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DÉLÉGATION À L'AMÉNAGEMENT ET AU DÉVELOPPEMENT DURABLE DU TERRITOIRE

Mercredi 20 novembre 2002

- Présidence de M. Jean François-Poncet, président -

Audition de M. Alain Rallet, Professeur à l'Université de Paris XI et membre du Conseil scientifique de la DATAR

La délégation a procédé à l'audition de M. Alain Rallet, Professeur à l'Université de Paris XI et membre du Conseil scientifique de la DATAR.

M. Jean François-Poncet, président, a tout d'abord présenté M. Alain Rallet, spécialiste des questions d'aménagement du territoire et de développement local d'une part, des nouvelles technologies de l'information et de la communication (NTIC), et notamment du télé-travail, d'autre part. Il a, en conséquence, interrogé M. Alain Rallet sur l'impact des NTIC sur le territoire.

M. Alain Rallet a déclaré que les plus récentes études montraient que les nouvelles technologies de la communication avaient le même effet, sur le territoire, que les infrastructures de transport : la disparition des distances entraîne une concurrence plus frontale et des économies d'échelle dans les zones de polarisation et de concentration.

M. Alain Rallet a néanmoins fait observer que les effets des NTIC restaient flexibles du fait de la « légèreté » des infrastructures qui en constituent le support.

M. Jean François-Poncet, président, a estimé que les conclusions de l'orateur étaient vérifiées en l'absence de toute politique volontariste et fait valoir que les zones de concentration suscitaient souvent des « désutilités » au moins aussi importantes que les effets de seuil.

M. Alain Rallet a considéré que l'on assistait à une tendance à la « métropolisation » du territoire en relevant que les « déséconomies » n'intervenaient, en réalité, qu'à partir d'un seuil de 500.000 habitants. Il a estimé, d'autre part, que les NTIC pouvaient « repousser les limites » de ces inconvénients.

M. Jean François-Poncet, président, a signalé qu'en Inde, quelques 600 centres d'appels informatiques, disséminés sur tout le territoire, rapportaient quelque un milliard de dollars.

M. Roger Besse a souligné les difficultés rencontrées par les départements ruraux pour attirer les NTIC, en évoquant le cas concret du refus, par un centre d'appel de réservation d'une chaîne hôtelière, de s'implanter à Aurillac.

M. Jean François-Poncet, président, a relevé que l'implantation territoriale de NTIC supposait une main-d'oeuvre nombreuse et qualifiée, en signalant que les anciens territoires industriels semblaient disposer de plus d'atouts.

Sur ce point, Mme Evelyne Didier a signalé qu'une partie de la main-d'oeuvre lorraine avait tendance à « s'exiler » dans le Grand Duché du Luxembourg.

M. Alain Rallet a déclaré que les métropoles les plus dynamiques attiraient les activités « High-tech » qui drainaient elles-mêmes les personnes d'un haut niveau d'éducation, qui exigent un environnement culturel et créatif.

Après avoir rappelé que la technopole « Sofia Antipolis » avait été puissamment soutenue par l'Etat, M. Alain Rallet a estimé que les NTIC, si elles n'avaient pas la faculté de « déplacer » des activités existantes des zones de polarisation vers le territoire, pouvaient néanmoins exercer un effet important sur les créations d'activités : il a évoqué, à cet égard, le tourisme rural et le « tourisme vert ».

M. Jean François-Poncet, président, s'est ensuite demandé si le télé-enseignement, la télé-santé et les télé-services pouvaient être des outils d'aménagement du territoire.

En réponse, M. Alain Rallet a relevé que ces nouveaux moyens de communication pouvaient représenter un risque pour les activités locales dès lors que l'exemple de la télévision montre que les nouveaux systèmes d'information peuvent entraîner une « industrialisation des contenus » avec diffusion mondiale.

Après l'intervention de M. Roger Besse qui s'est inquiété des difficultés d'accès de certains départements ruraux au haut débit, M. Alain Rallet a estimé que la priorité, pour certains territoires, était plutôt de se doter d'une couverture en moyen débit, en signalant, par ailleurs, que le contenu de la notion de service universel ne pourrait qu'évoluer avec les nouvelles technologies.

Puis M. Alain Rallet a indiqué que, selon certaines études, le télé-travail serait utilisé par quelque 15 millions de personnes aux USA, et quelque 10 millions en Europe. Ce télé-travail, a-t-il ajouté, concerne essentiellement les activités « high-tech », l'immobilier et les services aux entreprises.

M. Jean François-Poncet, président, a fait observer que si le télé-secrétariat n'avait pas connu le succès, de nombreux programmeurs informatiques, notamment aux Etats-Unis, avaient choisi le télé-travail.

Après avoir fait observer que le télé-travail n'était peut-être pas adapté aux pays latins où les besoins de « contacts sociaux » sont importants, M. Alain Rallet a proposé une typologie des différentes formes de télé-travail :

- le télé-travail « off-shore » de tâches peu qualifiées (cette forme de télé-travail qui présente un risque important de délocalisation semble appeler à disparaître du fait de l'automatisation de ce type de tâches) ;

- le télé-travail du salarié qui effectue son travail hors du contrôle de l'employeur (cette forme qui peut concerner les tâches peu qualifiées, mais aussi le travail « sophistiqué », a plutôt déçu les espoirs qu'elle avait fait naître) ;

- le télé-travail « mobile » : cette forme concerne les professionnels « itinérants », mais aussi les personnes qui continuent leur travail pendant la durée de leur transport ;

- les télé-services apportés aux personnes ou aux entreprises (télé-secrétariat, télé-comptabilité, télé-enseignement, commerce électronique...) ;

- le télé-travail en réseau qui permet à une entreprise « virtuelle » d'organiser un travail en correspondance sans modifier les localisations des uns et des autres.

En conclusion, M. Jean François-Poncet, président,a estimé que les NTIC, si elles ne pouvaient, à elles seules, exercer un effet direct sur le développement des territoires, constituaient un outil supplémentaire pour des politiques volontaristes qui sauraient utiliser l'atout du cadre de vie attractif dont souhaite bénéficier une proportion croissante nos concitoyens.