AFFAIRES ECONOMIQUES ET PLAN
Table des matières
Mercredi 15 décembre 1999
- Présidence de M. Jean François-Poncet, président. -
Audition de M. Pierre Daillant, président de l'Union nationale des fédérations départementales des chasseurs
La commission a procédé à l'audition de M. Pierre Daillant, président de l'Union nationale des fédérations départementales des chasseurs.
M. Pierre Daillant a évoqué les conclusions du rapport de M. François Patriat, député de la Côte d'Or, intitulé " Propositions pour une chasse apaisée et responsable ". S'agissant des modifications envisagées à la loi du 10 juillet 1964 dite " loi Verdeille ", il a rappelé que celle-ci s'appliquait dans 30 % des départements français et a convenu que sa mise en oeuvre n'avait pas toujours été bien comprise. Elle contraint, a-t-il ajouté, les propriétaires de parcelles d'une superficie inférieure à 20 hectares à faire apport de leurs terrains, et donc de leur droit de chasse, à une association communale de chasse agréée (ACCA), même s'ils sont opposés à l'exercice de la chasse.
M. Pierre Daillant a fait valoir que cette loi avait rempli son objectif, à savoir constituer des territoires de chasse d'une taille suffisante pour favoriser une meilleure gestion du gibier et mieux organiser la chasse. Il en a rappelé les effets très positifs sur le grand gibier qui, à l'époque, avait quasiment disparu de certains départements, notamment dans le sud de la France. Il a indiqué qu'à l'occasion des contentieux soulevés par les opposants à la chasse, l'ensemble des juridictions nationales avait considéré que la " loi Verdeille " était conforme à la Constitution, mais que dans son arrêt du 29 avril 1999, la Cour européenne des droits de l'homme avait jugé que, si la gestion de la faune était d'intérêt public, en l'espèce, les contraintes imposées par la loi " Verdeille " aux petits propriétaires portaient une atteinte excessive au droit de propriété et au principe de la liberté d'association, puisque les opposants à la chasse étaient de droit, en tant que propriétaires, adhérents d'une ACCA.
M. Pierre Daillant a considéré que cet arrêt allait remettre en cause nombre de réglementations en vigueur dans des Etats-membres comme l'Allemagne, l'Autriche ou encore le Luxembourg, imposant le regroupement des territoires pour l'exercice de la chasse. S'agissant de la France, il a jugé que les conflits resteraient limités, et il a considéré que les propositions de modification présentées par M. Henri Savoie, maître des requêtes au Conseil d'Etat, étaient acceptables et très proches de celles adoptées par le Sénat le 22 juin 1999 dans la proposition de loi n° 160, sous réserve de précisions concernant le regroupement des territoires et la superficie minimum des terrains en deçà de laquelle ce regroupement devait être obligatoire.
S'agissant de l'organisation de la chasse, M. Pierre Daillant s'est félicité de ce que le rapport renforce le rôle des fédérations départementales et il a fait valoir tout le travail accompli par ces structures de droit privé investies d'une mission de service public en matière de gestion des ressources cynégétiques et de formation des chasseurs. Il a souhaité que le futur projet de loi précise les missions de service public dévolues aux fédérations en matière de gestion de la faune, des dégâts de gibier et de formation.
Il a souligné le rôle très positif de l'Office national de la chasse, créé en 1974, tant en matière de recherche que comme intermédiaire entre l'Etat et les associations de chasseurs.
S'agissant de la garderie, il a rappelé que les fédérations de chasseurs s'étaient constituées pour mettre en commun les moyens nécessaires pour faire garder les territoires de chasse, et que l'ONC avait eu pour mission, en 1974, d'assurer une meilleure coordination des conditions d'emploi des gardes fédéraux. Evoquant les textes réglementaires qui avaient permis d'unifier le statut des gardes, M. Pierre Daillant en a déploré les conséquences en termes de gestion locale des besoins.
Il a déclaré que l'Union nationale des fédérations départementales des chasseurs, prenant acte de la volonté du ministre de l'aménagement du territoire et de l'environnement de donner le statut de fonctionnaires aux gardes de l'ONC, souhaitait reconstituer un corps d'agents de proximité chargés de faire respecter les orientations des fédérations départementales, qui pourraient être rejoints et encadrés par des gardes de l'ONC ayant souhaité entrer dans les structures des fédérations. L'Office conserverait, a-t-il ajouté, ses missions de garde d'environnement et de répression du grand braconnage. Il a reconnu que les problèmes du financement de ces agents n'étaient pas résolus, et qu'il fallait prendre en compte la diminution du nombre des chasseurs.
En ce qui concerne les dates d'ouverture et de fermeture de la chasse au gibier d'eau, il a rappelé que la directive n° 79/409/CEE du 2 avril 1979 sur la conservation des oiseaux sauvages autorisait la chasse de certaines espèces, en laissant aux Etats-membres le soin de prendre les mesures appropriées pour la protection des espèces migratrices pendant leur période de reproduction et dépendance, ainsi que pendant leur trajet de retour vers leur lieu de nidification. Soulignant la multiplication des contentieux depuis l'adoption de cette directive, il a évoqué la loi du 15 juillet 1994, qui adoptait des dates échelonnées de fermeture de la chasse en application des conclusions du comité Ornis. Il a regretté que la Cour de justice des communautés européennes, dans un arrêt rendu en 1994, rejette cette méthode en faisant application, à tort, du principe de confusion et du risque de dérangement pour le gibier, alors même que la directive de 1979 fait coexister plusieurs régimes plus ou moins protecteurs selon les espèces concernées.
