COM (2000) 392 final
du 12/07/2000
Date d'adoption du texte par les instances européennes : 07/03/2002
Examen dans le cadre de l'article 88-4 de la Constitution
Texte déposé au Sénat le 25/09/2000Examen : 13/11/2001 (délégation pour l'Union européenne)
Télécommunications
Communication de M. Simon Sutour
sur le « Paquet
Télécoms »
Textes E 1548 à
E 1554 et E 1630
COM (2000) 384 final à COM (2000)
386 final,
COM (2000) 392 final à COM (2000) 394 final,
COM
(2000) 406 final, COM (2000) 407 final
et COM (2000) 748 final
(Réunion du mardi 13 novembre 2001)
Le « Paquet Télécoms » présenté par la Commission européenne le 12 juillet 2000 est un ensemble de textes qui comprend deux volets distincts :
1. D'une part, une proposition de directive concernant le service universel et les droits des utilisateurs au regard des réseaux et services de communications électroniques ;
2. D'autre part, un ensemble formé par une proposition de directive relative à un cadre réglementaire commun pour les réseaux et les services de communications électroniques, assortie de six propositions de textes à caractère technique :
- une proposition de directive relative à l'accès aux réseaux de communications électroniques et aux installations associées ;
- une proposition de directive relative à l'autorisation de réseaux et de services de communications électroniques ;
- une proposition de directive relative à la concurrence dans les marchés des services de communications électroniques ;
- une proposition de directive concernant le traitement des données à caractère personnel et la protection de la vie privée dans le secteur des communications électroniques ;
- une proposition de décision relative à un cadre réglementaire pour la politique en matière de spectre radioélectrique dans la Communauté européenne ;
- une proposition de règlement relative au dégroupage de l'accès à la boucle locale.
Cet ensemble de textes est impressionnant, mais constitue néanmoins une simplification, puisqu'il est appelé à se substituer aux vingt-cinq directives qui régissent actuellement le secteur des télécommunications.
Je vous ai déjà présenté la proposition de règlement relative au dégroupage de l'accès à la boucle locale lors de ma précédente communication du 25 novembre 2000. Il y avait une urgence particulière à examiner ce texte en premier car, bien qu'entré officiellement en vigueur le 1er janvier 2001, il a été appliqué en France par anticipation, en vertu d'un décret en date du 22 septembre 2000.
Un an après, le bilan du dégroupage reste maigre. L'offre tarifaire faite par France Télécom, bien qu'elle ait été baissée d'office par l'Autorité de régulation des télécommunications (ART), est encore jugée trop élevée par les opérateurs concurrents. Alors que les centres de dégroupages nécessaires ont été équipés par France Télécom, quatre opérateurs seulement ont décidé de se lancer, sur 200 sites concentrés dans les grandes métropoles (35 sites dans Paris intra muros)
Pour le reste du « Paquet Télécoms », la négociation a avancé rapidement à l'issue des trois étapes importantes qu'ont représenté les Conseils Télécommunications des 4-5 avril, des 27-28 juin et des 15-16 octobre 2001. L'adoption définitive des textes est espérée avant la fin de l'année.
I. LE CONTEXTE DU MARCHÉ DES TÉLÉCOMMUNICATIONS
La nouvelle terminologie de « communications électroniques » retenue par la Commission recouvre à la fois les télécommunications et les services de communication audiovisuelle, c'est-à-dire tous les réseaux terrestres et satellitaires, avec ou sans fil. Il s'agit du réseau téléphonique public commuté, du réseau internet, de la télévision par câble et des réseaux mobiles et terrestres de radiodiffusion.
Le marché des communications électroniques, qui est évalué à 200 milliards de francs pour la France, a connu des années d'euphorie, avec des taux de croissance à deux chiffres. L'année 2001 marque un retournement de conjoncture, qui a des répercussions sur la capitalisation boursière des entreprises du secteur. Les incertitudes liées à l'UMTS, la téléphonie mobile de troisième génération, freinent le rétablissement de la situation.
