- Mardi 6 novembre 2012
- Economie, finances et fiscalité - Cadre financier pluriannuel de l'Union européenne - Proposition de résolution européenne de M. François Marc
- Economie, finances et fiscalité - Réciprocité dans l'ouverture des marchés publics (texte E 7237) - Proposition de résolution européenne de M. Simon Sutour
- Economie, finances et fiscalité - Brevet de l'Union européenne - Point d'actualité de M. Richard Yung
- Mercredi 7 novembre 2012
- Politique régionale - Examen de la proposition de résolution n° 93 sur la stratégie européenne pour les régions ultrapériphériques (RUP) à l'horizon 2020 - Rapport de M. Georges Patient
- Politique régionale - L'Union
européenne et le financement
des régions ultrapériphériques françaises - Proposition de résolution européenne de M. Georges Patient
Mardi 6 novembre 2012
- Présidence de M. Simon Sutour, président -Economie, finances et fiscalité - Cadre financier pluriannuel de l'Union européenne - Proposition de résolution européenne de M. François Marc
M. François Marc. - Dans un peu plus de deux semaines se tiendra un Conseil européen exceptionnel qui sera consacré à l'élaboration du prochain cadre financier pluriannuel (CFP) : les 22 et 23 novembre 2012, les États membres tenteront de s'accorder sur le montant des dépenses qu'engagera l'Union européenne entre 2014 et 2020. C'est une négociation essentielle pour l'avenir de l'UE. On sait que le Conseil européen a adopté en juin 2012 un pacte pour la croissance et l'emploi qui reconnaît l'effet catalyseur du budget de l'UE : ce budget européen peut aider l'ensemble de l'Union à sortir de la crise économique et financière actuelle. C'est, selon moi, un levier de relance collective.
A ce jour, ce point de vue ne semble pas prédominer en Europe et la négociation s'annonce de fait particulièrement difficile. D'une part, la forte pression qui s'exerce sur les finances publiques nationales à travers l'Union européenne raidit les positions des États membres à Bruxelles, notamment de certains contributeurs nets au budget européen. D'autre part, il s'agit de la première négociation à 27 États membres ; or l'adoption du CFP requiert l'unanimité au Conseil, et en plus, depuis Lisbonne, l'approbation du Parlement européen.
Le débat a débuté le 29 juin 2011 quand la Commission européenne a publié ses premières propositions ; elles tentaient déjà une synthèse délicate entre la demande du Parlement européen de porter à 1,11 % du RNB de l'UE les crédits d'engagement de l'UE pour 2014-2020, et la pression exercée par certains États membres pour maintenir ces crédits en-dessous du seuil de 1 % de ce RNB.
Réagissant au projet de la Commission européenne, notre commission a adopté, le 6 juillet 2011, un premier rapport. Elle y exposait la nature très contrainte de la négociation du prochain CFP, notamment du fait de l'inertie forte des dépenses européennes, dont plus des deux tiers vont actuellement à la politique agricole commune et à la politique de cohésion. Elle insistait aussi sur la nécessité de donner à l'UE les moyens de déployer sa stratégie Europe 2020, d'assumer ses nouvelles compétences issues du traité de Lisbonne, notamment en matière de citoyenneté, de justice et d'action extérieure, et de relever les défis internationaux que constituent l'aide au développement, la politique de voisinage, la lutte contre le changement climatique, l'aide humanitaire... Pour résoudre cette « quadrature du cercle » et présenter un cadre financier dont les crédits d'engagement se limitaient à 1,05 % du RNB de l'UE, la Commission européenne avait sorti du périmètre de ce cadre certaines lignes, assurant notamment le financement de projets stratégiques pour l'UE : ITER (réacteur thermonucléaire expérimental) et GMES (surveillance spatiale pour l'environnement et la sécurité). Notre commission avait dénoncé cet artifice, qui mettait à mal la transparence et la prévisibilité du CFP. Elle appelait plutôt à chercher comment améliorer la qualité de la dépense européenne et comment revoir son mode de financement.
Parallèlement, notre commission a élaboré une vision d'avenir pour redonner du sens à la politique agricole commune, dans un rapport établi en commun avec la commission de l'économie et présenté par Mmes Bernadette Bourzai et Odette Herviaux et MM. Jean Bizet et Jean-Paul Emorine ; elle a aussi proposé de nouvelles ambitions pour la politique de cohésion, dans un rapport présenté par MM. Yann Gaillard et Simon Sutour. Nous avons poursuivi nos travaux et approfondi les autres grands enjeux de ce prochain cadre financier pluriannuel : notre commission a adopté le rapport de M. Pierre Bernard-Reymond sur les ressources propres et celui de M. André Gattolin sur la recherche et l'innovation ; elle a initié trois propositions de résolution européenne devenues ensuite résolutions du Sénat : l'une revenant sur les propositions de règlements relatifs à la politique européenne de cohésion 2014-2020 ; l'autre sur le Mécanisme pour l'interconnexion en Europe que propose de créer la Commission, et la troisième sur « Erasmus pour tous », qui serait le nouveau programme de l'Union européenne pour l'éducation, la formation, la jeunesse et le sport.
Il doit être noté que la Commission européenne a revu à la marge sa proposition initiale : elle a, en effet, publié une proposition révisée, le 6 juillet 2012, résumée dans le tableau ci-après, pour tenir compte de la prochaine entrée de la Croatie dans l'UE et des données plus récentes en termes de PIB. Le montant total des crédits d'engagement pour 2014-2020 se trouve ainsi porté à 1 033, 235 milliards d'euros (prix 2011), représentant 1,08 % du RNB de l'UE à 28, ce qui reste en-deçà de la proposition du Parlement européen de porter les crédits d'engagement à 1,11 % du RNB de l'UE mais bien au-delà de la position de plusieurs États membres, dont l'Allemagne, qui souhaiteraient que ce taux ne dépasse pas 1 %. On peut observer que, dans cette enveloppe de 1 033 milliards, la Commission n'inclut toujours pas le financement des projets ITER et GMES qui devrait dépasser 8 milliards pour la période 2014-2020.
La présidence chypriote du Conseil a proposé une « boîte de négociation », le 18 septembre 2012, qui constitue le cadre de la négociation, non pas en termes de chiffres mais d'options de principe : périmètre du cadre financier (revu pour inclure GMES et ITER), rubriques budgétaires, critères de répartition des enveloppes à l'intérieur de ces rubriques, cadre stratégique commun pour les fonds structurels, nouvelles ressources propres (TVA et taxe sur les transactions financières) et question du rabais britannique et des autres corrections budgétaires. La négociation reste ouverte sur beaucoup de ces points, et sera encore compliquée par les discussions sur les données chiffrées. On le devine aux vives réactions qu'a suscitées la publication, le 29 octobre dernier, de la première version chiffrée de cette « boîte de négociation ». Les réactions toutes négatives attestent de la difficulté de la négociation : tentant de contenter toutes les parties à la négociation, la présidence n'y est pas parvenue réellement ! D'un côté, au Conseil, les États « amis de la cohésion » s'opposent à ceux qui défendent le « Mieux dépenser » ; de l'autre, le Parlement européen, convaincu de la valeur ajoutée du budget européen, déplore globalement le manque d'ambition budgétaire du Conseil.
Dans la perspective du Conseil européen des 22 et 23 novembre prochain, qui pourrait durer autant que nécessaire pour trouver un compromis final, le Sénat doit rappeler au Gouvernement quelles priorités il souhaite voir défendues à Bruxelles par les autorités françaises. Le budget européen peut, en effet, contribuer à sortir l'UE de la crise par son effet catalyseur et par sa nature, essentiellement, de budget d'investissement, expression de la solidarité européenne. En effet, moins de 6 % du budget de l'UE financent les frais d'administration de l'UE. Les 94 % restants peuvent donc être assimilés à des investissements qui viennent augmenter la valeur collective de l'Europe.
Je vais vous présenter quelles devraient être, selon moi, les priorités politiques que le Sénat pourrait mettre en avant, mais brièvement puisque je m'appuie sur les nombreux travaux menés ici ces derniers mois.
En ce qui concerne la politique agricole commune, il convient de faire observer que les propositions de la Commission européenne ont déjà entériné une stabilisation en valeur des crédits, quand les autres rubriques du cadre ont toutes connu une progression. Si le Conseil décidait de procéder à des aménagements budgétaires, il me semble impératif qu'ils n'affectent pas les crédits de la PAC, notamment les dépenses relatives au marché et les paiements directs.
À cet égard, la version chiffrée de la « boîte de négociation », qui a proposé la semaine dernière des montants ou des fourchettes pour chaque rubrique, est particulièrement préoccupante : sans conteste, une réduction du montant total des dépenses proposé par la Commission européenne s'imposera sans doute au Conseil, au regard des difficultés budgétaires des États membres. Mais nous ne pouvons accepter que la baisse de 50 milliards de l'enveloppe globale du CFP proposée par la présidence soit partiellement obtenue par ponction sur les crédits de la PAC. La présidence envisage ainsi de diminuer de 5 milliards les paiements directs, ramenant de 283 à 277 milliards l'enveloppe concernée pour 2014-2020. Cette option doit absolument être écartée, d'autant que la baisse de 50 milliards d'euros de l'enveloppe totale pourrait n'être que l'amorce d'une baisse plus conséquente, qui pourrait, si l'on veut répondre aux demandes des États les plus restrictifs, atteindre 100 milliards (le Royaume-Uni poursuivant même l'objectif de porter à 200 milliards cette réduction) ; le risque serait alors d'aboutir à une ponction double sur les crédits de la PAC, ce qui reviendrait à diminuer de 10 milliards d'euros l'enveloppe « dépenses de marché et paiements directs ».
