du 20/10/2000
Date d'adoption du texte par les instances européennes : 14/12/2000
Examen dans le cadre de l'article 88-4 de la Constitution
Texte déposé au Sénat le 07/11/2000Examen : 15/11/2000 (délégation pour l'Union européenne)
Budget communautaire
Texte E 1584
(Réunion du 15 novembre 2000)
Communication de M. Denis Badré sur la lettre rectificative n° 2 à l'avant-projet de budget des Communautés européennes pour 2001
Notre délégation est saisie en urgence d'une proposition de lettre rectificative à l'avant-projet de budget des Communautés pour l'exercice 2001.
Je vous rappelle qu'une première lettre rectificative a été présentée au mois de septembre par la Commission, qui demandait la création de 400 postes de catégorie A pour accompagner le redéploiement de ses activités, notamment vers la politique extérieure commune de sécurité et de défense.
La texte que nous avons à examiner aujourd'hui est la lettre rectificative « traditionnelle », qui ajuste les prévisions de recettes et de dépenses agricoles faites au printemps lors de l'élaboration de l'avant-projet de budget initial. Ce texte à caractère technique ne soulève pas vraiment de difficultés, mais il m'a paru mériter quand même quelques observations.
1. Du bon usage de la « cagnotte » européenne
Un surcroît de recettes de 900 millions d'euros par rapport aux prévisions initiales est constaté par la Commission. Selon la règle d'usage, il sera restitué aux Etats membres en s'imputant sur leurs contributions au prochain exercice budgétaire communautaire.
Je constate que, sur ce point, les règles européennes sont plus rigoureuses que les règles nationales : cette « cagnotte » communautaire générée par la forte croissance des pays de l'Union européenne ne peut pas être affectée à des dépenses nouvelles, ni même reportée d'un exercice budgétaire sur l'autre.
2. Les bénéfices inattendus de la chute de l'euro
Une économie de 932 millions d'euros est constatée par la Commission sur les dépenses d'orientation agricoles. Cette économie importante s'explique, dans une certaine mesure, par une tenue des marchés agricoles internationaux meilleure que prévue, mais surtout par la chute continue de l'euro, qui réduit mécaniquement les cours d'intervention agricoles.
Ainsi, à quelque chose malheur est bon. Il est toutefois permis de s'étonner de cet ajustement prévisionnel alors que, de l'avis général, le cours de l'euro est sous-évalué de 20 à 25 % au regard des fondamentaux de l'économie européenne. Ou alors, il faut croire que la Commission n'a guère confiance dans l'efficacité des interventions de la Banque centrale européenne...
Mais sa proposition prend déjà en compte cette objection, puisqu'elle se cale sur l'hypothèse d'un euro à 0,91 dollar en moyenne sur l'année 2001, soit un cours supérieur à son cours actuel.
3. L'hypothèque de la maladie de la vache folle
La révision du montant des dépenses agricoles proposée par la Commission apparaît raisonnable. Elle n'est d'ailleurs pas contestée par la France, à l'exception de la coupe portant sur l'organisation commune de marché (OCM) des fruits et légumes, d'un montant de 130 millions d'euros. Cette coupe apparaît contradictoire avec le principe de neutralité budgétaire présidant à la réforme en cours de cette OCM, qui vous a été présentée la semaine dernière par procédure écrite (texte E 1518).
En revanche, ce qui pourrait poser problème dans la discussion du budget communautaire pour 2001, ce sont les conséquences tirées par la Commission de cette baisse des dépenses agricoles. En effet, la Commission fait valoir que ces économies devraient permettre de redéployer des crédits de la rubrique 1 « dépenses d'orientation agricoles », vers la rubrique 4 « actions extérieures », afin de financer la reconstruction de la Serbie démocratisée.
Mais la révision des perspectives financières découlant de ce redéploiement de crédits pose un problème de principe. Le Conseil devrait camper sur son refus d'y toucher, et proposer de financer en 2001 l'aide exceptionnelle à la Serbie grâce à « l'instrument de flexibilité », d'un montant maximal de 200 millions d'euros, comme cela avait été le cas pour le Kosovo en 1999 et 2000.
De toute façon, les économies constatées sur les dépenses agricoles restent hypothéquées par les développements futurs de la maladie de la vache folle. Pour l'instant, l'accroissement de 82 millions d'euros des crédits consacrés à la viande bovine prévu par la lettre rectificative devrait suffire à faire face aux besoins.
Mais on ne peut pas exclure qu'il soit nécessaire d'ouvrir en cours d'exercice, par la procédure du budget rectificatif et supplémentaire, des montants de crédits bien plus considérables pour soutenir les producteurs européens de viande bovine.
Compte rendu sommaire du
débat
consécutif à la communication
M. Jean-Pierre Fourcade :
Quelle est la part de la contribution de la France dans le budget européen ?
M. Denis Badré :
Schématiquement, le montant du budget communautaire est de l'ordre de 100 milliards d'euros - 93 milliards exactement - et la contribution française est de l'ordre de 100 milliards de francs. Soit une part de la France dans les ressources de l'Union européenne d'environ 16 %.
Sous l'angle national, la contribution au budget communautaire représente environ 6 % des recettes fiscales, ou 1 % du PIB.
En ce qui concerne l'exécution des dépenses structurelles de l'Union, je vous rappelle que le reste à liquider s'élève à 40 milliards d'euros, ce qui correspond à un an et demi de retard en engagements. Ceci explique que la contribution de la France pour 2001, qui est actuellement fixée à 99,6 milliards de francs, passera vraisemblablement à 102 milliards de francs, mais sera exécutée in fine à 95 milliards de francs. Ces approximations successives ne sont guère satisfaisantes.
Les deux grandes masses du budget européen sont la politique agricole commune (PAC) et les fonds structurels. Pour la France, la PAC représente environ 40 milliards de francs de contribution, mais entraîne 60 milliards de francs de « retours ». A l'inverse, les politiques structurelles représentent environ 30 milliards de francs de contribution, mais entraînent 10 milliards de francs de « retours » seulement. C'est logique, puisque la France est à la fois un pays riche et un pays agricole. Au total, la somme des deux politiques est proche de zéro.
M. Jean-Pierre Fourcade :
Nous pouvons donc supprimer tout le budget européen !
M. Denis Badré :
Certes, en termes purement comptables, ce serait neutre pour la France. Mais cette analyse prouve simplement que le budget communautaire est un juste reflet de l'intégration croissante de l'Union européenne, et forme un tout bien lié. Chaque Etat membre y trouve son avantage, tout en contribuant à la mesure de sa richesse.
Le vrai problème est qu'il y a une discordance structurelle entre les dépenses, qui sont votées en codécision par le Parlement européen, et les recettes, qui sont automatiquement agréées par les parlements nationaux.
M. Robert Del Picchia :
Je serais curieux de connaître le montant exact des engagements budgétaires de l'Union européenne dans la région des Balkans.
M. Denis Badré :
Sur ce point, nous sommes encore actuellement dans le flou, tant sur l'imputation budgétaire des crédits promis, que sur les montants nécessaires.
Sous les réserves soulevées par le rapporteur, l'adoption de la lettre rectificative n° 2 à l'avant-projet de budget des Communautés européennes pour 2001 n'appelle pas d'objection de la part de la délégation.