M. Didier Migaud, garde des sceaux. « Faisons-leur confiance pour permettre une véritable mobilité dans le parc social. »

M. Rachid Temal. Et l’argent qui va avec ?

M. Mickaël Vallet. C’est un cadeau empoisonné…

M. Didier Migaud, garde des sceaux. « Un autre poste essentiel de dépense des Français, c’est l’alimentation. Une alimentation saine, variée et de qualité doit être à la portée de tous. À cette fin, notre agriculture, en métropole et en outre-mer, est l’un de nos principaux atouts.

« Nos agriculteurs et nos pêcheurs sont d’abord des producteurs. Leur production est vitale pour notre souveraineté alimentaire et pour la compétitivité de notre pays. Ils ont résolument, et depuis longtemps, engagé la transformation de leurs filières, en investissant, en se modernisant, en s’adaptant au changement climatique.

« J’ai soutenu cette transformation quand j’étais leur ministre, en particulier en lançant le premier plan Écophyto, et nous devons la poursuivre avec eux. Nous devons également les soutenir lorsqu’ils sont frappés par des crises, qu’elles soient sanitaires, comme la fièvre catarrhale ovine qui sévit en ce moment, ou qu’elles soient climatiques.

« Nous devons en outre leur donner des perspectives à long terme. Il faut renforcer la transparence sur les marges pratiquées par la grande distribution et encourager les contrats tripartites entre agriculteurs, transformateurs et distributeurs.

« Pour relever ces défis, mon gouvernement reprendra sans délai le projet de loi d’orientation pour la souveraineté en matière agricole et le renouvellement des générations en agriculture. Nous défendrons dans le même temps nos agriculteurs à Bruxelles, poursuivant le travail indispensable de simplification des règles et nous assurant que les négociations budgétaires et la négociation des accords de libre-échange respectent leurs intérêts et le principe de réciprocité – le Gouvernement y veillera.

« Enfin, les transports pèsent lourd dans les dépenses des ménages. Là aussi, je veux soutenir l’initiative locale. Telle est la logique du rattachement du ministère des transports à un grand ministère des partenariats avec les collectivités.

« Nous travaillerons donc avec les collectivités et avec les acteurs économiques pour investir en priorité dans les transports du quotidien et offrir des solutions de transport aux Français des zones périurbaines et rurales, à ces millions de travailleurs qui font quotidiennement des dizaines de kilomètres et n’ont à ce jour d’autre choix que la voiture.

« Le deuxième chantier, c’est celui de l’accès à des services publics de qualité.

« Les Français sont attachés à leurs services publics dans tous les territoires ; et je comprends leur désarroi, et parfois leur colère, quand il faut attendre de longues semaines pour obtenir une pièce d’identité ou quand des professeurs absents ne sont pas remplacés.

« L’école, voilà qui reste la priorité : celle de donner à tous nos enfants une école qui leur permette d’apprendre, de forger leur jugement et, à force de travail, de prendre leur avenir en main et de participer à celui du pays !

« J’ai confiance dans la qualité et l’engagement des enseignantes et des enseignants, ainsi que de tous les personnels de l’éducation nationale. Ils doivent être partout et toujours respectés et protégés. Ils ont moins besoin de grandes réformes et d’une énième refonte des programmes que du bon fonctionnement de leurs établissements.

« Ensemble, nous voulons renforcer l’attractivité de la mission d’enseigner. Ensemble, nous devons trouver des réponses au défi posé par le remplacement des professeurs absents. Au-delà des améliorations apportées en matière d’organisation et de formation, ne pourrait-on pas, par exemple, faire appel à des professeurs retraités volontaires, y compris pour accompagner leurs plus jeunes collègues ? » (Exclamations ironiques sur des travées des groupes SER et CRCE-K.)

M. Mickaël Vallet. C’est Cuba !

M. Didier Migaud, garde des sceaux. « Ensemble, nous devons travailler pour que toute notre jeunesse ait accès à la culture et au sport : telle est la trace durable que doivent laisser les jeux Olympiques et Paralympiques.

