- État civil :
- Né le 13 février 1811
Décédé le 23 septembre 1888 - Profession :
- Maréchal de France
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Ancien sénateur du Second Empire
Elu le 5 septembre 1864
Fin de mandat le 4 septembre 1870
avant 1889
BAZAINE (FRANÇOIS ACHILLE), sénateur du Second Empire, né à Versailles (Seine-et- Oise), le 13 février 1811, mort à Madrid, le 23 septembre 1888. Après avoir, a-t-on dit, échoué aux examens de l'École polytechnique, il s'engagea, en 1831, dans un régiment qui devait partir pour l'Afrique; son avancement fut très rapide. Sous-lieutenant en 1833, lieutenant en 1835, il devint chef d'état-major du petit corps de légion étrangère mis par Louis-Philippe au service de Christine, reine d'Espagne, pour la défendre contre les carlistes; cette expédition terminée, il retourna en Afrique, et entra dans les chasseurs à pied. Capitaine en 1839, chef de bataillon en 1844, lieutenant-colonel en 1848, colonel en 1850, il fut attaché aux bureaux arabes, puis il eut quelque temps le commandement de la Légion étrangère, prenant part surtout à des guerres de partisans et développant en lui l'énergie, la ruse et le talent des coups de main habiles. La guerre de Crimée le fit général de brigade, général de division et gouverneur de Sébastopol. La guerre d'Italie et principalement l'expédition du Mexique achevèrent de mettre Bazaine en relief. Le général de Lorencez, premier commandant en chef du corps expéditionnaire, était revenu en France profondément découragé par les malheureuses tentatives qui avaient marqué le début de la campagne; il céda la place au général Forey, qui, à la tête d'une armée de 30,000 hommes, dont Bazaine commandait la première division, s'empara de Mexico et de Puebla (février 1862). Le général Forey ayant été rappelé à son tour, avec le bâton de maréchal de France à titre de compensation, Bazaine ne tarda pas à conquérir dans le pays une influence considérable, dont il essaya de se servir à son profit exclusif. Il continua à outrance la lutte contre les « guerilleros », recueillit, à coups de fusil, à travers les provinces, un grand nombre d'adresses d'adhésion à l'empire mexicain qu'il s'agissait de créer; bref, à la fin de janvier 1864, les défenseurs de l'indépendance mexicaine étaient réduits à l'impuissance. On n'attendait plus que Maximilien, le futur empereur choisi par la complaisante assemblée des « notables » de Mexico. Il arriva à la Veracruz, le 28 mai 1864; mais Bazaine, créé maréchal par décret du 5 septembre, devait rester le véritable maître de l'Empire. En même temps, il devenait sénateur. Nous n'avons pas à raconter en détail les opérations militaires qu'il dirigea contre Juarez. Bazaine, d'ailleurs, ne fut mêlé personnellement qu'à une seule affaire, au siège d'Oajaca; le chef mexicain, Porfirio Diaz, capitula avec 4,000 hommes. Le maréchal préférait s'occuper de politique, conspirant secrètement avec les « conservateurs » la perte de Maximilien, (qui, dans mainte correspondance, se plaignait amèrement aux Tuileries de son singulier protecteur), et, poursuivant la réalisation de son rêve, devenir vice-roi du Mexique. Quelle qu'ait été la pensée qui fit agir Bazaine, elle eut bientôt pour résultat de rendre inévitable un désastre facile à prévoir. Les États-Unis, débarrassés (mai 1865) de leur guerre civile, commencèrent à exiger de Napoléon III le retrait des troupes françaises, dont l'intervention leur portait ombrage. Il fallut céder (février 1866). À mesure que nos troupes revenaient sur Mexico, celles de Juarez prenaient possession du territoire abandonné. Cependant Bazaine concentrait tous ses efforts non contre l'ennemi, mais contre Maximilien, pour lui arracher une abdication. N'ayant pu y réussir, il se retira avec le général Castelnau, et quitta Mexico, le 7 février, avec les dernières troupes françaises. Le 19 juin, Maximilien était pris par les troupes de Juarez, condamné à mort et exécuté.
