- Mercredi
9 octobre 2024
- Projet de loi de finances pour 2025 - Désignation de rapporteurs pour avis
- Proposition de loi visant à assurer la mixité sociale et scolaire dans les établissements d'enseignement publics et privés sous contrat du premier et du second degrés et à garantir davantage de transparence dans les procédures d'affectation et de financement des établissements privés sous contrat - Examen des amendements au texte de la commission
- Proposition de loi visant à renforcer l'indépendance des médias et à mieux protéger les journalistes - Examen du rapport et du texte de la commission
Mercredi 9 octobre 2024
- Présidence de M. Laurent Lafon, président -
La réunion est ouverte à 9 h 45.
Projet de loi de finances pour 2025 - Désignation de rapporteurs pour avis
M. Laurent Lafon, président. - Mes chers collègues, nous devons tout d'abord désigner nos rapporteurs pour avis sur le projet de loi de finances pour 2025. Après consultation des groupes, je vous propose de reconduire la quasi-totalité de nos collègues.
Sont désignés rapporteurs pour avis sur le projet de loi de finances pour 2025 :
- M. Jacques Grosperrin sur les crédits relatifs à l'enseignement scolaire ;
- M. Stéphane Piednoir sur les crédits de l'enseignement supérieur ;
- Mme Sabine Drexler sur les crédits des patrimoines ;
- M. Cédric Vial sur les crédits de l'audiovisuel public ;
- M. Michel Laugier sur les crédits de la presse ;
- M. Claude Kern sur les crédits de l'action culturelle extérieure de l'État ;
- M. Jean-Jacques Lozach sur les crédits du sport ;
- M. Yan Chantrel sur les crédits relatifs à la jeunesse et à la vie associative ;
- Mme Karine Daniel sur les crédits relatifs à la création, à la transmission des savoirs et à la démocratisation de la culture ;
- M. Mikaele Kulimoetoke sur les crédits du livre et des industries culturelles ;
- M. Jérémy Bacchi sur les crédits du cinéma ;
- M. Bernard Fialaire sur les crédits relatifs à l'enseignement technique agricole ;
- Mme Alexandra Borchio Fontimp sur les crédits de la recherche.
Proposition de loi visant à assurer la mixité sociale et scolaire dans les établissements d'enseignement publics et privés sous contrat du premier et du second degrés et à garantir davantage de transparence dans les procédures d'affectation et de financement des établissements privés sous contrat - Examen des amendements au texte de la commission
M. Laurent Lafon, président. - Nous en venons à l'examen des amendements au texte de la commission sur la proposition de loi visant à assurer la mixité sociale et scolaire dans les établissements d'enseignement publics et privés sous contrat.
EXAMEN DES AMENDEMENTS AU TEXTE DE LA COMMISSION
Mme Karine Daniel, rapporteure. - Je propose un avis favorable à l'amendement n° 3, qui tend à étendre la transmission de l'indice de position sociale (IPS) à l'ensemble de l'organe délibérant de la collectivité territoriale, et non au seul président. Le vice-président ou l'adjoint en charge des questions éducatives tout comme les membres de la commission éducation en seraient ainsi directement destinataires.
La commission émet un avis défavorable à l'amendement n° 3.
Mme Karine Daniel, rapporteure. - Avis également favorable à l'amendement n° 17 visant à prendre en compte les IPS dans les demandes de dérogation de carte scolaire.
La commission émet un avis défavorable à l'amendement n° 17.
Mme Karine Daniel, rapporteure. - L'amendement n° 15 tend à inclure dans le périmètre de la proposition de loi les jardins d'enfants. Nous avons récemment débattu au sein de notre commission de ces structures. Certes, elles ne sont pas gérées par le ministère de l'éducation nationale. Toutefois, afin d'élargir la notion de mixité, je vous propose un avis favorable.
La commission émet un avis défavorable à l'amendement n° 15.
Mme Karine Daniel, rapporteure. - L'amendement n° 4 tend à affiner l'utilisation de l'IPS, en considérant un écart type par rapport à la moyenne académique. Je vous propose un avis favorable.
La commission émet un avis défavorable à l'amendement n° 4, de même qu'à l'amendement de précision n° 1.
Mme Karine Daniel, rapporteure. - Je vous propose un avis favorable à l'amendement n° 5 visant à prévoir une pondération des subventions de l'État et des collectivités territoriales en fonction des IPS. Cette mesure entre dans la philosophie du texte.
La commission émet un avis défavorable à l'amendement n° 5.
Mme Karine Daniel, rapporteure. - Pour plus de transparence, je vous propose un avis favorable à l'amendement n° 7 tendant à permettre la publication par les établissements privés sous contrat des subventions versées par les collectivités territoriales.
La commission émet un avis défavorable à l'amendement n° 7.
Mme Monique de Marco. - Certains ne sont pas pour la transparence !
Mme Karine Daniel, rapporteure. - En revanche, je suis défavorable à l'amendement n° 8, ayant pour objet l'élargissement de la saisine permettant le déclenchement d'un contrôle au sein d'une école privée sous contrat. Il me semble nécessaire de maintenir un parallélisme entre établissements publics et privés.
La commission émet un avis défavorable à l'amendement n° 8 sur proposition du rapporteur.
Mme Karine Daniel, rapporteure. - L'auteur de l'amendement n° 9 propose la déconcentration au niveau académique des demandes d'ouverture de classe au sein d'un établissement privé sous contrat. Actuellement, les demandes sont déposées au niveau national, ce qui permet un équilibrage entre les différents réseaux d'établissements. Déconcentrer rendrait la situation plus complexe, sans apporter plus de lisibilité au niveau national. Avis défavorable.
La commission émet un avis défavorable à l'amendement n° 9 sur proposition du rapporteur.
Mme Karine Daniel, rapporteure. - L'amendement n° 16 concerne également les jardins d'enfants. Il s'agit de prendre en compte la présence et la composition sociale de ces structures lors de la création et de l'implantation de nouvelles classes maternelles et élémentaires. Comme précédemment, je vous propose un avis favorable.
La commission émet un avis défavorable à l'amendement n° 16.
Intitulé de la proposition de loi
Mme Karine Daniel, rapporteure. - En cohérence avec mes positions précédentes, je suis favorable à l'élargissement de l'intitulé du titre de la proposition de loi, tel que proposé à l'amendement n° 14.
La commission émet un avis défavorable à l'amendement n° 14.
La commission a donné les avis suivants sur les amendements de séance :
Proposition de loi visant à renforcer l'indépendance des médias et à mieux protéger les journalistes - Examen du rapport et du texte de la commission
M. Laurent Lafon, président. - Nous examinons à présent le rapport de notre collègue Sylvie Robert sur sa proposition de loi visant à renforcer l'indépendance des médias et à mieux protéger les journalistes, texte dont nous débattrons en séance le jeudi 17 octobre prochain dans l'espace réservé de nos collègues du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain.
Mme Sylvie Robert, rapporteure. - Les médias occupent une place centrale dans les travaux de notre commission. Quand on parle de culture, d'éducation, de communication, même de sport, on parle de médias, c'est-à-dire de notre capacité à comprendre et appréhender le monde dans sa diversité.
Aujourd'hui, nous le savons tous, les médias vont mal - les médias « traditionnels », devrais-je dire, car les réseaux sociaux et autres plateformes se portent très bien. Des médias qui vont mal, ce sont des informations qui ne sont pas traitées ou reçues par les citoyens, c'est un débat qui n'a pas lieu, c'est une complexité qui n'est pas perçue. De cela nous sommes comptables, comme législateurs et acteurs engagés.
