- Mercredi 17 octobre 2007
- Environnement - Changements climatiques - Audition de M. Claude Allègre, membre de l'Institut, professeur à l'université de Paris VII
- Environnement - Parc naturel régional de Camargue - Examen du rapport
- Agriculture - Produits agricoles, forestiers ou alimentaires et produits de la mer - Examen du rapport
- Environnement - Echange de vues sur la saisine de l'Office parlementaire d'évaluation des choix scientifiques et technologiques - Chlordécone et paraquat et autres pesticides dans l'agriculture martiniquaise, guadeloupéenne et guyanaise
Mercredi 17 octobre 2007
- Présidence de M. Jean-Paul Emorine, président. -Environnement - Changements climatiques - Audition de M. Claude Allègre, membre de l'Institut, professeur à l'université de Paris VII
Au cours d'une première réunion tenue dans la matinée, la commission a procédé à l'audition de M. Claude Allègre, membre de l'institut, professeur à l'université Paris VII, sur le réchauffement climatique.
Après avoir remercié M. Claude Allègre pour sa venue, M. Jean-Paul Emorine, président, a rappelé l'attachement de la commission des affaires économiques au thème de l'environnement.
A titre liminaire, M. Claude Allègre a estimé que les problèmes écologiques devaient constituer des moteurs de croissance, et non des freins, et a fortement critiqué la théorie de la décroissance. Reconnaissant l'existence d'un changement climatique, il a contesté en revanche la certitude d'un réchauffement de 2 degrés dans les années à venir et mis en doute les prévisions de températures de Météo France pour les cinquante prochaines années, celles établies pour l'été 2007 s'étant d'ores et déjà révélé erronées. A l'appui de ces propos, il a cité deux affirmations longtemps établies comme évidentes et aujourd'hui fortement remises en cause. La première était celle d'une élévation de la température moyenne du globe de 0,6 degré depuis 1850 : cette affirmation est sujette à caution du fait, d'une part, de la grande difficulté à définir la notion de « température moyenne » du globe, celui-ci connaissant des écarts de 100 degrés entre les pôles et l'équateur et de 10 degrés entre le jour et la nuit et, d'autre part, du très faible nombre de relevés de températures il y a plus d'un siècle, époque à laquelle les océans représentaient les deux tiers de la surface du globe. Le fait le plus établi concerne la seule Europe, où des mesures journalières sont effectuées depuis 1830, et on n'y constate pas de grande modification, à l'exception d'un léger, mais brutal, réchauffement depuis 1987. La deuxième « évidence » concernait la variation des teneurs en gaz carbonique des bulles enfermées dans la glace entre les périodes glaciaires et interglaciaires : on s'est rendu compte à ce sujet que la variation de température précédait de 900 ans l'augmentation du gaz carbonique dans l'atmosphère.
Après avoir indiqué qu'on observait, depuis une dizaine d'années, une augmentation des phénomènes extrêmes, M. Claude Allègre a déploré l'inaction actuelle sur ce sujet, notamment s'agissant des inondations, qui risquent de se multiplier. Il a cité deux actions urgentes à entreprendre : le dragage des fleuves, notamment le Rhône, dont l'état de sédimentation risque d'entraîner des crues dès la survenue de précipitations, et le stockage d'eau en vue de sa réinjection dans les sous-sols. Il a ensuite expliqué que la hausse du gaz carbonique dans l'atmosphère avait deux effets nocifs. Le premier, avéré, est un phénomène d'acidification des océans. Le second est en cours de démonstration, mais apparaît plausible : il s'agit de l'accroissement du nombre de feux de forêts, la photosynthèse étant favorisée par la hausse du gaz carbonique dans l'atmosphère et pouvant entraîner une combustion spontanée.
Abordant la question de la séquestration du gaz carbonique, M. Claude Allègre a précisé qu'un site pilote allait être créé à Massy, une centrale thermique devant permettre de piéger le gaz carbonique et de le transformer en calcaire, reproduisant ainsi le processus naturel qui s'est déroulée au début de l'histoire de la planète. Il a ensuite estimé que dans 15 ans, la séquestration du carbone pourrait représenter un chiffre d'affaires mondial de 600 milliards de dollars, soit le quart de l'activité pétrolière, et a souligné que de très nombreuses embauches étaient en jeu.
Après avoir évoqué le film réalisé par Al Gore et relevé que celui-ci comportait quelques erreurs, M. Claude Allègre a estimé que le Groupe d'experts intergouvernemental sur l'évolution du climat (GIEC) était un organisme politique, et non scientifique. Il a ensuite précisé que les glaciers fondaient depuis 1790 et que cette évolution était limitée à l'hémisphère Nord, les glaciers de l'Antarctique, qui représentent 92 % des glaces, n'étant pas touchés par ce phénomène. Il s'est ensuite dit davantage préoccupé par les changements concernant le cycle de l'eau et a rappelé que le réchauffement était lié pour 83 % à la vapeur d'eau et pour 13 % au gaz carbonique. Il a expliqué que, du fait de l'importance des fluctuations de la vapeur d'eau, qui varie de 0 % dans l'atmosphère à 30-40 % dans la zone équatoriale, il était difficile d'appréhender ce phénomène et que l'hypothèse dominante était l'absence d'influence de l'homme sur celui-ci, hypothèse contestable au regard, par exemple, des effets du pompage des fleuves pour l'irrigation agricole. M. Claude Allègre a ensuite souligné que la première urgence pour l'homme était de s'adapter, comme il l'avait fait lors des précédents changements climatiques. A titre d'exemple, des mesures devraient, selon lui, être prises sur la partie côtière de l'Atlantique Nord afin d'anticiper sur les tempêtes qui pourraient y survenir. En outre, du fait de la possibilité d'inondations et de sécheresses concomitantes, il serait opportun d'équiper, en France, toutes les routes à goudron et ciment afin qu'elles soient perméables, même si de tels équipements coûtent 20 % plus cher.