Les communications électroniques sont une industrie fortement capitalistique, où le jeu des économies d'échelle est important, ce qui ne la prédispose pas à la concurrence. Il s'agit aussi d'un marché segmenté. Certains secteurs, comme la téléphonie mobile, sont déjà très ouverts à la concurrence, tandis que d'autres, comme la téléphonie fixe, ne le sont encore que très partiellement - essentiellement sur les communications à longue distance.
Enfin, il s'agit d'un marché en transition, où le passage d'une situation de monopole à une situation de concurrence s'opère par l'intermédiaire d'une situation d'oligopole, qui pourrait être appelée à durer.
II. LE CADRE RÉGLEMENTAIRE GÉNÉRAL
1. L'application d'une pleine concurrence
La proposition de directive relative à la concurrence dans les marchés des services de communications électroniques vise à codifier et à simplifier dans un texte unique les cinq directives de libéralisation successivement adoptées depuis 1990. En pratique, la pleine concurrence a été introduite dès la directive 96/19/CE, qui a imposé aux Etats membres l'abolition des droits exclusif ou spéciaux. Le seul apport de ce texte concerne le marché des satellites, qui sera à son tour libéralisé.
2. Les pouvoirs des Autorités réglementaires nationales
La proposition de directive relative à un cadre réglementaire commun fixe les obligations incombant aux autorités réglementaires nationales.
Les Etats membres sont tenus de garantir l'indépendance des Autorités réglementaires nationales (ARN), qui doivent exercer leurs pouvoirs de manière impartiale et transparente. Leurs décisions doivent être susceptibles de recours. En France, l'autorité réglementaire est exercée à la fois par l'Autorité de régulation des télécommunications (ART), et par le Conseil de la concurrence, ce qui peut être source d'insécurité juridique pour les opérateurs. Les ARN doivent prendre toutes les mesures raisonnables visant à la réalisation de l'objectif fixé par la proposition de directive, à savoir l'instauration d'un marché ouvert et concurrentiel. Ces mesures doivent être proportionnées à cet objectif et respecter un impératif de neutralité technologique. La même proposition de directive prévoit par ailleurs des modalités de résolution par les ARN des litiges intervenant entre les entreprises.
3. L'attribution des licences
La proposition de directive relative à l'autorisation de réseaux et de services vise à remédier à la situation actuelle qui se caractérise par un assemblage disparate de quinze régimes nationaux très différents.
Ce texte propose de mettre en place une autorisation de portée générale, les seules exceptions à ce principe concernant la protection de la santé, de l'ordre public ou de la sécurité publique. Une fois autorisées, les entreprises sont habilitées à fournir des services de communications électroniques et à négocier l'interconnexion avec d'autres fournisseurs dans n'importe quelle partie de la Communauté.
Les opérateurs que j'ai auditionnés accueillent très favorablement cette simplification des divers régimes d'autorisation. Cette harmonisation juridique tire les conséquences de la convergence technologique des différents modes de communications électroniques.
Les droits d'utilisation sont soumis uniquement à des conditions répertoriées en annexe de la directive, concernant par exemple une participation au financement du service universel, l'interopérabilité des réseaux, l'accessibilité et la portabilité des numéros, les règles de protection de la vie privée ou plus spécifiquement la protection des mineurs. Des taxes administratives peuvent être mises à la charge des entreprises au titre de l'autorisation générale qui leur est accordée. A l'issue du Conseil Télécommunications des 4-5 avril 2001, les quinze Etats membres ont supprimé l'exigence d'une répartition de ces taxes entre les entreprises en fonction de leurs chiffres d'affaires, pour s'en tenir à une logique de redevance. Les obligations spécifiques qui peuvent être imposées aux « opérateurs puissants sur le marché » sont distinctes juridiquement des obligations et des droits visés par l'autorisation générale.
4. Les obligations des « entreprises puissantes sur le marché »
La proposition de directive relative à un cadre réglementaire commun définit les entreprises considérées comme puissantes sur le marché : c'est le cas d'une entreprise qui se trouve, individuellement ou conjointement avec d'autres, dans une position de force économique qui lui permet de se comporter, dans une mesure appréciable, de manière indépendante de ses concurrents et de ses clients.
