaire est censée encourager, joue toujours dans le même sens et elle justifie la suppression de moyens dans les établissements délaissés. Une sorte de « mobilité asymétrique », comme la fongibilité asymétrique des crédits de personnel d'après la Lolf.
Ce que le Gouvernement attend d'ailleurs des choix des parents d'élèves eux-mêmes, c'est qu'ils contribuent ainsi, « à l'insu de leur plein gré », à la maîtrise de la dépense publique pour l'éducation. La fermeture de l'école le samedi obéit à la même logique, alors même que les rythmes scolaires en France ne sont pas insupportables et que le nombre de jours de classe y est souvent moins élevé qu'ailleurs : 140 par an contre une moyenne de 185 dans les pays de l'OCDE. Cette fermeture permet quelques menues économies -en décharges d'enseignement par exemple- qui, mises bout à bout, finissent par comprimer les dépenses budgétaires.
Je ne suis pas convaincu que ces choix politiques, traduits dans les écritures budgétaires de cette loi de finances, soient les plus à même d'atteindre les objectifs ambitieux de la loi Fillon pour l'avenir de l'école. Co-rapporteur des crédits de l'enseignement scolaire, je pense même que c'est tout le contraire.
J'aurais pu parler des Rased dont l'efficacité est prouvée et que vous décidez de ne pas pérenniser, pour bricoler avec les accompagnements scolaires.
Pour toutes ces raisons, je ne vous invite pas à aller dans le sens de la commission.
M. Jean-Claude Carle, rapporteur pour avis de la commission de la culture. - Je dispose de cinq minutes pour 60 milliards : je n'aurai pas l'orgueil de dire que chaque minute de mon intervention représente 12 milliards ! (Sourires)
Ce budget de l'enseignement scolaire témoigne du maintien de l'effort gouvernemental en faveur de l'éducation, dans un contexte pourtant difficile. Je me félicite que la nécessité de maîtriser les dépenses publiques n'ait pas conduit à abandonner les réformes ambitieuses dont le système scolaire a besoin.
Les crédits de personnel représentent 93 % de ce budget, et il faudrait encore y ajouter les rémunérations inscrites sur les crédits d'intervention de la mission. Autant dire que beaucoup repose sur la politique de ressources humaines, quelle que soit l'importance des réformes pédagogiques, que je ne conteste pas, bien au contraire. La rénovation pédagogique ne verra pas le jour sans une rénovation des ressources humaines. Notre société, où la valeur caractéristique de la courbure d'espace-temps semble passée en quelques décennies de la journée à la nanoseconde, exige du secteur public, comme du secteur privé, une réactivité optimale appuyée sur une connaissance profonde des réalités socio-économiques. La modernisation de la gestion des recrutements, des carrières et des compétences des enseignants et des autres personnels doit habiter toutes vos démarches, monsieur le ministre.
Le schéma d'emplois de la mission est largement issu de la réforme de la mastérisation. Je soutiens sans réserve la réforme du recrutement des enseignants mais il faut porter attention à la définition des maquettes des nouveaux mastères ainsi qu'à l'organisation des stages d'observation et en responsabilité dans les classes, afin que l'élévation du niveau de connaissances s'accompagne d'un développement parallèle des qualités pédagogiques.
Tous les nouveaux mastères doivent permettre aux étudiants de connaître l'organisation du système éducatif et du marché du travail. Ainsi, les futurs enseignants pourront aider leurs élèves à élaborer un projet professionnel et à choisir l'orientation adéquate.
Sous l'impulsion de vos prédécesseurs, et notamment de Xavier Darcos, monsieur le ministre, la gestion des ressources humaines de l'éducation nationale s'est améliorée, particulièrement en matière de surnombres disciplinaires. Mais, les efforts doivent se poursuivre, surtout pour les remplacements d'enseignants.
En outre, il est urgent de combler le manque de médecins et d'infirmiers scolaires. L'exercice libéral ou en hôpital est plus attractif qu'une carrière au sein de l'éducation nationale et les difficultés de recrutement sont accrues dans les zones rurales ou les zones urbaines sensibles. Face à cette carence, il semble souhaitable de contractualiser avec la médecine libérale.
Je salue l'ampleur de la rénovation engagée depuis un an dans l'enseignement primaire. Reste un point capital qui n'est pas abordé de front par la réforme : le pilotage local de la politique éducative. La rénovation du statut des directeurs d'école devrait être très rapidement entreprise et je propose qu'on leur attribue un plein statut de chef d'établissement en adéquation avec leurs nouvelles responsabilités. Cette transformation irait de pair avec la création des établissements publics d'enseignement primaire, les Epep. La loi d'août 2004 prévoyait une expérimentation de ce dispositif, soumise à la publication d'un décret en Conseil d'État, qui n'a toujours pas eu lieu. Je le déplore car l'ampleur de la réforme du primaire appelle une redéfinition parallèle de sa gouvernance. J'ai confiance dans votre volonté, monsieur le ministre, d'agir sur ce terrain.
Nous considérons avec beaucoup de bienveillance le budget de l'éducation nationale. Cependant, inquiète du mauvais sort réservé à l'enseignement agricole...
Mme Nathalie Goulet. - Ah !
M. Jean-Claude Carle, rapporteur pour avis. - ...la commission de la culture et de l'éducation a émis un avis de sagesse sur la mission « Enseignement scolaire ». Mais le Gouvernement a entendu nos inquiétudes, le ministre de l'agriculture est présent, ce qui est rare et qu'il convient de saluer. C'est pourquoi je suis désormais favorable à l'adoption de ce budget, sous réserve de l'adoption de l'amendement de Gérard Longuet et du président Legendre et de l'engagement du Gouvernement de remédier à la situation inacceptable de l'enseignement agricole. (Applaudissements à droite et au centre)
Mme Françoise Férat, rapporteur pour avis de la commission de la culture. - Tout au long des neuf années pendant lesquelles j'ai officié en qualité de rapporteur pour avis, j'ai constaté la lente détérioration de l'enseignement agricole. Les 38 millions du programme 143, votés par notre assemblée l'an passé, m'avaient fait espérer en l'avènement d'une ère plus favorable pour l'enseignement agricole. Ce projet de loi de finances m'a déçue. Certes les 38 millions, après un gel de six mois, ont été débloqués et utilisés, permettant notamment de revaloriser la subvention aux organismes de formation des établissements privés et de réduire le report de charges du temps plein et du rythme approprié. Ces reports avaient atteint un niveau insupportable et minaient la crédibilité des engagements futurs de l'État. Je me réjouis de cet apurement qui avait largement motivé mon amendement l'an passé. Malheureusement, ce projet de loi de finances n'a repris qu'une faible partie des 38 millions octroyés grâce au Sénat. Les crédits du programme 143 enregistrent donc une baisse de 15,6 millions. La situation des établissements du rythme approprié est particulièrement difficile car il persiste à leur détriment un report de charges de 8,5 millions et la dotation 2010 ne prévoit pas de poursuivre le rattrapage. Or la subvention versée au rythme approprié comprend la rémunération des enseignants. C'est donc l'offre de formation et la capacité d'accueil des établissements qui sont directement touchées.
De plus, les suppressions de postes d'enseignants sont préoccupantes : 201 seraient supprimés pour 306 départs à la retraite. Deux départs à la retraite sur trois ne seraient donc pas remplacés, ce qui est nettement plus sévère que la règle du « un sur deux ». Cette rigueur particulière à l'égard des enseignants ne peut que conduire, inexorablement, à la réduction des effectifs scolarisés. Entre les rentrées 2005 et 2008, l'enseignement agricole a perdu 5 500 élèves sur un effectif de 170 000 environ. Cette diminution ne peut s'expliquer que par le verrouillage de l'offre, puisque je constate sur le terrain combien la demande des familles est forte.
Malheureusement, les fermetures de classes s'accélèrent : 65 sont prévues l'année prochaine après les 25 de cette année. Ce resserrement de l'offre de formation est particulièrement préjudiciable dans les zones rurales et remet en cause la mission d'aménagement du territoire de l'enseignement agricole. Je ne peux m'expliquer cette limitation du volume de cet enseignement, d'autant que ses performances en matière d'insertion professionnelle et de poursuite d'études dans le supérieur sont remarquables et reconnues par tous.
Ces succès témoignent de sa capacité à rester à l'écoute des territoires et des mutations du monde économique. Contrairement à l'image trop facilement véhiculée, peu de ses diplômés s'installent comme agriculteurs. Ils poursuivent une grande variété de carrières, y compris dans les services et les métiers du développement durable, qui ne manqueront pas de se développer dans les années à venir. Sans doute serait-il opportun de donner à cet enseignement une nouvelle dénomination qui mettrait en avant son ancrage territorial. Peut-être pourrait-il s'appeler « enseignement technique rural » ou « enseignement de l'environnement » ou « environnement et ruralité » ? Le concours est ouvert... Pour assurer la pérennité de l'enseignement agricole, un vrai régime de coresponsabilité entre les deux ministères de l'agriculture et de l'éducation nationale doit être mis en place. C'est là l'esprit même de la Lolf, tant vantée, qui devait abattre les cloisonnements administratifs mais qui est largement battue en brèche dans la pratique. Une coopération plus étroite avec l'Éducation nationale accélèrerait la diffusion des bonnes pratiques pédagogiques et administratives, tout en générant des économies grâce à la mutualisation des moyens. J'espère qu'il sera ainsi possible de regagner des marges de manoeuvre budgétaires pour l'enseignement agricole, avant que ne soit menacée sa capacité d'innovation. Des actions pourraient être rapidement lancées dans l'apprentissage des langues, l'information et l'orientation des élèves. On pourrait aussi envisagé de progresser encore dans l'organisation des concours de recrutement et des épreuves d'examen nationaux. Cependant, il faut éviter toute absorption au sein de l'Éducation nationale : cette solution de facilité n'est souhaitée ni par les enseignants, ni par les familles.
La mutualisation des moyens doit respecter la singularité de chacun des deux systèmes.
Déçue du sort de l'enseignement agricole, la commission de la culture avait décidé d'émettre un avis de sagesse. Le Gouvernement a cependant tenu compte de nos critiques et nous a assurés, d'une part, qu'il déposerait un amendement en loi de finances rectificative et, d'autre part, qu'il soutiendra l'amendement déposé par MM. Legendre et Longuet. J'approuve ces initiatives, qui me conduisent, à titre personnel, à émettre un avis favorable à l'adoption de ces crédits. (Applaudissements à droite, au centre et au banc des commissions)
Mme Brigitte Gonthier-Maurin, rapporteur pour avis de la commission de la culture. - Je regrette les conditions difficiles dans lesquelles il m'a fallu préparer mon avis sur le budget de l'enseignement professionnel : les documents budgétaires restent déficients, certains indicateurs de performance ne sont pas même renseignés et le ministère n'a pas été en mesure de me fournir en temps utile des données précises sur la rentrée 2009.
Si je n'étais pas hostile, par principe, à la possibilité de conduire certains élèves en trois ans jusqu'au baccalauréat professionnel, je m'étais inquiétée du sort des élèves les plus fragiles. Hélas, la réforme a produit une onde de choc qui a profondément déstabilisé l'enseignement professionnel. Menée dans la précipitation et sans doctrine pédagogique claire, elle a créé bien des dysfonctionnements. Pour assurer l'accompagnement personnalisé, les enseignants et les chefs d'établissement sont livrés à eux-mêmes. L'autonomie des établissements peut créer deux écueils : une rupture d'égalité, en l'absence d'un cadre national fort, entre les territoires et entre les élèves ; la multiplication des marchandages entre enseignants et chefs d'établissement, qui ne peuvent que diviser les équipes et favoriser une concurrence stérile entre les projets.
La carte des formations est un enjeu crucial. L'offre de CAP a augmenté, pour absorber les flux jusqu'à présent dirigés vers le BEP. Mais attention à ne pas ainsi favoriser à l'excès l'orientation vers le CAP à l'issue de la 3e. L'accès au baccalauréat ne saurait être réservé à une minorité, au risque de renforcer l'inégalité d'accès à l'éducation et de freiner l'élévation du niveau général de qualification, à l'opposé des objectifs affichés par le Gouvernement. Il faudra porter une attention particulière aux élèves de 3e en difficulté, notamment issus de classes d'insertion. Aucun ne doit être laissé de côté. Enfin, la cohérence des formations doit être assurée : si ne coexistent pas sur un même territoire une offre de CAP et de bac professionnel dans des spécialités proches, les élèves n'auront pas le choix et iront au plus proche. L'efficacité des passerelles est en jeu.
La certification intermédiaire méritera une évaluation attentive. Le BEP est un diplôme reconnu par les branches professionnelles et bien identifié par les entreprises. Qu'en sera-t-il de sa version rénovée, ainsi rebaptisée ? L'articulation de la certification intermédiaire et des programmes scolaires menant au baccalauréat mérite d'être clarifiée. Le choix du contrôle en cours de formation peut remettre en cause l'égalité entre élèves et la valeur du diplôme.
Pour le recrutement des professeurs de lycées professionnels, le concours externe ne sera plus ouvert aux candidats justifiant de huit ans de pratique professionnelle et d'un diplôme de niveau V. Écarter ainsi des personnes peu qualifiées mais bénéficiant d'une solide expérience n'est pas justifié. Je demande que soit rétablie cette possibilité, supprimée par le décret du 28 juillet 2009.