Pour inaugurer cette session ordinaire qui s'ouvre, mon groupe a inscrit à l'ordre du jour de notre assemblée, et je l'en remercie, ma proposition de loi visant à renforcer l'indépendance des médias et à mieux protéger les journalistes, deux objectifs qui sont indissociables. Nous avons ainsi souhaité que le Sénat, et singulièrement notre commission, puisse se saisir d'un texte ambitieux et large dont les aspirations sont, je le crois, partagées par chacun d'entre nous.
Les médias sont en crise, disais-je. Le rapporteur pour la presse, notre collègue Michel Laugier, établit pour nous chaque année un bilan éloquent et hélas ! jamais réjouissant, de la chute des ventes de la presse imprimée qui a tant compté dans notre histoire. Le monde audiovisuel résiste, mais souffre face aux nouveaux modes de consommation de l'information et des divertissements.
De quoi souffrent donc tant les médias, courroie de transmission essentielle, vitale, de notre démocratie ? Sans entrer dans une typologie exhaustive, je veux citer trois points, qui sont tous intimement liés.
Tout d'abord, la montée que l'on pourrait juger inexorable des plateformes, réseaux sociaux, en bref, d'un monde numérique dont nous serions devenus, je reprends les termes de Catherine Morin-Desailly, une « colonie ». Ceux que l'on qualifie encore de « nouveaux acteurs », mais qui ne sont plus si jeunes, s'ils offrent des services que nous apprécions tous, font peu de cas de la qualité de l'information et des ressources à y consacrer. Après avoir cannibalisé le marché publicitaire, ils pillent maintenant les contenus pour nourrir des modèles d'intelligence artificielle (IA) dont nous ignorons encore s'ils seront d'aimables auxiliaires ou de trop redoutables concurrents.
Ensuite, la polarisation extrême dans laquelle vivent maintenant nos sociétés. Pour m'éloigner un peu de l'Hexagone, je peux citer l'extraordinaire violence de la campagne électorale américaine qui livrera bientôt son verdict. On a vraiment l'impression que deux mondes cohabitent en se haïssant et ne se parlent plus que par injures et diffamations interposées. Quelle place pour un discours posé, construit, argumenté ? Quelle place, alors que chacun n'utilise plus que des canaux d'information partisans qui ne prennent même plus la peine de dissimuler le peu de cas qu'ils font de la vérité ?
Enfin, les difficultés économiques de la presse et des médias en général plongent les journalistes dans la précarité. Or nous avons besoin de professionnels correctement rémunérés, à la hauteur de leur engagement, pour que les faits soient vérifiés, sourcés, contextualisés, en un mot, pour passer du fait brut à l'information, ce qui n'est pas la même chose.
Le texte que je vous propose aujourd'hui est donc ambitieux, certes ; mais l'est-il assez au regard des enjeux que nous avons à traiter ? Je ne le crois pas, comme je ne crois pas que nous perdions notre temps et notre énergie à débattre et à marquer, depuis tant de temps que nous abordons ces sujets, la singularité de nos analyses.
J'ai donc souhaité, avec cette proposition de loi, mettre en avant quelques questions soulevées par les très nombreux travaux menés sur ce thème. Je pense bien entendu aux contributions de notre assemblée, avec la loi sur les droits voisins, le rapport de la commission d'enquête sur la concentration des médias, nos multiples rapports d'information, ou encore les débats que nous menons régulièrement. Je me suis également appuyée sur les travaux de l'Assemblée nationale ; je pense en particulier à l'évaluation de la loi du 14 novembre 2016 visant à renforcer la liberté, l'indépendance et le pluralisme des médias, dite « Bloche », menée par nos homologues de la commission de la culture.
Je le reconnais bien volontiers et m'en excuse par avance, les délais d'examen de cette proposition de loi ont été parmi les victimes des conséquences de la dissolution. Nous avons disposé de peu de temps, une semaine, pour mener nos travaux. Mais nous l'avons mise à profit, avec l'organisation de 16 auditions, toutes riches et passionnantes - je remercie sincèrement ceux de nos collègues qui ont trouvé le temps d'y assister.
Je retire de ce travail dans l'urgence trois convictions.
Première conviction, le sujet devant nous est tout entier à traiter, et oserais-je dire, rapidement. Il faut arrêter de renvoyer à des lendemains qui chantent ou à des textes magiques qui n'apparaissent pas. Les acteurs du monde médiatique que nous avons pris le temps d'entendre sont en souffrance : éditeurs, journalistes, chaînes de télévision.
Deuxième conviction, le sujet n'est pas qu'urgent, il est existentiel pour nous et nos démocraties. La violence dans le débat public est alimentée par la perte de sens de la réalité, ce que d'aucuns ont qualifié de « post-vérité ». Dans un monde de « faits alternatifs », il n'y a pas de débat public, il y a juste des opinions hystérisées. Or la démocratie, ce n'est pas cela, c'est même l'inverse. Le mal qui nous ronge, c'est bien la défiance, qui s'étend des médias au monde politique en passant malheureusement par toutes les institutions.
Troisième conviction, des solutions existent, elles sont même à portée de main si nous employons à bon escient nos prérogatives et notre conviction. Nous ne pouvons pas, nous, législateurs, nous confiner dans l'impuissance ou dans l'attente.
Je vais maintenant vous exposer rapidement les options que j'ai retenues dans ce texte. J'ai bien conscience qu'elles ne rencontreront pas in fine l'approbation de tous, et, oserais-je dire, tant mieux ! Débattons-en, prenons date, expertisons davantage, continuons les réflexions et les débats que nous avons eus en commission et en séance. Il y va de la responsabilité du Sénat en cette période si particulière !
L'article 1er de ma proposition de loi vise à sanctuariser dans la loi l'arrêt du Conseil d'État du 13 février 2024 qui a abouti à un changement de doctrine de l'Autorité de régulation de la communication audiovisuelle et numérique (Arcom) dans son contrôle du respect du pluralisme. Je crois nécessaire que nous, législateurs, prenions la responsabilité de cette précision de la loi de 1986 qui ouvre la voie à une régulation plus équilibrée. Je vous proposerai par la suite un amendement travaillé avec l'Arcom prenant mieux en compte la jurisprudence du Conseil d'État.
L'article 2 tend à renforcer les pouvoirs de sanction de l'Arcom pour lui permettre d'agir plus rapidement et efficacement face à des manquements répétés sur les antennes.
L'article 3 s'inscrit directement dans les travaux de la commission d'enquête sur la concentration des médias, en donnant plus de visibilité et de légitimité aux comités d'éthique des chaînes de télévision. Je vous proposerai sur cet article trois amendements pour donner encore plus de force à ces comités, notamment en faisant valider leurs membres par l'Arcom.
L'article 4 tient compte des insuffisances dans l'application de la loi dite « Bloche » du 14 novembre 2016 sur les chartes de déontologie, là aussi pour leur permettre de mieux remplir leur rôle. Je vous proposerai deux amendements sur cet article, pour assurer une meilleure accessibilité des chartes et pour mieux calibrer l'intervention du Conseil de déontologie journalistique et de médiation.