Or la PAC reste une politique essentielle de l'UE dans la mesure où elle contribue à la sécurité alimentaire de l'Union, au développement durable et équilibré des territoires et à l'emploi en zone rurale, dans un contexte de concurrence mondiale. Il est donc impératif de ne pas diminuer le soutien économique aux agriculteurs européens, qui sont confrontés à une forte volatilité des prix agricoles sur les marchés internationaux. Et la flexibilité entre le premier et le second pilier de la PAC ne peut en aucun cas servir d'argument pour réduire les crédits affectés au premier pilier. Cette stabilisation des aides directes doit parallèlement s'accompagner d'une révision de leur répartition pour plus de justice : ainsi, il est admis que les références historiques doivent être abandonnées et les aides plafonnées. En outre, on ne peut plus longtemps ignorer la nécessité d'un redéploiement sectoriel des aides, en particulier vers les activités d'élevage. Le second pilier de la PAC, dédié au développement des zones rurales, ne doit pas non plus être sacrifié. Je constitue un soutien décisif à l'intégration de ces territoires dans l'économie nationale.
Le Sénat se doit aussi d'insister sur le nécessaire caractère progressif de la convergence des aides directes : cette convergence doit évidemment s'opérer mais à un rythme qui tienne compte des différences transitoires, mais persistantes, de situation entre États membres.
Enfin, le Sénat doit souligner l'enjeu que représente le maintien, dans la programmation 2014-2020, d'une ligne budgétaire européenne suffisante au profit de l'aide alimentaire pour les plus démunis, aide qui pourrait, selon le récent projet de la Commission, couvrir aussi d'autres besoins matériels pour ces personnes. Il s'agit d'éviter de mettre en péril le fonctionnement de nombreuses associations, qui mènent une action particulièrement vitale en ces temps de crise économique et sociale ; en outre, une telle intervention de l'UE contribuerait à donner une image positive de la construction européenne.
En ce qui concerne la cohésion régionale dans l'UE, le Sénat a toujours défendu une politique de cohésion qui bénéficie à l'ensemble des régions européennes ; ceci à la fois pour des raisons de justice et pour que la stratégie Europe 2020 soit mise en oeuvre sur l'ensemble du territoire de l'Union. Au nom de l'équité, le Sénat estime en outre que toutes les régions européennes dont le PIB est compris entre 75 % et 90 % de la moyenne communautaire doivent recevoir un soutien équivalent au titre de la politique de cohésion, ce qui n'est pas le cas durant l'actuelle période de programmation : il nous faut donc inviter le Gouvernement à soutenir fermement la création de la catégorie des « régions en transition ».
Par ailleurs, pour éviter que l'enveloppe budgétaire dédiée à la politique de cohésion n'explose par simple effet mécanique du fait de l'enrichissement des États récemment entrés dans l'UE, il importe d'abaisser sensiblement le plafond exprimé en part de PIB des versements opérés au profit d'un État membre au titre de cette politique. Ce plafond, que la Commission européenne proposait de ramener à 2,5 %, pourrait même être réduit à 2,36 %, selon la dernière version de la « boîte de négociation », ce qui ne manque pas de faire grincer certains. Mais la capacité d'absorption des fonds européens dans certains États récemment entrés dans l'UE est visiblement limitée ! Une deuxième clef de sécurité peut être prévue pour juguler la progression des crédits de la cohésion : il s'agirait de plafonner la progression relative, d'une programmation à l'autre, des aides reçues par les États membres au titre de cette politique. Cette protection représente une garantie importante pour les États contributeurs nets, au premier rang desquels se situe la France.
Au-delà des chiffres, le Sénat doit se positionner sur les principes qui vont régir le cadre stratégique commun dont devraient relever à l'avenir l'ensemble des fonds structurels. Sur ce point important, il devrait renouveler son opposition à une généralisation de la conditionnalité macroéconomique à l'ensemble des fonds structurels : faut-il priver un État membre de fonds européens parce qu'il ne respecte pas les règles de bonne gouvernance économique ? Quelle serait la légitimité d'une telle disposition qui reviendrait finalement à sanctionner les régions pour des faits relevant de la responsabilité des États ? Est-ce juste d'exposer à une double peine les États, déjà passibles de sanctions financières au titre du pacte de stabilité et de croissance ? Est-ce efficace de priver de fonds structurels un État déjà incapable de dégager une capacité d'investissement ? Surtout, ce serait introduire une instabilité dans l'exécution du cadre financier pluriannuel, ce qui serait préjudiciable aux projets de moyen terme que la politique de cohésion permet justement de programmer. Dans sa résolution du 23 octobre 2012, le Parlement européen juge également que ces conditionnalités macroéconomiques sont inacceptables.
Enfin, les régions ultrapériphériques (RUP) doivent faire l'objet d'un soutien plus marqué et surtout plus durable de l'UE. Le premier objectif serait d'obtenir le maintien à son niveau dans l'actuelle programmation de l'allocation spécifique dont bénéficient ces régions en raison de leurs contraintes spécifiques, conformément à l'article 349 du TFUE : la Commission propose, en effet, de réduire son montant de 35 à 20 euros par habitant. Pour marquer sa volonté de mettre en place une politique plus volontariste, l'UE devrait aussi aligner le taux de cofinancement associé à cette allocation (aujourd'hui 50 %) sur celui pratiqué pour les autres fonds structurels dans les RUP, soit 85 %, pour ne pas trop peser sur leurs budgets locaux. Enfin, pour ce qui est de la coopération transfrontière, il importe de la faciliter en permettant aux RUP insulaires de mobiliser ces crédits au-delà de la limite prévue de 150 kilomètres. Sur ce point précis, il semble que la présidence du Conseil soit réceptive puisque cette limite a disparu dans la dernière version de la « boîte de négociation ».
En ce qui concerne le nouveau mécanisme pour l'interconnexion en Europe, je vous propose d'insister sur l'importance de ce projet, dans chacun de ses trois volets (transports, énergie et numérique) qui sont d'intérêt commun pour l'UE mais qui sont, de ce fait, peu défendus au Conseil : il est indispensable, en effet, de prévoir de financer des réseaux structurants d'intérêt non exclusivement national et de contribuer ainsi à une meilleure valeur ajoutée pour la construction de l'espace européen. C'est selon moi une vraie source de croissance pour l'UE.
Il en est de même des investissements d'avenir : le Sénat doit appeler le Conseil à consentir un effort particulier en faveur d'un soutien à la recherche, en lien avec l'innovation. C'est la clef de la compétitivité européenne, dont dépendra la place de l'UE dans l'économie mondiale. Mais l'effort budgétaire doit aussi s'accompagner d'une simplification de la politique de la recherche et d'une meilleure articulation entre les guichets national et européen pour faciliter la participation, encore trop discrète, des chercheurs français aux programmes européens.
Par ailleurs, le Sénat doit confirmer son souhait que les projets ITER et GMES, décisifs pour l'avenir industriel de l'UE, demeurent dans le périmètre du cadre financier pluriannuel et voient ainsi leur financement prévu et encadré.
Enfin, il devrait rappeler son attachement à une augmentation des crédits, comme le propose la Commission, pour le nouveau programme en matière d'éducation, de formation, de jeunesse et de sport, intitulé « Erasmus pour tous », de manière à permettre à ce programme, qui contribue à forger la conscience européenne et à préparer l'avenir, de donner sa pleine efficacité. Il faut aussi plaider pour que les engagements pris sur Erasmus pour 2014-2020 se traduisent annuellement en crédits de paiements suffisants, que ce programme ne souffre pas de sous financements comme en cette fin d'année 2012.
Mais, au-delà de ces considérations sectorielles, le Sénat devrait faire valoir son souci général d'améliorer l'efficacité des dépenses européennes.
À ce titre, il convient de resserrer autant que possible les dépenses administratives et de consultation de prestataires extérieurs, mais aussi de s'interroger sur l'efficacité des dépenses, notamment en matière d'action extérieure. Les effectifs pléthoriques du Service européen d'action extérieure et la dimension du réseau diplomatique de l'UE soulèvent en effet des interrogations.
Surtout, il conviendrait d'approfondir la coordination budgétaire entre les États membres afin de créer une véritable synergie entre les budgets nationaux et celui de l'Union européenne autour d'objectifs prioritaires partagés, pour réorienter de manière cohérente l'ensemble de l'UE, conformément aux décisions du Conseil européen de juin 2012.
Enfin, concernant le financement de l'Union européenne, le Sénat doit appeler à une remise à plat de la décision « ressources propres ». Cette exigence est partagée par le Parlement européen, qui a commencé à l'exprimer dès la fin 2010, à l'occasion de la procédure d'adoption du budget 2011 de l'UE. Il est temps de clarifier et rendre plus autonome le financement du budget de l'UE : le rabais britannique, consenti en 1984 au sommet de Fontainebleau, et les différentes corrections qu'il entraîne sont un facteur de complexité et d'iniquité ; ils ont perdu leur justification et doivent être mis en extinction. Ce doit être l'occasion de revenir à l'esprit des traités et de faire reposer la majorité du financement de l'UE sur de vraies ressources propres, ce qui permettrait une diminution de la part des contributions nationales dans ce financement.