J'en viens à l'orientation. L'idée d'un parcours progressif tout au long du collège et du lycée n'est pas sans intérêt, mais les différentes séquences de la 5e à la 3e manquent de cohérence. Je reste convaincue qu'il faut prévoir un accompagnement dans la durée par un adulte référent, lequel ne doit pas pour autant se substituer aux conseillers d'orientation-psychologues, dont on éteint le recrutement alors même que leur effectif actuel est déjà trop bas. Je souhaite que cette tendance puisse s'inverser.
La déstabilisation de la voie professionnelle, la déficience des dispositifs d'orientation, gouvernés par une logique utilitariste, me conduisent à émettre, à titre personnel, un avis défavorable à l'adoption de ce budget. (Applaudissements à gauche)
Interventions des orateurs des groupes
M. René-Pierre Signé. - Notre école, monsieur le ministre, ne va pas bien. L'échec scolaire frappe tous les cycles et le nombre des réformes menées depuis quelques années, la suivante gommant la précédente, montre assez leur inefficience.
L'enseignement scolaire, au coeur de notre socle républicain, doit être une priorité nationale, et non pâtir d'arbitrages budgétaires. Si le budget de la mission « Enseignement scolaire » demeure le premier de l'État, il fait preuve, comme les années précédentes, de peu d'ambition. Certes, il augmente de 1,5 %, mais le montant des crédits, 60,84 milliards, est largement inférieur à ce que prévoit la programmation pluriannuelle 2009-2011.
Il reste marqué par le non-remplacement d'un fonctionnaire sur deux, soit 16 000 suppressions d'emplois qui s'ajouteront aux 13 500 de 2009 et aux 11 200 de 2008 : depuis 2003, près de 45 000 postes ont été supprimés dans les collèges et les lycées, à l'inverse de la poussée démographique qui se poursuit à l'école.
Les conséquences sont lourdes pour les personnels, les élèves, les conditions de travail, d'étude et d'enseignement : suppression des options, surcharge de classes, alourdissement de la charge de travail, offre éducative en baisse, remplacements non assurés, multiplication des heures supplémentaires et des compléments de service, non-scolarisation des enfants de 2 ans, réduction des possibilités de formation professionnelle pour les enseignants...
Un regard sur l'enseignement privé permet de constater que le principe de parité n'est pas tenu : les suppressions de postes ne sont pas également réparties, tandis que la loi Carle conforte encore les établissements privés en instaurant une relation marchande entre usager et commune, avec ou sans accord du maire.
La réforme Darcos -semaine de quatre jours, évaluations, nouveaux programmes, stages de remise à niveau, accompagnement éducatif- suscite bien des critiques. L'inspection générale a récemment pointé les perturbations de rythme, l'alourdissement des conditions de travail, une école désorganisée par la multiplication des dispositifs hors et pendant le temps scolaire, les doutes sur l'efficacité du dispositif de l'aide personnalisée en l'absence de moyens supplémentaires.
Le démantèlement des Rased, dont l'efficacité a pourtant été prouvée, ou les incertitudes concernant les EVS ou les AVS, sans statut et pourtant indispensables à la scolarisation des enfants handicapés, ajoutent encore une note négative.
Les nouvelles évaluations nationales ? Confusion sur leur finalité, calendrier inadapté, manque de concertation avec les enseignants, absence d'accompagnement des équipes : autant de constats partagés par les enseignants, les parents d'élèves et nombre d'autres acteurs de l'école.
La précipitation est source de bien des maux...
Sur la réforme du lycée, les mobilisations ont poussé le Gouvernement à répondre à des demandes fortes, comme la reconnaissance de la voie technologique, la prise en compte de la diversité des publics scolarisés et le rééquilibrage des séries générales avec une rénovation de la série L.
En seconde, dont la vocation de classe de détermination est réaffirmée, deux enseignements d'exploration, dont au moins un d'économie, sont introduits.
La classe de première s'articulera autour d'un tronc commun représentant 60 % de l'emploi du temps. Grâce à des stages passerelle, les lycéens auront désormais droit à l'erreur et pourront changer de série en cours de première.
La classe de terminale bénéficiera d'un choix élargi d'enseignements spécialisés pour projeter l'élève vers l'enseignement supérieur.
Le tutorat est généralisé. C'est peut-être la meilleure mesure si les moyens lui sont donnés. Mais la forme en reste floue, ce sera aux établissements eux-mêmes de la définir. Toute tentative de confier aux établissements la gestion d'une partie de la dotation horaire, qui serait globalisée, ne fera que renforcer autonomie et mise en concurrence.
Les crédits dévolus à l'enseignement des langues vivantes et des technologies de l'information et de la communication ont diminué de moitié en un an, de même que se sont réduits les partenariats dans les domaines artistique, littéraire, culturel et scientifique.
Malgré quelques mesures intéressantes, cette réforme ne semble guidée que par une volonté d'économie qui accentue le caractère sélectif du lycée et ferme les portes de l'enseignement supérieur aux lycéens qui ont le plus de difficultés.
L'aide aux élèves ne doit pas se résumer à un accompagnement personnalisé, financé par une réduction des horaires d'enseignement.
Le lycée professionnel est peu touché par cette réforme. Le Président de la République a affirmé qu'il n'y aurait pas de nivellement par le bas, ni d'abaissement du niveau d'exigence. II n'est pas inutile de rappeler l'exigence de qualité, si elle s'accompagne de moyens, c'est-à-dire pas de suppression de postes, des pratiques pédagogiques adéquates et des filières suffisamment ouvertes, ce qui n'est pas le cas aujourd'hui.
L'assouplissement de la carte solaire a accentué les phénomènes de ghettoïsation de certains établissements. La réforme de la sectorisation a entraîné une perte d'effectifs jusqu'à 10 % et une concentration des élèves en difficulté dans certains établissements, notamment ceux relevant de l'éducation prioritaire.
Plus encore, au mépris des constats sur les effets positifs d'une scolarisation précoce, le désengagement de l'État vis-à-vis des plus petits se traduit par la création des jardins d'éveil, nouvelles structures d'accueil pour les 2 et 3 ans qui ne sauraient remplacer la maternelle. Les jardins d'éveil, forme de halte-garderie sans grande ambition éducative, vont soustraire les enfants les plus fragiles à ce premier lieu de socialisation et d'éducation.
Avec la disparition programmée des IUFM et la mastérisation, on peut s'interroger sur les moyens consacrés à la formation des enseignants. Le Gouvernement a décidé de relever le niveau de recrutement de bac+3 à bac+5 et veut revenir, sans l'avouer, à une formation disciplinaire et à la certitude que ce métier s'apprend. Les enseignants se formeront sur le terrain. Mais rien, dans le détail, n'est bien établi, en particulier la définition des mastères suivis par ces étudiants. Les jeunes professeurs risquent donc d'arriver fort démunis devant leurs élèves.
L'école subit une crise : il faut donc lui donner les moyens de réhabiliter l'ascenseur social, grippé par des inégalités criantes, par des disparités qui sautent aux yeux dès le départ, mais qui sont tolérées. Il faut reconsidérer, aussi, les savoirs professionnels qui méritent mieux que l'intérêt qu'on leur porte aujourd'hui. L'école publique n'est pas une charge mais un investissement sur l'avenir, un pilier essentiel de notre République, un instrument majeur de l'égalité des chances, toujours réaffirmée mais toujours plus lointaine. Vous faites de l'école une machine à sélectionner, avec une stratégie éducative de tri social : réussite pour les uns, avenir incertain pour les autres.
L'État doit développer une offre de qualité, diversifiée et répartie sur tout le territoire. Oubliant cette obligation fondamentale, le système éducatif peine à réduire les inégalités sociales. Au moment où l'on parle d'identité nationale, l'école doit donner une densité nationale à tous ses élèves. Elle doit marquer la volonté du « vivre ensemble », ce que Renan appelait fort justement le « plébiscite quotidien ». On peut craindre, au contraire, que votre projet porte en lui les prémices d'une école à deux vitesses, à l'encontre des objectifs de l'école républicaine. Nous ne voterons donc pas votre budget. (Applaudissements sur les bancs socialistes)
Mme Françoise Laborde. - Avec 292 millions, l'enseignement scolaire est le premier budget de l'État, ce qui lui permet d'assurer l'une de ses principales missions régaliennes. Ces crédits devraient garantir l'égal accès de tous à un socle commun de connaissances et à un enseignement de qualité, quelle que soit la filière choisie, quel que soit le territoire.
En y regardant de plus près, ces chiffres ne sont malheureusement pas à la hauteur du défi à relever. Comment l'Éducation nationale peut-elle trouver un nouveau souffle pour mener sa nécessaire modernisation avec un budget en hausse de seulement 1,6 % ? Une fois l'inflation déduite, l'augmentation est plus que modeste. Je partage les inquiétudes du monde enseignant et des familles car, à ce rythme, la qualité de l'enseignement pour les générations futures pourrait être sérieusement hypothéquée. Avec des crédits pédagogiques passant de 12,3 à 5,9 millions pour le premier degré de l'enseignement public, quels types de citoyens l'État entend-il former ?
M. Daniel Raoul. - On se le demande !
Mme Françoise Laborde. - Lors de votre audition en commission, vous avez reconnu, monsieur le ministre, certains dysfonctionnements, mais vous n'en avez pas tiré les conséquences. Vous avez aussi rendu hommage « à la politique de gestion des ressources humaines de l'éducation nationale qui participe à l'effort de redressement des finances publiques de l'État ». Vous vous placez dans la logique de la RGPP que je déplore, même si une rationalisation de la gestion des ressources humaines est souhaitable. Encore faut-il savoir au service de quel objectif ? L'effort budgétaire devrait porter sur le personnel, en ouvrant le robinet des recrutements, de la formation et de la titularisation des contractuels. II devrait aussi permettre de tourner davantage l'école, le collège et le lycée vers des activités complémentaires : partenariats culturels, scientifiques, artistiques, ou éducation à la santé et à l'environnement.
On ne peut reprocher à votre gouvernement son immobilisme. Les réformes tous azimuts, menées dans la précipitation depuis un an, suscitent oppositions et incompréhensions chez les enseignants comme dans les familles. A l'école primaire, le service minimum d'accueil, de nouveaux programmes, la semaine de quatre jours et un dispositif d'accompagnement scolaire personnalisé des élèves parallèlement à la suppression des postes Rased ; au collège, l'aide au devoir ; au lycée, la réforme des programmes avec pour objectif de conduire 50 % d'une classe d'âge à un diplôme de l'enseignement supérieur, la rénovation de la voie professionnelle, le bac pro en trois ans ainsi que l'amélioration des passerelles entre les différentes voies de l'enseignement secondaire sans oublier la réforme des IUFM et celle des enseignements artistiques. Toutes ces réformes semblent plutôt creuser les inégalités.
J'en viens aux emplois de vie scolaire (EVS) et auxiliaires de vie scolaire (AVS). Le nombre d'enfants handicapés accueillis en école banalisée n'a cessé d'augmenter pour atteindre, en 2009, 185 000 élèves. Mais 1 300 accompagnants ont été licenciés, en août, à la fin de leurs contrats. Vous dites vouloir pérenniser les 17 000 contrats existants. Mais il ne s'agit pas des mêmes personnes physiques. Je regrette que les compétences acquises se soient perdues dans la nature. Quels moyens consacrerez-vous à la formation professionnelle ? Il n'est pas possible d'intégrer des enfants en difficulté avec du personnel qui n'est pas formé. Il est devenu urgent de mettre en place un véritable statut professionnel pour garantir un service d'accompagnement compétent et de qualité.
J'en viens à la question des réseaux d'aide aux enfants en difficulté, soumis, eux aussi, à la logique de la RGPP. Je l'avais déjà dit lors du budget 2009. Le soutien scolaire ne peut pas remplacer la spécificité du travail effectué par ces personnels spécialisés. Une équipe de chercheurs de l'Université Paris-Descartes a présenté les résultats d'une analyse comparative sur l'efficacité des aides personnalisées et des aides spécialisées type Rased. Les aides personnalisées correspondent à deux heures hebdomadaires de soutien scolaire et permettent la révision de notions non acquises : 20 % des élèves font des progrès grâce à cette méthode. Les aides dispensées par les enseignants spécialisés des Rased sont beaucoup plus diversifiées et complexes : 70 % des élèves ayant suivi cette forme d'aide progressent au niveau des acquisitions scolaires et dans le domaine des compétences cognitives, sociales et relationnelles. Les chercheurs concluent que « la nature de la réponse institutionnelle apportée à la difficulté scolaire a des conséquences directes sur la nature et les finalités de l'école. L'école doit-elle permettre aux élèves d'utiliser des notions de base telles que la lecture, l'écriture et le calcul ou doit-elle également former des citoyens capables de vivre dans une société, d'y apporter une contribution personnelle, de développer leurs compétences et leurs talents ? ».
Le recrutement des autres personnels spécialisés, infirmiers, médecins et psychologues scolaires, est insuffisant. Comment comptez-vous améliorer la prévention santé et l'écoute des enfants et des adolescents si vous n'y consacrez pas plus de moyens ?
