COM (2018) 476 final  du 13/06/2018

Contrôle de subsidiarité (article 88-6 de la Constitution)


Le texte COM 476 concerne le nouveau Fonds européen de la défense. Celui-ci devrait être doté d'un budget de 13 milliards d'euros pour 2021-202. Il mettrait à disposition 4,1 milliards d'euros pour financer directement des projets de recherche collaborative, en particulier par des subventions. Au-delà de la phase de recherche, 8,9 milliards d'euros seraient disponibles pour compléter les investissements des États membres par un cofinancement des coûts liés au développement de prototypes et aux exigences de la certification et des essais. Le Fonds serait un catalyseur pour l'instauration d'une base industrielle et scientifique innovante et compétitive.

Les décisions relatives aux investissements dans la défense et aux programmes de développement dans le domaine de la défense relèvent de la compétence et de la responsabilité des États membres. Toutefois, l'Union européenne peut compléter les efforts de collaboration déployés par les États membres pour développer des capacités de défense, donner un effet de levier à ces efforts et les consolider, afin de soutenir l'industrie européenne de la défense et de relever les défis de sécurité. Cela évitera les doubles emplois, permettra une meilleure utilisation de l'argent public, l'interopérabilité des équipements de défense, la réduction de la fragmentation ainsi que la compétitivité et l'innovation de la base industrielle et technologique de défense européenne. L'initiative est, par ailleurs, limitée aux objectifs que les États membres ne peuvent atteindre de manière satisfaisante par leurs propres moyens et pour lesquels l'Union peut obtenir des résultats plus probants. La proposition de mécanisme de mise en oeuvre, applicable au niveau européen, visera à limiter les coûts financiers et administratifs. Pour ces raisons, la proposition de règlement paraît conforme au principe de subsidiarité. Il a donc été décidé de ne pas intervenir plus avant au titre de l'article 88-6 de la Constitution.


Examen dans le cadre de l'article 88-4 de la Constitution

Texte déposé au Sénat le 14/06/2018
Examens : 04/02/2020 (commission des affaires européennes), 05/02/2020 (commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées)

Ce texte a fait l'objet de la proposition de résolution : Proposition de résolution européenne sur le fonds européen de la défense (2019-2020) : voir le dossier legislatif


Politique étrangère et de défense

Examen d'une proposition de résolution européenne sur le Fonds européen de la défense
Proposition de résolution européenne sur le Fonds européen de la défense

COM (2018) 476 final - Texte E 13196

(Réunion du 4 février 2020)

M. Jean Bizet, président. - Mes chers collègues, vous n'êtes pas sans savoir que la présidence finlandaise a proposé une réduction de près de 50 % des crédits envisagés par la Commission pour le Fonds européen de la défense. Cette proposition s'explique en partie par le Brexit, mais aussi par l'émergence de nouvelles politiques, telles que la lutte contre le réchauffement climatique.

Pourtant, vous le savez, ce fonds est plus que jamais nécessaire. Depuis la présidence Obama, et cela a été accentué par Donald Trump, les États-Unis n'ont eu de cesse d'enjoindre aux Européens de mieux prendre en charge leur défense. Nous ne pouvons plus nous appuyer seulement sur l'OTAN.

À mon sens, le Sénat doit insister pour que cette politique naissante ne soit pas fragilisée. Nos délais sont contraints, car Charles Michel a annoncé la tenue d'un Conseil européen extraordinaire le 20 février afin de rapprocher les positions des États membres sur le cadre financier pluriannuel et il importe que la résolution européenne du Sénat soit devenue définitive avant cette date. Je tiens à souligner que cette démarche se fait en plein accord avec la commission des affaires étrangères, qui examinera demain la proposition de résolution européenne que nous adopterons.

Je cède sans plus tarder la parole à nos collègues rapporteurs.

M. Cyril Pellevat, rapporteur. - Le Fonds européen de la défense, annoncé par le président Jean-Claude Juncker en 2016, est le point d'aboutissement d'une dynamique européenne de défense qui a vu l'entrée en vigueur des instruments prévus par le Traité de Lisbonne.

Nous le soulignons dans notre proposition de résolution européenne et rappelons notamment qu'il a été précédé de deux programmes expérimentaux : l'action préparatoire sur la recherche en matière de défense et le programme européen de développement industriel dans le domaine de la défense.

Le Fonds européen de la défense a toutefois une ambition bien plus grande pour renforcer la base industrielle et technologique de défense européenne et contribuer ainsi à l'autonomie stratégique de l'Union.

Avec le Fonds européen de la défense, la démarche proposée par la Commission européenne marque une rupture : c'est la première fois que des crédits communautaires viennent directement financer une politique de défense, en l'occurrence dans le domaine capacitaire.

Cependant, pour être efficace et exercer un véritable effet de levier, ce fonds doit disposer de ressources suffisantes. Le Conseil, le Parlement européen et la Commission ont trouvé, début 2019, un accord partiel, approuvé par le Parlement européen le 18 avril 2019, mais la dimension budgétaire, cruciale pour la réussite du projet, dépend de l'accord d'ensemble sur le cadre financier pluriannuel de l'Union.

