Mercredi 15 mars 2006

- Présidence de M. Joël Bourdin, président.

Économie - Accès des ménages au crédit en France - Examen du rapport d'information

La délégation a procédé à l'examen du rapport d'information de M. Joël Bourdin, président, rapporteur, sur l'accès des ménages au crédit en France.

M. Joël Bourdin, rapporteur, a rappelé que le rapport sur l'accès des Français au crédit faisait suite aux travaux de la délégation sur les perspectives économiques à moyen terme de l'automne, qui sont l'occasion d'insister sur un point essentiel : toute réduction du déficit public qui ne serait pas compensée par plus de demande privée exercerait un impact négatif sur la croissance. Ce diagnostic conduit à vérifier s'il existe des réserves d'endettement des ménages à mobiliser pour placer leur trajectoire de demande sur un niveau plus élevé.

En outre, le contexte du rapport a justifié cette étude du fait de la coexistence de discours plutôt alarmistes des Banques centrales et, au contraire, de travaux de l'Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE) notamment, estimant que, parmi les réformes structurelles nécessaires pour que l'Europe surmonte la langueur de son économie figure un élargissement de l'accès des ménages au crédit.

Le Gouvernement n'est d'ailleurs pas insensible à de telles préoccupations puisqu'il a présenté au Parlement, qui l'a adopté, un projet l'autorisant à introduire par ordonnances des mécanismes - l'hypothèque rechargeable et le viager hypothécaire - visant à « doper » la distribution de liquidités aux ménages.

Les questions qui sont abordées dans le rapport découlent donc d'un besoin de clarification. Il s'agit, d'abord, de prendre la mesure de l'endettement des Français et d'examiner la contribution d'un supplément d'endettement à la croissance économique. Il s'agit, en second lieu, d'examiner si l'offre de crédit comporte des rigidités spécifiques qui freinent le recours au crédit.

Le rapport porte sur l'accès des ménages au crédit, et non sur la demande de crédits par les ménages. C'est souvent celle-ci qui est invoquée pour rendre compte de la dynamique du crédit. Sans nier son importance, l'idée que l'industrie du crédit revêt globalement les caractéristiques d'une industrie d'offre, c'est-à-dire d'une activité capable de créer sa propre demande, a conduit à regarder si un certain malthusianisme bancaire n'était pas à l'oeuvre du fait, soit du contexte institutionnel de l'offre de crédit (la réglementation, le contrôle prudentiel, l'organisation de marché...), soit du fonctionnement économique du secteur bancaire et des pratiques commerciales de ses acteurs.

M. Joël Bourdin, rapporteur, a alors indiqué que le rapport établissait que, malgré une importante augmentation de leurs dettes, les Français étaient globalement « sous-endettés ».

Un endettement des ménages français plus important serait soutenable, tant au regard de leur situation financière propre que si on l'apprécie par rapport à leurs homologues de l'OCDE. Enfin, la diffusion du crédit dans la population est insuffisante.

L'endettement des ménages a beaucoup augmenté depuis 1995. La dette des ménages représentait alors environ la moitié de leur revenu annuel. Elle s'élève aujourd'hui à prés de 60 % de celui-ci. Ainsi, la dette des ménages a augmenté plus rapidement que leur revenu et aussi que le produit intérieur brut (PIB). L'essentiel de la dette des ménages, et de sa progression, est attribuable aux crédits immobiliers, qui représentent 432,7 milliards d'euros (79 % de la dette totale), contre 116 milliards pour les crédits à la consommation. Enfin, la distribution de crédits aux ménages augmente ces dernières années sur un rythme élevé, proche de 8 %.

Ces éléments ne participent pas pour autant à une dérive du crédit.

Au regard de la situation financière des ménages, on doit d'abord remarquer que, si l'endettement des Français a progressé, le poids des charges liées à cette dette (remboursement du capital et intérêts) est resté quasiment stable, grâce à la baisse des taux d'intérêt et à l'allongement de la durée des prêts, qui ont permis aux Français emprunteurs « d'économiser » 13 points de leur revenu annuel.

Deuxième élément : l'augmentation de la dette brute des ménages ne les a pas empêchés d'améliorer significativement leur situation patrimoniale nette.

Entre 1998 et 2002, le passif en crédits bancaires des ménages a augmenté de 27 % et leur actif net de 24,1 %. L'actif net des ménages représentait 5.656 milliards d'euros, contre un passif en crédits de 587 milliards. Il faut observer que le patrimoine brut des ménages, pris globalement, représente ainsi près de 7 ans de revenu contre un endettement bancaire de l'ordre d'un semestre de revenu.