Dans cette perspective, le Sénat pourrait se féliciter des progrès qu'enregistre le projet de taxe sur les transactions financières, qui pourrait voir le jour par le biais d'une coopération renforcée dont la France est l'une des initiatrices et à laquelle elle devrait participer. Mais cela ne doit pas l'empêcher de regretter que n'aient pas été explorées plus avant d'autres pistes de ressources propres : les accises sur le tabac ou l'alcool, le produit des enchères de quotas de gaz à effet de serre, une taxe sur l'énergie ou encore la taxe carbone aux frontières qu'avait proposée la France. On pourrait aussi réexaminer les conditions de rémunération des États membres en compensation de leurs frais de perception des droits de douane pour le compte de l'UE : aujourd'hui, pour compenser leurs frais de perception, les États membres conservent 25 % du montant des droits de douane qu'ils perçoivent sur les importations de produits en provenance des pays extérieurs à l'UE. Ce taux, consenti comme un « rabais » accordé aux Pays-Bas et à la Belgique en fin de négociation du cadre financier actuel 2007-2013, devrait être réduit : il assure une forme de rente à certains États mieux dotés en frontières extérieures, et notamment en ports assurant la gestion des frontières maritimes. En ramenant ce taux à son niveau précédent de 10 %, qui était déjà élevé, les droits de douane, qui sont des ressources propres traditionnelles, pourraient alimenter plus largement le budget de l'UE, dont ils représentent aujourd'hui seulement 14 % des recettes.
Toutefois, il serait peu réaliste d'espérer de grands changements en matière de ressources propres à ce stade des négociations. Le Parlement européen, que le Conseil est seulement tenu de consulter sur la décision «ressources propres », a toutefois annoncé qu'il ne donnerait son approbation au volet « dépenses » du CFP qu'en cas d'accord politique au Conseil sur la réforme du système actuel de financement de l'UE. Le Parlement l'a encore rappelé dans sa résolution du 23 octobre 2012.
À moyen terme, il me semble en tout cas nécessaire que les États membres engagent une réflexion approfondie sur les objectifs, l'efficacité et la valeur ajoutée de l'ensemble du budget de l'Union européenne, afin de préparer d'ici 2020 sa nécessaire rénovation.
Je vous propose donc d'adopter la proposition de résolution européenne que je viens de vous présenter.
M. Simon Sutour, président. - Ce rapport est très important, car il nous faut indiquer au Gouvernement nos positions. Il constitue une excellent synthèse de nos travaux : notre commission est en effet favorable à la PAC, mais une PAC réorientée ; elle soutient la cohésion territoriale qui figure dans les traités européens depuis le traité de Lisbonne et, à ce titre, la nouvelle catégorie de régions en transition, qui pourrait rapporter 3 milliards d'euros aux régions françaises concernées, sans rien enlever aux autres ; elle se préoccupe des régions ultrapériphériques dont les crédits sont menacés, nous en reparlerons demain. L'enjeu véritable, c'est que le montant de ce budget européen traduise une ambition européenne. Pour les ressources propres, je me félicite du « petit début » que représentent les progrès de la TTF. Je conclurai en partageant le souhait de Daniel Cohn-Bendit que le Royaume-Uni clarifie sa position en faisant un référendum sur l'Europe !
M. Alain Richard. - La démarche septennale de l'UE pour fixer son cadre financier a ses mérites ; je note que nous la rejoignons un peu en adoptant notre programmation budgétaire pluriannuelle. Mais elle est un peu frustrante du fait qu'elle est déconnectée du mandat du Parlement européen. Nous pourrions faire le voeu, d'ordre institutionnel, de faire coïncider les échéances électorales et budgétaires pour l'UE.
Pour ce qui concerne les montants de ce budget, je souligne l'intérêt qu'il y aurait à établir un lien entre ces montants de crédits disponibles et la croissance européenne. Ne serait-il pas judicieux de programmer des dépenses non pas en termes absolus mais en référence au PIB européen ?
Concernant la taxe sur les transactions financières (TTF), je voudrais être sûr que la politique du Gouvernement n'a pas changé et que le produit de cette taxe ne sera pas absorbé pour contribuer au financement des 20 milliards de crédits d'impôts que vient d'annoncer le Premier Ministre, au bénéfice des entreprises. Je m'inquiète aussi qu'une taxe ainsi créée par le biais d'une coopération renforcée entre une dizaine d'États membres serve à financer un budget européen qui profite aux 27...
Concernant les interventions militaires de l'UE, leur financement qui repose à 100 % sur les États membres qui en sont les décideurs me paraît difficile à soutenir, d'autant que ces opérations ne sont pas très gratifiantes et présentent beaucoup de risques humains et éthiques. La persistance de ce mode de financement me semble constituer un frein très sérieux à l'action extérieure de l'UE.
Enfin, je voudrais dire que le texte qui nous est soumis est un peu raide dans son refus de la conditionnalité macroéconomique. La France prend toujours une posture laissant présupposer qu'elle ne veut pas respecter ses engagements budgétaires. La France souffre déjà d'un manque de crédibilité en matière budgétaire, est-ce donc opportun de défendre ceux qui ne respectent pas le pacte de stabilité et de croissance ?
M. Pierre Bernard-Reymond. - Il n'est pas sûr qu'en 2020, le budget européen ressemble à celui d'aujourd'hui. On commence à parler de capacité budgétaire pour la zone euro et on ignore à quoi seront affectées les recettes de la TTF. Va-t-on renationaliser ces recettes ou financer grâce à elles un budget spécifique ? Nous sommes donc devant plusieurs inconnues en matière de structure budgétaire européenne. On pourrait même imaginer plusieurs budgets en 2020 : le budget des politiques différenciées, celui de l'Eurogroupe et celui de l'Europe-espace à 28.
Je voudrais aussi faire observer qu'il serait plus facile de négocier ce cadre financier pluriannuel si l'on augmentait la part des ressources propres dans le financement de l'UE. Même si c'est toujours le citoyen européen qui paie, une véritable taxe européenne serait plus indolore que les contributions nationales des États, qui donnent lieu à une foire d'empoigne et à la transposition erronée de réflexes nationaux (visant à réduire la dette publique) au niveau européen (où n'existe aucune dette).
M. Richard Yung. - Je voudrais savoir si les propositions que nous soumet le rapporteur général ont des conséquences chiffrées à comparer avec les propositions de la Commission européenne ? J'estime aussi que la patience a assez duré avec le Royaume-Uni : trente ans se sont écoulés depuis l'octroi du rabais britannique ! Concernant la suggestion de mon collègue Alain Richard d'établir une corrélation entre le budget européen et l'évolution du PIB, je la trouve intéressante. On la pratique d'ailleurs de facto au plan national puisque nous débattons longuement, durant la discussion budgétaire, du degré de réalisme des hypothèses de croissance économique sur lesquelles le Gouvernement fonde son projet de loi de finances ; mais si nous devions établir cette corrélation au niveau européen, cela impliquerait un ajustement annuel du cadre financier, ce que ne prévoit pas l'actuelle organisation institutionnelle. Je m'interroge par ailleurs sur les justifications qui pourraient conduire à élaborer un budget pour la zone euro. Enfin, je veux souligner que les représentations de l'UE à l'étranger n'ont pas de sens tant qu'il n'existe pas de diplomatie européenne et que l'action extérieure de l'UE se limite au maintien de la paix ou à l'aide humanitaire.
M. François Marc. - En réponse à vos interventions, je conviens que le manque de connexion entre la durée du cadre financier pluriannuel (CFP) et celle du mandat des députés européens rend le débat budgétaire « hors sol » ; il est vrai que, si elles coïncidaient avec le CFP, les élections européennes y gagneraient en matière ; ceci pourrait contribuer à faire reculer l'abstention massive dont souffrent ces élections. Mais comment organiser ce changement ?
S'agissant des ressources propres, je veux indiquer que, lorsque la TTF sera adoptée, elle viendra en déduction des contributions nationales des seuls États ayant adopté cette taxe. Nous avons aujourd'hui même en commission des finances un débat délicat sur la contribution de la France au budget européen, les co-rapporteurs MM. Jean Arthuis et Marc Massion ne partageant pas les mêmes vues. Concernant les propositions chiffrées, nous n'en faisons pas de concurrentes à celles de la Commission européenne mais, de toute façon, il convient plutôt de se positionner par rapport à celles de la présidence du Conseil qui incluent d'ores et déjà le financement de GMES et d'ITER. En tout état de cause, il est évident qu'il faut procéder à des coupes budgétaires, notamment sur la politique de cohésion et sa dérive budgétaire dans les nouveaux États membres. Nous ne pouvons pas accepter qu'un pays comme la Pologne touche à ce titre près d'un milliard d'euros par mois. Enfin, le combat pour les RUP est difficile car peu d'États membres sont derrière nous. Si le principe d'un soutien spécifique aux RUP paraît acquis, l'alimentation en fonds doit rester correcte.
M. Simon Sutour, président. - Notre collègue Michel Delebarre, qui n'a pu être présent aujourd'hui, m'a demandé de souligner que, selon lui, le moment est venu pour la France de donner un coup d'accélérateur à la défense des « régions en transition », catégorie dont la création pourrait être remise en cause dans la dernière ligne droite des négociations.
Je vous propose maintenant de débattre du texte même de la proposition de résolution européenne que nous soumet François Marc.
M. Alain Richard. - Je renouvelle mes réserves sur l'alinéa n° 29 : je considère que c'est aux mauvais élèves de refuser la conditionnalité macroéconomique. Ce n'est pas à nous de défendre cette position !
Mme Colette Mélot. - Je suis très sensible à l'alinéa n° 36 et au soutien qu'il apporte au programme Erasmus.
M. Alain Richard. - Il serait utile d'insister sur la nécessité d'un meilleur contrôle des dépenses de l'UE en matière d'action extérieure, car le travail que fait la Cour des comptes de l'UE n'a pas grand-chose à voir avec celui de notre Cour des comptes. Une précision pourrait être apportée en ce sens à l'alinéa n° 38, si le rapporteur en était d'accord.
