MAITRISER LA SOCIETE DE L'INFORMATION :
QUELLE STRATEGIE POUR LA FRANCE ?
Texte de clôture
Explications sur la mission commune d'information sur les nouvelles technologies de l'information
MISSION COMMUNE D'INFORMATION SUR LES NOUVELLES TECHNOLOGIES DE L'INFORMATION _________ |
La mission sénatoriale sur l'entrée dans la société de l'information a été créée en juin 1996. A cette date, malgré les rapports publiés sur le sujet, seuls les milieux professionnels concernés et certains politiques se rendaient compte de l'importance du sujet.
Les membres du gouvernement et du parlement et l'ensemble de l'opinion publique, y compris nombre d'industriels et d'organes de presse croyaient encore à un phénomène de mode. Au mieux, les progrès de l'informatique, de la télématique et d'Internet ne semblaient pas différents de ceux de l'industrie ferroviaire, automobile ou aéronautique.
Désormais, il est acquis pour la majorité de nos concitoyens et de nos décideurs que l'entrée dans la société de l'information est inéluctable. Et surtout que celle-ci implique une transformation profonde de toutes les économies, de toutes les sociétés sur notre planète, avec des dangers et des opportunités.
On peut s'en inquiéter ou s'en réjouir. Mais il serait déraisonnable de l'ignorer. Des centaines de millions d'emplois de par le monde sont concernés dans tous les secteurs. Emplois supprimés, emplois modifiés, emplois créés. Les villes, les régions, les Etats profiteront ou pâtiront de ces bouleversements selon leur capacité d'adaptation à la mondialisation qui résulte des nouvelles technologies de l'information.
Sur le plan des techniques et des conséquences en matière de politique industrielle, la commission n'a pas estimé nécessaire de reprendre de longues auditions, considérant que le rapport de l'Office parlementaire d'évaluation des choix scientifiques et techniques (rapport Laffitte) était assez complet. On peut noter toutefois l'émergence croissante des systèmes de diffusion satellitaire. La France est en bonne position. Encore faut-il que sa politique spatiale maintienne le cap.
Notre mission sénatoriale s'est tout particulièrement penchée sur les conséquences pratiques de cette nouvelle donne pour les collectivités locales, privilégiant, chaque fois que cela était possible, un point de vue descriptif et pratique propre à susciter l'intérêt des responsables locaux pour les solutions que les nouvelles technologies leur offrent en matière d'aménagement et d'animation de la vie locale.
Ainsi, en matière d'aménagement du territoire, l'entrée dans la société de l'information modifie profondément les possibilités offertes aux communes, aux départements, aux régions. Pour toute une série de services éducatifs, administratifs ou culturels le handicap de l'éloignement disparaît. Ou du moins disparaîtra si les mesures de modernisation des équipements télématiques sont prises, si des vidéoconférences sont accessibles partout. La mission a constaté que les collectivités locales sont souvent plus avancées que l'Etat, et qu'elles s'aperçoivent avant d'autres qu'il faut désormais toujours se poser la question des investissements prioritaires -parmi lesquels les systèmes de télécommunications large bande et les investissements immatériels liés aux téléservices.
La mission a aussi constaté que l'évolution des mentalités était en retard sur les conséquences prévisibles des changements, y compris ceux qu'analysent le rapport de l'Office parlementaire déjà cité et le rapport Sérusclat sur l'évolution des modes d'enseignement et d'apprentissage. Toutes les anciennes règles du jeu changent.
La fonction hiérarchique est spécialement concernée par ce changement. Les facilités des échanges à travers les frontières sont impressionnantes et, bien sûr, inquiétantes pour les législateurs habitués au cadre étatique. De quelle loi dépend un travail coopératif entre une équipe de dix personnes réparties au Bengale, à Taiwan, en France, en Californie, à Milan ? Quel système de propriété industrielle de droits d'auteurs s'applique ? Qui est responsable d'un forum libre auquel s'adjoignent pour quelques minutes ou quelques heures des internautes du monde entier ? Une bouteille à la mer que des milliers de personnes peuvent lire est-elle encore une correspondance privée ?
La relation du citoyen avec les administrations est en train d'évoluer. La transparence des décisions va s'imposer. Les multiples expériences réalisées en France par les villes, les départements, les régions, prouvent que pour peu que les initiatives adéquates soient prises, une rénovation démocratique et une évolution des fonctions hiérarchiques, analogues à celle constatée dans les sociétés industrielles ou commerciales les plus innovantes, sont prêtes à s'imposer.
Ces évolutions trouvent des réponses diverses selon les législations nationales. Dans le pays dominant, les Etats-Unis, pour l'essentiel on laisse faire : les lois générales s'appliquent. Si litige il y a, c'est à la justice de trancher, ce qui fait le bonheur des " lawyers ".
Dans d'autres pays, on censure ou on interdit car on craint le côté " subversif " voire anarchique du phénomène Internet. Ces pays ne sont pas ceux qui ont la plus forte tradition démocratique, ni une grande pratique du commerce et de l'industrie au niveau international. Mais les barrières se lèvent. Ainsi, en Chine on vend désormais des ordinateurs avec des modems permettant de se connecter à Internet, alors que la réglementation l'interdisait il y a seulement quelques mois.
La mission, fidèle à la tradition française, a essayé de trouver le bon compromis entre le " laissez faire " et l'interventionnisme excessif. Son objectif principal est d'indiquer les voies d'une action dynamique pour que les effets positifs de l'entrée dans la société de l'information puissent éclore tout en veillant à la maîtrise de certaines dérives.