Débarqué à Toulon, en disgrâce, - car, par ordre de Napoléon, les honneurs militaires ne lui furent pas rendus, - Bazaine n'hésita pas à se tourner du côté de l'opposition, et à entrer en relations avec Thiers. Vers la même époque (1867), M. de Kératry publiait sous ce titre : l'Élévation et la chute de l'empereur Maximilien, une véritable apologie du maréchal. C'est ainsi que Bazaine, soldat de fortune, jouissait auprès de l'opinion publique d'une certaine popularité, quand éclata la guerre d'Allemagne. Notre armée, très inférieure en nombre, morcelée, par surcroît, en sept corps éparpillés de Belfort à Thionville, fut bientôt écrasée par les fortes masses de l'armée allemande, qui débouchait sur nous dans les directions de Strasbourg et de Metz. Bazaine qui se trouvait, le 6 août, tout près de Forbach, avec un corps
d'armée, laissa accabler le général Frossard, qu'il avait été blessé de voir mis sur le même pied que lui. La double défaite de Woerth et de Forbach, qui allait ouvrir aux Allemands la route de Metz, eut pour conséquence immédiate une pressante démarche de MM. de Kératry, Jules Favre et Ernest Picard auprès du ministre de la Guerre, pour obtenir que le commandement de l'armée entière fût donné au maréchal Bazaine. Ainsi fut-il fait.
Pendant que le maréchal de Mac-Mahon rassemblait à Châlons les débris des corps battus à Woerth, le reste de l'armée avait été réuni sous les murs de Metz, où se trouvaient Bazaine et Napoléon. On avait résolu la retraite sur Verdun; mais, trop lents à nous mettre en marche, nous fûmes surpris par l'ennemi. Bazaine s'attarda encore un jour entier dans un engagement inutile qui aboutit à la déroute de Gravelotte. Après avoir laissé le temps aux troupes allemandes de recevoir tous leurs renforts, il donna enfin l'ordre de revenir du côté de Metz, révélant ainsi son véritable objectif: il se coupait la route à lui-même et se trouvait seul en présence de l'année allemande.
Tout un jour fut rempli par une lutte acharnée ; l'armée française se surpassa, tandis que Bazaine la laissait systématiquement sans commandement, jusqu'au moment où il donna à Bourbaki l'ordre de rentrer dans le camp de Metz avec toute la garde. L'officier charge de ce message, M. de Beaumont, déclara au procès de Trianon qu'il n'avait pu en croire ses oreilles. Mais le maréchal insista et dit : « La journée est terminée; les Prussiens ont voulu nous tâter, et c'est fini. » Peu après, Canrobert, soutenait dans Saint-Privat le dernier assaut; quand il fut obligé de se retirer, la victoire était acquise aux Allemands. Le maréchal était isolé dans Metz investi; il avait dans les mains la dernière armée française, il se flattait de commander aux événements. Les événements, on sait quelle tournure ils prirent; on a raconté souvent les vains efforts de Mac-Mahon pour aider Bazaine à percer les lignes allemandes, l'inaction calculée de celui-ci; et les deux capitulations terribles pour nous, qui en résultèrent: celles de Sedan et de Metz. Il fut établi, au procès de Trianon, que Bazaine avait connu par une dépêche, à lui remise le 23 août par le colonel Lewal, la marche de Mac-Mahon, et que Bazaine