M. François Marc. - Tout à fait.
La proposition de résolution européenne ainsi amendée est adoptée à l'unanimité.
Economie, finances et fiscalité - Réciprocité dans l'ouverture des marchés publics (texte E 7237) - Proposition de résolution européenne de M. Simon Sutour
M. Simon Sutour, président. - Les marchés publics ont un impact très important sur l'économie. Ils constituent un enjeu majeur pour la croissance et l'emploi. C'est pourquoi il paraît nécessaire que le Sénat se prononce sur la proposition de règlement présentée par la Commission européenne qui prévoit une série de mesures concernant la réciprocité dans l'accès aux marchés publics.
1/ Quelle est la situation actuelle ?
Les acteurs publics représentent une part importante du commerce mondial, de l'ordre de 1 000 milliards d'euros par an. Les produits et services achetés par les pouvoirs publics représentent environ 17 % du PIB de l'Union européenne.
Selon les estimations de la Commission européenne, les marchés publics ont une incidence sur au moins 22 marchés clés de produits et de services. Au total, le chiffre d'affaires des entreprises actives sur ces marchés pourrait dépasser 25 % du PIB de l'Union européenne et représenter 31 millions d'emplois.
Lors des négociations avec les pays tiers, l'Union européenne a toujours défendu une ouverture ambitieuse des marchés publics internationaux. Or force est de constater que cette position n'a eu que peu d'écho puisqu'un quart seulement des marchés publics dans le monde est ouvert à la concurrence internationale. L'Union européenne ouvre généreusement ses marchés publics aux pays tiers. Mais, en retour, nos entreprises subissent des pratiques discriminatoires dans ces mêmes pays.
Les chiffres parlent d'eux-mêmes : 85 % des marchés publics de l'Union européenne sont ouverts aux pays tiers contre 32 % des marchés américains et 28 % des marchés japonais.
Je précise que les marchés publics ne sont pas couverts par les accords de l'OMC, qui régissent les échanges internationaux de produits et de services. Mais les pays industrialisés parmi lesquels l'Union européenne et 14 autres pays (dont les États-Unis, le Japon, le Canada et la Corée) sont parties à l'accord de l'OMC sur les marchés publics (l'accord AMP). En principe, ces États s'engagent à ouvrir mutuellement leurs marchés.
Or ces engagements ne sont pas tenus. Selon la Commission européenne, plus de 50 % des marchés publics susceptibles d'être mis en concurrence sont fermés par des mesures protectionnistes. En outre, 25 % sont ouverts de facto mais peuvent être fermés à tout moment. Les exportations inexploitées en raison de cette fermeture s'élèveraient à 12 milliards d'euros pour l'Union européenne.
Ce déséquilibre est d'autant plus marqué que l'Union européenne est allé plus loin dans ce domaine que les autres parties à l'AMP. Elle n'a en effet jamais transposé cet accord dans sa législation, en prévoyant par exemple, comme le permet l'accord, de n'ouvrir ses marchés qu'à hauteur des ouvertures consenties par ses partenaires. Certes, des mesures ont été prévues par une directive de 2004 pour les marchés publics passés dans les secteurs de l'eau, de l'énergie, des transports et des services postaux. Mais elles n'ont pas été appliquées. La proposition de règlement propose d'ailleurs de les abroger au profit du nouveau dispositif qu'elle met en place.
L'Union européenne a par ailleurs accepté d'ouvrir ses marchés publics dans le cadre d'accords de libre échange conclus en dehors de l'OMC. Toutefois, à ce stade, elle n'a pas encore conclu d'accords avec la Chine et l'Inde.
J'ajouterai que, au titre des plans de relance adoptés pour lutter contre la crise, de nombreux États tiers n'ont pas hésité à retenir des mesures discriminatoires en matière d'accès aux marchés publics. De fait, la plupart des grands partenaires commerciaux de l'Union européenne appliquent de telles mesures à l'encontre des fournisseurs européens.
2/ Que propose le texte ?
Il précise tout d'abord que les pouvoirs adjudicateurs pourront exclure des procédures d'attribution de marché les produits et services non couverts par les engagements internationaux de l'Union européenne. Sont visés les marchés d'un montant supérieur ou égal à 5 millions d'euros lorsque la valeur des produits et services non couverts représente plus de 50 % de l'offre. Je précise - c'est très important - que cette exclusion ne pourra s'appliquer aux produits et services provenant des pays les moins développés qui bénéficient d'un régime dit de « préférence généralisée ».
Il reviendra à la Commission d'approuver l'exclusion envisagée par le pouvoir adjudicateur. Pour cela, elle pourra se fonder, lorsqu'il existe, sur un accord international qui prévoit des réserves explicites formulées par l'Union pour l'accès au marché. A défaut d'un tel accord, la Commission pourra se fonder sur l'application par le pays tiers de mesures restrictives qui entraînent un manque de réciprocité « substantielle ». Cette situation sera présumée lorsque les mesures restrictives se traduisent par des « discriminations graves et persistantes » à l'égard des opérateurs économiques de l'Union.
La Commission européenne pourra par ailleurs ouvrir une enquête externe sur des mesures restrictives présumées. Sur la base de cette enquête, elle pourra inviter le pays concerné à engager une concertation. Si l'absence de réciprocité substantielle n'est pas levée, la Commission pourra décider de limiter l'accès du pays tiers en cause aux marchés de l'Union. Cette limitation pourra prendre la forme d'une restriction d'accès, éventuellement sectorielle ou encore d'une pénalité de prix.
3/ Quelle appréciation pouvons-nous porter ?
L'absence d'accès réciproque aux marchés publics pénalise gravement les entreprises européennes. Non seulement, elles subissent des restrictions d'accès aux marchés de pays tiers. Mais en outre, sur le marché européen, elles subissent la concurrence déloyale d'entreprises qui, protégées sur leur marché domestique, peuvent se permettre de soumissionner sur le marché européen à des prix anormalement bas.
S'assurer que l'ouverture des marchés publics de l'Union européenne se réalise dans le cadre d'une réciprocité effective apparaît donc indispensable. On peut d'ailleurs regretter que l'Union européenne n'ait pas pris plus tôt conscience de cette exigence.
Mais mieux vaut tard que jamais. Il est urgent d'en finir avec cette naïveté de l'Union européenne dans ses relations avec les pays tiers. C'est pourquoi je crois que nous devons approuver cette initiative de la Commission européenne et inviter le Gouvernement à la soutenir. Il faut aussi se féliciter de l'appel du Conseil européen de juin dernier qui s'est prononcé pour un examen rapide de cette proposition.
Il me semble néanmoins que nous devons également insister sur les conditions de mise en oeuvre de ce texte. La Commission européenne devra faire preuve de fermeté pour faire prévaloir cette exigence de réciprocité vis-à-vis de nos partenaires commerciaux. Cela est vrai pour les pays tiers qui n'ont pas d'accord commercial avec l'Union européenne. Mais ce devra aussi être le cas pour des pays qui ont souscrit de tels accords et qui, pour autant, n'hésitent pas à faire subir des pratiques discriminatoires aux entreprises européennes.
En outre, la Commission européenne devra être très vigilante sur ce sujet lors de la révision de l'Accord sur les marchés publics et dans le cadre de la négociation d'accords commerciaux bilatéraux ou multilatéraux.
M. Jean-François Humbert. - Je souscris pleinement à ces analyses et je soutiens la proposition de résolution qui nous est proposée.
M. Alain Richard. - Ce texte de la Commission européenne constitue un progrès incontestable, même s'il est tardif.
M. Simon Sutour, président. - L'adoption par le Sénat de cette proposition de résolution européenne pourra appuyer la position de la France dans la négociation sur cette proposition de règlement.
A l'issue de ce débat, la commission des affaires européennes a conclu, à l'unanimité, au dépôt de la proposition de résolution européenne suivante :
Economie, finances et fiscalité - Brevet de l'Union européenne - Point d'actualité de M. Richard Yung
I/ Quel est le contexte ?
L'amélioration du système des brevets en Europe doit comporter deux volets : la mise en place d'un système unifié de règlement des litiges ; la création d'un titre unitaire valable pour l'ensemble de l'Union européenne.
Le système unifié de règlement des litiges aurait une compétence exclusive pour les litiges civils liés à la contrefaçon et à la validité des brevets. Il comprendrait un tribunal de première instance (avec une division centrale et des divisions locales et régionales) et une cour d'appel. La Cour de justice serait chargée d'assurer la primauté et l'uniformité d'interprétation du droit communautaire dans ce système juridictionnel ;
Le brevet de l'Union européenne serait un instrument juridique unitaire valable dans l'ensemble de l'Union européenne.
En pratique, pour concrétiser ce projet, plusieurs textes sont nécessaires :
- un règlement créant le brevet ;
- un règlement relatif au régime linguistique ;
- un accord international créant le système juridictionnel unifié.
La Commission européenne a proposé, en juin 2010, que le régime linguistique du brevet de l'Union européenne soit le régime trilingue de l'Office européen des brevets (anglais, allemand, français). La demande de brevet serait publiée dans la langue de procédure qui doit être l'une des trois langues officielles de l'Office européen des brevets (OEB) ; ses revendications seraient traduites dans les deux autres langues officielles ; le texte authentique serait celui de la langue de procédure (seule à faire foi et donc à avoir une valeur juridique). En cas de litige, le titulaire du brevet devrait fournir, à la demande du supposé contrefacteur ou de la juridiction saisie, une traduction intégrale dans la langue officielle de l'État membre où les faits poursuivis ont été commis ou celle du domicile du supposé contrefacteur. La Commission européenne a mis en avant la nécessité de réduire le coût des traductions qui constitue une part importante du coût total des brevets (un brevet européen validé conformément aux stipulations de la convention de Munich dans 13 États coûterait jusqu'à 20 000 euros, dont 14 000 pour les traductions, contre 1 850 euros pour un brevet valable aux États-Unis). Le régime trilingue qu'elle propose de retenir représenterait un coût de traduction de 680 euros par brevet. 93 % des demandeurs européens utilisent l'une des trois langues de l'OEB.
