Table des matières
Mardi 18 juin 2002
- Présidence de M. Gérard Larcher, président, puis de M. Gérard César, vice-président. -
Audition de M. Luc Guyau, président de l'Assemblée permanente des chambres d'agriculture
La commission a procédé, conjointement avec la Délégation à l'Union européenne, à l'audition de M. Luc Guyau, président de l'Assemblée permanente des chambres d'agriculture.
M. Gérard Larcher, président, a rappelé l'importance des travaux menés actuellement par la commission sur les questions agricoles, évoquant notamment :
- les trois missions d'information portant respectivement sur la politique agricole commune, sur l'avenir de l'élevage et sur les organismes génétiquement modifiés ;
- le groupe de réflexion sur la politique de l'eau et les deux groupes de travail, relatifs, d'une part, à l'avenir de la viticulture française, d'autre part à l'Organisation mondiale du commerce (OMC) ;
- la participation à une mission commune d'information sur la montagne.
M. Gérard Larcher, président, a souligné que la commission était d'autant plus désireuse de recueillir le point de vue de l'Assemblée permanente des chambres d'agriculture (APCA) que le contexte agricole était particulièrement difficile, en raison notamment de l'adoption, par les Etats-Unis, d'une nouvelle loi agricole (Farm Bill), du raidissement de certains de nos partenaires européens à l'égard de la réforme de la politique agricole commune (PAC) et du volet agricole de l'élargissement, ainsi que de la fragilisation de nombreux secteurs, comme l'aviculture et la filière bovine.
Après avoir rappelé les contours du réseau des chambres d'agriculture, M. Luc Guyau a détaillé le projet « CAP 2010 », adopté par l'APCA le 13 décembre 2001, qui vise à promouvoir une agriculture durable. Il a alors défini l'agriculture durable comme étant :
- une agriculture rentable, qui permette aux agriculteurs de vivre de leur métier ;
- une agriculture vivable, offrant des conditions de travail et de vie attractives pour les jeunes ;
- une agriculture fiable, qui réponde pleinement aux préoccupations de sécurité alimentaire des consommateurs ;
- une agriculture adaptable, intégrant les avancées scientifiques et technologiques ;
- une agriculture renouvelable, ce qui renvoie aussi bien à la prise en compte de l'environnement qu'à la nécessité d'assurer le remplacement des agriculteurs cessant leur activité ; il s'est inquiété, à cet égard, de la diminution continue du nombre des installations.
M. Luc Guyau a expliqué que, pour mener à bien ce projet, l'APCA s'était donné trois missions : communiquer à l'extérieur, mener un effort de prospective et participer à la diffusion et à la bonne acceptation de l'innovation. Il a toutefois considéré que cet objectif ne pourrait être atteint que si la France réaffirmait pleinement son attachement à l'agriculture comme activité productive et comme élément structurant pour l'aménagement du territoire.
Evoquant ensuite le contexte européen, M. Luc Guyau a fait part de son souhait de voir renaître un partenariat franco-allemand sur les questions agricoles. Il a également évoqué la possibilité de convergences, notamment avec l'Espagne ou, à moyen terme, avec la Pologne. Il a, en revanche, déploré les importantes difficultés rencontrées avec les partenaires britanniques, et exprimé son inquiétude à l'égard de la volonté de la Commission européenne de réformer profondément la PAC dès 2003.
M. Luc Guyau a confirmé l'importance des crises sectorielles qui touchent la filière bovine, la viticulture et, depuis peu, le secteur céréalier. Il s'est également montré préoccupé par les difficultés que rencontre l'aviculture française, confrontée à l'afflux massif de viande de volaille en provenance d'Amérique latine. Déplorant, à cet égard, un contournement de la législation commerciale internationale, il s'est étonné du peu de méfiance des consommateurs européens, par ailleurs très exigeants en matière de sécurité sanitaire des aliments, à l'égard de produits transformés n'offrant pas toutes les garanties de traçabilité. Il a estimé que toutes ces crises sectorielles plaidaient en faveur d'un renforcement des mécanismes de régulation de la PAC.
Revenant sur la réforme de la PAC, M. Luc Guyau s'est opposé à un financement du développement du deuxième pilier par une réduction du premier pilier. Il a estimé que l'élargissement ne devait pas servir de prétexte à une remise en cause de la PAC. Il s'est félicité, à cet égard, du projet de la Commission européenne prévoyant l'attribution aux nouveaux Etats membres d'aides directes, dont le principe apparaissait ainsi renforcé. Il a souhaité que l'Union européenne adopte une réponse ferme à l'égard du nouveau Farm Bill américain. Enfin, il s'est félicité de l'affirmation du concept de modèle agricole et alimentaire européen, fondé sur une relation particulière entre les hommes, leur alimentation et leur territoire.
S'agissant des rapports entre agriculture et environnement, M. Luc Guyau a rappelé que l'APCA était prête à participer à tout nouveau débat relatif à la politique de l'eau. Il a mis l'accent sur les difficultés financières posées par la mise aux normes des bâtiments d'élevage. En ce qui concerne l'application de la directive nitrate, il a regretté que la définition des zones d'excédent structurel ne tienne pas davantage compte des efforts déjà fournis par les agriculteurs. Enfin, il a évoqué le problème des boues d'épuration, déplorant le manque de transparence de leur traitement et la confusion du discours dont elles font l'objet.
M. Luc Guyau a ensuite insisté sur la nécessité de simplifier les formalités administratives imposées au monde agricole. Il a expliqué que, face à la complexité des dossiers, un nombre croissant d'agriculteurs étaient conduits à externaliser la gestion de leur exploitation, au risque de perdre leur indépendance et leur esprit d'entreprise. Enfin, il s'est inquiété de la pérennité de l'Association nationale pour le développement agricole (ANDA).
Enfin, M. Luc Guyau a conclu en rappelant que l'APCA était attachée aux contrats territoriaux d'exploitation (CTE), mais souhaitait qu'ils retrouvent leur vocation initiale, celle d'aider les agriculteurs à répondre aux demandes de la société envers l'agriculture. Il a déploré que les CTE se transforment en outils de gestion des crises.
M. Jean Bizet, président du groupe de travail sur l'OMC, a souhaité connaître le point de vue de l'APCA sur l'évolution des négociations agricoles à l'Organisation mondiale du commerce (OMC) après l'adoption, par les Etats-Unis, d'un nouveau Farm Bill et s'est inquiété du manque de pugnacité de l'Union européenne sur ce dossier. Il a regretté qu'aucun progrès n'ait été réalisé en matière de partage de la valeur ajoutée entre les producteurs agricoles et la grande distribution, déplorant notamment l'emprise des marques de distributeurs (MDD) sur les produits du terroir et l'absence d'efficacité de la commission d'examen des pratiques commerciales instaurée par la loi sur les nouvelles régulations économiques (NRE). Il a proposé la création d'un dispositif de crédit d'impôt, dans lequel l'impôt serait perçu en cas de pratiques abusives.
M. Marcel Deneux a confirmé les propos de M. Jean Bizet sur la grande distribution. Contestant l'importance des aides directes dans le revenu des agriculteurs européens, il a souhaité connaître le point de vue de l'APCA sur une éventuelle réévaluation des prix des produits agricoles sur le marché intérieur, qui permettrait de rémunérer les producteurs par le revenu de leur travail.
Mme Odette Herviaux est revenue sur la gravité de la crise de l'aviculture, évoquant notamment la situation de ce secteur dans le Morbihan. Elle a préconisé un fort durcissement de la réglementation européenne. Elle a ensuite fait valoir que la diversité régionale devait être prise en compte pour la répartition des crédits de la PAC entre les deux piliers, indiquant que certains territoires avaient besoin de soutiens plus importants à l'espace rural. Elle a estimé indispensable la redéfinition des relations entre producteurs et grande distribution. Enfin, elle a plaidé en faveur d'une définition plus précise du terme de « boues d'épuration », qui recouvrait aujourd'hui des réalités très différentes.
En réponse, M. Luc Guyau s'est interrogé sur la compatibilité du « Farm Bill » et des règles du commerce international édictées par l'OMC, demandant une fermeté de l'Europe sur ce dossier. Après avoir plaidé en faveur d'une réaffirmation de la préférence communautaire, il a mis en cause la stratégie d'abaissement des prix européens au niveau des prix mondiaux, estimant que ceux-ci étaient un leurre, comme l'a illustré l'évolution du marché mondial des céréales. Il s'est dit favorable à une augmentation des prix des produits agricoles sur le marché communautaire, indiquant qu'elle devrait résulter à la fois des mécanismes des organisations communes de marché et d'une maîtrise de la production. S'agissant des rapports avec la grande distribution, il a indiqué avoir remis récemment un rapport à la Fédération internationale des producteurs agricoles (FIPA) sur ce thème. Il a estimé que l'action syndicale était la seule arme des agriculteurs face à la grande distribution. Il s'est dit préoccupé par la concentration des enseignes, qui accroît la dépendance des producteurs. En ce qui concerne les importations de produits avicoles transformés, il a fait observer que les producteurs brésiliens n'étaient pas soumis aux mêmes contraintes que les producteurs européens.
M. Marcel Deneux s'est demandé comment fixer le niveau de la préférence communautaire.
M. Luc Guyau a répondu que ce niveau dépendait des produits concernés. Il a indiqué que la préférence communautaire ne devait pas être présentée comme une mesure protectionniste, faisant valoir que l'Europe était le premier importateur mondial de produits agroalimentaires.
M. Charles Revet s'est interrogé sur l'impact de l'élargissement sur le budget de la PAC, tout en estimant que l'attribution des aides directes aux nouveaux membres était légitime. Il a évoqué les conséquences de la répartition des aides sur l'orientation agricole des territoires, citant l'exemple de la Seine-Maritime, où le soutien au maïs avait entraîné une diminution des prairies et provoqué une érosion des sols. Il a préconisé la mise en place d'une gestion décentralisée des aides.
M. Jean Boyer a souhaité savoir quelles mesures concrètes pourraient être prises dans le domaine de la gestion de la PAC.
M. Gérard Bailly a fait part du mal-être ressenti par les agriculteurs, confirmant que cela constituait une difficulté importante pour le renouvellement des exploitants, et ce, alors même que la taille croissante des exploitations rend les reprises de plus en plus difficiles. Il a insisté sur l'utilité des aides à l'investissement et à la mécanisation. Enfin, tout en reconnaissant l'intérêt des CTE, il a regretté les formalités administratives excessives qui les accompagnaient.
M. Jean-Marc Pastor a souligné que l'agriculture ne pouvait être régulée par le seul marché et qu'elle avait besoin de soutien. Il a fait valoir que derrière les questions de production se profilaient de plus en plus des questions d'aménagement du territoire. Il a souligné l'inquiétude des petites exploitations à l'égard de la suppression de la modulation. Se déclarant très favorable à ce que les CTE interviennent dans leur champ de compétences originel, il a conclu son intervention par deux questions, l'une sur la situation actuelle de la crise bovine, l'autre sur la position de l'APCA à l'égard des OGM.
M. Jacques Oudin a jugé que la révision de la loi sur l'eau devait être l'occasion d'examiner plus largement les rapports entre l'agriculture et l'environnement. Il a plaidé en faveur d'une implication des agriculteurs dans les commissions locales de l'eau et les schémas d'aménagement et de gestion des eaux (SAGE).
M. Aymeri de Montesquiou s'est interrogé sur l'opportunité de mettre en place un système de double prix, destiné d'une part à l'exportation, d'autre part au marché intérieur, comme cela existe dans l'organisation commune de marché du sucre.
M. Gérard César, président, s'est préoccupé du devenir des stocks de farines animales.
M. Emmanuel Hamel a souhaité savoir quelles seraient les conséquences, pour l'agriculture française, d'une sortie du système communautaire.
M. Luc Guyau a répondu qu'il ne fallait pas oublier que l'agriculture française était le premier bénéficiaire de la PAC, même si cela n'est pas sans contreparties. Il a fait observer qu'une grande partie des exportations françaises étaient destinées aux marchés communautaires, concluant que l'agriculture française ne pouvait se passer de l'Europe.