Le message principal que porte cette résolution est ainsi budgétaire. Il ne vous surprendra pas puisqu'il reprend la position défendue dans la proposition de résolution générale de notre commission sur le cadre financier pluriannuel : nous refusons la perspective proposée par la présidence finlandaise du Conseil en décembre dernier, qui conduit à réduire de près de moitié des crédits consacrés au Fonds européen de la défense. Nous demandons que le niveau de crédits dévolus à ce fonds soit relevé à la hauteur initialement prévue par la Commission européenne, soit 11,453 milliards d'euros en prix 2018 ou 13 milliards d'euros en euros courants.

Mme Gisèle Jourda, rapporteure. - Cet appel budgétaire est en effet le message fort de cette résolution, car nous considérons que la réduction des crédits proposée par la présidence finlandaise du Conseil en décembre est un contresens politique, économique et stratégique.

Le contexte sécuritaire dans lequel évolue l'Union européenne s'est très largement dégradé au cours des dernières années, entre terrorisme, perturbations aux frontières, affirmations de puissance de la part de la Russie et de la Chine, notamment, tensions dans la relation transatlantique, cyberattaques et menaces hybrides. Je pense également aux conséquences des dérèglements climatiques, qui donnent à la zone Arctique une importance géostratégique nouvelle.

La présidente de la Commission européenne appelle à une « Commission géopolitique » et crée au sein de la Commission européenne une direction générale de l'industrie de la défense et de l'espace. La France ne cesse de plaider pour le renforcement de l'autonomie stratégique de l'Union. Il faut donc que le Gouvernement défende avec vigueur les crédits du Fonds européen de la défense dans le cadre des négociations sur le cadre financier pluriannuel. Si nous ne parvenons pas à renforcer la base industrielle et technologique de défense européenne, notre industrie européenne ne sera pas en mesure de relever les défis en matière d'investissement auxquels elle doit faire face, notamment pour faire émerger des technologies de rupture.

Il ne s'agit pas d'une démarche comptable, technique ou même industrielle ; il s'agit d'une démarche éminemment politique qui touche à une certaine vision du rôle qu'entend jouer ou non l'Union européenne sur la scène mondiale. Le Fonds européen de la défense présente une véritable valeur ajoutée européenne s'il est correctement calibré. Il faut donc lui permettre de jouer un rôle efficace, dans l'intérêt supérieur des Européens.

Au-delà de ces éléments budgétaires, la proposition de résolution européenne que nous vous présentons apporte un soutien à l'objectif général du fonds, que je viens d'évoquer, et à ses objectifs spécifiques, qui visent à soutenir la recherche collaborative afin d'améliorer les performances de futures capacités, ainsi que le développement collaboratif de produits et de technologies se rapportant à la défense. Sur la base des 13 milliards d'euros initialement envisagés pour le fonds, en euros courants, 4,1 milliards d'euros devaient ainsi être consacrés aux actions de recherche et 8,9 milliards d'euros aux actions de développement.

La présente proposition de résolution européenne aborde également les enjeux relatifs à la gestion opérationnelle de ce fonds, en soulignant que les programmes financés devront répondre aux besoins futurs des armées européennes, plutôt qu'au souci d'assurer un juste retour aux industries nationales, et à l'ambition de renforcer l'autonomie stratégique européenne. Elle considère toutefois que les États membres devront être étroitement associés au processus décisionnel.

La lettre de mission adressée le 1er décembre 2019 à Thierry Breton, qui aura la main sur la future direction générale de l'industrie de la défense et de l'espace, précise qu'il aura pour mission, dans le cadre de la mise en oeuvre du Fonds européen de la défense, d'« encourager les projets de collaboration prévoyant la plus forte participation transfrontière possible de petites et moyennes entreprises ».

Le texte issu de l'accord intervenu en trilogue indique en effet que, pour bénéficier d'un financement du fonds, il sera nécessaire d'avoir un consortium comprenant au moins trois entités établies dans au moins trois États membres ou pays associés différents, sauf pour les actions relatives à des technologies de rupture en matière de défense et certaines études de faisabilité.

M. Cyril Pellevat, rapporteur. - Les modalités de gestion du fonds sont en effet essentielles pour répondre à l'objectif qui lui est assigné. Nous soulignons ainsi l'importance de la préférence européenne dans la mise en oeuvre du Fonds européen de la défense. Le choix des Européens de dégager des crédits doit réellement servir les intérêts européens et contribuer directement à renforcer la base industrielle et technologique de défense européenne. Nous soutenons donc les mesures de protection des intérêts européens affirmés dans le projet de règlement : les destinataires et sous-traitants participant à une action financièrement soutenue par le fonds devront être établis dans l'Union européenne ou dans un pays associé, c'est-à-dire membre de l'Association européenne de libre-échange et de l'Espace économique européen ; ils ne devront pas être soumis au contrôle d'un pays tiers non associé ou d'une entité de pays tiers non associé ; les infrastructures, installations, biens et ressources de ces destinataires et sous-traitants devront être situés sur le territoire d'un État membre ou d'un pays associé pendant toute la durée de l'action, de même que leurs structures exécutives de gestion.