Avec le recul, il s'avère que confier les enseignements artistiques aux professeurs d'histoire-géographie était inapproprié, le programme de ces disciplines étant déjà très chargé. Il faut donc faire appel à des enseignants spécialisés. Garantir l'égalité d'accès à la culture, pour tous, par le biais de l'école, est à ce prix. Je l'ai dit vendredi au ministre de la culture. II ne suffit pas de prendre des engagements : les moyens doivent suivre. Comme l'affirme l'académicien Pierre Rosenberg : « L'histoire de l'art est peut-être l'une des meilleures idées de ces dernières années, encore faudrait-il que le ministère se donne les moyens de dispenser un enseignement de qualité plutôt qu'une culture du saupoudrage ». « C'est une discipline à part entière, l'enseigner est un métier qu'on apprend, on ne s'improvise pas professeur d'histoire de l'art ».
Venons-en à la réforme des IUFM et à la mastérisation de la formation des enseignants qui sera effective dès 2011. Rapatrier les IUFM au sein des facs et prévoir des mastères pour revaloriser le diplôme, j'en conviens ! Mais le contenu est inadapté à la réalité de ce métier qui nécessite la maîtrise de connaissances polyvalentes et une formation didactique et pédagogique permettant la prise en charge d'une classe. Par ailleurs, je m'oppose à la suppression de l'année de stage rémunérée, tout comme au fait que les enseignements soient essentiellement théoriques. La formation professionnelle des enseignants, désormais de la responsabilité de l'université, ne sera pas organisée dans les mêmes conditions selon l'université et le parcours choisi, générant ainsi une véritable fracture territoriale. Que se passera-t-il pour les IUFM installés dans les villes moyennes où il n'y a pas d'université ?
Je constate aussi une rupture d'égalité dans la différence de traitement qui est faite entre le privé et le public. Les suppressions de postes dans le budget 2010 interviendront lors d'une diminution d'effectifs de 76 élèves dans l'enseignement privé contre seulement 36 dans le public. Cela se passe de commentaires.
Concernant l'accueil de la petite enfance, la réponse n'est pas satisfaisante. Je regrette vivement que davantage de moyens ne soient pas mobilisés pour financer un service public d'accueil gratuit, et notamment la scolarisation en maternelle à partir de 2 ans.
Pour terminer par une touche positive, j'évoquerai l'initiative heureuse lancée en faveur de l'école numérique rurale en 2009. Cette opération est destinée à attribuer aux communes de moins de 2 000 habitants, un crédit de 10 000 euros en vue d'acquérir du matériel informatique pour équiper leurs écoles. Limitée à 5 000 dossiers, elle a connu un très vif succès avec plus de 8 000 candidatures déclarées. Comptez-vous pérenniser cette opération ?
Les membres du groupe RDSE déplorent la précipitation avec laquelle sont conduites toutes ces réformes et vous demandent de prendre du temps pour l'évaluation et les ajustements. Nous serons particulièrement attentifs aux questions relatives à la laïcité dans l'enseignement scolaire et supérieur.
Nous ne voterons pas ce budget. (Applaudissements sur les bancs du RDSE et sur les bancs socialistes)
M. Alain Vasselle. - (Applaudissements à droite) Je suis chargé de vous dire tout le bien que le groupe UMP pense de votre action, monsieur le ministre. (Exclamations à gauche)
M. René-Pierre Signé. - Voilà de la pommade !
M. Alain Vasselle. - Je souhaiterais quelques éclairages sur trois points, et d'abord sur la réforme du lycée. Je crois le diagnostic partagé : chaque année, 50 000 élèves quittent le lycée sans le baccalauréat et un étudiant sur deux échoue à l'issue de la première année d'université, parce que mal orienté.
M. Yannick Bodin. - Cela fait sept ans que vous répétez la même chose ! Qu'avez-vous fait ?
M. Alain Vasselle. - Vous avez été aux affaires et la situation n'a pas évolué !
M. René-Pierre Signé. - Elle était meilleure !
M. Alain Vasselle. - Je salue la méthode, importante dans un ministère aussi sensible que le vôtre, une méthode faite d'écoute et de dialogue avec les professionnels, les enseignants et les parents ; c'était un préalable indispensable. C'est d'ailleurs la méthode que le Gouvernement privilégie dans tous les domaines. (Exclamations à gauche) Quels changements les lycéens vont-ils connaître ? Quid d'une orientation plus ouverte et plus progressive, d'un apprentissage renforcé des langues, de l'accès à la culture, de l'enseignement de l'économie ? J'ai reçu, comme d'autres, des courriers d'enseignants de cette dernière discipline qui s'inquiètent de la réforme et du contenu de l'enseignement. Je passe sur le nécessaire rééquilibrage des voies générale et technologique pour relever que l'accompagnement personnalisé des élèves est la mesure forte de la réforme. Je sais, monsieur le ministre, votre détermination à répondre aux attentes de notre jeunesse et à celles du pays.
Je ne m'attarderai pas sur la réforme de l'école élémentaire, que les enseignants se sont appropriés et qui est un succès, sinon pour regretter qu'un enseignement précoce des langues étrangères ne soit pas assuré dès la maternelle. J'ai eu l'occasion de m'en entretenir à plusieurs reprises avec le président Legendre. Des expériences sont menées dans certaines régions, notamment frontalières...
M. Gérard Longuet, rapporteur spécial. - C'est vrai !
M. Alain Vasselle. - ...mais il semble qu'elles s'essoufflent. Grâce à un partenariat entre l'éducation nationale, le conseil général et les collectivités locales, une expérimentation est menée dans mon département de l'Oise pour dispenser aux élèves six heures de langue étrangère dès la moyenne section de maternelle. Cette formule pèse sur le budget des collectivités mais les résultats, évalués par le rectorat et l'inspection d'académie, sont très positifs. Les enfants qui ont suivi un tel enseignement arrivent en 6e avec un acquis. Cette démarche mériterait d'être généralisée. Quel est votre sentiment, monsieur le ministre ?
Dernier point, que vient d'évoquer Mme Laborde, l'école numérique rurale, qui connaît un véritable succès, au point que votre ministère a été un peu débordé et n'a pu satisfaire toutes les demandes -120 sur 160 l'ont été dans mon département. Entendez-vous prolonger l'opération ? Je relève que certaines communes de l'Oise éprouvent des difficultés pour encaisser les subventions qui leur permettraient de boucler le financement des opérations. L'inspection d'académie a assoupli la procédure mais on continue à m'interpeller sur le sujet ; des facilités supplémentaires seront-elles accordées ?
Je confirme que le groupe UMP votera ce budget. (Applaudissements à droite)
Mme Brigitte Gonthier-Maurin. - Je déplore que l'examen de cette mission, fondamentale pour l'avenir de notre jeunesse et premier budget de l'État, se déroule à une heure aussi tardive. C'est d'autant plus regrettable que ce budget est une étape décisive dans la déconstruction du service public de l'éducation engagée depuis plusieurs années. Réduire la dépense et les emplois publics, voilà l'objectif. Budget après budget s'égrènent les suppressions d'emplois : 16 000 en 2010, après les 13 500 de 2009 et les 11 200 de 2008 -plus de 13 000 même cette dernière année au vu de l'exécution budgétaire, notamment au détriment du premier degré pour lequel le plafond d'emplois a été sous-utilisé de 1 232 postes. Malgré l'augmentation des effectifs d'élèves, les créations de postes votées par le Parlement n'ont pas été au rendez-vous ; l'exécution 2008 a même été inférieure au plafond 2006 ! Voilà pour les promesses non tenues. C'est là toute la perversité de la notion de plafond d'emplois, qui mène toujours à la compression des effectifs.
En lieu et place des créations de postes, le Gouvernement généralise, institutionnalise les heures supplémentaires, au point d'en faire un mode habituel de gestion, qui favorise le développement de la précarité. La situation est particulièrement criante dans le second degré, où le nombre de contractuels a augmenté de 21 % en deux ans -et de 18 % au collège qui, dans la même période, a perdu 8 000 postes. Dans le premier degré, le nombre de postes de professeurs des écoles mis au concours est en baisse depuis 2008 et le recours aux listes complémentaires a été considérablement réduit, quand il n'a pas disparu. Tout cela alors que les effectifs d'élèves sont en hausse en 2010 dans l'élémentaire comme dans le préélémentaire. Et si l'on en croit l'Insee, la tendance va se poursuivre. Comment ferez-vous dans les années à venir, monsieur le ministre, qui verront par ailleurs un départ massif à la retraite d'enseignants ? Comment garantirez-vous le face-à-face pédagogique ?
Certains recteurs se tournent dès maintenant vers des vacataires, ce qui permet de faire des économies, tant sur la formation que sur la rémunération. Le problème se posera avec acuité à la rentrée 2010, car 9 182 postes d'enseignants stagiaires du premier degré sont supprimés, soit 2 296 ETPT, et vous n'en créez que 2 182. Le solde est négatif, alors que vous prévoyez d'accueillir 5 300 élèves supplémentaires. Que deviendra le taux d'encadrement des élèves ?
Un mot sur les conditions d'accueil à la maternelle. Tandis que les effectifs du préélémentaire sont revus à la hausse en 2010, le Gouvernement a dit son hostilité à la scolarisation des 2-3 ans. Je crains qu'elle ne disparaisse pour de bon. Elle est déjà en chute libre du fait de la pression démographique et du manque de postes et de classes. Le problème touche aussi les 3 ans de fin d'année. L'État ne se dote plus des moyens de remplir les obligations imposées par le code de l'éducation. Le développement des jardins d'éveil n'est pas la réponse, j'ai déjà eu l'occasion de le dire ici. Il faut au contraire plus et mieux d'école maternelle et la possibilité d'accueillir les enfants de 2 ans. Investir dans l'école maternelle, c'est investir pour l'avenir de chaque élève.
Votre réforme prétend « revaloriser » la formation des enseignants ; la communauté éducative y voit au contraire une détérioration de la formation initiale et un risque de précarisation pour ceux qui resteront sur le carreau. Mais vous touchez le jackpot : 173 millions d'économies dans le premier degré, 252 dans le second !
Après avoir supprimé 40 000 postes en trois ans, comment affirmer que l'offre éducative n'est pas dégradée ? Classes surchargées, enseignants non remplacés, options supprimées... « Si l'on veut continuer à diminuer les emplois, dans une optique de réduction de la dépense publique à long terme, il faudra modifier en profondeur le système éducatif et les méthodes enseignement » : c'est M. Censi, rapporteur UMP pour ce budget à l'Assemblée nationale, qui le dit.
Votre solution miracle ? L'aide individualisée. Ces « nouveaux services » ont l'avantage d'aller de pair avec la généralisation des heures supplémentaires et de ne répondre à aucun cadrage national : aux établissements de se débrouiller, et qu'importe l'égalité de traitement... Depuis trois ans, les crédits qui relèvent de ces missions fondent comme neige au soleil : moins 12 % au collège, alors que le nombre d'élèves augmente depuis 2007. Vous revendiquez toujours plus d'autonomie, pour les lycées, mis en concurrence, et bientôt pour les écoles.
Loin d'un service public de l'éducation gratuit et laïc pour tous, oeuvrant à l'émancipation de chacun, votre projet, purement utilitariste, vise l'employabilité immédiate, en invoquant la stratégie dite de Lisbonne. Voyez l'exemple de l'enseignement agricole : à force de restrictions budgétaires, il est en état de choc. Voter ce budget, c'est généraliser ce que chacun dénonce pour l'enseignement agricole. Mon groupe votera contre. (Applaudissements sur les bancs CRC-SPG)
M. Luc Chatel, ministre de l'éducation nationale, porte-parole du Gouvernement. - Jamais le monde n'a eu autant besoin d'éducation. Le diplôme est la meilleure arme anticrise : avec un diplôme, un jeune a cinq fois plus de chances de trouver un emploi que sans ! L'école est le lieu où se prépare la France de demain, qui misera plus encore qu'aujourd'hui sur l'intelligence pour relever les défis.
Ce projet de budget doit nous permettre de remplir les missions que la Nation a confiées à l'école : instruire, éduquer, insérer les jeunes dans la vie professionnelle, transmettre les savoirs qui forment notre culture commune, aider chaque élève à affermir ses goûts, à exercer son esprit critique, à forger un projet d'avenir, l'accompagner vers les responsabilités de l'âge adulte. Y a-t-il de plus beau projet ?
Les crédits des 5 programmes relevant de ma compétence s'élèvent à 59,6 milliards, en progression de 1,6 % à périmètre constant. L'éducation nationale reste le premier budget de l'État.
Ce projet de budget concrétise les engagements pris par le Président de la République : adapter l'éducation nationale à de nouveaux défis, favoriser l'égalité des chances, participer à l'effort de redressement des finances publiques tout en menant une politique ambitieuse de gestion des ressources humaines.
Quels sont ces nouveaux défis ? Le monde a changé, les jeunes ont changé. Notre système éducatif doit s'adapter à la diversité de nos élèves : aujourd'hui, ce n'est plus 20 % d'une classe d'âge qui entre au lycée mais 70 % !
Je poursuivrai les réformes substantielles qui ont déjà été entreprises. A l'école primaire et au collège, elles doivent conduire tous les élèves à maîtriser le socle commun de connaissances et de compétences. La réforme de l'enseignement primaire s'appuie sur de nouveaux programmes, axés sur les enseignements fondamentaux, sur des évaluations nationales, sur une nouvelle organisation de la semaine scolaire qui permet...
