COM (2018) 568 final  du 01/08/2018

Contrôle de subsidiarité (article 88-6 de la Constitution)


Le texte COM 568 tend à développer les liaisons maritimes directes, après le Brexit, entre les ports de la République d'Irlande et le reste de l'Union européenne à 27, alors qu'une part substantielle du trafic maritime actuel entre l'Irlande et l'Union passe aujourd'hui par des ports anglais.

La Commission européenne propose, à cet effet, de modifier un règlement de 2013 établissant le mécanisme pour l'interconnexion en Europe. Son intervention est justifiable au regard de la subsidiarité dans la mesure où l'Union apparaît la mieux placée pour mettre en oeuvre ledit mécanisme. Reste que le dispositif proposé privilégie de façon inexplicable des ports situés hors de France, en accordant l'exclusivité des nouvelles liaisons à deux ports belges et à un néerlandais : Zeebrugge, Antwerpen (Anvers) et Rotterdam.

S'il a été décidé de ne pas intervenir au titre de l'article 88-6 de la Constitution, il pourrait être envisagé d'étudier ce texte au fond, en application de l'article 88-4 de la Constitution.


Examen dans le cadre de l'article 88-4 de la Constitution

Texte déposé au Sénat le 23/08/2018
Examen : 29/11/2018 (commission des affaires européennes)

Ce texte a fait l'objet de la proposition de résolution : Proposition de résolution européenne sur la proposition de règlement du Parlement européen et du Conseil modifiant le règlement (CE) n° 1316/2013 en ce qui concerne le retrait du Royaume-Uni de l'Union (2018-2019) : voir le dossier legislatif


Transports

Adaptation des corridors de transports dans l'Union européenne

Rapport d'information, proposition de résolution européenne
et avis politique de MM. Pascal Allizard, Didier Marie
et Jean-François Rapin

COM (2018) 568 final - Texte E 13368

(Réunion du 29 novembre 2018)

M. Jean Bizet, président. - Nous allons maintenant examiner le rapport d'information de Pascal Allizard, Didier Marie et Jean François Rapin sur l'adaptation des corridors de transports dans l'Union européenne, qui est accompagné d'une proposition de résolution européenne. Pascal Allizard ne pouvant être parmi nous aujourd'hui, ce sont nos deux autres rapporteurs qui exposeront le résultat de leurs travaux communs

C'est une question très importante qui revêt des enjeux majeurs pour les territoires concernés. Disons-le, la proposition de la Commission européenne pour tirer les conséquences du Brexit est tout à fait inacceptable puisqu'elle aboutit purement et simplement à faire l'impasse sur les ports français. Il était donc important que notre commission fasse connaître sa position au Gouvernement et à la Commission européenne. C'est pourquoi je remercie nos rapporteurs de s'être mobilisés pour nous proposer une analyse de ce dossier. Nous y reviendrons puisque le Brexit est devant nous, et le reformatage des flux commerciaux entre l'Irlande et le continent devra être retravaillé dans les prochains mois.

M. Jean-François Rapin, rapporteur. - Cette affaire m'inspire deux questions. D'abord : tout cela pour quoi ? Et ensuite : pourquoi en sommes-nous arrivés là ? Dans l'enchaînement qui nous a conduits à la résolution du 1er août, provoquant une crise et une forte angoisse dans les ports concernés, nous n'avons pas encore réussi à décrypter tous les facteurs politiques.

Je vous prie d'abord d'excuser notre collègue Pascal Allizard, qui est en déplacement. Didier Marie et moi-même nous exprimerons en son nom, avec son autorisation.

Le rapport soumis à votre examen, ainsi que la proposition de résolution européenne qui l'accompagne, sont motivés par une proposition publiée le 1er août par la Commission européenne, afin de tirer les conséquences du Brexit. Elle a ému le monde maritime français, jusqu'au Gouvernement et aux régions maritimes concernées, car elle tendait à remplacer l'actuelle liaison entre Dublin et Calais via la Grande-Bretagne par une liaison purement maritime allant de Dublin aux principaux ports du Benelux.

