M. Edmond HERVÉ, rapporteur spécial
ANNEXES
ANNEXE 1
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EVOLUTION DU BUDGET DE LA JUSTICE DEPUIS 2000
Source : ministère de la justice
ANNEXE 2
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DÉFINITION DES FRAIS DE JUSTICE
Lors du dernier débat budgétaire intéressant la mission « Justice », la commission des finances du Sénat s'est à nouveau penchée sur l'évolution des « frais de justice », confrontée à leur croissance durable depuis 2000, excepté une pause en 2006.
Par lettre du 21 novembre 2011, le Président de la Commission a saisi la Cour des comptes d'une demande d'enquête. La Cour a rendu son rapport en septembre 2012 pour nous être présenté publiquement le 10 octobre 2012. Celui-ci fait suite à un précédant rapport adressé à cette même commission sénatoriale des finances le 18 novembre 2005.
Dans sa dernière livraison, la Cour des comptes consacre les conclusions de notre rapport spécial « Justice » pour la loi de finances pour 2012.
Nous y constations une croissance de ces frais, rappelions les principaux facteurs explicatifs : croissance des prescriptions, revalorisations tarifaires, inflation des textes...
Nous dénoncions une sous-budgétisation renouvelée depuis 1999 qui nous confrontait à un problème de sincérité budgétaire.
La Cour formule quatorze recommandations. En voici le résumé :
- améliorer la connaissance et la maîtrise des frais de justice par l'analyse de leur coût global et l'intégration de ceux qui sont supportés par le ministère de l'intérieur : par le renforcement des études d'impact des textes lorsque ceux-ci recommandent expertises et collaboration ;
- mise en place d'une gestion budgétaire réaliste évitant les dysfonctionnements et les retards ;
- modernisation et rationalisation de la gestion (recours à la mise en concurrence, contrôle de la ratification, sensibiliser les acteurs à la dépense et aux bonnes pratiques).
Leur mise en oeuvre - qui peut demander des modifications législatives - ne saurait nous dispenser d'une plus juste appréciation financière.
Le cas cité par la Cour des comptes de la Cour d'appel de Colmar - qui dès mars 2012 réduit le paiement des frais de justice pour payer en priorité les jurés d'assises et les éventuelles avances des témoins - n'est pas exceptionnel.
De nombreux tribunaux, en octobre 2012, ont du cesser de payer les frais de justice depuis le début du mois d'août 2012. Les magistrats ne sont pas en cause. Avec la LOLF, ils portent grande attention à la mise en oeuvre des marchés d'analyse génétiques, des transports de corps, à la réforme de la médecine légale, au suivi de gardiennages, à la mise des confiscations de véhicules...
Régulièrement certains de ces magistrats tiennent des réunions avec les responsables de la justice et de la gendarmerie.
Ces retards, pour honorer les frais de justice, créent des tensions, dégradent l'image de la justice, entrainent des défections chez les experts, fragilisent les auxiliaires, ralentissent la mise en oeuvre d'alternatives aux poursuites...
Toutes ces considérations devront faire l'objet d'un consensus, retenons quelques impératifs essentiels.
Observons tout d'abord que le périmètre des frais de justices est très large.
1/ Les dépenses de l'article R92 du code de procédure pénale, c'est-à-dire :
- frais de transport des personnes, frais postaux, frais de transports des procédures et des scellés, rémunération des personnes apportant leur concours à la fonction de jugement (jurés, huissiers, audienciers...), coût de mise en oeuvre des mesures restrictives de liberté, frais d'exécution ou d'application des peines (enquêtes sociales, contrôles judiciaires, médiation), frais de recherche de la vérité ou destinés à éclairer la décision du juge (reconstitutions, exhumation, expertises, témoins, écoutes, FNAEG, saisie), dépenses réparant un préjudice en cas d'erreur judiciaire, de détention suivie de non-lieu, relaxe ou acquittement, de rectification ou d'interprétation d'une décision de justice, frais garantissant des droits dans la procédure (examen médical, traduction, rémunération des administrateurs ad-hoc, CIVI).
2/ Les dépenses de l'article R93 du code de procédure pénale, c'est-à-dire :
- les dépenses liées à la protection des personnes ou garantissant l'exercice de droits (tutelles, autorité parentale, successions, droit des étrangers dont mineurs isolés, droit de la consommation), dépenses liées à la défense de la société (frais à la charge du Trésor public), frais liés à la responsabilité de l'Etat, frais liés à l'exécution des peines, frais postaux liés aux casiers judiciaires.
Les articles R93 et R94 comprennent aussi bien les frais de justice au pénal que les frais de justice civils, commerciaux et prud'homaux.
Si les frais de justice au pénal se rattachent à la recherche de la vérité, les frais de justice civils, commerciaux et prud'homaux se rattachent à la notion d'ordre public de protection :
- protection des personnes faibles et garanties de leurs droits : dépenses occasionnées par les mesures judiciaires de protection de certaines personnes vulnérables (frais liés à la législation sur la protection de l'enfance en danger, procédures portant sur l'internement des malades mentaux), ou pour leur permettre de faire valoir leurs droits (représentation des incapables majeurs, administrateurs ad hoc pour les mineurs, audition des mineurs...) ;
- protection d'intérêts sociaux : l'intérêt de la société est recherché dans la prise en charge, au moins à titre d'avance, de certains frais liés à des procédures collectives. Ces procédures visent à sauver l'entreprise, à préserver les emplois ou à favoriser le paiement des créanciers afin d'éviter des faillites en chaîne. Il en est de même, lorsque des frais sont générés à l'initiative ou à la requête du ministère public, en tant que partie principale ou partie jointe à des procédures.
Les examens médicaux méritent une précision : ils prennent de plus en plus d'importance. Citons :
- les autopsies virtuelles qui recourent à un scanner ou à l'imagerie par résonance magnétique. La « virtospie » complète l'autopsie classique ;
- la tomodensitométrie peut s'avérer utile pour appréhender un corps brulé en décomposition, préciser les données statistiques (forts utiles pour distinguer un meurtre d'un suicide) ;
- l'image 3D est moins traumatisante pour les familles (tout spécialement lorsqu'il s'agit de jeunes enfants décédés). Elle est facilement transmissible et favorise la diversité des avis.
Rappelons que la part de l'activité des médecins légistes sur le cadavre ne concerne que 20 % de leur travail. Les 80 % restant sont en lien avec le vivant (par exemple, la détermination de la gravité d'une blessure pour fixer la durée d'une incapacité de travail).
Une des grandes ambiguïtés des frais de justice est qu'ils sont payés par le ministère de la justice alors que beaucoup sont engagés par les policiers et les gendarmes. Quelle maîtrise peuvent avoir les magistrats sur la pertinence d'un tel acte ?