Jeudi 31 mai 2018
- Présidence de M. Jean Bizet, président -
La réunion est ouverte à 8 h 35.
Travail - Détachement des travailleurs : rapport d'information, proposition de résolution européenne et avis politique de Mme Fabienne Keller et M. Didier Marie
M. Jean Bizet, président. - Je vous informe que la communication sur l'Union pour la Méditerranée est ajournée, car notre rapporteur Jean-Pierre Grand est retenu dans son département.
Le dossier des travailleurs détachés qui nous occupe aujourd'hui est particulièrement sensible et a des répercussions directes dans nos territoires. Nous sommes attentifs à ce que les milieux du BTP et de l'artisanat peuvent nous en dire. Une directive dite d'exécution de 2014 avait apporté plusieurs précisions sur la mise en oeuvre d'un dispositif issu d'une directive de 1996, aplanissant un certain nombre de critiques. La Commission européenne a entrepris la révision de cette dernière directive. Elle a également fait des propositions concernant les règles applicables en matière de sécurité sociale.
Sur la base du travail important qu'avait conduit notre collègue Éric Bocquet, nous avons déjà eu l'occasion d'affirmer nos positions à travers des résolutions européennes. Je remercie nos deux rapporteurs d'avoir repris ce dossier complexe. Leur rapport nous permet d'y voir plus clair sur le compromis qui a été trouvé entre le Conseil et le Parlement européen - qui l'a voté à une très large majorité avant-hier - concernant la révision de la directive de 1996. Au-delà, il met en évidence les enjeux de la révision des règles européennes en matière de sécurité sociale. Enfin, il nous permet d'examiner la situation spécifique du transport routier.
M. Didier Marie. - Fabienne Keller et moi avons mis nos pas dans ceux d'Éric Bocquet, mais les choses ont évolué depuis son travail. Les règles européennes en matière de détachement ont été adoptées en 1996 par une Union européenne qui ne disposait alors que de 15 membres. Un salarié détaché doit être rémunéré aux conditions minimales du pays d'accueil, définies par la loi ou des conventions collectives d'application générale. Il continue à verser des cotisations sociales dans le pays d'établissement. Confrontée avec les élargissements et la crise à un recours accru au détachement et à une multiplication concomitante des fraudes, l'Union européenne a adopté, en 2014, une directive d'exécution qui vise, quant à elle, à accroître les contrôles.
Le nombre de salariés détachés a enregistré en 2017 une hausse de 46 % en France, passant de 354 151 à 516 101, hors secteur des transports. Ce nombre avait déjà augmenté de 24 % en 2016 et de 25 % en 2015. Ces chiffres pourraient être imputables à une augmentation des contrôles qui aurait induit un plus grand nombre de déclarations. Les Portugais sont les principaux concernés avec près de 74 500 travailleurs détachés en 2017, devant les Polonais, qui sont plus de 61 000, les Allemands et les Roumains étant autour de 45 000. Plus de 37 000 Français sont également détachés en France.
M. Jean Bizet, président. - Vous voulez dire hors de France ?
M. Didier Marie. - Non, ils sont domiciliés à l'étranger et détachés en France, aussi surprenant que cela puisse paraître.
À l'initiative de la France et de plusieurs de ses partenaires, la Commission européenne a présenté en mars 2016 une proposition de révision ciblée de la directive sur le détachement des travailleurs. L'ambition affichée était de majorer le coût du détachement pour réduire le phénomène de dumping social observé.
Malgré les réticences de plusieurs États, principalement situés à l'Est du continent, mais aussi de l'Espagne, un compromis a pu être trouvé au Conseil en octobre dernier. Nous étions venus le présenter. Celui-ci a ouvert la voie à des négociations en trilogue avec le Parlement européen. Elles ont débouché sur un accord le 28 février dernier. Le Parlement européen a validé ce compromis le 29 mai. Il doit désormais définitivement être adopté par le Conseil.
Le nouveau dispositif entend garantir le principe « à travail égal, salaire égal, sur un même lieu de travail ». La rémunération versée au travailleur détaché sera ainsi désormais totalement équivalente à celle dont bénéficie un travailleur local au titre de la loi ou des conventions collectives d'application générale ou régionale. À la demande de la France, la durée du détachement est désormais limitée à douze mois à laquelle s'ajoute une option de six mois supplémentaires. Le délai de transposition du texte est relativement court puisqu'établi à deux ans.
Si ces trois points, en particulier le premier, constituent de réelles avancées qu'il convient de saluer, une étude plus poussée du dispositif laisse apparaître quelques zones d'ombre. Ainsi, le texte distingue logiquement la rémunération des indemnités d'hébergement, de transport et de nourriture. Celles-ci ne peuvent plus être considérées comme des éléments de salaire. Reste qu'elles sont versées sur la base des forfaits établis dans les pays d'envoi. Je doute qu'un ouvrier polonais ou portugais travaillant sur un chantier parisien puisse, dans ces conditions, se loger et se nourrir convenablement...