En outre, il a constaté qu'il serait difficile de développer d'autres politiques européennes et de mener à bien l'élargissement à budget communautaire constant. Il a précisé que l'APCA était opposée au cofinancement de la PAC par les Etats membres dans la mesure où celui-ci est source d'inégalités.
M. Luc Guyau a précisé que l'APCA était attachée à l'existence d'un pilier « développement rural » dans la PAC. Mais il a relevé que le budget prévu à ce titre n'avait pas été entièrement consommé, faute d'une participation à due concurrence du budget national. Il a souhaité le développement d'une véritable politique de la montagne, distincte des mesures de soutien aux productions et de la politique environnementale. Il a nuancé l'idée d'une différence d'impact environnemental entre le maïs et l'herbe, ajoutant que cet impact dépendait plus de la qualité de la mise en culture que du type de culture.
Soulignant le caractère inéquitable du dispositif de modulation à la française, il s'est toutefois interrogé sur les conséquences de sa suppression, rappelant l'intérêt de l'APCA pour une modulation européenne obligatoire et plafonnée. Il a considéré qu'il ne fallait pas lier le dossier de la modulation à celui des CTE.
Evoquant la crise bovine, M. Luc Guyau a constaté qu'après un recentrage temporaire sur la viande de qualité, les consommateurs et la distribution se tournaient de nouveau sur la viande de vache de réforme à bas prix. En matière d'OGM, il a plaidé en faveur d'un étiquetage précis susceptible de garantir la liberté de choix des consommateurs, tout en estimant nécessaire une poursuite de la recherche.
Au sujet de la proposition d'instaurer un système de double prix, il a fait observer que les aides à l'exportation allaient déjà dans ce sens. Il a néanmoins considéré que la situation du secteur betteravier était particulière, du fait de l'existence de quotas, et ne pouvait donc être généralisée.
M. Jean Bizet a souhaité apporter des précisions sur le dossier du stockage des farines animales. Il a souligné le caractère très préoccupant de la situation, puisque seules 2.000 des 10.000 tonnes produites hebdomadairement étaient éliminées. Il a déploré l'insuffisante capacité d'élimination en France, alors que l'Allemagne est en mesure d'éliminer toute sa production de farines. Il a indiqué, qu'à ce rythme, les stocks ne pourraient être éliminés avant 2009, ce qui laissait présager une grave crise politique sur ce sujet.
En conclusion, M. Gérard César, président, a remercié M. Luc Guyau et les membres de la Délégation pour l'Union européenne pour leur participation.
Mercredi 19 juin 2002
- Présidence de M. Gérard Larcher, président. -
Audition de M. Henri Proglio, président du directoire de Vivendi Environnement
La commission, conjointement avec le groupe d'étude sur l'eau et le groupe d'étude sur les déchets, a procédé à l'audition de M. Henri Proglio, président du directoire de Vivendi Environnement.
Présentant le groupe Vivendi Environnement, M. Henri Proglio a rappelé qu'il s'agissait d'une entreprise héritière de la Compagnie générale des eaux, fondée en 1853, dont l'activité s'est développée autour des délégations de service public. Il a souligné qu'elle était une des premières entreprises du genre.
Il a précisé que ce concept ayant pour objectif de concilier efficacité économique et exigence de service public avait pu être développé en France, puis à l'international, et qu'il constituait la réponse la mieux adaptée à la problématique de la gestion des services publics locaux.
Les activités de Vivendi Environnement, a-t-il ajouté, recouvrent quatre grands secteurs, la gestion de l'eau, la gestion des déchets, les transports collectifs et l'énergie, et ces activités, ainsi que leur hiérarchisation, correspondent à celles définies par le Conseil des ministres de l'environnement de l'Union européenne en juin 2000. Ce dispositif permet ainsi d'optimiser un système de gestion de l'environnement.
M. Henri Proglio a ensuite décrit l'entreprise Vivendi Environnement, leader mondial sur ces métiers, présente dans plus de 100 pays, réalisant un chiffre d'affaires annuel de 30 milliards d'euros et employant environ 300.000 personnes, dont 100.000 en France. Elle réalise, a-t-il précisé, 70 % de son chiffre d'affaires avec les collectivités territoriales, par des délégations de service public, et les 30 % restants en fournissant des services aux entreprises industrielles.
Il a notamment relevé que 60 % de ce chiffre d'affaires était réalisé dans des pays étrangers -70 % de l'activité en Europe et 23 % en Amérique du Nord- d'où l'importance, pour le groupe, de son développement au niveau international.
Il a indiqué ainsi que la croissance de l'entreprise viendrait, au cours des prochaines années, des marchés européens et surtout des marchés en Amérique du nord, où les potentialités étaient importantes, évoquant à titre d'exemple le contrat de gestion de l'eau avec la ville d'Indianapolis.
Il a néanmoins considéré qu'à terme la croissance du groupe, dans les années 2005-2010, viendrait de la zone asiatique, et souligné que le développement des métiers de Vivendi Environnement était lié au mouvement de concentration des populations dans les zones urbaines, notamment dans les pays développés, et que cette concentration concernerait, à terme, les deux tiers de la population mondiale.
Il a tout d'abord mis en lumière le fait que l'eau -aussi bien la production que le traitement des eaux usées- constituait l'activité principale du groupe, contribuant pour 50 % au chiffre d'affaires, pour un montant annuel de 16 milliards d'euros, et que cela positionnait l'entreprise comme leader mondial de ce secteur.
Pour la gestion des déchets, il a relevé également que Vivendi Environnement était le premier opérateur mondial hors Etats-Unis et qu'elle était présente sur toute la gamme des services.
Il a ensuite évoqué les activités de Vivendi Environnement liées aux transports, en précisant que le groupe était le premier opérateur commercial européen de transports collectifs de personnes sans être propriétaire de ses infrastructures et qu'il assurait des prestations pour les grandes communautés urbaines françaises, ainsi que pour des collectivités publiques nationales régionales ou locales dans de nombreux pays, citant à titre d'exemple le métro de Stockholm.
Il a enfin exposé l'activité du groupe dans le domaine de l'énergie, en précisant que Vivendi Environnement proposait des prestations de service, mais n'assurait pas la production d'énergie. Il a rappelé -pour s'en féliciter- le partenariat exclusif qui lie le groupe avec EDF à travers l'ouverture du capital de sa filiale Dalkia en juillet 2000.
Il a indiqué, enfin, qu'une partie importante de l'activité du groupe s'exerçait pour le compte d'entreprises industrielles -comme les constructeurs automobiles ou des industries sidérurgiques- qui souhaitent externaliser leur service à l'environnement.
Il a précisé, en outre, que les perspectives de croissance dans cette activité étaient très favorables.
M. Henri Proglio a ensuite exposé les trois axes stratégiques du groupe avec, en premier lieu, l'action de Vivendi Environnement en matière de développement durable, dans une logique d'amélioration de la vie locale.
Il a ensuite souligné la priorité du groupe en matière de recherche et développement, en citant l'exemple de l'eau afin d'améliorer les techniques de dépollution, de traitement ou de traçabilité.
Relevant que cette exigence permanente d'amélioration technologique concernait de nombreuses activités de Vivendi Environnement comme la valorisation énergétique des déchets, l'utilisation de la cogénération, la lutte contre l'effet de serre ou le développement de la pile à combustible, il a indiqué que le groupe comptait renforcer les moyens en matière de recherche et développement à hauteur de 30 % par an afin de renforcer son avance technologique.
Enfin, il a précisé que le troisième axe stratégique de l'entreprise concernait la formation professionnelle des salariés et la valorisation des compétences, afin, notamment, d'assurer la fluidité sociale au sein de Vivendi Environnement. Evoquant le centre de formation interne, ouvert en 1994 à Cergy-Pontoise, il a souligné que ce centre assurait des formations diplômantes. Actuellement, a-t-il ajouté, 600 collaborateurs sont formés tous les ans, le taux de réussite au CAP approche les 97 %, 140 à 160 personnes préparent un diplôme universitaire et cette initiative a reçu un accueil favorable de la part du ministère de l'Education nationale. A terme, Vivendi Environnement souhaite développer ce système dans tous les pays européens où l'entreprise opère.
M. Henri Proglio a ensuite commenté les récents développements liés à l'actualité de Vivendi Environnement, après avoir indiqué que ce groupe était coté à la Bourse de Paris depuis juillet 2000 et à la Bourse de New-York depuis le 5 octobre 2001. Il a précisé que 63 % du capital de Vivendi Environnement étaient actuellement détenus par Vivendi Universal. Soulignant que la naissance de Vivendi Environnement était liée à la fusion entre Vivendi et Universal, et à la dissociation concomitante en deux entités du groupe, il a rappelé que la dette initiale de 17 milliards d'euros du groupe avait été réduite à 14 milliards grâce à une augmentation de capital.
Il a indiqué que les exigences liées au développement de Vivendi Universal et sa spécialisation dans les métiers de la communication l'avaient poussé à décider de réduire sa participation dans le capital de Vivendi Environnement de 63 % à 40 %. Dans le cadre de cette cession d'actifs, il a insisté sur le fait qu'il souhaitait assurer l'avenir du groupe en garantissant son identité et en évitant le transfert des centres de décision. Par ailleurs, il a noté que Vivendi Universal s'était engagé à conserver les 40 % restants du capital pendant une période de 18 mois.
Il a donc souligné que cette décision de Vivendi Universal obligeait Vivendi Environnement, d'une part à constituer un socle d'actionnaires stables d'ici à fin décembre 2002 afin de renforcer le capital, et, d'autre part, à procéder à une augmentation de capital, pour un volume de 1,5 milliard d'euros de titres sur les marchés et de 100 millions d'euros pour les salariés.
M. Ladislas Poniatowski a alors souligné la nécessité de rassurer les collectivités locales qui pourraient douter de la pérennité des contrats qui les lient à Vivendi Environnement compte tenu du contexte financier évoqué par le président de Vivendi Environnement. Il s'est ensuite inquiété de l'identité des « investisseurs institutionnels » susceptibles de s'impliquer dans le capital de Vivendi Environnement.
M. Dominique Braye, président du groupe d'étude sur la gestion des déchets, rappelant qu'il présidait une communauté d'agglomérations en relation contractuelle avec Vivendi Environnement dans plusieurs secteurs d'activité, s'est interrogé sur :
- les raisons du profond changement de stratégie du groupe Vivendi Universal ;
- l'identité des investisseurs susceptibles de souscrire à l'augmentation de capital du groupe Vivendi Environnement ;
- les capacités du groupe à réduire sa dette ;
- les assurances que Vivendi Environnement peut apporter aux collectivités locales s'agissant des provisions pour renouvellement des réseaux constitués par les filiales de Vivendi Environnement, au montant estimé à environ 3,7 milliards d'euros ;
- le risque de fragilisation pour l'ensemble du groupe résultant de l'expansion internationale poursuivie parfois à travers des réponses, qu'on pourrait qualifier de « généreuses », aux appels d'offre.
M. Dominique Braye a enfin déclaré que l'inquiétude exprimée par les collectivités locales n'était que le revers de la confiance investie dans un groupe qui a toujours su exercer ses responsabilités.
En réponse aux intervenants, M. Henri Proglio a remercié les orateurs pour leur témoignage de confiance à l'égard du groupe Vivendi Environnement. Il a insisté sur le fait que tous les engagements juridiques et moraux de son groupe vis-à-vis des collectivités locales seraient tenus, car il s'agissait de la responsabilité de l'entreprise, quelle que soit l'identité de ses actionnaires. A propos de la préoccupation portant sur les risques encourus par Vivendi Environnement et après avoir relevé que 20 % seulement des contrats avec les collectivités locales françaises seraient à renouveler d'ici à 2008, il a mis en avant les bonnes performances économiques de Vivendi Environnement en 2001 -+ 21 % pour le résultat d'exploitation et + 11 % pour le chiffre d'affaires- en dépit d'une conjoncture décevante.
M. Henri Proglio a ensuite déclaré que, dans le domaine des appels d'offres internationaux, les propositions de son groupe pour conquérir ou renouveler des marchés étaient tout à fait raisonnables. Il a relevé, à titre d'exemple, que Vivendi Environnement avait présenté une offre de valorisation de la Société des Eaux de Berlin inférieure de 25 % à celle de ses concurrents. S'agissant du contrat de Prague, a-t-il ajouté, ses conditions financières sont justifiées par sa durée, égale à vingt-cinq ans.