M. Yannick Bodin. - D'aller à Carrefour !
M. Luc Chatel, ministre. - ...de consacrer deux heures d'aide personnalisée à ceux qui rencontrent des difficultés.
Depuis la loi Fillon, monsieur Vasselle, toutes les classes de CE2, CM1 et CM2 bénéficient d'un enseignement d'une heure et demie de langue vivante par semaine, ainsi que 72,4 % des élèves de CE1 et 31,4 % des élèves de CP.
La rénovation de la voie professionnelle vise à élever le niveau de qualification et à limiter les sorties sans qualification. Tous les jeunes doivent pouvoir obtenir un diplôme de niveau V.
Nous améliorons l'orientation : parcours de découverte des métiers et des formations, développement de la plate-forme d'information multimédia de l'Onisep. L'enjeu de la réforme du lycée est de passer d'une orientation subie à un système plus progressif, qui autorise d'éventuelles corrections de trajectoire et reconnaisse le droit à l'erreur. Mme Gonthier-Maurin suggère qu'un adulte-référent accompagne chaque élève ; nous proposons que les enseignants assurent ce tutorat, en complémentarité avec les conseillers d'orientation.
La modernisation du lycée est un objectif majeur du Gouvernement. La concertation conduite par M. Descoing a abouti à un constat partagé ; c'est sur cette base que j'ai proposé des orientations, qui ont été présentées par le Président de la République le 13 octobre et sont déclinées devant les syndicats depuis novembre. L'objectif est que, dès la rentrée 2010, la seconde soit une classe générale de détermination, comptant deux enseignements d'exploration d'une heure trente par semaine, dont un en économie.
L'apprentissage des langues bénéficiera d'un effort sans précédent : nous aurons recours plus fréquemment au multimédia et aux échanges entre établissements. L'objectif est que les élèves maîtrisent parfaitement leur première langue vivante à l'issue du lycée.
Il faudra aussi ouvrir le lycée sur le monde et la culture et développer la vie lycéenne en confiant de plus amples responsabilités aux lycéens.
M. Longuet a évoqué le coût de cette réforme ; mais celle-ci se fera à moyens constants. Les horaires des élèves ne seront pas alourdis : l'accompagnement personnalisé remplacera certains enseignements traditionnels et entrera dans les obligations de service des professeurs.
Autre défi : l'égalité des chances. Il faut faire en sorte que l'école soit plus juste, en aidant les élèves qui en ont le plus besoin. L'accompagnement éducatif bénéficie déjà à 870 000 élèves, pour un coût de 278 millions d'euros. Nous renforcerons les moyens de l'éducation prioritaire en affectant 1,2 milliard d'euros aux réseaux « ambition réussite » et « réussite scolaire ».
L'assouplissement de la carte scolaire a eu des effets dans les deux sens, madame Escoffier : 20 % des établissements ont vu leur effectif augmenter. Il faudra évaluer les effets de cette mesure. J'envisage de donner la priorité pour le choix de leur collège aux élèves issus des réseaux « ambition réussite » et de stabiliser les équipes éducatives de ces collèges en y affectant des personnes spécialement formées, comme ce fut fait pour les internats d'excellence.
Une école plus juste, c'est aussi une école qui accueille mieux les handicapés. Pas moins de 185 000 d'entre eux sont scolarisés cette année, soit 10 000 de plus que l'année dernière et 40 % de plus qu'en 2005, lors du vote de la loi sur le handicap. De nouvelles unités pédagogiques d'intégration seront créées en 2010. Monsieur Signé, n'ayez aucune inquiétude sur le sort des auxiliaires de vie scolaire : le Gouvernement a prolongé les contrats de 17 000 d'entre eux et décidé de créer 5 000 postes supplémentaires. En vertu d'un amendement d'origine parlementaire, l'État peut aider les associations à reprendre les contrats qui ne peuvent être renouvelés : j'ai signé cet après-midi une quatrième convention de ce type avec une association d'aide aux autistes.
Nous luttons enfin contre la fracture numérique. Dans l'Oise, département dont M. Vasselle est l'élu, 111 projets sur 123 seront financés. Le plan de relance comprenait 50 millions d'euros pour créer 5 000 écoles numériques rurales. Devant le succès de ce dispositif, le Premier ministre a décidé de redéployer ces crédits. Comme je l'ai annoncé hier en compagnie de M. Devedjian, 17 millions d'euros supplémentaires seront débloqués pour répondre aux demandes. Quant aux formalités évoquées par M. Vasselle, j'en informerai mes services afin que les communes puissent recevoir les subventions en temps utile.
Nous comptons définir une gestion des ressources humaines plus ambitieuse, tout en participant à l'effort de redressement des finances publiques. Il n'est pas question de revenir sur l'engagement de ne pas remplacer un fonctionnaire sur deux partant à la retraite. Dans l'éducation nationale, cela se soldera par la suppression de 16 000 postes en 2010 : 18 202 postes de stagiaires disparaîtront du fait de la mastérisation, mais 2 182 postes d'enseignants seront créés dans le premier degré, 144 dans le second degré et 476 dans l'enseignement privé : nous respectons strictement la proportion de 20 % d'emplois supprimés et créés dans le privé. Ces chiffres montrent que nous savons nous adapter aux besoins. Le taux d'encadrement reste inchangé : la qualité de l'enseignement ne pâtira donc pas du non-renouvellement de certains postes.
La contrepartie de cette politique, c'est la revalorisation du traitement des enseignants : 196 millions d'euros y sont affectés dans ce budget et les négociations se poursuivront jusqu'à la fin janvier. Les professeurs en début de carrière toucheront l'équivalent d'un treizième mois.
J'en viens à la réforme de la formation des maîtres. La mastérisation, madame Laborde, répond au double objectif d'améliorer la formation disciplinaire et didactique des futurs enseignants. Les étudiants en licence pourront bénéficier de stages d'observation ; en mastère 1, ils suivront 108 heures de stage d'observation et en mastère 2, le même nombre d'heures de stage en responsabilité. Les lauréats des concours seront pendant un an rémunérés en tant que stagiaires et suivront une formation en alternance : ils passeront les deux tiers de leur temps en classe, un tiers en formation complémentaire. Le transfert aux universités des compétences des IUFM a été engagé depuis la loi Fillon de 2005. Les bâtiments et équipements des IUFM seront affectés, entre autres, à des formations universitaires, en concertation avec leur propriétaire, c'est-à-dire le plus souvent le conseil général.
Moderniser l'enseignement, l'adapter à la situation de chaque établissement, assurer la réussite de chacun : tels sont les objectifs du Gouvernement. (Applaudissements à droite et au banc des commissions)
Mlle Sophie Joissains. - Bravo !
M. Bruno Le Maire, ministre de l'alimentation, de l'agriculture et de la pêche. - Comme le Gouvernement dans son ensemble, je suis personnellement attaché à l'enseignement agricole, qui accueille aujourd'hui plus de 170 000 élèves. Le taux de réussite au baccalauréat y est supérieur à 80 % et le taux d'insertion professionnel de plus de 85 % : c'est un modèle à suivre.
M. Ivan Renar. - C'est pour cela qu'on l'étrangle !
M. Bruno Le Maire, ministre. - Face au désarroi des enseignants et des parents d'élèves, j'ai pris les décisions attendues depuis des décennies : j'ai lancé les assises de l'enseignement agricole public (marques d'ironie à gauche) afin de définir les nouvelles missions de ce secteur, conformément au voeu général. J'ai décidé d'un moratoire sur les fermetures et fusions d'établissements.
M. Jean-Claude Carle, rapporteur pour avis. - Très bien !
M. Bruno Le Maire, ministre. - Le Premier ministre a décidé de rétablir, à la rentrée 2009, 60 équivalents temps plein afin d'accueillir 400 élèves supplémentaires et de résorber les listes d'attente. Grâce à un amendement très constructif de Mme Férat, 38 millions ont été débloqués en 2009. Nous solderons le report de charges de 8,2 millions d'euros par un amendement gouvernemental à la loi de finances rectificative pour 2009.
Toutes ces décisions ont rassuré l'enseignement agricole public quant au soutien du Gouvernement. Mais un budget est toujours perfectible, j'accueillerai très favorablement les propositions de M. Longuet et Mme Ferrat qui visent à donner à l'enseignement public agricole les moyens de remplir ses missions.
M. Pierre Hérisson. - Très bien !
M. Bruno Le Maire, ministre. - M. Chatel et moi-même savons qu'il est temps de renforcer la coopération entre nos ministères, que Mme Ferrat appelle de ses voeux, pour éviter les difficultés récurrentes concernant la gestion des emplois. Nous engageons formellement ce travail qui portera, dans un premier temps, sur la gestion des concours ou encore sur les liens entre deux établissements géographiquement proches. Il en va de notre intérêt, de l'intérêt de l'enseignement public agricole et de l'intérêt des élèves ! (Applaudissements à droite et au centre)
M. Jean Arthuis, président de la commission des finances. - Quelle est la richesse de l'éducation nationale ? Ce sont les enseignants. Leurs salaires et leurs charges sociales constituent, au reste, l'essentiel de votre budget. Avec environ 979 000 emplois inscrits dans le budget pour 2010, la moitié du plafond des autorisations d'emplois de l'État est atteinte. Reste que nous avons quelques difficultés à appréhender la réalité des effectifs. Je m'explique : collèges et lycées, dotés de la personnalité morale, disposent d'un budget et de dotations de l'État. A ce titre, ils peuvent recruter directement des collaborateurs dont le nombre s'élèverait à 97 600 personnes, dont 53 000 assistants d'éducation, 42 500 contrats aidés et plus de 2 000 auxiliaires de vie scolaire.
M. Yannick Bodin. - C'est une bonne chose !
M. Jean Arthuis, président de la commission. - Pour un encadrement de ces effectifs, peut-être faudrait-il donner à ces établissements le statut d'opérateur de l'État, dont jouissent déjà les universités. La question se pose également pour les écoles ; un décret se fait attendre depuis 2004. Une fois leur statut modifié, il serait bon de fixer des règles claires sur les effectifs. Le contrôle du Parlement passe par un renforcement des procédures. Monsieur Chatel, quelles sont vos intentions ?
M. Luc Chatel, ministre. - Le statut d'établissement public local d'enseignement, dont nous avons récemment fêté les 25 ans, autorise lycées et collèges à recruter directement des personnels soit pour leur propre compte soit pour celui des écoles, qui sont dépourvues de statut particulier. Ces contrats n'apparaissent pas dans les effectifs du budget que vous examinez mais dans le budget de fonctionnement pour 1,5 milliard en 2010. Leur nombre est plus élevé que 97 600 si l'on tient compte des 6 000 personnes au titre de l'accompagnement éducatif. Faut-il, au nom de la transparence budgétaire, modifier le statut de ces établissements ? La question n'a pas été abordée lors du colloque organisé pour les 25 ans du statut d'Eple. Sans mesurer les conséquences juridiques d'une telle évolution, je ne suis pas fermé à cette réflexion tout à fait intéressante.
Questions et réponses
M. Claude Domeizel. - Pour la deuxième année, les écoles élémentaires expérimentent l'aide personnalisée mise en place concomitamment à la suppression de l'école le samedi matin. Le démarrage de ce service imposé et non concerté a été difficile. Les directeurs d'écoles ont dû adapter les différents temps scolaires et périscolaires. Selon les écoles et les circonscriptions, l'aide personnalisée, plus ou moins intégrée dans le projet d'école, est dispensée soit le matin avant la classe, soit entre midi et deux heures, soit le soir après la classe. Un vrai casse-tête pour les intervenants mais aussi pour les familles ! Les journées doivent paraître très longues aux enfants, près de dix heures pour ceux allant en garderie le matin et fréquentant cantine et garderie le soir. Certes, l'aide personnalisée est profitable en cas de difficultés passagères, mais je doute qu'elle le soit en cas de difficultés plus marquées. En outre, je regrette la confusion entre l'aide personnalisée et l'intervention des réseaux d'aide spécialisée aux élèves en difficulté, les Rased. Paradoxalement, l'aide personnalisée a mis en lumière le caractère indispensable de ces Rased, dont le maintien est vivement souhaité par les enseignants. Après deux ans d'expérience, réaliser un bilan auprès des enseignants, des enfants, des parents, mais aussi des communes est indispensable. Monsieur le ministre, ne pensez-vous pas qu'il faudrait expertiser l'aide personnalisée à l'aune du service rendu par les Rased ?
M. Luc Chatel, ministre. - L'aide personnalisée a déjà été évaluée. En juillet 2009, l'inspection générale de l'éducation nationale a remis un rapport intitulé « Troisième note de synthèse sur la réforme de l'enseignement primaire ». « Les parents et les élèves ont plébiscité le dispositif. L'aide personnalisée est vue comme un privilège que les élèves demandent pour eux-mêmes », peut-on y lire. Ce dispositif est une avancée et constitue une réponse à la diversité des élèves, évoquée par M. Longuet, qui fait aussi toute notre richesse. Certes, il y a les programmes nationaux, dont je suis le garant en tant que ministre de l'éducation nationale, mais notre système doit s'adapter à chaque élève. Nous avons voulu laisser aux directeurs d'établissement le soin de déterminer, après avis du conseil d'école, leur organisation. Ainsi, dans ma ville de Chaumont, les établissements ont fait des choix différents. Laissons aux communautés éducatives la liberté de s'organiser ! La prise en charge des élèves en grande difficulté relève non de l'aide personnalisée, qui concerne potentiellement tous les élèves, mais des Rased. Quelque 1 500 ont été sédentarisés.
