COM(2023) 692 FINAL  du 08/11/2023

Contrôle de subsidiarité (article 88-6 de la Constitution)


Ø Proposition de règlement du Parlement européen et du Conseil établissant une facilité pour les réformes et la croissance en faveur des Balkans occidentaux COM (2023) 692 final

1. Panorama introductif

Le contexte géopolitique consécutif à la guerre en Ukraine et au conflit au Proche-Orient renforce l'importance du caractère stratégique du partenariat de l'Union européenne (UE) avec la région des Balkans occidentaux.

La perspective européenne des pays qui la composent (Albanie, Monténégro, Macédoine du Nord, Serbie, Bosnie-Herzégovine, et depuis 2008 le Kosovo) fut reconnue dès le sommet de Thessalonique des 19 et 20 juin 2003. Alors que la Slovénie a rejoint l'UE dès 2004 et la Croatie en 2013, cette promesse européenne a tardé à se concrétiser pour les autres pays de la région.

Or par sa position géographique et son histoire, cette zone constitue un lieu privilégié d'influence de puissances extérieures et de menaces de déstabilisation, accentuées par les conséquences de l'agression russe en Ukraine.

C'est pourquoi le sommet UE-Balkans occidentaux du 13 décembre dernier a réaffirmé clairement que « l'avenir des Balkans occidentaux est au sein de notre Union »1(*).

Puis le Conseil européen des 14 et 15 décembre a accordé une attention particulière à la région, en « réaffirmant son attachement total et sans équivoque à la perspective de l'adhésion des Balkans occidentaux à l'UE » et en restant « attaché à poursuivre l'intégration graduelle entre l'Union européenne et la région au cours du processus d'élargissement même, de manière réversible et fondée sur les mérites ».

Il a aussi décidé d'ouvrir des négociations d'adhésion avec la Bosnie-Herzégovine, « une fois que le degré nécessaire de conformité avec les critères d'adhésion sera atteint » ; et d'achever la phase d'ouverture des négociations d'adhésion avec la Macédoine du Nord « dès que ce pays aura mis en oeuvre son engagement de réaliser les modifications constitutionnelles visées dans les conclusions du Conseil du 18 juillet 2022 ».

Il a enfin pris « note de la communication de la Commission relative à un nouveau plan de croissance pour les Balkans occidentaux, qui vise à accélérer la convergence socio-économique entre les Balkans occidentaux et l'Union européenne, sur la base de conditions strictes », et encouragé « la région à accroître le rythme des réformes liées à l'UE et à faire progresser l'intégration économique régionale par l'intermédiaire du marché commun régional, sur la base des règles et normes de l'UE ».2(*)

C'est ce plan de croissance et d'investissement qui fait l'objet de la présente proposition de règlement, présentée à notre commission dès le 6 novembre 2023, au lendemain de l'adoption du Paquet élargissement, par le Commissaire européen en charge de l'élargissement et de la politique de voisinage, M. Olivér Várhelyi.

2. Le contenu de la proposition législative de la Commission

Selon les mots mêmes du Commissaire européen lors de son audition précitée3(*), « l'objectif de ce plan est de stimuler l'économie des Balkans occidentaux au cours des prochaines années afin de combler le fossé socio-économique existant entre l'Union et ses partenaires d'ici la fin de cette décennie. »

Ce plan repose sur quatre piliers.

Premièrement, il tend à intégrer progressivement les Balkans occidentaux dans le marché unique de l'Union européenne, avant même leur adhésion pleine et entière à l'Union européenne.

Deuxièmement, il vise à stimuler de l'intérieur l'économie dans la région des Balkans occidentaux, par l'intermédiaire du marché régional commun fondé sur les normes et les règles de l'Union européenne.

Troisièmement, le plan de croissance aidera les pays des Balkans occidentaux à accélérer les réformes fondamentales, y compris celles relatives à l'État de droit et à la démocratie. Ces réformes sont nécessaires au déploiement rapide du plan de croissance lui-même, afin d'attirer les investissements privés, de favoriser une croissance économique durable et de réduire la pollution.

Enfin, ce plan augmente l'assistance financière en soutien aux réformes au moyen d'un mécanisme pour la réforme et la croissance des Balkans occidentaux.

Le texte proposé comporte 55 considérants et 29 articles, répartis en cinq chapitres.

Il articule une enveloppe de 6 milliards d'euros qui comprend 2 milliards d'euros de soutien non remboursable - il s'agit donc de subventions - et de 4 milliards d'euros sous forme de prêts favorables. L'ajout de mécanismes pour l'aide à la croissance relevant de l'instrument d'aide de préadhésion dit « IAP III » offrira aux Balkans occidentaux un niveau d'aide par habitant à peu près identique à celui de la politique de cohésion dans l'Union européenne.

Le «soutien non remboursable» sera financé par des ressources supplémentaires au titre de la rubrique 6 du cadre financier pluriannuel (CFP) dans le cadre de la révision à mi-parcours du CFP. En conséquence, la proposition de modification du règlement fixant le cadre financier pluriannuel prévoit la mise à disposition de ce montant supplémentaire de 2 milliards d'euros au titre de la rubrique 6 pour l'assistance aux Balkans occidentaux.