Rappelant, en conclusion, qu'à la suite de l'annonce par le club de Rome, en 1970, de l'épuisement des matières premières, le président Valéry Giscard d'Estaing avait fait de l'écologie une priorité, priorité ensuite oubliée du fait de la non-réalisation des prédictions du club, il a jugé impératif d'établir les vraies priorités et d'éviter de jouer les « Nostradamus modernes ».
Après avoir salué la qualité de l'exposé de M. Claude Allègre, M. Jean-Paul Emorine, président, a indiqué que celui-ci serait de nature à alimenter la réflexion des groupes de suivi du Grenelle de l'environnement de l'Assemblée nationale et du Sénat, qui se réunissent aujourd'hui pour auditionner M. Jean-Louis Borloo, ministre d'Etat chargé de l'écologie, du développement et de l'aménagement durables.
Jugeant également très intéressant l'exposé de l'intervenant, M. Gérard César a estimé fondamental de promouvoir le récurage et le dragage des cours d'eau pour lutter contre les inondations, dont le risque devrait s'accroître dans les années à venir, et déploré que les associations écologistes ainsi que les pêcheurs soient opposés à ce type d'opération d'entretien.
Après avoir félicité M. Claude Allègre pour la qualité des informations communiquées à la commission, M. Charles Revet a rappelé qu'au cours des années 1970 certaines analyses avaient mis en évidence le fait que les carburants verts seraient compétitifs avec un cours du baril de pétrole aux alentours de 60 dollars. Or, il a relevé que cette rentabilité ne semblait toujours pas assurée, alors même que le cours se situe aujourd'hui à plus de 85 dollars. Puis, faisant référence aux propos de M. Claude Allègre selon lesquels une hausse de la température de l'atmosphère terrestre de 2 degrés doit être relativisée au regard de l'écart entre les extrêmes des températures constatées sur la planète, environ 100 degrés, il a précisé que certains scientifiques prévoyaient une hausse du niveau des océans de plus de sept mètres, en raison de la fonte des glaciers. Il s'est donc interrogé sur les endroits du globe qui seraient le plus affectés par cette hausse générale du niveau des eaux.
A son tour, M. Marcel Deneux a jugé très instructif l'exposé de l'intervenant et a souhaité savoir s'il était possible, en matière d'évolution du climat, de disposer d'une analyse scientifique solidement établie. Indiquant qu'il avait eu l'occasion de visiter des installations de capture et de séquestration du CO2 exploitées par des compagnies pétrolières, il s'est demandé si cette technologie permettrait d'augmenter les taux d'extraction du pétrole afin de repousser la date de survenance du peak-oil. Il a enfin interrogé M. Claude Allègre sur les évolutions souhaitables du dispositif du crédit d'impôt-recherche.
Mme Odette Herviaux a demandé à l'intervenant son sentiment sur l'affaiblissement du gulf-stream et les impacts prévisibles de cette évolution sur le climat.
En réponse aux différents orateurs, M. Claude Allègre a apporté les précisions suivantes :
- seuls, les glaciers de l'hémisphère Nord sont actuellement en train de fondre. Sous l'effet de cette évolution, le niveau des océans s'élève de 2 millimètres par an, soit 20 centimètres par siècle, ce qui est très éloigné des ordres de grandeur habituellement évoqués par les climatologues ;
- la fonte des glaciers de l'hémisphère Nord n'est pas liée à l'action de l'homme, mais répond à des évolutions du climat sur le long terme. A titre d'exemple, le Groenland était, au Moyen-Age, recouvert de prairies et de forêts ;
- le climat peut varier brutalement. Ainsi, au XVIIIe siècle, sous le règne de Louis XVI, une forte canicule a causé la mort de plus de 40.000 personnes alors même que le climat était, à cette époque, assez froid en France ;
- le système climatique est complexe et instable ; dans ces conditions, il est impératif que l'homme soit en mesure de s'adapter à ses évolutions ;
- il est indispensable de mettre en place un plan en faveur de l'entretien des rivières françaises, dont l'une des mesures principales serait l'installation de petits barrages placés en amont des cours d'eau ;
- les associations écologistes ne sont pas guidées par un souci de protection de l'environnement, mais par une volonté de remise en cause plus générale du mode d'organisation de la société. A cet égard, il est primordial que le Grenelle de l'environnement débouche sur des mesures de nature à enclencher une dynamique positive en faveur de l'environnement et n'ait pas pour but de donner satisfaction à un courant de pensée politique qui a obtenu de si faibles résultats aux dernières élections ;
- il est impératif de promouvoir la récupération des gravats et du sable dans les cours d'eau. Une telle action éviterait de déstabiliser les espaces littoraux, puisqu'aujourd'hui, ces matériaux sont retirés en grande quantité des plages. Par ailleurs, ces activités d'extraction seront de nature à redynamiser l'industrie du bâtiment et des travaux publics et à réduire le trafic routier ;
- l'avenir du Gulf-stream est un sujet débattu au sein de la communauté scientifique entre ceux qui pensent que ce phénomène se ralentit, ceux qui réfutent cette évolution et ceux qui estiment que le Gulf-stream n'a, en tout état de cause, pas d'impact sur le changement climatique. Même si le Gulf-stream influençait le climat, les évolutions de son intensité ne seraient perceptibles qu'à très long terme ;