La même proposition de directive prévoit une procédure d'analyse du marché. Une ARN qui souhaite utiliser des définitions de marchés qui en diffèrent doit obtenir au préalable l'accord de la Commission. Le texte ne précise pas le pourcentage de parts de marché au-delà duquel il y aurait automatiquement position dominante, mais dans ses lignes directrices la Commission avance un seuil de 40 %, au-delà duquel il y aurait présomption de position dominante.
A l'issue du Conseil Télécommunications des 4-5 avril 2001, les quinze Etats membres ont décidé d'introduire dans la proposition de directive cadre le concept de « dominance collective ». Les ARN apprécieront, selon la méthode du faisceau d'indices, si deux ou plusieurs entreprises exercent une dominance collective, à partir des lignes directrices de la Commission et d'une liste de critères répertoriés en annexe II du texte : degré de maturité du marché ; croissance stagnante de la demande ; faible élasticité de la demande ; homogénéité du produit ; structures de coûts semblables ; absence d'innovations technologiques ; absence de capacités excédentaires ; liens informels entre les entreprises ; possibilités réduites de concurrence par les prix...
La proposition de directive relative à l'accès est sans doute le texte le plus contraignant pour les opérateurs historiques. Elle définit l'accès comme « la mise à disposition d'une autre entreprise, dans des conditions bien définies et de manière exclusive ou non exclusive, de ressources et/ou de services en vue de la fourniture de services de communications électroniques ». Ce texte fixe les droits et obligations des entreprises qui possèdent ou exploitent les réseaux, et de celles qui souhaitent s'y interconnecter ou y accéder. Il prévoit que les ARN ont le pouvoir d'imposer des obligations aux opérateurs désignés comme puissants sur le marché, en termes de respect des principes de transparence, de non-discrimination, de séparation comptable, de contrôle des prix et de comptabilisation des coûts.
5. La coordination de l'action des ARN
Une harmonisation informelle existe déjà entre les ARN, à travers l'action du Groupe des régulateurs indépendants.
L'article 6 de la proposition de directive relative à un cadre réglementaire commun instaure un mécanisme de coordination, qui fait obligation aux ARN d'organiser une consultation lorsqu'elles prennent des décisions affectant des tiers. Si une ARN envisage de prendre une mesure qui aura un impact significatif sur le marché, elle informe ses homologues et la Commission. Celles-ci disposent alors d'un mois pour réagir.
Initialement, ce texte accordait un droit de veto à la Commission, qui pouvait exiger d'une ARN la modification ou le retrait d'une mesure qu'elle aurait jugée injustifiée. Mais, lors du Conseil Télécommunications des 4-5 avril 2001, les quinze Etat membres ont unanimement rejeté cette tutelle de la Commission sur les ARN. Ils n'ont reconnu à la première que le pouvoir d'émettre des avis circonstanciés sur les décisions des secondes. La présidence belge vient de proposer un projet de compromis qui maintiendrait un droit de veto de la Commission sur certaines décisions des régulateurs nationaux. Mais ce droit de veto ne pourrait pas être utilisé si le groupe des régulateurs européens est d'accord avec la décision incriminée : cela revient à les rendre juges et parties. Le retour au texte initial de la proposition de directive apparaît donc préférable, afin de garantir une réelle harmonisation des pratiques des ARN en Europe.
6. La gestion du spectre radioélectrique
La gestion du spectre radioélectrique relève d'autres acteurs que l'Union européenne : au niveau mondial, l'Union internationale des communications (UIT), qui compte 189 Etats membres, et, au niveau du continent européen, la Conférence européenne des administrations des postes et télécommunications (CEPT), qui compte 43 Etats membres.
La proposition de décision relative à un cadre réglementaire pour la politique en matière de spectre radioélectrique vise à :
- créer un cadre d'orientation pour la planification stratégique et l'harmonisation de l'utilisation du spectre radioélectrique dans la Communauté ;
- assurer la diffusion coordonnée d'informations sur la disponibilité du spectre ;
- sauvegarder les intérêts de la Communauté dans les négociations internationales lorsque l'utilisation du spectre radioélectrique a une incidence sur les politiques communautaires.