Après avoir rappelé que la dette initiale du groupe avait été ramenée à 14 milliards d'euros à la fin de l'année 2001, il a souligné que les agences de notation internationale continuent à considérer le groupe de façon très positive.
M. Charles Revet, après avoir insisté sur l'importance de Vivendi Environnement pour les collectivités locales, s'est interrogé sur la situation financière du groupe avant d'évoquer le partenariat de Vivendi Environnement avec Electricité de France, notamment sur les réseaux de cogénération, compte tenu des prix pratiqués.
M. Georges Gruillot, rappelant que certaines évolutions récentes semblaient remettre en cause l'inéluctabilité annoncée du phénomène de la concentration urbaine dans les différentes parties du monde, s'est interrogé sur les conséquences de ces évolutions pour Vivendi Environnement à l'horizon 2010 ou 2020.
M. Philippe Leroy, évoquant l'évolution de la sidérurgie française, s'est demandé si, à terme, le nécessaire développement de Vivendi Environnement sur les marchés asiatiques ou américains n'aurait pas pour conséquence une remise en cause de la qualité de service offerte jusqu'à présent par le groupe aux collectivités locales en France. Il a, en conséquence, interrogé le président de Vivendi Environnement sur les garanties qu'il pouvait apporter à cet égard.
Leur répondant, M. Henri Proglio a apporté les précisions suivantes :
- pour conserver une place de leader mondial dans les services de proximité, Vivendi Environnement est tenu de maintenir la qualité des services qu'il assure actuellement auprès des collectivités territoriales en France ;
- la stabilité des actionnaires de Vivendi Environnement sera d'autant mieux assurée que les performances de l'entreprise seront satisfaisantes ;
- Vivendi Environnement n'a aucune participation dans Vivendi Universal ;
- le rachat par EDF de l'énergie produite se fait à des conditions différentes selon qu'il s'agit de cogénération -pour laquelle des prix supérieurs au prix du marché sont actuellement pratiqués- ou d'incinération -pour laquelle l'électricité est cédée au prix du marché. En conséquence, a-t-il estimé, l'évolution des prix de vente d'électricité aux industriels du fait de l'ouverture du marché, ne devrait pas modifier la valeur de reprise de l'électricité produite à partir d'usines d'incinération ;
- afin d'anticiper sur les évolutions sociales et sociologiques à venir, un institut de réflexion prospective, l'Institut Vivendi Environnement, a été constitué fin 2001 et il est composé d'experts et de scientifiques d'envergure internationale.
M. Claude Saunier, après s'être félicité de la qualité des performances de Vivendi Environnement dans les services de proximité, a considéré que l'engagement de dix-huit mois de Vivendi Universal de conserver sa part de capital de Vivendi Environnement était dérisoire eu égard à la durée des contrats que l'opérateur avait signés avec les collectivités territoriales. Il a souhaité avoir des précisions sur l'affectation des provisions constituées pour assurer le renouvellement des réseaux et s'est déclaré extrêmement attentif à suivre les stratégies du groupe, notamment en ce qui concerne les futurs partenariats envisagés.
M. Jacques Oudin, président du groupe d'étude sur l'eau, s'est interrogé sur l'intérêt pour Vivendi Environnement de rechercher des partenariats avec d'autres opérateurs, notamment pour les marchés remportés à l'international et il a souligné l'avantage qu'il y aurait à ce que les multiples instituts de recherche et de prospective existants dans le domaine de l'eau, de la propreté et des transports coordonnent leurs programmes. Il a enfin souhaité connaître la position du président de Vivendi Environnement sur l'avenir de l'énergie éolienne.
M. Gérard Larcher, président, a considéré indispensable une réflexion politique sur les modalités à inventer pour dégager, en l'absence de fonds de pension, les moyens financiers nécessaires pour assurer un financement stable des entreprises françaises, dès lors que les investisseurs institutionnels ne semblent plus en mesure d'assurer ce rôle. Il s'est inquiété des risques de fragilisation pour la structure des entreprises françaises induits par ce phénomène.
Leur répondant, M. Henri Proglio a souligné que l'énergie éolienne était loin d'être une activité rentable et il s'est inquiété des effets d'un « phénomène de mode » qui conduisait à subventionner lourdement des projets dépourvus de rationalité économique. Il a réaffirmé que les engagements contractuels financiers et juridiques seraient tenus par Vivendi Environnement sans conséquences dommageables pour les collectivités locales et les usagers. Il a enfin fait valoir la réflexion, déjà engagée par les partenaires européens de la France, sur la recherche de moyens financiers stables et souligné l'urgence d'une réflexion nationale sur ce thème.
Mercredi 26 juin 2002
- Présidence de M. Gérard Larcher, président,puis de M. Gérard César, vice-président -
Nouvelles technologies - Audition de M. Serge Tchuruk, président directeur général d'Alcatel
La commission a tout d'abord procédé à l'audition de M. Serge Tchuruk, président directeur général d'Alcatel.
M. Serge Tchuruk, président directeur général d'Alcatel, a dressé un panorama du secteur des télécommunications, en rappelant que cette industrie se décomposait en deux segments, avec d'une part les opérateurs de réseau et d'autre part les équipementiers, comme Alcatel, dont la vocation est de développer et de fournir des infrastructures de télécommunications et des services aux opérateurs.
Il a souligné que le secteur des télécommunications constituait l'un des éléments les plus importants de l'industrie des nouvelles technologies et que la croissance économique des Etats-Unis et de l'Europe reposait pour moitié sur le développement de ce secteur depuis une dizaine d'années. Parmi les équipementiers, il a noté que les acteurs importants se situaient aux Etats-Unis, en Europe et en Asie.
Il a ensuite précisé qu'Alcatel regroupait 100.000 salariés au niveau mondial -contre 120.000 dix-huit mois auparavant-, dont 25 à 28 % en France, et que la société réalisait un chiffre d'affaires annuel de 20 à 25 milliards d'euros, la France concourant, dans ce total, pour un peu moins de 10%. En outre, il a relevé qu'environ 50 % du capital était détenu par des actionnaires français et que 40 % de l'activité d'Alcatel était réalisée en Europe, 20 % aux Etats-Unis.
Au sein des métiers d'Alcatel, il a rappelé que le développement de nouvelles technologies était une activité dominante et que l'entreprise consacrait 12 % de son chiffre d'affaires annuel en investissements en matière de recherche et de développement, activité employant 20.000 ingénieurs, dont 80 % spécialisés sur les logiciels. A ce sujet, il a attiré l'attention de la commission sur l'évolution des métiers d'Alcatel au cours des 7 dernières années, soulignant qu'aux activités industrielles, qui pesaient lourd dans la valeur ajoutée, s'étaient progressivement substituées des activités à caractère « immatériel ».
Par ailleurs, il a indiqué que le secteur des télécommunications avait connu une forte croissance au cours des trois dernières décennies, surtout pendant les années 1990, où l'entreprise avait connu une croissance de l'ordre de 15 % par an et notamment en 1999, année où la demande avait crû très fortement, et en 2000, où l'entreprise a connu une croissance interne de 42 %, soit l'équivalent de la valeur d'une ou deux entreprises du CAC 40.
Evoquant le retournement de conjoncture en 2001 et la crise profonde qu'avait entraînée la diminution des investissements des opérateurs de téléphonie -clients d'Alcatel-, il a précisé que le groupe avait alors perdu entre un tiers et 50 % de son chiffre d'affaires en quelques mois, suivant les différents opérateurs occidentaux.
Analysant les multiples raisons de la crise, il a d'abord invoqué la chute de la demande des clients d'Alcatel après la « surcroissance » des années précédentes liée à « l'effet internet ». En second lieu, il a noté que la stratégie d'ouverture sur les marchés étrangers adoptée par les opérateurs de télécommunication avait entraîné une forte croissance externe de ces opérateurs et une hausse de leurs investissements financiers. Enfin, il a déploré que l'évolution rapide des technologies ne permette pas à chaque nouvelle technique élaborée par les équipementiers d'atteindre son seuil de saturation. En outre, il a estimé que le catalyseur de ces évolutions avait été le prix élevé de vente des licences UMTS.
Jugeant que toutes ces raisons s'étaient conjuguées avec la crise sur les marchés financiers, il a fait observer que la réduction des liquidités disponibles sur ces marchés avait focalisé l'attention sur la dette des opérateurs, ce qui s'était traduit par une défiance à l'égard de ces entreprises.
Il a souligné que cette crise touchant le secteur des télécommunications était de nature différente selon les acteurs et que les opérateurs connaissaient plutôt une crise du bilan, leur chiffre d'affaires restant stable, et que les équipementiers connaissaient une crise plus grave, les obligeant à des restructurations massives pour éviter une amputation du fonds de commerce et pour s'adapter aux nouvelles conditions du marché.
Il a en outre attiré l'attention de la commission sur la nécessité de ne pas faire l'amalgame entre les problèmes d'Enron, liés à des manipulations comptables, et la crise des télécommunications.
Il a ensuite indiqué qu'Alcatel était devenue une société diversifiée au cours des dernières années, centrée essentiellement sur les télécommunications, atteignant la place de numéro un mondial aujourd'hui sur le marché des infrastructures de télécommunications et des services aux opérateurs. Il a notamment insisté sur le fait que l'entreprise offrait une large palette de technologies, comme l'internet à haut débit (Asymetric Digital Subscriber Line -ADSL), les fibres optiques, marchés sur lesquels Alcatel était en position de leader, ou les infrastructures de téléphonie mobile, la technique IP, marchés sur lesquels Alcatel renforce actuellement sa position.
Après avoir rappelé qu'Alcatel avait néanmoins connu des pertes importantes en 2001, de l'ordre de 5 milliards d'euros, du fait des coûts de restructurations et des réajustements des postes de bilan, il a relevé que ces pertes restaient modiques par rapport à d'autres concurrents.
Il a enfin déclaré que le marché sortirait de la crise dans la mesure où la demande pour les biens et services de télécommunications restait forte, ce qui garantissait un potentiel de croissance important.
A l'issue de cet exposé, M. Philippe Leroy s'est interrogé sur la profondeur de la crise du secteur des télécommunications et sur la capacité des opérateurs à sortir de cette crise. Il s'est notamment demandé si le développement de la technique des fibres optiques n'ouvrait pas la possibilité d'une voie de sortie de la crise pour les équipementiers.
M. Serge Tchuruk lui a répondu que les fibres optiques faisaient partie des techniques qui permettaient de convoyer des données à haut débit, mais qu'il ne serait envisageable d'amener la fibre optique jusqu'à l'utilisateur final que dans une dizaine d'années. Il a indiqué que l'ADSL constituait une bonne alternative à court terme, mais qu'à long terme, les collectivités ne prenaient pas de risques à se lancer dans la construction des réseaux de fibres optiques, cette technique ayant toutes les chances de se développer dans un avenir proche.
M. Daniel Reiner a fait part à M. Serge Tchuruk de deux préoccupations, l'une d'ordre stratégique, l'autre d'ordre social. D'une part, il s'est interrogé sur l'opportunité du recentrage effectué par Alcatel sur son coeur de métier -les télécommunications- et sur la prévisibilité du retournement début 2001 du marché des télécommunications, arrivé à saturation. D'autre part, il a souhaité connaître quels étaient les effets cumulatifs sur Alcatel du développement du concept « d'entreprise sans production » à l'heure des restructurations.
En réponse, M. Serge Tchuruk a d'abord fait valoir qu'il était souvent plus facile d'expliquer les événements après leur apparition plutôt qu'avant. Il a reconnu qu'Alcatel avait bien eu conscience que la croissance du marché des télécommunications était trop extravagante pour durer. Il a souligné la différence fondamentale entre un marché comme celui du pétrole, où la capacité et la demande sont connues, et le marché des télécommunications, pour lequel la quantification des paramètres de marché est plus difficile et approximative. Il a ainsi estimé que, si l'accélération du marché avait paru excessive à Alcatel, nul n'avait été capable de mesurer l'ampleur de cet excès.