Je relève également que la proposition initiale de la Commission européenne ciblait les chaînes de sous-traitance. Celles-ci ont disparu du texte final. Je me suis rendu la semaine passée sur un chantier parisien avec l'inspection du travail. La sous-traitance en cascade y est la règle. On peut donc tout à fait envisager demain que deux salariés détachés sur un même chantier ne soient pas rémunérés aux mêmes conditions en fonction de leur place sur la chaîne de sous-traitance... Je m'interroge enfin sur l'effet cosmétique de la limitation à dix-huit mois de la durée du détachement, sachant qu'en France un détachement dure en moyenne 47 jours.
Plus largement, il aurait été judicieux de renforcer dans le même temps la lutte contre les faux détachements et autres « sociétés boîte aux lettres ». Mon déplacement la semaine passée a été éloquent. Sur trois sociétés contrôlées sur un même chantier, une pratiquait un faux détachement puisque les salariés polonais ne travaillaient jamais en Pologne et étaient établis en France depuis au moins cinq ans et un prestataire italien s'appuyait sur de faux travailleurs indépendants pour assurer la conduite d'un chantier.
Notre rapport détaille les mesures qui pourraient être envisagées afin de renforcer la lutte contre ces pratiques déviantes : définition d'un chiffre d'affaires annuel minimal dans le pays d'établissement de la société qui détache, publication par la future Autorité européenne du travail d'un registre des entreprises effectuant des prestations de service internationales et d'une liste noire des entreprises qui fraudent, principe d'une interdiction pour une société européenne de localiser ou de transférer son siège social dans un État membre où elle n'a aucune véritable activité économique.
Il conviendra, dans cette optique, de donner les moyens suffisants à la future Autorité européenne du travail ainsi qu'aux services des États membres. Cette autorité doit permettre une meilleure coordination entre les inspections du travail des États membres sans s'y substituer. Elle doit pouvoir s'appuyer sur une banque carrefour de la sécurité sociale, fondée sur une interconnexion des systèmes européens de sécurité sociale.
L'affiliation au régime de sécurité sociale du pays d'envoi est, en effet, l'autre volet du détachement. Pour l'heure, le certificat A1 permet d'attester cette affiliation. Dans le cadre de la révision en cours des règlements européens de coordination des régimes de sécurité sociale, la Commission a proposé de mieux encadrer la procédure de délivrance du certificat A1. On peut regretter qu'elle souhaite utiliser le biais des actes délégués pour y parvenir. Nous souhaitons au contraire qu'une plus grande marge de manoeuvre soit laissée aux États membres afin de renforcer les contrôles. Nous devons parvenir à sécuriser ce formulaire, en y apposant notamment une photo ou en le numérisant. Il s'agit également de parvenir à la création d'un numéro de sécurité sociale européen.
Enfin, les autorités de contrôle des États membres doivent désormais être en mesure de déqualifier rapidement un certificat qui serait entaché d'irrégularité, sans être tenues par une procédure de coopération administrative qui s'avère lourde. Là encore, la future Autorité européenne du travail peut constituer une opportunité.
Le principe d'une affiliation préalable du salarié détaché au régime de sécurité sociale de l'État d'envoi trois mois avant détachement a été retenu par le Conseil. Il convient de saluer cette avancée. Reste qu'on observe ces derniers mois un déport du statut de travailleur détaché vers celui de travailleur pluriactif. En effet, dès lors qu'un travailleur est appelé à travailler de manière habituelle dans plus d'un État au cours d'une durée de 12 mois, soit simultanément, soit en alternance, sa situation au regard de la sécurité sociale ne relève plus des dispositions relatives au détachement. Ce statut permet à la société qui l'emploie de déroger aux règles de limitation de durée de détachement ou d'activité substantielle dans le pays d'établissement. Il convient donc d'aligner le statut de travailleur pluriactif sur celui de travailleur détaché.
Avant de céder la parole à Fabienne Keller, j'aborderai d'un mot la question même du principe de l'affiliation au régime du pays d'envoi, qui induit une distorsion de concurrence. Le coût du travail n'est, en effet, pas harmonisé au sein de l'Union. Reste qu'une affiliation au régime du pays d'accueil s'avèrerait complexe à mettre en oeuvre et poserait à terme des problèmes de portabilité des droits. La solution imaginée par le président de la République d'un versement des cotisations sociales au taux du pays d'accueil puis d'une répartition entre régime du pays d'établissement et fonds de convergence peut également paraître utopique. Plus modestement, il pourrait être envisagé que le versement au taux du pays d'envoi soit effectué dans le pays d'accueil avant d'être transféré. Cette mesure permettrait de contrôler la réalité de l'affiliation au régime de sécurité sociale du pays d'établissement.
Mme Fabienne Keller. - Au Conseil européen de juin dernier, la France a accepté, en contrepartie de la limitation à douze mois du travail détaché, de sortir du dossier le secteur routier, qui reste donc en cours de discussion. C'est le secteur ou le détachement est massif et difficile à organiser, compte tenu de la mobilité des travailleurs.