Face à l'opposition de l'Espagne et de l'Italie à ce régime linguistique, une coopération renforcée a été lancée fin 2010. Elle associe les 25 autres États membres. Un recours a été introduit par l'Italie devant la Cour de justice. Mais, à mon sens, il a peu de chances d'aboutir. Dans le cadre de cette coopération, la Commission européenne a proposé que le brevet de l'Union européenne soit un brevet européen, délivré par l'OEB conformément à la convention de Munich. Le demandeur pourra continuer à choisir entre un brevet national, européen ou de l'Union européenne (ces deux derniers suivant une procédure unique de délivrance). Le régime linguistique n'impliquera pas de traduction supplémentaire ni de validation nationale. La demande pourra être déposée dans n'importe quelle langue de l'Union européenne. Un dispositif de compensation des coûts de traduction vers les trois langues de l'OEB sera prévu. Il en ira de même pour l'obligation faite au titulaire de produire, en cas de litige, des traductions de son brevet dans la langue du contrefacteur présumé et dans celle de la juridiction saisie. Les traductions automatiques (qui peuvent avoir un intérêt pour la diffusion de l'information technologique) seraient instituées à l'échelle de l'Union européenne, via un instrument séparé, et seraient soutenues financièrement par le budget européen.
Saisie pour avis, la Cour de justice de l'Union, le 8 mars 2011, a conclu que le projet d'accord sur la juridiction unifiée était incompatible avec les traités. La Cour a, en effet, considéré que l'accord envisagé, en attribuant une compétence exclusive pour connaître un nombre important d'actions intentées par des particuliers dans le domaine du brevet communautaire ainsi que pour interpréter et appliquer le droit de l'Union dans ce domaine à une juridiction internationale, qui se situe en dehors du cadre institutionnel et juridictionnel de l'Union, priverait les juridictions des États membres de leurs compétences concernant l'interprétation et l'application du droit de l'Union. L'accord aurait également un impact sur la compétence de la Cour pour répondre, à titre préjudiciel, aux questions posées par les juridictions nationales. De ce fait, l'accord dénaturerait les compétences conférées aux institutions de l'Union et aux États membres qui sont essentielles à la préservation de la nature même du droit de l'Union. Depuis lors, le projet d'accord a été amendé afin de répondre aux objections de la Cour.
II/ Quel est l'état actuel de la négociation ?
Le « paquet brevet » demeure composé de trois projets de texte en cours de discussion :
- deux projets de règlement (un règlement mettant en oeuvre la coopération renforcée dans le domaine de la création d'une protection par brevet unitaire et un règlement sur le régime linguistique, lequel ne pose plus de difficultés) ;
- un accord international entre États membres mettant en place une juridiction unifiée du brevet, qui est en cours de finalisation.
Un compromis avait été élaboré, en décembre 2011, sous Présidence polonaise. Il avait été accepté par 23 des 25 États participant à la coopération renforcée. Cependant, l'Allemagne et le Royaume-Uni ont bloqué ce compromis en raison de leur opposition à l'attribution à Paris du siège de la division centrale de la future juridiction unifiée. Ces deux États membres revendiquaient l'attribution du siège de la juridiction respectivement pour Munich (où siège l'OEB) et pour Londres. L'accord international sur la juridiction unifiée devant être adopté à l'unanimité, la question du siège empêchait la conclusion de la négociation.
Lors du Conseil européen des 28 et 29 juin 2012, les chefs d'État ou de gouvernement des États membres participants sont parvenus à un accord sur cette question. Le siège de la division centrale de la future juridiction sera situé à Paris. Londres et Munich seront, pour leur part, appelées à héberger des chambres juridictionnelles spécialisées dans certains domaines. Mais le Conseil européen a aussi suggéré, à la demande du Royaume-Uni, la suppression des articles de la proposition de règlement créant le brevet de l'Union européenne. Ces articles établissent le droit d'empêcher l'exploitation directe ou indirecte de l'invention et précisent les limites des effets du brevet. Leur existence dans le règlement communautaire garantirait la compétence de la Cour de justice pour apprécier la portée du brevet de l'Union européenne.
Cette proposition de règlement ayant déjà fait l'objet d'un accord en trilogue, la position du Conseil européen a suscité une vive réaction du Parlement européen, lequel a décidé de reporter son vote, initialement programmé en séance plénière le 4 juillet 2012.
La Commission JURI du Parlement européen a rappelé, le 11 octobre dernier, l'importance de respecter les conditions de la base juridique de l'article 118 TFUE qui précise que les mesures relatives à la création de titres européens visent à « assurer une protection uniforme des droits de propriété intellectuelle dans l'Union ». Le rapporteur (M. Rapkay, S&D, ALL) avait estimé, en juillet dernier, que la demande du Conseil européen aurait pour effet de réduire considérablement le pouvoir de la Cour de justice. Lors de cette nouvelle réunion, il s'est néanmoins montré ouvert à une solution pragmatique.
Cette ouverture a trouvé un écho dans la proposition de compromis présentée au Coreper I du 18 octobre par la Présidence chypriote. En pratique, ce compromis consisterait à renvoyer au droit national le droit matériel des brevets (qui recouvre des questions comme le principe du premier déposant, la publication des demandes à l'issue d'un délai de 18 mois ou encore l'opposition postérieure à la délivrance). Il se fonderait sur le constat que le droit des États membres est déjà en grande partie harmonisé et que la juridiction unifiée du brevet complétera cette harmonisation. Ainsi la demande britannique de faire échapper le droit matériel des brevets à la compétence de la Cour de justice de l'Union européenne serait satisfaite. Néanmoins, à ce jour, le Royaume-Uni n'a toujours pas donné son assentiment à ce compromis, bloquant ainsi le processus de négociation.
L'objectif demeure d'aboutir à un accord d'ensemble. L'accord international sur la juridiction unifiée pourrait être signé en marge du Conseil Compétitivité des 10 et 11 décembre prochains mais sous réserve de l'adoption des deux projets de règlement. Le processus de ratification (par 13 États au minimum) pourrait alors être lancé afin de mettre en place cette juridiction unifiée de manière à permettre la délivrance du premier brevet européen à effet unitaire en avril 2014.
M. Simon Sutour, président. - Je vous remercie pour cette communication qui fait utilement un point d'étape sur les négociations en cours. Il sera souhaitable que vous nous présentiez ultérieurement le bilan de ces négociations quand elles auront abouti.
Je veux par ailleurs rappeler la préoccupation exprimée par notre collègue Jean Bizet. En l'état actuel des discussions que Richard Yung vient de nous présenter, la proposition de règlement ne tient pas compte de la spécificité des plantes et de la coexistence de deux systèmes de propriété intellectuelle dans le domaine de l'amélioration des plantes, le brevet sur les inventions biotechnologiques et le Certificat d'obtention végétale sur les variétés végétales. Il serait donc logique d'inclure une exemption identique à celle existant déjà en France et en Allemagne, dans la proposition de règlement sur le brevet de l'Union européenne.
Mercredi 7 novembre 2012
- Présidence de M. Simon Sutour, président,et de MM. Daniel Raoul, président de la commission des affaires économiques,
et Serge Larcher, président de la délégation à l'outre-mer -
Politique régionale - Examen de la proposition de résolution n° 93 sur la stratégie européenne pour les régions ultrapériphériques (RUP) à l'horizon 2020 - Rapport de M. Georges Patient
M. Simon Sutour, président de la commission des affaires européennes. - Comme en avril dernier à propos de la réforme de la politique commune de la pêche (PCP), cette réunion est commune à la commission des affaires européennes, à la commission des affaires économiques et à la délégation à l'Outre-mer. Ce travail en commun est utile car les régions ultrapériphériques (RUP) sont souvent les oubliées de la construction européenne. Seuls trois États membres, à savoir l'Espagne, le Portugal et la France, disposent de RUP. Les autres États ne mesurent pas toujours que les RUP sont une chance pour l'Europe, de la même manière que l'Europe est une chance pour les RUP. Il est donc impératif de rappeler l'importance des RUP et la spécificité de leurs problèmes.
Notre réunion est une première étape. Nous allons examiner en commun deux propositions de résolutions européennes. La semaine prochaine, la commission des affaires économiques se prononcera sur les éventuels amendements à ces deux propositions de résolution. Troisième étape : le 19 novembre, le Sénat examinera ces deux propositions de résolution en séance publique.
M. Daniel Raoul, président de la commission des affaires économiques. - Avec l'examen en séance publique du projet de loi relatif à la régulation économique outre-mer, cette semaine est clairement consacrée aux outre-mer.
M. Serge Larcher, président de la délégation sénatoriale à l'Outre-mer. - Depuis plusieurs années, dans les plans de financement des projets dans les outre-mer, l'État a disparu et c'est l'Europe qui joue le rôle clé. Nous avons donc tout intérêt à suivre les décisions prises par l'Union européenne (UE) et sa stratégie à l'égard des RUP. Nous sommes aujourd'hui inquiets : une fois de plus, l'Union ne semble pas désireuse de prendre en compte les spécificités de nos outre-mer. L'article 349 du traité sur le fonctionnement de l'Union européenne (TFUE) n'est pas suffisamment utilisé. La délégation sénatoriale à l'Outre-mer a souhaité donc réagir à la communication présentée en juin dernier par la Commission européenne sur sa stratégie à l'égard des RUP en initiant une proposition de résolution européenne.