Si on passe à des comparaisons internationales, on est conduit à remarquer que la France est l'un des pays du monde développé où l'endettement des ménages est le plus faible.

Pour l'Europe, seuls les ménages italiens sont moins endettés. L'endettement par habitant est près de trois fois plus faible qu'au Danemark, et environ deux fois moindre que pour l'Europe en moyenne.

Dans l'encours total des crédits à long terme de douze pays européens, la France occupe une place modeste avec 8,1 %, soit nettement moins que son poids dans le PIB des pays concernés (17,6 %).

Si on regarde un autre indicateur, le taux de financement, qui agrège le taux d'épargne des ménages et le taux de recours au crédit, on retrouve une situation identique, même si l'importance relative du taux d'épargne des ménages français réduit les écarts.

Enfin, un dernier constat doit intervenir : la diffusion du crédit est réduite en France.

La proportion des ménages endettés a décliné entre 1989 et 2004, malgré l'augmentation de l'endettement des ménages. En 2004, avec 50,2 % des ménages, elle est inférieure à ce qu'elle était en 1989, soit 52,8 %, et seulement très légèrement supérieure à 1995, avec 49,1 %.

Ainsi, l'essor du crédit s'est accompagné d'une concentration sur une partie plutôt stable de la population, si bien que de nombreux ménages n'en ont pas tiré parti.

Cette situation est d'autant plus paradoxale que le revenu disponible de l'ensemble des ménages connaissait une amélioration, que des dispositifs publics étaient mis en place pour favoriser l'accès au crédit et que les taux d'intérêt connaissaient une forte diminution.

Si les données permettant de comparer la diffusion du crédit au niveau international ne sont pas disponibles, plusieurs éléments conduisent à penser que la diffusion du crédit est sensiblement plus modeste en France qu'à l'étranger : les niveaux comparés d'endettement des particuliers, qui y sont nettement plus importants, vont dans ce sens ; la proportion des ménages propriétaires de leur logement est relativement faible en France ; et le niveau des taux de défaut sur crédit dans notre pays est comparativement bas.

Ainsi, structurellement, la moitié des ménages français n'est pas concernée par la dette, et seuls un peu moins de 30 % des ménages sont endettés au titre du logement.

M. Joël Bourdin, rapporteur, a alors indiqué que le sous-endettement relatif des ménages français entraînait un « coût » macroéconomique et microéconomique sur lequel il faut insister tant, en ce domaine, restant dominante l'idée selon laquelle l'endettement serait, en soi, pernicieux.

Cette idée, directement liée aux approches théoriques classiques de la monnaie, fonde le point de vue selon lequel le niveau des liquidités dans l'économie n'a pas d'influence durable sur le rythme de la croissance et risque, tout au plus, de relancer l'inflation.

Or, ces approches sous-estiment le rôle des variables monétaires qui peuvent agir par plusieurs canaux : celui des taux d'intérêt, qui influencent les taux d'intérêt exigés des emprunteurs par les banques, et influence ainsi la demande de crédit et le revenu relatif des ménages ; celui du crédit, qui décrit l'abondance relative des crédits dispensés par le secteur bancaire ; et celui des effets de richesse, qui décrit l'impact des variations du patrimoine des ménages sur leur demande.

Plutôt que de voir la demande de monnaie comme une relation stable avec des variables réelles lourdes (le revenu, l'inflation, le chômage...), ces différents canaux montrent d'abord que la demande des ménages est influencée par les conditions mêmes de l'offre de crédit.

De même, plutôt que d'estimer que la quantité de crédit dans l'économie n'a pas d'impact sur les variables réelles, il est plus fondé de prétendre qu'elle peut enclencher un mécanisme vertueux d'élévation du niveau de la demande, de la production et de la croissance potentielle.

Les constats empiriques tirés de la situation française et des situations observables dans les pays anglo-saxons vont dans ce sens.

S'agissant de l'influence des conditions de l'offre de crédit sur sa dynamique, il est possible de comparer la période connue par la France au début des années 90 avec la période ultérieure de cheminement vers l'euro.

Au début des années 90 se produit une nette inflexion du crédit qui fait suite à l'essor observé à partir de 1986. Certains en déduisent que l'impact de la dérégulation des années 80 s'épuise alors et que la demande de crédit obéit à une sorte de mouvement de balançoire. Cette analyse qui, incidemment, valide l'idée que les conditions de crédit conditionnent sa dynamique, doit être complétée par la considération de l'impact de la hausse des taux d'intérêt et d'une innovation bancaire qui s'est essoufflée sur la restriction du crédit.

