Table des matières
Mardi 22 mai 2001
- Présidence de M. Jean-Yves Le Déaut, député, premier vice-président.
Les perspectives offertes par la technologie de la pile à combustible - Examen du rapport
L'Office a procédé à l'examen du rapport confié à MM. Robert Galley et Claude Gatignol, députés, sur les perspectives offertes par la technologie de la pile à combustible.
En préambule, M. Claude Gatignol, député, rapporteur, a indiqué que ce qu'on appelait d'un terme assez imprécis « pile à combustible » était un générateur électrochimique dont le principe de fonctionnement, l'inverse de l'électrolyse de l'eau pour produire des électrons, a été découvert dès 1839. Il a souligné que cette pile s'était développée par étapes jusqu'en 1960 et avait connu un essor important comme source d'énergie des véhicules spatiaux.
Il a ensuite noté qu'un regain d'intérêt se portait sur cette technique pour la propulsion de véhicules électriques, compte tenu des inquiétudes croissantes sur la dégradation de la qualité de l'air et sur l'avenir énergétique de la planète. Il a estimé que se posaient sur ces points des questions inquiétantes auxquelles il faudra répondre, notamment l'épuisement à terme des réserves d'énergies fossiles et la pollution engendrée par leur combustion.
Il a indiqué que l'énergie idéale restait l'électricité, malgré ses défauts qui tiennent aux difficultés de son transport et à l'impossibilité de la stocker.
Il a souligné qu'il y avait cinq types principaux de piles à combustible : alcaline, à membrane échangeuse de protons, à acide phosphorique, à carbonates fondus et à oxyde solide. Il a énuméré quelques utilisations possibles : motorisation d'un véhicule, alimentation de téléphones ou d'ordinateurs portables, source d'énergie stationnaire, avec des puissances dans ce dernier cas pouvant aller jusqu'au mégawatt, le rendement thermique pouvant aller jusqu'à 80 % en cas de cogénération.
Il a ajouté que les piles à combustible se différenciaient également par leur température de fonctionnement, de 70 à 1000°C, leur puissance, leur poids et leur volume.
Il a attiré l'attention sur le fait que si le principe paraissait simple, la gestion du système était compliquée. Il a donc indiqué que dans le rapport, il s'était interrogé sur la mise au point réelle de cette technique en examinant plus particulièrement la pile à membrane échangeuse de protons, P.E.M. en anglais, qui était à l'heure actuelle le type le plus achevé.
Il a ensuite décrit la constitution d'une pile qui comprend quatre éléments principaux :
- un « coeur » où se trouvent la membrane, un électrolyte, des électrodes et un catalyseur, généralement du platine,
- un système de gestion des fluides, air et eau,
- des compresseurs,
- une électronique de commande.
Après avoir noté que beaucoup de recherches sont en cours dans le monde sur le « coeur », il a indiqué que les piles consommaient généralement de l'hydrogène mais que certaines étaient alimentées directement en méthanol.
Il a mis l'accent sur le fait que l'hydrogène doit être produit à partir d'un certain nombre de précurseurs comme les hydrocarbures, spécialement l'essence légère, le méthanol ou le méthane, ce qui nécessitait l'utilisation d'un appareil appelé « reformeur ». Il a reconnu que des problèmes pouvaient se poser tant l'hydrogène est un gaz qui a mauvaise réputation.
Il a ensuite abordé les recherches conduites dans le monde. Il a fait part, à cet égard, de l'intense activité qui règne dans ce domaine en Amérique du Nord, aux Etats-Unis et au Canada. Il a insisté sur le fait que les investissements dans cette recherche y sont très importants et dépassent même les frontières puisque le Département de l'énergie américain finance des activités de recherche sur ce thème au Canada, pays où se trouve une des sociétés les plus en pointe, Ballard. Il a également cité le Japon comme un pays très avancé dans ces recherches.
Abordant la situation de l'Union européenne, il a reconnu qu'une recherche intéressante y était conduite mais il a regretté d'une part que celle-ci se fasse de façon assez peu ordonnée et d'autre part qu'un certain nombre de firmes européennes, comme Daimler-Benz et Siemens, collaborent de façon privilégiée avec des partenaires américains et canadiens.