Je ne dirai qu'un mot sur l'article 5, traitant du secret des sources, un dossier extrêmement important qui est pendant depuis des années. Nous l'avons délégué au fond à notre commission des lois, et je remercie vivement notre collègue Lauriane Josende d'y avoir consacré son expertise et d'avoir accueilli avec une grande ouverture cette démarche.
L'article 6 vise à instaurer dans les rédactions un droit d'agrément sur le choix du directeur. Il s'agit d'un vieux débat, dont je n'ignore pas les difficultés. Dans mon esprit, comme dans celui des journalistes que nous avons entendus, il faut y voir non pas une forme de défiance, mais au contraire un moyen de créer de la confiance entre l'actionnaire et la rédaction.
Enfin, l'article 7 tient compte des nombreux problèmes soulevés par la loi sur les droits voisins. Je peux vous assurer que les plateformes déploient une énergie et des moyens juridiques considérables, acceptent même de régler, pour Google, 750 millions d'euros d'amende, pour ne pas avoir à appliquer cette loi. Je veux quand même m'arrêter sur l'énormité du chiffre : 750 millions d'euros, c'est trois fois le montant des aides à la presse, et je ne compte pas les frais d'avocats très importants. Nous sommes face à des acteurs si puissants et si riches qu'ils peuvent contester sans limites et régler des amendes gigantesques pour ne pas appliquer une loi qui ne nécessite en réalité qu'un peu de bon sens et de bonne volonté partagée.
Je vous proposerai quatre amendements sur cet article, qui tiennent largement compte des échanges que nous avons eus la semaine dernière. En particulier, il me paraît utile de mieux assurer le respect du décret que je propose, lequel est destiné à fixer les éléments nécessaires à une négociation équilibrée entre les plateformes et les éditeurs, une initiative qui, je dois le dire, rassemble un large consensus des parties prenantes. Inversement je crois préférable, après réflexion, de ne pas confier à l'Autorité de la concurrence la possibilité de fixer les modalités de rémunération en cas d'échec des négociations. D'une part, cela s'avère encore juridiquement incertain sur le principe, et, d'autre part, l'Autorité n'a ni la compétence ni les moyens pour cette mission.
Comme vous le voyez, mes chers collègues, ma démarche est très ouverte. J'attends de nos débats en séance publique des prises de position et, surtout, des engagements de la ministre, qui semble envisager le dépôt d'un projet de loi sur l'indépendance des médias et la protection des journalistes inspiré des conclusions des états généraux de l'information (EGI).
Je crois profondément que nos échanges seront très utiles, nécessaires, et marqueront de la meilleure des manières l'entrée de notre commission dans cette nouvelle année parlementaire. En effet, nous sommes tous d'accord, ce sujet est essentiel pour notre démocratie !
M. Laurent Lafon, président. - J'invite notre rapporteure à nous présenter le périmètre de cette proposition de loi.
Mme Sylvie Robert, rapporteure. - Je vous propose maintenant de définir le périmètre pour l'application des irrecevabilités prévues par l'article 45 de la Constitution en réservant notre examen : au champ du contrôle mené par l'Autorité de régulation de la communication audiovisuelle et numérique ; au contrôle du respect par les titulaires des autorisations d'émettre de leurs engagements au titre de la loi du 30 septembre 1986 relative à la liberté de communication ; aux Comités relatifs à l'honnêteté, à l'indépendance et au pluralisme de l'information et des programmes (Chipip) ; aux chartes de déontologie prises en application de l'article 2 bis de la loi du 29 juillet 1881 sur la liberté de la presse ; au respect de la protection des sources des journalistes ; aux conditions de nomination des directeurs de rédaction dans la presse écrite et dans l'audiovisuel ; aux droits voisins des éditeurs et des agences de presse.
M. Laurent Lafon, président. - J'ouvre à présent la discussion générale en donnant la parole à notre collègue Lauriane Josende, rapporteure pour avis de la commission des lois, à laquelle l'article 5 du texte a été délégué au fond. À ce titre, je le rappelle, nous prendrons acte de la position retenue par nos collègues au moment de l'examen des articles.
Mme Lauriane Josende, rapporteure pour avis de la commission des lois. - Comme rappelé par Mme la rapporteure, l'article 5 de la présente proposition de loi est relatif à la protection du secret des sources. Il reprend pour partie les dispositions contenues dans la loi dite « Bloche » du 14 novembre 2016 et censurées par le Conseil constitutionnel dans une décision du 10 novembre 2016. Il vise à étendre le champ des immunités pénales en matière de secret des sources : aux journalistes non rémunérés et employés, y compris de manière ponctuelle, aux directeurs de publication et « à tout collaborateur d'une rédaction amené à prendre connaissance d'informations permettant de découvrir une source ». Il entend soumettre également tout acte de procédure tendant à lever le secret des sources au juge des libertés et de la détention (JLD) et propose d'aggraver les sanctions en cas d'atteinte au secret des sources.
Plusieurs de ces choix posent des difficultés. Dans sa décision précitée, le Conseil constitutionnel a considéré que l'extension de l'immunité prévue par l'article 2 de la loi du 29 juillet 1881, si elle devait être étendue aux collaborateurs de rédaction, concernerait des personnes dont la profession ne présente qu'un lien indirect avec la diffusion d'informations au public, ce qui rend douteuse la constitutionnalité de la disposition.
Par ailleurs, la commission des lois s'est opposée de manière constante au transfert au juge des libertés et de la détention de la compétence sur les actes de procédure relatifs au secret des sources. Cette mission, qui ne relève pas du coeur des compétences du JLD, est assurée de manière efficace aujourd'hui par les juges d'instruction, et il serait malvenu d'alourdir encore la procédure pénale.
Enfin, l'alourdissement des peines en matière d'atteinte au secret des sources n'améliorera pas la protection dont elles font l'objet.
Si ces points ne peuvent être conservés, l'extension de la protection du secret des sources à tous les journalistes exerçant la profession dans le cadre fixé par le code du travail et au directeur de publication paraît proportionnée, en ce qu'elle est déjà juridiquement consacrée et protégée, notamment par le juge européen.
L'amendement de réécriture adopté en commission des lois juste avant que je vienne vous rejoindre vise à ne conserver que ces seuls points.
M. Pierre-Antoine Levi. - J'interviens en remplacement de Michel Laugier, retenu par le congrès des maires de son département.
Je souhaite tout d'abord souligner la qualité du travail réalisé dans l'élaboration de cette proposition de loi, qui concerne un sujet central dans nos sociétés démocratiques : l'indépendance des médias.
Cependant, permettez-moi avant toute considération de fond de relever deux points liés au calendrier de la présentation de ce texte. Il a été déposé le 24 juillet dernier, soit le jour où l'Arcom a décidé de ne pas renouveler l'autorisation d'émettre sur la TNT de deux chaînes, dont C8, et avant le rendu des conclusions des états généraux de l'information, qui ont été connues en septembre. Très logiquement, le projet de texte, en intervenant à contretemps, ne peut tirer les enseignements de ces deux annonces. « Patience et longueur de temps font plus que force ni que rage », comme le disait La Fontaine...
Plusieurs des propositions émises dans le projet de texte sont néanmoins pertinentes. D'ailleurs, elles reprennent ou s'inspirent de recommandations parlementaires, telles que la disposition relative à la meilleure visibilité des comités d'éthique, à l'article 3, directement inspirée des recommandations de la commission d'enquête sénatoriale de 2022 sur la concentration des médias, de même que celle qui accorde plus de visibilité et de transparence, à l'article 4, aux chartes de déontologie, laquelle reprend les conclusions rendues en mars 2024 par la mission d'évaluation de l'Assemblée nationale ayant mesuré l'impact de la loi « Bloche » du 14 novembre 2016.