« Ensemble, avec les parents, nous pouvons trouver des solutions pour mieux soutenir les élèves en difficulté, consolider les savoirs fondamentaux, améliorer l’accessibilité des élèves en situation de handicap et l’inclusion scolaire, continuer la lutte sans merci contre le harcèlement à l’école et sur les réseaux sociaux.

« Ensemble, nous devons investir dans les équipes et les dispositifs d’orientation, afin de mieux accompagner nos élèves dans leurs choix d’avenir, tout en continuant à valoriser nos filières professionnelles.

« Ensemble, nous devons aussi développer le service public de la petite enfance, lieu des premiers apprentissages et des premières protections, par exemple contre le danger des écrans.

« Aux côtés de l’école, la santé est au cœur des préoccupations des Français. Là aussi, nous devons, avec tous les professionnels de santé, trouver des solutions de terrain, qui fonctionnent pour les patients, aux deux immenses défis que sont le fonctionnement de l’hôpital et les déserts médicaux.

« La lutte contre les déserts médicaux et contre la pénurie de soignants sera l’une des priorités de mon gouvernement. Le temps est révolu où l’on avait la crainte de former trop de médecins. » (Exclamations sur les travées du groupe SER.)

M. Mickaël Vallet. On a de la marge…

M. Didier Migaud, garde des sceaux. « Nous allons amplifier l’effort engagé.

« Je sais votre incompréhension quant à la diminution des postes d’internes cette année. En 2025, la dynamique reprendra fortement : il y aura 11 000 internes, contre 8 500 cette année.

« Nous proposerons la création d’un programme intitulé “Hippocrate”, par lequel je souhaite que les internes, français et étrangers (M. Rachid Temal sexclame.), s’engagent volontairement, pour une période donnée et grâce à l’accompagnement de l’État et des collectivités, à exercer dans les territoires qui manquent le plus de médecins. »

M. Rachid Temal. Ces médecins étrangers, ce sont les mêmes étrangers que… ?

M. Didier Migaud, garde des sceaux. « Inspirons-nous de ce qui marche ! Déployons plus rapidement les assistants médicaux, les bus de santé, les regroupements de professionnels de santé. Appuyons-nous aussi sur les nouvelles technologies, sur la télémédecine, la télésurveillance ou l’intelligence artificielle, lorsque cela est utile.

« Et puisque rien ne remplace le contact humain, pourquoi ne pas s’appuyer davantage sur les médecins retraités, en leur permettant de reprendre du service (Brouhaha sur les travées des groupes SER, GEST et CRCE-K.), via un cumul favorable entre rémunération et retraite ? »

Mme Cathy Apourceau-Poly. Après les profs, les médecins…

M. Didier Migaud, garde des sceaux. « Je connais l’engagement des soignants, en particulier des médecins, qui font l’objet d’une revalorisation légitime, et je sais qu’ils répondront présent au service des Français, tant il y a urgence à agir.

« Mon gouvernement vous proposera aussi d’accélérer l’accès aux soins grâce à une loi “infirmières, infirmiers”, qui ira plus loin dans la reconnaissance de l’expertise et des compétences de cette profession et lui donnera un rôle élargi dans la prise en charge des patients. Nous pourrions du reste développer cette même logique avec les pharmaciens et les kinésithérapeutes.

« La situation de notre hôpital mérite toute notre attention. Afin de soulager les urgences, nous devons mieux orienter les patients en généralisant le service d’accès aux soins, ce qui sera fait d’ici à la fin de l’année. Nous devons aussi améliorer l’organisation et la complémentarité des soins au sein de nos territoires, entre la ville et l’hôpital, entre le public et le privé.