Rappelant notamment que début 2001, Alcatel se trouvait en situation de demander à ses grands clients de bien vouloir excuser ses retards de livraison, il a jugé que, dans un tel contexte, prendre des mesures de « freinage » -gel des embauches...- n'apparaissait pas nécessairement opportun, ni même possible. Il a insisté, de nouveau, sur la très grande brutalité du retournement du marché, brutalité qu'il n'avait jamais expérimentée dans les autres secteurs industriels -pétrole, chimie...- qu'il avait connus.
Concernant la stratégie d'Alcatel, M. Serge Tchuruk s'est dit convaincu que dans le contexte actuel d'une concurrence très vive, il devenait extrêmement difficile pour une entreprise d'exercer des métiers aussi diversifiés que les transports, l'énergie, la presse et les télécommunications. Relevant l'exception de General Electric, il a noté que de moins en moins d'entreprises conservaient aujourd'hui une stratégie de conglomérat. En outre, il a fait observer que tout ce qui ne relevait pas du secteur des télécommunications dans l'ancien groupe Alcatel-Alsthom n'était pas véritablement contrôlé par Alcatel, qui détenait seulement la moitié du capital GEC-Alsthom et environ le tiers de celui de Framatome. Enfin, il s'est dit fier de voir qu'Alcatel faisait figure de numéro un mondial dans son coeur de métier.
S'agissant du concept d'« entreprise sans production », M. Serge Tchuruk a rappelé qu'il regrettait que la presse lui ait fait dire, par une traduction littérale du terme anglais « fabless », qu'il envisageait de faire d'Alcatel « une entreprise sans usine ». Il a toutefois remarqué que le mouvement de miniaturisation conduisait à une diminution très rapide du poids de l'électronique rapporté à l'unité de chiffre d'affaires. Il a justifié les cessions d'usines auxquelles avait procédé Alcatel par les partenariats noués, à l'occasion de ces cessions, avec des industriels dont la fabrication est le véritable métier et dont le champ de débouchés, plus large que le marché des télécommunications, leur permet de lisser la charge. Il a, par ailleurs, souligné qu'Alcatel conservait le contrôle d'unités de fabrication dans les domaines stratégiques que constituent notamment l'optique et le satellite et que, comparativement à toutes les autres entreprises du secteur de l'équipement téléphonique, Alcatel avait externalisé ses activités beaucoup moins.
M. Jean-François Le Grand a souhaité revenir sur le concept d'« entreprise sans usine » au regard de la création récente d'Alcatel Shangaï Bell. Il a également souhaité connaître l'avenir que M. Serge Tchuruk promettait à l'ADSL alors que l'aménagement du territoire impliquait la nécessité de liaisons symétriques assurant le même débit en voie ascendante et descendante. Il a enfin demandé à M. Serge Tchuruk quels seraient les facteurs permettant la sortie de crise qu'il avait annoncée dans son exposé liminaire.
M. Daniel Raoul a fait part de ses doutes quant à la nécessité d'amener la fibre optique jusque chez les particuliers, estimant que le SDSL constituerait, sans doute, un progrès déjà considérable. Evoquant les diverses technologies d'Internet mobile -UMTS, BLR, WIFI- il s'est interrogé sur celle dont M. Serge Tchuruk jugeait qu'elle s'imposerait.
En réponse à M. Jean-François Le Grand, M. Serge Tchuruk a justifié l'implantation d'Alcatel en Chine par le potentiel exceptionnel du marché chinois des télécommunications. Assurant que la Chine serait, à l'avenir, le premier marché du monde, il a relevé que ce pays avait connu, dans un contexte général de crise des télécommunications, la croissance la plus nette dans ce secteur. Evoquant les joint-ventures auxquelles était partie Alcatel en partenariat, le plus souvent, avec l'Etat chinois, il s'est félicité d'avoir convaincu l'Etat chinois, au terme de deux ans de pourparlers, de pouvoir fusionner toutes ces participations au sein d'Alcatel Shangaï Bell. Tout en espérant pouvoir tirer profit de la croissance du marché chinois à travers ce nouveau pôle et, à terme, réaliser en Chine 15 % du chiffre d'affaires d'Alcatel, il a précisé que la production locale d'équipements téléphoniques reposerait sur des logiciels adaptés aux spécificités de ce marché et sur 3.000 à 3.500 ingénieurs en recherche et développement, soit 12 à 15 % des effectifs d'Alcatel affectés à cette activité.
Concernant l'ADSL, M. Serge Tchuruk, sans méconnaître le caractère asymétrique de cette liaison, a toutefois souligné qu'elle permettait, d'ores et déjà, d'utiliser les voies montantes et descendantes. Il a convenu que le caractère symétrique de la liaison autorisée par le SDSL constituait un progrès et qu'Alcatel avait déjà pu installer le SDSL pour diverses entreprises.
Revenant sur l'interrogation de M. Daniel Raoul relative à l'accès par fibre optique, M. Serge Tchuruk a reconnu que la généralisation d'un tel accès ne serait envisageable que d'ici 5 à 10 ans, et qu'en tout état de cause, Alcatel tirerait profit d'une utilisation générale et prolongée de l'ADSL.
Enumérant les facteurs de sortie de crise, M. Serge Tchuruk a cité les grandes chances de progrès que représentait, sur le réseau fixe, la large bande, aujourd'hui utilisée par seulement 4 % des internautes, mais quasiment nécessaire pour tous, et le potentiel ouvert par la possibilité d'accéder à la vidéo -notamment interactive- par le réseau téléphonique aussi bien que par les réseaux câblés.
Interrogé à ce sujet par M. Daniel Raoul sur les perspectives de la télévision numérique terrestre (TNT), M. Serge Tchuruk a convenu que la TNT représentait un moyen de diffusion puissant de la vidéo sur une voie, mais qu'elle n'offrait pas de voie de retour, ce qui impliquait de coupler le réseau téléphonique à la TNT.
Revenant sur les facteurs de sortie de crise, M. Serge Tchuruk a rappelé que le Global Packet Radio Service (GPRS) ne constituait pas une solution pérenne au transfert de données par la voie des airs et que l'UMTS représenterait vraiment l'avancée majeure en cette matière. Enfin, il a souligné qu'au sein même d'Alcatel, l'implantation et l'optimisation des divers usages d'Internet offraient un gisement inouï de productivité.
S'agissant de la question de M. Daniel Raoul sur les diverses technologies d'Internet mobile, il a jugé que l'UMTS était confronté à une difficulté économique consécutive au prix très élevé des licences octroyées, mais que son succès technique était avéré et son succès commercial, quasi certain. Par opposition, il a estimé que la boucle locale radio (BLR) était un succès technique, mais un échec commercial, en raison de la difficulté à décomposer le territoire en zones desservies par la BLR et qu'en conséquence, la BLR ne concurrencerait pas véritablement les réseaux fixes existants utilisant l'ADSL ou le SDSL. Quant au WLAN (wireless local area network), il a reconnu qu'il permettrait un débit très rapide, mais localisé dans certaines zones.
M. Philippe Leroy a souhaité savoir si Alcatel, une fois sortie de crise, accepterait d'être partenaire au sein de sociétés d'économie mixte locales afin d'accompagner les collectivités locales dans l'équipement de leur territoire et de partager les risques attenants.
A cette question, M. Serge Tchuruk a répondu qu'Alcatel détenait une véritable compétence pour conseiller les collectivités locales dans le choix d'un équipement efficace et adapté à leur contexte, et que le groupe était donc très enclin à accompagner ces collectivités, sous réserve de ne pas être conduit à faire de l'exploitation de service, ce qui reviendrait à concurrencer les opérateurs, clients d'Alcatel.
M. Jean-François Le Grand est revenu sur le manque crucial d'expertise dont souffraient les collectivités locales et s'est félicité de l'intérêt que semblait manifester Alcatel à leur égard.
M. Serge Tchuruk s'est félicité de ce que l'expertise d'Alcatel puisse permettre aux collectivités de faire les bons choix d'équipement de télécommunications.
M. Patrick Lassourd s'est interrogé sur la composition du capital d'Alcatel et sur les perspectives de sa consolidation. Il a également souhaité connaître l'appréciation de M. Serge Tchuruk sur la formation des jeunes ingénieurs spécialisés en logiciels. Il s'est inquiété de savoir, à cet égard, si M. Serge Tchuruk souscrivait à la rumeur selon laquelle la Grande-Bretagne damait le pion de la France en matière d'économie de services.
En réponse, M. Serge Tchuruk a précisé que le capital d'Alcatel était approximativement composé ainsi : environ 50 % d'intérêts français, 20 % d'intérêts américains, 20 % d'intérêts britanniques ou d'Europe continentale et le reste dispersé. Il a fait observer que le plus gros détenteur de capital au sein de l'actionnariat d'Alcatel était un fonds américain présent à hauteur de 4 % du capital. Il a précisé que les institutionnels français présents au capital ne l'étaient qu'à hauteur de 1 à 3 %. Enfin, il a relevé que les petits porteurs représentaient entre 1,5 et 2 % du capital et que leur fidélité à l'Assemblée générale du groupe, rapportée au faible poids relatif de leurs droits de vote cumulés, pouvait donner à cette dernière un caractère parfois surréaliste. Il a toutefois insisté sur l'importance de ce rituel annuel du point de vue de « l'affectio societatis ».
Concernant la stratégie boursière, M. Serge Tchuruk a rappelé que le cours de l'action d'Alcatel avait effectivement beaucoup baissé, mais que son comportement avait été meilleur que celui des concurrents.
Concernant l'économie de services, il a confirmé que l'Angleterre dépassait effectivement la France, notamment en matière de services financiers, dont le poids croissait dans l'économie moderne. Relevant la qualité mais aussi le coût des ingénieurs français, il a estimé que la France ne pouvait pas être compétitive dans le bas de gamme et qu'elle devait se positionner sur les créneaux à forte valeur ajoutée.
Revenant sur la question du capital, M. Patrick Lassourd a souligné que la structure actuelle de ce dernier ne laissait pas de part importante aux institutionnels. Toutefois, il a estimé que la perspective de sortie de crise annonçait des restructurations dans le secteur et s'est inquiété de savoir quels fonds Alcatel serait alors en mesure de solliciter.
En réponse, M. Serge Tchuruk, après avoir déploré l'absence d'une analyse financière consistante en France en matière de télécommunications et la perte de souveraineté nationale en résultant, a rappelé les circonstances de l'échec du mariage programmé entre Alcatel et Lucent. Précisant que ce projet de fusion avait été examiné à la demande de Lucent, il a expliqué le caractère infructueux de son issue par les différences de sensibilités et de mode de gouvernance opposant les deux groupes.
Nomination d'un rapporteur
La commission a ensuite nommé M. Jean-François Le Grand, rapporteur de la proposition de loi n° 287 (2000-2001) relative à l'implantation des éoliennes et à la protection de l'environnement.
Organisme extraparlementaire - Agence de prévention et de surveillance des risques miniers
Puis elle a examiné la question d'un remplacement d'un membre titulaire de l'Agence de prévention et de surveillance des risques miniers, M. Philippe Darniche, précédemment désigné, ayant renoncé à occuper ce poste. M. Gérard César, président, a indiqué que M. Jean-Louis Masson s'était déclaré candidat. S'est alors engagé un large débat portant notamment sur la question de savoir s'il était envisageable de désigner un sénateur n'étant pas membre de la commission, alors que cette hypothèse avait été antérieurement écartée par la commission et son Bureau.
M. Gérard César a précisé qu'il était annoncé que M. Jean-Louis Masson pourrait rejoindre prochainement la commission. Il a rappelé qu'il était, quant à lui, très réservé pour que des mandats soient confiés à des sénateurs ne rejoignant que pour une brève durée la commission. Il a ajouté qu'il demanderait à son Bureau de se prononcer sur cette question. Il a été décidé, en conséquence, de surseoir à la désignation discutée et de renvoyer la question au Bureau de la commission.
Enfin, M. Gérard Larcher, président, a fait part à la commission du courrier que M. Alain Gérard, rapporteur pour avis du budget de la pêche, avait adressé à M. Hervé Gaymard, ministre de l'agriculture, de l'alimentation, de la pêche et des affaires rurales, pour lui faire part des inquiétudes que lui inspirait le projet de réforme de la politique commune de la pêche.