Au demeurant, depuis 1995, avec la perspective de l'euro et une situation de taux d'intérêt durablement peu élevés, le cycle haussier du crédit nourri par l'apparition de nouveaux produits est ininterrompu.

Son impact sur la croissance française n'a pas été négligeable tant à travers la contribution directe de l'investissement en logement qu'à travers l'augmentation du rythme de la consommation qu'elle a induit et dont témoigne la baisse du taux d'épargne des ménages.

Mais dans les pays anglo-saxons ces enchaînements ont été beaucoup plus puissants du fait de la disponibilité de mécanismes d'extraction hypothécaire notamment.

Selon une estimation reposant sur les résultats d'une étude de la Réserve fédérale, les ressources ainsi extraites par les ménages américains auraient représenté une part considérable des ressources des ménages à partir de 2000. Elles se seraient élevées à 90 milliards de dollars en 2000 (1,3 % du revenu disponible brut des ménages), 130 milliards de dollars en 2002 (1,7 % du revenu) et 190 milliards en 2003 (2,3 % du revenu).

Le dynamisme de la consommation privée aux États-Unis qui s'en serait suivi aurait exercé, selon d'autres études, une contribution à la croissance de la consommation proche de 0,8 point de taux de croissance chaque année depuis 2001.

Le rapport évoque un certain nombre de risques et dresse le constat qu'en France les risques macroéconomiques et microéconomiques sont faibles et beaucoup plus réduits que les avantages correspondant à une plus grande dynamique du crédit, en termes de croissance économique, de bien-être et d'emploi.

M. Joël Bourdin, rapporteur, a alors insisté sur la question du surendettement individuel des ménages en appelant à en prendre la vraie mesure.

Il a cité un récent rapport d'enquête de l'Inspection générale des Finances et de l'Inspection générale des Services judiciaires qui pose la bonne question :

« 

En France, depuis la fin des années 1980, les politiques publiques en matière de crédit aux ménages ont été surtout marquées par la lutte contre le surendettement qui a fait l'objet de textes législatifs successifs. Il n'est donc pas anormal d'y trouver des taux de sinistres extrêmement bas.

Les consultations auxquelles a procédé la mission montrent que la priorité collective est bien une politique très prudente d'octroi de crédits immobiliers, afin d'éviter au maximum les sinistres... La plupart des interlocuteurs de la mission (établissements de crédit, consommateurs, administrations, magistrats, spécialistes de l'immobilier...) se rejoignent pour donner la priorité à la prévention du surendettement, quitte à écarter de l'accession à la propriété des catégories marginalement plus risquées ».

Il a estimé, comme dans d'autres domaines, qu'un arbitrage devait être effectué entre un principe d'extrême précaution aux effets inhibants et un principe de précaution raisonnable tendant à éviter les excès.

Il a alors observé que, si les cas individuels de surendettement étaient douloureux, le système de crédit était très loin de produire du surendettement : du côté des bilans bancaires, la proportion des encours de créances douteuses sur les ménages a très sensiblement diminué ; du côté des ménages, si le surendettement touche de l'ordre de 3 à 4 % des personnes endettées, notre pays comptant une minorité de ménages endettés, il ne s'élève qu'à peu près à 1,5 % seulement de l'ensemble des ménages concernés.

Plus qualitativement, l'origine des cas de surendettement et son évolution indiquent que celui-ci est très majoritairement inévitable, et, par conséquent, qu'il n'est pas à mettre au compte de pratiques dispendieuses, ni des banques ni des ménages.

Les experts de ce dossier distinguent entre le surendettement actif qui résulte d'une « sur-allocation » du crédit et le surendettement passif qui provient « d'accidents de la vie », essentiellement peu prévisibles.

On observe que la première catégorie est en forte régression depuis 1990 et que les 2/3 des cas de surendettement résultent d'événements essentiellement aléatoires.

De ces constats, on peut tirer l'observation qu'une distribution inconsidérée de crédits n'est qu'assez rarement en cause dans les situations de surendettement.

De fait, seul 1 % des ménages endettés peut être considéré en situation d'endettement de ce fait (soit 0,5 % de l'ensemble des ménages français). Encore faut-il relever qu'en ce cas, le surendettement concerne l'ensemble des dettes des ménages, et pas uniquement leurs dettes bancaires.

