COM(1998)257 final
du 15/05/1998
Date d'adoption du texte par les instances européennes : 22/06/2000
Examen dans le cadre de l'article 88-4 de la Constitution
Texte déposé au Sénat le 16/06/1998Examen : 22/07/1998 (délégation pour l'Union européenne)
Contrôle des exportations de biens et
technologies à double usage
Proposition E 1100 - COM (98) 257
final
(Procédure écrite du 22 juillet 1998)
Ce texte a pour objet de modifier le régime communautaire de contrôle des exportations de biens et technologies à double usage, c'est-à-dire ceux qui peuvent être indifféremment utilisés à des fins civiles ou militaires.
La suppression des contrôles aux frontières internes, qui a résulté de la réalisation, à compter du 1er janvier 1993, du marché intérieur, a conduit à harmoniser les contrôles pratiqués par chacun des Etats membres pour l'exportation de ces produits vers des pays tiers.
Le régime actuel de contrôle des exportations des biens et technologies à double usage a été institué par deux textes :
- un règlement (CE) du Conseil n° 3381/94 ;
- une décision du Conseil n° 94/942/PESC adoptée sur la base de l'article J.3 du traité.
L'adoption de deux textes se justifie par la nature de cette matière qui relève, pour une part, de la coopération politique des Etats membres dans le cadre de la politique étrangère et de sécurité commune (PESC) et, pour l'autre part, de la compétence communautaire au titre de l'achèvement du marché intérieur.
Le régime institué fixe les règles communes de procédure pour les produits à double usage dont l'exportation est soumise à autorisation. La liste de ces produits, arrêtée par la décision du Conseil précitée, est périodiquement révisée par un comité technique pour tenir compte des progrès de la recherche et de l'évolution de l'offre industrielle. L'autorisation d'exportation, individuelle ou catégorielle, octroyée par un Etat membre, est valable dans toute la Communauté et peut être assortie de certaines exigences. Néanmoins, si un Etat membre estime qu'une exportation risque de porter atteinte à ses intérêts essentiels, il peut demander à un autre Etat membre le refus ou l'annulation d'une autorisation d'exportation ou, à titre exceptionnel, empêcher l'exportation des biens concernés depuis son territoire en dépit de l'autorisation donnée par un autre Etat membre. Une période transitoire de trois ans a, par ailleurs, été instituée pendant laquelle les mesures de contrôle continuent de s'appliquer aux échanges intra-communautaires "de manière non discriminatoire sur l'ensemble du territoire de la Communauté".
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La proposition de règlement E 1100 a pour objet de modifier le régime actuel entré en vigueur le 1er juillet 1995 de façon à améliorer son fonctionnement. Ce texte vise, d'une part, à abroger et remplacer le règlement (CE) n° 3381/94 et, d'autre part, à intégrer au nouveau règlement les listes communes de biens à double usage dont l'exportation est soumise à autorisation, listes qui sont actuellement annexées à la décision du Conseil adoptée dans le cadre de la PESC (n° 94/942/PESC).
Les modifications que la Commission envisage d'apporter sont les suivantes :
- introduction d'une autorisation communautaire harmonisée d'exportation de ces biens. Cette autorisation commune ne ferait que tirer les conséquences des similitudes qui existent déjà entre les modalités appliquées par les Etats membres pour l'octroi d'une autorisation d'exportation vers les pays tiers suivants : Australie, Canada, Etats-Unis, Japon, Norvège, Nouvelle-Zélande et Suisse. Cette autorisation harmonisée s'appliquerait, en outre, aux exportations destinées à la Hongrie, la Pologne et la République tchèque, pays qui sont très avancés en termes de législation sur les contrôles à l'exportation et d'adhésion aux régimes internationaux de non-prolifération. Elle simplifierait le système actuel dans la mesure où, selon la Commission, elle s'appliquerait à 70 % des exportations de biens à double usage, les biens les plus sensibles demeurant exclus du champ de cette autorisation. La mise à jour de la liste des produits relèverait de la compétence des Etats membres ;
- extension de la clause dite "fourre-tout" en vertu de laquelle tout bien qui ne figure pas dans la liste des biens dont l'exportation est soumise à autorisation est néanmoins soumis à la présentation d'une telle autorisation dès lors que ce bien est ou peut être destiné "entièrement ou en partie, à contribuer au développement, à la production, au fonctionnement (...) d'armes chimiques, biologiques ou nucléaires". En effet, la proposition E 1100 prévoit que des biens qui ne figurent pas dans cette liste seront néanmoins soumis à autorisation dès lors qu'ils sont ou peuvent être destinés "entièrement ou en partie, à un usage final militaire dans un pays soumis à un embargo des Nations unies" ;
- meilleur contrôle des transferts de technologies à double usage. Actuellement, le contrôle ne s'exerce que sur les technologies qui sont transmises sous forme tangible (par exemple celles qui sont transférées par courrier postal). Le contrôle n'est, en revanche, pas pratiqué lorsque le transfert s'opère, par exemple, par courrier électronique. La proposition E 1100 tend à faire disparaître cette différence de traitement qui ne se justifie pas ;
- suppression de l'obligation d'autorisation pour la quasi totalité des transferts intra-communautaires des biens à double usage. Toutefois, en raison de la sensibilité particulière de certains biens, la Commission envisage d'instituer une procédure de notification des transferts de manière à tenir les autorités compétentes informées de tous les échanges intra-communautaires concernant ces produits ;
- renforcement de la coopération entre Etats membres au sujet des exportations sensibles.
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Sur le fond, l'ensemble des modifications que la Commission propose d'apporter devrait, sous réserve de certaines modifications d'ordre technique, être approuvé par les Etats membres.
En revanche, le problème central soulevé par la proposition de la Commission est celui de sa base juridique. La Commission retient, en effet, l'article 113 du traité (politique commerciale commune) comme base juridique de ce texte alors même que celui-ci reprend en annexe les listes de produits à double usage dont l'exportation est soumise à autorisation, listes qui sont actuellement annexées à la décision PESC. Le Gouvernement français, comme d'autres Etats membres, estime que si cette base juridique était retenue il en résulterait un glissement de compétence au profit de la Commission et du Parlement européen dans un domaine qui relève, en grande partie, de la coopération entre Etats membres dans le cadre du deuxième pilier de l'Union européenne.
Les négociations relatives à ce texte, qui viennent de commencer, se déroulent, néanmoins, au sein du Groupe "Double usage" qui est une instance mixte aux premier et deuxième piliers. Une solution devra incontestablement être trouvée de façon à ce que le partage des compétences entre les Etats membres et la Commission soit respecté.
Compte tenu du caractère sensible de ce sujet, la délégation a estimé qu'il était souhaitable que ce texte soit évoqué en réunion. Toutefois, elle a souhaité qu'elle puisse faire savoir sans retard au Gouvernement qu'il ne lui paraissait pas acceptable que cette matière soit intégralement traitée dans le cadre du premier pilier.