Table des matières
Mardi 18 juin 2002
- Présidence de M. Gérard Larcher, président, puis de M. Gérard César, vice-président. -
Audition de M. Luc Guyau, président de l'Assemblée permanente des chambres d'agriculture
La commission a procédé, conjointement avec la Délégation à l'Union européenne, à l'audition de M. Luc Guyau, président de l'Assemblée permanente des chambres d'agriculture.
M. Gérard Larcher, président, a rappelé l'importance des travaux menés actuellement par la commission sur les questions agricoles, évoquant notamment :
- les trois missions d'information portant respectivement sur la politique agricole commune, sur l'avenir de l'élevage et sur les organismes génétiquement modifiés ;
- le groupe de réflexion sur la politique de l'eau et les deux groupes de travail, relatifs, d'une part, à l'avenir de la viticulture française, d'autre part à l'Organisation mondiale du commerce (OMC) ;
- la participation à une mission commune d'information sur la montagne.
M. Gérard Larcher, président, a souligné que la commission était d'autant plus désireuse de recueillir le point de vue de l'Assemblée permanente des chambres d'agriculture (APCA) que le contexte agricole était particulièrement difficile, en raison notamment de l'adoption, par les Etats-Unis, d'une nouvelle loi agricole (Farm Bill), du raidissement de certains de nos partenaires européens à l'égard de la réforme de la politique agricole commune (PAC) et du volet agricole de l'élargissement, ainsi que de la fragilisation de nombreux secteurs, comme l'aviculture et la filière bovine.
Après avoir rappelé les contours du réseau des chambres d'agriculture, M. Luc Guyau a détaillé le projet « CAP 2010 », adopté par l'APCA le 13 décembre 2001, qui vise à promouvoir une agriculture durable. Il a alors défini l'agriculture durable comme étant :
- une agriculture rentable, qui permette aux agriculteurs de vivre de leur métier ;
- une agriculture vivable, offrant des conditions de travail et de vie attractives pour les jeunes ;
- une agriculture fiable, qui réponde pleinement aux préoccupations de sécurité alimentaire des consommateurs ;
- une agriculture adaptable, intégrant les avancées scientifiques et technologiques ;
- une agriculture renouvelable, ce qui renvoie aussi bien à la prise en compte de l'environnement qu'à la nécessité d'assurer le remplacement des agriculteurs cessant leur activité ; il s'est inquiété, à cet égard, de la diminution continue du nombre des installations.
M. Luc Guyau a expliqué que, pour mener à bien ce projet, l'APCA s'était donné trois missions : communiquer à l'extérieur, mener un effort de prospective et participer à la diffusion et à la bonne acceptation de l'innovation. Il a toutefois considéré que cet objectif ne pourrait être atteint que si la France réaffirmait pleinement son attachement à l'agriculture comme activité productive et comme élément structurant pour l'aménagement du territoire.
Evoquant ensuite le contexte européen, M. Luc Guyau a fait part de son souhait de voir renaître un partenariat franco-allemand sur les questions agricoles. Il a également évoqué la possibilité de convergences, notamment avec l'Espagne ou, à moyen terme, avec la Pologne. Il a, en revanche, déploré les importantes difficultés rencontrées avec les partenaires britanniques, et exprimé son inquiétude à l'égard de la volonté de la Commission européenne de réformer profondément la PAC dès 2003.
M. Luc Guyau a confirmé l'importance des crises sectorielles qui touchent la filière bovine, la viticulture et, depuis peu, le secteur céréalier. Il s'est également montré préoccupé par les difficultés que rencontre l'aviculture française, confrontée à l'afflux massif de viande de volaille en provenance d'Amérique latine. Déplorant, à cet égard, un contournement de la législation commerciale internationale, il s'est étonné du peu de méfiance des consommateurs européens, par ailleurs très exigeants en matière de sécurité sanitaire des aliments, à l'égard de produits transformés n'offrant pas toutes les garanties de traçabilité. Il a estimé que toutes ces crises sectorielles plaidaient en faveur d'un renforcement des mécanismes de régulation de la PAC.
Revenant sur la réforme de la PAC, M. Luc Guyau s'est opposé à un financement du développement du deuxième pilier par une réduction du premier pilier. Il a estimé que l'élargissement ne devait pas servir de prétexte à une remise en cause de la PAC. Il s'est félicité, à cet égard, du projet de la Commission européenne prévoyant l'attribution aux nouveaux Etats membres d'aides directes, dont le principe apparaissait ainsi renforcé. Il a souhaité que l'Union européenne adopte une réponse ferme à l'égard du nouveau Farm Bill américain. Enfin, il s'est félicité de l'affirmation du concept de modèle agricole et alimentaire européen, fondé sur une relation particulière entre les hommes, leur alimentation et leur territoire.
S'agissant des rapports entre agriculture et environnement, M. Luc Guyau a rappelé que l'APCA était prête à participer à tout nouveau débat relatif à la politique de l'eau. Il a mis l'accent sur les difficultés financières posées par la mise aux normes des bâtiments d'élevage. En ce qui concerne l'application de la directive nitrate, il a regretté que la définition des zones d'excédent structurel ne tienne pas davantage compte des efforts déjà fournis par les agriculteurs. Enfin, il a évoqué le problème des boues d'épuration, déplorant le manque de transparence de leur traitement et la confusion du discours dont elles font l'objet.
M. Luc Guyau a ensuite insisté sur la nécessité de simplifier les formalités administratives imposées au monde agricole. Il a expliqué que, face à la complexité des dossiers, un nombre croissant d'agriculteurs étaient conduits à externaliser la gestion de leur exploitation, au risque de perdre leur indépendance et leur esprit d'entreprise. Enfin, il s'est inquiété de la pérennité de l'Association nationale pour le développement agricole (ANDA).
Enfin, M. Luc Guyau a conclu en rappelant que l'APCA était attachée aux contrats territoriaux d'exploitation (CTE), mais souhaitait qu'ils retrouvent leur vocation initiale, celle d'aider les agriculteurs à répondre aux demandes de la société envers l'agriculture. Il a déploré que les CTE se transforment en outils de gestion des crises.
M. Jean Bizet, président du groupe de travail sur l'OMC, a souhaité connaître le point de vue de l'APCA sur l'évolution des négociations agricoles à l'Organisation mondiale du commerce (OMC) après l'adoption, par les Etats-Unis, d'un nouveau Farm Bill et s'est inquiété du manque de pugnacité de l'Union européenne sur ce dossier. Il a regretté qu'aucun progrès n'ait été réalisé en matière de partage de la valeur ajoutée entre les producteurs agricoles et la grande distribution, déplorant notamment l'emprise des marques de distributeurs (MDD) sur les produits du terroir et l'absence d'efficacité de la commission d'examen des pratiques commerciales instaurée par la loi sur les nouvelles régulations économiques (NRE). Il a proposé la création d'un dispositif de crédit d'impôt, dans lequel l'impôt serait perçu en cas de pratiques abusives.
M. Marcel Deneux a confirmé les propos de M. Jean Bizet sur la grande distribution. Contestant l'importance des aides directes dans le revenu des agriculteurs européens, il a souhaité connaître le point de vue de l'APCA sur une éventuelle réévaluation des prix des produits agricoles sur le marché intérieur, qui permettrait de rémunérer les producteurs par le revenu de leur travail.
Mme Odette Herviaux est revenue sur la gravité de la crise de l'aviculture, évoquant notamment la situation de ce secteur dans le Morbihan. Elle a préconisé un fort durcissement de la réglementation européenne. Elle a ensuite fait valoir que la diversité régionale devait être prise en compte pour la répartition des crédits de la PAC entre les deux piliers, indiquant que certains territoires avaient besoin de soutiens plus importants à l'espace rural. Elle a estimé indispensable la redéfinition des relations entre producteurs et grande distribution. Enfin, elle a plaidé en faveur d'une définition plus précise du terme de « boues d'épuration », qui recouvrait aujourd'hui des réalités très différentes.
En réponse, M. Luc Guyau s'est interrogé sur la compatibilité du « Farm Bill » et des règles du commerce international édictées par l'OMC, demandant une fermeté de l'Europe sur ce dossier. Après avoir plaidé en faveur d'une réaffirmation de la préférence communautaire, il a mis en cause la stratégie d'abaissement des prix européens au niveau des prix mondiaux, estimant que ceux-ci étaient un leurre, comme l'a illustré l'évolution du marché mondial des céréales. Il s'est dit favorable à une augmentation des prix des produits agricoles sur le marché communautaire, indiquant qu'elle devrait résulter à la fois des mécanismes des organisations communes de marché et d'une maîtrise de la production. S'agissant des rapports avec la grande distribution, il a indiqué avoir remis récemment un rapport à la Fédération internationale des producteurs agricoles (FIPA) sur ce thème. Il a estimé que l'action syndicale était la seule arme des agriculteurs face à la grande distribution. Il s'est dit préoccupé par la concentration des enseignes, qui accroît la dépendance des producteurs. En ce qui concerne les importations de produits avicoles transformés, il a fait observer que les producteurs brésiliens n'étaient pas soumis aux mêmes contraintes que les producteurs européens.
M. Marcel Deneux s'est demandé comment fixer le niveau de la préférence communautaire.
M. Luc Guyau a répondu que ce niveau dépendait des produits concernés. Il a indiqué que la préférence communautaire ne devait pas être présentée comme une mesure protectionniste, faisant valoir que l'Europe était le premier importateur mondial de produits agroalimentaires.
M. Charles Revet s'est interrogé sur l'impact de l'élargissement sur le budget de la PAC, tout en estimant que l'attribution des aides directes aux nouveaux membres était légitime. Il a évoqué les conséquences de la répartition des aides sur l'orientation agricole des territoires, citant l'exemple de la Seine-Maritime, où le soutien au maïs avait entraîné une diminution des prairies et provoqué une érosion des sols. Il a préconisé la mise en place d'une gestion décentralisée des aides.
M. Jean Boyer a souhaité savoir quelles mesures concrètes pourraient être prises dans le domaine de la gestion de la PAC.
M. Gérard Bailly a fait part du mal-être ressenti par les agriculteurs, confirmant que cela constituait une difficulté importante pour le renouvellement des exploitants, et ce, alors même que la taille croissante des exploitations rend les reprises de plus en plus difficiles. Il a insisté sur l'utilité des aides à l'investissement et à la mécanisation. Enfin, tout en reconnaissant l'intérêt des CTE, il a regretté les formalités administratives excessives qui les accompagnaient.
M. Jean-Marc Pastor a souligné que l'agriculture ne pouvait être régulée par le seul marché et qu'elle avait besoin de soutien. Il a fait valoir que derrière les questions de production se profilaient de plus en plus des questions d'aménagement du territoire. Il a souligné l'inquiétude des petites exploitations à l'égard de la suppression de la modulation. Se déclarant très favorable à ce que les CTE interviennent dans leur champ de compétences originel, il a conclu son intervention par deux questions, l'une sur la situation actuelle de la crise bovine, l'autre sur la position de l'APCA à l'égard des OGM.
M. Jacques Oudin a jugé que la révision de la loi sur l'eau devait être l'occasion d'examiner plus largement les rapports entre l'agriculture et l'environnement. Il a plaidé en faveur d'une implication des agriculteurs dans les commissions locales de l'eau et les schémas d'aménagement et de gestion des eaux (SAGE).
M. Aymeri de Montesquiou s'est interrogé sur l'opportunité de mettre en place un système de double prix, destiné d'une part à l'exportation, d'autre part au marché intérieur, comme cela existe dans l'organisation commune de marché du sucre.
M. Gérard César, président, s'est préoccupé du devenir des stocks de farines animales.
M. Emmanuel Hamel a souhaité savoir quelles seraient les conséquences, pour l'agriculture française, d'une sortie du système communautaire.
M. Luc Guyau a répondu qu'il ne fallait pas oublier que l'agriculture française était le premier bénéficiaire de la PAC, même si cela n'est pas sans contreparties. Il a fait observer qu'une grande partie des exportations françaises étaient destinées aux marchés communautaires, concluant que l'agriculture française ne pouvait se passer de l'Europe.