La révision de la directive de 1996 renvoie à l'adoption d'une lex specialis les modalités d'application du régime du détachement au secteur du transport routier. La France était favorable à ce que la directive relie plus explicitement les deux questions. Elle s'est heurtée à l'intransigeance des pays du Groupe de Viegrad, mais aussi de l'Espagne qui a subordonné en octobre dernier son vote sur le compromis à la distinction des deux régimes. Le texte initial de la Commission européenne ne prévoyait pas non plus un alignement complet. Ce renvoi constitue néanmoins un véritable apport puisqu'il clarifie la situation du secteur du transport routier, considéré par certains États membres comme ne relevant pas du régime du détachement des travailleurs. Seuls quatre pays - Allemagne, Belgique, Espagne et France - appliquent aujourd'hui les normes relatives au détachement au transport routier de marchandises.
En 2017, 880 295 attestations de transport ont été produites par des entreprises étrangères en France. Elles représentent 81 % des déclarations de détachement. Les entreprises qui détachent le plus sont polonaises - près de 213 000 attestations - espagnoles, pour 105 000 attestations environ, et roumaines, avec 99 000 attestations environ. Les chauffeurs sont essentiellement polonais, pour près de 171 500, roumains pour 145 500 et ukrainiens pour près de 91 000.
La lex specialis est contenue dans le paquet « Europe en mouvement » que la Commission européenne a présenté il y a un an. L'objectif affiché de l'ensemble du paquet est de moderniser la mobilité et les transports européens, afin d'aider le secteur à rester compétitif tout en garantissant une transition vers une énergie propre et la numérisation. La Commission européenne entend, dans le même temps, réduire les formalités administratives pour les entreprises, lutter contre le travail illégal et offrir aux travailleurs des conditions d'emploi et des temps de repos adéquats dans le secteur du transport routier
Les négociations sur ce paquet font apparaître deux groupes de pays : le premier constitué du groupe de Viegrad auxquels s'ajoutent essentiellement la Bulgarie, l'Espagne les pays baltes et le Portugal entend garantir les parts de marchés acquises par leurs flottes au sein de l'Union européenne. La Pologne est ainsi le premier pavillon routier européen et réalise à elle seule près de 28 % de l'activité de transport routier de marchandises au sein de l'Union européenne, le secteur représentant 10 % de son PIB. L'Alliance du routier, créée à l'initiative de la France le 31 janvier 2017 et composée de l'Allemagne, de l'Autriche, de la Belgique, du Danemark, de l'Italie, du Luxembourg, de la Norvège - au titre de l'Espace économique européen - et de la Suède, vise à une réduction des distorsions de concurrence entre les États membres et une véritable convergence en matière sociale. La Grèce a rejoint l'Alliance en mai 2018.
S'agissant du détachement, le paquet prévoit deux types d'application. Ces règles viseront les opérations de transport international dès lors qu'elles sont égales ou supérieures à trois jours sur une période d'un mois calendaire, hors transit. Ce calcul, rétroactif, apparaît complexe et difficilement applicable. Le droit français est aujourd'hui plus protecteur puisqu'il applique les normes européennes en matière de détachement aux opérations de transport international dès le premier jour passé sur le territoire et non au bout de trois jours. Si le texte était adopté en l'état, il pourrait être difficile de maintenir la norme française.
Les règles en matière de détachement concerneront également le cabotage. La Commission propose aujourd'hui une dérégulation complète en la matière. Actuellement, un camion peut, à l'issue d'une livraison internationale, effectuer trois opérations de cabotage sur une période de sept jours dans l'État de livraison. Ce serait illimité. On observe ainsi des phénomènes de cabotage permanent. La Commission européenne propose aujourd'hui de supprimer le nombre d'opérations de cabotage mais réduit la période pour effectuer celles-ci. Dans un délai de cinq jours, un transporteur pourrait donc effectuer autant de livraisons qu'il le souhaite, les opérations de cabotage pouvant également viser les pays limitrophes.
La Commission justifie cette position en insistant sur la simplification qu'elle représente pour les autorités de contrôle. Dans le même temps, celles-ci se voient assigner des objectifs : la Commission souhaite qu'elles vérifient 2 % de l'activité de cabotage sur leur sol d'ici au 1er janvier 2020, puis 3 % à partir du 1er janvier 2022. La Commission indique que la révision en cours des normes relatives au temps de travail des transporteurs routiers devrait également relativiser le recours au cabotage. Il convient cependant de rappeler que le régime des opérations de cabotage vise le camion et non le chauffeur. Un changement d'équipage est donc parfaitement envisageable afin de limiter l'impact des obligations de repos à domicile envisagées.
