COM(2008) 668 final
du 10/12/2008
Date d'adoption du texte par les instances européennes : 08/06/2011
Examen dans le cadre de l'article 88-4 de la Constitution
Texte déposé au Sénat le 22/12/2008Examen : 28/05/2010 (commission des affaires européennes)
Questions sociales et santé
Texte E 4188
Lutte contre les médicaments
falsifiés
(Paquet pharmaceutique)
COM (2008) 668 final
(Procédure écrite du 28 mai 2010)
Cette proposition de directive a pour objectif de lutter contre la falsification des médicaments en renforçant la sécurité de la chaîne d'approvisionnement et de fabrication des médicaments.
Les médicaments contrefaits sont des produits qui, selon les cas, ne contiennent aucun principe actif, des principes actifs mal dosés ou mal conditionnés, ou des principes actifs totalement différents de ceux devant être utilisés, et dont l'étiquetage n'est délibérément pas conforme à la réalité. Dans le meilleur des cas, il s'agit d'un mélange inoffensif, sans effet sur le patient ; dans le pire, le faux médicament peut contenir des substances toxiques qui mettent en danger la santé du patient.
La proposition de directive répond à une forte préoccupation des États membres de l'Union européenne face à un phénomène qui prend de plus en plus d'ampleur (4081 millions de médicaments contrefaits ont été saisis aux frontières de l'Union en 2007, soit 51% de plus qu'en 2006) et qui représente une activité hautement lucrative pour de nombreuses organisations criminelles internationales.
La Commission européenne propose de modifier la directive 2001/83/CE instituant un code communautaire relatif aux médicaments à usage humain afin d'éviter que des médicaments falsifiés soient introduits dans la chaîne d'approvisionnement légale. Les principales mesures préconisées sont les suivantes :
1) La Commission retient tout d'abord une définition large du médicament contrefait, allant au-delà de la question de la violation des droits de propriété intellectuelle. La proposition de directive s'applique à tout médicament falsifié « du point de vue de son identité, de son historique ou de sa source ». Cela permet donc de couvrir à la fois les médicaments protégés par des brevets et les génériques.
2) La Commission souhaite imposer des dispositifs de sécurité (numéro de série, cachet, etc) sur l'emballage des médicaments délivrés sur ordonnance. Les intermédiaires de la chaîne d'approvisionnement des médicaments, situés entre le fabricant et l'utilisateur final, auraient l'interdiction de manipuler les emballages (« enlever, modifier ou recouvrir les dispositifs de sécurité »). Le reconditionnement ou les manipulations en cours de chaîne seraient toutefois autorisés selon certaines conditions.
3) Au sein de la chaîne de distribution, les grossistes auront pour obligation de garantir la fiabilité de leurs partenaires commerciaux, tandis que les acteurs spécialisés dans le négoce ou le courtage (même si ceux-ci n'ont pas de contact direct avec le médicament) devront notifier leur activité aux autorités compétentes et veiller à ce que les médicaments concernés disposent d'une autorisation de mise sur le marché.
4) Les exigences seront relevées en ce qui concerne les importations de principes pharmaceutiques actifs (PPA) en provenance de pays tiers dont on ne peut établir que le cadre réglementaire garantit une protection suffisante de la santé publique en Europe.
5) Les fabricants de substances actives (ou PPA) implantés dans les États membres feront l'objet d'un contrôle de la part des fabricants de médicaments afin que ceux-ci soient assurés du respect des bonnes pratiques dans la fabrication des matières premières du médicament.
6) Des règles plus strictes seront érigées pour l'inspection des laboratoires producteurs de médicaments et des producteurs de subsistances actives, couplées à des mesures de transparence puisque les résultats des inspections seront publiés sur la base de données EudraGMP de l'Agence européenne des médicaments.
Les mesures prévues par la Commission ont été accueillies favorablement par les États membres. La France, globalement satisfaite, propose néanmoins quelques améliorations :
- elle souhaite que le principe des dispositifs de sécurité soit étendu aux médicaments non prescrits. En effet, en ne prévoyant des dispositifs de sécurité que pour les médicaments soumis à prescription, on s'expose à des difficultés pratiques importantes dans la mesure où la liste des médicaments sous prescription est variable d'un pays à l'autre et évolutive dans le temps : des médicaments nécessiteraient un dispositif de sécurité dans certains États et pas dans d'autres. En outre, le risque de falsification est le même pour les médicaments non prescrits et les dangers pour le public sont équivalents voire plus élevés du fait de l'automédication.
- en ce qui concerne la sécurisation des médicaments, la France souhaite que l'on différencie les dispositifs qui visent à permettre l'authentification, l'identification et l'inviolabilité de ceux qui en permettent la traçabilité. Cela permettrait aux États comme la France ou la Suède de conserver l'usage de la norme Data Matrix (la nouvelle génération de code-barres, en quelque sorte) dans le cadre des obligations de traçabilité, pour laquelle ils viennent d'opter récemment.
- la France a proposé également que, outre les substances actives, la proposition de directive prenne en compte les excipients. Les excipients sont ces substances qui confèrent une consistance donnée, ou d'autres caractéristiques physiques ou gustatives particulières, au médicament, tout en évitant toute interaction, notamment chimique, avec le principe actif. Les excipients sont sujets à la contrefaçon au même titre que les substances actives : leur sécurisation au sein de la chaîne de fabrication des médicaments doit donc être assurée de la même façon.
Au-delà de ces demandes particulières, il faut également savoir que les débats au sein du Conseil ainsi qu'au Parlement européen ont permis d'évoquer la question de la vente de médicaments sur Internet, le réseau étant un vecteur important de la diffusion de médicaments falsifiés. Le Parlement européen est favorable à une législation européenne en la matière ; les États, pour la plupart, souhaitent conserver leurs prérogatives. En tout état de cause, la France a indiqué qu'elle ne souhaitait pas se voir imposer, à la faveur de l'adoption de cette proposition de directive sur les médicaments falsifiés, des mesures visant à autoriser la mise en place de pharmacies sur Internet. Logiquement, en raison de l'opposition de plusieurs États, cette question ne devrait pas faire partie des problématiques visées par la future directive sur les médicaments falsifiés. Toutefois, la Commission européenne préparerait une initiative législative distincte qui ne se limiterait pas à la question de la contrefaçon, dans le but de répondre aux préoccupations du Parlement européen.
Sous le bénéfice de ces observations, la commission a décidé de ne pas intervenir plus avant sur ce texte qui renforce le dispositif européen de lutte contre les médicaments falsifiés.