Le projet de règlement instituant le Fonds européen de la défense prévoit toutefois la possibilité de déroger à ces principes sous certaines conditions. Nous insistons donc pour que ces dérogations ne compromettent pas l'ambition du fonds et qu'elles soient limitées au strict nécessaire. Les dérogations devront répondre à des garanties assurant qu'une telle participation ne serait contraire ni aux intérêts de l'Union et de ses États membres en matière de sécurité et défense ni aux objectifs du fonds.

Nous saluons en particulier le régime de protection de la propriété intellectuelle mis en place afin d'éviter que les droits de propriété intellectuelle ne sortent de l'Union européenne. Nos collègues Ronan Le Gleut et Hélène Conway-Mouret, auteurs d'un rapport sur la défense européenne, au nom de la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées, avaient souligné qu'en agissant ainsi l'Union européenne commençait à adopter une législation comparable à celle des États-Unis en ce qui concerne le contrôle des fruits de ses investissements en matière de défense, de manière toutefois moins stricte qu'aux États-Unis.

Nous avons enfin souhaité évoquer les critiques formulées par les États-Unis d'Amérique à l'égard du fonds, ainsi que la situation du Royaume-Uni.

Les États-Unis d'Amérique ont émis de vives critiques à l'encontre du Fonds européen de la défense, qu'ils analysent comme une volonté de fermer les marchés de défense européens aux entreprises américaines. Or le marché européen est très ouvert aux équipements de défense américains : en témoigne la signature par la Pologne, le 31 janvier 2020, de l'achat de 32 avions de combat F-35-A, sans contrepartie industrielle. La mise en place du Fonds européen de la défense n'y changera rien, et elle n'empêchera pas les États membres d'acheter des équipements américains s'ils le souhaitent. Nous avons donc tenu à faire valoir que la mise en place de ce fonds ne fermait pas les marchés de défense européens aux entreprises d'États tiers, et à inviter, dans une logique de réciprocité, à veiller à l'ouverture des marchés de défense d'États tiers aux entreprises européennes.

Mme Gisèle Jourda, rapporteure. - Il est essentiel que les crédits du Fonds européen de la défense soient utilisés conformément à leur objet : nous devons renforcer l'autonomie stratégique de l'Union et réduire notre dépendance à l'égard de fournisseurs d'États tiers, notamment des États-Unis. Les propos du président Trump sur l'Union européenne devraient agir comme un électrochoc ! C'est un point qui avait été évoqué à Helsinki en septembre dernier, lors de la conférence interparlementaire sur la politique étrangère et de sécurité commune (PESC) et la politique de sécurité et de défense commune (PSDC).

Il ne s'agit aucunement, au travers de notre proposition de résolution, de partir en guerre contre les uns ou les autres. Il est juste question de faire respecter l'espace européen, dont la défense et l'armée constituaient une priorité qui a, par la suite, toujours été repoussée. Or, sans avoir l'esprit belliqueux, cet espace très original mérite que nous trouvions des solutions, dans l'intérêt de nos populations et aux côtés de l'OTAN.

Je rappelle que nous avions déjà proposé avec Yves Pozzo di Borgo l'idée d'un fonds européen de la défense. Or, en dépit de notre souci constant en la matière et alors que la présidence finlandaise se montrait très offensive sur la défense européenne, les crédits alloués à ce fonds « républicain » seraient divisés par deux si les propositions budgétaires présentées en décembre dernier étaient validées ! Cela briserait les ailes à ces premiers pas vers une autonomie de la défense européenne.

Un autre État tiers mérite en revanche un traitement particulier : le Royaume-Uni. Il a, certes, désormais quitté l'Union européenne depuis quelques jours, mais nous souhaitons rappeler la nécessité de maintenir une coopération solide, étroite et privilégiée en matière de défense et de sécurité entre l'Union européenne et le Royaume-Uni.

Nous pensons qu'un statut spécifique devrait être réservé au Royaume-Uni pour permettre sa participation aux actions financées par le Fonds européen de la défense. Ce point avait été laissé de côté dans la résolution adoptée par le Parlement européen au mois d'avril 2019, dans l'attente de la réalisation du Brexit, dont nul ne pouvait prédire les modalités pratiques. Dès lors que le Brexit est effectif, il importe d'ajuster les dispositions du projet de règlement pour trouver les voies et moyens du maintien d'une coopération solide avec le Royaume-Uni en matière d'industrie de défense.

La recommandation de la Commission sur le mandat de négociation concernant le nouveau partenariat avec le Royaume-Uni a été publiée hier. Elle évoque, lorsque c'est dans l'intérêt industriel et technologique de l'Union, la possibilité d'une participation des entreprises britanniques éligibles aux actions soutenues par le Fonds européen de la défense.

Tels sont les grands axes de cette proposition de résolution que nous vous présentons aujourd'hui et qui sera soumise demain à la commission des affaires étrangères. Nous avons souhaité étayer le volet de la défense tel qu'il figurait dans la proposition de résolution européenne de Jean Bizet et de Simon Sutour sur la cadre financier pluriannuel, car il viendra très prochainement sur la table des négociations lors du futur Conseil européen. Nous sommes un peu pris par le temps, mais nous avons la ferme volonté de donner à l'Union européenne les conditions nécessaires pour que son développement se poursuive.