M. Simon Sutour, président. - Hier après-midi, la commission des affaires européennes a adopté, sur la proposition de notre collègue François Marc, une proposition de résolution européenne sur le cadre financier pluriannuel de l'Union européenne. Ce texte prend en compte la problématique des RUP. Cette proposition de résolution européenne va être transmise à la commission des Finances et devrait devenir résolution du Sénat.
Nous allons donc examiner tout d'abord la proposition de résolution initiée par la délégation sénatoriale à l'Outre-mer.
M. Roland du Luart, auteur de la proposition de résolution européenne. - Le 30 octobre, Georges Patient et moi-même présentions devant la délégation sénatoriale à l'Outre-mer, qui nous avait désignés comme co-rapporteurs, la proposition de résolution européenne que je suis chargé de vous exposer.
Les deux propositions de résolution que nous examinons aujourd'hui sont tout à fait complémentaires et l'on ne peut que se féliciter de cette synchronisation des travaux de la commission et de la délégation qui permettra de porter ces textes sur les fonds baptismaux de la séance publique le 19 novembre. L'onction du vote donnera toute sa solennité à la démarche qui pourra constituer un appui appréciable pour le Gouvernement dans les négociations à Bruxelles. Les instances européennes sont en effet attentives, nous l'avons vérifié pour la pêche, à l'expression de la représentation nationale ! Cet appui sera d'autant plus précieux dans un contexte budgétaire tendu, la présidence chypriote de l'Union entendant proposer 50 milliards de coupes budgétaires.
J'en viens au contenu de notre proposition de résolution. Le 20 juin dernier, la Commission européenne publiait une communication intitulée « Les régions ultrapériphériques de l'Union européenne : vers un partenariat pour une croissance intelligente, durable et inclusive », exposant la stratégie de l'Union européenne à l'égard des régions ultrapériphériques (RUP). Cette communication intervenait bien tardivement dans le processus des négociations puisque les propositions de la Commission sur le cadre financier pluriannuel avaient été publiées dès juin 2011 et celles sur le paquet réglementaire en octobre 2011.
Je vous dirai d'emblée que l'accueil réservé à cette communication par les RUP elles-mêmes, qu'il s'agisse des RUP françaises mais également des RUP espagnole (Canaries) et portugaises (Açores, Madère), a été extrêmement mitigé. Cela fut exprimé très clairement au Forum des régions ultrapériphériques, tenu à Bruxelles début juillet, et réitéré à la Conférence des présidents des RUP, aux Açores, en septembre. Le point de vue des deux députés européens que nous avons auditionnés le 11 octobre, MM. Younous Omarjee et Patrice Tirolien, avait la même tonalité.
En dépit de timides avancées relatives à la reconnaissance d'une diversité de situations caractérisant les RUP et à la nécessité de leur meilleure insertion régionale, ainsi que de grandes orientations stratégiques globalement acceptables, la communication de la Commission européenne reste largement redondante et incantatoire et reflète une position en net décalage avec les attentes et la situation concrète des RUP.
En réaction à cette approche de l'avenir européen des RUP qui n'est guère satisfaisante, la résolution que nous vous soumettons aujourd'hui s'articule autour de deux axes principaux et intègre les préoccupations exprimées à maintes reprises par ces régions : elle appelle ainsi à une prise en compte effective des contraintes et de la diversité de ces régions ; elle appelle également à une meilleure cohérence dans la mise en oeuvre des politiques européennes entre elles, les RUP étant trop fréquemment les victimes collatérales de leurs contradictions.
S'agissant de la première série de préconisations, qui visent à assurer la prise en compte effective des contraintes et de la diversité des RUP, il s'agit de plaider pour une stratégie européenne équilibrée prenant en compte effectivement, et pas seulement dans le discours, d'une part, à la fois le retard en termes d'équipements structurants des territoires et un contexte économique et social très dégradé, et, d'autre part, les contraintes propres aux RUP et la diversité de leurs situations.
Tout d'abord, et Georges Patient y reviendra tout à l'heure en présentant la proposition de résolution de la commission des affaires européennes, il nous est apparu nécessaire, dans le cadre de la politique de cohésion, de renchérir sur la demande d'un assouplissement de ce qu'il est convenu d'appeler en langue européenne « la concentration thématique », c'est-à-dire les critères d'objectifs auxquels doivent satisfaire les projets pour être éligibles aux fonds structurels. Je n'entre pas dans le détail des objectifs thématiques qui sera exposé ultérieurement avec la politique de cohésion.
Cet assouplissement en matière de fléchage des projets éligibles aux financements européens, ainsi qu'un abaissement du taux de concentration thématique devraient contribuer à éviter que ne se matérialise un décalage de plus en plus important entre les objectifs stratégiques ambitieux définis par la Commission européenne, axés sur la compétitivité et l'innovation, et la réalité du terrain qui appelle un rattrapage structurel.
En outre, les objectifs de développement ne pourront être atteints en l'absence de consolidation des secteurs traditionnels qui, eux aussi, ont besoin des aides européennes. Ces secteurs, garants de la cohésion sociale, constituent le socle de développement sans lequel l'émergence de secteurs innovants restera une fiction.
De même que la Commission européenne scande un discours incantatoire sur la nécessité de valoriser les atouts des RUP dans le développement d'une « croissance intelligente, durable et inclusive », en « (tenant) compte (de leurs) spécificités et contraintes » mais n'évoque que bien peu les nécessaires politiques de rattrapage, elle se contente d'inviter chaque région à « trouver sa propre voie vers une prospérité accrue, en fonction de ses particularités » et reste hostile à l'instauration d'instruments spécifiques d'aide aux RUP bien que, reconnaît-elle, « certains (...) aient fait leurs preuves ». Ainsi, en contradiction avec ce discours sur les atouts que représentent les outre-mer et, fait nouveau, la mention explicite et la reconnaissance de leur diversité, la Commission européenne veille à une interprétation et à une mise en oeuvre très restrictive de l'article 349.
En deuxième lieu, la proposition de résolution invite à mobiliser plus largement et plus fréquemment au bénéfice des RUP le fondement juridique de l'article 349 du traité sur le fonctionnement de l'Union européenne (TFUE).
Conformément à la position traditionnellement réductrice de la Commission, sa communication de juin 2012 ne fait que de rares références à l'article 349 du traité qui justifie pourtant que des mesures spécifiques soient prises en faveur des RUP afin de tenir compte de leurs handicaps.
La France est déterminée à obtenir une meilleure utilisation de ce fondement juridique et nous pouvons, par notre résolution, peser dans les négociations et aider le gouvernement dans ce dossier majeur. Il s'agit de mettre en place un cadre global approprié qui pourrait prendre la forme d'un « règlement plurisectoriel en faveur du soutien aux filières d'avenir dans les RUP », à savoir des filières identifiées comme stratégiques et contribuant à leur désenclavement telles que les énergies renouvelables, les TIC, les transports, le tourisme ou encore une filière bois en Guyane. Ce mécanisme pourrait comprendre un programme ? de type POSEI ? d'aides aux entreprises et couvrant ces secteurs porteurs de croissance.
Il s'agit également de multiplier les déclinaisons sectorielles de l'article 349 afin de permettre l'adaptation des politiques européennes aux réalités des RUP. Cette prise de position, déjà martelée dans les négociations sur la réforme de la politique commune de la pêche (PCP), semble en voie d'aboutir pour ce secteur.
La prise en compte des contraintes spécifiques aux RUP sur le fondement de l'article 349 du TFUE doit enfin pouvoir se décliner dans les programmes européens horizontaux, tels que l'instrument financier pour l'environnement (LIFE) ou le programme « Horizon 2020 » pour la recherche. Il apparaît nécessaire, pour rendre effectif l'accès des RUP à ces programmes, d'assurer un accompagnement spécifique des porteurs de projet issus des RUP ainsi que des appels à projets spécifiques à ces régions.
L'accès des RUP à certains programmes horizontaux reste en effet aujourd'hui théorique, faute pour ces régions de pouvoir répondre aux critères d'éligibilité qui ne tiennent pas compte de certaines contraintes telles que, par exemple, l'éloignement. C'est ainsi que la jeunesse des RUP françaises se trouve largement privée du bénéfice du programme Erasmus dans la mesure où celui-ci ne permet pas la prise en charge financière du transport de l'étudiant originaire d'une RUP entre sa région et la capitale de son État membre.
Il apparaît par ailleurs nécessaire, pour compenser les handicaps structurels auxquels sont confrontés les acteurs économiques, de faire des aides d'État un levier plus efficace. L'article 107, paragraphe 3, du traité permet la prise en compte des spécificités des RUP. Compte tenu de l'éloignement géographique et de l'étroitesse de leurs marchés, les aides aux entreprises des RUP ne peuvent en effet être considérées comme des menaces à la libre concurrence. Il apparaît donc aujourd'hui indispensable que les taux actuels d'intensité et l'éligibilité des aides au fonctionnement valables dans les RUP soient maintenus et il serait même utile d'aller plus loin en introduisant un seuil de minimis spécifique à ces régions.
Enfin, il est singulier que la communication de la Commission n'évoque pas le cas particulier de Mayotte, collectivité en voie de « rupéisation ». Il convient que la Commission accorde une attention toute particulière à cette collectivité qui présente d'importantes spécificités et que de larges dérogations lui soient accordées sur le fondement de l'article 349 pour lui permettre de bénéficier effectivement des aides européennes.
La seconde catégorie de préconisations figurant dans la proposition de résolution souligne la nécessaire cohérence des politiques communautaires à l'égard des RUP : il s'agit de la problématique de la politique commerciale.