Je commencerai par présenter la dimension juridique, en comparant le cadre de la politique européenne des transports en vigueur depuis le 11 décembre 2013 et la proposition de règlement formulée le 1er août par la Commission européenne, avant de céder la parole à Didier Marie pour la dimension économique.

Les deux règlements adoptés le 11 décembre 2013 ont totalement restructuré la politique européenne des transports. Le règlement n° 1315/2013 a unifié l'approche des transports terrestres, aériens ou par navigation au sein de l'Union européenne, à travers le concept de « réseau transeuropéen de transport » ou RTE-T.

Les infrastructures terrestres prises en compte dans ce cadre ont été regroupées en deux grandes catégories nouvelles : le réseau dit « central », et le réseau dit « général ». Au sein du réseau central, neuf corridors ont été identifiés. Les projets d'intérêt commun situé sur ces corridors sont prioritaires, alors que cette priorité n'est pas nécessairement acquise même aux projets d'intérêt commun situés sur le réseau central mais à l'extérieur des corridors. L'enjeu financier est donc majeur.

Cependant, les corridors ne sont pas les seuls à bénéficier d'une priorité au titre du réseau transeuropéen de transport. En effet, trois politiques dites techniques peuvent également bénéficier d'un soutien prioritaire de l'Union européenne. Elles englobent la gestion du trafic aérien et du trafic ferroviaire, mais le sujet qui nous intéresse est celui des autoroutes de la mer, définies comme « la dimension maritime du réseau transeuropéen de transport ». Cette novation majeure et cruciale inclut totalement les liaisons maritimes dans la politique européenne des transports. Pour être éligible à des subventions au titre des autoroutes de la mer, un projet d'intérêt commun doit préférentiellement porter sur les liaisons maritimes entre deux ports du réseau central, qu'ils fassent ou non partie d'un corridor. Il reste néanmoins possible de financer au titre des autoroutes de la mer une liaison entre un port du réseau central et un port du réseau global, mais à condition que cette liaison présente un intérêt européen particulièrement marqué.

La dernière grande nouveauté a fait l'objet d'un texte spécifique : le règlement n° 1316/2013, lui aussi du 11 décembre 2013, crée le mécanisme pour l'interconnexion en Europe (ou MIE), pour organiser la participation de l'Union européenne au financement des projets d'intérêt commun retenus à la suite d'appels d'offres. Le dispositif initial a énuméré un certain nombre de projets reconnus prioritaires dès 2013, avant tout appel d'offres.

Or la proposition du 1er août a littéralement piétiné cet ensemble. La motivation invoquée, le fait que le retrait du Royaume-Uni imposerait à l'Irlande un isolement qu'il faudrait impérativement éviter, est grossièrement inexacte puisque ces autoroutes de la mer parcourent de façon extrêmement dense l'espace considéré.

Au demeurant, même si elle avait été conforme à la vérité, la crainte d'un isolement aurait justifié une modification du tracé des autoroutes de la mer, puisqu'il s'agit de liaisons maritimes. De plus, le Brexit, négocié ou pas, doit nécessairement se traduire par une révision du corridor physique « mer du Nord - Méditerranée », tel qu'il résulte du règlement n° 1315/2013. Or, la Commission européenne propose de modifier le règlement qui avait créé le MIE, en visant précisément l'annexe qui recense les projets initialement prioritaires en 2013, c'est-à-dire un ensemble dépourvu du moindre rapport avec l'objet du texte.

Ce n'est pas tout : la Commission européenne a écarté toute étude d'impact, dans une démarche cohérente avec une consultation des parties intéressées réduite à deux semaines, entre le 26 juin et le 12 juillet - la procédure régulière durant, à ma connaissance, quatre semaines. Un délai aussi bref permettait de réduire au strict minimum inévitable toute expression publique des intérêts économiques en cause ; l'absence d'étude d'impact évitait à la Commission européenne d'analyser elle-même la dimension économique, dont Didier Marie s'apprête à vous entretenir.