Par ailleurs, l'article 1er, qui a pour ambition de donner un cadre au contrôle au pluralisme exercé par l'Arcom, est intéressant.
Quant aux droits voisins, la publication d'un décret déterminant les éléments devant être transmis par les Gafa - Google, Apple, Facebook, Amazon - aux agences et titres de presse, prévue à l'article 7, me semble très opportune pour soutenir les titres dans leurs négociations.
En revanche, le droit d'agrément à la nomination du directeur de la rédaction, accordé aux rédactions par l'article 6, va à l'encontre du droit de propriété et de la liberté d'entreprendre de l'actionnaire, avec le risque inhérent de dévaloriser la valeur économique de l'entreprise de presse, sans oublier que les dispositifs existent déjà, à l'image du droit de veto, en vigueur dans plusieurs rédactions.
Je n'évoque pas ici l'article 5, qui a été délégué au fond à nos collègues de la commission des lois, mais il soulève également une problématique très intéressante et appellera probablement des débats nourris.
Pour finir, je veux une nouvelle fois rappeler l'attachement de notre groupe à l'indépendance de la presse. Celle-ci passe, selon nous, en premier lieu, par la solidité de son modèle économique.
M. Jérémy Bacchi. - Je tiens à mon tour à remercier et à féliciter le groupe SER ainsi que ma collègue Sylvie Robert pour ce texte.
Depuis plusieurs années, l'information tend à exploser, parfois dans tous les sens, pour le meilleur, mais aussi souvent pour le pire. Ces problématiques ont été soulevées lors des états généraux de l'information, et peut-être plus encore lors des états généraux de la presse indépendante.
En cela, la proposition de loi nous semble répondre aux défis qui sont devant nous. Mieux protéger et renforcer l'indépendance des journalistes nous paraît une nécessité absolue. Nous partageons ainsi bon nombre des préconisations de ce texte - pour ne pas dire l'ensemble d'entre elles.
À titre personnel, je m'interroge sur l'article 6, relatif au droit d'agrément à la nomination du directeur des rédactions. Je n'y vois pas un problème philosophique, bien au contraire ! Cela dit, le fait que les directeurs de publication restent responsables, au regard de la loi, de ce qui va sortir dans le journal, sans avoir de pouvoir de nomination du directeur de la rédaction, peut parfois poser quelques soucis supplémentaires ou faire naître des frictions ou des tensions au sein même des rédactions.
Nous n'avons pas fait de propositions d'amendement sur ce sujet, mais c'est l'un des angles morts que nous voyons, même si les deux fonctions de directeur de publication et de directeur de la rédaction sont parfois confondues.
M. Bernard Fialaire. - Je veux à mon tour féliciter Sylvie Robert et le groupe SER. Je regrette de n'avoir pu être disponible pour participer à ces travaux, car c'est un sujet important, à un moment où l'on peut s'interroger sur l'information en ligne, le rôle des réseaux sur ces flux d'informations...
On peut être rassuré sur la sensibilisation des jeunes à l'information : la majorité d'entre eux ont un certain esprit critique, comme le montre un sondage qui doit, me semble-t-il, être publié aujourd'hui dans Le Point. C'est plutôt rassurant, et je pense qu'il faut continuer à insister sur l'éducation aux médias et à l'information.
Le secret des sources, on le voit bien, pose problème. Je pense qu'il faut effectivement peut-être aller plus loin, être encore plus audacieux sur les comités d'éthique et les chartes de déontologie, qui sont à géométrie variable. Il faudra un jour oser dire qu'il faut un véritable code déontologique des journalistes, qui les protège vis-à-vis de leurs employeurs et rassure les citoyens destinataires de l'information, avec un ordre chargé de délivrer la carte de journaliste. Je ne vois pas pourquoi cette carte est uniquement délivrée sur des critères économiques. D'autres critères devraient être pris en compte, qui pourraient d'ailleurs avoir des effets sur le secret des sources - on peut être un journaliste performant qui a droit au secret des sources en ne tirant qu'une partie minime de ses revenus de la presse...
Il faut aller plus loin. Je continuerai toujours à défendre l'instauration d'un véritable code de déontologie, avec un ordre des journalistes qui permette de prononcer des mesures disciplinaires. Les journalistes sont bien les plus à même de repérer des dérives que commettraient leurs pairs...
M. Max Brisson. - Je veux d'abord poser un préalable. Certes, la proposition de loi de Sylvie Robert témoigne d'une volonté louable de renforcer l'indépendance des médias et de mieux protéger les journalistes. Certes, le texte que nous examinons contient de bonnes mesures : je pense, en particulier, aux articles 3, 4 et 7. Je souscris d'ailleurs à l'ouverture de Sylvie Robert sur ces trois articles.
Mais je vais plutôt parler de ce qui fâche...
Pour ce qui concerne d'abord le calendrier, ce texte n'est-il pas prématuré, comme l'a dit Pierre-Antoine Levi ? Il vient ou trop tôt, ou trop tard, puisque les États généraux de l'information viennent tout juste de rendre leur rapport et qu'il appartient au Gouvernement, à ce stade, de faire des propositions en tenant compte des consultations ayant eu lieu.
De fait, si cette proposition de loi contient quelques avancées, d'autres de ces dispositions remettent en cause des équilibres importants et appellent un certain nombre de réserves de notre part. Je les présenterai à partir des articles 1er, 2, 5 et 6.
À l'article 1er, vous nous proposez, madame la rapporteure, de sanctuariser la décision du Conseil d'État du 13 février 2024. À titre personnel, j'y suis plus que réticent. Si l'amendement que vous proposez réécrit pour partie cet article, il n'en modifie guère la portée : vous poursuivez dans l'idée d'étiqueter en courants de pensée chroniqueurs, animateurs et invités. Or je me rappelle que, en son temps, le président de l'Arcom avait exprimé devant cette commission sa réticence à comptabiliser les temps de parole des éditorialistes. Mais il est vrai que les temps ont changé...
Surtout, je ne comprends pas pourquoi vous souhaitez inscrire dans la loi la décision du Conseil d'État, puisque, pour la rendre, celui-ci s'est appuyé sur le droit existant, et c'est sur la base de ce droit qu'il a donné pour injonction à l'Arcom de prendre une nouvelle délibération, ce qui fut fait.
La situation est aujourd'hui apaisée - c'est bien la réalité - et les craintes qui ont pu être exprimées, y compris sur nos travées, n'ont plus de raison d'être. Dès lors, pourquoi rouvrir le débat ? Pourquoi s'attaquer à un équilibre de nouveau trouvé ? Ne visez-vous pas d'autres objectifs ?
À l'article 2, vous proposez de renverser le pouvoir de sanction de l'Arcom, en introduisant la notion d'atteinte grave et manifeste à la vie démocratique de la Nation. Mes chers collègues, quelle serait la légitimité d'une autorité publique indépendante à juger d'une atteinte à la vie démocratique de la Nation ? Sur quels critères ce jugement se fondera-t-il : une simple interprétation, un contexte politique ? J'ai, pour ma part, une certaine conception de l'État de droit et de la souveraineté nationale. Elle m'empêche de me résoudre à confier le pouvoir de suspendre le droit d'antenne d'un média sur la seule base d'une interprétation subjective et d'un contexte politique ambiant !