De fait, une dérégulation complète du cabotage ne serait, par ailleurs, pas sans incidence sur le transport routier français, qui représente environ 700 000 emplois. Les différentiels de coût par rapport à la concurrence des pays de l'Est mais aussi de l'Espagne et du Portugal ont déjà progressivement conduit à une éviction du pavillon français des opérations de transport international. La part de l'international ne représente ainsi que 7 % des activités du transport routier mobile pour compte d'autrui français, là où elle dépasse 80 % en Lettonie ou en Slovaquie ou atteint plus de 60 % au Portugal et en Pologne. Les chiffres sont également éloquents lorsqu'on mesure l'importance du pavillon français dans les échanges internationaux en partance ou à destination de la France ; si la part atteignait 55,7 % en 1992, elle est aujourd'hui ramenée à 10,5 %. Les entreprises françaises se concentrent donc principalement sur le marché national où elles sont également concurrencées par les transporteurs européens dans le cadre des opérations de cabotage - d'où la sensibilité de ce secteur. Le régime actuel s'est traduit par une multiplication des opérations de cabotage par cinq sur la période 1999-2016. La France est donc un marché déjà largement ouvert, comme en témoigne l'augmentation de 17 % des opérations de cabotage en 2016 par rapport à 2015 - en un an seulement !
Une libéralisation complète renforcerait donc cette tendance et menacerait directement la survie du secteur, quand bien même seraient strictement appliquées les règles afférentes au détachement et le principe d'équivalence de rémunération. La structure de celle-ci diffère en effet d'un pays à l'autre, notamment en ce qui concerne le poids des charges sociales. Le salaire versé en France est constitué d'une part fixe évaluée à 77 % et de primes estimées à 23 % de la rémunération totale. Le salaire versé à un chauffeur bulgare est constitué à 76 % d'indemnités journalières qui viennent s'ajouter à un salaire fixe relativement bas, sur lequel sont calculées les cotisations. Le coût annuel d'un chauffeur routier est ainsi estimé à 20 348 euros en Pologne contre 47 000 euros en France.
Les ministres des transports français et allemand ont déjà indiqué, à la veille du Conseil Transports du 7 juin prochain, que les textes actuellement sur la table empêchaient d'aller dans le sens de l'application du principe simple : « À travail égal, salaire égal, sur le même territoire ». Il y a lieu d'appuyer la fermeté des autorités françaises sur ces questions tant les propositions de la Commission mais aussi les amendements de la Présidence bulgare ne remplissent pas les objectifs initiaux de renforcement des droits des conducteurs et de réduction des distorsions de concurrence.
Il convient de rappeler à ce stade que le compromis trouvé en trilogue, le 28 février 2018, par le Parlement européen et le Conseil sur la révision de la directive de 1996 sur le travail détaché garantit a minima l'application du régime de détachement aux chauffeurs tel que prévu par le droit européen actuel et à venir, une fois la révision définitivement adoptée. Ce qui permet, en l'espèce, de maintenir les dispositions prévues par le droit français, à savoir l'application du droit du travail français dès l'entrée sur le territoire. Au-delà de ces textes, il apparaît indispensable de lancer une réflexion sur l'élaboration d'un statut de travailleur hautement mobile, qui permettrait une uniformisation des statuts des chauffeurs routiers dans l'ensemble de l'Union européenne, destinée à juguler les distorsions de concurrence, garantir un niveau élevé de protection sociale et assurer une mobilité sûre et durable.
Notre proposition de résolution relaie ces observations. Nous souhaitons également que le transport combiné puisse se voir appliquer le régime du détachement, ce qui n'est pas le cas actuellement. Nous souhaitons enfin, en vue de renforcer les contrôles, que soit généralisé dès 2023 le chronotachygraphe numérique - le mouchard - qui permet de mieux vérifier les itinéraires et les temps de conduite. La Commission souhaite que cette généralisation n'intervienne qu'en 2034 alors que, de l'avis des experts, cette mesure peut largement être avancée.
M. Jean Bizet, président. - La partie délicate du transport routier est donc loin d'être réglée, alors que c'est dans ce domaine que le dumping social est le plus pratiqué.
M. René Danesi. - On ne peut qu'approuver une proposition de résolution qui arrive à point nommé, puisque le Parlement européen a voté avant-hier le projet de révision de la directive par 456 voix contre 147. La proposition de résolution met bien en évidence les insuffisances de cette révision, fruit du compromis entre les différents pays : le point 23 le « salue », mais « considère qu'il doit permettre de mieux respecter les droits sociaux des travailleurs et lutter contre les distorsions de concurrence »... Cela montre bien qu'il reste du chemin à faire !
Trois mesures phares vont dans le bon sens : la rémunération doit être la même pour tous, y compris les primes prévues dans les conventions collectives. Les employeurs ne pourront plus inclure dans le salaire les frais d'hébergement et de nourriture, ce qui semble normal. Les calculs de ces frais se feront malheureusement sur la base du pays d'origine - ce qui est une demi-avancée. Le détachement est limité à douze mois, alors que la durée moyenne dans l'Union européenne est de quatre mois - cette limitation reste donc théorique. Il y aura toujours distorsion de concurrence, grâce au mode de calcul des frais et à l'absence d'encadrement de la sous-traitance. Le point 26 dit très bien que les accords d'entreprise devraient s'appliquer aux travailleurs détachés. Enfin et surtout, les charges sociales seront toujours celles du pays d'origine.