M. Didier Marie, rapporteur. - Les échanges maritimes entre l'Irlande et le continent peuvent se classer en deux catégories. La première concerne les trajets exclusivement maritimes, principalement entre Dublin ou Cork pour la côte irlandaise et les ports du Benelux. Il peut s'agir de vrac solide, de vrac liquide ou de conteneurs qui, arrivés à Zeebrugge, Anvers ou Rotterdam, sont souvent transbordés sur d'autres navires pour atteindre leur destination finale. Symétriquement, des conteneurs venant de loin sont transbordés dans ces mêmes ports avant de rejoindre l'Irlande. Le retrait du Royaume-Uni laissera ces trajets inchangés, l'Irlande ayant ses propres liaisons maritimes avec le continent.

La seconde catégorie d'échanges maritimes entre l'Irlande et la partie continentale de l'Union emprunte le long bridge, surnom anglais donné aux trajets terrestres entre Liverpool et Calais via le tunnel sous la Manche. Ce trajet se situe entièrement sur le corridor « mer du Nord - Méditerranée ». Or les poids-lourds qui empruntent le long bridge n'apparaissent pas dans la partie de l'étude consacrée aux autoroutes de la mer, publiée en avril 2018 par le coordonnateur européen de ces autoroutes.

Dans sa réponse au courrier envoyé le 10 août par Mme Élisabeth Borne, ministre des transports, Mme Violeta Bulc, commissaire aux transports, a invoqué précisément cette étude, alors même que son auteur avait pris soin de préciser qu'il ne proposait aucune estimation portant sur les conséquences du Brexit.

En d'autres termes, la seule justification avancée par la Commission européenne consistait en un document certes bien réalisé, mais portant sur un autre sujet. Et ce travail ignorait par nature la fraction des échanges entre l'Irlande et le continent qui emprunte le tunnel sous la Manche, dans un sens ou dans l'autre, soit 90 % du trafic total.

Or la seule conséquence possible d'un retrait du Royaume-Uni sans accord concerne précisément les itinéraires nouveaux que les marchandises empruntant aujourd'hui le long bridge devront utiliser demain en cas de Brexit « dur ».

Face à cela, que peut faire l'Union européenne ?

En premier lieu, il convient bien sûr de retirer purement et simplement une proposition indéfendable. C'est indispensable, mais insuffisant. De même, il est indispensable bien qu'insuffisant de modifier les annexes aux deux règlements du 11 décembre 2013 afin d'en retirer le réseau de transport britannique. L'éventualité d'un accord n'enlève rien à la pertinence de cette seconde recommandation, puisque le Royaume-Uni deviendra, quoi qu'il arrive, un pays tiers à compter du 30 mars 2019. La révision des autoroutes de la mer dans la Manche et la mer du Nord procède d'une même logique.

Plus immédiatement opérationnelle et surtout proche du sujet qui nous préoccupe, est l'étude approfondie des aménagements dont les ports bretons ou normands auront besoin afin d'accueillir les navires qui devront peut-être transporter les poids lourds qu'un Brexit « dur » priverait de long bridge.

Prolongeant cette réflexion, il est impératif d'envisager une meilleure desserte de l'arrière-pays de ces ports. En effet, l'axe « mer du Nord - Méditerranée » ne serait rejoint qu'après le corridor « Atlantique » reliant la péninsule ibérique à l'Europe du Nord. Il faudra donc revoir non pas un corridor, mais deux, selon un calendrier accéléré, sauf si une période de transition apportait à cette région un répit bienvenu.

Enfin, une observation sur l'économie irlandaise s'impose. Ses exportations représentent 42 % du PIB, contre 39 % pour l'Allemagne et 20 % pour la France. L'Irlande doit donc logiquement être particulièrement préoccupée par les conséquences possibles qu'un retrait du Royaume-Uni aurait pour ses voies d'exportation. Un lobbying bien conduit aurait toutes les chances d'y recevoir une écoute attentive.

Les bizarreries juridiques analysées par Jean-François Rapin peuvent trouver une explication économique. Il n'est pas anodin de proposer à tort la révision d'un corridor terrestre alors que la situation envisagée relève uniquement des autoroutes de la mer : ce faisant, la proposition de la Commission européenne écarte implicitement, donc avec discrétion, les ports bretons et normands du réseau global, c'est-à-dire précisément les mieux placés géographiquement pour accueillir les poids lourds privés de long bridge !

