COM (2004) 165 final
du 12/03/2004
Examen dans le cadre de l'article 88-4 de la Constitution
Texte déposé au Sénat le 08/06/2004Examen : 15/07/2004 (délégation pour l'Union européenne)
Justice et affaires intérieures
Prévention de la
criminalité
Texte E 2606 - COM (2004) 165 final
(Procédure écrite du 15 juillet 2004)
Cette communication de la Commission européenne, datée du 25 mars 2004, est consacrée à la prévention de la criminalité dans l'Union européenne. Il s'agit de la seconde communication portant sur ce sujet puisque la Commission avait déjà adopté une première communication sur la prévention de la criminalité le 29 novembre 2000. Celle-ci avait donné lieu à la mise en place de plusieurs instruments tels que le Forum européen de prévention du crime organisé, le Réseau européen de prévention de la criminalité et le programme communautaire de financement « Hippocrate ». Cependant, alors que jusqu'à présent l'action communautaire en matière de prévention de la criminalité se limitait essentiellement au crime organisé, le texte E 2606 porte sur la prévention du crime non organisé.
Il s'agit, en effet, pour la Commission européenne, de couvrir la criminalité ordinaire, comme, par exemple, les cambriolages domestiques, les vols dans les véhicules ou dans la rue ou encore les voies de fait. Il s'agit aussi de viser les « comportements anti-sociaux » comme « le tapage, les adolescents traînant dans la rue, les personnes ivres ou bruyantes, les déchets ou ordures répandus sur le sol, un environnement et des logements dégradés ». Il s'agit, enfin, de lutter contre le sentiment d'insécurité, par exemple en renforçant l'éclairage public.
Certes, la Commission européenne reconnaît dans sa communication la responsabilité première des États membres en matière de prévention. Elle estime toutefois que certaines actions de coopération doivent être menées à l'échelon de l'Union européenne. Pour la Commission, la prévention de la délinquance de masse devrait, en effet, « constituer un domaine politique à part entière dans l'Union européenne ».
Ainsi, la Commission considère que l'Union européenne devrait accomplir les tâches suivantes :
- procéder à un échange d'expériences entre responsables politiques et experts de la prévention ;
- définir et arrêter d'un commun accord des actions prioritaires ;
- convenir des politiques et mesures en matière de prévention de la criminalité dont l'efficacité a été démontrée (inventaire des bonnes pratiques) ;
- convenir de méthodologies uniformes pour l'élaboration, la mise en oeuvre et l'évaluation des politiques de prévention ;
- sensibiliser davantage la population de l'Union européenne à l'utilité de la prévention de la criminalité ;
- convenir de recherches ;
- lancer des projets communs de prévention ;
- suivre et évaluer les politiques nationales de prévention.
Afin de réaliser ces différents objectifs, la Commission européenne envisage notamment d'institutionnaliser le Réseau européen de prévention de la criminalité et d'augmenter ses moyens, tant financiers qu'en matière d'effectifs, d'instituer un mécanisme d'évaluation et de généraliser le « prix européen de prévention de la criminalité ». La Commission européenne a donc l'intention de soumettre, d'ici à la fin de l'année, des propositions pour mettre en oeuvre ces différentes mesures.
Créé le 28 mai 2001, le Réseau européen de prévention de la criminalité (REPC) a pour objectifs de faciliter la coopération, les échanges d'informations et d'expériences entre les États membres, les organisations internationales, la Commission et d'autres réseaux spécialisés dans les questions liées à la prévention de la criminalité. Il a notamment organisé une conférence au Danemark, en octobre 2002, sur l'échange de bonnes pratiques sur les questions de la délinquance chez les jeunes et les minorités ethniques, les cambriolages domestiques et les vols liés à la drogue. La Commission européenne estime dans sa communication que le fonctionnement de ce Réseau doit être considérablement amélioré car « des difficultés majeures résultent de l'absence de structure institutionnelle du Réseau, de l'insuffisance de son budget et de l'absence de règles financières claires ». La Commission européenne considère donc que « le Réseau devrait bénéficier du budget communautaire (...) ainsi que d'un secrétariat doté d'un personnel suffisant ».
Établi le 7 juillet 2001 pour deux années, le programme « Hippocrate » était destiné à encourager la coopération entre tous les organismes publics ou privés des États membres participants à la prévention de la criminalité. En 2001, sur soixante propositions, vingt-trois projets ont bénéficié d'un soutien financier. Parmi ces projets, on peut citer notamment la coopération entre les secteurs public et privé, le hooliganisme et l'urbanisme au service de la lutte contre la criminalité. Sur proposition de la Commission, le Conseil a adopté, le 22 juillet 2002 un programme-cadre AGIS qui a remplacé le programme Hippocrate. En 2003, trente projets de prévention de la criminalité ont été cofinancés. Parmi ces projets, on peut citer : la conception d'environnements urbains sûrs, les coûts de la criminalité et leur répartition.
Le prix européen de prévention de la criminalité (ECPA) est une initiative prise par les Pays-Bas, la Belgique et le Royaume-Uni en 1997. L'idée à l'origine de cette initiative était d'encourager les acteurs de la prévention de la criminalité en sélectionnant chaque année les deux meilleurs projets pour l'attribution du prix. Depuis sa création, six autres États membres (Danemark, France, Suède, Portugal, Grèce et Finlande) se sont associés à cette initiative. Ce prix a bénéficié en 2002 une aide financière de la Communauté.
La communication de la Commission européenne apparaît, sur bien des aspects, problématique au regard du respect du principe de subsidiarité. En effet, comme le reconnaît elle-même la Commission européenne, « puisque la criminalité de masse se produit au niveau local, les politiques ne peuvent être efficacement mises en oeuvre qu'à ce niveau, en étant adaptées aux spécificités locales ou régionales. Il incombe donc aux États membres d'assurer la mise en oeuvre de politiques efficaces de prévention de la criminalité à tous les niveaux de leur territoire ». Par ailleurs, la « valeur ajoutée » d'une éventuelle action communautaire en matière de prévention de la criminalité non organisée peut être sujette à caution au regard de l'expérience du Réseau européen de prévention de la criminalité qui, de l'aveu même de la Commission, ne paraît pas concluante.
Compte tenu de ces éléments, la délégation a appelé le Gouvernement à demander le respect du principe de subsidiarité lors de l'examen des différentes mesures envisagées par la Commission européenne à la suite de cette communication.