En conclusion, le point 20 de notre résolution rappelle l'objectif du détachement : « permettre de répondre à un manque de main d'oeuvre dans un secteur précis et faciliter la mobilité au sein de l'Union européenne » -, or c'est loin d'être le cas. Je lisais une page locale du journal l'Alsace sur la récolte des asperges - laissez-moi vous dire à ce propos que l'Alsace en produit d'excellentes ; le Rhin ayant divagué pendant des millions d'années, nous avons beaucoup de terrains sablonneux. Le titre de l'article disait : « Récolte des asperges : les Polonais se font rares ». S'ils se font rares, c'est parce que - Dieu merci pour eux - ils gagnent de mieux en mieux leur vie et sont dès lors moins tentés de prendre des congés sans solde pour gagner un peu plus d'argent par ce travail saisonnier. On le voit, ce problème ne se réglera qu'avec l'élévation du niveau de vie des travailleurs dans les pays d'origine, comme c'est le cas en Pologne.
D'après l'article, les Polonais sont remplacés par des Roumains. Si tout se passe bien, ils seront demain remplacés par des Macédoniens ou des Albanais... Il y a 550 000 travailleurs détachés en France, c'est énorme ! En Grande-Bretagne, il y en avait beaucoup plus et cela n'a pas été sans influence sur le Brexit : ils étaient 1,2 million, poussés avec plus ou moins de délicatesse vers la sortie. Il nous faut penser à nos compatriotes en bas de l'échelle, qui pointent à Pôle emploi, et voient des étrangers travailler chez nous parce que le patron paie des charges sociales beaucoup moins élevées qu'en France - où elles sont parmi les plus élevées d'Europe... Cela favorise forcément le populisme.
M. Jean-François Rapin. - La dérégulation du cabotage aura un impact considérable sur nos petites entreprises de transport. Avec le développement de l'e-commerce, les derniers 10 km, qui sont les plus complexes, sollicitent beaucoup nos petites entreprises de transport local. Il y a du lobbying à faire sur ce point-là. Globalement, nos entreprises de transport ne se portent pas trop mal. Il ne faudrait pas qu'elles en souffrent, car elles sont de grandes créatrices d'emploi sur tout le territoire.
M. Claude Kern. - Bravo aux rapporteurs pour leur excellent travail. Je souscris à tout ce qui a été dit. Attention à l'absence de disposition encadrant les chaînes de sous-traitance. Les entreprises utilisent souvent ce subterfuge en utilisant des entreprises boîtes aux lettres. Au point 31, au lieu de « souhaite qu'elle puisse élaborer un registre », il serait préférable de dire « juge » ou « considère nécessaire l'élaboration d'un registre ... »
M. André Gattolin. - ... « ou demande l'élaboration d'un registre... »
M. Jean-François Rapin. - Au point 47, je propose également de rendre l'expression plus incisive en écrivant « s'oppose à une dérégulation du cabotage », plutôt que « juge indispensable de conserver le nombre maximal d'opérations de cabotage actuellement autorisé. »
M. Pierre Ouzoulias. - Merci pour la qualité de votre travail et pour la conscience qui vous anime. Nous sommes tous ici de vrais européens et nous avons pleinement conscience que les processus que nous dénonçons peuvent remettre en cause l'idée européenne. Nous assistons à un double mouvement : un repli des États sur eux-mêmes - la crise italienne nous montre jusqu'où cela peut aller - et une Europe qui s'apparente de plus en plus à un pur marché, avec un nivellement vers le bas. Si ces deux mouvements continuent, nous serons bientôt face à des contradictions majeures qu'il nous faudra bien résoudre d'une manière ou d'une autre. La proposition de résolution souligne utilement ces difficultés.
J'ajouterai un point : concernant le transport routier, vous n'avez pas évoqué la transition énergétique. Avec les facilités données au cabotage, certaines pratiques se multiplieront alors qu'elles sont en contradiction avec nos engagements de réduction des émissions de carbone. Il faut avoir à l'idée - les Alsaciens sont bien placés pour le savoir et les sénateurs de Savoie nous le disent aussi - qu'on ne pourra pas supporter une augmentation du transport routier. L'esprit qui nous unit, quel que soit notre groupe, c'est la nécessité de sauver l'Europe, et, pour cela, il faut une Europe sociale.
M. Jacques Bigot. - Un mot sur la forme de notre résolution. Je salue cette directive, mais celle-ci reste insatisfaisante. En Alsace, nous savons la manière dont les entreprises allemandes obtiennent y compris des marchés publics en faisant appel à des entreprises sous-traitantes recourant massivement à des travailleurs détachés (notamment roumains) payés 30 % moins cher. Par conséquent, les entreprises locales du BTP ne peuvent accéder à certains marchés, le coût de leur main-d'oeuvre étant plus élevé. Le problème demeurera donc puisque, contrairement à nos voisins allemands, nous ne savons pas protéger notre marché.