- il est nécessaire de s'interroger sur la composition du GIEC, qui comprend en son sein des personnalités qui n'ont plus effectué de recherches depuis 40 ans et, en tout état de cause, jamais dans le domaine du changement climatique ;
- la plupart des grandes découvertes scientifiques se font généralement contre le consensus général, comme le démontrent les critiques qui ont été émises en France à l'encontre d'Albert Einstein, quand celui-ci est venu faire des conférences à Paris, en 1933, sur la théorie de la relativité ;
- il est malvenu de remettre en cause le consensus sur le réchauffement climatique, comme l'a expliqué M. Richard Lindzen dans un article publié dans le Wall Street Journal, qui a indiqué que toute critique émise, aux Etats-Unis, à l'encontre de la théorie communément admise exposait son auteur à être privé de subventions publiques de recherche ;
- les technologies de capture et de séquestration du CO2 développées par les pétroliers présentent l'avantage de créer de la richesse et des emplois ;
- l'existence du crédit impôt-recherche est positive. Ce dispositif est cependant parfois détourné de son but principal, puisque certaines entreprises s'en servent pour financer des actions de développement. L'exemple américain pourrait être suivi en ce domaine, en exonérant totalement d'impôt les contrats de recherche passés par les entreprises avec des laboratoires ;
- contrairement à ce qui peut être pratiqué en France, il est plus important de soutenir le tissu de petites et moyennes entreprises innovantes, en particulier leurs activités de recherche, que les grandes entreprises ;
- le poids des cotisations sociales peut constituer un frein à la création d'entreprises. Il est donc impératif d'exonérer les entreprises nouvellement créées du paiement de ces cotisations pendant leurs premières années d'activité ;
- la situation de la recherche en France est paradoxale puisque le pays compte de nombreux chercheurs de très haut niveau, alors que les découvertes sont exploitées et valorisées par des sociétés américaines ou suisses.
Après avoir fait part de « l'élévation de son niveau d'incertitude » après l'intervention de M. Claude Allègre et indiqué que cela ne facilitait pas la recherche de solutions politiques, M. Charles Josselin a relevé qu'on observait depuis quelques années une accélération très importante de la consommation de matières et s'est interrogé sur la possibilité de poursuivre un tel processus. Estimant cruciale la question de l'eau, il a jugé qu'il serait difficile de convaincre les services chargés de l'environnement du bien-fondé du lancement d'un programme de travaux publics, concernant notamment le dragage des fleuves.
M. Claude Allègre a souligné que le problème soulevé était complexe et a observé, à titre d'exemple, que l'oxyde de souffre, dont les émissions ont diminué en Europe, est un refroidissant de l'atmosphère et que sa diminution pourrait donc contribuer au réchauffement. Il a déploré l'inertie actuelle et insisté sur l'urgence à agir sur de nombreux problèmes tels que les glissements de terrain, les fleuves, la réduction des émissions de gaz carbonique, la protection de la biodiversité. A ce propos, il a estimé que les moyens financiers mobilisés pour réintroduire l'ours dans les Pyrénées pourraient opportunément être utilisés autrement, par exemple pour remettre des écrevisses dans les rivières.
Après avoir salué le courage de Claude Allègre d'être « scientifiquement incorrect », M. Raymond Couderc a déploré la confusion actuelle entre météorologie et climatologie. Il s'est ensuite demandé s'il n'était pas nécessaire d'exagérer le phénomène du réchauffement pour accélérer la prise de conscience chez les citoyens de l'urgence à agir.
M. Michel Doublet a relevé, pour le déplorer, que les écologistes s'opposaient, dans bien des cas, à la construction de barrages.
Revenant sur l'affirmation de M. Claude Allègre selon laquelle le niveau des mers s'élève de 2 millimètres par an en moyenne, M. Dominique Braye a posé une question sur le processus conduisant la mer, dans certaines régions d'Asie du Sud-Est, à inonder les constructions situées sur le littoral. Il s'est ensuite interrogé sur les raisons de la domination de la théorie du réchauffement climatique par rapport à celle défendue par M. Claude Allègre et a souligné qu'il fallait se mettre d'accord sur le diagnostic avant d'agir. Enfin, qualifiant le Grenelle de l'environnement de « psychothérapie collective », il s'est interrogé sur les raisons pour lesquelles, dans certains groupes, il n'était pas tenu compte des conclusions des expertises demandées, lorsqu'elles « dérangeaient ».
Observant que la « catastrophisme » était un phénomène ancien, M. René Beaumont a évoqué la couche d'ozone et s'est interrogé sur sa reconstitution et l'impact de celle-ci sur le climat. A propos d'un « plan rivières », il a relevé qu'il faudrait convaincre les autorités chargées de l'environnement, en leur rappelant que le processus de domestication du Rhône avait conduit à son envasement.