« Notre système de santé est aujourd’hui malade de sa complexité et de sa bureaucratie. Selon certains médecins, réduire les formalités auxquelles ils sont astreints permettrait d’augmenter de 15 % le temps qu’ils peuvent dédier aux consultations. Il est grand temps de s’attaquer à la simplification et à la suppression de ces formalités, pour retrouver du temps médical utile, mais aussi pour redonner du sens au métier des soignants. » (Mme Laurence Rossignol sexclame.)

M. Mickaël Vallet. Avec des secrétaires retraités ?

M. Didier Migaud, garde des sceaux. « À l’heure de l’intelligence artificielle, comment expliquer que l’hôpital, comme l’école et comme tant d’autres services publics, soit encombré par la paperasse qui mine le moral des agents comme des usagers ?

« Par ailleurs, les crises successives, notamment celle du covid, qui n’est pas si lointaine, ont eu un effet important sur la santé mentale de beaucoup de Françaises et de Français. Les problèmes de santé mentale touchent un Français sur cinq, et particulièrement les jeunes. L’impact sur les familles et sur les proches est immense. Les maladies psychiques sont le premier poste de dépenses de l’assurance maladie.

« Ces maladies se soignent, et la prévention est essentielle. Des progrès sont réalisés dans la recherche et dans les traitements, mais il y a tant à faire dans les modes d’accompagnement des malades et des aidants. Je n’oublie pas les troubles cognitifs et du neurodéveloppement : l’accès aux soins, à l’éducation et à l’emploi des personnes concernées constitue une priorité.

« Cet enjeu me tient particulièrement à cœur. Et je veux le dire clairement, la santé mentale est l’affaire de tous : État, collectivités, entreprises, associations. Nous ferons donc de la santé mentale la grande cause nationale de l’année 2025. (Mme Marie Mercier applaudit.)

« Enfin, dans tous les domaines de la santé, la politique de prévention guidera notre action. Prévention des comportements à risque, intensification des dépistages, développement du sport-santé : nous investirons et mènerons ces chantiers avec énergie, car ils sont la seule manière d’améliorer durablement notre espérance de vie en bonne santé.

« Le troisième chantier, c’est la sécurité au quotidien. (Ah ! sur les travées des groupes SER et GEST.)

« Les Français nous demandent d’assurer la sécurité dans chaque territoire. À cet égard, nous généraliserons la méthode expérimentée pendant les jeux Olympiques et Paralympiques. Partout, dans chaque département, sous l’autorité des préfets et des procureurs, un plan d’action sera déployé par la police et la gendarmerie nationales, en liaison avec les autres acteurs locaux de la sécurité, à commencer par les polices municipales. »

Mme Marie-Arlette Carlotti. Rien de nouveau…

M. Didier Migaud, garde des sceaux. « Les résultats devront être rapides, concrets et visibles ; ils feront l’objet de points de situation très réguliers.

« Les Français ont besoin d’être rassurés par la présence de nos forces. Celles-ci seront plus visibles et plus présentes encore sur la voie publique, dans les villes et les villages de France. Tel est l’objectif qui préside à la création de nouvelles brigades de gendarmerie – cet engagement sera confirmé. »

M. Rachid Temal. Mettez des policiers à la place !

M. Didier Migaud, garde des sceaux. « Il y a dans les commissariats et dans les gendarmeries trop de procédures administratives. Nous allons méthodiquement les réduire, afin d’augmenter le temps de présence des forces de l’ordre sur la voie publique.

« La lutte contre le trafic de drogue, la criminalité organisée et l’économie souterraine, qui gangrènent beaucoup de territoires, urbains ou ruraux, sera une priorité.

« Les Français s’attendent à ce que les sanctions interviennent rapidement. Nous devons donc nous attaquer de manière volontariste à la réduction des délais de jugement, en particulier pour les mineurs. Nous reprendrons la discussion sur la création d’une procédure de comparution immédiate pour les mineurs délinquants de plus de 16 ans déjà connus de la justice et poursuivis pour des actes graves d’atteinte à l’intégrité physique des personnes.

