Discours de M. le Président du Sénat
Congrès des pouvoirs locaux et régionaux du Conseil de l’Europe
Sénat - Jeudi 11 février 2016
Monsieur le Président,
Mesdames, Messieurs les élus,
Mesdames, Messieurs,
Je suis très heureux de vous accueillir au Sénat, dans ces salons de Boffrand. Je tiens à saluer tout particulièrement, mon collègue, le sénateur, Jean-Claude Frécon, qui préside le Congrès des pouvoirs locaux et régionaux du Conseil de l'Europe, depuis le 14 octobre 2014, je tiens à le féliciter pour son engagement à vos côtés.
Votre assemblée, qui regroupe 648 élus, qu’ils soient présidents de région, maires, conseillers régionaux et municipaux, représente plus de 200 000 collectivités territoriales de 47 pays européens, elle a vocation à unifier cette Europe qui va de l’Atlantique à l’Oural, comme disait le Général de Gaulle et même au-delà.
Cette union à l’échelle de notre continent ne verra le jour que si elle repose sur un réseau territorial solide tissé entre nos régions et nos communes, encourageant les processus de décentralisation ainsi que la coopération transfrontalière. C’est pourquoi le Sénat, qui est le représentant des collectivités territoriales françaises, comme le veut notre Constitution, est heureux de vous recevoir ce soir : Cette Maison est la vôtre !
Comme vous le savez, Paris, a été frappée en janvier et en novembre 2015 par une série d’attentats terroristes d’une barbarie inouïe, revendiqués par l’Etat islamique. Au cours des dernières années, des attentats ont aussi endeuillé nombre de vos pays. Nos collègues des États qui ont été touchés par les attentats savent de quoi je parle.
Je sais combien ce sujet vous tient à cœur et je me félicite que, dès le 25 mars 2015, votre assemblée ait organisé un débat sur “les villes contre le terrorisme” et ait évalué les menaces intérieures et extérieures qui pèsent sur nos villes.
Les élus que vous êtes, représentant des millions d’élus locaux et ayant une connaissance de leur territoire, sont les mieux à même de prévenir les dérives de radicalisation.
Dans cet esprit, je me réjouis que les élus locaux et régionaux échangent sur ce thème à Rotterdam en 2016 lors du Sommet européen des maires et créent une Alliance des villes européennes face à l’extrémisme. J’en profite pour saluer le courage du maire de Rotterdam, Ahmed Aboutaleb qui est au cœur de ce combat.
Alors que la cohésion de nos sociétés est remise en cause, nous devons avoir à cœur de concilier le respect des libertés fondamentales d’une part, et les exigences de sécurité d’autre part, c’est ce à quoi le Sénat français veille aujourd’hui et je sais combien les droits de l’Homme demeurent au cœur de vos préoccupations.
Le projet européen, auquel nous sommes attachés, est menacé par la montée des communautarismes. Or, l’enrichissement de nos sociétés par la diversité des origines, des parcours, ou des confessions, ne peut avoir pour conséquence une remise en cause des règles communes, qui sont la garantie de notre liberté. Dans un tel contexte, le Conseil de l’Europe et l’Union européenne souhaitent placer le dialogue entre tous les citoyens, quelles que soient leurs origines, au centre des débats. Je sais que cet aspect du problème fera l’objet de discussions lors de votre session du 22 mars prochain à Strasbourg consacrées à la stratégie du Congrès pour combattre la radicalisation dans les villes et les régions et à la création d’une « boite à outils » pédagogique à l’usage des élus.
Vos débats sur la migration et l’intégration des réfugiés font écho à ceux que nous avons eus nous-mêmes dans notre pays et sont au cœur de l’actualité. Nos collectivités territoriales sont en première ligne dans la gestion de la crise migratoire et l’accueil des réfugiés et je crains que cette crise ne soit pas apaisée.
Mais les États-membres doivent aujourd’hui travailler à un rétablissement rapide des contrôles effectifs aux frontières extérieures de notre Union européenne, si nous souhaitons préserver cet espace de libre circulation.
Ces épreuves doivent être pour nous l’occasion d’évaluer votre coopération, en vue de la renforcer et de l’approfondir en favorisant la démocratie locale.
C’est ce que vous avez entrepris avec l’observation des élections locales ou régionales en Moldavie, en Albanie et en Ukraine. Vous avez aussi organisé à Bruxelles, des tables rondes sur la situation de la démocratie locale en Azerbaïdjan, en Ukraine et en Arménie, sur la base du travail de monitoring de la Charte européenne de l’autonomie locale effectué par le Congrès.
Parmi ces pays, l’Ukraine représente à l’évidence un enjeu fondamental et le Sénat français a pris des initiatives pour faciliter la mise en œuvre de la décentralisation prévue par les accords de Minsk. Je sais combien le Conseil de l’Europe et votre Congrès sont fortement impliqués dans les réformes en cours.
En complément de son travail de suivi de la démocratie locale et régionale, je salue l’initiative de votre Congrès qui a élaboré avec les gouvernements des pays concernés une « feuille de route » en vue de la poursuite des réformes dans le respect de la Charte européenne de l’autonomie locale.
Ce travail d’évaluation et d’observation d’élections est complété, depuis quelques années par des activités de coopération qui visent à accompagner concrètement les réformes et à former les élus locaux. De tels programmes de coopération sont mis en œuvre en Albanie, en Arménie et en Ukraine.
Je pense aussi à nos collectivités qui sont frappées dans un grand nombre de nos pays par la crise économique et le chômage.
Cette crise touche le tissu social des collectivités dans leur fondement et exacerbe les tensions. De véritables fractures territoriales ont vu ainsi le jour sur notre continent et affectent la confiance que les citoyens ont dans les élus que nous sommes.
Je sais que, lors de votre réunion de demain à la Mutualité, vous serez amenés à analyser les résultats des élections régionales qui se sont déroulées en France, en décembre dernier, et vous verrez combien ces fractures qu’elles soient territoriales, ethniques et religieuses ont joué un rôle dans le vote populiste.
Dans ce contexte, les régions doivent veiller à la cohésion de nos territoires et assumer leur rôle de soutien des économies locales. Nos régions, de plus en plus, ont des responsabilités de gestion des fonds publics et d’investissement dans l’avenir. En réponse aux défis multiples de la crise économique, je sais combien le Congrès soutient les initiatives favorisant la bonne gouvernance et appuie la gestion transparente des biens publics.
Après ces quelques mots, je vais maintenant passer la parole à votre Président, Jean-Claude Frécon.
Je vous remercie encore une fois d’avoir honoré le Sénat de votre présence et je souhaite à tous les membres de la Commission de suivi du Congrès des discussions aussi fructueuses que possible demain à la Mutualité.
Merci à tous.