COM (2007) 861 final
du 21/12/2007
Date d'adoption du texte par les instances européennes : 24/09/2008
Examen dans le cadre de l'article 88-4 de la Constitution
Texte déposé au Sénat le 09/01/2008Examen : 13/06/2008 (délégation pour l'Union européenne)
Institutions européennes
Prolongation temporaire de
l'Agence européenne
chargée de la sécurité des
réseaux et de l'information (ENISA)
Texte E 3751 - COM
(2007) 861 final
(Procédure écrite du 13 juin 2008)
C'est en 2004 que l'Agence européenne chargée de la sécurité des réseaux et de l'information (ENISA) a été instituée. Avec le développement de l'informatique et des réseaux et la prise de conscience de la gravité d'éventuelles « attaques » des systèmes d'information, cette création visait à renforcer les capacités européennes de prévention dans ce domaine. L'idée était d'instaurer une coopération transfrontière entre États membres, de développer des capacités d'assistance et de conseils.
Compte tenu de la spécificité du secteur, la Commission avait proposé de recourir à une agence. La formule de l'agence décentralisée, dotée d'une personnalité juridique distincte des institutions communautaires, répond à une logique d'externalisation de tâches particulières de nature technique ou scientifique que la Commission ne peut faire exécuter par ses propres services. L'ENISA correspond parfaitement à ce cas de figure puisqu'il s'agit de renforcer la capacité de défense informatique de l'Union européenne.
Selon la formule habituelle, l'acte de création de l'agence était assorti d'une clause de révision à mi-parcours. L'agence a été créée en 2004 pour une durée de cinq ans, mais la Commission devait procéder à une évaluation dans un délai de trois ans.
Cette évaluation à mi-parcours a eu lieu en 2007. Elle a été confiée à des « experts indépendants » qui ont « validé le raisonnement à la base de la création de l'Agence » et suggéré de prolonger le mandat, après le 13 mars 2009, échéance prévue dans l'acte fondateur.
Le texte proposé suit cette recommandation et prévoit en effet de prolonger l'agence jusqu'en 2011.
Pourquoi 2011 ? 2011 seulement ? Au risque de renouveler l'exercice dans quelques années ? Parce que, en parallèle à ce réexamen, la Commission a proposé la création en 2011 d'une « autorité européenne du marché des communications électroniques », dont la compétence engloberait celle de l'actuelle ENISA. Ainsi, l'ENISA serait en quelque sorte absorbée par la future autorité européenne.
Que penser de cette initiative ?
Formellement, ce texte assure la transition entre l'actuelle ENISA et la future « autorité européenne ». La prolongation du mandat de l'agence est par conséquent une mesure de bon sens qui appelle peu de commentaires.
On pourra néanmoins s'interroger sur ce projet de glissement, d'absorption par une future « autorité européenne ».
Il ne faut pas cacher que la création d'agences suscite de plus en plus de critiques de la part de certains États membres, qui y voient un risque de dérive administrative et institutionnelle.
Sur le plan budgétaire, on pourra relever par exemple que la part des dépenses administratives au sein du budget de l'agence ENISA (6,8 millions d'euros en 2005, 8,2 millions d'euros en 2008) est passée de 45 % à 59 % en quatre ans. La création d'agences s'accompagne de recrutements, de nominations de personnels expatriés, de recherche de locaux, de compétition entre États membres pour obtenir le siège de l'agence... Un bilan exhaustif économique et financier n'a pas été fait.
Sur le plan institutionnel, la multiplication des agences concourt à un certain démembrement fonctionnel de la Commission. S'agit-il d'une politique délibérée ou d'une adaptation au coup par coup, sans ligne directrice clairement définie ?
Ces questions sont implicites dans les positions critiques présentées par certaines délégations dans le cadre du réexamen du cadre financier pluriannuel. Pour la France (contribution officielle au réexamen du cadre financier) : « l'exigence de bonne gouvernance impose de respecter le principe d'unité budgétaire (...). Un effort doit conduire à limiter les instruments ad hoc en marge du budget (...). Le recours aux agences doit reposer sur l'absence de doublon avec les moyens administratifs existants (...). » Une autre contribution de la CSU allemande est encore plus claire : « La création effrénée d'agences de toutes sortes doit prendre fin (...). Il faut s'assurer de la valeur ajoutée de leur activité, de l'exécution efficace de leur mission (...) ».
Il faut donc bien être conscient du contexte plutôt tendu dans lequel intervient cette proposition de règlement. Le passage du statut d'« agence » à celui d'« autorité » lui assure une pérennité. Aurait-elle été menacée sinon ? On retiendra que les experts indépendants chargés de cette évaluation à mi-parcours ont « confirmé la validité du raisonnement politique à la base de la création de l'Agence et les objectifs originaux », mais, apparemment, ne se sont prononcés ni sur le fonctionnement ni sur les résultats.
La délégation doit être vigilante sur l'évolution prochaine des agences décentralisées européennes. Dans le cas présent, elle a décidé de ne pas intervenir plus avant sur ce texte.