À deux reprises au cours des deux dernières années, le Sénat a souligné l'incohérence de la politique commerciale avec les autres politiques sectorielles de l'Union à l'égard des RUP. Je vous rappelle nos initiatives successives qui ont conduit à l'adoption de la résolution du 3 mai 2011 tendant à obtenir compensation des effets, sur l'agriculture des départements d'outre-mer, des accords commerciaux conclus par l'Union européenne, ainsi qu'à l'adoption de la résolution du 3 juillet 2012 visant à obtenir la prise en compte par l'Union européenne des réalités de la pêche des régions ultrapériphériques françaises.
La politique commerciale de l'UE constitue en effet une menace pour l'économie des RUP et entrave l'intégration régionale de ces régions.
La mise en cohérence de la politique commerciale avec les autres politiques communautaires doit notamment passer par l'évaluation systématique et préalable des effets des accords commerciaux conclus par l'UE sur l'économie des RUP, les mécanismes de compensation financière ne pouvant constituer qu'un pis aller et n'étant pas en mesure, à terme, d'empêcher la disparition de pans entiers de l'économie des RUP, en particulier dans le secteur agricole.
Dès sa communication de 2004, la Commission affirmait que « en ce qui concerne les nouveaux accords préférentiels de l'UE avec d'autres pays tiers, la Commission effectuera une analyse d'impact des effets de ces accords sur l'économie des régions ultrapériphériques ». Il est donc troublant de trouver une déclaration analogue de la Commission huit ans plus tard, dans la communication de 2012 : « les accords conclus par l'UE tiendront dûment compte des RUP, par exemple lorsque ces accords couvrent des produits fabriqués dans les RUP », dont l'application paraît loin d'être garantie. Encore une fois, il y a loin du discours aux mesures concrètes : les sombres perspectives pour les marchés de la banane, du sucre et du rhum en sont une illustration !
Ce constat justifie que nous prenions encore une fois une position très ferme sur cette question.
M. Georges Patient. - Mes chers Collègues, vous ne serez pas étonnés que je vous appelle à adopter la proposition de résolution européenne que j'ai déposée avec le président Serge Larcher et notre collègue Roland du Luart. Il était impératif que la délégation sénatoriale à l'Outre-mer réagisse à cette nouvelle stratégie européenne pour les RUP, qu'a publiée la Commission à la veille de la conclusion de plusieurs négociations décisives pour ces régions : celle sur le cadre financier pluriannuel 2014 2020 et celle sur la nouvelle politique de cohésion de l'Union européenne pour la même période.
Je ne reviendrai pas sur le caractère décidément incantatoire des communications successives de la Commission au sujet des RUP. Malgré trois communications en dix ans sur ce sujet, la cause des RUP ne semble pas avoir avancé à Bruxelles, du moins pas dans certains bureaux. Je le regrette beaucoup évidemment. Cette dernière communication, publiée fin juin par la Commission, m'offre toutefois un motif d'espoir : pour la première fois, elle reconnaît la nécessité de prendre en compte la spécificité de chacune des RUP, et non simplement des RUP dans leur ensemble par rapport au reste de l'UE. Il nous faudra être vigilants sur la concrétisation de cette avancée.
La proposition de résolution qui est aujourd'hui soumise à la commission des affaires européennes me semble insister sur deux points majeurs : l'article 349 du TFUE et la nécessité de favoriser l'intégration régionale des RUP dans leur environnement géographique immédiat.
L'article 349 du TFUE, je le rappelle, prévoit que le Conseil adapte le droit de l'UE pour prendre en compte les handicaps des RUP, qu'il s'agisse de l'éloignement, de l'insularité, de la faible superficie, du relief et du climat difficiles, ou encore de leur dépendance économique vis-à-vis d'un petit nombre de produits. Or, nous peinons à obtenir de la Commission, qui a le monopole du pouvoir de proposition au Conseil, la mise en oeuvre de cet article qui figure dans le traité et doit donc bénéficier aux RUP. Vous verrez dans la proposition de résolution que je vous soumettrai tout à l'heure, que cet article 349 doit également trouver à s'appliquer en matière fiscale et en matière de fonds structurels européens.
Le second point que je veux souligner dans la proposition de résolution que nous vous soumettons au nom de la délégation à l'Outre-mer, c'est la nécessité de faciliter l'intégration des RUP dans leur environnement géographique. Ce n'est que la contrepartie obligée de leur éloignement du continent européen. La délégation à l'Outre-mer insiste, à ce sujet, sur les obstacles que les accords commerciaux conclus par l'UE peuvent représenter pour cette intégration régionale. C'est un fait, je le déplore. J'évoquerai tout à l'heure une autre entrave à l'intégration régionale : les normes qui s'imposent dans nos DOM de la même manière que dans l'Hexagone ; cela asphyxie certaines productions, complique les échanges des DOM avec leurs voisins et rend souvent plus coûteux leur approvisionnement.
Comment l'UE peut elle encore ignorer l'incohérence entre, d'une part, son souci de faciliter l'intégration régionale des RUP, souci d'ailleurs manifeste dans ses propositions sur la future politique de cohésion et, d'autre part, l'application aveugle dans les RUP d'accords commerciaux ou de normes inadaptées ? Je ne m'attarde pas plus sur ces deux éléments essentiels de la proposition de résolution soumise à notre commission : mise en oeuvre de l'article 349 et cohérence dans la stratégie d'intégration régionale des RUP. Leur importance capitale explique qu'ils soient également défendus dans un autre texte que je vais vous soumettre tout à l'heure en mon nom propre.
Mais, pour l'heure, je vous invite à adopter cette proposition de résolution.
M. Simon Sutour, président. - Je vous rappelle le contexte de ces propositions de résolution : des décisions sont sur le point d'être prises s'agissant du budget de l'Union européenne sur la période 2014-2020. C'est un moment décisif : il s'agit de savoir quelle partie du budget sera consacrée à la politique de cohésion et, au sein de cette enveloppe, quelle part sera consacrée aux RUP.
Les deux propositions de résolution européenne que nous examinons aujourd'hui visent, d'une part, à sensibiliser le Gouvernement. La commission des affaires européennes a entendu M. Bernard Cazeneuve, ministre des affaires européennes, il y a deux semaines : il a indiqué qu'il réunirait les parlementaires des RUP et qu'il se rendrait dans ces régions. On ne peut que saluer cette décision. Il s'agit par ailleurs de faire savoir à la Commission européenne que, pour parler clairement, nous ne nous laisserons pas faire. Nous n'accepterons pas que ces crédits, essentiels au vu de la situation de ces territoires, soient diminués.
Je pense que cette proposition de résolution doit susciter une large adhésion sur tous les bancs.
La proposition de résolution européenne suivante est adoptée à l'unanimité, sans modification, par la commission des affaires européennes :
Politique régionale - L'Union
européenne et le financement
des régions
ultrapériphériques françaises - Proposition de
résolution européenne de M. Georges Patient
M. Georges Patient. - Le financement des RUP françaises se trouve largement tributaire des décisions qui vont être prises prochainement à Bruxelles. Deux sujets préoccupent particulièrement les RUP : l'avenir des fonds structurels européens et celui du régime de l'octroi de mer.
Concernant l'avenir des fonds structurels, il dépend du cadre financier pluriannuel dont l'Union européenne va bientôt se doter pour la période 2014-2020.
Sur la période 2007-2013, les RUP françaises sont les seules régions de la République française à être éligibles à l'objectif « convergence » et bénéficient d'une enveloppe de 3,2 milliards d'euros. Sur ces 3,2 milliards, 482 millions d'euros sont attribués au titre d'une dotation complémentaire qui est versée aux RUP, pour compenser les surcoûts liés à leurs handicaps structurels. Cette allocation additionnelle s'élève à 35 euros par habitant.
Ce soutien européen à l'investissement local est essentiel pour les RUP. Il exprime la volonté de l'UE de tirer parti des « atouts uniques qu'elles possèdent et de leur valeur ajoutée pour l'UE » : je ne fais ici que reprendre les mots de la Commission dans sa récente communication sur les RUP du 20 juin 2012. Effectivement, les RUP sont aux avant-postes de l'UE dans l'océan Atlantique, les Caraïbes, l'Amérique latine et l'océan Indien. Elles représentent plus de la moitié de la zone économique exclusive de l'UE ; elles constituent aussi une réserve potentielle de ressources marines et un laboratoire en eau profonde unique pour la recherche. Leur biodiversité exceptionnelle offre également de nombreuses opportunités. Leurs situations géographiques permettent à l'UE de développer des activités spatiales, mais aussi d'exploiter certaines sources d'énergie renouvelables (éolienne, solaire, géothermique ou photovoltaïque). Des gisements de pétrole ont même été découverts l'an dernier au large de la Guyane.
Le Sénat devrait plaider pour que le cadre financier pluriannuel 2014-2020 traduise concrètement cette reconnaissance des régions ultrapériphériques (RUP) comme un atout pour toute l'Union européenne.
Car, pour l'instant, ce n'est pas le cas. La Commission européenne propose au contraire une baisse d'environ 43 % de l'allocation spécifique pour les régions ultrapériphériques (RUP), ce qui mettrait en péril la continuité des projets initiés pendant l'actuelle période de programmation. De fait, la Commission propose de ramener de 35 à 20 euros par habitant le montant de l'allocation spécifique RUP.
Par ailleurs, au-delà de la question de l'enveloppe budgétaire, il ne faut pas entraver la consommation des crédits dans les RUP et, pour cela, il faudrait adapter les règles aux situations locales, conformément à l'article 349 du TFUE. De ce point de vue, il serait utile d'aligner le taux de cofinancement pour l'allocation spécifique RUP sur celui prévu pour les fonds européens « classiques » en outre-mer, soit 85 % au lieu de 50 % aujourd'hui.
