COM(2010) 379 final
du 15/07/2010
Examen dans le cadre de l'article 88-4 de la Constitution
Texte déposé au Sénat le 21/07/2010Examen : 11/02/2013 (commission des affaires européennes)
Justice et affaires intérieures
Texte E 5515
Conditions d'entrée et de séjour des
travailleurs
saisonniers en provenance de pays tiers
COM (2010) 379 final
(Procédure écrite du 11 février 2013)
La proposition de directive établissant les conditions d'entrée et de séjour des ressortissants de pays tiers aux fins d'un emploi saisonnier a été présentée par la Commission européenne en juillet 2010. Elle fait partie d'un ensemble de directives particulières visant certaines catégories de travailleurs extra-européens -outre les saisonniers, les travailleurs hautement qualifiés, les personnes transférées au sein de leur entreprise et les stagiaires rémunérés sont concernés -, en appui à la directive-cadre dite « Permis unique » (2011/98/UE). Ces directives ont pour objectif de développer une politique d'immigration légale de nature à répondre aux besoins structurels de l'économie européenne.
Le dispositif proposé par la Commission européenne
La proposition de directive sur les travailleurs saisonniers vise à définir des règles harmonisées, équitables et transparentes en matière d'entrée et de séjour des travailleurs saisonniers. Elle prévoit des mécanismes d'incitations et de garanties afin d'éviter qu'un séjour temporaire ne se transforme en séjour permanent. Il s'agit, par la mise en oeuvre d'un dispositif harmonisé et la promotion de la migration circulaire, de faire face aux besoins de main d'oeuvre saisonnière et de diminuer l'immigration illégale dans ce domaine par une gestion plus efficace des flux migratoires saisonniers.
Cette proposition de directive vise à introduire un permis de séjour et de travail pour les travailleurs saisonniers étrangers, sur présentation d'un contrat de travail ou d'une promesse ferme d'embauche, d'une assurance maladie et de l'engagement de l'employeur de fournir un logement décent en termes de confort et de prix dès lors que l'étranger acquitte un loyer. La durée de séjour autorisée serait de six mois par an.
Serait considéré comme un « travailleur saisonnier » au sens du projet tout ressortissant de pays tiers qui séjourne temporairement sur le territoire d'un Etat membre aux fins d'y exercer un emploi dans un secteur dont l'activité est soumise au rythme des saisons, sous couvert d'un ou plusieurs contrats de travail à durée déterminée qu'il conclut avec un employeur établi dans l'Etat membre.
La proposition prévoit une procédure d'admission accélérée, la décision devant être prise dans les trente jours suivant le dépôt de la demande.
Des dispositions facilitent la réadmission d'un travailleur saisonnier la saison suivante. Les Etats membres auraient ainsi la possibilité, soit de délivrer une carte pluriannuelle d'une durée triennale, soit de mettre en place une procédure simplifiée à l'intention de celles et ceux qui auraient déjà été précédemment admis en qualité de saisonnier.
Le travailleur saisonnier bénéficierait des droits suivants :
- la possibilité d'entrée et de séjourner sur l'ensemble du territoire de l'Etat membre qui a délivré le permis ;
- des conditions de travail en matière de salaire, de licenciement, de santé et de sécurité au travail applicables au travail saisonnier dans la législation de l'Etat membre qui a délivré le permis ;
- l'égalité de traitement avec les travailleurs nationaux en matière de liberté d'association et d'adhésion à un syndicat, de prestations de sécurité sociale et d'accès aux biens et aux services (à l'exclusion du logement social et des services de conseil offerts par les agence pour l'emploi).
La définition claire de ces droits devrait permettre de prévenir l'exploitation et de protéger la sécurité et la santé des travailleurs saisonniers ressortissants de pays tiers.
Les Etats membres pourraient continuer à appliquer des dispositions plus favorables découlant, soit du droit de l'UE (y compris les accords bilatéraux ou multilatéraux), soit d'accords bilatéraux ou multilatéraux conclus entre un ou plusieurs Etats membres et un ou plusieurs pays tiers. Serait également maintenu pour les Etats membres le droit d'adopter ou de conserver des dispositions plus favorables en ce qui concerne les garanties procédurales, l'hébergement, les droits attachés au titre de séjour prévu par la directive, les droits qu'elle confère au titulaire de ce titre et la simplification du dépôt des plaintes.
Position française et enjeux pour la France
Le dispositif communautaire proposé reprend pour l'essentiel le dispositif français créé par la loi n°2006-911 du 24 juillet 2006. La carte de séjour temporaire (CST) portant la mention « travailleur saisonnier », d'une durée de trois ans renouvelable, peut être délivrée à l'étranger qui présente un contrat de travail saisonnier de plus de trois mois et qui s'engage à maintenir sa résidence habituelle hors de France. Ce titre donne à son titulaire le droit de travailler en France pour une durée maximale de six mois par an. Dans ces conditions, la France, à l'instar de plusieurs de ses partenaires, s'est interrogée sur le bénéfice escompté de cette directive et sur l'opportunité que ce sujet soit traité au niveau communautaire. Ce texte peut néanmoins constituer une réelle plus-value pour certains Etats membres et permettre d'éviter des disparités dans ce domaine au sein de l'UE.
La France, au cours des négociations, a émis des réserves sur la définition de l'activité saisonnière et sur le champ d'application aux séjours de moins de trois mois. Le premier sujet a été pris en compte via une définition qui renvoie désormais vers la législation nationale la définition des secteurs susceptibles de faire appel à des travailleurs saisonniers. Les séjours de courte durée, quant à eux, ont donné lieu à des débats prolongés.
La proposition initiale de la Commission européenne ne semblait pas viser les courts séjours. Ces derniers ont été introduits explicitement dans les discussions sous présidence hongroise, en 2011.
La prise en compte des séjours de moins de trois mois aux fins de travail saisonnier conduit à introduire dans le texte des dispositions relatives aux visas (dont le cadre juridique est fixé par l'acquis Schengen) et à détailler les mesures applicables en la matière selon les cas et la durée du séjour. De plus, si le visa de court séjour Schengen devait également valoir autorisation de travail (procédure unique), les procédures de contrôle seraient très différentes de celles prévues pour les travailleurs saisonniers.
Au stade actuel des négociations, il semble bien que l'on s'oriente vers une extension de la directive aux courts séjours. Dans ces conditions, la France insiste sur le respect de deux principes essentiels. Elle souhaite ainsi que les travailleurs saisonniers bénéficient, quelle que soit la durée de leur séjour, des mêmes droits et de l'égalité de traitement avec les travailleurs nationaux, et que la stricte distinction entre le droit d'entrée sur le territoire et l'autorisation de travail soit préservée, afin de ne pas affecter l'acquis de Schengen. Pour assurer une bonne cohérence des dispositions de la directive avec l'acquis de Schengen, il convient de régler les questions suivantes : dispositions à prendre pour les ressortissants de pays tiers non soumis à visa Schengen, modalités de prolongation des séjours au-delà de trois mois, prise en compte de la charge administrative résultant de l'application de ces différentes dispositions, avec une attention particulière sur les modalités de prolongation des courts séjours.
Sous le bénéfice de ces remarques, la commission a décidé de ne pas intervenir plus avant sur ce texte.