Il n'est pas neutre non plus de vouloir modifier le règlement relatif au financement européen du RTE-T, sous prétexte d'assurer la continuité géographique d'un corridor.

Ces constats incitent vos rapporteurs à vous soumettre une proposition de résolution européenne, et un avis politique au dispositif identique.

La commission des transports et du tourisme (TRAN) du Parlement européen est saisie de ce texte ; elle semble s'orienter vers des modifications proches de celles de la proposition de résolution européenne, qu'il s'agisse de la prise en compte des ports français, des conséquences du Brexit pour les corridors « Mer du Nord - Méditerranée » et « Atlantique » ou du financement dont les ports auraient besoin en cas de no deal, comme il est écrit dans le projet de rapport publié par Mme Karima Delli au nom de la commission TRAN, qui doit se prononcer le 22 janvier.

M. Jean Bizet, président. - Merci de vous être mobilisés rapidement, d'avoir pris toute la mesure du sujet. La déclaration de la Commission européenne, mi-août, était inacceptable. Je me félicite que le Parlement européen puisse s'en saisir. J'ai accompagné, à sa demande, la ministre des transports à Dublin la semaine dernière pour rencontrer les professionnels de ce secteur, qui sont extrêmement demandeurs d'une réaction de la France. Au Havre, à Dunkerque et dans tous les ports concernés, les professionnels sont très mobilisés et conscients que nous essayons de nous montrer réactifs. Nous allons inviter la commissaire chargée du dossier, Mme Violeta Bulc ; elle recevra votre rapport. Un avis politique sera publié.

J'ai aussi rédigé une note préconisant l'intégration dans la réflexion de la liaison avec Marseille via le ferroutage, en passant par le contournement de Lyon. Le Brexit, dur ou soft, est l'occasion de repenser les interconnexions européennes.

M. Yannick Botrel. - Les préconisations initiales ont créé un certain émoi, d'autant que certains ports comme Roscoff trouvent leur raison d'être dans le trafic avec les îles britanniques. Certaines infrastructures méritent d'être adaptées, mais on ne peut ignorer les ports bretons et normands dans la nouvelle organisation, sans tenir compte des conséquences économiques pour les régions maritimes concernées.

Le projet de loi de finances 2019 prévoit la création d'une soixantaine de postes de fonctionnaires pour fluidifier le trafic de marchandises à travers la Manche. La crainte du détournement du trafic vers les ports du Benelux repose aussi sur le fait que ceux-ci sont moins contrôlés que les nôtres. Il y a quelques années, un rapport de la commission des finances sur les exportations agro-alimentaires françaises avait mis en évidence un taux de contrôle à Anvers de 0,4 %. Ce moins-disant ne risque-t-il pas de jouer au détriment des ports français ?

M. Didier Marie, rapporteur. - Au cours de nos auditions, nous avons appris que la nature et l'intensité des flux entre l'Irlande et le continent n'étaient pour ainsi dire pas connues, car ceux-ci sont mêlés aux flux britanniques : on ne peut pas dire si un camion arrivant à Calais vient d'Irlande ou de Grande-Bretagne. Personne n'est en mesure de fournir d'éléments précis et tangibles sur la nature des marchandises. Mais la nature des trafics et les routes suivies relèvent, quoi qu'il arrive, des décisions des armateurs.

En fléchant dans le corridor les ports du Benelux, la Commission européenne dirige vers ceux-ci les subventions européennes. Or du fait du Brexit et de la nécessité de récupérer une partie du trafic irlandais, les ports français devront faire des travaux d'aménagement. Les représentants des autorités portuaires nous ont souligné l'importance des investissements en jeu. L'impossibilité d'accéder aux financements européens représenterait un fort déficit de compétitivité.

Pour résumer notre propos, il faut rejeter la proposition de règlement parce que le véhicule juridique est inadapté, parce qu'il n'y a pas eu d'étude d'impact, et que les réseaux maritimes et terrestres sont confondus dans la décision de la Commission européenne.