La décision crée un groupe consultatif de hauts fonctionnaires chargés de donner des avis à la Commission, ainsi qu'un « comité du spectre radioélectrique », composé de représentants des Etats membres. La Commission propose des mesures afin d'harmoniser l'utilisation du spectre radioélectrique, ainsi que les méthodes d'assignation des fréquences. A ces fins, elle confie des mandats à la CEPT, dont elle peut rendre les résultats obligatoires pour les Etats membres.
7. La protection des données personnelles
La proposition de directive concernant le traitement des données à caractère personnel et la protection de la vie privée est une mise à jour de la directive 97/66/CE. Sans introduire de modification majeure, elle actualise les définitions afin de couvrir les nouvelles formes de communications électroniques.
Les données de localisation très précises ne pourront être utilisées qu'avec le consentement de l'intéressé, sauf pour motif de sécurité publique, de sûreté de l'Etat et de recherche d'infraction pénale.
Le texte traite par ailleurs de l'envoi massif de courriers électroniques non sollicités à des fins de prospection commerciale. Cette technique dite de « spamming », ou « pollupostage », sera en principe interdite, sauf à destination des abonnés qui souhaitent en recevoir. Ce système de consentement préalable explicite (« opt in ») est opposé à celui mis en place dans certains Etats membres et basé sur des listes d'opposition (« opt out »). Aucun accord n'a pu être trouvé à ce jour, et la proposition de directive relative au traitement des données personnelles a été disjointe afin de ne pas retarder l'adoption du reste du « Paquet Télécoms ».
Le principe de l'opt in me paraît plus protecteur de la vie privée. Mais il ne pourra pas constituer une barrière totalement efficace. En effet, il ne sera pas opposable aux entreprises établies dans des pays tiers. Il suffira donc de faire transiter les courriers électroniques non sollicités par les Etats-Unis, par exemple, pour atteindre sa cible.
Un autre point de cette proposition de directive faisant débat est l'équilibre à trouver entre la protection de la vie privée, dont découle le principe d'effacement à terme des données personnelles, et la protection de l'ordre public et de la sûreté de l'Etat, qui justifie leur conservation pendant un laps de temps suffisant. La priorité récemment donnée à la lutte contre le terrorisme a relancé la discussion entre les Etats membres sur ce sujet. Il me semble naturel, dans le contexte actuel, que les considérations de sécurité soient sérieusement prises en compte.
III. LE SERVICE UNIVERSEL
Les quinze Etats membres sont parvenus à un accord politique sur l'essentiel de la proposition de directive relative au service universel lors du Conseil Télécommunications des 27-28 juin 2001.
1. Une définition évolutive
Le service universel consiste à mettre certains services à la disposition de tous les utilisateurs sur le territoire de chaque Etat, indépendamment de leur position géographique, à un niveau de qualité spécifique et à un prix abordable.
Concrètement, en matière de communications électroniques, le service universel comprend un service de renseignements téléphoniques et un annuaire, la mise à disposition de postes téléphoniques payants publics, la possibilité d'effectuer des appels d'urgence gratuitement (le 112 dans toute la Communauté) ainsi que des mesures particulières en faveur des handicapés et des utilisateurs ayant des besoins spécifiques. Il comporte également la possibilité pour les abonnés de conserver leurs numéros de téléphone et la compatibilité entre eux des équipements de réception des programmes de télévision numérique. Les utilisateurs doivent pouvoir émettre et recevoir des appels téléphoniques locaux, nationaux et internationaux, des communications par télécopie et des communications de données, à des débits de données suffisants pour permettre l'accès à l'internet.
Le Parlement européen propose que les services opérateurs, et notamment les services de renseignement, soient offerts gratuitement. Il va sans dire que les opérateurs sont opposés à ce principe de gratuité, qui irait à l'encontre du développement attendu de ce type de service.
Dès le début des négociations, la France a voulu intégrer dans la définition du service universel la couverture mobile et l'internet à haut débit. Elle a été rejointe progressivement par l'Espagne, l'Italie, le Luxembourg, la Grèce et l'Irlande. Le Conseil économique et social a soutenu également l'inclusion de l'accès à internet dans le service universel, considérant que cela contribuerait à aider certaines catégories de populations défavorisées ainsi que les régions faiblement peuplées. Néanmoins, la position commune à laquelle sont parvenus les quinze Etats membres à l'issue du Conseil Télécommunications des 27-28 juin 2001 s'en tient au périmètre initialement prévu. L'article 15 de la proposition de directive prévoit un réexamen périodique du contenu du service universel, le premier intervenant deux ans après l'entrée en vigueur du texte et les suivants étant réalisés tous les trois ans.