Votre article 5 relevant du champ de la commission des lois, je ne m'y attarderai pas. Je me contenterai d'exprimer mon accord avec la réécriture des articles entreprise par notre collègue Lauriane Josende.
Quant à l'article 6, qui propose de conférer aux journalistes des entreprises de presse et des médias audiovisuels un droit d'agrément à la nomination du directeur, je dois vous dire qu'il nous inspire un désaccord de fond.
D'abord, si le rapport issu des États généraux de l'information suggère de redessiner le fonctionnement des entreprises de média, il ne préconise pas un tel droit d'agrément. Il recommande simplement que l'actionnaire informe la rédaction sur son intention de procéder à un changement de direction et que le comité d'éthique puisse rendre son avis public. Cela me semble plus sage.
Ensuite, l'exigence d'un agrément a été rejetée en avril dernier par la commission des affaires culturelles de l'Assemblée nationale, examinant la proposition de loi de Sophie Taillé-Polian, qui conditionnait l'obtention d'aides publiques à la presse ainsi que la mise à disposition d'un canal TNT à l'effectivité d'un agrément des journalistes.
Par ailleurs, cet article pose un problème d'ordre constitutionnel, en portant atteinte au principe de la liberté d'entreprendre. Or, selon la jurisprudence du Conseil constitutionnel, le respect de cette liberté implique la liberté de choix par l'employeur de ses collaborateurs.
En outre, l'instauration d'un tel droit risquerait de dissuader les investisseurs, alors même que le secteur de la presse est fragile et que la survie de nos entreprises face au développement des géants internationaux est posée.
Enfin, il existe déjà un grand nombre de dispositifs et de pratiques garantissant la protection des rédacteurs à l'égard des pressions extérieures, les journalistes bénéficiant, à titre individuel, de la clause de conscience et de la clause de cession, qui garantissent l'autonomie de la rédaction vis-à-vis des propriétaires de l'entreprise éditrice.
Vous l'aurez compris, j'ai sur ce texte des réticences multiples. Et je peux déjà dire que nous nous opposerons aux articles 2 et 6, et que nous nous interrogeons sur le vote qui sera le nôtre sur l'article 1er.
Nous pensons surtout que ce texte prématuré n'apporte rien d'indispensable au bon fonctionnement du principe du pluralisme dans l'audiovisuel ni aucun apport juridique notable pour le renforcer. En revanche, nous craignons qu'il ne remette directement en cause la liberté éditoriale des médias audiovisuels et les équilibres scellés par la loi et la jurisprudence, y compris la plus récente.
Toutefois, en application de notre gentlemen's agreement, nous poursuivrons le débat en séance.
Mme Monique de Marco. - Je tenais à remercier le groupe SER d'avoir porté au débat ce sujet, qui nous semble crucial, du renforcement de l'indépendance des journalistes et d'une meilleure protection de ces derniers.
Je remercie particulièrement Sylvie Robert, qui, la semaine dernière, a mené des auditions à un rythme intense. Ces auditions ont été très instructives, et je puis dire que le retour des différents acteurs auditionnés était beaucoup plus nuancé et constructif que ce que je viens d'entendre.
Pour nous, membres du groupe Écologiste - Solidarité et Territoires, l'indépendance des médias, l'honnêteté, le pluralisme de l'information sont des sujets cruciaux. Ils apparaissent néanmoins menacés par la participation de groupes industriels à leur capital, mais également par de nouvelles pratiques liées à l'expansion du numérique et aux réseaux sociaux. Il convient, dans ce contexte, d'exercer une forte vigilance et de pouvoir anticiper ce qui va se passer très prochainement.
Contrairement à ce que j'ai entendu, cette proposition de loi arrive à point nommé. Ce n'est pas parce que les EGI n'avaient pas remis leur rapport au moment du dépôt du texte que nous ne savions pas dans quel sens iraient les propositions ! Ceux qui ont assisté aux auditions et qui lisaient la presse savaient qu'elles conforteraient les mesures présentées ici.
En outre, la présente proposition de loi reprend les recommandations de la commission d'enquête de 2022 sur la concentration des médias et tire les conséquences de ce qui s'est passé au Journal du Dimanche (JDD), des travaux menés par le Sénat ainsi que par la commission d'enquête sur la télévision numérique terrestre à l'Assemblée nationale au tout début de l'année 2024.
Elle vise à remédier aux lacunes du droit existant, en répondant aux principales inquiétudes que suscitent les menaces actuelles sur l'indépendance des médias, l'honnêteté de l'information et le pluralisme, mais également à améliorer la régulation audiovisuelle et la protection des journalistes et de leurs sources, dans l'attente d'une réforme d'adaptation plus approfondie à l'ère numérique et à l'intelligence artificielle.
Nous avons entendu que la ministre de la culture souhaitait produire un grand projet de loi, en s'inspirant des EGI. Dans l'attente, ce texte, large et ambitieux, permet de poser une première brique et de susciter le débat. Je me félicite de son inscription à notre ordre du jour.
Les auditions ont permis d'infléchir certaines de nos positions, d'où les amendements que j'ai déposés.
Je remercie une dernière fois Sylvie Robert et son groupe : ce texte marque une première étape dans une réflexion cruciale pour l'avenir de notre démocratie.
Mme Colombe Brossel. - Je remercie l'ensemble de la commission, qui a travaillé sur ce texte en un temps record. Je remercie de façon plus personnelle Sylvie Robert, qui, au sein du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, travaille sur ces sujets importants, dans la continuité des travaux antérieurs de David Assouline. Pour avoir assisté à une grande partie des auditions, je puis confirmer que cette proposition de loi, ainsi que certains des amendements déposés à l'issue des auditions, répondent aux enjeux démocratiques, économiques et juridiques qui sont devant nous.
Je souhaite insister sur deux sujets.
D'abord, d'où partons-nous ? De la loi dite « Bloche » du 14 novembre 2016, qui a été fondatrice sur ces sujets. Elle constitue encore à ce jour le cadre juridique de certaines conditions d'exercice des journalistes. Or, si le cadre juridique est resté le même depuis huit ans, le monde, lui, a changé : des médias ont disparu ou sont apparus, mais surtout les réseaux sociaux, les plateformes, le numérique ont pris une ampleur considérable. En outre, la diffusion de fausses nouvelles, de « vérités alternatives », a pris une place ahurissante dans le débat démocratique.
Ainsi, je ne suis pas sûre que la loi « Bloche », quelque fondatrice qu'elle soit, suffise encore à réguler ce secteur. Aussi sommes-nous, en tant que législateurs, devant l'obligation d'agir. Du reste, la nécessité d'une action fait l'objet d'un consensus au sein de l'ensemble des acteurs entendus, même s'ils pouvaient diverger quant aux solutions à proposer.
Ensuite, cette proposition de loi arrive-t-elle trop tôt ? Ou trop tard ? Dans le contexte de l'accélération des mécanismes que je décrivais, il me semble plus bénéfique pour notre démocratie d'avancer à petits pas mais de façon certaine, que d'attendre un avenir meilleur mais incertain. D'ailleurs, les propositions de notre groupe sur cette question, reprises dans la proposition de loi, correspondent aux recommandations des états généraux de l'information, car nous travaillons sur le sujet depuis longtemps.