Après ces différentes interventions, M. Claude Allègre a apporté les éléments d'information suivants :
- dans les années 1970, la diminution de la couche d'ozone au dessus de l'Antarctique a été mise en évidence, les Américains accusant le Concorde d'en être responsable. Les scientifiques ont cependant démontré que les émissions de chlorofluorocarbures (CFC) étaient responsables de cette détérioration. L'entreprise Dupont de Nemours a alors élaboré des substituts aux CFC et a cédé gratuitement le brevet de cette innovation aux pays en voie de développement. L'utilisation massive de ces produits de substitution a ainsi permis d'interrompre ce phénomène et favorisé la reconstitution de la couche d'ozone ;
- dans les années 1970, les météorologues, à la suite des travaux d'Edward Lorenz ayant débouché sur l'élaboration de la théorie du chaos et de l'effet papillon, se sont aperçus qu'il était impossible de prévoir l'évolution du climat à une échéance supérieure à quatre ou cinq jours. Les météorologues se sont alors reconvertis dans la climatologie, sans avoir de connaissances très poussées en matière de géographie ;
- certains experts du GIEC commencent à émettre des doutes quant à la responsabilité de l'homme en matière de réchauffement climatique ;
- les objectifs définis lors du sommet de Kyoto n'ont pas été atteints, puisque les émissions de dioxyde de carbone ont triplé depuis cette date ;
- les vérités scientifiques mettent souvent quelques temps à s'imposer, à l'image de l'article fondateur sur la structure de l'ADN, qui n'a été exploité que quatre années après sa publication ;
- il appartient aux responsables politiques d'estimer s'il est nécessaire d'exagérer la vérité pour favoriser un changement des comportements au sein de la population, les scientifiques ayant, quant à eux, le devoir de ne présenter que des éléments solidement fondés. Toute stratégie s'appuyant sur l'exagération de la réalité présenterait un risque considérable d'inefficacité si les citoyens, conscients de cette exagération, en concluaient qu'aucun changement de comportement n'est en réalité nécessaire ;
- l'eau est le problème principal auquel est confrontée la planète. Au demeurant, le développement de certaines variétés d'organismes génétiquement modifiés (OGM), de maïs notamment, ont pour caractéristique de consommer le tiers de l'eau que consomment les variétés non modifiées. L'exploitation de ce type d'OGM pourrait ainsi apporter un début de solution à ce problème ;
- il convient de faire la différence entre deux phénomènes distincts : la montée du niveau des océans et l'effondrement du niveau des terres. Ainsi, comme l'a démontré Charles Darwin, les îles volcaniques ont vocation à disparaître sous le niveau des eaux sous l'effet de leur propre poids. Dans ces conditions, il est mensonger d'affirmer que les Australiens, par leurs pollutions, sont responsables de la disparition d'îles du Pacifique.
M. Bruno Sido a tout d'abord fait part de deux sentiments inspirés par l'intervention de M. Claude Allègre : la sérénité, à l'écoute d'un discours de géologue, et la perplexité, du fait de la nécessité pour les politiques d'apporter rapidement des solutions qui pourraient être lourdes de conséquences. Rappelant que le monde était fini, il a indiqué qu'une corrélation très fine entre gaz carbonique et température avait été établie par les scientifiques, mais que, depuis une cinquantaine d'années, le taux de gaz carbonique augmentait beaucoup plus vite que la température. Admettant ensuite que les relevés de températures effectués au 19e siècle pouvaient être sujets à caution, il a estimé que tel n'était pas le cas de ceux pris depuis une trentaine d'années, qui montrent une forte évolution. Il s'est interrogé sur la possibilité de disposer d'une projection sur les prochaines années à partir de ces mesures.
Mme Evelyne Didier a souligné que le mérite du débat était de faire émerger les problèmes. Après avoir relevé l'existence d'un consensus sur la nécessité de développer la recherche et de s'adapter et d'un désaccord sur la question de la corrélation entre hausse du gaz carbonique et réchauffement, elle a posé une question sur les consensus existants permettant de trouver des solutions.
M. Jacques Muller s'est félicité de la convergence de vues entre l'intervenant et lui-même quant au rôle néfaste de l'homme sur la planète, à la nécessité de traiter les ordures ménagères, au problème de l'eau et à la réduction des émissions de gaz carbonique. Puis il a posé une question sur la nécessité de modifier le modèle agricole, aux niveaux communautaire et national, afin de réduire les inondations et l'usage des pesticides, relevant que les vers de terre, qui ont un rôle dans l'infiltration de l'eau, étaient de moins en moins nombreux.
En réponse à ces différentes interventions, M. Claude Allègre a apporté les précisions suivantes :
- il existe une corrélation entre les émissions de CO2 et la température, en application d'une loi de physique, selon laquelle la solubilité des gaz décroît avec la hausse de la température. Dans ces conditions, la hausse de la température de l'atmosphère provoque, après une très longue période, une hausse de la teneur de l'atmosphère en CO2. Au demeurant, le dioxyde de carbone ne représente qu'un pourcentage infime de la composition de l'atmosphère (0,03 %) et l'accroissement de sa part ne constitue pas le problème principal en matière de changement climatique, qui reste bien celui des émissions de vapeur d'eau ;
- pour autant, l'augmentation des émissions de CO2 a des effets non négligeables sur l'environnement, puisqu'elle favorise vraisemblablement l'acidification des océans et la propagation des feux de forêts. Il convient donc de limiter ces émissions au moyen de mesures concrètes, efficaces et courageuses, comme l'interdiction des véhicules classiques dans les villes à l'horizon 2020 et leur remplacement par des véhicules électriques ou hybrides ou des mesures en faveur de l'efficacité énergétique des bâtiments anciens ;
- en matière agricole, il est aujourd'hui impératif de limiter drastiquement l'utilisation des pesticides, ce qui ne peut se faire qu'en utilisant des OGM ;
- par ailleurs, les changements permanents de culture sur les mêmes parcelles empêchent les plantes de développer de longues racines, ce qui nuit à la qualité des sols. Il convient donc de favoriser le maintien des mêmes plantes pendant plusieurs années sur les mêmes parcelles et de réaliser des cartographies des cultures ;
- il conviendra de demander au ministre chargé de l'écologie le bilan économique et en termes de création d'emplois des mesures qui seront proposées à l'issue du Grenelle de l'environnement.