M. Claude Domeizel. - J'ignorais l'existence de ce rapport. J'aurais aimé en savoir plus sur la comparaison entre le service rendu par l'aide personnalisée et par les Rased.
Mme Anne-Marie Escoffier. - Monsieur le ministre, la réforme de la carte scolaire, initiée en juin 2007, entre dans sa phase finale en 2010. Conforté par la hausse des demandes de dérogation, vous souhaitez renforcer les mesures d'assouplissement pour placer, à terme, les établissements d'enseignement et leur projet éducatif au coeur du système scolaire. Si l'objectif est louable, le résultat paraît incertain. La Cour des comptes, les commissions du Parlement, les élèves, et même l'inspection générale de l'éducation nationale relèvent les effets secondaires de cette réforme au regard de l'égalité des chances et de l'équité. D'après l'inspection générale de l'éducation nationale, la réforme serait applicable en ville mais non en milieu rural.
La suppression de la carte scolaire conduit à organiser implicitement un palmarès des établissements scolaires et des équipes enseignantes ; elle réduit les chances de mixité scolaire et sociale ; elle emporte, à terme, la disparition des établissements non sélectionnés. Clivage citadin-rural accru ; distinction entre établissements bien et mal cotés ; remise en cause de l'accompagnement éducatif ; difficultés conséquentes en matière de transport scolaire -bref, une vraie contre-performance !
C'est pourquoi je souhaite connaître les premiers résultats de l'évaluation que vous vous êtes engagé à conduire et les mesures propres, selon vos engagements, à assurer aux établissements qui perdront des élèves la conservation de leurs moyens et la mobilisation de l'équipe enseignante pour améliorer la réussite de leurs élèves. Cette réforme vous paraît-elle vraiment adaptée aux territoires ruraux ? Ne serait-il pas plus raisonnable de suivre le conseil de la Commission et d'étudier à fond les équilibres précaires du milieu rural afin d'éviter une disparition des collèges et lycées de campagne, qui ne ferait qu'amplifier la désertification de nos territoires ruraux.
M. Luc Chatel, ministre. - Lorsque la carte scolaire a été créée, en 1963, elle était justifiée par la construction à la fois de nouveaux quartiers de banlieue et d'établissements scolaires. Quarante ans après, elle a montré ses effets pervers : cette carte subit des contournements, un véritable délit d'initié commis par ceux qui savent au détriment de ceux qui subissent. Il est là, aujourd'hui, le véritable ghetto ! C'est pourquoi nous avons engagé la suppression progressive de cette carte avec de nouveaux critères de dérogation pour les enfants handicapés et boursiers.
Le nombre de demandes s'est accru et deux sur trois de celles qui ont été formulées par les familles d'enfants handicapés ont été satisfaites. Les évolutions sont en cours, il faut aller plus loin : les élèves des « écoles ambition réussite », les ex-ZEP, doivent pouvoir choisir plus facilement leur collège.
Cet assouplissement de la carte scolaire va inciter les établissements à travailler sur des projets. Ceux qui l'ont déjà fait ont vu leurs effectifs augmenter. Ceux dont les effectifs auront diminué pour des raisons de carte scolaire ne seront pas fermés pour autant car je souhaite qu'ils profitent de la situation pour construire leur projet pédagogique, avec des identités fortes, des partenariats.
Je reviendrai dans quelques semaines vous présenter le bilan qui est en cours d'élaboration et vous faire des propositions.
Mme Anne-Marie Escoffier. - Vos « délits d'initiés » posaient moins de problèmes que l'assouplissement de la carte scolaire. Écoutez les inspecteurs d'académie !
Mme Monique Papon. - Le Gouvernement a mis en place, à la rentrée 2009, une réforme du lycée professionnel dont l'objectif est d'amener davantage de jeunes jusqu'au bac professionnel. Les principales orientations de cette réforme ont été approuvées par le Haut-conseil de l'éducation, dans son rapport remis au Président de la République le 17 novembre dernier. Il s'agit d'augmenter le nombre de bacheliers professionnels et de favoriser l'accès à l'enseignement supérieur ; d'améliorer la lisibilité des diplômes pour les élèves et pour les chefs d'entreprise qui les recrutent ; de réduire significativement le nombre de jeunes quittant le système scolaire sans qualification.
Cette réforme a été fondée sur le constat qu'un élève sur deux ayant choisi la voie professionnelle n'allait pas plus loin que le BEP. C'est que le choix d'une filière est particulièrement contraignant pour l'élève. Nous saluons donc la simplification et la souplesse qu'apportent les passerelles entre les spécialisations et entre les filières.
Un baccalauréat en quatre ans, alors que les autres lycées préparaient le leur en trois ans, paraissait pénalisant pour les élèves. Je me félicite donc que l'accès au baccalauréat professionnel soit désormais facilité grâce à la création d'un parcours en trois ans au lieu de quatre. Cependant, je m'interroge sur les conséquences de l'accélération des apprentissages. En effet, pour de nombreux jeunes, la première année de BEP constituait une année de remise en confiance après une scolarité difficile. Pouvez-vous ainsi nous préciser quel est l'avenir des CAP et des BEP ? (Applaudissements sur les bancs UMP)
M. Luc Chatel, ministre. - Il n'y a pas qu'une voie d'excellence, la voie royale que serait le bac général, avec en son coeur la série S. Il faut diversifier les voies d'accès à l'excellence ; c'est la raison d'être du bac professionnel en trois ans, qui met ainsi ses titulaires sur un pied d'égalité avec ceux du baccalauréat général.
Nous travaillons à l'insertion de ces jeunes ; nous ne voulons plus voir tous ces élèves quitter le système éducatif sans diplôme.
Le bac professionnel en trois ans fait du CAP le niveau d'insertion et du BEP une étape dans le parcours vers le bac professionnel.
Mme Monique Papon. - Merci de ces précisions qui vont rassurer les nombreux jeunes qui fondent de grands espoirs sur le bac professionnel.
Mme Brigitte Gonthier-Maurin. - L'opacité du projet de loi de finances sur l'avenir des Rased m'amène à tirer de nouveau la sonnette d'alarme. La loi de finances pour 2009 inscrivait la sédentarisation ou la suppression de 3 000 Rased, soit 1 000 équivalents temps plein travaillé, pour la rentrée ; M. Darcos avait dû reculer face à la mobilisation et il s'était engagé à n'en supprimer que 1 500, soit 500 équivalents temps plein travaillé. Le projet de loi de finances 2009 prévoyait un plafond d'emplois de 318 912 équivalents temps plein travaillé pour le premier degré. Si l'engagement de ne supprimer que 1 500 Rased avait été tenu, le plafond aurait dû être augmenté de 500 équivalents temps plein travaillé, soit 319 412. Or que lit-on pour le plafond d'emplois 2009 ? La même chose que l'an dernier !
Les engagements ne sont donc pas tenus, sauf à penser qu'ils l'auraient été au détriment d'autres postes. Sans doute allez-vous pouvoir m'éclairer.
Je regrette que le ministère ne nous ait pas fourni d'évaluation du dispositif d'aide personnalisée. Les données quantitatives ne disent rien de ce qui est fait pendant ces deux heures hebdomadaires. Quels sont les élèves concernés ? Pour quel type d'activité ? Avec quelle efficacité ?
En septembre 2009, la Fédération nationale des associations de rééducateurs de l'éducation nationale a publié une étude de l'Université Paris-Descartes sur les différences de traitement des difficultés scolaires par l'aide personnalisée et l'aide spécialisée des Rased. L'efficacité de l'aide personnalisée n'est confirmée que pour les élèves dont le niveau, même bas, est homogène. Pour ceux dont les difficultés relèvent d'une multiplicité de facteurs, l'aide rééducative des Rased apporte des progrès scolaires, mais aussi des compétences cognitives, sociales et relationnelles. Or les difficultés des élèves sont souvent d'origine multifactorielle. D'où ma question : allez-vous enfin donner toute leur place aux Rased, qui sont reconnus pour leur efficacité sur le terrain ?
M. Luc Chatel, ministre. - J'ai dit tout à l'heure que le traitement de l'échec scolaire dans le primaire était pour nous une priorité. J'ai donc mis au point un dispositif capable de prendre en charge tous les types de difficultés. D'une part, deux heures hebdomadaires d'aide personnalisée seront dispensées par l'enseignant pour tous les élèves qui en auraient besoin. D'autre part, des stages de remise à niveau, gratuits, seront organisés pendant les congés scolaires pour les CM1 et les CM2 en français et en mathématiques. Les maîtres sont donc là à même de traiter le problème de la majorité des élèves en difficulté. Cela étant, la contribution des Rased évolue : ils n'interviennent plus que pour les élèves en très grande difficulté. A la rentrée de 2009, ils étaient 8 000 pour répondre aux situations que ne peuvent traiter les professeurs des écoles, plus 1 500 maitres itinérants en surnuméraire. Et le dispositif sera reconduit pour la rentrée 2010.
Mme Brigitte Gonthier-Maurin. - Je n'ai pas de réponse à la première partie de ma question... Le ministère entretient la confusion entre les deux types d'aides. M. Darcos m'a répondu l'an dernier que l'échec scolaire devait être traité par les enseignants dans la classe. Or l'aide spécialisée n'est pas réalisée en classe mais ajoutée aux horaires de cours. Que dire du rallongement de la journée scolaire, avec une aide personnalisée souvent réalisée entre midi et deux ou tard en fin de journée ? Et quid des bons élèves qui perdent ainsi pas moins de 540 heures d'enseignement du CP au CM2 ? Les enseignants doivent devenir des super formateurs polyvalents : enseignement, orientation, bivalence pour assurer plus de remplacements, aide aux élèves à la place des Rased. Dans le même temps, les crédits de la formation continue sont réduits. Preuve supplémentaire, s'il en fallait, que ce budget ne repose que sur des logiques comptables.
Mme Françoise Cartron. - Vous nous dites « le monde a besoin d'éducation ». Oui, mais j'ajouterai : l'éducation a besoin de moyens ! Or, en matière de personnel, vous poursuivez cette année la réduction massive entreprise depuis 2002. En 2010, 16 000 postes seront supprimés ; au total, 45 000 postes ont disparu depuis 2003, alors que les effectifs du premier degré ont progressé de plus de 15 000 élèves. Dans la fameuse logique de la RGPP, le Gouvernement a annoncé que deux départs en retraite sur trois devaient être remplacés dans l'enseignement scolaire, contre un sur deux dans le reste de la fonction publique. La réalité est tout autre : le taux de non-remplacement atteindra 47 % en 2010. Les effets se font déjà sentir : dans certaines académies, on doit désormais recourir à des contractuels ou à des retraités pour assurer les remplacements -quand les remplacements sont assurés. Dans certains établissements, les horaires normaux d'EPS ne peuvent pas être assurés, faute d'enseignants. Dans ce domaine comme dans d'autres, l'obsession comptable et la politique du chiffre ne peuvent que dégrader le service public.
L'année dernière, toujours au nom de la rationalisation, le Gouvernement a décidé de supprimer un grand nombre de postes Rased pour les réaffecter à des classes fixes. Les heures d'intervention des Rased ont été remplacées par des heures de soutien assurées par les enseignants. C'était l'un des axes choisi par votre prédécesseur pour lutter contre l'échec scolaire. Dans la réalité, ces heures de soutien, quand elles ont été mises en place, l'ont été le plus souvent au moment de la pause déjeuner, ce qui est en totale contradiction avec les recommandations sur les rythmes scolaires. De plus, aucun contenu sérieux n'a été défini pour ces horaires. En réalité, on a donc sacrifié les Rased, qui accomplissaient un travail remarquable auprès des enfants en difficulté scolaire, pour leur substituer une solution inadaptée, véritable contresens pédagogique.
Quels critères avez-vous retenu pour évaluer ces dispositifs d'aide ?
Jusqu'à quand allez-vous persister à ne remplacer qu'un départ en retraite sur deux, sacrifiant ainsi la qualité de notre enseignement public ? (Applaudissements sur les bancs socialistes)
M. Luc Chatel, ministre. - Les propos du Président de la République, cet après-midi, répondent à votre seconde question.
Nous sommes au moins d'accord sur un point : l'éducation a besoin de moyens. Avec les 59,6 milliards qui lui sont consacrés, c'est le plus gros budget que vous ayez eu à voter ! Malgré le contexte budgétaire contraint, il augmente de 1,6 % ! Depuis 1975, le budget accordé au secondaire a augmenté de 16 % de plus que celui de la moyenne des pays de l'OCDE. S'il suffisait de multiplier les moyens pour obtenir des résultats, nous n'aurions pas 150 000 jeunes qui quittent chaque année le système sans diplôme...
Et nous n'avons pas choisi de tailler dans les effectifs sans nuances puisque nous avons créé plus de 2 000 postes pour le primaire et dans les zones sensibles.