M. Jean Bizet, président. - Le 9 mai prochain s'ouvrira, pour deux ans, la période de refondation de l'Union européenne. Se dessine, à la place d'une « Europe espace », une « Europe puissance ». À mes yeux, une Europe puissance suppose une monnaie, une économie et une armée. Or, concernant la défense, il serait utopique et inimaginable de se priver du jour au lendemain de l'appui de l'OTAN. C'est une politique en devenir qu'il est essentiel de pouvoir construire.

M. André Gattolin. - J'adresse mes félicitations à Gisèle Jourda et à Cyril Pellevat, d'autant que cette question de la défense européenne est un « serpent de mer ». On a un peu l'impression, si l'on se réfère aux discussions sectorielles que nous avons eues dans la perspective de ce cadre financier pluriannuel, d'être face à un jeu de dupes. En dépit des nombreux entretiens avec Bruxelles, notamment à propos de la politique spatiale, de la cybersécurité ou de la défense, qui laissaient à penser que, cette fois, des arbitrages positifs seraient rendus, il semblerait, au vu de ce qui a été proposé par la Finlande, que certains autres pays n'ont pas envie d'une défense européenne ou n'y ont pas intérêt.

Sans vouloir charger notre voisin allemand, j'ai toujours pensé que, pour lui, le commerce était l'outil le plus indispensable pour avoir une place inédite au sein de l'Europe et y exercer une influence importante, qui peut même devenir déséquilibrée du fait des manquements de la France, d'un désengagement du Royaume-Uni et des faiblesses de l'Italie. Toujours est-il que, face à des coûts structurels élevés pour la défense, certains estiment qu'il vaut mieux continuer à être sous protection américaine et qu'il s'agit d'un moindre mal au regard d'une puissance politique fondée sur la puissance commerciale.

Il est important que nous, parlementaires français, mettions l'accent sur l'importance de ces enjeux de défense. Le Président de la République avait lui-même indiqué en septembre 2017 la nécessité de la création d'un fonds européen de défense, et nous pourrions évoquer dans les visas son discours de la Sorbonne.

M. Jean Bizet, président. - C'est exact !

M. André Gattolin. - Il était d'ailleurs très écouté au niveau international.

Le point 53 énonce qu'il est nécessaire de réserver un statut spécifique au Royaume-Uni pour sa participation aux actions financées par le Fonds européen de défense. J'approuve totalement ce principe sur le fond. Néanmoins, il ne me semble pas approprié de l'évoquer ici.

Il faut éviter d'imposer des contraintes supplémentaires au négociateur en chef, Michel Barnier. Nous espérons aboutir à la définition d'un nouveau statut du Royaume-Uni à l'issue des négociations qui s'engagent. Il sera très difficile de mettre en place une défense européenne sans une forme de partenariat avec notre voisin outre-Manche. Pour autant, d'aucuns murmurent que la coopération avec le Royaume-Uni à la suite des accords de Lancaster House n'a pas été très forte, hormis pour l'intervention en Libye ou sur la question du nucléaire iranien, avec des avancées en matière de renseignement et de logistique. On peut dire que, sur les théâtres d'opérations extérieures, l'appui a été plus franc de la part des Danois, des Tchèques et des Polonais.

Si la coopération avec les Britanniques apparaît indispensable, il faut néanmoins faire attention car sinon nous aurons beaucoup de mal à refuser les demandes de pays tiers.

M. Pierre Laurent. - Si je comprends le calendrier qu'a rappelé M. le président, la PPRE n'a pas vocation à dépasser le stade de la discussion dans les deux commissions en raison du calendrier d'examen du cadre financier pluriannuel.

M. Jean Bizet, président. - Nous sommes en effet contraints par la réunion du Conseil européen extraordinaire qui aura lieu le 20 février. Mais il peut n'y avoir aucun résultat à l'issue de cette réunion.

M. Pierre Laurent. - C'est donc un message politique que l'on souhaite adresser.

Toute la PPRE s'appuie sur le fait que le Fonds européen de la défense sera mis au service de l'ambition d'une « autonomie stratégique européenne ». Or, pour l'heure, cette autonomie n'existe pas par rapport à l'OTAN ; ce sujet mérite pourtant une attention particulière compte tenu de la politique américaine, notamment sur la question palestinienne. En outre, les manoeuvres stratégiques de l'OTAN qui auront lieu au printemps seront entièrement dirigées contre la Russie et font droit à toutes les revendications des pays européens qui vont probablement s'opposer à l'émergence de ce fonds.

La définition même d'une autonomie stratégique européenne fait donc l'objet de nombreuses contradictions. Et au sein de l'Union européenne, les débats sont loin d'aboutir à des solutions. C'est pourquoi nous nous interrogeons sur l'opportunité d'investir massivement dans ce fonds sans avoir précisément éclairci cette ambition stratégique.