En conclusion, M. Jean-Paul Emorine, président, a remercié M. Claude Allègre pour la qualité de son exposé et de ses réponses et a rappelé que la commission avait travaillé longuement sur la question des OGM dans le cadre d'un rapport d'information ayant associé MM. Jean Bizet et Jean-Marc Pastor. Il a souligné que les échanges qui avaient eu lieu en commission étaient particulièrement importants à un moment où des décisions dans le domaine de l'environnement étaient sur le point d'être prises.
Environnement - Parc naturel régional de Camargue - Examen du rapport
Au cours d'une seconde réunion tenue dans l'après-midi, la commission a examiné le rapport présenté par M. Jean Boyer sur le projet de loi n° 10 (2007-2008) relatif au Parc naturel régional de Camargue.
M. Jean Boyer, rapporteur, a souligné la spécificité du projet de loi examiné, qui avait pour objet de régler un cas d'espèce, à savoir le statut juridique du Parc naturel régional de Camargue, victime d'un contexte juridique incertain et très complexe, menaçant son existence même.
Il a tout d'abord fait valoir la très grande richesse biologique de la Camargue, située dans le delta du Rhône, considérée comme l'une des plus vastes zones humides d'Europe, sur l'axe de migration des oiseaux du Nord de l'Europe.
Après avoir évoqué la variété des espaces naturels présents, il a relevé que ces derniers avaient été très largement façonnés par la main de l'homme, à partir du milieu du XIXe siècle, avec l'endiguement des bras du Rhône et la construction de digues à la mer pour se protéger des inondations, puis la mise en place d'un réseau hydraulique complexe avec l'installation de stations de pompage et le creusement de canaux d'irrigation et d'assainissement.
La Camargue, site naturel d'intérêt majeur, a-t-il ajouté, est en réalité un milieu artificiel géré par l'homme et dépendant étroitement des activités qui y sont pratiquées : la riziculture, l'élevage et aussi la saliculture. Au sein du PNR, des démarches de qualité sont développées et reconnues à travers notamment une appellation d'origine contrôlée (AOC) « riz de Camargue » et une AOC « Taureau de Camargue ».
Il a ajouté que la Camargue bénéficiait de nombreuses protections et reconnaissances tant nationales qu'internationales, confirmant ainsi son caractère emblématique. Ainsi, depuis 1927, le site de Vaccarès -13.000 hectares- est protégé et est devenu site classé en 1942, puis réserve nationale en 1975.
La protection de la Camargue se traduit également par des acquisitions foncières, du département des Bouches-du-Rhône, utilisant la taxe départementale sur les espaces naturels sensibles et du Conservatoire du littoral, propriétaire ou affectataire de plus de 15.000 ha sur le territoire du PNR. La quasi-totalité du parc est également désigné au titre de Natura 2000 et le PNR est responsable de l'élaboration d'un document d'objectifs.
Sur le plan international, M. Jean Boyer, rapporteur, a évoqué le classement, en 1977, de la Camargue en réserve de biosphère, réseau coordonné par l'UNESCO et l'adhésion à la Convention Ramsar sur les zones humides en 1986.
Pour présenter le contexte juridique complexe justifiant le projet de loi, le rapporteur a fait valoir que la structure gestionnaire du parc aurait dû voir évoluer ses statuts, mais que de fortes oppositions de personnes avaient entraîné une série de recours contentieux, successivement perdus par le PNR.
Il a indiqué que le PNR de Camargue, troisième quant à l'ancienneté, avait été créé en 1970 et géré par une fondation, reconnue d'utilité publique en 1972, permettant d'associer à part entière les grands propriétaires, mais aussi l'ensemble des collectivités et acteurs locaux, exploitants, pêcheurs, chasseurs soucieux de préserver la qualité emblématique d'un territoire face à de grands projets d'aménagement, comme Fos-sur-Mer ou le Cap d'Agde. On parlait alors du « Parlement de Camargue » et son rôle a été essentiel dans la mise en valeur du territoire, permettant ainsi le renouvellement du classement du Parc, en 1998, pour dix ans, avec une charte révisée.
Le rapporteur a ensuite indiqué que la Fondation avait été confrontée à de multiples difficultés juridiques, comptables et budgétaires, et qu'il était apparu très difficile de maintenir le statut privé d'un organisme, ne bénéficiant quasiment que de fonds publics, d'autant plus que la loi du 2 février 1995 dite « loi Barnier » avait posé le principe -pour les nouveaux PNR- du recours à un syndicat mixte pour leur gestion.
Tant l'administration centrale que la majorité des acteurs locaux ont tenté de faire évoluer le statut de l'organe gestionnaire du parc, tout en préservant sa spécificité historique, à savoir la très forte implication des propriétaires fonciers, notamment à travers la création, en décembre 2001, d'un groupement d'intérêt public (GIP) par arrêté préfectoral, repris par un arrêté ministériel en janvier 2003, à qui le budget et le personnel de la Fondation avaient été transférés. Mais le rapporteur a déploré que la procédure de retrait d'utilité publique, puis de dissolution de la Fondation n'ait pas été engagée, laissant coexister deux structures sur le même territoire et pour exercer des compétences identiques.