En outre, il a constaté qu'il serait difficile de développer d'autres politiques européennes et de mener à bien l'élargissement à budget communautaire constant. Il a précisé que l'APCA était opposée au cofinancement de la PAC par les Etats membres dans la mesure où celui-ci est source d'inégalités.
M. Luc Guyau a précisé que l'APCA était attachée à l'existence d'un pilier « développement rural » dans la PAC. Mais il a relevé que le budget prévu à ce titre n'avait pas été entièrement consommé, faute d'une participation à due concurrence du budget national. Il a souhaité le développement d'une véritable politique de la montagne, distincte des mesures de soutien aux productions et de la politique environnementale. Il a nuancé l'idée d'une différence d'impact environnemental entre le maïs et l'herbe, ajoutant que cet impact dépendait plus de la qualité de la mise en culture que du type de culture.
Soulignant le caractère inéquitable du dispositif de modulation à la française, il s'est toutefois interrogé sur les conséquences de sa suppression, rappelant l'intérêt de l'APCA pour une modulation européenne obligatoire et plafonnée. Il a considéré qu'il ne fallait pas lier le dossier de la modulation à celui des CTE.
Evoquant la crise bovine, M. Luc Guyau a constaté qu'après un recentrage temporaire sur la viande de qualité, les consommateurs et la distribution se tournaient de nouveau sur la viande de vache de réforme à bas prix. En matière d'OGM, il a plaidé en faveur d'un étiquetage précis susceptible de garantir la liberté de choix des consommateurs, tout en estimant nécessaire une poursuite de la recherche.
Au sujet de la proposition d'instaurer un système de double prix, il a fait observer que les aides à l'exportation allaient déjà dans ce sens. Il a néanmoins considéré que la situation du secteur betteravier était particulière, du fait de l'existence de quotas, et ne pouvait donc être généralisée.
M. Jean Bizet a souhaité apporter des précisions sur le dossier du stockage des farines animales. Il a souligné le caractère très préoccupant de la situation, puisque seules 2.000 des 10.000 tonnes produites hebdomadairement étaient éliminées. Il a déploré l'insuffisante capacité d'élimination en France, alors que l'Allemagne est en mesure d'éliminer toute sa production de farines. Il a indiqué, qu'à ce rythme, les stocks ne pourraient être éliminés avant 2009, ce qui laissait présager une grave crise politique sur ce sujet.
En conclusion, M. Gérard César, président, a remercié M. Luc Guyau et les membres de la Délégation pour l'Union européenne pour leur participation.
Mercredi 19 juin 2002
- Présidence de M. Gérard Larcher, président. -
Audition de M. Henri Proglio, président du directoire de Vivendi Environnement
La commission, conjointement avec le groupe d'étude sur l'eau et le groupe d'étude sur les déchets, a procédé à l'audition de M. Henri Proglio, président du directoire de Vivendi Environnement.
Présentant le groupe Vivendi Environnement, M. Henri Proglio a rappelé qu'il s'agissait d'une entreprise héritière de la Compagnie générale des eaux, fondée en 1853, dont l'activité s'est développée autour des délégations de service public. Il a souligné qu'elle était une des premières entreprises du genre.
Il a précisé que ce concept ayant pour objectif de concilier efficacité économique et exigence de service public avait pu être développé en France, puis à l'international, et qu'il constituait la réponse la mieux adaptée à la problématique de la gestion des services publics locaux.
Les activités de Vivendi Environnement, a-t-il ajouté, recouvrent quatre grands secteurs, la gestion de l'eau, la gestion des déchets, les transports collectifs et l'énergie, et ces activités, ainsi que leur hiérarchisation, correspondent à celles définies par le Conseil des ministres de l'environnement de l'Union européenne en juin 2000. Ce dispositif permet ainsi d'optimiser un système de gestion de l'environnement.
M. Henri Proglio a ensuite décrit l'entreprise Vivendi Environnement, leader mondial sur ces métiers, présente dans plus de 100 pays, réalisant un chiffre d'affaires annuel de 30 milliards d'euros et employant environ 300.000 personnes, dont 100.000 en France. Elle réalise, a-t-il précisé, 70 % de son chiffre d'affaires avec les collectivités territoriales, par des délégations de service public, et les 30 % restants en fournissant des services aux entreprises industrielles.
Il a notamment relevé que 60 % de ce chiffre d'affaires était réalisé dans des pays étrangers -70 % de l'activité en Europe et 23 % en Amérique du Nord- d'où l'importance, pour le groupe, de son développement au niveau international.
Il a indiqué ainsi que la croissance de l'entreprise viendrait, au cours des prochaines années, des marchés européens et surtout des marchés en Amérique du nord, où les potentialités étaient importantes, évoquant à titre d'exemple le contrat de gestion de l'eau avec la ville d'Indianapolis.
Il a néanmoins considéré qu'à terme la croissance du groupe, dans les années 2005-2010, viendrait de la zone asiatique, et souligné que le développement des métiers de Vivendi Environnement était lié au mouvement de concentration des populations dans les zones urbaines, notamment dans les pays développés, et que cette concentration concernerait, à terme, les deux tiers de la population mondiale.
Il a tout d'abord mis en lumière le fait que l'eau -aussi bien la production que le traitement des eaux usées- constituait l'activité principale du groupe, contribuant pour 50 % au chiffre d'affaires, pour un montant annuel de 16 milliards d'euros, et que cela positionnait l'entreprise comme leader mondial de ce secteur.
Pour la gestion des déchets, il a relevé également que Vivendi Environnement était le premier opérateur mondial hors Etats-Unis et qu'elle était présente sur toute la gamme des services.
Il a ensuite évoqué les activités de Vivendi Environnement liées aux transports, en précisant que le groupe était le premier opérateur commercial européen de transports collectifs de personnes sans être propriétaire de ses infrastructures et qu'il assurait des prestations pour les grandes communautés urbaines françaises, ainsi que pour des collectivités publiques nationales régionales ou locales dans de nombreux pays, citant à titre d'exemple le métro de Stockholm.
Il a enfin exposé l'activité du groupe dans le domaine de l'énergie, en précisant que Vivendi Environnement proposait des prestations de service, mais n'assurait pas la production d'énergie. Il a rappelé -pour s'en féliciter- le partenariat exclusif qui lie le groupe avec EDF à travers l'ouverture du capital de sa filiale Dalkia en juillet 2000.
Il a indiqué, enfin, qu'une partie importante de l'activité du groupe s'exerçait pour le compte d'entreprises industrielles -comme les constructeurs automobiles ou des industries sidérurgiques- qui souhaitent externaliser leur service à l'environnement.
Il a précisé, en outre, que les perspectives de croissance dans cette activité étaient très favorables.
M. Henri Proglio a ensuite exposé les trois axes stratégiques du groupe avec, en premier lieu, l'action de Vivendi Environnement en matière de développement durable, dans une logique d'amélioration de la vie locale.
Il a ensuite souligné la priorité du groupe en matière de recherche et développement, en citant l'exemple de l'eau afin d'améliorer les techniques de dépollution, de traitement ou de traçabilité.
Relevant que cette exigence permanente d'amélioration technologique concernait de nombreuses activités de Vivendi Environnement comme la valorisation énergétique des déchets, l'utilisation de la cogénération, la lutte contre l'effet de serre ou le développement de la pile à combustible, il a indiqué que le groupe comptait renforcer les moyens en matière de recherche et développement à hauteur de 30 % par an afin de renforcer son avance technologique.
Enfin, il a précisé que le troisième axe stratégique de l'entreprise concernait la formation professionnelle des salariés et la valorisation des compétences, afin, notamment, d'assurer la fluidité sociale au sein de Vivendi Environnement. Evoquant le centre de formation interne, ouvert en 1994 à Cergy-Pontoise, il a souligné que ce centre assurait des formations diplômantes. Actuellement, a-t-il ajouté, 600 collaborateurs sont formés tous les ans, le taux de réussite au CAP approche les 97 %, 140 à 160 personnes préparent un diplôme universitaire et cette initiative a reçu un accueil favorable de la part du ministère de l'Education nationale. A terme, Vivendi Environnement souhaite développer ce système dans tous les pays européens où l'entreprise opère.
M. Henri Proglio a ensuite commenté les récents développements liés à l'actualité de Vivendi Environnement, après avoir indiqué que ce groupe était coté à la Bourse de Paris depuis juillet 2000 et à la Bourse de New-York depuis le 5 octobre 2001. Il a précisé que 63 % du capital de Vivendi Environnement étaient actuellement détenus par Vivendi Universal. Soulignant que la naissance de Vivendi Environnement était liée à la fusion entre Vivendi et Universal, et à la dissociation concomitante en deux entités du groupe, il a rappelé que la dette initiale de 17 milliards d'euros du groupe avait été réduite à 14 milliards grâce à une augmentation de capital.
Il a indiqué que les exigences liées au développement de Vivendi Universal et sa spécialisation dans les métiers de la communication l'avaient poussé à décider de réduire sa participation dans le capital de Vivendi Environnement de 63 % à 40 %. Dans le cadre de cette cession d'actifs, il a insisté sur le fait qu'il souhaitait assurer l'avenir du groupe en garantissant son identité et en évitant le transfert des centres de décision. Par ailleurs, il a noté que Vivendi Universal s'était engagé à conserver les 40 % restants du capital pendant une période de 18 mois.
Il a donc souligné que cette décision de Vivendi Universal obligeait Vivendi Environnement, d'une part à constituer un socle d'actionnaires stables d'ici à fin décembre 2002 afin de renforcer le capital, et, d'autre part, à procéder à une augmentation de capital, pour un volume de 1,5 milliard d'euros de titres sur les marchés et de 100 millions d'euros pour les salariés.
M. Ladislas Poniatowski a alors souligné la nécessité de rassurer les collectivités locales qui pourraient douter de la pérennité des contrats qui les lient à Vivendi Environnement compte tenu du contexte financier évoqué par le président de Vivendi Environnement. Il s'est ensuite inquiété de l'identité des « investisseurs institutionnels » susceptibles de s'impliquer dans le capital de Vivendi Environnement.
M. Dominique Braye, président du groupe d'étude sur la gestion des déchets, rappelant qu'il présidait une communauté d'agglomérations en relation contractuelle avec Vivendi Environnement dans plusieurs secteurs d'activité, s'est interrogé sur :
- les raisons du profond changement de stratégie du groupe Vivendi Universal ;
- l'identité des investisseurs susceptibles de souscrire à l'augmentation de capital du groupe Vivendi Environnement ;
- les capacités du groupe à réduire sa dette ;
- les assurances que Vivendi Environnement peut apporter aux collectivités locales s'agissant des provisions pour renouvellement des réseaux constitués par les filiales de Vivendi Environnement, au montant estimé à environ 3,7 milliards d'euros ;
- le risque de fragilisation pour l'ensemble du groupe résultant de l'expansion internationale poursuivie parfois à travers des réponses, qu'on pourrait qualifier de « généreuses », aux appels d'offre.
M. Dominique Braye a enfin déclaré que l'inquiétude exprimée par les collectivités locales n'était que le revers de la confiance investie dans un groupe qui a toujours su exercer ses responsabilités.
En réponse aux intervenants, M. Henri Proglio a remercié les orateurs pour leur témoignage de confiance à l'égard du groupe Vivendi Environnement. Il a insisté sur le fait que tous les engagements juridiques et moraux de son groupe vis-à-vis des collectivités locales seraient tenus, car il s'agissait de la responsabilité de l'entreprise, quelle que soit l'identité de ses actionnaires. A propos de la préoccupation portant sur les risques encourus par Vivendi Environnement et après avoir relevé que 20 % seulement des contrats avec les collectivités locales françaises seraient à renouveler d'ici à 2008, il a mis en avant les bonnes performances économiques de Vivendi Environnement en 2001 -+ 21 % pour le résultat d'exploitation et + 11 % pour le chiffre d'affaires- en dépit d'une conjoncture décevante.
M. Henri Proglio a ensuite déclaré que, dans le domaine des appels d'offres internationaux, les propositions de son groupe pour conquérir ou renouveler des marchés étaient tout à fait raisonnables. Il a relevé, à titre d'exemple, que Vivendi Environnement avait présenté une offre de valorisation de la Société des Eaux de Berlin inférieure de 25 % à celle de ses concurrents. S'agissant du contrat de Prague, a-t-il ajouté, ses conditions financières sont justifiées par sa durée, égale à vingt-cinq ans.