J'en viens aux industries européennes de défense. Puisqu'elles sont nombreuses en France, ce sujet nous concerne de près. Dans la proposition de résolution, on trouve « un principe de préférence européenne », tout de même extrêmement timide, ou la « réciprocité », mais de manière assez ambiguë. En matière de défense, les formules employées me semblent étonnantes, notamment à l'alinéa 48. Si l'on n'aborde pas les questions autrement, l'autonomie de la défense européenne sera un voeu pieux. C'est pourquoi nous ne pouvons pas vous suivre sur cette PPRE.

M. Pascal Allizard. - Je remercie nos deux collègues pour le travail qu'ils ont réalisé afin d'aboutir à cette PPRE. Je partage l'objectif de celle-ci, et je la voterai. Pour autant, ne soyons pas trop naïfs.

Tout d'abord, il me semble difficile de scinder les problèmes de la défense et ceux de l'industrie de défense. Pierre Laurent a déclaré que l'autonomie stratégique de l'Union européenne était inexistante. Je serai positif en disant qu'elle est balbutiante et doit être encouragée. De plus, le rapport à l'OTAN n'est pas réglé.

Ensuite, je citerai l'exemple tout récent de l'achat de F-35 américains par la Pologne. Réjouissons-nous que le logiciel de tir de cet avion ne fonctionne pas - j'ai trouvé cette information dans la presse - : il rate sa cible à tous les coups ! Cela étant, le programme du Système de combat aérien futur (SCAF) pose des difficultés en raison de divergences d'organisation entre la France et l'Allemagne : chez nous, le patron, c'est la Direction générale de l'armement (DGA) ; outre-Rhin, ce sont les industriels...

Concernant le Royaume-Uni, je suis d'accord avec la PPRE, car le Royaume-Uni, s'il a quitté l'Union européenne, demeure tout de même dans l'Europe. Il faut absolument faire vivre les accords de Lancaster House et développer le bilatéral, non pas celui de l'Union avec le Royaume-Uni, mais celui de la France avec notre partenaire !

Mme Gisèle Jourda, rapporteure. - Vous m'ôtez les mots de la bouche !

M. Pascal Allizard. - Ainsi, nous pourrons rééquilibrer nos relations avec l'Allemagne dès que la nécessité se fera sentir.

Quant à la coopération avec l'Allemagne, elle s'apparente aujourd'hui à un marché de dupes : pendant que les Allemands produisent et facturent, les Français tirent et, parfois, meurent...

L'objectif visé par la proposition de résolution européenne est bon, mais gardons-nous, je le répète, d'être naïfs !

M. Jean-François Rapin. - Les uns et les autres, nous dénonçons les coupes claires dans le budget européen, mais quelles alternatives proposons-nous ? La réalité budgétaire est là : faute de volonté, on sera loin de 1,30 % du RNB, et même de 1,20 % - sans doute entre 1,07 % et 1,04 %. Dans ces conditions, si nous adoptons une résolution européenne chaque fois qu'une baisse de financement est envisagée pour une politique, nous risquons d'entrer dans un cercle infernal... Tous les souhaits exprimés sont louables, mais, au-delà de la réflexion géostratégique, nous ne devons pas perdre de vue le bon sens budgétaire.

Mme Gisèle Jourda, rapporteure. - Je remercie nos collègues pour l'intérêt qu'ils portent à notre proposition de résolution.

Avec notre ancien collègue Yves Pozzo Di Borgo, nous avions déjà proposé la création d'un fonds européen de la défense, mais les plus éminents spécialistes nous avaient répondu que ce levier n'était pas actionnable. Je suis restée fidèle à cette idée, tout en ayant conscience de ses limites, surtout dans un domaine où les États sont souverains, ce qui d'ailleurs n'est pas remis en cause. Telle Pénélope, nous remettons l'ouvrage sur le métier...

À la vérité, ce projet dérange, parce qu'il consiste à faire avancer le canevas d'une défense européenne. L'Europe est née d'un rêve de paix qu'il nous appartient de défendre. Notre initiative peut sembler angélique, mais elle ne l'est pas, car il s'agit de poser un jalon vers le renforcement de l'autonomie stratégique européenne. L'Europe de la défense progresse à petits pas, certes, mais ne progressera pas du tout si nous, politiques, ne faisons rien.

Face aux menaces qui se multiplient, face au président Trump qui s'en prend au multilatéralisme et porte des coups au fonctionnement de l'OTAN, face aux puissances montantes que sont la Chine et l'Inde, face à l'apparition dans certains pays européens de pratiques contraires aux idéaux européens, nous ne devons pas abandonner notre objectif d'une Europe forte, d'une Europe puissance ! Il faut d'ailleurs saluer le volontarisme du Président de la République en la matière, exprimé notamment dans son discours de la Sorbonne.

M. Jean Bizet, président. - Quid de la proposition de modifier l'alinéa 53 ? La remarque de M. Gattolin est pertinente : nous devons veiller à ne pas gêner Michel Barnier.

M. André Gattolin. - Le mieux serait de supprimer la seconde partie de cet article - même s'il est évidemment souhaitable qu'un statut soit trouvé pour le Royaume-Uni.