« Nous poursuivrons la réflexion sur les atténuations de l’excuse de minorité. Il faut arrêter la montée continue de la violence de mineurs qui rendent impossible la vie de quartiers entiers.

« Les Français demandent de surcroît que les peines soient réellement exécutées.

« Il est nécessaire que les jugements soient respectés, que les peines soient exécutées sans être transformées au risque de faire perdre toute crédibilité à la réponse pénale. C’est pourquoi nous proposerons des peines de prison courtes et immédiatement exécutées pour certains délits. Il nous faut également réviser les conditions d’octroi du sursis et limiter les possibilités de réduction ou d’aménagement des peines.

« Nous prévoirons en outre un recours plus important aux travaux d’intérêt général, aux amendes administratives et aux amendes forfaitaires délictuelles. Pour que ces amendes soient bel et bien payées, nous recouvrerons de manière effective les retenues sur salaire ou sur prestations sociales. »

M. Hussein Bourgi. Il faut donner des moyens à la protection judiciaire de la jeunesse !

M. Didier Migaud, garde des sceaux. « Pour réaffirmer le rôle dissuasif de la sanction, nous devons également construire des places de prison.

« La France compte actuellement près de 80 000 détenus, pour 62 000 places disponibles. Ce nombre de places est très insuffisant et nuit à la dignité des conditions de détention.

« Il est donc urgent de construire de nouvelles places de prison, ces mêmes places déjà promises par les gouvernements précédents. Mais, devant l’ampleur du chantier, il est tout aussi urgent de diversifier les solutions d’enfermement ou de surveillance effective en fonction du profil de la personne détenue et de la peine prononcée, pour ce qui est notamment des mineurs délinquants. Je suis à cet égard favorable à la création d’établissements pour courtes peines.

« Enfin, ou d’abord, et d’une manière générale, la fermeté de la politique pénale, que les Français demandent, est indissociable du respect de l’État de droit et des principes d’indépendance et d’impartialité de la justice, auxquels je suis profondément attaché. » (M. Yannick Jadot ironise.)

M. Didier Migaud, garde des sceaux. « Nous avons aussi besoin d’une politique de maîtrise de l’immigration : voilà notre quatrième chantier.

« Il est urgent de sortir le sujet de l’immigration de l’impasse idéologique où l’ont mis les uns et les autres. »

Mme Marie-Pierre de La Gontrie. Mais non, mais non… (Sourires sur les travées du groupe SER.)

M. Didier Migaud, garde des sceaux. « Ce sujet, qui ne laisse personne indifférent, doit être traité avec la gravité et l’humanité qu’il mérite, plutôt que d’être instrumentalisé dans des controverses. (Ah ! sur des travées du groupe SER.)

« L’immigration est une question que nous devons considérer avec lucidité et affronter avec pragmatisme.

« L’an dernier, 2,5 millions de visas ont été accordés à des ressortissants étrangers. Chaque année, plus de 150 000 demandes d’asile sont enregistrées, dont les deux tiers, en moyenne, seront rejetées. Chaque année, plus de 100 000 obligations de quitter le territoire français sont prononcées, mais des dizaines de milliers de migrants en situation irrégulière se maintiennent indûment sur notre sol.

« Le résultat, c’est que nous ne maîtrisons plus de manière satisfaisante notre politique migratoire. La conséquence, c’est que nous n’atteignons plus de manière satisfaisante nos objectifs d’intégration.

« Le Gouvernement travaillera à un traitement plus efficace et de proximité des demandes d’asile, afin que les demandeurs obtiennent rapidement une décision. Nous proposerons de faciliter la prolongation exceptionnelle de la rétention des étrangers en situation irrégulière, afin de mieux exécuter les obligations de quitter le territoire français. »

M. Didier Migaud, garde des sceaux. « Nous voulons aussi mieux contrôler nos frontières.

« Le récent pacte européen sur la migration et l’asile prévoit de maîtriser les flux en opérant les contrôles aux frontières extérieures de l’Union européenne. C’est à ces frontières-là que l’on décidera qui est et qui n’est pas en droit d’entrer sur le territoire de l’Union européenne au nom du droit d’asile.