La France a accepté ces négociations, mais elle aurait souhaité aller plus loin. Et donc, notre résolution devrait plus fortement insister sur cette insatisfaction. Laisser entendre que nous sommes satisfaits me paraît, d'un point de vue politique, sur la scène européenne, pas tout à fait approprié. Il faudrait parfois envisager des directives un peu plus musclées, en dépit des compromis nécessaires.
Peut-être pourrions-nous demander à nos collègues de la commission des affaires économiques de suivre l'évolution de ce dossier. Je ne suis pas certain que cette directive modifie fondamentalement les choses, même si elle constitue un progrès.
M. André Gattolin. - Nos deux rapporteurs ont fait preuve de pédagogie sur ce sujet complexe. S'agissant des transports routiers, secteur ultra concurrentiel, et de la question de la transition énergétique, je rejoins Pierre Ouzoulias. Je m'étonne que certains chauffeurs routiers traversent l'Europe de la Pologne jusqu'au Portugal en embarquant, depuis le pays d'origine, 1 000 ou 2 000 litres de réserve de fioul à bord des camions, ce qui est extrêmement dangereux et d'une légalité douteuse. De fait, ces transporteurs, hormis les frais de péage, n'assument aucun coût (environnementaux, risques, etc.). Il faudrait interdire les réservoirs d'une capacité supérieure à 400 ou 500 litres. Cela obligerait ces chauffeurs routiers à refaire le plein en France (et donc à acquitter les taxes pesant sur les carburants) et cela permettrait, lors des arrêts en station-service, de procéder à des contrôles. J'avais eu un échange à ce sujet avec l'ancienne ministre de l'écologie, qui n'avait pas vraiment compris le sens de ma proposition.
Je suis un peu inquiet, car j'ai l'impression que les contrôles sont toujours à la charge des pays de destination de ces travailleurs détachés, tandis que leurs pays d'origine sont par nature beaucoup plus laxistes. Et l'absence de contrôles plus sévères en amont rend les choses extrêmement complexes. Parce que 2 ou 3 % de contrôles aléatoires sur des centaines de milliers de cas, c'est totalement ridicule !
Par ailleurs, je trouve assez intéressante l'idée d'une conditionnalité de certaines aides européennes au titre des fonds sociaux en cas de nouvel élargissement (outre les exigences en matière d'indépendance de la justice, de lutte contre la corruption, etc.), idée évoquée la semaine dernière lors de l'audition du commissaire européen Günther Oettinger. Compte tenu des différentiels sociaux pouvant exister entre les pays membres et un pays candidat, il faudrait obliger celui-ci (et même certains pays membres) à mettre en place des moyens de lutte contre cette fraude sociale potentielle, source de dysfonctionnements comme l'a souligné notre collègue René Danesi.
Au point 44 de la proposition de résolution, il est indiqué que le Sénat « partage la volonté de la Commission européenne de renforcer les contrôles », tandis qu'au point suivant, il est indiqué qu'il « estime les propositions de la Commission complexes, inapplicables ou potentiellement dangereuses » ! C'est bien là le problème, et heureusement que le rapport détaille ces dangers. Concernant les transports, la révision du règlement sur l'application du régime du détachement doit mener à une réflexion d'ensemble sur cette question, en particulier sur ses aspects environnementaux, et non pas uniquement sur ses aspects sociaux.
Quant à la sous-traitance en cascade, on l'observe malheureusement aussi en France (certains grands opérateurs de l'État en abusent). Il n'existe pratiquement aucune réglementation européenne sérieuse.
Mme Colette Mélot. - Je salue le travail des rapporteurs et leur rapport limpide. Cette directive et le travail qui a été amorcé sont une avancée que nos concitoyens européens attendent. Certes, le résultat n'est pas totalement satisfaisant, mais, compte tenu du nombre de pays membres et de la multiplicité des régimes sociaux, toute harmonisation est impossible. J'approuve donc cette proposition de résolution.
Mme Gisèle Jourda. - Ma question porte sur le point 32 de cette proposition de résolution, où il est indiqué que le Sénat « considère qu'une entreprise devrait effectuer au moins la moitié de son chiffre d'affaires annuel au sein de son pays d'établissement ». Concernant les entreprises de transport routier, dont les activités sont internationales, qu'en est-il ?
M. Jean Bizet, président. - Il ne faut pas perdre de vue l'objectif originel du détachement de travailleurs, à savoir répondre à un manque de main-d'oeuvre dans un secteur donné à un endroit donné et favoriser ce qu'on appelle le marché unique. Au fil du temps, les distorsions de concurrence se sont installées, ce qu'il faut maintenant corriger pour aller vers une certaine Europe sociale ; on ne peut pas rester focalisé sur la seule problématique économique.