Pour apprécier l'aide individualisée, nous disposons du rapport de l'inspection générale de l'éducation nationale et aussi de l'évaluation des élèves décidée dans le cadre de la réforme, et qui mesurera l'impact de cette aide. Les résultats de ces évaluations seront publics et largement diffusés.
Mme Françoise Cartron. - S'agissant des comparaisons avec les pays de l'OCDE, il faudrait rentrer dans les détails, voir à quoi sont consacrés les moyens et quelles sont les priorités. Les crédits destinés aux élèves en difficulté diminuent et ce n'est pas ainsi qu'on réduira le nombre de ceux qui sortent du système scolaire sans qualification.
M. Yvon Collin. - Sur un budget de presque 60 milliards consacrés à la mission « Enseignement scolaire », le système du remplacement en mobilisera 2,7. Depuis plusieurs années, les parents se plaignent de son inefficacité et les enseignants eux-mêmes le jugent inadapté. Il consiste avant tout à organiser la pénurie. A chaque rentrée, les suppressions de postes dégradent les conditions d'enseignement et compliquent la gestion quotidienne du remplacement.
Dans mon département, le Tarn-et-Garonne, la situation du remplacement dans les écoles primaires est alarmante. Alors que la population scolaire du premier degré a augmenté de 1 140 élèves entre 2006 et 2008, les créations de postes ne suivent pas. Le Tarn-et-Garonne a ainsi la particularité d'avoir un taux de remplacement de 6,95 %, alors que la moyenne de l'académie de Toulouse est de 8,5 % et la moyenne nationale de 8,4 %. Comment faire accepter aux parents cette situation de sous-dotation chronique ? Cette année, l'affectation de deux remplaçants supplémentaires, sur un total de 82, ne suffira pas à rattraper le retard accumulé. D'autant que, sur ces deux postes, un demi-poste a été créé pour compenser la fermeture d'une classe à Montaigu-de-Quercy. Les difficultés sont telles que sept enseignants du Lot voisin ont été intégrés. Mais nous sommes encore loin des moyennes académiques. Et que vont devenir ces postes l'an prochain ?
A la prochaine rentrée, 777 élèves supplémentaires sont attendus dans les écoles primaires du Tarn-et-Garonne. Cela justifie une dotation exceptionnelle, au titre de l'évolution démographique, pour une vingtaine de postes. Si une décision de création de postes de remplaçants est envisagée pour la rentrée 2010, se fera-t-elle au détriment des nécessaires ouvertures de classes ?
Quelles garanties pouvez-vous apporter aujourd'hui pour rassurer des parents et des enseignants très inquiets ?
M. Luc Chatel, ministre. - Je vous accorde que le système des remplacements, trop rigide, doit être amélioré et je m'y emploie. Xavier Darcos avait évoqué la création d'une « agence » de remplacements. Certes, le terme n'était-il peut-être pas adéquat mais une amélioration du système s'impose. J'ai donc confié une mission à Michel Dellacasagrande qui me rendra ses conclusions en début d'année ; j'annoncerai alors des mesures d'amélioration.
Actuellement, 91 % des absences sont remplacées dans le primaire et 96,5 % dans le secondaire mais les taux de mobilisation sont un peu inférieurs. Nous pouvons avoir, dans une académie, des enseignants disponibles, sans besoin de remplacement et, dans l'académie voisine, des besoins mais pas d'enseignants disponibles.
Votre département du Tarn-et-Garonne a reçu une dotation de postes : 16 des 44 créations de votre académie en 2007, et 62,5 % des créations en 2009 alors que vous n'avez que 10 % des effectifs du primaire de l'académie. Je n'ai pas le sentiment que votre département soit mal traité.
M. Yvon Collin. - Le fonctionnement des remplacements ne vous parait donc pas idéal et vous envisagez de l'améliorer l'an prochain, j'en ai pris bonne note. Mais, monsieur le ministre, les chiffres que j'ai cités pour mon département sont parfaitement exacts, et je suis prêt à en parler plus avant avec vous.
Mme Colette Mélot. - La loi de 2005 a renforcé l'effort de scolarisation des enfants handicapés et réaffirmé le droit de chacun d'eux à être scolarisé en milieu ordinaire, le plus près possible de chez lui, au long d'un parcours adapté et continu, les parents étant associés.
Le Président de la République a rappelé, lors de la conférence du handicap, le 10 juin 2008, que la scolarisation des enfants handicapés était une priorité. Pour assurer une scolarisation adaptée, la loi sur la mobilité dans la fonction publique, adoptée en juillet dernier, autorise les associations ayant conclu une convention avec l'État, et après accord entre l'inspecteur d'académie et les familles, à assurer l'aide individualisée ; solution innovante et conforme à l'intérêt supérieur de l'enfant. Pouvez-vous nous rassurer sur sa mise en oeuvre ?
Autre question, celle de la fin de contrat des auxiliaires de vie scolaire, qui ont créé avec l'enfant des relations de confiance sources de progrès. Ne peut-on porter remède à une séparation déstabilisante pour l'enfant et pour les familles ?
Quel est, enfin, le nombre d'unités pédagogiques et de postes d'AVS prévus dans le budget ? (Applaudissements à droite et au banc des commissions)
M. Luc Chatel, ministre. - J'ai dit la volonté du Gouvernement d'intégrer les enfants handicapés dans l'école. Des progrès ont été accomplis depuis quatre ans : 185 000 enfants sont aujourd'hui scolarisés au sein des établissements.
Nous avons ouvert 200 nouvelles unités pédagogiques d'intégration, ce qui porte leur nombre à 1 800, l'objectif étant de dépasser les 2 000 en 2010. Nous ouvrons chaque année 100 places en classes d'intégration, lesquelles sont aujourd'hui au nombre de 4 000 et accueillent 41 000 élèves au primaire.
Nous avons choisi de reconduire les 17 000 contrats existants d'auxiliaires de vie scolaire et créé 5 000 postes supplémentaires. Nous sommes conscients des difficultés des familles et des problèmes de continuité dans l'accompagnement lorsque le contrat d'un auxiliaire arrive à échéance, bien que le poste continue d'exister. C'est ainsi que nous avons proposé, en juillet, l'amendement auquel vous avez fait référence, qui permet aux associations de prendre le relai. J'ai signé, à la rentrée, un avenant avec trois associations, et un quatrième cet après-midi, avec Autisme France. Ce dispositif doit assurer un portage, sachant que, pour l'avenir, il serait bon, ainsi que vous l'avez souligné, de songer à ne pas laisser se perdre des compétences précieuses en pérennisant ces emplois. C'est pourquoi nous travaillons avec Mme Morano sur la constitution d'une filière comme il en existe dans le secteur médico-social.
Mme Colette Mélot. - Je vous remercie de ces précisions propres à rassurer les familles. Il faut garder présentes à l'esprit les difficultés que rencontrent les familles pour trouver un établissement convenant au type de handicap de leur enfant. La situation s'améliore mais tout doit être fait pour trouver des solutions individualisées.
M. Ivan Renar. - La création d'une agence nationale du remplacement, prévue en 2009, justifiait, disiez-vous alors, la suppression de 3 000 postes. Ils ont été supprimés, et l'agence n'a pas vu le jour... Désormais, dans le budget, on ne parle plus d'emplois mais d'équivalents temps plein, officiellement pour prendre en compte les temps partiels, mais surtout pour ne plus distinguer emplois précaires et emplois statutaires. Le nombre de non-titulaires, parmi les remplaçants, ne cesse d'augmenter, tandis que les crédits destinés au remplacement diminuent. Tout laisse à penser que vous souhaitez développer une main-d'oeuvre bon marché, corvéable à merci. La réforme de la formation des maîtres a été une aubaine : elle vous fournit une génération « kleenex » de jeunes diplômés de mastère qui, étant donné la diminution des postes, seront disponibles pour assurer des remplacements, sans aucune perspective.
Avec l'autonomisation des établissements qui, faute d'enseignants disponibles, affectent des titulaires-remplaçants sur des postes à l'année, le potentiel de remplacement diminue et l'on recourt de plus en plus à des vacataires, rémunérés dans les budgets d'heures supplémentaires effectives, qui ne rentrent donc pas dans le plafond d'emplois...
En septembre 2009, la FCPE créait un site recensant les enseignants non remplacés, témoignage du désarroi des parents. Le problème, monsieur le ministre, est que l'indice de performance de l'éducation nationale ne comptabilise pas les absences de moins de quinze jours, les plus difficiles à remplacer.
Suppressions de postes, dégradation du potentiel de remplacement : par quels moyens, monsieur le ministre, entendez-vous remplacer les enseignants manquants cette année, sauf à précariser toute une génération de jeunes diplômés ?
M. Luc Chatel, ministre. - Le projet de budget prévoit pour le premier degré 27 000 titulaires remplaçants, soit 8,5 % du nombre d'enseignants, et 21 000 pour le secondaire, dont 75 % de titulaires et seulement 25% de contractuels, souvent faute de titulaires disponibles dans la discipline. J'ajoute que les vacataires sont souvent des étudiants ayant échoué au concours, qui bénéficient ainsi d'une formation permanente complémentaire.
J'ai dit que la situation du remplacement n'était pas satisfaisante, et c'est pourquoi j'ai diligenté une mission qui me rendra bientôt ses conclusions. Nous avons besoin d'un système plus souple, d'une interaction entre académies pour une meilleure adéquation entre besoins et disponibilités.
M. Ivan Renar. - Vous n'avez dit mot, monsieur le ministre, et l'on vous comprend, de la circulaire du recteur de l'académie de Créteil qui, face à la pénurie, invite les chefs d'établissements à recruter des étudiants titulaires d'une licence ou, en cas d'urgence, toute personne ayant des « compétences avérées ». C'est proprement inadmissible, d'autant que ce sont les établissements des quartiers défavorisés qui souffrent le plus d'un besoin de remplacement. Comme j'ai eu l'occasion de la dire à Mme Pécresse, la précarité est désormais une plaie dans l'ensemble du système d'enseignement et de recherche. Prenez-y garde.
Mme Claudine Lepage. - Un plan d'urgence pour les langues : c'est ainsi que, le 13 octobre, le Président de la République annonçait son ambition de former des bacheliers bilingues, voire trilingues. Sénatrice des Français de l'étranger, je sais combien sont enrichissantes la maîtrise d'une langue étrangère et la connaissance d'une autre culture. Mais comment se traduit cette ambition dans les faits ? Par la répartition des élèves en groupes de compétence ? Mais les groupes de niveau existent déjà, même si les moyens manquent souvent pour diviser les classes. Par le recours aux « locuteurs natifs » ? Mais que sont donc les assistants de langue, qui existaient déjà à l'époque lointaine où j'étais au lycée ? Par l'enseignement d'une matière dans la langue pratiquée ? Mais les sections européennes ne font pas autre chose.
Mais n'est-ce pas le rôle des sections européennes, telles que nous les connaissons depuis bientôt vingt ans ? Le bilinguisme que vous appelez de vos voeux, c'est bien autre chose, monsieur le ministre, et cela nécessite bien d'autres moyens ! Cet objectif peut être atteint d'abord par l'enseignement dès la maternelle, et pas seulement pour apprendre des comptines mais aussi en généralisant l'enseignement de disciplines fondamentales non linguistiques par des locuteurs natifs. Mais l'éducation nationale dispose-t-elle des ressources humaines adéquates ? Pour y parvenir, il faut prévoir des échanges d'enseignants au niveau européen. Dans ce cadre, le récent programme Jules Verne, sorte d'Erasmus des professeurs, est prometteur, s'il est davantage développé.
Bien entendu, il n'est pas question de mettre en concurrence les professeurs de l'éducation nationale et les enseignants locuteurs natifs. L'expérience des écoles françaises à l'étranger témoigne de la parfaite complémentarité de leur travail. Qui mieux qu'un natif peut enseigner non seulement la langue mais aussi les codes interculturels et la communication non verbale ? Une seule question : au-delà des mots, l'éducation nationale se donnera-t-elle les moyens de faire en sorte que chaque lycéen approche le bilinguisme à sa sortie du lycée ?
M. Luc Chatel, ministre. - Nous partageons le même objectif : nous ne nous résignons pas à ce que notre pays continue à demeurer dans les profondeurs des classements internationaux : 64ème sur 109 au classement TOEFL ! Nous avons décidé de prendre le taureau par les cornes en multipliant les initiatives pour l'apprentissage des langues. Nos mesures émanent d'expérimentations menées dans de nombreux lycées. Les groupes de compétence existent dans un certain nombre de disciplines et ils ont démontré toute leur efficacité : l'idée est de regrouper les élèves par niveau homogène et de constituer des groupes moins nombreux pour ceux qui ont des difficultés.
En deuxième lieu, nous allons proposer l'enseignement en langue étrangère de certaines disciplines. Dans la filière littéraire, qui a pour objectif de devenir une filière d'excellence en langue, deux heures de cours de littérature étrangère seront dispensées en langue étrangère en première, et une heure trente en terminale.
Nous généraliserons l'usage des multimédias dans l'apprentissage de la langue anglaise, car les expérimentations ont permis des progrès significatif.
Enfin, chaque élève devra avoir au moins une fois effectué un échange avec un établissement de sa première langue vivante afin de garantir un bon apprentissage des langues.