2. Le financement
L'article 12 de la proposition de directive donne compétence aux ARN pour calculer le coût net du service universel. Le coût net correspond à la différence entre le coût supporté par une entreprise lorsqu'elle fournit un service universel et lorsqu'elle n'en fournit pas. Ce calcul se fonde sur les coûts correspondant aux services ne pouvant être fournis qu'à perte ou à des coûts s'écartant des conditions normales d'exploitation commerciale.
Le calcul du coût net doit prendre en compte les « avantages induits », pécuniaires ou non, pour l'opérateur de service universel. En pratique, il s'agit essentiellement de l'avantage commercial lié à l'inscription du logo « France Télécom » sur les cabines téléphoniques publiques. Mais, loin de voir dans la publiphonie un avantage induit, France Télécom la considère au contraire comme une charge croissante. L'expansion de la téléphonie mobile entraîne une chute du chiffre d'affaires de la publiphonie, qui diminue de 15 % par an. Ce phénomène incite France Télécom à diminuer drastiquement le nombre de ses cabines publiques, notamment dans les zones rurales, où elles sont le moins rentables.
Dans le département du Gard, par exemple, France Télécom a l'intention de supprimer 700 cabines publiques sur un total de 1 900, en invoquant les contraintes du passage à l'euro. Cette politique pose un problème de fond car ces cabines ont souvent été implantées avec l'aide publique du Conseil général. Certes, les maires ne sont pas totalement désarmés, puisque leur accord est requis avant la suppression de toute cabine dans les communes de moins de 2 500 habitants. Mais il me semble que le législateur n'a pas été suffisamment vigilant lorsqu'il a défini le service public des télécommunications.
S'agissant des modalités de financement du service universel, la proposition de directive laisse le choix entre deux solutions :
- un prélèvement sur le budget de l'Etat membre concerné. C'est la solution qui a la préférence de la Commission ;
- la constitution d'un fonds de compensation alimenté par tous les opérateurs. C'est l'option défendue par la France qui, avec l'Italie, est le seul Etat membre à avoir déjà mis en place un fonds de ce type.
La proposition de directive prévoit que le fonctionnement du fonds de compensation, administré par un organisme indépendant, doit respecter les principes de transparence, de distorsion minimale du marché, de non-discrimination et de proportionnalité. Les contributions versées au financement du service universel peuvent être mentionnées sur les factures adressées aux clients.
Au cours de la négociation, certains Etats membres ont émis la crainte que cette diversité des modalités de financement du service universel soit un facteur de distorsion de concurrence. La Commission s'est engagée à examiner tout particulièrement ce point lors de ses révisions périodiques.
3. Les obligations des opérateurs
Les opérateurs de service public s'engagent à fournir des prestations d'une qualité donnée. L'annexe III de la proposition de directive donne les définitions et méthodes de mesure d'une série de paramètres destinés à évaluer la qualité du service universel : délai pour le raccordement initial, taux de défaillance, temps de réparation d'une défaillance, temps de réponse pour les services de renseignements téléphoniques...
Des procédures de réclamation doivent être mises à la disposition du public.
L'article 19 de la proposition de directive investit l'ARN du pouvoir d'exiger la publication d'informations comparables, adéquates et actualisées sur la qualité des services. En effet, la concurrence à laquelle se livrent les opérateurs aboutit à une telle complexité dans les offres et les tarifs proposés que le consommateur ne s'y retrouve plus. Toutefois, les opérateurs craignent que cette exigence de comparabilité restreigne leur capacité d'innovation marketing.
4. Les droits des utilisateurs
La proposition de directive impose un degré élevé de transparence et d'information dans les services de communications électroniques. Les Etats membres doivent s'assurer que toutes les informations concernant la tarification et les conditions générales pratiquées par l'ensemble des fournisseurs de services de communications sont mises à la disposition du public. Les contrats doivent spécifier les conditions et la qualité du service, les modalités de résiliation et de cessation du service, les mesures de compensation et le mode de règlement des litiges.