M. Didier Marie. - Madame Jourda, cette proposition de résolution et le rapport qui l'accompagne comportent trois aspects, mais il faut en distinguer deux très clairement : la révision de la directive de 1996 sur les travailleurs détachés, en dépit de quelques regrets, va globalement dans le bon sens ; en revanche, le volet transports est pour l'instant dans une impasse, les négociations achoppant sur toute une série de sujets. De fait, la France et l'Allemagne refuseront la proposition de la Commission relative au pacte transports. Le point 32 ne concerne donc pas le transport routier, auquel ne s'applique pas partout en Europe la directive « Travailleurs détachés » (la France l'applique). Si jamais la Commission obtenait satisfaction, la réglementation française serait amenée à régresser. C'est la raison pour laquelle nous nous opposons fermement à certains de ses points.
Je partage ce qu'ont dit René Danesi et Jacques Bigot sur la nature de cette révision : elle va dans le bon sens, mais sans aller jusqu'au bout. C'est pourquoi nous formulons dans cette proposition de résolution un certain nombre de remarques et de regrets. Par exemple, sur la question des frais, il y a une avancée puisque, auparavant, les frais d'hébergement et de nourriture étaient inclus dans la rémunération, tandis qu'ils s'en distinguent désormais, mais en prenant comme référence le pays d'établissement. Et le prix d'une nuit d'hôtel ou d'un panier-repas diffère d'un pays à l'autre.
Sur le niveau des rémunérations, on a maintenu grosso modo le principe « à travail égal, salaire égal », en retenant les conventions collectives générales et non pas les accords d'entreprise, souvent plus intéressants.
Sur les questions de sécurité sociale, il faut distinguer la révision de la directive « Travailleurs détachés » de celle des règlements de sécurité sociale, qui n'est pas encore parvenue à son terme : les négociations avancent, notamment sur la lutte contre la fraude et le certificat A1 attestant l'affiliation du travailleur à un régime de sécurité sociale, en l'occurrence depuis un minimum de trois mois. Mais les règles relatives aux contrôles ne sont pas suffisamment définies en termes de délais. À ce jour, ces contrôles suivent la règle dite de la « coopération loyale » : on considère que tous les pays européens jouent le jeu. Si un inspecteur du travail français veut savoir si le travailleur polonais est affilié au régime de sécurité sociale, c'est compliqué, car la sécurité sociale française doit faire une demande à la sécurité sociale polonaise. En l'absence de réponse, il n'est pas pour autant possible de s'opposer au certificat A1 et de casser le contrat, faute de pouvoir prouver l'absence d'affiliation.
Enfin, nous regrettons que la future Agence européenne du travail ne puisse pas être plus efficace. La Commission et l'ensemble des partenaires ont renoncé à la mise en place à terme d'un corps d'inspection du travail européen, privilégiant une meilleure coopération. Certains auraient voulu que cette agence soit un peu plus coercitive. Son action s'inscrira donc dans la durée.
Mme Fabienne Keller. - Vos nombreuses interventions montrent l'importance de cette question des travailleurs détachés, qui sont maintenant présents partout.
Notre insatisfaction, cher Jacques Bigot, tient au fait qu'il faut, sur ces questions européennes, parvenir à des compromis. D'où l'intérêt de notre résolution pour aller plus loin. Mais, comme l'a dit Pierre Ouzoulias, c'est assez décevant : un peu comme avec la fiscalité des entreprises, ces avantages comparatifs ont fini par figer les choses, alors qu'au contraire la mobilité devrait créer une forme de convergence. On ne trouve plus de Polonais pour ramasser les asperges, ce qui est bon signe : cela veut dire que leur rémunération moyenne augmente et qu'ils se tournent vers des fonctions plus qualifiées, conformément au mécanisme d'intégration voulu par les fondateurs de l'Europe.
Notre proposition de résolution contient de nombreux éléments, dont nous pourrions faire la synthèse afin de la relayer.
L'enjeu des entreprises sous-traitantes concerne en particulier le BTP. Les professionnels que nous avons auditionnés nous ont même parlé d'effets d'éviction : par exemple, si le nombre d'apprentis a baissé dans ce secteur, c'est notamment parce qu'ils ont été remplacés par des travailleurs détachés. Cette obligation faite à l'entreprise d'exercer au moins 50 % de son activité sur le territoire où elle est immatriculée vise à lutter contre cette sous-traitance en cascade. Certains collègues ont d'ailleurs fait remarquer que ce sont très largement des travailleurs détachés qu'on retrouve sur les chantiers d'équipement numérique, financés par l'argent public. Il y a donc un problème de cohérence d'ensemble.
Je salue l'engagement au Parlement européen d'Élisabeth Morin-Chartier et de sa collègue rapporteure Elisabeth Jangerius, qui se sont donné du mal. Il n'était pas évident d'aboutir sur cette révision de la directive travailleurs détachés. Il est simplement dommage que le transport soit exclu de ce compromis, puisque même la directive de 1996 n'est appliquée que dans quatre États membres.