De plus, a-t-il relevé, les deux arrêtés de création du GIP ayant fait l'objet de recours contentieux ont été tous les deux annulés, l'arrêté préfectoral pour vice de forme et l'arrêté interministériel au moyen qu'en cas de changement de l'organe gestionnaire du parc, le nouvel organisme devait être impérativement un syndicat mixte.
M. Jean Boyer a alors indiqué qu'un décret du 9 novembre 2004 transférait la gestion du PNR à un syndicat mixte créé par l'arrêté préfectoral du 1er décembre 2004.
Les deux structures -Fondation et syndicat mixte- continuaient de coexister, la première dans des conditions de régularité douteuses et sans moyens et la seconde, dotée d'un budget et de personnel, mais les difficultés quotidiennes de fonctionnement étaient permanentes, les locaux du PNR étant propriété de la Fondation et sans convention de mise à disposition.
En outre, a-t-il souligné, le feuilleton judiciaire s'est poursuivi, avec l'annulation du décret du 9 novembre 2004 par le Conseil d'Etat en février 2007, au moyen que le changement d'organisme gestionnaire d'un PNR constituait une révision de la charte et devait donc être assurée par l'organisme gestionnaire historique, en l'occurrence la Fondation.
Le recours contre l'arrêté préfectoral de création du syndicat mixte est pendant devant le tribunal administratif de Marseille, mais selon toute vraisemblance, il sera aussi annulé et la décision peut intervenir avant la fin de l'année.
Depuis février 2007, le rapporteur a indiqué que le PNR expédiait les affaires courantes, le trésorier payeur général ayant notamment accepté de payer les 37 salariés du parc. Mais, si l'arrêté de création du syndicat mixte est annulé, celui-ci devra être mis en liquidation, ce qui entraînera le licenciement du personnel, avec un coût social d'autant plus inacceptable que les salariés sont très attachés au PNR et à son développement. Il a également souligné que toutes les conventions de gestion signées par le PNR, en matière agricole, dans la lutte contre les inondations, ou encore l'accueil du public tomberaient, ce qui porterait gravement préjudice à la Camargue.
En outre, il a rappelé que le classement du PNR avait été renouvelé jusqu'au 20 février 2008 et que si, à cette date, aucune procédure de révision de la Charte n'était en cours, le Parc perdrait son label de « parc naturel régional ».
Il a fait valoir que le projet de loi prenait acte de cette impasse juridique interdisant de recourir à la procédure de droit commun pour réviser la Charte du parc et modifier le statut de la structure gestionnaire et de l'accord auquel étaient parvenues l'ensemble de parties prenantes réunies sous l'égide de M. Jean-Louis Borloo, ministre d'Etat, ministre de l'écologie, du développement et de l'aménagement durables, le 2 août dernier, pour stabiliser la situation juridique du PNR de Camargue.
Le dispositif proposé prévoit la validation des actes juridiques passés par le syndicat mixte depuis sa création, la reconnaissance du syndicat mixte comme unique organe gestionnaire du PNR, nonobstant toute disposition contraire, la désignation de trois délégués par le syndicat mixte de gestion des associations syndicales des propriétaires du Pays d'Arles, représentant les associations de propriétaires gérant le système hydraulique en Camargue et la prolongation, jusqu'au 18 février 2011, de la durée de validité du classement du PNR de Camargue, afin de laisser au syndicat mixte le délai nécessaire pour réviser sa Charte.
M. Jean Boyer, rapporteur, a recommandé l'adoption de ce projet de loi assorti d'un amendement rédactionnel, après avoir indiqué avoir reçu tous les acteurs concernés, qui dans leur quasi-majorité, souhaitent qu'une solution pérenne soit mise en place pour doter le Parc d'une structure juridique incontestable.
Il a considéré que les aménagements proposés pour la composition du syndicat mixte permettaient de ménager les susceptibilités, encore à fleur de peau pour certains, et d'assurer la représentation des propriétaires, dans l'esprit de la Fondation.
Il a souhaité que la dévolution des biens de la Fondation, en particulier de ceux acquis sur des fonds publics puissent être utilisés pour répondre aux missions du Parc et s'est déclaré favorable à la solution permettant au Conservatoire du littoral d'être affectataire des biens de la Fondation, pour les donner en gestion au PNR de Camargue.
En revanche, a-t-il précisé, une solution spécifique devra être trouvée pour les biens reçus par donation.
En conclusion, le rapporteur a considéré qu'en apportant son soutien sans réserve à ce projet de loi, la commission marquait sa volonté de voir gérer et mis en valeur cet espace emblématique qu'est la Camargue dans une démarche concertée associant l'ensemble des acteurs locaux et économiques concernés. Il est de l'intérêt de tous que le label « Parc naturel régional » soit maintenu au-delà de 2008.
M. Charles Revet a déclaré partager le souhait du rapporteur de voir adopter très rapidement ce projet de loi afin de préserver l'intégrité du Parc naturel de Camargue.
M. Paul Raoult a félicité le rapporteur pour la très grande attention et l'écoute qu'il avait eues sur ce sujet complexe et a déclaré regretter le harcèlement juridique constaté depuis des années, qui avait bloqué l'évolution nécessaire de la structure juridique gestionnaire du Parc naturel de Camargue. Il a également souhaité que le projet de loi soit adopté dans les meilleurs délais et rappelé l'intérêt écologique majeur du territoire du Parc, tout en soulignant son caractère excessivement fragile et menacé.