M. Claude Kern. - Je suis d'accord : supprimons ce qui suit « Royaume-Uni ».

Mme Gisèle Jourda, rapporteure. - C'est en effet le plus simple.

M. Jean Bizet, président. - L'alinéa 53 est donc ainsi rédigé : « Rappelle qu'il est essentiel de maintenir une coopération solide, étroite et privilégiée en matière de défense et de sécurité entre l'Union et le Royaume-Uni ; ».

Il est sûr qu'un accord bilatéral particulier avec le Royaume-Uni est indispensable ; je fais confiance à la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées pour réfléchir à un Lancaster House de nouvelle génération.

Sur le plan budgétaire, les sommes en jeu sont beaucoup moins importantes en matière de défense que dans les domaines de la PAC et des fonds de cohésion. Toujours est-il que Charles Michel a clairement annoncé une possible réponse pour le 20 février. Il faudrait aussi réfléchir à des ressources propres, comme le préconisait le rapport Monti. Enfin, la suppression des rabais accordés à cinq États doit être engagée, même s'il faudra six ou sept ans.

M. André Gattolin. - S'agissant de ces rabais, soyons conscients qu'un rapport de force est engagé pour tenter de faire céder, notamment, la France et l'Italie.

M. Jean Bizet, président. - Il conviendrait aussi d'utiliser un coefficient déflateur un peu plus faible pour l'établissement des prévisions budgétaires du cadre financier sur les prochaines années, dans la mesure où l'inflation ne sera pas de 2 %.

Enfin, la question d'une conditionnalité de l'attribution des fonds de cohésion est posée.

M. Pascal Allizard. - D'expérience, je sais qu'il est très difficile de travailler avec les Allemands dans le domaine industriel, mais qu'ils y sont excellents, en matière à la fois d'organisation et de protection de leurs intérêts. Leur réseau de fournisseurs et de sous-traitants est également très important dans d'autres pays, ce qui offre des gisements de valeur ajoutée, dont il faut tenir compte dans les négociations. À nous d'être à la hauteur !

À l'issue du débat, la commission a adopté la proposition de résolution européenne, dans la rédaction suivante :

Proposition de résolution européenne
sur le fonds européen de la défense

(1)  Le Sénat,

(2)  Vu l'article 88-4 de la Constitution,

(3)  Vu le traité sur l'Union européenne, en particulier ses articles 42 à 46,

(4)  Vu le traité sur le fonctionnement de l'Union européenne, en particulier ses articles 310, 311 et 312,

(5)  Vu les conclusions du Conseil européen du 20 décembre 2013, du 26 juin 2015, du 15 décembre 2016, du 22 juin 2017, du 28 juin 2018, du 14 décembre 2018 et du 20 juin 2019 ;

(6)  Vu la proposition de résolution européenne n° 619 (2015-2016) sur les perspectives de la politique de sécurité et de défense commune (PSDC), présentée par Mme Gisèle JOURDA et M. Yves POZZO di BORGO au nom de la commission des affaires européennes du Sénat,

(7)  Vu le rapport n° 686 (2015-2016) de MM. Jacques GAUTIER et Daniel REINER, fait au nom de la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées, et la résolution européenne du Sénat n° 160 (2015-2016) du 21 juin 2016 sur les perspectives de la politique de sécurité et de défense commune (PSDC),

(8)  Vu le document intitulé « Vision partagée, action commune : une Europe plus forte - Une stratégie globale pour la politique étrangère et de sécurité de l'Union européenne », présenté par la Haute représentante de l'Union pour les affaires étrangères et la politique de sécurité et vice-présidente de la Commission européenne (HR/VP) le 28 juin 2016,

(9)  Vu le document de réflexion sur l'avenir de la défense européenne présenté par la Commission européenne le 7 juin 2017, COM(2017) 315,

(10)  Vu le discours du Président de la République Emmanuel Macron Pour une Europe souveraine, unie, démocratique, prononcé le 26 septembre 2017 à la Sorbonne,

(11)  Vu le rapport d'information de l'Assemblée nationale L'Europe de la défense et son articulation avec l'OTAN, n° 719 (quinzième législature) - 22 février 2018-, de MM. Pieyre-Alexandre ANGLADE et Joaquim PUYEO, fait au nom de la commission des affaires européennes,

(12)  Vu la proposition de règlement du Conseil fixant le cadre financier pluriannuel pour la période 2021-2027, présentée par la Commission européenne le 2 mai 2018, COM(2018) 322 final,

(13)  Vu la proposition de règlement du Parlement européen et du Conseil du 13 juin 2018 établissant le Fonds européen de la défense, COM(2018) 476 final,

(14)  Vu le règlement (UE) 2018/1092 du Parlement européen et du Conseil du 18 juillet 2018 établissant le programme européen de développement industriel dans le domaine de la défense visant à soutenir la compétitivité et la capacité d'innovation de l'industrie de la défense de l'Union,

(15)  Vu la résolution législative du Parlement européen du 18 avril 2019 sur la proposition de règlement du Parlement européen et du Conseil établissant le Fonds européen de la défense, COM(2018) 476 - C8-0268/2018 - 2018/0254(COD),