Sans doute aurons-nous des sujets de divergence, mais je ne puis me résoudre à admettre que des propositions de loi sénatoriales n'arrivent jamais au bon moment, au motif qu'un grand projet de loi pourrait répondre peut-être, par magie, un jour, à tous les problèmes... Faisons notre travail de législateur ; je préfère quelques avancées très importantes à un hypothétique Grand Soir, auquel j'ai cessé de croire depuis longtemps.
M. Jean-Gérard Paumier. - Je ne méconnais pas l'importance de l'indépendance des médias et de la protection des journalistes. Mais, selon moi, la première urgence en matière de qualité, de pluralisme et de véracité de l'information est ailleurs que dans les médias classiques. Elle réside dans les réseaux sociaux, qui distillent sans contrôle et sans frontières le poison des fake news et des trolls, avec un recours croissant à l'intelligence artificielle. La campagne américaine actuelle en est une illustration caricaturale.
Le législateur doit de toute urgence traiter ce sujet, limiter le pouvoir de sociétés privées, comme celle d'Elon Musk, et lutter contre les ingérences étrangères émanant souvent de pays autoritaires, qui font peser un péril réel sur notre démocratie, notamment en interférant sur les processus électoraux. Selon moi, c'est là qu'est l'urgence en la matière.
M. Ahmed Laouedj. - Je veux insister sur une situation préoccupante relative à l'indépendance de certains médias, celle des chaînes C8 et CNews. Ces chaînes ont été sanctionnées récemment par l'Arcom, ce qui soulève des interrogations légitimes quant à la ligne éditoriale et l'objectivité de leurs contenus. L'épisode survenu entre le présentateur de l'émission Touche pas à mon poste !, Cyril Hanouna, et un député de La France insoumise a provoqué une vive polémique et a conduit à une amende record de 3 millions d'euros à l'encontre de la chaîne. À la suite de cet incident, cette émission semble avoir pris un tournant regrettable de dénigrement systématique des élus et candidats de ce parti, ce qui remet en cause la responsabilité éthique de ces médias.
Ce n'est pas tout. Le Journal du dimanche a diffusé, le dernier jour de la campagne des législatives, une fausse information susceptible d'influencer le processus électoral ; de même, la chaîne Europe 1 a été mise en cause par l'Arcom pour manquement à l'honnêteté et au pluralisme de l'information dans une émission créée spécialement pour cette campagne. Ces exemples ne sont que la partie émergée de l'iceberg, mais ils révèlent une tendance inquiétante, une dérive menaçant notre démocratie.
Ne l'oublions pas, une information de qualité est le socle sur lequel repose notre société ; or, les auteurs de cette proposition de loi l'ont rappelé, certains médias tendent à amalgamer information et opinion. Ces chaînes jouissent d'une large audience, notamment auprès des plus jeunes. Il est essentiel que les médias respectent les principes de pluralisme et l'indépendance afin de garantir une information de qualité et une démocratie saine, notamment pendant les campagnes électorales.
Le bilan d'activité du Conseil d'État publié le 18 juin 2024, intitulé Le Pluralisme de l'information, un impératif démocratique, rappelle opportunément que la garantie de « l'expression de l'ensemble des opinions et courants de pensée des médias est un objectif inscrit dans notre Constitution et une des conditions de notre démocratie ». Cette proposition de loi n'est sans doute qu'une première étape dans le renouveau médiatique auquel nous aspirons, mais il nous incombe de la soutenir pour intensifier le pluralisme et l'indépendance, mais également pour protéger les reporters et leurs sources. Soyons à la hauteur des enjeux !
Mme Laure Darcos. - Contrairement à d'autres, je pense qu'il est positif de « cranter » les choses dès maintenant, avant l'examen d'un futur grand projet de loi, au travers d'un texte comme celui-ci, qui reprend des recommandations des états généraux de l'information.
Je tiens à dire, et je regrette les propos de M. Ahmed Laouedj à ce sujet, que Sylvie Robert ne vise nullement, au travers de ce texte, certains médias en particulier. Je comprends que - appelons un chat un chat - le groupe Bolloré puisse en gêner certains, mais beaucoup de personnes me disent aussi que la pluralité des opinions n'est pas non plus respectée au sein de l'audiovisuel public. Il s'agit de traiter tous les organes de tout le spectre médiatique. Il faut que le grand public, qui ne peut être spécialiste de tout, puisse reprendre confiance dans les médias, dans les journalistes.
Mme Catherine Morin-Desailly. - Le Sénat s'est toujours préoccupé de l'indépendance et du pluralisme des médias.
Sans doute ressentons-nous un décalage entre ce texte et les conclusions des États généraux de l'information. Cela dit, beaucoup des préconisations de ceux-ci émanent de rapports parlementaires ; ce sont souvent des recommandations de bon sens, qui ne font pas toujours appel à la loi. On y retrouve nombre de nos travaux. Le Parlement a donc bien travaillé, même s'il est peut-être moins audible que certains collectifs.
Nous attendons d'examiner les amendements de la rapporteure, notamment sur l'article 1er. Il est positif d'avoir travaillé avec l'Arcom, qui a pris une place considérable, ses missions se multipliant dans des domaines complexes. Nous devons entretenir un lien permanent avec cette autorité et contrôler son action en l'entendant régulièrement.
De nombreux textes ont été cités, comme la loi « Bloche », le rapport d'information sur la concentration des médias et la loi relative aux droits voisins, mais n'oublions pas le droit européen, car une importante réflexion est en cours à cet échelon sur la liberté et l'indépendance des médias ; je pense par exemple à l'acte sur la liberté des médias, le Media Freedom Act. Il existe d'ailleurs, à côté de la loi sur les droits voisins, une directive sur les droits d'auteur et droits voisins. Les amendements proposés par Sylvie Robert à l'article 7 sont-ils compatibles avec la législation européenne ?
Notre rapporteure a raison de s'insurger contre les plateformes, qui préfèrent payer des amendes colossales qu'appliquer la loi. Depuis quinze ans que nous légiférons, pas à pas, petit à petit, les plateformes résistent toujours, recourant à tous les moyens pour exercer un lobbying puissant à Paris et à Bruxelles afin que les règles ne s'appliquent jamais à elles. Il faut être tenace ! En dépit de l'application des droits voisins, il restera toujours la situation particulière de ces plateformes, qui, en raison de leur modèle économique et de leurs algorithmes toxiques, font que certains de leurs contenus sont plus exposés que d'autres.
Ma dernière réflexion porte sur le financement de l'audiovisuel public, dont nous allons bientôt débattre, puisque nous avons déposé une proposition de loi sur le sujet. C'est là aussi un enjeu d'indépendance des médias, qui requiert un financement pérenne.
M. Laurent Lafon, président. - Je signale que nous entendrons en audition, la semaine prochaine, Roch-Olivier Maistre, président de l'Arcom. Il viendra nous présenter son rapport d'activité, mais nous pourrons également l'interroger sur tous les sujets évoqués ce matin.
Mme Sylvie Robert, rapporteure. - Je vais d'abord répondre aux questions portant sur le calendrier : est-ce le bon moment ? Mes chers collègues, si l'on ne s'empare pas nous-mêmes de cette thématique, ce ne sera jamais le bon moment ! Je serai personnellement ravie, si un projet de loi nous arrive un jour, de débattre de façon globale de la pluralité des médias et de la protection des journalistes, voire du secret des sources et de l'intelligence artificielle - toutes questions essentielles pour notre démocratie, qui souffre de la désinformation. Mais, à ce jour, nous n'avons aucune certitude à ce sujet.