Ce n'est pas une seule mesure mais la généralisation des diverses initiatives expérimentées avec succès qui permettra de parvenir à l'objectif que nous nous sommes assignés.
Mme Claudine Lepage. - Pour ce qui concerne l'enseignement en langue étrangère, pourquoi se borner à la littérature et ne pas envisager aussi l'histoire ? Cet enseignement pourrait être dispensé par des locuteurs natifs. Au lycée français de Munich, la littérature allemande est enseignée par un enseignant allemand, de même que l'histoire : la façon d'aborder les problématiques de ces disciplines est bien différente.
Mlle Sophie Joissains. - (Applaudissements à droite) Ma question porte sur la formation des enseignants, volet fondamental pour mener à bien la réforme globale de l'éducation nationale. En juillet, lors de votre audition par notre commission, vous nous avez présenté les grands axes de votre projet et j'aimerais avoir des précisions sur certains points.
Vous souhaitez élever le niveau de qualification des enseignants, désormais recrutés au niveau du mastère. Le contenu des formations, comme le fonctionnement des concours, ne permet plus de répondre aux besoins et aux attentes, tant sur le plan intellectuel que disciplinaire, du système éducatif. Comment cette mastérisation répondra-t-elle à ce double défi et, surtout, quelles sont les mesures qui pourront l'accompagner ?
Ma deuxième question concerne la répartition des compétences entre l'État et les universités dans la mise en oeuvre de votre réforme. Seule leur complémentarité permettra d'améliorer la qualité de notre éducation. Je pense à la préparation aux concours, à l'adaptation des contenus et à l'avenir des IUFM qui ont vocation à s'intégrer dans la réforme et qui sont des éléments importants de l'attractivité de nos territoires. Pouvez-vous m'éclairer sur ce point ?
Pour conclure, un mot célèbre de Victor Hugo : « Une école qui ouvre, c'est une prison qui ferme ». Pouvez-vous, monsieur le ministre, revenir sur la mise en oeuvre de cette réforme essentielle pour les futurs enseignants et pour l'éducation des citoyens de demain, en précisant les moyens budgétaires qui lui seront alloués ?
M. Jean-Claude Carle, rapporteur pour avis. - Très bonne question !
M. Luc Chatel, ministre. - J'ai eu l'occasion de revenir sur les grands enjeux de cette réforme de la formation des enseignants : il s'agit d'atteindre un haut niveau de compétence pour exercer le métier d'enseignant en allongeant d'une année la formation des maîtres, mais aussi de revaloriser les carrières des enseignants. Les futurs titulaires se présenteront à l'université avec une licence. En mastère 1, ils pourront procéder à des stages d'observation. Au début du mastère 2, ils passeront leur concours et ils suivront des stages de mise en situation. L'objectif, c'est que les épreuves d'admissibilité au concours aient vocation à sélectionner les étudiants ayant le meilleur niveau scientifique. Pour la phase d'admission, il s'agira de vérifier l'aptitude à enseigner des futurs enseignants.
Cette mastérisation se traduira par une revalorisation financière en début de carrière. Des enseignants mieux formés doivent être mieux rémunérés : nous sommes en train de négocier avec les organisations syndicales et je souhaite que nous puissions aboutir d'ici fin janvier.
Mlle Sophie Joissains. - Me voilà rassurée et pleine d'espoir : le talent pédagogique des prochains professeurs rejoindra leur capacités scientifiques. (Applaudissements à droite)
M. Claude Bérit-Débat. - Ce budget comporte de nombreuses insuffisances mais aussi, malheureusement, beaucoup d'incohérences.
J'en veux pour preuve les crédits alloués à l'accompagnement des élèves handicapés. Aujourd'hui, près de 160 000 de ces élèves sont scolarisés et ils seront, dès la rentrée prochaine, plus de 185 000. On ne peut, bien sûr, que se féliciter de cette intégration. Mais les ressources mobilisées pour permettre cette intégration manquent cruellement : actuellement, à peine plus d'un quart de ces élèves sont accompagnés par un auxiliaire de vie scolaire individuel. Il s'agit d'un taux d'encadrement très faible, d'autant plus anormal que, en 2003, un plan d'adaptation et d'intégration scolaire des élèves handicapés prévoyait la création de 6 000 postes d'auxiliaires de vie scolaire.
Or, seuls, à ce jour, 2 000 postes d'AVS collectifs ont été créés. Ce manque est d'autant plus considérable qu'il n'est pas compensé par les AVS individuels.
Cette situation ne devrait pas s'améliorer puisque le bleu 2010 ne précise pas le nombre d'AVS collectifs qui seront créés et qu'aucun chiffrage fiable n'est disponible pour les AVS individuels en 2010.
C'est pourquoi ce budget est incohérent : vous ne pouvez pas prétendre que vous allez accueillir plus d'enfants handicapés tout en refusant d'embaucher des AVS en nombre suffisant. Cette situation ne permet pas aux enseignants d'intégrer dans leur classe des élèves handicapés tout en s'occupant des autres élèves.
De même, il n'est pas acceptable que les AVS, ou les EVS, qui eux aussi réalisent ces missions d'accompagnement, ne bénéficient pas d'un réel statut et de la reconnaissance sociale qui l'accompagne. Cette précarité les pénalise d'ailleurs doublement puisqu'ils ne bénéficient pas du dispositif de validation des acquis.
Ce manque de personnel pénalise aussi et surtout les élèves handicapés et remet en cause leur intégration scolaire.
L'État doit, dans ce domaine, se donner les moyens de ses ambitions et débloquer les crédits correspondants aux engagements pris. Ce n'est manifestement pas le cas. Quelles mesures entendez-vous prendre pour tenir vos engagements ? (Applaudissements sur les bancs socialistes)
M. Luc Chatel, ministre. - Il y a bien 185 000 élèves handicapés scolarisés en cette rentrée 2009, et non 160 000. Il s'agit d'un doublement par rapport à il y a dix ans et c'est 40 % de plus qu'en 2005, lors du vote de la loi sur le handicap. J'ai déjà rappelé les moyens supplémentaires déployés par le Gouvernement : 200 unités pédagogiques d'intégration supplémentaires ont été créées pour la rentrée et notre objectif est d'atteindre au total 2 000 unités en 2010. Une centaine de Clis ont été créés dans le premier degré à la rentrée. Je vous confirme que nous avons pérennisé les postes des 17 000 AVSi, dont certains devaient être renouvelés, mais nous avons aussi décidé, dans le cadre des mesures d'accompagnement du plan de relance, de créer 5 000 postes supplémentaires, ce qui porte à 22 000 le nombre de postes d'AVSi. Nous n'en avons jamais eu autant !
Enfin, pour que des enfants handicapés soient accompagnés durant leur cursus, nous avons rendu possible leur portage par des associations d'enfants handicapés, avec un financement de l'État. C'est tout l'objet des conventions que j'ai signées avec quatre associations.
M. Claude Bérit-Débat. - En 2007 et en 2008, les moyens consacrés à l'accompagnement des élèves handicapés avaient considérablement diminué. Effectivement, vos crédits permettent de rattraper, en partie, le retard accumulé. Néanmoins, je prends note de vos engagements et je veillerai à ce que ces chiffres se traduisent dans la réalité, ne serait-ce que dans mon département et dans ma ville.
M. Jackie Pierre. - Les commissions des finances et de la culture ont fait part de leurs critiques sur le traitement réservé à l'enseignement technique agricole, signe de notre attachement à cette filière d'excellence qui accueille 338 000 élèves et étudiants et dont le taux d'insertion professionnelle atteint 85 %. Je ne méconnais pas l'engagement du ministre de l'agriculture, qui a lancé les assises de l'enseignement agricole pour mieux faire connaître et reconnaître ce dernier et construire pour lui dans la concertation une nouvelle stratégie. Mais le budget suscite des inquiétudes. L'enseignement agricole ne peut supporter que 30 des 224 suppressions de postes prévus au projet de loi de finances. Que comptez-vous faire, monsieur le ministre, pour que cette filière ne devienne pas le parent pauvre de l'enseignement et qu'elle reste d'excellence ? (Applaudissements à droite)
M. Luc Chatel, ministre. - Les crédits affectés à l'enseignement agricole ne représentent que 2,1 % du budget de la mission. Élu d'un département rural, je sais la tradition et les spécificités de cet enseignement. M. Le Maire et moi réfléchissons à l'évolution d'un système qui est loin d'avoir fait ses preuves, comme l'a relevé Mme Férat. M. Longuet défendra tout à l'heure un amendement, fruit de discussions avec nos deux ministères, qui répondra à vos inquiétudes. Mais la situation actuelle ne pourra perdurer. Il serait logique que le décideur, le gestionnaire et le payeur soit la même entité, afin de mieux contrôler l'engagement des fonds publics et la répartition des moyens. Nous trouverons d'ici le projet de loi de finances pour 2011 une solution qui évite les gesticulations actuelles. (Applaudissements au centre et à droite)
M. Jackie Pierre. - J'espère que ces propos apaiseront les inquiétudes, dans votre département comme dans le mien.
M. Jean-Luc Fichet. - Le diagnostic est largement partagé : l'enseignement agricole est dans une situation d'une extrême gravité. Il est depuis cinq ans le parent pauvre de l'enseignement scolaire. Il n'en va pas autrement cette année. La réduction drastique des emplois publics empêche toute réflexion sur son rôle, tandis qu'il est pris dans une partie de ping-pong entre deux ministères. L'annonce des assises de l'enseignement agricole avait fait naître un espoir, mais le budget 2010 et les suppressions de postes augurent mal du nouvel élan attendu. Quelle déception pour la commission de la culture, qui demandait de véritables moyens pour cette filière d'excellence !
L'enseignement agricole apporte aux futurs acteurs du monde rural un savoir-faire technique et humain qui touche au changement climatique, à la biodiversité, à la dégradation des ressources ou encore aux déséquilibres nord-sud. C'est le choix d'une école ouverte qui met l'élève et sa réussite au coeur de sa mission. C'est un taux d'insertion professionnelle exceptionnel. Le Président de la République a vanté les mérites de l'agriculture et ceux de l'enseignement agricole, formation d'excellence propre à réconcilier le monde agricole avec la société. Nous ne pouvons qu'approuver ces propos, sauf que le budget régresse et que des postes sont supprimés : 244 en 2009, après 106 en 2008, 210 en 2006, 94 en 2005 et 126 en 2004 ; 200 classes ont été fermées alors que les effectifs augmentaient. Les établissements refusent des inscriptions : ils doivent s'adapter aux petits moyens qu'on leur affecte.
A l'heure des assises, du Grenelle de l'environnement, des beaux discours du Président de la République, nous nous attendions au moins à une stabilité. Face à cette logique de démolition de l'enseignement public, il est temps de décider un moratoire sur les suppressions de postes. Mettez vos actes en cohérence avec vos discours, monsieur le ministre !
M. Luc Chatel, ministre. - Je viens de rappeler les enjeux. Je ne peux accepter votre suggestion, qui verrait l'enseignement s'exonérer des contraintes budgétaires. Les règles sont claires, les efforts doivent être partagés. Quant à la partie de ping-pong, elle trouvera son terme cette année grâce à l'amendement de M. Longuet ; avec l'accord du Premier ministre, M. Le Maire et moi-même vous présenterons, pour le projet de loi de finances 2011, une solution qui réglera définitivement le problème.
M. Jean-Luc Fichet. - Nous avons entendu les mêmes affirmations l'an dernier avec MM. Darcos et Barnier. On parle toujours d'excellence mais rien ne se passe, sinon des suppressions de postes et la baisse des crédits. Il ne sera bientôt plus possible de tenir. Je me fais ici le porte-parole des enseignants, des directeurs d'établissement, des familles en attente : l'enseignement agricole se dégrade, il a besoin d?urgence de signes d'espérance.
Examen des crédits
M. le président. - Amendement n°II-91 rectifié, présenté par MM. Carle, Humbert et Beaumont.
Modifier ainsi les crédits des programmes :
(en euros)
Programmes |
Autorisations d'engagement |
Crédits de paiement |
||
|
+ |
- |
+ |
- |
Enseignement scolaire public du premier degréDont Titre 2 |
|
|||
Enseignement scolaire public du second degréDont Titre 2 |
|
|||
Vie de l'élèveDont Titre 2 |
5 500 000 |
5 200 000
|
|
|
Enseignement privé du premier et du second degrésDont Titre 2 |
2 400 000 |
2 000 000
|
|
|
Soutien de la politique de l'éducation nationaleDont Titre 2 |
7 900 000 |
|
7 200 000
|
|
Enseignement technique agricoleDont Titre 2 |
|
|||
TOTAL |
7 900 000 |
7 900 000 |
7 200 000 |
7 200 000 |
SOLDE |
0 |
0 |
M. Jean-Claude Carle. - Cet amendement ne modifie en rien l'équilibre du budget et ne remet pas en cause la volonté du Gouvernement de financer le plan de soutien à l'agriculture par la contribution de toutes les lignes budgétaires. Le ministère du budget a prélevé 21,5 millions d'euros sur la mission « Enseignement scolaire », dont 11,5 sur la ligne « Vie de l'élève », soit sur des actions que nous jugeons prioritaires, destinées à l'accueil des élèves handicapés, à la santé scolaire ou aux bourses. Cela n'est guère opportun et envoie un message très négatif à la communauté éducative. Nous proposons de prélever cette somme sur la ligne « Soutien à la politique de l'éducation nationale », dotée de 2 milliards d'euros. Le grand corps qu'est l'administration centrale enverrait ainsi un signal de solidarité à un des secteurs économiques parmi les plus méritants et les plus exposés.