(16)  Vu le rapport d'information du Sénat Défense européenne : le défi de l'autonomie stratégique, (n° 626, 2018-2019) - 3 juillet 2019 -, de M. Ronan LE GLEUT et Mme Hélène CONWAY-MOURET, fait au nom de la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées,

(17)  Vu le document d'analyse n° 9 de la Cour des comptes européenne, La défense européenne, en date du 16 juillet 2019,

(18)  Vu la résolution du Parlement européen du 10 octobre 2019 sur le cadre financier pluriannuel 2021-2027 et les ressources propres : « il est temps de répondre aux attentes des citoyens »,

(19)  Vu le rapport d'information du Sénat Brexit : tous perdants, (n° 49, 2019-2020) - 10 octobre 2019 -, de MM. Jean BIZET et Christian CAMBON, fait au nom du groupe de suivi sur le retrait du Royaume-Uni et la refondation de l'Union européenne,

(20)  Vu les lettres de mission adressées par la présidente de la Commission européenne le 1er décembre 2019 au Haut représentant de l'Union pour la politique étrangère et de sécurité commune/vice-président de la Commission européenne, ainsi qu'au commissaire européen chargé du marché intérieur,

(21)  Vu le cadre de négociation du cadre financier pluriannuel assorti de chiffres publié par la présidence finlandaise du Conseil le 5 décembre 2019,

(22)  Vu le rapport du Parlement européen La mise en oeuvre de la politique de sécurité et de défense commune - rapport annuel, (2019/2135(INI) - 11 décembre 2019 -, de M. Arnaud DANJEAN, au nom de la commission des affaires étrangères,

(23)  Vu la proposition de résolution européenne du Sénat, (n° 273, 2019-2020) - 23 janvier 2020) -, de MM. Jean BIZET et Simon SUTOUR, au nom de la commission des Affaires européennes, sur le cadre financier pluriannuel de l'Union européenne (2021-2027),

(24)  Considérant que le contexte géostratégique et géopolitique a évolué de manière significative au cours des dernières années et que l'Union européenne doit faire face à de nombreuses menaces, y compris sous des formes nouvelles comme les attaques hybrides ou informatiques ;

(25)  Considérant l'importance des coûts des équipements et des coûts de recherche et de développement, en particulier pour les technologies de rupture, dans le secteur de la défense ;

(26)  Considérant l'ambition d'autonomie stratégique européenne portée par la « Stratégie globale pour la politique étrangère et de sécurité de l'Union européenne », présentée le 28 juin 2016 par la Haute représentante de l'Union pour les affaires étrangères et la politique de sécurité et vice-présidente de la Commission européenne (HR/VP) ;

(27)  Considérant que cette autonomie stratégique suppose que l'Union européenne renforce sa capacité opérationnelle autonome, sa capacité industrielle à produire les équipements nécessaires à ses forces et sa capacité politique à prendre des décisions opérationnelles lorsque les circonstances l'imposent ;

(28)  Considérant que le renforcement de l'autonomie stratégique européenne repose sur une augmentation des capacités des États membres et de leur budget de défense, ainsi que sur le renforcement de la base industrielle et technologique de défense européenne ;

(29)  Considérant les enjeux particuliers résultant, en matière de défense, du retrait du Royaume-Uni de l'Union européenne ;

(30)  Concernant l'inclusion du Fonds européen de la défense dans la nouvelle dynamique européenne de défense

(31)  Observe que les instruments de la politique de sécurité et de défense commune prévus par le traité de Lisbonne ont connu une mise en oeuvre progressive au cours des dernières années,

(32)  Prend note de la révision du plan de développement des capacités opérée en 2018, qui intègre le niveau d'ambition plus élevé de l'Union européenne en matière de sécurité et de défense, conformément à la stratégie globale pour la politique étrangère et de sécurité de l'Union européenne ;

(33)  Considère que l'examen annuel coordonné en matière de défense est un élément important pour structurer le processus européen de planification et renforcer la coopération au niveau de l'Union, en encourageant une plus grande transparence et le partage d'informations par les États membres et en leur permettant d'investir plus efficacement dans la défense ;

(34)  Salue la mise en oeuvre effective de la coopération structurée permanente en vue d'une coopération renforcée en matière de sécurité et de défense entre les États membres, qui permet à ceux qui le souhaitent de progresser plus vite sur des projets communs ;

(35)  Se félicite du lancement de l'action préparatoire sur la recherche en matière de défense et du programme européen de développement industriel dans le domaine de la défense, programmes pilotes dont le Fonds européen de la défense est un prolongement d'une ampleur budgétaire bien plus importante ; affirme la nécessité de tirer les enseignements opérationnels de la conduite de ces deux programmes pilotes pour la mise en oeuvre du Fonds européen de la défense, qui vient consolider le pilier budgétaire de la dynamique européenne de défense ;

(36)  Salue la création, au sein de la Commission européenne, d'une nouvelle direction générale de l'industrie de la défense et de l'espace, placée sous l'autorité du commissaire chargé du marché intérieur, qui confirme sur le plan de l'organisation institutionnelle la dynamique européenne de défense ;