M. Joël Bourdin, rapporteur, a enfin exposé ses analyses sur la responsabilité des viscosités institutionnelles et des pratiques commerciales des établissements de crédit dans la situation de faible endettement des ménages.

Il a d'abord fait constat d'un marché où la concurrence est paradoxale, car malgré une très forte concurrence entre les offreurs de crédit, certains effets attendus de la concurrence font défaut ou sont incomplets : le marché du crédit aux ménages français connaît un relatif manque de maturité, en ce sens notamment que la gamme des produits pèche sous l'angle de la diversité ; par ailleurs, il existe une sorte de consensus implicite aux termes duquel l'offre bancaire se concentre sur des segments réduits de la population, situation paradoxale puisque alors que la bancarisation est plus développée en France (avec un taux qui dépasse 95 %) qu'au Royaume-Uni ou aux États-Unis (80 %), le crédit aux particuliers y est nettement moins répandu et diffusé.

Les résultats de la concurrence sont, quant à eux, problématiques. Deux phénomènes importants méritent l'attention : la nature de « produit d'appel » d'une partie du compartiment du crédit aux ménages (le crédit immobilier pour l'essentiel) ; l'existence de « subventions croisées », autrement dit d'une forme de péréquation financière entre les différentes catégories d'interventions des banques.

Ces deux phénomènes pourraient freiner l'offre de crédit aux ménages. Jusqu'à présent les autorités monétaires ne s'en sont préoccupées que sous l'angle de la couverture des risques et de la rentabilité des actifs bancaires.

Une « circulaire Trichet » est intervenue en ce sens demandant qu'aucun crédit ne soit consenti à moins de 60 points au-dessus du taux des emprunts d'État. Cette intervention n'a pas eu d'effet apparent et on peut s'en étonner.

M. Joël Bourdin, rapporteur, a souhaité que l'attention des autorités monétaires se porte sur cette question ainsi que sur les conséquences de ces phénomènes sur l'accès des Français au crédit et sur la fonction distributive des banques.

Si les pratiques commerciales des offreurs de crédit semblent pouvoir freiner la diffusion du crédit, le contexte institutionnel est également en cause, notamment les règles relatives à l'usure et l'absence de fichier positif, qui constituent deux exceptions françaises.

La réglementation de l'usure est désormais ancienne et semble limiter la diffusion du crédit, en particulier parce qu'elle repose sur l'application d'un coefficient uniforme à des assiettes de crédit qui peuvent être fort différentes. Une réforme, qui pourrait passer par une définition de l'usure par application d'un majorant exprimé en valeur absolue, notamment pour des crédits de montants limités pourrait être utile. Mais il faudrait l'entreprendre sous la réserve que les phénomènes de produit d'appel soient résorbés et avec le souci de préserver l'équité des relations de crédit.

Sur le fichier positif, c'est-à-dire un fichier qui recenserait non seulement les incidents de paiement mais aussi la situation d'endettement des ménages, M. Joël Bourdin, rapporteur, a estimé que son introduction aurait trois avantages :

- contribuer à la prévention du surendettement individuel ;

- remédier aux rigueurs, peut-être excessives, des méthodes alternatives de sélection des dossiers de crédit utilisés par les banques, en particulier la technique du score ;

- permettre une plus grande fluidité du marché, puisque le fichier positif mettrait à égalité d'information sur la situation des demandeurs, tous les offreurs potentiels de crédits.

Il a alors abordé trois éléments de contexte plus structurels, souhaitant tour à tour, que les emprunteurs puissent mieux profiter des desserrements des taux quand ils interviennent ; que soit favorisé l'élargissement de la gamme des produits offerts aux ménages et qu'une réflexion soit conduite sur les modalités de répartition des risques de crédit.

Sur le premier point, il s'est interrogé sur l'opportunité de maintenir en l'état les règles prévoyant le versement d'indemnités de renégociation d'emprunts. Compte tenu du niveau des taux aujourd'hui pratiqués, ce dossier n'est pas urgent. Mais des motifs d'équité et l'objectif de mieux tirer parti des détentes monétaires semblent militer pour que ce dossier soit ouvert. Les banques disposent de ressources courtes abondantes qui leur permettent d'adosser leurs encours à long terme. A tout le moins, le maintien d'un système d'indemnités, prohibées dans de nombreux États étrangers, suppose que des tests de sensibilité des bilans bancaires viennent le justifier. Une telle vérification devrait être opérée par les autorités compétentes. En outre, à l'heure où la Commission européenne entend introduire un tel système dans le champ du crédit à la consommation, où il n'est pas praticable en France, il a jugé qu'il fallait s'opposer à ce projet.