Ce texte a pour objet de montrer que le Sénat a beaucoup travaillé sur la question. Vous avez d'ailleurs contribué vous-même, chère Catherine Morin-Desailly, à engager le débat au sein de la commission des affaires européennes. Nous pouvons certes céder la priorité à l'Assemblée nationale, mais je propose que le Sénat prenne l'initiative et pose d'emblée quelques briques.
Je connais certaines des positions exprimées, mais pourquoi faudrait-il ne pas en débattre ? Pour ma part, vu l'urgence démocratique, je crois que c'est nécessaire. D'ailleurs, les intervenants aux États généraux de l'information se retrouvent complètement dans ce texte ; j'ai même parfois été, sur certaines dispositions, un peu timorée à leurs yeux.
Pierre-Antoine Levi a évoqué le modèle économique de la presse ; il a raison, c'est un sujet important. Jean-Gérard Paumier a pour sa part mentionné les réseaux sociaux et l'intelligence artificielle ; dans ce domaine, les choses vont très vite et nous devrons réexaminer la question de la régulation numérique à l'heure de l'IA. D'ailleurs, monsieur le président, il serait intéressant que notre commission lance une mission de suivi sur la question des droits d'auteur et droits voisins à l'heure de l'IA.
M. Pierre Ouzoulias. - Tout à fait.
Mme Sylvie Robert, rapporteure. - Cela nous permettrait de faire un point sur l'évolution des textes. Les acteurs entendus en audition ont de grandes inquiétudes sur le sujet.
Vous soulevez, cher Jérémy Bacchi, la question du droit d'agrément. Je peux entendre vos propos sur la responsabilité pénale du directeur de la publication, mais pour ma part, je conçois ce dispositif comme une marque de confiance entre l'actionnaire et la rédaction. Tout le monde a intérêt à ce que les choses se passent bien, personne ne gagnera à revivre ce qu'il s'est passé au JDD. Les rédactions ont besoin de confiance. Poursuivons ce débat en séance.
Cher Bernard Fialaire, j'ai surtout voulu donner une meilleure visibilité au comité d'éthique. J'ai notamment souhaité améliorer le contenu et l'effectivité des chartes de déontologie. Il faut aller un peu plus loin en matière de transparence, même si je ne prévois pas d'aller aussi loin que ce que vous proposez. Quoi qu'il en soit, la question de la déontologie et des comités d'éthique, qui sont deux choses différentes, est bien traitée dans le texte.
Sans revenir sur les propos de Max Brisson au sujet du droit d'agrément, je dirai un mot sur l'article 1er pour vous éclairer sur l'état d'esprit qui m'a animée en mettant au rang législatif la jurisprudence du Conseil d'État. Selon moi, c'est au législateur d'interpréter la loi, non au Conseil d'État. Nous en avons parlé lors de l'audition du président de l'Arcom : non seulement il n'était pas contre, mais il a complété l'article pour le rendre complètement identique à la délibération de l'autorité de régulation, en y ajoutant - ce qui n'est pas rien - la liberté éditoriale et les programmes consacrés à l'information. Sa contribution me fait dire qu'il est plutôt heureux de notre initiative : c'est au législateur qu'il revient de préciser l'interprétation de la loi de 1986, non au Conseil d'État !
Concernant l'article 2, vous avez raison : ce texte a été déposé avant que nous connaissions la décision de l'Arcom sur C8. Pour autant, j'avoue que ce sont en réalité tous les médias qui sont concernés. Comme l'ont souligné certains de mes collègues, cette question, touchant la société entière, interroge sur la perception et l'interprétation qu'ont nos concitoyens de leur rapport aux médias. Nous devons dépasser un certain nombre de sujets pour pouvoir mieux réguler et encadrer, en tant que législateur, un aspect qui nous paraît essentiel depuis des années au Sénat, à savoir l'indépendance, le pluralisme et la protection des journalistes.
Tel est l'esprit qui m'animait en déposant ce texte !
EXAMEN DES ARTICLES
Mme Sylvie Robert, rapporteure. - L'amendement COM-1 propose une rédaction plus fidèle à la jurisprudence du Conseil d'État du 13 février 2024. Elle a été travaillée conjointement avec l'Arcom.
M. Max Brisson. - Nous allons nous abstenir. Je connais les convictions de Sylvie Robert, qui a su répondre à mes interrogations sur l'article 1er, mais j'ai aussi entendu les propos de notre collègue Ahmed Laouedj, qui parle sans fard. Je soumettrai tous ces éléments à mon groupe et nous prendrons une décision en séance, où nous aurons le débat.
M. Laurent Lafon, président. - Il existe au Sénat un gentlemen's agreement qui veut que lorsqu'un texte est déposé par un groupe de l'opposition, on ne puisse pas empêcher son examen dans l'hémicycle.
M. Max Brisson. - Nous nous abstenons, nous ne bloquons rien !
M. Laurent Lafon, président. - Certes, je le précise à l'intention des autres groupes.
L'amendement COM-1 est adopté.
L'article 1er est ainsi rédigé.
Mme Sylvie Robert, rapporteure. - L'amendement COM-16 vise à mettre en oeuvre une plus grande transparence des algorithmes des réseaux sociaux et à améliorer la visibilité des contenus d'information de la presse d'information politique et générale (IPG).
Il met en avant un vrai sujet, qui nous a beaucoup occupés ces dernières années, notamment avec la loi relative à la lutte contre la manipulation de l'information. Il reprend de plus des idées avancées par les états généraux de l'information.
Cependant, il ne me paraît pas entrer dans le champ du texte que nous examinons aujourd'hui. Aussi, je propose de le déclarer irrecevable au titre de l'article 45 de la Constitution.
L'amendement COM-16 est déclaré irrecevable en application de l'article 45 de la Constitution.
Article 2
L'article 2 est adopté sans modification.
Mme Sylvie Robert, rapporteure. - L'amendement COM-2 précise que la saisine des comités d'éthique au sein d'un groupe de médias doit être réalisée par un mécanisme de saisine en ligne facilement accessible.
Cet amendement s'inscrit dans la lignée de positions plusieurs fois exprimées par notre commission sur les comités d'éthique et de déontologie, les fameux « Chipip ». Je vous rappelle que n'importe qui peut saisir ces comités par des moyens que nous rendons plus facilement accessibles.
Cependant, le site internet ne peut être géré que par le détenteur de l'autorisation d'émettre. Aussi, afin de renforcer la confiance en ces comités, je vous propose d'inscrire dans la loi que la confidentialité des échanges et l'anonymat seront garantis.
L'amendement COM-3 est un amendement de précision pour être cohérent dans les renvois au sein de l'article 30-8 de la loi du 30 septembre 1986.
L'amendement COM-4 vise à confier à l'Arcom la mission de valider la liste des membres des Chipip désignés par le conseil d'administration ou le conseil de surveillance du détenteur de l'autorisation d'émettre.
L'accord du collège de l'Arcom constitue une garantie supplémentaire d'indépendance des membres de nature à conforter leurs missions. Cet amendement reprend l'idée avancée par la commission d'enquête sur la concentration des médias en France.
L'amendement COM-2 est adopté, de même que les amendements COM-3 et COM-4.
L'article 3 est adopté dans la rédaction issue des travaux de la commission.