Il a déploré, enfin, que la Commission européenne fasse désormais sienne cette interprétation restrictive et que le Conseil d'Etat, dans sa décision du 3 décembre 1999, en fasse application pour sanctionner le principe de dates d'ouverture de la chasse échelonnées et modulées selon les départements.
Il a considéré qu'une solution au niveau national, acceptée par la Commission européenne, devait être adoptée avant que la Cour de justice ne statue sur la procédure de recours en constatation de manquement engagée contre la France, décision qui pourrait intervenir fin 2000 ou début 2001.
Il a jugé que les propositions du rapport Patriat, à savoir ouverture de la chasse le 10 août et fermeture le 10 février, n'étaient pas totalement satisfaisantes, notamment sur le plan communautaire, et qu'il lui semblait possible de faire avancer les dates d'ouverture de la chasse pour le domaine public maritime et d'obtenir des dates de fermeture au 28 février pour certaines espèces migrant très tardivement.
Répondant à Mme Anne Heinis, qui l'interrogeait sur une déclaration de M. Francis Lamy, commissaire du Gouvernement en faveur d'une saison de chasse allant strictement du 1er septembre au 1er janvier, M. Pierre Daillant a reconnu que le Conseil d'Etat avait requis contre toutes les dates d'ouverture de la chasse antérieures au 26 août, mais il a jugé possible d'obtenir un accord de la Commission sur des dates modulées et échelonnées, justifiées par des données scientifiques fiables.
M. Ladislas Poniatowski a fait valoir qu'il fallait, au préalable, pour obtenir une modification de la directive -modification qui s'avérait indispensable-, adopter une loi qui transcrive cette directive en droit interne. Il a jugé que, compte tenu des décisions récentes du Conseil d'Etat, la future loi ne pouvait que reprendre les dispositions générales de la directive en matière d'ouverture et de fermeture de la période de chasse, laissant aux autorités administratives le soin de fixer des dates précises tenant compte des circonstances locales et des cas d'espèce. S'agissant de la garderie, il a considéré que la loi devait instituer un corps de gardes fédéraux, financé par les fédérations départementales, dont les membres seraient formés et assermentés au niveau national.
Lui répondant, M. Pierre Daillant s'est déclaré favorable à une garderie fédérale spécifique, tout en soulignant les incertitudes qui pesaient sur son financement ; il a considéré, par ailleurs, que la loi pouvait fixer des dates butoir pour les périodes de chasse, évoquant les multiples contentieux qui ne manqueraient pas d'être soulevés si le pouvoir de décision était laissé aux seules autorités administratives.
En réponse à M. Philippe François, sur l'opportunité d'intégrer le corps des gardes de l'ONC dans la gendarmerie, M. Pierre Daillant s'est interrogé sur la possibilité de parvenir à un tel dispositif, compte tenu de l'évolution de la garderie nationale.
M. Gérard César s'est inquiété de la prolifération prévisible des animaux nuisibles sur les terrains ayant été retirés du territoire de chasse d'une ACCA, ainsi que d'une interdiction éventuelle de la chasse le mercredi et le dimanche.
M. Pierre Daillant a considéré que, compte tenu de la superficie des terrains concernés par l'exercice du droit de non-chasse, le risque de prolifération des animaux nuisibles était faible, qu'en tout état de cause la responsabilité du propriétaire du terrain pourrait être engagée au moyen des dégâts de gibiers occasionnés à un tiers et que les battues administratives seraient toujours autorisées. Il a considéré qu'une interdiction de chasser le mercredi ou le dimanche instaurée au niveau national constituerait une atteinte excessive au droit de propriété et que les restrictions éventuelles à introduire, s'agissant des jours de chasse, relevaient des pouvoirs de police du maire et de la responsabilité des propriétaires.
Répondant à M. Jean François-Poncet, président, sur l'intérêt des propositions formulées dans le rapport de M. François Patriat, M. Pierre Daillant a considéré que ce dernier offrait une base de négociations qui pourrait être améliorée et enrichie par des amendements parlementaires.
Répondant à M. Daniel Percheron, qui l'interrogeait sur les risques d'un renforcement des positions les plus extrêmes, s'agissant de la défense de l'exercice du droit de chasse, M. Pierre Daillant s'est alarmé de la multiplication possible de comportements " hors la loi " et de troubles généralisés, qui ne pourraient que desservir, à terme, les partisans d'une chasse responsable.
Bureau - Modification de la composition
La commission a ensuite procédé à une modification dans la composition de son bureau. En effet, M. Jean-Pierre Raffarin, démissionnaire de son poste de vice-président, a été nommé secrétaire, et M. Jean-Paul Emorine, démissionnaire de son poste de secrétaire, a été nommé vice-président.
Résolutions européennes - Infrastructures ferroviaires - Fixation du délai-limite pour le dépôt des amendements
Enfin, en application de l'article 73 bis, alinéa 6 du Règlement, la commission a fixé au lundi 20 décembre 1999 à 12 heures le délai-limite pour le dépôt d'amendements sur les propositions de résolution n°s 389 (1998-1999) présentée par M. Hubert Haenel, et 411 (1998-1999) présentée par M. Pierre Lefèbvre et plusieurs de ses collègues, sur plusieurs propositions de directive du Conseil relatives aux infrastructures ferroviaires, développement des chemins de fer communautaires et licences des entreprises ferroviaires.