La ruralité,un atout pour demain à défendre ensemble



Palais du Luxembourg, 28 mai 2003

Guy PARAYRE Major Général de la Gendarmerie Nationale

Il semble normal que la gendarmerie ait quelque chose à dire sur la ruralité puisqu'elle a été vouée, par François I er , au rétablissement de la sécurité dans les campagnes car la justice, ordinaire à cette époque, peinait à y remettre de l'ordre. Bien que sa vocation ne soit pas que rurale, au contraire d'une idée reçue, la gendarmerie nationale vit, aujourd'hui encore, cette ruralité au quotidien.

Le premier facteur tient à l'espace rural lui-même, qui, de plus en plus, est devenu un objectif de la convoitise des malfaiteurs. Cet espace rural est devenu moins observé par ses habitants, parce qu'une partie des habitants l'ont abandonné et qu'il est devenu d'un coup, plus vaste et moins peuplé. Les campagnes sont également moins observées par les gendarmes puisqu'ils disposent de moins d'auxiliaires d'observation dans ce milieu. Ces espaces sont également plus accessibles aujourd'hui pour les malfaiteurs grâce aux voies de communication. Des Mongols, originaires de Mongolie extérieure, ont été arrêtés par exemple dans la Vienne dans le courant de l'année pour un trafic de lames de rasoir, papiers à cigarettes, produits d'hygiène féminine de base, et ce à une grande échelle. Cette liberté de circulation, qui est effective depuis un certain nombre d'années sur le plan pratique, mais aussi sur le plan juridique avec l'espace Schengen, les malfaiteurs savent l'utiliser.

Il y a également des raisons tenant à l'évolution de la délinquance, avec le phénomène des raids sur des objectifs moindres, mais plus ou moins surveillés dans un espace où un certain nombre de personnes, âgées notamment, sont plus vulnérables.

D'autres raisons tiennent à l'évolution de notre arme puisque, ces dernières années, notre personnel a eu l'aspiration d'évoluer comme l'ensemble de la société. Le gendarme veut vivre avec son temps et lorsqu'il a un peu de repos, il part, comme les autres, à l'extérieur de la circonscription. La gendarmerie a du également faire face à la formidable explosion de la délinquance dans le milieu urbain et péri-urbain, à une époque où la gendarmerie connaissait une déflation de ses effectifs.

Au total, l'insécurité dans le milieu rural, ces dernières années, a certes augmenté mais de façon relative. On peut comparer en faits objectifs le taux de délinquance de la moyenne nationale, qui est de l'ordre de 69 faits pour mille habitants, à celui, non pas de la ruralité, mais de l'ensemble de l'espace gendarmerie, qui n'est que de 42 faits. Et dans la ruralité elle-même, la gendarmerie contrôle à la fois des zones urbaines, périurbaines, et rurales.

Aujourd'hui, la gendarmerie se réorganise. Cette réorganisation, à l'intérieur d'un ensemble plus vaste qui est celui de tous les acteurs de la sécurité intérieure, sous la coordination du ministre de l'intérieur, se traduit, pour ce qui nous concerne, tout d'abord, par un passage d'une police de circonscription à une police de flux. Autrefois, la brigade locale maîtrisait l'insécurité sur sa circonscription grâce à sa connaissance des mauvais garçons locaux, à l'origine de méfaits commis sur la circonscription. Aujourd'hui, cette connaissance reste utile mais ne suffit plus. La gendarmerie doit donc s'organiser, au moins au niveau du département, c'est-à-dire autour d'un pivot qui est le commandement de groupement. Ce pivot, avec une organisation opérationnelle qui dispose d'un outil de commandement (centre opérationnel), situé au chef-lieu, et un réseau qui est organisé avec l'ensemble des brigades, des unités particulières et spécialisées que sont les pelotons de surveillance et d'intervention, que sont aussi les brigades de recherche, permet de coordonner l'ensemble de ces moyens. C'est une rénovation du maillage territorial, conformément aux engagements du Gouvernement, et grâce aux moyens prévus dans la loi d'orientation et de programmation de sécurité intérieure. Dans cinq ans, des renforts substantiels seront amenés sur l'ensemble de l'espace, notamment l'espace rural. La rénovation du maillage territorial vise à obtenir à la fois, premièrement, une plus grande cohérence entre les zones de police et les zones de gendarmerie, mais aussi une adaptation du dispositif de la gendarmerie qui se résume, pour ce qui la concerne, à quelques idées maîtresses : le principe d'une brigade territoriale par canton est maintenu. Il n'y a pas de souci de récupération d'effectif, mais uniquement le souci d'être plus efficace en regroupant un certain nombre de moyens car un trop faible effectif ne permet plus, aujourd'hui, de travailler.

Les communautés de brigades consistent à regrouper des forces qui existent. Il ne s'agit pas de les diminuer mais de les faire travailler ensemble C'est grâce à la mise en commun de ces compétences, que la gendarmerie peut être plus présente sur le terrain.

Sur la demande du ministre de l'intérieur, la gendarmerie insiste sur le dialogue du Gouvernement avec les élus. Nous devons vivifier ces contacts : les gendarmes ont un devoir d'information. Les élus doivent également aller vers eux pour apporter ensemble une plus grande sécurité à nos concitoyens. Dans le dispositif nouveau des conseils locaux de sécurité et de prévention de la délinquance, face à chacune des brigades de communautés que nous allons créer, il est souhaitable que les élus aient un conseil local qui regroupe un certain nombre de communes pour discuter avec ces brigades.

Page mise à jour le

Partager cette page