Mme Sylvie Robert, rapporteure. - L'amendement COM-14 entend soumettre au contrôle de la Haute Autorité pour la transparence de la vie publique (HATVP) les personnes physiques ou morales qui détiennent plus de 10 % du capital des titulaires d'autorisation d'émettre, les directeurs de publication et les personnes exerçant une activité d'influence en ligne.
Je comprends l'inspiration de cet amendement, mais outre des incertitudes juridiques, il ne me semble pas rentrer dans le cadre de cette proposition de loi. Je propose donc de le déclarer irrecevable au titre de l'article 45 de la Constitution.
L'amendement COM-14 est déclaré irrecevable en application de l'article 45 de la Constitution.
Mme Monique de Marco. - Mes amendements vont dans le sens du texte. Il s'agit uniquement de le conforter, tout en mettant certains sujets en débat.
Mme Sylvie Robert, rapporteure. - L'amendement COM-5 vise à rendre accessibles les chartes déontologiques sur le site internet des éditeurs de presse ou d'audiovisuelle.
L'amendement COM-6 propose de remplacer le contrôle de conformité des chartes déontologiques du Conseil de déontologie journalistique et de médiation (CDJM) par une transmission des chartes à cet organisme, qui en garantirait l'accès pour le public sur son site internet. Cette démarche de transparence s'inscrit dans la lignée des recommandations de la mission d'information de la commission des affaires culturelles de l'Assemblée nationale sur la loi du 14 novembre 2016. Je reprends au vol une suggestion qui nous a été faite durant les auditions de charger le CDJM d'une mission de « chartothèque », à savoir la compilation et la mise à disposition sur son site de l'ensemble des chartes.
L'amendement COM-5 est adopté, de même que l'amendement COM-6.
L'article 4 est adopté dans la rédaction issue des travaux de la commission.
Mme Sylvie Robert, rapporteure. - L'amendement COM-13 propose de modifier la loi du 1er août 1986 portant réforme du régime juridique de la presse en insérant une nouvelle condition pour la définition d'une « publication de presse » qui serait la proportion de journalistes professionnels, fixée à 75 %.
Je comprends bien l'inspiration de cet amendement, dont l'objet est en réalité de diminuer la proportion de pigistes dans les publications de presse. Cependant, il me paraît éloigné de l'objet de la proposition de loi, et je vous propose de le déclarer irrecevable au titre de l'article 45 de la Constitution.
L'amendement COM-13 est déclaré irrecevable en application de l'article 45 de la Constitution.
M. Laurent Lafon, président. - Je vous rappelle que l'article 5 a été délégué au fond à la commission des lois qui nous propose d'adopter l'amendement COM-12 et l'article 5 ainsi modifié.
L'amendement COM-12 est adopté.
L'article 5 est ainsi rédigé.
Après l'article 5
L'amendement COM-15 est déclaré irrecevable en application de l'article 45 de la Constitution.
Mme Sylvie Robert, rapporteure. - L'amendement COM-17 vise à doter les rédactions d'une personnalité juridique en lieu et place du droit d'agrément proposé à cet article.
Il s'agit là d'un vieux débat, qui a notamment beaucoup agité les travaux de notre commission d'enquête sur la concentration des médias en France. Le fait de doter les rédactions d'une personnalité juridique serait de nature à mieux assurer leur indépendance et à les mettre en position de négociation plus favorable avec les actionnaires. L'auteur de l'amendement estime cette solution plus réaliste et consensuelle que le droit d'agrément que je propose à cet article.
Je préférerais néanmoins que ce dernier puisse être débattu en séance publique, ce que nous ne pourrions pas faire si nous adoptions cet amendement. Notre collègue ne pourrait-elle pas redéposer cet amendement sous la forme d'un article additionnel ? Dans l'immédiat, j'émettrai un avis plutôt défavorable.
Mme Monique de Marco. - Je comprends tout à fait votre préoccupation. Pour autant, cet amendement tient compte des auditions menées dans le cadre de la commission d'enquête sur la concentration des médias en France. J'ai également été inspirée par Nathalie Goulet, qui a fait cette proposition tout à fait pertinente lors de l'examen d'une PPL voilà plus d'un an. J'ai donc pensé que la majorité sénatoriale me suivrait.
L'amendement COM-17 est retiré.
L'article 6 est adopté sans modification.
Mme Sylvie Robert, rapporteure. - Avec l'amendement COM-7, je vous propose que le décret fixant les éléments nécessaires à une négociation équilibrée entre les éditeurs, les agences de presse et les services de communication au public en ligne soit pris en Conseil d'État.
Je souhaite ainsi entourer des meilleures garanties juridiques le décret que je propose à l'article 7 et qui vise à fixer les éléments devant être transmis par les plateformes aux éditeurs lors de la négociation des droits voisins. Pour moi, le décret offre la possibilité de remettre tous les acteurs autour de la table pour négocier. C'est un point important.
Lors de son audition, la vice-présidente de l'Autorité de la concurrence a très bien souligné la complexité de l'exercice, à laquelle elle s'est déjà livrée dans le cadre des injonctions à la société Google. Il s'agit donc d'un amendement que je crois très utile pour éviter de potentiels contentieux, dans un secteur où ils ne manquent déjà pas.
L'amendement COM-8 a pour objet de mettre en place une plus grande confiance entre les éditeurs, les agences de presse et les services de communication au public en ligne, en instaurant dans le décret les conditions d'un réel contrôle de la fiabilité des données transmises.
Avec cet amendement, je vous propose un nouveau pas en direction d'une relation plus équilibrée et confiante entre les éditeurs de presse et les plateformes. Il me paraît important de permettre une bonne « auditabilité » de ces données afin de fonder les négociations sur des bases transparentes et partagées.
L'amendement COM-9 tend à préciser les sanctions en cas de refus des services de communication au public en ligne de se conformer aux obligations de transmission des éléments prévus dans le décret.
La procédure que j'avais initialement envisagée souffrait d'un certain manque de précision. Je propose donc de confier cette mission de manière explicite à l'Autorité de la concurrence et de la placer dans un cadre déjà maîtrisé par elle, à savoir les articles 464-1 et 464-2 du code de commerce. L'Autorité pourrait donc prononcer des astreintes journalières, comme elle n'a pas hésité à le faire pour Google, dans la limite de 5 % du chiffre d'affaires mondial journalier. Toutes les garanties seraient par ailleurs respectées.
S'agissant de l'amendement COM-10, les auditions ont montré qu'il n'entrait pas dans les attributions de l'Autorité de la concurrence de déterminer les modalités de la rémunération due par les services de communication en ligne aux éditeurs et agences de presse au titre des droits voisins. Je vous propose donc de supprimer les dispositions figurant dans le texte initial.
L'amendement COM-7 est adopté, de même que les amendements COM-8, COM-9 et COM-10.
L'article 7 est adopté dans la rédaction issue des travaux de la commission.
Mme Sylvie Robert, rapporteure. - L'amendement de coordination COM-11 vise à assurer l'application des mesures de la proposition de loi dans les îles Wallis-et-Futuna, en Polynésie française, en Nouvelle-Calédonie et dans les Terres australes et antarctiques françaises.
L'amendement COM-11 est adopté et devient article additionnel.
Article 8
L'article 8 est adopté sans modification.
La proposition de loi est adoptée dans la rédaction issue des travaux de la commission.
Le sort des amendements examinés par la commission est retracé dans le tableau suivant :
La réunion est close à 11 h 20.