n'avait véritablement engagé l'action que le 31 au soir. Le lendemain, il ordonnait aux troupes de regagner leurs campements. La défaite de Sedan avant, d'autre part, ouvert la France tout entière à l'invasion, et la République ayant été proclamée à Paris, Bazaine pensa, que son heure cette fois avait sonné; on allait enfin traiter, et il allait avoir, dans les destinées du pays, un rôle prépondérant. Impatient d'être fixé sur les intentions politiques des Allemands, il entra en rapport avec le prince Frédéric-Charles pour lui demander des renseignements; celui-ci lui laissa entendre que l'Allemagne ne reconnaissait en France que le gouvernement impérial et ne pouvait consentir à traiter « qu'avec l'Empereur, l'Impératrice, ou le maréchal Bazaine. » Avec cette amorce, l'ennemi n'eut pas de peine à conduire le commandant en chef de l'armée du Rhin jusqu'à la capitulation. Obtenir une convention qui lui permît, d'accord avec M. de Bismarck, d'employer son armée non contre l'ennemi, mais contre la République, au profit de sa domination personnelle, à lui Bazaine : telle fut sa pensée dominante. Un aventurier, nommé Régnier, servit d'intermédiaire et de négociateur entre Bazaine et l'Allemagne, qui savait pleinement à quoi s'en tenir sur le maréchal. Dès l'entrevue de Ferrières (19 septembre),
M. de Bismarck disait à Jules Favre: « Êtes-vous bien sûr du maréchal Bazaine? » Et, comme celui-ci répondait affirmativement: « Vous avez tort, ajoutait-il, j'ai des raisons de croire que
M. Bazaine ne vous appartient pas. » À la fin de septembre, Bazaine, dans une lettre au général de Stiehle, offrait d'accepter une « capitulation » avec les honneurs de la guerre ; la réponse se faisant attendre, il en vint à arrêter, dans Metz, la fabrication des munitions, à gaspiller les vivres, et à obtenir finalement, le 10 octobre, des chefs de corps, une décision favorable à l'ouverture des négociations. Fort de cette décision, il envoyait le général Boyer à Versailles proposer aux Prussiens le rétablissement de l'Empire. Cette nouvelle tentative politique étant demeurée sans résultat, Bazaine recommença à agir auprès de Frédéric-Charles et lui envoya le général Changarnier. Les deux derniers conseils, tenus à Metz, le 26 et le 28,
ne purent qu'enregistrer les conditions désastreuses faites à l'armée de Metz. Toute l'armée
(139.000 hommes), était prisonnière de guerre. La place de Metz était remise à l'ennemi avec tout son matériel et celui de l'armée : il y avait 1.665 canons, 274.000 fusils, 3.000.000 de projectiles, 23.000.000 de cartouches, 9.000 voitures et affûts, etc. La capitulation fut exécutée le 29 octobre. Bazaine reçut pour prison une somptueuse résidence près de Napoléon III, qui lui fit parvenir le témoignage de sa sympathie. Il y eut dans tout le pays une émotion profonde, quand fut connue la dépêche du gouvernement de la Défense nationale, signée: Ad. Crémieux, Glais-Bizoin, Léon Gambetta, et qui contenait ce passage :
« Metz a capitulé !
« Un général sur qui la France comptait, même après le Mexique, vient d'enlever à la Patrie en danger plus de deux cent mille de ses défenseurs.
« Le maréchal Bazaine a trahi !