« Ce pacte doit être mis en place sans délai. Il doit en outre être complété en redonnant à Frontex sa mission première de garde-frontière de l’Union européenne. Nous devons être impitoyables avec les passeurs et les trafiquants qui exploitent la misère et le désespoir au prix de la vie de milliers de migrants.

« La France continuera de surcroît, aussi longtemps que nécessaire, à rétablir des contrôles à ses propres frontières, comme le permettent les règles européennes, et comme l’Allemagne vient de le faire.

« Les Français nous demandent par ailleurs de trouver des solutions avec les pays d’origine et de transit.

« Mon gouvernement ne s’interdira pas de conditionner davantage l’octroi de visas à l’obtention des laissez-passer consulaires nécessaires aux reconduites à la frontière, »…

M. Rachid Temal. Parlez-en à Darmanin !

M. Didier Migaud, garde des sceaux. … « ni d’ouvrir une discussion avec les pays avec lesquels nous avons conclu de longue date des accords bilatéraux qui ne correspondent plus aux réalités d’aujourd’hui. »

M. Bruno Sido. Très bien !

M. Didier Migaud, garde des sceaux. « C’est en mettant en œuvre ces mesures strictes de maîtrise de l’immigration que nous serons en mesure de mieux intégrer celles et ceux que nous choisissons d’accueillir, en leur ouvrant plus rapidement l’accès à un titre de séjour, à l’apprentissage du français, à un logement et à un emploi.

« Je veux enfin citer un dernier chantier : nous avons besoin dans notre pays de plus de fraternité.

« La formidable réussite des Jeux de Paris 2024 a encouragé la pratique sportive, qui est l’une des clés là où il s’agit de soutenir le moral individuel et collectif des Français et de promouvoir l’apprentissage des règles du jeu, ainsi que l’acceptation de l’autre.

« Au-delà des belles cérémonies, au-delà des médailles françaises, la plus grande réussite de ces Jeux a été de changer notre regard sur le handicap. Tous ces athlètes nous ont rendus fiers. »

M. Rachid Temal. Et donc ?…

M. Didier Migaud, garde des sceaux. « L’une des priorités du Gouvernement sera de maintenir cet élan, pour résorber les inégalités qui demeurent, pour renforcer la scolarisation et l’accessibilité des transports ou de l’espace public, pour combattre les discriminations à l’embauche.

« La fraternité, c’est aussi renouer avec une politique familiale. C’est soutenir toutes les familles, en particulier les familles monoparentales.

« C’est combattre avec la plus grande énergie la pauvreté qui progresse de nouveau dans nos villes et dans nos campagnes.

« C’est encourager le bénévolat et la vie associative, qui font reculer l’isolement et la solitude et apportent tant à notre pays. Tous les ministres qui le pourront – je pense à ceux qui sont chargés de la ruralité, de l’environnement, de l’éducation, de l’intérieur, du sport – s’attacheront à valoriser un “volet bénévolat” dans leur action.

« La fraternité, c’est développer une politique culturelle accessible à tous, notamment aux jeunes, sur tout le territoire : l’accès à la culture est à la fois un facteur essentiel d’ouverture personnelle, une condition pour faire progresser l’égalité des chances et l’un des ciments de notre lien social.

« Un formidable chantier culturel est aussi celui, dans tous les villages comme dans les plus grandes villes, de la sauvegarde, de l’entretien et de la valorisation de notre patrimoine.

« La fraternité, c’est aussi tisser davantage de liens entre les générations. La cohabitation intergénérationnelle, qui aide beaucoup de jeunes à se loger tout en aidant les plus âgés à vivre à leur domicile le plus longtemps possible, doit être développée.