Mme Evelyne Didier a souligné le caractère particulier de ce projet de loi ayant pour unique objet le statut juridique de l'organe de gestion du PNR de Camargue. Elle a confirmé que toutes les parties prenantes étaient désormais convaincues de la nécessité de l'adopter dans les plus brefs délais.
La commission a ensuite adopté à l'unanimité un amendement rédactionnel présenté par le rapporteur à l'article 2 puis l'ensemble du projet de loi ainsi modifié.
Agriculture - Produits agricoles, forestiers ou alimentaires et produits de la mer - Examen du rapport
La commission a ensuite procédé à l'examen du rapport sur le projet de loi n° 179 (2006-2007) ratifiant l'ordonnance n° 2006-1547 du 7 décembre 2006 relative à la valorisation des produits agricoles, forestiers ou alimentaires et des produits de la mer.
Soulignant que les signes valorisant la qualité et l'origine des produits agricoles et alimentaires bénéficient d'un engouement croissant auprès de nos concitoyens, M. Benoît Huré, rapporteur, a inscrit ce phénomène dans un contexte où les préoccupations liées au goût, à la sécurité et à la préservation des savoir-faire et du patrimoine gastronomique prennent une place prééminente. Cette évolution permet, a-t-il ajouté, de renforcer économiquement la partie la plus qualitative de notre agriculture, de valoriser notablement les productions nationales destinées à l'exportation et de contribuer à un aménagement équilibré et durable du territoire.
Si la demande de signes de valorisation existe donc assurément, l'offre ne paraît plus aujourd'hui être à la hauteur des attentes légitimes des consommateurs. Ces derniers se trouvent en effet de plus en plus désemparés devant la multiplication de ces signes, créés à des époques, à des échelons et selon des logiques différents, sans qu'aucun travail de clarification n'ait jamais été mené. Peu lisibles du fait de leur inflation et de leur complexité, les signes de valorisation sont désormais, pour certains du moins, peu crédibles aux yeux du grand public, comme l'ont montré plusieurs études récentes. Par ailleurs, il est devenu nécessaire de mettre tous ces signes d'identification en concordance avec le droit communautaire, qui fixe de façon très précise le cadre de leur régime depuis quelques années.
Renforcer la lisibilité de ces signes, accroître leur crédibilité et garantir leur compatibilité avec le droit communautaire, tel était donc devenu l'impératif pour leur conserver toute leur renommée et leur valeur, a résumé M. Benoît Huré, rapporteur. Il a rappelé que cet objectif avait été fixé au Gouvernement, lors du vote de la dernière loi d'orientation agricole, début 2006, dans un article d'habilitation législative. Soulignant que l'ensemble des acteurs intéressés -parlementaires, professionnels et fonctionnaires- avaient travaillé en concertation pour finalement aboutir à la publication de l'ordonnance du 7 décembre 2006 relative à la valorisation des produits agricoles, forestiers ou alimentaires et des produits de la mer, que le projet de loi examiné se propose de ratifier, il a regroupé autour de quatre grands axes la réforme du système français de valorisation opérée par ce texte :
- la structuration des nombreux signes de valorisation existant autour de trois catégories principales : d'une part, les signes d'identification de la qualité et de l'origine, qui valorisent soit une qualité supérieure (label rouge), soit une qualité liée à la tradition (spécialité traditionnelle garantie) ou à l'origine (appellation d'origine contrôlée, appellation d'origine protégée ou indication géographique protégée), soit une qualité environnementale (agriculture biologique) ; d'autre part, les mentions valorisantes (« montagne », « fermier », « produits de pays », « vin de pays » ...) ; enfin, les démarches de certification des produits. D'une nature différente des autres signes, puisque reposant sur des démarches internes à des entreprises, elles ne relèvent pas de l'INAO ;
- la création d'un Institut national de l'origine et de la qualité (INAO), structure « tête de réseau » prenant la place de l'ancien Institut national des appellations d'origine. Doté d'un rôle central, cet INAO « nouvelle formule » encadre tous les signes d'identification de la qualité et de l'origine. Il est composé de comités nationaux par filières et types de signes, où est représentée chaque catégorie d'opérateurs. Il possède par ailleurs un conseil des agréments et contrôles, qui supervise le contrôle, par les organismes privés, de tous les signes pour lesquels il est compétent ;
- la mise en place d'organismes de défense et de gestion (ODG), qui se substituent aux multiples structures existant auparavant. Egalement représentatifs des différentes catégories d'opérateurs, ils mettent au point et gèrent les cahiers des charges des signes de qualité et d'origine, après avoir été reconnus par l'INAO ;
- le renforcement des structures et procédures de contrôle. En vue de mettre fin aux critiques sur l'impartialité des contrôles, ceux-ci ne sont plus confiés aux opérateurs eux-mêmes, mais à des organismes dits « d'inspection » et « de contrôle », indépendants et impartiaux, accrédités et contrôlés par l'INAO.
Indiquant qu'il avait procédé à une douzaine d'auditions des organismes administratifs, syndicaux et professionnels les plus concernés, M. Benoît Huré, rapporteur, a dit avoir constaté que le nouveau dispositif, qui est en cours de mise en place progressive depuis la publication de l'ordonnance à la fin de l'année dernière, recueillait l'assentiment général de l'ensemble des acteurs et devrait donc faire l'objet d'un consensus politique. Par conséquent, il a annoncé qu'il ne souhaitait pas remanier profondément le texte, mais simplement procéder aux quelques corrections ou adaptations dont l'expérience avait démontré la nécessité.