Dans le même esprit, il serait nécessaire d'adapter le « fléchage » des fonds aux réalités locales. En effet, la Commission propose que, pour les RUP, 50 % des crédits du FEDER soient consacrés à trois objectifs : la recherche et innovation, la compétitivité des PME et la promotion d'une économie à faible teneur en carbone. Les RUP doivent certes prendre ainsi leur part au succès de la stratégie Europe 2020, mais le retard que certaines RUP accusent en termes d'infrastructures justifierait plus de souplesse sur le fondement de l'article 349 du TFUE. A cet égard, le Sénat doit soutenir deux demandes : d'une part, exonérer de toute conditionnalité et de tout fléchage l'utilisation de l'allocation spécifique RUP, parce que, précisément, cette allocation est destinée à compenser les handicaps des RUP ; d'autre part, prévoir que l'affectation de la moitié des crédits du FEDER se fasse non pas sur trois mais quatre objectifs, le quatrième devant être laissé au libre choix des RUP.
En complément du FEDER et du FSE, les régions européennes peuvent mobiliser des crédits européens au titre de la coopération territoriale avec des collectivités ou États voisins.
Toutes ces possibilités pourraient être mises à profit pour favoriser l'indispensable intégration des DOM dans leur environnement géographique immédiat. Pour cela, il faut combattre l'idée que les crédits de coopération transfrontière ne devraient pas être mobilisés au-delà de 150 kilomètres des frontières de l'UE. Cette idée semble aujourd'hui abandonnée, mais nous devons en avoir confirmation.
Sur un plan plus général, il faut souligner que l'application stricte des normes européennes dans les RUP n'est pas cohérente avec la nécessité reconnue par la Commission européenne de promouvoir l'intégration des RUP dans leur environnement régional. Par exemple, les exigences phytosanitaires s'appliquant à la production du riz dans l'UE ont conduit la Guyane à délaisser cette culture, et à importer du riz des États voisins (comme le Suriname) qui ne respectent pas ces normes. Pour remédier à l'absurdité de telles situations, des adaptations des normes doivent être décidées chaque fois que nécessaire sur le fondement de l'article 349 du TFUE, pour mieux prendre en compte les réalités locales.
Le second sujet européen qui met en jeu le financement des RUP françaises est l'avenir du régime de l'octroi de mer après le 1er juillet 2014, date à laquelle expire la décision du Conseil de 2004 ayant autorisé le régime actuel.
Ce régime fiscal très ancien, puisqu'il remonte au XVIIème siècle, s'applique à la fois aux marchandises importées et aux biens fabriqués localement. Son taux de base diffère selon les régions : de 6,5 % à La Réunion à 17,5 % en Guyane. Dans chaque DOM, le Conseil régional, qui fixe les taux, peut décider d'exonérer totalement ou partiellement les biens produits sur place, ce qui crée de fait un différentiel de taxation par rapport aux produits importés. Une décision du Conseil de 2004 encadre ces différentiels de taux.
Les recettes générées par l'octroi de mer et l'octroi de mer régional représentent de 130 millions d'euros pour la Guyane à 366 millions pour La Réunion. Cela représente une part importante des recettes fiscales des collectivités, jusqu'à 90 % pour certaines communes guyanaises.
Or l'avenir de ce régime fiscal, qui déroge au principe de liberté de circulation des marchandises dans le marché intérieur, est incertain. Le régime actuel d'octroi de mer est encadré par la décision du Conseil du 10 février 2004 relative au régime de l'octroi de mer dans les DOM, qui a autorisé ce régime pour dix ans, jusqu'au 1er juillet 2014. Un rapport à mi-parcours était néanmoins attendu des autorités françaises afin de vérifier l'impact de ce régime.
Si la France a bien remis ce rapport en 2009, la Commission a jugé que son contenu ne permettait pas d'étayer sérieusement le bien-fondé du régime dérogatoire.
Or l'échéance du 1er juillet 2014 approche et la France n'a pas encore pris l'attache de la Commission européenne pour préparer l'avenir de ce régime fiscal. Or, les vingt mois qui nous séparent du 1er juillet 2014 ne seront pas trop longs pour mener à bien ce dossier et le Sénat doit marquer son inquiétude devant l'incertitude qui règne encore.
Plusieurs scénarios d'évolution sont envisageables, de la reconduction d'un dispositif d'octroi de mer simplifié et flexibilisé, à l'évolution vers un système de TVA régionale permettant de maintenir un effet de soutien à la production locale, en passant par un scénario hybride mêlant les deux options.
Or le ministère des outre-mer ne semble travailler que sur l'hypothèse d'une reconduction de l'octroi de mer, moyennant quelques adaptations.
Le Sénat doit faire valoir que la piste de la TVA régionale mériterait aussi d'être explorée, même si elle représenterait un changement radical. Au vu des échanges avec la Direction générale TAXUD (Fiscalité et union douanière) de la Commission européenne, il m'apparaît que la Commission européenne attend des autorités françaises la présentation de différentes options, pour dégager celle qui serait la moins discriminatoire et la plus propice au développement économique local. Le Sénat doit donc demander au Gouvernement de s'atteler sans délai à cette tâche, pour que les RUP ne vivent pas avec l'épée de Damoclès d'un refus européen de prolonger le régime de l'octroi de mer.
C'est pourquoi je vous propose d'adopter la proposition de résolution européenne que je viens de vous présenter.
M. Daniel Raoul. - Pouvez-vous nous donner des indications sur la part que représentent les recettes de l'octroi de mer dans les recettes fiscales des collectivités d'Outre-mer, afin que la commission des affaires économiques puisse se prononcer en toute connaissance de cause la semaine prochaine ?
M. Georges Patient. - Oui, nous pouvons évidemment vous les fournir sans délai.
M. Daniel Raoul. - L'important est en effet de sécuriser le financement des collectivités territoriales dans les DOM.
M. Georges Patient. - Effectivement, tout nouveau dispositif qui viendrait se substituer au régime actuel de l'octroi de mer devrait être calibré pour préserver les recettes fiscales des collectivités.
M. Serge Larcher. - Les plus pessimistes à l'égard de l'avenir de l'octroi de mer inclinent à croire que tout droit de douane de ce type est incompatible avec les règles de l'Union européenne. En fait, il suffirait que le Gouvernement démontre que le régime de l'octroi de mer est un outil pertinent pour soutenir l'activité et l'emploi en Outre-mer. Jusque là, aucun rapport suffisant n'a été fourni à cette fin par le gouvernement français à la Commission européenne. Or, il devient urgent en 2012 d'apporter cette preuve. Le Gouvernement semble tabler vers une décision politique mais ce scénario n'est que la réplique de celui de 2004, lequel s'était soldé par l'octroi d'un délai de dix ans, que la France n'a pas mis à profit pour réfléchir. Nous sommes désormais dos au mur. Il importe donc, aujourd'hui, soit d'apporter la justification du bien-fondé de l'octroi de mer, soit d'imaginer un dispositif alternatif. Dans cette perspective, je souligne qu'une TVA régionale frapperait les services qui n'entrent pas, aujourd'hui, dans l'assiette de l'octroi de mer. Par ailleurs, la TVA suffira-t-elle à assurer aux collectivités territoriales un niveau de recettes équivalent à aujourd'hui ? Il est en tous cas urgent d'intervenir dans la mesure où l'État, en l'état actuel de ses finances publiques, serait incapable de combler le manque à gagner.
M. Simon Sutour, président. - Finalement, l'avenir de l'octroi de mer est une question française plutôt qu'européenne : c'est à la France, dans le cadre des règles européennes auxquelles elle a consenti, de trouver un dispositif équivalent et compatible avec ces règles. Le ministre des affaires européennes, que notre commission a entendu le 24 octobre dernier, a affirmé sa volonté de prendre ce dossier à bras le corps. Mais il est utile de lui dire notre inquiétude par cette proposition de résolution européenne, dont l'autre volet, consacré à la politique de cohésion, est également important, tant l'investissement local dépend des fonds européens.
M. Yannick Vaugrenard. - La France s'est-t-elle rapprochée des deux autres États membres directement concernés par la problématique des régions ultrapériphériques : l'Espagne et le Portugal ?
M. Serge Larcher. - Les députés européens de ces régions ont déjà l'occasion d'échanger au sein de la Conférence des députés des RUP qui les réunit. Et nous savons par ailleurs que l'Espagne, qui dispose d'un régime analogue à l'octroi de mer dans ses RUP, a déjà entrepris des démarches auprès de la Commission européenne pour assurer l'avenir, si bien que nos homologues sont beaucoup moins inquiets.
M. Yannick Vaugrenard. - Et, concernant la politique de cohésion, avez-vous rapproché vos points de vue avec vos homologues portugais et espagnols ?
M. Simon Sutour, président. - En effet, trois États dont la France sont directement concernés au Conseil. Mais l'issue dépendra de l'ensemble de la négociation du cadre financier pluriannuel qui est encore cours.
M. Serge Larcher. - Je note que nous avons déjà adopté deux résolutions européennes dans les derniers mois, l'une sur la politique commerciale de l'Union, l'autre sur la pêche, et nous avons à chaque fois obtenu des résultats. Il est donc utile de mobiliser le Parlement national pour conforter la position des autorités françaises dans la négociation européenne, et un vote à l'unanimité de la proposition de résolution qui nous est soumise lui conférerait encore plus de poids.
A l'issue de ce débat, la commission des affaires européennes a adopté, à l'unanimité, la proposition de résolution européenne suivante :