5. Les interventions tarifaires des ARN
Selon l'article 9 de la proposition de directive, les ARN ont pour mission de surveiller l'évolution du niveau et de la structure des tarifs. Au vu des circonstances nationales, elles peuvent exiger des entreprises qu'elles proposent aux consommateurs des options ou des formules tarifaires qui diffèrent des conditions normales d'exploitation commerciale, dans le but notamment de garantir l'accès des publics fragiles aux services téléphoniques. Pour certains utilisateurs, les tarifs pourront s'écarter des conditions normales d'exploitation commerciale, en vertu de règles d'encadrement des prix ou de péréquation géographique.
*
En ce qui concerne le cadre réglementaire, les auditions que j'ai faites m'ont confirmé que le « Paquet Télécoms » constitue, dans son principe, une adaptation bienvenue à l'évolution du marché des télécommunications vers davantage de concurrence et vers l'unification technologique.
Mais mes interlocuteurs m'ont unanimement signalé un risque, important à leurs yeux, de surréglementation. Faute de pouvoir déjà appliquer le droit commun de la concurrence, le « Paquet Télécoms » propose d'en introduire les concepts dans la réglementation spécifique au secteur des télécommunications. Le maintien de ces deux législations parallèles, symbolisé par le dualisme entre l'ART et le Conseil de la concurrence, risque de produire des incohérences.
J'estime important de limiter au moins les risques de contradictions entre les autorités de régulation nationales, en accordant à la Commission le droit de veto que celle-ci demande afin de garantir un minimum d'harmonisation.
En ce qui concerne le service universel, il faut d'abord considérer comme un acquis important la reconnaissance par le droit communautaire des communications électroniques de cette notion chère à la France. Cela n'allait pas de soi, car les contraintes découlant de la géographie physique et humaine de notre pays ne sont pas celles d'autres Etats membres moins étendus et plus densément peuplés.
Je trouve dommage que la proposition défendue par le Gouvernement français d'étendre le contenu du service universel à la téléphonie mobile et à l'internet n'ait pas été retenue au cours de la négociation. On ne peut pas parler pour autant de service public réduit au minimum. Et la révision périodique du service universel pourra être l'occasion d'en enrichir le contenu.
J'ai quelques inquiétudes quant à la pérennité du financement du service universel tel qu'il a été conçu en France, c'est-à-dire par l'intermédiaire d'un fonds de compensation. Ce mécanisme m'est apparu contesté aussi bien par France Télécom, qui en est le bénéficiaire, que par ses concurrents, qui en sont les contributeurs. C'est pourquoi j'estime qu'il ne faut pas s'interdire par principe d'envisager le recours à un mode de financement budgétaire du service universel des télécommunications.
Compte rendu sommaire du débat
M. Robert Del Picchia :
Le problème est que ces directives européennes sont dépassées le jour où elles sont adoptées. Ainsi, le processus de compression numérique de l'information risque de périmer l'UMTS avant même qu'il ne soit mis en place. A terme, on arrivera à faire transiter par les canaux téléphoniques classiques la même quantité de données que par ces autoroutes de l'information. Cette réglementation communautaire terriblement compliquée est mal ou pas appliquée. Mais une régulation reste nécessaire.
Mme Danielle Bidard-Reydet :
Je m'interroge sur le problème du financement du service universel. Ne va-t-on pas une nouvelle fois se tourner vers les collectivités locales ?
M. Simon Sutour :
Pour la couverture mobile, c'est déjà le cas, conformément aux conclusions du Comité interministériel à l'aménagement du territoire de Limoges. Ainsi, le département du Gard devrait consacrer trois millions de francs cette année à compléter sa couverture mobile.
Mme Danielle Bidard-Reydet :
Une réflexion me paraît nécessaire sur l'implantation des relais. Il n'est pas possible d'avoir les réseaux en triple.
M. Simon Sutour :
Une répartition est déjà prévue entre les opérateurs, qui se partagent les zones non couvertes.