Enfin, au cours de l'examen du projet de loi d'habilitation portant sur le Brexit, il nous a été indiqué que le Gouvernement recruterait 700 douaniers pour faire face au Brexit, mais seulement 40 agents des services phytosanitaires vétérinaires, alors que les besoins ont été estimés entre 90 à 150 par M. Pourquery de Boisserin, chargé par le Gouvernement d'évaluer les conséquences du Brexit pour les ports. Or si la Grande-Bretagne devient un pays tiers, dans l'attente d'un accord, l'intégralité de ses marchandises devra être contrôlée.

M. Jean-François Rapin, rapporteur. - Nous devons insister sur les recrutements nécessaires. La pédagogie est dans la répétition.

Ce rapport a été préparé dans un temps très limité, mais il était important de réagir rapidement ; un député vient seulement d'être désigné pour un rapport d'information sur le même thème. Il reste des zones d'ombre sur les raisons de la mise à l'écart de la France de cette décision.

M. Jean Bizet, président. - Je propose d'ajouter un point numéro 25 : « Souligne la nécessité d'une harmonisation des contrôles qui seront opérés respectivement au Royaume-Uni et dans les États membres de l'Union européenne ».

M. Didier Marie, rapporteur. - Au point 17, je propose d'ajouter l'adverbe « exclusivement » après « s'il s'était agi ».

M. Jean Bizet, président. - Nous inviterons Mme Bulc à venir rencontrer la représentation nationale.

M. André Gattolin. - Pourquoi la France a-t-elle été exclue de cette décision ? L'an passé, la Commission a attaqué des ports français et belges pour des abattements estimés indus. L'absence de réaction des autorités françaises s'explique-t-elle par une crainte de sanctions sur ce dossier ?

À l'issue du débat, la commission, à l'unanimité, autorise la publication du rapport d'information et adopte, dans la rédaction suivante, la proposition de résolution européenne ainsi que l'avis politique qui en reprend les termes et qui sera adressé à la Commission européenne.


Proposition de résolution européenne

(1) Le Sénat,

(2) Vu l'article 88 4 de la Constitution,

(3) Vu la proposition de règlement du Parlement européen et du Conseil modifiant le règlement (CE) n° 1316/2013 en ce qui concerne le retrait du Royaume-Uni de l'Union, COM(2018) 568 final,

(4) Vu le règlement (CE) n° 1316/2013 du Parlement européen et du Conseil du 11 décembre 2013 établissant le mécanisme pour l'interconnexion en Europe, modifiant le règlement (UE) n° 913/2010 et abrogeant les règlements (CE) n° 680/2007 et (CE) n° 67/2010,

(5) Vu le règlement (CE) n° 1315/2016 du Parlement européen et du Conseil du 11 décembre 2013 sur les orientations de l'Union pour le développement du réseau transeuropéen de transport et abrogeant la décision n° 661/2010/UE,

(6) Considérant que la proposition du règlement COM(2018) 568, publiée le 1er août 2018, tend à introduire, dans le corridor « Mer du Nord - Méditerranée », une liaison maritime spécifique entre deux ports de la République d'Irlande faisant partie de ce corridor et Zeebrugge, Anvers et Rotterdam, sans mentionner les ports de Calais, ni de Dunkerque,

(7) Approuve l'intention d'anticiper les éventuelles conséquences imputables à un retrait du Royaume-Uni en l'absence d'accord avec l'Union européenne ;

(8) Estime indispensable à cette fin de prévoir, autant qu'il est possible de le faire, les effets spontanés d'un tel départ afin d'y remédier lorsque cela paraît nécessaire ;

(9) Insiste sur l'absolue nécessité pour la Commission européenne de procéder à une consultation suffisante des parties prenantes - notamment des États membres directement concernés - avant d'élaborer une proposition ;

(10) Rappelle que toute proposition normative doit être accompagnée, dès sa publication, d'une étude d'impact permettant d'apprécier la situation de départ, le dispositif proposé, ainsi que les résultats attendus ;