Approuvant les conclusions du rapporteur, M. Jean-Paul Emorine, président, a fait observer que les rapports de forces dans le secteur agricole à l'échelle mondiale étaient fortement déséquilibrés. Illustrant son propos par l'écart existant entre la surface agricole utile du Brésil (220 millions d'hectares) et celle de la France (30 millions d'hectares), il a appelé à développer, dans notre pays, des productions de niche hautement qualitatives.
Répondant à une question de Mme Jacqueline Panis, qui l'interrogeait sur les suites données à une enquête d'une association de consommateurs remettant en cause la légitimité du classement d'une partie notable des vins AOC, M. Benoît Huré, rapporteur, a précisé que leurs cahiers des charges seraient progressivement réexaminés.
Après avoir félicité le rapporteur, M. Charles Revet a regretté que l'ordonnance ne précise pas la notion de « produit fermier », alors que le Gouvernement s'était engagé en ce sens lors du vote de la dernière loi d'orientation agricole.
M. Benoît Huré, rapporteur, a indiqué que ce type de précisions relevait plutôt des mesures règlementaires d'application.
S'inquiétant des conséquences du découplage des labels rouges et des indications géographiques protégées (IGP), M. Philippe Darniche s'est demandé dans quelle mesure les producteurs sous labels rouges, qui se sont investis dans la constitution de leurs cahiers des charges sur un territoire géographique délimité, pourraient continuer de protéger leurs produits par de tels signes attachant la qualité à un terroir.
M. Benoît Huré, rapporteur, l'a rassuré en lui indiquant que l'un des amendements présentés avait justement pour objet de permettre à des opérateurs de continuer d'associer un label rouge à une IGP.
Abondant dans le sens de M. Charles Revet, Mme Odette Herviaux a appelé à mieux distinguer les signes garantissant la qualité et l'origine des simples mentions valorisantes. Estimant que ces dernières recouvraient des réalités très hétérogènes et n'étaient plus des garanties de qualité à elles seules, elle a préconisé de procéder, au moyen de mesures règlementaires, à une segmentation plus claire entre ces deux types de signes.
M. Jean-Paul Emorine, président, a précisé que les IGP, qui s'inscrivent souvent dans la continuation d'une AOC, présentent un périmètre et des cahiers des charges fort distincts de ceux des mentions valorisantes.
A Mme Elisabeth Lamure, qui s'interrogeait sur la reconnaissance par des signes valorisants des pratiques d'agriculture raisonnée, M. Jean-Paul Emorine, président, a indiqué que cette démarche n'était pas reconnue par de tels signes, le degré de contrainte étant moindre que celui exigé pour les signes d'identification prévus par la loi.
M. Benoît Huré, rapporteur, a précisé que l'agriculture raisonnée, qui ne fonctionne pas sur le même modèle que celle sous signe valorisant, deviendrait bientôt la norme. Il a ajouté qu'elle était souvent un premier pas vers une agriculture sous signe de qualité.
Puis il a présenté cinq amendements tendant respectivement :
- à l'article 1er, à apporter diverses améliorations et précisions rédactionnelles au texte de l'ordonnance ;
- à insérer un article additionnel après l'article 1er afin de proroger de deux années le mandat des assesseurs aux tribunaux paritaires des baux ruraux, les élections normalement prévues en janvier de l'année prochaine ne pouvant être organisées dans des conditions satisfaisantes pour des questions pratiques ;
- à insérer un article additionnel après l'article 1er permettant, si les ODG concernées le demandent, de maintenir obligatoirement couplés un label rouge et une IGP, afin de continuer à préserver le lien entre qualité et origine ;
- à insérer un article additionnel après l'article 1er habilitant l'INAO à prendre des mesures communes pour l'ensemble des labels rouges, après avoir consulté les ODG intéressés ;
- à adapter les dates d'entrée en vigueur de l'article 2, tendant à supprimer la catégorie des appellations d'origine « vins de qualité supérieure » (AOVDQS), ces dates étant soit déjà expirées, soit trop rapprochées.
L'ensemble de ces amendements, puis le projet de loi ainsi amendé, ont ensuite été adoptés, le groupe communiste républicain et citoyen s'abstenant.
Environnement - Echange de vues sur la saisine de l'Office parlementaire d'évaluation des choix scientifiques et technologiques - Chlordécone et paraquat et autres pesticides dans l'agriculture martiniquaise, guadeloupéenne et guyanaise
La commission a, pour finir, procédé à un échange de vues sur la saisine de l'Office parlementaire d'évaluation des choix scientifiques et technologiques sur l'utilisation du chlordécone, du paraquat et des autres pesticides dans l'agriculture martiniquaise, guadeloupéenne et guyanaise.
M. Jean-Paul Emorine, président, a indiqué que l'audition des quatre ministres compétents, la semaine dernière, en commun avec la commission des affaires sociales, avait permis de relativiser l'émotion suscitée par les déclarations du docteur Belpomme sur les effets des pesticides employés aux Antilles. Il a ajouté que les ministres avaient également annoncé l'engagement de plusieurs études permettant de faire toute la clarté sur les problèmes qui peuvent subsister, à la suite de l'emploi de certains pesticides tels que le chlordécone.
Il a proposé qu'au vu de ces éléments et des débats du Bureau de la commission des affaires économiques, lors de sa dernière réunion, l'office parlementaire d'évaluation des choix scientifiques et technologiques soit saisi d'une mission de veille visant à s'assurer que tous les rapports annoncés soient bien conduits à terme et qu'après leur publication, tous les aspects scientifiques du problème aient été éclairés.
Cette proposition a été adoptée à l'unanimité.