(37)  Préconise, pour que cette dynamique européenne de défense produise des résultats efficaces, de renforcer la performance du processus de planification de l'Union européenne et la cohérence des actions des différentes structures impliquées dans ce processus, en tenant compte des observations formulées par la Cour des comptes européenne ;

(38)  Concernant l'objectif du Fonds européen de la défense

(39)  Soutient l'objectif général du fonds, tel que défini dans la résolution législative du Parlement européen du 18 avril 2019, visant à renforcer la compétitivité, l'efficacité et la capacité d'innovation du socle technologique et industriel européen de la défense dans toute l'Union, dès lors que ces éléments contribuent de manière importante à l'autonomie stratégique et à la liberté d'action de l'Union, en réduisant sa dépendance à l'égard de sources situées dans des États tiers et en améliorant la sécurité de son approvisionnement ;

(40)  Approuve les objectifs spécifiques visant à soutenir la recherche collaborative afin d'améliorer les performances de futures capacités, ainsi que le développement collaboratif de produits et de technologies se rapportant à la défense, afin de permettre une rationalisation des dépenses consacrées à la défense et d'éviter une fragmentation des produits et des technologies au sein de l'Union ;

(41)  Affirme l'importance de ce fonds pour permettre le financement de technologies de rupture pour la défense ;

(42)  Concernant les moyens nécessaires pour permettre au Fonds européen de la défense de répondre à l'objectif qui lui est assigné

(43)  Estime, au regard des objectifs qui précèdent, que les crédits consacrés à la mise en oeuvre du fonds européen de la défense présentent une véritable valeur ajoutée européenne ;

(44)  Souligne qu'ils doivent atteindre un niveau suffisant pour exercer un véritable effet de levier ;

(45)  Déplore vivement les propositions formulées par la présidence finlandaise du Conseil en décembre 2019, qui réduisent de près de moitié l'enveloppe proposée par la Commission européenne pour le Fonds européen de la défense, ce qui le priverait d'une réelle capacité à renforcer la base industrielle et technologique de défense européenne ;

(46)  Affirme qu'une telle réduction serait un contresens politique, au regard des ambitions affichées par la nouvelle Commission européenne, un contresens économique et un contresens stratégique ;

(47)  Insiste donc pour consacrer à ce fonds 11,453 milliards d'euros en prix 2018 pour la période 2021-2027, soit 13 milliards d'euros en euros courants, conformément à la proposition initiale de la Commission ;

(48)  Concernant les enjeux relatifs à la gestion opérationnelle de ce fonds

(49)  Juge nécessaire que les programmes financés par le Fonds européen de la défense répondent aux besoins futurs des armées européennes, plutôt qu'au souci d'assurer un juste retour aux industries nationales, et qu'ils bénéficient à des projets majeurs de recherche ou capacitaires, en cohérence avec l'ambition de renforcer l'autonomie stratégique européenne ;

(50)  Considère néanmoins, au regard du caractère stratégique de la recherche en matière de défense, que les États membres devront être étroitement associés au processus décisionnel pour garantir que les programmes financés par l'Union européenne répondent aux besoins stratégiques de la politique de sécurité et de défense commune et des États membres ;

(51)  Affirme l'importance de la préférence européenne, seule à même de favoriser une réelle autonomie de la base industrielle et technologique de défense européenne, et soutient donc pleinement le principe selon lequel, d'une part, les destinataires et sous-traitants participant à une action financièrement soutenue par le fonds sont établis dans l'Union européenne ou dans un pays associé et ne sont pas soumis au contrôle d'un pays tiers non associé ou d'une entité de pays tiers non associé et, d'autre part, que les infrastructures, installations, biens et ressources de ces destinataires et sous-traitants sont situés sur le territoire d'un État membre ou d'un pays associé pendant toute la durée de l'action, de même que leurs structures exécutives de gestion ;

(52)  Souligne que les dérogations à ce principe, permettant à une entité de pays tiers non associé ou contrôlée par un pays tiers non associé d'être éligible aux crédits du fonds dans les conditions limitatives prévues par la résolution législative du Parlement européen du 18 avril 2019, doivent répondre à des garanties assurant qu'une telle participation ne serait contraire ni aux intérêts de l'Union et de ses États membres en matière de sécurité et défense, ni aux objectifs du fonds ; salue en particulier le régime de protection de la propriété intellectuelle mis en place afin d'éviter que les droits de propriété intellectuelle sortent de l'Union européenne, ainsi que l'interdiction de faire sortir du territoire de l'Union des informations classifiées ; insiste pour que ces dérogations ne compromettent pas l'ambition du fonds et soient limitées au strict nécessaire ;

(53)  Observe que la mise en place de ce fonds ne ferme pas les marchés de défense européens aux entreprises d'États tiers ; invite, dans une logique de réciprocité, à veiller à l'ouverture des marchés de défense d'États tiers aux entreprises européennes ;

(54)  Rappelle qu'il est essentiel de maintenir une coopération solide, étroite et privilégiée en matière de défense et de sécurité entre l'Union et le Royaume-Uni ;

(55)  Invite le Gouvernement à faire valoir cette position dans les négociations au Conseil.