Concernant la France, il a noté que le chef de file en ce domaine était le Commissariat à l'énergie atomique qui consentait beaucoup d'efforts. Il a salué l'initiative de M. Claude Allègre de créer le Réseau national de recherche sur les piles à combustible et souligné les perspectives ouvertes par la création de l'entreprise « TopCo » et l'action importante conduite par Air Liquide.
Il a remarqué que la recherche sur les piles à combustible doit se développer face à la concurrence des autres moyens de production d'énergie comme les batteries, essentiellement celles au lithium-ions, et les moteurs à combustion interne, notamment le diesel dont les capacités d'amélioration sont importantes tant du point de vue du rendement que des émissions.
Il a estimé qu'une étape intermédiaire serait sans doute constituée par les véhicules hybrides dans le cadre de la forte croissance de la consommation d'électricité des véhicules modernes.
Evoquant la fiabilité des piles à combustible, il a observé que celles qui fonctionnaient actuellement nécessitaient une forte assistance technique tandis que les coûts de revient restaient très importants.
Il a donc estimé que les piles à combustible étaient susceptibles d'ouvrir la transition vers une véritable civilisation de l'hydrogène, ainsi que le montrent déjà certaines applications actuelles comme le prototype bi-carburant, essence - hydrogène, du constructeur B.M.W. ou les bus ayant fonctionné à l'hydrogène pendant deux ans à Chicago.
Il a considéré que, si les piles à combustible se développent, il faudra gérer les différents usages de l'hydrogène à la fois en disposant de fournisseurs et en trouvant des solutions aux problèmes de sécurité inhérents à ce gaz.
En concluant sur l'exposé des grandes lignes du rapport, M. Claude Gatignol a estimé que les piles à combustible étaient sûrement un élément essentiel de la politique énergétique de demain. Il a en revanche émis des réserves quant à leur proche commercialisation compte tenu d'une mise au point encore insuffisante et d'une imprécision encore beaucoup trop importante quant aux coûts de revient.
Il a ensuite abordé les recommandations du rapport.
Il a estimé qu'il n'y avait pas, à l'heure actuelle en France, de ligne directrice quant à la politique à suivre dans ce domaine et que cela justifiait qu'une enquête soit menée sur les compétences actuellement existantes et dispersées. Il a observé qu'il serait souhaitable que tous les acteurs de ce domaine se rencontrent. Concernant les aides distribuées par l'intermédiaire du Réseau « pile à combustible », il a souligné la complexité de l'élaboration des dossiers. Il a souhaité une simplification de ces aides pour augmenter leur efficacité.
Il a également émis le voeu que les actions européennes soient menées avec une meilleure cohérence. Il a enfin de nouveau souligné l'importance de l'hydrogène en souhaitant que l'Office, dans le cadre des règles qui le régissent, puisse être saisi d'un rapport au fond sur ce thème.
M. Jean-Yves Le Déaut, député, premier vice-président, a évoqué le problème des coûts de revient et la question des aides financières à ce secteur de recherche.
M. Claude Gatignol, député, rapporteur, a noté qu'il n'y avait pas, à l'heure actuelle, de chef de file dans ce domaine en France mais que des possibilités existaient de la part de Technicatome et de TopCo.
Un certain nombre de membres de l'Office sont alors intervenus. M. Serge Poignant, député, a demandé quelle était l'action du Centre National de la Recherche Scientifique (C.N.R.S.) dans ce domaine et s'est interrogé sur les possibilités d'utiliser le méthanol au-delà de la production d'hydrogène. M. Gérard Miquel, sénateur, a estimé que la part des énergies renouvelables n'était pas modeste et que certaines d'entre elles, comme le bois, étaient prometteuses.
M. Claude Birraux, député, a posé une question sur l'utilisation du bois au regard de l'effet de serre.
M. Claude Gatignol, député, rapporteur, a observé qu'il n'était pas toujours possible d'utiliser le bois, que les systèmes énergétiques étaient complexes et que c'est surtout une certaine complémentarité qui semblait se dégager dans ce domaine.
Les membres présents ont alors décidé, sur la proposition de M. Jean-Yves Le Déaut, député, premier vice-président, et de M. Claude Gatignol, député, rapporteur, compte tenu de l'importance du sujet et de la nécessité de disposer d'éléments d'information complémentaires sur certains points précis, de consacrer une nouvelle réunion à la fin de l'examen et au vote sur le projet de rapport soumis à l'Office.