Les investissements ciblés par ce plan seront réalisés par l'intermédiaire du cadre d'investissement en faveur des Balkans occidentaux (CIBO) et concerneront les secteurs de multiplicateurs de croissance : la connectivité, y compris les transports, l'énergie, les transitions écologique et numérique, l'éducation et le développement des compétences. Les projets ou programmes connexes seront mis en oeuvre en coopération avec les institutions financières internationales et les banques de développement des États membres de l'UE et attireront des investissements supplémentaires de celles-ci et du secteur privé.

Le fait que les fonds destinés aux investissements en capital transiteront par le CIBO apportera des garanties supplémentaires contre les risques fiduciaires, étant donné que le CIBO dispose de systèmes de contrôle financier bien établis reposant sur les normes de contrôle des institutions financières chargées de la mise en oeuvre.

Le CIBO constitue un cadre unique de coopération entre la Commission européenne, les bailleurs de fonds bilatéraux des États membres et les institutions financières. Tous les investissements seront fondés sur les principes consistant à «ne pas nuire» et à «ne laisser personne pour compte» et ils contribueront à l'objectif plus large consistant à faciliter la transition de la région vers une économie verte, neutre pour le climat, résiliente au changement climatique, numérique et inclusive, alignée sur les règles et les normes de l'UE.

Si les deux mécanismes susmentionnés absorberont la majeure partie des fonds, un montant mineur du budget de l'instrument (correspondant à 1,5 %) sera réservé à l'assistance technique et administrative liée à la mise en oeuvre de la facilité, dont les actions préparatoires et les activités de suivi, de contrôle, d'audit et d'évaluation.

Les fonds seront débloqués dès la mise en oeuvre des programmes de réforme que les pays des Balkans occidentaux devraient élaborer selon les recommandations de la Commission européenne. Ces programmes devront faire l'objet d'un accord avec l'UE et être mis en oeuvre au cours de la période de 2024 à 2027. Ils devront porter sur les réformes socio-économiques fondamentales.

Il pourra être procédé au décaissement des fonds dans un délai de 12 mois suivant la date limite initiale fixée dans le programme de réformes, pour autant que les conditions relatives au paiement auront été remplies. Ce délai devrait être porté à 24 mois au cours de la première année de mise en oeuvre. À défaut, le montant correspondant pourra être déduit de l'enveloppe du bénéficiaire et redistribué entre les autres bénéficiaires au cours des années suivantes.

Pour les fonds destinés aux budgets nationaux, un système d'audit et de contrôle à plusieurs niveaux est proposé: premièrement, si nécessaire, la réforme des systèmes d'audit et de contrôle des bénéficiaires sera intégrée dans leurs programmes de réformes; deuxièmement, la Commission sera en mesure de procéder à des examens détaillés des systèmes nationaux d'exécution budgétaire à tout moment du cycle du projet.

En résumé, ce plan de croissance et d'investissement vise à créer ou accélérer les conditions propices à l'adhésion de ces pays à l'Union. Comme l'a exposé le Commissaire Várhelyi devant notre commission, il appartient donc désormais aux dirigeants de ces pays de saisir cette opportunité de réformer, d'intégrer et de « mettre à niveau » leurs économies afin de les rapprocher de celles de l'UE.

3. Cette proposition législative est-elle conforme aux principes de subsidiarité et de proportionnalité ?

Cette proposition de règlement est cohérente avec d'autres domaines de l'action et des politiques extérieures tels que les négociations d'élargissement et l'aide de préadhésion. La facilité qu'il établit complétera ces politiques en accélérant la convergence socio-économique de la région avec l'UE en vue de son intégration future.

Ce texte est fondé sur les articles 212 et 322 du traité sur le fonctionnement de l'Union européenne (TFUE). Il est conforme à la procédure prévue à l'article 294 du TFUE.

Conformément à l'article 212 du TFUE, qui expose la procédure législative ordinaire à utiliser pour arrêter les mesures nécessaires à la mise en oeuvre de la coopération avec les pays tiers, la proposition revêt la forme d'un règlement, qui garantit sa portée générale, son caractère obligatoire dans tous ses éléments et son applicabilité directe.

La facilité proposée visant à aider les bénéficiaires des Balkans occidentaux à parvenir à une convergence avec l'Union européenne dans le cadre de la politique d'élargissement, l'Union est la mieux à même de fournir cette aide.

C'est également l'Union qui est la mieux placée pour aider les pays candidats et candidats potentiels à se préparer à l'adhésion.

L'ampleur de l'aide à apporter justifie que l'UE s'en charge, de manière coordonnée et prévisible, en mobilisant sa capacité d'emprunt pour octroyer des prêts à des conditions avantageuses à ces pays, ainsi que pour fournir une aide non remboursable et des garanties dans une perspective pluriannuelle.

La proposition est donc conforme au principe de subsidiarité.

La proposition est également conforme au principe de proportionnalité en ce qu'elle se limite au minimum requis pour atteindre les objectifs précités au niveau européen et n'excède pas ce qui est nécessaire à cette fin.

Le groupe de travail sur la subsidiarité a décidé de ne pas intervenir plus avant sur ce texte au titre de l'article 88-6 de la Constitution.


* 1 https://www.consilium.europa.eu/fr/meetings/international-summit/2023/12/13/

* 2 https://www.consilium.europa.eu/fr/press/press-releases/2023/12/15/european-council-conclusions-14-and-15-december-2023/

* 3 https://www.senat.fr/compte-rendu-commissions/20231106/europ.html#toc4


Examen dans le cadre de l'article 88-4 de la Constitution

Texte déposé au Sénat le 13/12/2023