M. Jean-Marie Vanlerenberghe :
Je m'interroge au sujet de l'extension du service universel à l'internet à haut débit, qui risque de coûter très cher aux collectivités locales.
M. Simon Sutour :
Les contributions financières des collectivités locales sont sollicitées même en dehors de tout service universel, comme le montre la téléphonie mobile. Pour ma part, je ne trouve pas mauvais que l'on impose des obligations minimales aux opérateurs, l'internet à haut débit étant important pour l'aménagement du territoire.
Mme Maryse Bergé-Lavigne :
Je ne suis pas d'accord avec votre idée de recourir à un mode de financement budgétaire du service universel.
M. Simon Sutour :
Il me semble simplement qu'il ne faut pas s'interdire d'y recourir par principe, alors que c'est la solution retenue par la plupart des Etats membres de l'Union européenne. Mais j'accepte volontiers que cette idée ne figure pas dans le texte des conclusions que je vous propose d'adopter.
A l'issue de ce débat, la délégation a adopté les conclusions suivantes :
Conclusions
La délégation pour l'Union européenne,
Vu l'article 88-4 de la Constitution,
Vu la proposition de directive du Parlement européen et du Conseil relative à l'accès aux réseaux de communications électroniques et aux installations associées, ainsi qu'à leur interconnexion (E 1548) ;
Vu la proposition de directive du Parlement européen et du Conseil concernant le traitement des données à caractère personnel et la protection de la vie privée dans le secteur des communications électroniques (E 1549) ;
Vu la proposition de directive du Parlement européen et du Conseil relative à l'autorisation de réseaux et de services de communications électroniques (E 1550) ;
Vu la proposition de directive du Parlement européen et du Conseil concernant le service universel et les droits des utilisateurs au regard des réseaux et services de communications électroniques (E 1551) ;
Vu la proposition de directive du Parlement européen et du Conseil relative à un cadre réglementaire commun pour les réseaux et les services de communications électroniques (E 1 552) ;
Vu la proposition de règlement du Parlement européen et du Conseil relative au dégroupage de la boucle locale (E 1 553) ;
Vu la proposition de décision du Parlement européen et du Conseil relative à un cadre réglementaire pour la politique en matière de spectre radioélectrique dans la Communauté européenne (E 1 554) ;
Vu la proposition de directive de la Commission relative à la concurrence dans les marchés des services de communications électroniques (E 1560)
Sur la proposition de directive-cadre et les six propositions de textes communautaires afférentes :
Approuve l'harmonisation et la simplification proposées du cadre réglementaire des télécommunications électroniques dans la Communauté, qui complètent la réalisation dans ce secteur d'activités d'un marché intérieur concurrentiel ;
S'inquiète toutefois, pendant cette phase de transition, où une réglementation sectorielle tend vers l'application du droit commun de la concurrence, des risques de surréglementation et d'incohérence entre les différentes autorités réglementaires nationales ;
Se déclare favorable au texte initial de l'article 6 de la proposition de directive relative à un cadre réglementaire commun, qui accorde à la Commission un droit de veto sur les décisions des autorités de régulation nationales ;
Soutient la mise en place d'un système de consentement préalable explicite (opt in) pour lutter contre l'envoi en masse de communications commerciales non sollicitées ;
Souhaite, en matière de conservation des données personnelles, que les considérations de protection de l'ordre public et de sûreté de l'Etat soient prioritairement prises en compte, sans que soit portée atteinte au principe de protection de la vie privée.
Sur la proposition de directive relative au service universel :
Rappelle son attachement à un service universel européen de communications électroniques, qui mette un ensemble de services défini en commun à la disposition de tous les utilisateurs sur le territoire de chaque Etat membre, indépendamment de leur position géographique, à un niveau de qualité adéquat et à un prix abordable ;
Se déclare favorable à l'extension du périmètre du service universel à la téléphonie mobile et à l'internet à haut débit ;
Souligne le caractère évolutif de la notion de service universel, en espérant que ses réexamens périodiques seront l'occasion d'en enrichir le contenu ;
Estime souhaitable, afin de les rendre incontestables, de préciser les modalités de calcul du coût net du service universel.