Sur le deuxième point, M. Joël Bourdin, rapporteur, a rappelé que le Parlement avait autorisé le gouvernement à prendre par ordonnances des dispositions visant à simplifier le recours à l'hypothèque et à introduire dans le droit français l'hypothèque rechargeable et le viager hypothécaire. Il a souhaité que ces ordonnances soient fidèles au souci d'ouvrir aux ménages, le plus largement possible, l'opportunité de mobiliser leur patrimoine immobilier pour en retirer des liquidités, tout en soulignant qu'une des limites des dispositifs dont il s'agit est qu'ils ne bénéficieront qu'aux ménages propriétaires.

M. Joël Bourdin, rapporteur, a donc jugé souhaitable que cette réforme soit complétée par une réflexion sur les conditions d'un élargissement de l'accès aux crédits immobiliers, estimant qu'en ce domaine, il existait une question fondamentale, celle de la répartition du risque de crédit.

Trois systèmes coexistent :

- ceux où le risque est porté par les ménages emprunteurs, tel est le cas où les crédits à long terme sont assortis de taux variables comme au Royaume-Uni ;

- ceux où le risque est disséminé, tel est le modèle américain où le risque de crédit est éparpillé entre l'offreur de crédit, l'emprunteur individuel et une multiplicité de financeurs ;

- ceux où le risque repose essentiellement sur les banques qui dispensent le crédit, tel est le cas français.

M. Joël Bourdin, rapporteur, a jugé qu'il serait envisageable de s'inspirer de l'exemple américain. Dans ce pays, le marché du refinancement des prêts à long terme a été pensé non seulement en fonction d'impératifs techniques, mais aussi en fonction d'objectifs de politique économique et sociale.

Les intervenants sur ce marché se sont vus doter d'avantages en contrepartie d'un objectif de diffusion harmonieux et le plus large possible du crédit.

Une telle préoccupation s'est incarnée en France, notamment avec le Fonds de garantie à l'accession sociale, que la loi de finances 2006 a profondément modifié. Ce fonds a contribué à sécuriser une quarantaine de milliards d'euros de crédit, contribution utile mais insuffisante. Les conditions d'éligibilité réservaient ce mécanisme aux prêts à taux zéro et aux prêts de l'accession sociale qui eux-mêmes sont fortement conditionnels. Il faut envisager un élargissement du périmètre du mécanisme.

M. Joël Bourdin, rapporteur, a conclu son intervention en appelant de ses voeux la définition d'une politique publique du crédit avec des objectifs clairs et des moyens appropriés.

Un large débat s'est alors ouvert.

M. Yves Fréville a jugé essentiel que la réépargne publique associée à l'effort de maîtrise du solde public s'accompagne d'une accélération de la demande privée. Il a souligné que le dynamisme de l'investissement des entreprises était crucial et que le recours à la liquidité devait également être dirigé en ce sens si nécessaire. Il a suggéré que le choix de facturer les crédits à taux variable ou à taux fixe devait avoir un impact non négligeable sur les comportements des agents. Évoquant la demande de crédit par les ménages, il a estimé qu'une étude de ces déterminants pourrait être utile s'interrogeant, en particulier, sur la contribution de la pyramide des âges et du pessimisme des Français à un comportement de demande qui ne semble pas privilégier le recours au crédit.

S'étant déclaré favorable au fichier positif, il a souligné l'importance de pondérer les systèmes de garantie des crédits par les risques d'aléa moral qu'ils peuvent comporter.

M. Bernard Angels s'est félicité de l'apport informatif de l'exposé du rapporteur, qui montre que des réformes structurelles favorables aux Français peuvent intervenir. Il a souhaité que toutes les pistes ouvertes soient explorées, insistant sur la contribution de formules innovantes à la mise en oeuvre de politiques publiques favorables à la croissance économique et au bien-être individuel, tout en étant économes en deniers publics.

M. Joseph Kerguéris a abondé dans le sens de la proposition tendant à ce que le maintien de la réglementation sur les indemnités de renégociation soit suspendu à la vérification de sa justification économique.

M. Jean-Pierre Plancade a souhaité que la future recharge hypothécaire soit conçue avec suffisamment de souplesse pour que ce mécanisme contribue réellement à une croissance économique plus forte et à une meilleure transmission de la politique monétaire.

La délégation a alors donné un avis favorable à la publication du rapport d'information sur l'accès des ménages au crédit en France, de M. Joël Bourdin, rapporteur.