(11) Regrette que la Commission européenne se soit abstenue d'étudier le seul effet qu'un retrait du Royaume-Uni pourrait avoir pour le fret maritime entre la République d'Irlande et la partie continentale de l'Union européenne, à savoir la réorientation vers d'autres voies des poids-lourds qui utilisent aujourd'hui la liaison maritime entre Dublin et Liverpool, afin de rejoindre la France à Calais ou Dunkerque via Douvres ;

(12) Déplore que la consultation des parties prenantes n'ait duré que deux semaines, du 26 juin au 12 juillet 2018 ;

(13) S'interroge sur l'absence de consultation des autorités françaises, qui ont manifestement découvert le dispositif lorsqu'il a été publié le 1er août 2018 ;

(14) Souligne que les liaisons commerciales maritimes entre ports des États membres peuvent emprunter librement les itinéraires choisis par les opérateurs, si bien que même une éventuelle absence de liaison identifiée comme telle par l'Union européenne n'aurait provoqué aucun isolement de la République d'Irlande, même en cas de retrait britannique sans accord avec l'Union ;

(15) En déduit que rien ne peut justifier l'urgence alléguée de présenter une proposition dont la durée d'application serait nécessairement brève, alors que le dispositif du réseau transeuropéen de transport a une vocation de long terme ;

(16) Observe en outre que la Commission européenne ayant invoqué une nécessité portant sur le tracé du corridor « Mer du Nord - Méditerranée », elle propose de modifier non le règlement (CE) n° 1315/2013 - qui définit les corridors du réseau central - mais le texte qui tend à accompagner lesdits tracés sur le plan des subventions budgétaires, sans justifier cette apparente confusion entre deux dispositifs, complémentaires mais distincts bien qu'ils aient été signés le même jour ;

(17) Constate en outre, avec surprise, qu'un sujet relevant par excellence des « autoroutes de la mer » au sens du règlement (CE) n° 1316/2013 ait été traité par la Commission européenne comme s'il avait relevé exclusivement d'un corridor du réseau central ;

(18) Observe que la modification proposée par la Commission européenne tend à modifier, au sein du règlement (CE) n° 1316/2013, la partie I de l'annexe I, dont l'objet consiste à établir la «  liste des projets présélectionnés dans le secteur des transports » ;

(19) S'interroge en conséquence sur le rapport entre le fait de modifier une liste établie en 2013 pour donner un premier élan au mécanisme pour l'interconnexion en Europe, d'une part, la prise en compte d'un retrait du Royaume-Uni presque six ans après, d'autre part ;

(20) Constate que la Commission européenne s'est abstenue de proposer une modification des réseaux central et global, bien qu'une part substantielle de chacun de ces réseaux se trouve sur le territoire du Royaume-Uni ;

(21) Constate également qu'aucune modification n'a été proposée au tracé des autoroutes de la mer, bien que celles aboutissant à un port britannique ne puissent perdurer après le retrait du Royaume Uni, avec ou sans accord accompagnant ce retrait ;

(22) Pour l'ensemble de ces raisons, demande le retrait pur et simple de la proposition de règlement COM(2018) 568 final ;

(23) Estime, d'autre part, impérieux que la Commission européenne élabore deux propositions de règlements tendant à modifier les cartes des réseaux de transport annexées aux règlements (CE) n° 1315/2013 et (CE) n° 1316/2013 afin d'y supprimer les tracés de réseaux terrestres situés sur le territoire du Royaume-Uni, l'entrée en vigueur de ces deux propositions étant conditionnée par le seul retrait du Royaume-Uni, indépendamment de ses modalités ;

(24) En cas de retrait britannique sans accord avec l'Union, estime en outre indispensable d'engager au plus vite une réflexion sur les flux commerciaux entre la République d'Irlande et la partie continentale de l'Union européenne, afin d'éclairer la révision des corridors et des autoroutes de la mer, dont le calendrier devra nécessairement être accéléré ;

(25) Souligne la nécessité d'une harmonisation des contrôles qui seront opérés respectivement au Royaume-Uni et dans les États membres de l'Union européenne ;

(26) Invite le Gouvernement à faire valoir cette position dans les négociations au Conseil.