« Il s'est fait, comme l'homme de Sedan, le complice de l'envahisseur, etc... »
À Paris, l'atroce nouvelle, publiée par le journal le Combat, de M. Félix Pyat (Voy. ce nom), et d'abord dissimulée et même démentie par le gouvernement, fut la cause déterminante de l'insurrection du 31 octobre. L'indignation générale ne fit que s'accroître à la publication des récits et des déclarations de plusieurs officiers de l'armée de Metz, par exemple, du colonel d'Andlau (Voy. ce nom) : Metz, combats et négociations (1871). L'Assemblée nationale, après la paix, dut instituer un conseil d'enquête pour examiner les circonstances de la capitulation. Bientôt (le 2 mai 1872), le ministre de la Guerre, général de Cissey, annonçait que l'intention du gouvernement était de traduire le maréchal devant un Conseil de guerre. Un projet de loi spécial fut voté en conséquence pour régler la composition de ce Conseil; enfin, le 24 juillet 1873, le général du Barail, ministre de la Guerre, rendit l'ordonnance de mise en jugement sous les trois chefs d'accusation suivants:
1° « D'avoir capitulé avec l'ennemi et rendu la place de Metz, dont il avait le commandement supérieur, sans avoir épuisé tous les moyens de défense dont il disposait, et sans avoir fait tout ce que lui prescrivaient le devoir et l'honneur;
2° D'avoir, commandant eu chef devant Metz, signé en rase compagne une capitulation qui a eu pour résultat de faire poser les armes à ses troupes;
3° De n'avoir pas fait, avant de traiter verbalement ou par écrit, tout ce que lui prescrivaient le devoir et l'honneur. »
M. le duc d'Aumale (Voy. ce nom) accepta la présidence du Conseil, où siégèrent, comme juges, les généraux de La Motte Rouge, de Chabaud-Latour, Tripier, Princeteau, Martineau- Deschenez, Pourcet, Lallemand, Ressayre et Malroy. Rapporteur le général Séré de Rivières, Commissaire du Gouvernement le général Pourcet. Les débats, qui durèrent du 6 octobre au 10 décembre 1873, eurent lieu à Versailles, au grand Trianon. « Le décor, a écrit M. Camille Pelletan dans une notice sur Bazaine, faisait un étrange contraste avec la scène. Le Conseil siégeait au milieu d'un parc de Watteau, coloré de tous les ors et de toutes les pourpres de l'automne... » Bazaine garda une attitude morne et apathique. « On avait peine à reconnaître, dans l'accusé, le chef militaire qui avait eu un si grand rôle dans de si grands événements. On ne voyait qu'un gros homme à la figure éteinte, à la physionomie et à la parole indifférentes, qui semblait presque étranger aux choses dont on parlait, et s'en remettait, le plus possible, pour répondre, à son avocat (Me Lachaud). » Après le très long défilé des témoins, généraux, officiers, sous-officiers, hommes d'État de l'Empire et de la République le 10 décembre, à 9 heures du soir, le duc d'Aumale donna lecture, « au nom du peuple français », du jugement du 1er Conseil de guerre permanent de la 1re division militaire. Ce jugement, à l'unanimité, reconnaissait l'accusé coupable sur tous les chefs d'accusation, et, toujours à l'unanimité des voix, condamnait « François-Achille Bazaine, maréchal de France, à la peine de mort, avec dégradation militaire. » Toutefois les membres du Conseil, aussitôt ce jugement prononcé, croyaient devoir écrire au ministre pour lui « indiquer» des circonstances atténuantes, « et
pour prier» le président de la République de ne pas laisser exécuter la sentence qu'ils venaient de prononcer. Le surlendemain, la peine était commuée en prison perpétuelle. Huit mois après, Mme Bazaine faisait évader son mari de l'île Sainte-Marguerite, à l'aide d'une corde à noeuds, et le recevait dans une barque, au bas de la terrasse. Poursuivi à la suite de cette trop facile évasion, qui n'a jamais été éclaircie, le directeur de la prison, M. Marchi, fut acquitté. L'ex-maréchal se retira en Espagne avec Mme Bazaine; il y publia (1873) un mémoire sur le Blocus de Metz, et fut d'abord assez bien reçu a-t-on dit, à la cour du roi Alphonse XII, puis il tomba dans l'oubli, et même dans la gêne. En 1887, un Français, nommé Hillairaud, exaspéré par la vue de Bazaine et le souvenir de sa trahison, lui porta un coup de couteau qui l'atteignit à peine. Hillairaud fut condamné à la prison. Bazaine mourut l'année d'après.
Extrait du « Dictionnaire des Parlementaires français », Robert et Cougny (1889)
Extrait de la table nominative
Résumé de
l'ensemble des travaux parlementaire
de François-Achille BAZAINE
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