Le risque de cabotage évoqué par Jean-François Rapin est majeur. Il faut en effet être beaucoup plus ferme sur ce blocage du cabotage, notamment pour la raison très technique que j'ai indiquée.
Les entreprises « boîte aux lettres », dont a parlé Claude Kern, sont très clairement visées dans la proposition de résolution. Il faut s'assurer de la réalité du travail dans le pays d'établissement de l'entreprise (nous fixons un seuil de 50 % de l'activité). Tous les secteurs sont concernés, pour des motivations différentes (fiscalité, travail détaché, etc.). On ne pense pas forcément à ces mécanismes de contournement du concept d'entreprise.
Sur la transition énergétique, point tout à fait pertinent soulevé par André Gattolin et Pierre Ouzoulias, la croissance considérable du transport routier nous ramène à la question d'une écotaxe, qui n'a toujours pas été mise en place de manière harmonisée dans l'Union européenne, à la question des normes Euro, à la question des zones. Par exemple, certaines zones portuaires mettent en place des règles assez strictes en raison de la mauvaise qualité de l'air (bateaux utilisant des carburants de très médiocre qualité, noria de camions pour décharger les marchandises).
Il faut creuser cette question de la capacité des réservoirs des camions. Dans un de mes précédents rapports, j'indiquais que la France vendait 80 % du gazole consommé sur son territoire, tandis que le Luxembourg en vendait quatre fois plus qu'il n'en consommait, en raison de sa faible fiscalité. Par ailleurs, les grands axes de circulation à partir des ports néerlandais et belges passent par le Benelux, les camions faisant donc le plein avant de passer en France pour aller en Espagne. Mais peut-être la consommation des camions a-t-elle diminué aussi.
La conditionnalité des fonds sociaux européens est un vaste sujet. Il est compliqué d'agir ainsi à l'égard de pays qui ont besoin d'être épaulés pour leur permettre de rejoindre les standards européens. D'autant que nous avons tout intérêt à cette convergence européenne.
Colette Mélot a souligné qu'un travail est amorcé et que nous progressons sur ces questions de la dérégulation du travail détaché, de cette sous-traitance en cascade, sans sous-estimer les effets de fuite des plus réactifs, c'est-à-dire les personnes qui, ayant plusieurs employeurs, contourneraient ainsi la réglementation.
En conclusion, nous devons être heureux de ces avancées, mais fermes sur la poursuite nécessaire d'un approfondissement européen sur la directive sécurité sociale et la directive travailleurs détachés.
M. Didier Marie. - Un chiffre montre qu'un pas a été franchi : un travailleur polonais sur un chantier français, dans le cadre de la directive de 1996 et de la directive d'exécution de 2014, coûtait 1 587 euros par mois ; avec la directive révisée, il coûtera 1 960 euros, contre 2 146 euros pour le travailleur français pour le même travail. La différence tient au fait que les charges sociales sont payées dans le pays d'origine.
M. Jean Bizet, président. - Je vous propose de voter la proposition de résolution avec les corrections qui y ont été apportées, avec l'aval de nos deux rapporteurs. Nous adresserons par la suite un avis politique à Jean-Claude Juncker et à Antonio Tajani.
J'espère que le psychodrame du plombier polonais est derrière nous. A contrario, la question du transport routier n'est toujours pas réglée. Le sera-t-elle d'ailleurs un jour, tellement elle est complexe ? Quant au cabotage, l'idée au départ était de rationaliser l'utilisation d'un véhicule pour éviter qu'il ne « tourne à vide », de manière à préserver l'environnement. Comme le souligne le rapport, 700 000 emplois sont en jeu en France, au plus proche de nos territoires, des créateurs de richesses (et de richesse humaine). La directive d'exécution de 2014 nous a permis de lever bien des incompréhensions et de mettre fin à de nombreuses distorsions ou dérives. Le différentiel de salaires demeure, mais il est beaucoup moins important. Cette question des travailleurs détachés est un « substrat » idéal pour aller vers une Europe sociale, qui avance tout doucement.
Mme Fabienne Keller. - La Commission, dans sa logique plutôt techno, voudrait boucler le paquet transport routier avant les élections européennes.
M. Jean Bizet, président. - Voeu pieux !
Mme Fabienne Keller. - Je ne suis pas sûre que ce soit une bonne idée. Cela mettrait alors le transport routier au coeur du débat européen, de même que la fracture entre les pays du groupe de Visegrád et les autres.
M. Jean Bizet, président. - Nous essaierons de sortir par le haut en soulignant, dans notre avis politique, qu'il ne faut pas faire n'importe quoi, les sujets étant complexes.
À l'issue du débat, la commission a autorisé, à l'unanimité, la publication du rapport d'information et adopté, à l'unanimité, la proposition de résolution européenne suivante ainsi que l'avis politique qui en reprend les termes et qui sera adressé à la Commission européenne :
La réunion est close à 9 h 45.