M. Gérard Longuet, rapporteur spécial. - La commission n'a pas examiné cet amendement. A titre personnel, je comprends les motivations de ses auteurs. A l'Assemblée nationale, M. Woerth a appliqué la répartition traditionnelle de l'effort entre enseignement public, 80 %, et enseignement privé, 20 %. L'amendement conduirait à augmenter l'effort de la ligne « Soutien », mais, pour la partie « Vie de l'élève », à augmenter la contribution du public et à baisser celle du privé.
La commission des finances a toujours défendu le statu quo pour éviter de rouvrir un vieux dossier. Au regard de cette position constante, je vous propose de retirer votre amendement.
M. Luc Chatel, ministre. - Je suis sensible à l'objectif de M. Carle, mais le programme « Soutien de la politique de l'éducation » a déjà vu ses crédits baisser de 14 % entre 2007 et 2009 : moins 17 % pour le Cned, cher à M. Longuet. Malgré les efforts de rationalisation, le programme est tendu, entre investissement immobilier outre-mer ou crédits informatiques pour s'adapter au futur opérateur national de paye. Il ne serait pas pertinent d'accroître encore ses contraintes. Retrait, sinon rejet.
M. Jean-Claude Carle. - Mon amendement respecte la règle des 20 %-80 %. Le retirer confirmerait le signal négatif envoyé à la communauté éducative sur des lignes prioritaires. C'est un amendement de conviction : je le maintiens.
M. Yannick Bodin. - Cet amendement serait de nature à nous satisfaire mais, sans verser dans l'idéologie, nous pensons que le rôle de l'État est plutôt de renforcer l'offre éducative dans l'enseignement public que dans l'enseignement privé, d'autant que ce dernier n'est pas trop mal traité : une suppression de poste pour 76 élèves, contre une pour 36 dans le public ! Nous nous abstiendrons donc.
Mme Brigitte Gonthier-Maurin. - Voyez dans quelles affres nous plonge le dogme de la réduction de la dépense publique ! Même ses plus ardents défenseurs s'inquiètent de la baisse des crédits. Le remède proposé est toutefois inacceptable : l'aide de l'État doit aller en priorité à l'enseignement public. Vous amputez les crédits dédiés à l'innovation pédagogique, qui comprennent les subventions à des associations comme la Ligue de l'enseignement. Nous voterons contre.
L'amendement n°II-91 rectifié n'est pas adopté.
M. le président. - Amendement n°II-126, présenté par MM. Longuet et Legendre.
Modifier ainsi les crédits des programmes :
(en euros)
Programmes |
Autorisations d'engagement |
Crédits de paiement |
||
|
+ |
- |
+ |
- |
Enseignement scolaire public du premier degréDont Titre 2 |
1 809 185 1 809 185 |
1 809 185 1 809 185 |
||
Enseignement scolaire public du second degréDont Titre 2 |
||||
Vie de l'élèveDont Titre 2 |
||||
Enseignement privé du premier et du second degrésDont Titre 2 |
||||
Soutien de la politique de l'éducation nationaleDont Titre 2 |
||||
Enseignement technique agricoleDont Titre 2 |
1 809 185 1 809 185 |
1 809 185 1 809 185 |
||
TOTAL |
1 809 185 |
1 809 185 |
1 809 185 |
1 809 185 |
SOLDE |
0 |
0 |
M. Jacques Legendre. - Il s'agit de répondre à un problème qui a largement été abordé ce soir et de tenir compte des engagements pris lors de l'ouverture des assises de l'enseignement technique agricole public en septembre dernier : rétablissement de 60 postes, gel des décisions de fermeture de classes et établissements, révision du plafond d'emplois.
Il nous a paru important d'abonder les crédits du programme « Enseignement technique agricole » dès le budget pour 2010. A ce titre, le plafond des autorisations d'emplois du ministère de l'éducation nationale est minoré de 50 ETPT et celui du ministère de l'alimentation, de l'agriculture et de la pêche majoré à due concurrence. Cette évolution est souhaitée par Mme Férat et toute la commission de la culture.
M. Jean Arthuis, président de la commission. - La commission des finances remercie les auteurs de l'amendement. En présentant les crédits de la mission, avec M. Foucaud, M. Longuet avait laissé entendre qu'il y aurait une initiative à prendre. La commission l'y avait encouragé Cet amendement va permettre au ministre de l'agriculture de tenir ses engagements. La commission ne s'est pas réunie, mais aurait sans doute émis un avis favorable.
M. Luc Chatel, ministre. - J'ai indiqué la position du Gouvernement sur l'enseignement agricole. Nous avons eu de nombreux échanges avec vous et décidé de soutenir cet amendement, qui apporte une réponse ponctuelle. Nous devrons toutefois vous proposer l'an prochain une structure budgétaire différente pour que le problème ne se reproduise plus.
M. Yannick Bodin. - Les années se suivent et se ressemblent, les ministres se succèdent et disent la même chose... Mais l'engagement n'est jamais tenu ! Certes, cette année, le ministre de l'agriculture s'est déplacé... mais c'est tout !
Autant nous reconnaissons que le budget de l'enseignement agricole est insuffisant, autant nous refusons qu'il soit abondé au détriment de l'enseignement scolaire : pas question de retirer des crédits à un programme dont les dépenses de fonctionnement et d'intervention sont déjà en baisse ! Nous attendions que vous preniez vos responsabilités, et nous nous sommes souvent abstenus. Aujourd'hui, vous vous engagez solennellement à ce que cela ne se reproduise plus. Cette fois, nous vous prenons solennellement au mot : nous voterons contre. (Marques de perplexité sur le banc des commissions)
M. Jacques Legendre. - Il faudra qu'on m'explique...
Mme Brigitte Gonthier-Maurin. - Je ne saurais dire ma consternation, ma colère, mon désarroi. Dire qu'il me faudra demain expliquer cela à l'intersyndicale ! L'enseignement agricole est une voie d'excellence, d'insertion professionnelle, de remédiation, une clé du développement durable.
Mais cet enseignement a besoin de moyens pérennes ; il faudra poser la question du plafond d'emplois !
La commission propose une nouvelle ponction sur le budget du premier degré : M. le ministre a évoqué une gesticulation, j'aurais plutôt parlé de bricolage. (Protestations à droite) On ne sait même pas à qui profiteront les crédits transférés : est-ce aux établissements publics ou privés ?
Nous voterons contre.
L'amendement n°II-126 est adopté.
Mme Françoise Férat. - Je salue le travail remarquable accompli par MM. Legendre et Longuet. L'amendement que nous venons d'adopter donnera un peu d'air à la grande famille de l'enseignement agricole. L'an dernier, 38 millions d'euros lui avaient déjà été transférés.
Mais nous ne pouvons nous satisfaire de ces demi-mesures. L'enseignement agricole est aujourd'hui à la croisée des chemins. C'est une filière hautement spécialisée et professionnalisée, ancrée dans les campagnes, qui nous aidera à relever les défis de l'économie verte. Elle forme à des métiers très divers : l'agriculture bien sûr, mais aussi certains services, l'industrie agro-alimentaire, etc. Mais elle n'est toujours pas reconnue à sa juste valeur : chaque année, on ne parvient à la doter de crédits suffisants qu'au terme d'un véritable parcours du combattant. Cela ne peut plus durer. Messieurs les ministres de l'éducation nationale et de l'agriculture, l'enseignement agricole a besoin de vous. Des mesures peu coûteuses pourraient être prises, comme la mutualisation des moyens entre les deux ministères. Dans le cadre de la réforme du lycée, on met l'accent sur l'orientation des élèves ; il serait paradoxal de laisser au bord du chemin ceux qui ont fait le choix de cette filière d'excellence !
Toutefois, l'avis favorable donné par M. le ministre à l'amendement de MM. Legendre et Longuet est un signe encourageant. J'ai également pris note de l'amendement du Gouvernement à la loi de finances rectificative discutée à l'Assemblée nationale. C'est parce qu'il se fie à vos promesses, monsieur le ministre, que mon groupe votera les crédits de la mission. (Marques de satisfaction au banc des commissions)
Les crédits de la mission sont adoptés.
Article 54 ter
Au plus tard le 30 juin 2010, le Gouvernement transmet au Parlement un rapport sur les moyens financiers et en personnels consacrés à la scolarisation en milieu ordinaire des élèves handicapés.
M. le président. - Amendement n°II-14, présenté par M. Longuet au nom de la commission des finances.
Compléter cet article par un alinéa ainsi rédigé :
Ce rapport précise également l'impact sur les charges des collectivités territoriales, notamment les coûts spécifiques de transport scolaire et d'aménagement des établissements publics locaux d'enseignement.
M. Gérard Longuet, rapporteur spécial. - Le rapport sur les coûts financiers et humains de l'accueil des élèves handicapés dans les établissements scolaires en milieu ouvert doit aussi évaluer les dépenses de transport qui incombent aux collectivités. Il s'agit pour elles d'une lourde responsabilité technique et financière.
M. Luc Chatel, ministre. - Avis favorable.
M. Gérard Bailly. - Cet amendement est bien inspiré. Dans mon départements, les 350 ou 400 autobus scolaires devront être équipés de manière à accueillir les élèves handicapés, mais nous ne comptons pas renoncer aux 150 ou 200 voitures qui y sont destinées car elles peuvent venir chercher les élèves jusqu'au pas de leur porte et les accompagner jusqu'à l'entrée de l'école, alors que les bus s'arrêtent à 200 ou 500 mètres de leur domicile ou de la cour de l'école. Certains chauffeurs vont même chercher les élèves chez eux si leurs parents sont partis travailler ; à l'inverse, des élèves handicapés peuvent avoir besoin qu'on les accompagne en bus. Les voitures sont coûteuses, mais fort utiles. Le risque est que les départements doivent faire face à deux dépenses au lieu d'une. Le rapport évoqué par M. Longuet doit prendre en compte ce problème.
M. Gérard Longuet, rapporteur spécial. - L'objet du rapport est justement d'évaluer la pertinence et le coût des différentes mesures envisageables. (Applaudissements à droite)
L'amendement n°II-14 est adopté.
L'article 54 ter, modifié, est adopté.
Prochaine séance aujourd'hui, mercredi 2 décembre 2009, à 10 h 30.
La séance est levée à 1 h 25.
Le Directeur du service du compte rendu analytique :
René-André Fabre
ORDRE DU JOUR
du mercredi 2 décembre 2009
Séance publique
A 10 HEURES 30, A 14 HEURES 30 ET LE SOIR
- Suite de la discussion du projet de loi de finances pour 2010, adopté par l'Assemblée nationale (n°100, 2009-2010).
Examen des missions :
Politique des territoires
M. François Marc, rapporteur spécial (rapport n°101, annexe n°20) ;
M. Rémy Pointereau, rapporteur pour avis de la commission de l'économie, du développement durable et de l'aménagement du territoire (avis n°105, tome VI).
Anciens combattants, mémoire et liens avec la Nation (+ article 51)
M. Jean-Marc Todeschini, rapporteur spécial (rapport n°101, annexe n°5) ;
Mme Janine Rozier, rapporteur pour avis de la commission des affaires sociales (avis n°103, tome I).
Gestion des finances publiques et des ressources humaines
Compte spécial : prêts et avances à des particuliers ou à des organismes privés
Compte spécial : avances à divers services de l'État ou organismes gérant des services publics
Compte spécial : gestion du patrimoine immobilier de l'État
M. Bernard Angels et Mme Nicole Bricq, rapporteurs spéciaux (rapport n°101, annexe n°14) ;
Mme Jacqueline Gourault, rapporteur pour avis de la commission des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du Règlement et d'administration générale (Fonction publique - avis n°106, tome II) ;
Mme Éliane Assassi, rapporteur pour avis de la commission des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du Règlement et d'administration générale (Modernisation de l'État - avis n°106, tome VI).
Régimes sociaux et de retraite
Compte spécial : pensions
M. Bertrand Auban, rapporteur spécial (rapport n°101, annexe n°24) ;
M. Dominique Leclerc, rapporteur pour avis de la commission des affaires sociales (avis n°103, tome III).
Remboursements et dégrèvements
Mme Marie-France Beaufils, rapporteur spécial (rapport n°101, annexe n°26) .
Santé (+ articles 59, 59 bis et 59 ter)
M. Jean-Jacques Jégou, rapporteur spécial (rapport n°101, annexe n°27) ;
M. Alain Milon, rapporteur pour avis de la commission des affaires sociales (avis n°103, tome IV).
Travail et emploi (+ articles 61, 62 et 63)
M. Serge Dassault, rapporteur spécial (rapport n°101, annexe n°32) ;
M. Alain Gournac, rapporteur pour avis de la commission des affaires sociales (avis n°103, tome VII).
Plan de relance de l'économie
M. Jean Arthuis, rapporteur spécial (rapport n°101, annexe n°19) ;
M. Charles Revet, rapporteur pour avis de la commission de l'économie, du développement durable et de l'aménagement du territoire (avis n°105, tome V).