Après avoir rappelé que la dette initiale du groupe avait été ramenée à 14 milliards d'euros à la fin de l'année 2001, il a souligné que les agences de notation internationale continuent à considérer le groupe de façon très positive.
M. Charles Revet, après avoir insisté sur l'importance de Vivendi Environnement pour les collectivités locales, s'est interrogé sur la situation financière du groupe avant d'évoquer le partenariat de Vivendi Environnement avec Electricité de France, notamment sur les réseaux de cogénération, compte tenu des prix pratiqués.
M. Georges Gruillot, rappelant que certaines évolutions récentes semblaient remettre en cause l'inéluctabilité annoncée du phénomène de la concentration urbaine dans les différentes parties du monde, s'est interrogé sur les conséquences de ces évolutions pour Vivendi Environnement à l'horizon 2010 ou 2020.
M. Philippe Leroy, évoquant l'évolution de la sidérurgie française, s'est demandé si, à terme, le nécessaire développement de Vivendi Environnement sur les marchés asiatiques ou américains n'aurait pas pour conséquence une remise en cause de la qualité de service offerte jusqu'à présent par le groupe aux collectivités locales en France. Il a, en conséquence, interrogé le président de Vivendi Environnement sur les garanties qu'il pouvait apporter à cet égard.
Leur répondant, M. Henri Proglio a apporté les précisions suivantes :
- pour conserver une place de leader mondial dans les services de proximité, Vivendi Environnement est tenu de maintenir la qualité des services qu'il assure actuellement auprès des collectivités territoriales en France ;
- la stabilité des actionnaires de Vivendi Environnement sera d'autant mieux assurée que les performances de l'entreprise seront satisfaisantes ;
- Vivendi Environnement n'a aucune participation dans Vivendi Universal ;
- le rachat par EDF de l'énergie produite se fait à des conditions différentes selon qu'il s'agit de cogénération -pour laquelle des prix supérieurs au prix du marché sont actuellement pratiqués- ou d'incinération -pour laquelle l'électricité est cédée au prix du marché. En conséquence, a-t-il estimé, l'évolution des prix de vente d'électricité aux industriels du fait de l'ouverture du marché, ne devrait pas modifier la valeur de reprise de l'électricité produite à partir d'usines d'incinération ;
- afin d'anticiper sur les évolutions sociales et sociologiques à venir, un institut de réflexion prospective, l'Institut Vivendi Environnement, a été constitué fin 2001 et il est composé d'experts et de scientifiques d'envergure internationale.
M. Claude Saunier, après s'être félicité de la qualité des performances de Vivendi Environnement dans les services de proximité, a considéré que l'engagement de dix-huit mois de Vivendi Universal de conserver sa part de capital de Vivendi Environnement était dérisoire eu égard à la durée des contrats que l'opérateur avait signés avec les collectivités territoriales. Il a souhaité avoir des précisions sur l'affectation des provisions constituées pour assurer le renouvellement des réseaux et s'est déclaré extrêmement attentif à suivre les stratégies du groupe, notamment en ce qui concerne les futurs partenariats envisagés.
M. Jacques Oudin, président du groupe d'étude sur l'eau, s'est interrogé sur l'intérêt pour Vivendi Environnement de rechercher des partenariats avec d'autres opérateurs, notamment pour les marchés remportés à l'international et il a souligné l'avantage qu'il y aurait à ce que les multiples instituts de recherche et de prospective existants dans le domaine de l'eau, de la propreté et des transports coordonnent leurs programmes. Il a enfin souhaité connaître la position du président de Vivendi Environnement sur l'avenir de l'énergie éolienne.
M. Gérard Larcher, président, a considéré indispensable une réflexion politique sur les modalités à inventer pour dégager, en l'absence de fonds de pension, les moyens financiers nécessaires pour assurer un financement stable des entreprises françaises, dès lors que les investisseurs institutionnels ne semblent plus en mesure d'assurer ce rôle. Il s'est inquiété des risques de fragilisation pour la structure des entreprises françaises induits par ce phénomène.
Leur répondant, M. Henri Proglio a souligné que l'énergie éolienne était loin d'être une activité rentable et il s'est inquiété des effets d'un « phénomène de mode » qui conduisait à subventionner lourdement des projets dépourvus de rationalité économique. Il a réaffirmé que les engagements contractuels financiers et juridiques seraient tenus par Vivendi Environnement sans conséquences dommageables pour les collectivités locales et les usagers. Il a enfin fait valoir la réflexion, déjà engagée par les partenaires européens de la France, sur la recherche de moyens financiers stables et souligné l'urgence d'une réflexion nationale sur ce thème.
Mercredi 26 juin 2002
- Présidence de M. Gérard Larcher, président,puis de M. Gérard César, vice-président -
Nouvelles technologies - Audition de M. Serge Tchuruk, président directeur général d'Alcatel
La commission a tout d'abord procédé à l'audition de M. Serge Tchuruk, président directeur général d'Alcatel.
M. Serge Tchuruk, président directeur général d'Alcatel, a dressé un panorama du secteur des télécommunications, en rappelant que cette industrie se décomposait en deux segments, avec d'une part les opérateurs de réseau et d'autre part les équipementiers, comme Alcatel, dont la vocation est de développer et de fournir des infrastructures de télécommunications et des services aux opérateurs.
Il a souligné que le secteur des télécommunications constituait l'un des éléments les plus importants de l'industrie des nouvelles technologies et que la croissance économique des Etats-Unis et de l'Europe reposait pour moitié sur le développement de ce secteur depuis une dizaine d'années. Parmi les équipementiers, il a noté que les acteurs importants se situaient aux Etats-Unis, en Europe et en Asie.
Il a ensuite précisé qu'Alcatel regroupait 100.000 salariés au niveau mondial -contre 120.000 dix-huit mois auparavant-, dont 25 à 28 % en France, et que la société réalisait un chiffre d'affaires annuel de 20 à 25 milliards d'euros, la France concourant, dans ce total, pour un peu moins de 10%. En outre, il a relevé qu'environ 50 % du capital était détenu par des actionnaires français et que 40 % de l'activité d'Alcatel était réalisée en Europe, 20 % aux Etats-Unis.
Au sein des métiers d'Alcatel, il a rappelé que le développement de nouvelles technologies était une activité dominante et que l'entreprise consacrait 12 % de son chiffre d'affaires annuel en investissements en matière de recherche et de développement, activité employant 20.000 ingénieurs, dont 80 % spécialisés sur les logiciels. A ce sujet, il a attiré l'attention de la commission sur l'évolution des métiers d'Alcatel au cours des 7 dernières années, soulignant qu'aux activités industrielles, qui pesaient lourd dans la valeur ajoutée, s'étaient progressivement substituées des activités à caractère « immatériel ».
Par ailleurs, il a indiqué que le secteur des télécommunications avait connu une forte croissance au cours des trois dernières décennies, surtout pendant les années 1990, où l'entreprise avait connu une croissance de l'ordre de 15 % par an et notamment en 1999, année où la demande avait crû très fortement, et en 2000, où l'entreprise a connu une croissance interne de 42 %, soit l'équivalent de la valeur d'une ou deux entreprises du CAC 40.
Evoquant le retournement de conjoncture en 2001 et la crise profonde qu'avait entraînée la diminution des investissements des opérateurs de téléphonie -clients d'Alcatel-, il a précisé que le groupe avait alors perdu entre un tiers et 50 % de son chiffre d'affaires en quelques mois, suivant les différents opérateurs occidentaux.
Analysant les multiples raisons de la crise, il a d'abord invoqué la chute de la demande des clients d'Alcatel après la « surcroissance » des années précédentes liée à « l'effet internet ». En second lieu, il a noté que la stratégie d'ouverture sur les marchés étrangers adoptée par les opérateurs de télécommunication avait entraîné une forte croissance externe de ces opérateurs et une hausse de leurs investissements financiers. Enfin, il a déploré que l'évolution rapide des technologies ne permette pas à chaque nouvelle technique élaborée par les équipementiers d'atteindre son seuil de saturation. En outre, il a estimé que le catalyseur de ces évolutions avait été le prix élevé de vente des licences UMTS.
Jugeant que toutes ces raisons s'étaient conjuguées avec la crise sur les marchés financiers, il a fait observer que la réduction des liquidités disponibles sur ces marchés avait focalisé l'attention sur la dette des opérateurs, ce qui s'était traduit par une défiance à l'égard de ces entreprises.
Il a souligné que cette crise touchant le secteur des télécommunications était de nature différente selon les acteurs et que les opérateurs connaissaient plutôt une crise du bilan, leur chiffre d'affaires restant stable, et que les équipementiers connaissaient une crise plus grave, les obligeant à des restructurations massives pour éviter une amputation du fonds de commerce et pour s'adapter aux nouvelles conditions du marché.
Il a en outre attiré l'attention de la commission sur la nécessité de ne pas faire l'amalgame entre les problèmes d'Enron, liés à des manipulations comptables, et la crise des télécommunications.
Il a ensuite indiqué qu'Alcatel était devenue une société diversifiée au cours des dernières années, centrée essentiellement sur les télécommunications, atteignant la place de numéro un mondial aujourd'hui sur le marché des infrastructures de télécommunications et des services aux opérateurs. Il a notamment insisté sur le fait que l'entreprise offrait une large palette de technologies, comme l'internet à haut débit (Asymetric Digital Subscriber Line -ADSL), les fibres optiques, marchés sur lesquels Alcatel était en position de leader, ou les infrastructures de téléphonie mobile, la technique IP, marchés sur lesquels Alcatel renforce actuellement sa position.
Après avoir rappelé qu'Alcatel avait néanmoins connu des pertes importantes en 2001, de l'ordre de 5 milliards d'euros, du fait des coûts de restructurations et des réajustements des postes de bilan, il a relevé que ces pertes restaient modiques par rapport à d'autres concurrents.
Il a enfin déclaré que le marché sortirait de la crise dans la mesure où la demande pour les biens et services de télécommunications restait forte, ce qui garantissait un potentiel de croissance important.
A l'issue de cet exposé, M. Philippe Leroy s'est interrogé sur la profondeur de la crise du secteur des télécommunications et sur la capacité des opérateurs à sortir de cette crise. Il s'est notamment demandé si le développement de la technique des fibres optiques n'ouvrait pas la possibilité d'une voie de sortie de la crise pour les équipementiers.
M. Serge Tchuruk lui a répondu que les fibres optiques faisaient partie des techniques qui permettaient de convoyer des données à haut débit, mais qu'il ne serait envisageable d'amener la fibre optique jusqu'à l'utilisateur final que dans une dizaine d'années. Il a indiqué que l'ADSL constituait une bonne alternative à court terme, mais qu'à long terme, les collectivités ne prenaient pas de risques à se lancer dans la construction des réseaux de fibres optiques, cette technique ayant toutes les chances de se développer dans un avenir proche.
M. Daniel Reiner a fait part à M. Serge Tchuruk de deux préoccupations, l'une d'ordre stratégique, l'autre d'ordre social. D'une part, il s'est interrogé sur l'opportunité du recentrage effectué par Alcatel sur son coeur de métier -les télécommunications- et sur la prévisibilité du retournement début 2001 du marché des télécommunications, arrivé à saturation. D'autre part, il a souhaité connaître quels étaient les effets cumulatifs sur Alcatel du développement du concept « d'entreprise sans production » à l'heure des restructurations.
En réponse, M. Serge Tchuruk a d'abord fait valoir qu'il était souvent plus facile d'expliquer les événements après leur apparition plutôt qu'avant. Il a reconnu qu'Alcatel avait bien eu conscience que la croissance du marché des télécommunications était trop extravagante pour durer. Il a souligné la différence fondamentale entre un marché comme celui du pétrole, où la capacité et la demande sont connues, et le marché des télécommunications, pour lequel la quantification des paramètres de marché est plus difficile et approximative. Il a ainsi estimé que, si l'accélération du marché avait paru excessive à Alcatel, nul n'avait été capable de mesurer l'ampleur de cet excès.
