Allocution du Président du Sénat, M. Gérard Larcher, à l’occasion du lancement à Paris de la Présidence polonaise de l’Union européenne le 28 janvier 2025, aux Invalides
Seul le prononcé fait foi.
Madame le Maréchal, Présidente du Sénat polonais,
Mon Général, que je remercie vivement de l’accueil qui nous est réservé,
Monsieur le Vice-ministre polonais de la Défense nationale,
Monsieur l’Ambassadeur de Pologne en France,
Mesdames et Messieurs les Ambassadeurs,
Messieurs les Officiers généraux,
Chers collègues Sénateurs polonais, mers chers collègues sénateurs – permettez-moi de saluer en particulier, le Vice-président du Sénat, M. Loïc Hervé, le Président de la Commission des Affaires européennes, M. Jean-François Rapin, la Présidente du groupe d’amitié France-Pologne, Mme Valérie Boyer, et le Vice-Président de la Commission des Affaires étrangères, de la défense et des forces armées, M. Philippe Paul
Mesdames et Messieurs,
Je vous suis très reconnaissant, Madame la Présidente du Sénat, de m’avoir invité à prendre la parole au cours de cette cérémonie de lancement, à Paris, de la présidence polonaise de l’Union européenne.
Et d’avoir choisi ce lieu riche d’histoire, à deux pas du tombeau de Napoléon, Napoléon qui évoque des heures glorieuses de la relation entre la Pologne et la France, et dont le nom figure dans votre hymne national.
Où mieux qu’en ces lieux sentir le souffle épique de ces relations, celui de la Pologne renaissante avec la création, en 1807, du Duché de Varsovie ? La mémoire de ce Duché, à l’existence pourtant brève, et de la Pologne souveraine devait entretenir l’espérance jusqu’en 1918, pendant la longue nuit de 123 années dans laquelle furent plongés les Polonais.
Nous venons d’admirer, avec la Présidente du Sénat, des souvenirs émouvants du Général de Gaulle qui, simple capitaine, effectua entre 1919 et 1921 deux séjours en Pologne : il contribua à la mise sur pied d’une armée polonaise plus forte, conscient que les menaces pesant sur votre pays demeuraient bien présentes.
Alors que la Pologne était à nouveau meurtrie et sous la domination de l’Union soviétique, le Général de Gaulle, de retour à Varsovie en septembre 1967, déclarait devant un demi-million de vos compatriotes - je cite :
« Polonais, Français, nous nous ressemblons tant et tant ! …. De siècle en siècle, il n’arriva jamais que nos deux peuples se soient combattus. Au contraire, le succès ou le malheur de l’un ont toujours été liés au succès ou au malheur de l’autre. »
Et d’ajouter : « Ce que je voudrais que vous sentiez, c’est que la France a toujours voulu la Pologne ; les autres puissances ne l’ont pas toujours voulue ». Fin de citation.
Mesdames et Messieurs,
Le Général de Gaulle, une fois de plus, avait tout dit. La Pologne est, avec l’Irlande, la seule Nation européenne contre laquelle la France, volontiers batailleuse au fil des siècles - on craignait la « furia francese », n’a jamais combattu.
Et que de ressemblances entre nos deux peuples ! Des esprits volontiers échauffés par les idées, souvent divisés entre eux, comme les diètes polonaises de l’ancien temps où les majorités peinaient à s’exprimer, mais toujours unis dans l’adversité ! Le goût pour l’héroïsme, le combat du faible au fort, avec la conviction chevillée au corps que les idées l’emporteront sur la force, surtout lorsqu’il s’agit de défendre son pays !
Combien de souveraines et de souverains nos deux pays ont-ils partagés ! Combien de talents sont-ils nés du croisement de l’âme polonaise et de l’esprit français : je pense en cet instant à Marie Curie, dont nous venons de commémorer le 90e anniversaire de la disparition.
Sans la Grande émigration polonaise, le romantisme aurait-il connu l’élan qui fut le sien en France, lorsque nationalisme et patriotisme ne faisaient qu’un ? Le cœur de la Pologne dépecée battait alors, aussi, à Paris, au rythme des Mazurkas et de la Grande polonaise que Chopin composa, au nom de votre lutte pour la liberté.
La liberté que nos deux pays chérissent ensemble, sans limite !
Mesdames et Messieurs,
La France et la Pologne sont jumelles. Leurs destins sont croisés.
2025, nous l’espérons, en portera le signe renouvelé, grâce à un traité bilatéral, le Traité de Nancy, au nom tout indiqué. Nous appelons à la conclusion des négociations en vue d’un traité ambitieux, en particulier sur les questions de défense et de sécurité, afin que nos deux pays hissent leur partenariat au niveau de leur histoire et au rang le plus élevé.
Si 2025 s’annonce comme une année franco-polonaise, elle sera pour l’Europe aussi un « moment » polonais. La Pologne, si longtemps meurtrie par les rivalités entre puissances sur le continent européen, sait que l’Union européenne est pour elle une chance, comme la Pologne, je ne crains pas de l’affirmer, est une chance pour l’Europe.
Avec sa Présidence du Conseil de l’Union, après quelques années où les relations étaient plus délicates, la Pologne reprend toute sa place dans l’Union européenne. Nous l’attendions !
Nous devons à ce titre reconnaître que votre pays, Madame la Présidente, a souvent montré la voie en Europe. Pionnier, dans les années 1980, pour secouer le joug du communisme et l’emprise soviétique, tel fut le combat de Solidarność qui, dans nul autre pays que la France, n’a suscité autant d’échos.
Lucide aussi, votre compréhension des périls, alors que peu partageaient vos préoccupations : la Pologne a eu raison avant bien d’autres, en percevant la menace que la Russie faisait peser sur l’Ukraine et la sécurité collective de l’ensemble de l’Union européenne. Vous nous avez ouvert les yeux.
Les autorités polonaises ont choisi de placer votre présidence de l’Union européenne, la 2nde de votre histoire, sous le signe de la sécurité : sécurité de l’Union européenne, contrôle des mouvements migratoires, sécurité alimentaire, énergétique, économique, tous objectifs que nous partageons et qui devraient peut-être davantage, dans certains cas, nous inspirer.
Car, à travers la sécurité, c’est la souveraineté de l’Union européenne qui est en jeu.
Je forme le vœu que votre Présidence porte la concrétisation de la sécurité et de la souveraineté européennes aussi loin que possible, en ces moments cruciaux pour notre avenir, où l’union de notre Union est plus que jamais indispensable !
Nous faisons confiance à la Pologne pour y parvenir !
Vive la Pologne et vive la France ! Vive l’amitié entre la Pologne et la France ! Vive l’Union européenne !