Rappelant notamment que début 2001, Alcatel se trouvait en situation de demander à ses grands clients de bien vouloir excuser ses retards de livraison, il a jugé que, dans un tel contexte, prendre des mesures de « freinage » -gel des embauches...- n'apparaissait pas nécessairement opportun, ni même possible. Il a insisté, de nouveau, sur la très grande brutalité du retournement du marché, brutalité qu'il n'avait jamais expérimentée dans les autres secteurs industriels -pétrole, chimie...- qu'il avait connus.
Concernant la stratégie d'Alcatel, M. Serge Tchuruk s'est dit convaincu que dans le contexte actuel d'une concurrence très vive, il devenait extrêmement difficile pour une entreprise d'exercer des métiers aussi diversifiés que les transports, l'énergie, la presse et les télécommunications. Relevant l'exception de General Electric, il a noté que de moins en moins d'entreprises conservaient aujourd'hui une stratégie de conglomérat. En outre, il a fait observer que tout ce qui ne relevait pas du secteur des télécommunications dans l'ancien groupe Alcatel-Alsthom n'était pas véritablement contrôlé par Alcatel, qui détenait seulement la moitié du capital GEC-Alsthom et environ le tiers de celui de Framatome. Enfin, il s'est dit fier de voir qu'Alcatel faisait figure de numéro un mondial dans son coeur de métier.
S'agissant du concept d'« entreprise sans production », M. Serge Tchuruk a rappelé qu'il regrettait que la presse lui ait fait dire, par une traduction littérale du terme anglais « fabless », qu'il envisageait de faire d'Alcatel « une entreprise sans usine ». Il a toutefois remarqué que le mouvement de miniaturisation conduisait à une diminution très rapide du poids de l'électronique rapporté à l'unité de chiffre d'affaires. Il a justifié les cessions d'usines auxquelles avait procédé Alcatel par les partenariats noués, à l'occasion de ces cessions, avec des industriels dont la fabrication est le véritable métier et dont le champ de débouchés, plus large que le marché des télécommunications, leur permet de lisser la charge. Il a, par ailleurs, souligné qu'Alcatel conservait le contrôle d'unités de fabrication dans les domaines stratégiques que constituent notamment l'optique et le satellite et que, comparativement à toutes les autres entreprises du secteur de l'équipement téléphonique, Alcatel avait externalisé ses activités beaucoup moins.
M. Jean-François Le Grand a souhaité revenir sur le concept d'« entreprise sans usine » au regard de la création récente d'Alcatel Shangaï Bell. Il a également souhaité connaître l'avenir que M. Serge Tchuruk promettait à l'ADSL alors que l'aménagement du territoire impliquait la nécessité de liaisons symétriques assurant le même débit en voie ascendante et descendante. Il a enfin demandé à M. Serge Tchuruk quels seraient les facteurs permettant la sortie de crise qu'il avait annoncée dans son exposé liminaire.
M. Daniel Raoul a fait part de ses doutes quant à la nécessité d'amener la fibre optique jusque chez les particuliers, estimant que le SDSL constituerait, sans doute, un progrès déjà considérable. Evoquant les diverses technologies d'Internet mobile -UMTS, BLR, WIFI- il s'est interrogé sur celle dont M. Serge Tchuruk jugeait qu'elle s'imposerait.
En réponse à M. Jean-François Le Grand, M. Serge Tchuruk a justifié l'implantation d'Alcatel en Chine par le potentiel exceptionnel du marché chinois des télécommunications. Assurant que la Chine serait, à l'avenir, le premier marché du monde, il a relevé que ce pays avait connu, dans un contexte général de crise des télécommunications, la croissance la plus nette dans ce secteur. Evoquant les joint-ventures auxquelles était partie Alcatel en partenariat, le plus souvent, avec l'Etat chinois, il s'est félicité d'avoir convaincu l'Etat chinois, au terme de deux ans de pourparlers, de pouvoir fusionner toutes ces participations au sein d'Alcatel Shangaï Bell. Tout en espérant pouvoir tirer profit de la croissance du marché chinois à travers ce nouveau pôle et, à terme, réaliser en Chine 15 % du chiffre d'affaires d'Alcatel, il a précisé que la production locale d'équipements téléphoniques reposerait sur des logiciels adaptés aux spécificités de ce marché et sur 3.000 à 3.500 ingénieurs en recherche et développement, soit 12 à 15 % des effectifs d'Alcatel affectés à cette activité.
Concernant l'ADSL, M. Serge Tchuruk, sans méconnaître le caractère asymétrique de cette liaison, a toutefois souligné qu'elle permettait, d'ores et déjà, d'utiliser les voies montantes et descendantes. Il a convenu que le caractère symétrique de la liaison autorisée par le SDSL constituait un progrès et qu'Alcatel avait déjà pu installer le SDSL pour diverses entreprises.
Revenant sur l'interrogation de M. Daniel Raoul relative à l'accès par fibre optique, M. Serge Tchuruk a reconnu que la généralisation d'un tel accès ne serait envisageable que d'ici 5 à 10 ans, et qu'en tout état de cause, Alcatel tirerait profit d'une utilisation générale et prolongée de l'ADSL.
Enumérant les facteurs de sortie de crise, M. Serge Tchuruk a cité les grandes chances de progrès que représentait, sur le réseau fixe, la large bande, aujourd'hui utilisée par seulement 4 % des internautes, mais quasiment nécessaire pour tous, et le potentiel ouvert par la possibilité d'accéder à la vidéo -notamment interactive- par le réseau téléphonique aussi bien que par les réseaux câblés.
Interrogé à ce sujet par M. Daniel Raoul sur les perspectives de la télévision numérique terrestre (TNT), M. Serge Tchuruk a convenu que la TNT représentait un moyen de diffusion puissant de la vidéo sur une voie, mais qu'elle n'offrait pas de voie de retour, ce qui impliquait de coupler le réseau téléphonique à la TNT.
Revenant sur les facteurs de sortie de crise, M. Serge Tchuruk a rappelé que le Global Packet Radio Service (GPRS) ne constituait pas une solution pérenne au transfert de données par la voie des airs et que l'UMTS représenterait vraiment l'avancée majeure en cette matière. Enfin, il a souligné qu'au sein même d'Alcatel, l'implantation et l'optimisation des divers usages d'Internet offraient un gisement inouï de productivité.
S'agissant de la question de M. Daniel Raoul sur les diverses technologies d'Internet mobile, il a jugé que l'UMTS était confronté à une difficulté économique consécutive au prix très élevé des licences octroyées, mais que son succès technique était avéré et son succès commercial, quasi certain. Par opposition, il a estimé que la boucle locale radio (BLR) était un succès technique, mais un échec commercial, en raison de la difficulté à décomposer le territoire en zones desservies par la BLR et qu'en conséquence, la BLR ne concurrencerait pas véritablement les réseaux fixes existants utilisant l'ADSL ou le SDSL. Quant au WLAN (wireless local area network), il a reconnu qu'il permettrait un débit très rapide, mais localisé dans certaines zones.
M. Philippe Leroy a souhaité savoir si Alcatel, une fois sortie de crise, accepterait d'être partenaire au sein de sociétés d'économie mixte locales afin d'accompagner les collectivités locales dans l'équipement de leur territoire et de partager les risques attenants.
A cette question, M. Serge Tchuruk a répondu qu'Alcatel détenait une véritable compétence pour conseiller les collectivités locales dans le choix d'un équipement efficace et adapté à leur contexte, et que le groupe était donc très enclin à accompagner ces collectivités, sous réserve de ne pas être conduit à faire de l'exploitation de service, ce qui reviendrait à concurrencer les opérateurs, clients d'Alcatel.
M. Jean-François Le Grand est revenu sur le manque crucial d'expertise dont souffraient les collectivités locales et s'est félicité de l'intérêt que semblait manifester Alcatel à leur égard.
M. Serge Tchuruk s'est félicité de ce que l'expertise d'Alcatel puisse permettre aux collectivités de faire les bons choix d'équipement de télécommunications.
M. Patrick Lassourd s'est interrogé sur la composition du capital d'Alcatel et sur les perspectives de sa consolidation. Il a également souhaité connaître l'appréciation de M. Serge Tchuruk sur la formation des jeunes ingénieurs spécialisés en logiciels. Il s'est inquiété de savoir, à cet égard, si M. Serge Tchuruk souscrivait à la rumeur selon laquelle la Grande-Bretagne damait le pion de la France en matière d'économie de services.
En réponse, M. Serge Tchuruk a précisé que le capital d'Alcatel était approximativement composé ainsi : environ 50 % d'intérêts français, 20 % d'intérêts américains, 20 % d'intérêts britanniques ou d'Europe continentale et le reste dispersé. Il a fait observer que le plus gros détenteur de capital au sein de l'actionnariat d'Alcatel était un fonds américain présent à hauteur de 4 % du capital. Il a précisé que les institutionnels français présents au capital ne l'étaient qu'à hauteur de 1 à 3 %. Enfin, il a relevé que les petits porteurs représentaient entre 1,5 et 2 % du capital et que leur fidélité à l'Assemblée générale du groupe, rapportée au faible poids relatif de leurs droits de vote cumulés, pouvait donner à cette dernière un caractère parfois surréaliste. Il a toutefois insisté sur l'importance de ce rituel annuel du point de vue de « l'affectio societatis ».
Concernant la stratégie boursière, M. Serge Tchuruk a rappelé que le cours de l'action d'Alcatel avait effectivement beaucoup baissé, mais que son comportement avait été meilleur que celui des concurrents.
Concernant l'économie de services, il a confirmé que l'Angleterre dépassait effectivement la France, notamment en matière de services financiers, dont le poids croissait dans l'économie moderne. Relevant la qualité mais aussi le coût des ingénieurs français, il a estimé que la France ne pouvait pas être compétitive dans le bas de gamme et qu'elle devait se positionner sur les créneaux à forte valeur ajoutée.
Revenant sur la question du capital, M. Patrick Lassourd a souligné que la structure actuelle de ce dernier ne laissait pas de part importante aux institutionnels. Toutefois, il a estimé que la perspective de sortie de crise annonçait des restructurations dans le secteur et s'est inquiété de savoir quels fonds Alcatel serait alors en mesure de solliciter.
En réponse, M. Serge Tchuruk, après avoir déploré l'absence d'une analyse financière consistante en France en matière de télécommunications et la perte de souveraineté nationale en résultant, a rappelé les circonstances de l'échec du mariage programmé entre Alcatel et Lucent. Précisant que ce projet de fusion avait été examiné à la demande de Lucent, il a expliqué le caractère infructueux de son issue par les différences de sensibilités et de mode de gouvernance opposant les deux groupes.
Nomination d'un rapporteur
La commission a ensuite nommé M. Jean-François Le Grand, rapporteur de la proposition de loi n° 287 (2000-2001) relative à l'implantation des éoliennes et à la protection de l'environnement.
Organisme extraparlementaire - Agence de prévention et de surveillance des risques miniers
Puis elle a examiné la question d'un remplacement d'un membre titulaire de l'Agence de prévention et de surveillance des risques miniers, M. Philippe Darniche, précédemment désigné, ayant renoncé à occuper ce poste. M. Gérard César, président, a indiqué que M. Jean-Louis Masson s'était déclaré candidat. S'est alors engagé un large débat portant notamment sur la question de savoir s'il était envisageable de désigner un sénateur n'étant pas membre de la commission, alors que cette hypothèse avait été antérieurement écartée par la commission et son Bureau.
M. Gérard César a précisé qu'il était annoncé que M. Jean-Louis Masson pourrait rejoindre prochainement la commission. Il a rappelé qu'il était, quant à lui, très réservé pour que des mandats soient confiés à des sénateurs ne rejoignant que pour une brève durée la commission. Il a ajouté qu'il demanderait à son Bureau de se prononcer sur cette question. Il a été décidé, en conséquence, de surseoir à la désignation discutée et de renvoyer la question au Bureau de la commission.
Enfin, M. Gérard Larcher, président, a fait part à la commission du courrier que M. Alain Gérard, rapporteur pour avis du budget de la pêche, avait adressé à M. Hervé Gaymard, ministre de l'agriculture, de l'alimentation, de la pêche et des affaires rurales, pour lui faire part des inquiétudes que lui inspirait le projet de réforme de la politique commune de la pêche.