« Enfin, être fraternel, c’est savoir accompagner les personnes en fin de vie. Je sais l’engagement et le travail de nombre d’entre vous sur ce dossier grave. Nous reprendrons le dialogue avec vous, avec le Sénat, les soignants et les associations au début de l’année prochaine sur le projet de loi dont l’examen a été interrompu par la dissolution. Et, sans attendre, nos efforts en faveur du développement des soins palliatifs seront renforcés dès 2025.

« Une exigence, une méthode, cinq chantiers : cette feuille de route doit nous permettre de répondre sincèrement et sérieusement à une partie des défis auxquels est confronté notre pays.

« Il me reste à mentionner un impératif, conforme à notre histoire, à notre géographie, à notre culture, à notre langue : celui de tenir compte du monde qui nous entoure – un monde dangereux, instable, fragile – et d’y être influents.

« L’influence française ne se décrète pas. Les trois millions de nos compatriotes qui vivent à l’étranger le savent bien ! Cette influence se construit patiemment, en défendant nos intérêts sans arrogance et en prêtant de l’attention à tous nos partenaires, et d’abord en Europe. (M. Rachid Temal sexclame.)

« Depuis 1950, la France et l’Europe vont ensemble. La France a un rôle majeur à jouer pour continuer à faire changer l’Europe.

« Ces dernières années, l’Union européenne a progressé sur la politique industrielle, sur la souveraineté technologique, sur la sécurité économique, sur la défense ou encore sur la lutte contre la concurrence déloyale.

« Il reste bien des choses à faire bouger en Europe : pour accélérer la transition écologique en veillant à l’acceptabilité sociale et économique et à la réciprocité environnementale de nos échanges commerciaux ; pour investir de façon innovante et massive dans les secteurs du numérique, de la santé, de l’espace, de la défense.

« Notre influence en Europe dépend aussi des députés et sénateurs de la Nation. Et je demanderai aux ministres de mon gouvernement de venir régulièrement vous rendre compte des négociations qu’ils mènent au plan européen, mais aussi de vous aider à organiser des débats sur les textes européens les plus importants, au sein de cette assemblée comme dans vos circonscriptions.

« La France doit tenir son rang en Europe, mais elle doit aussi continuer à porter une voix singulière dans le monde, où notre capacité à prendre des initiatives est reconnue et respectée par nos partenaires.

« Sous l’impulsion du Président de la République, et avec le ministre de l’Europe et des affaires étrangères et les ministres délégués auprès de lui, nous continuerons à agir au service de la paix et de la sécurité en Europe et dans le monde.

« La France restera aux côtés du peuple ukrainien, qui, deux ans et demi après l’agression russe, continue, avec courage, de se battre pour défendre sa souveraineté et sa liberté, pour faire respecter l’intégrité territoriale de son pays, mais aussi pour défendre les valeurs européennes que nous avons en partage.

« La France restera également active au Proche et au Moyen-Orient. Quelques jours avant le triste anniversaire du 7 octobre, nous pensons à toutes les victimes des attaques terroristes du Hamas. Nous pensons à tous les otages dont nous exigeons la libération et, parmi eux, à nos deux compatriotes.

« Nous pensons aussi à toutes les victimes civiles palestiniennes. La violence n’a que trop duré. La France appelle à un cessez-le-feu à Gaza. Au-delà de cette tragédie, nous savons que la clé de la paix et de la stabilité dans la région à long terme repose sur une solution à deux États.

« L’aggravation de la situation au Liban, pays si cher à la France et que je connais bien, exige notre pleine mobilisation, aux côtés de nos partenaires, pour faire cesser au plus vite les hostilités qui menacent gravement la stabilité de la région. Je rappelle que 20 000 de nos compatriotes vivent au Liban et que nos soldats y sont déployés au sein de la Finul (Force intérimaire des Nations unies au Liban).

« Face à ces conflits, face à l’instabilité persistante tout autour de nous, face à toutes les menaces hybrides, l’effort de défense est évidemment nécessaire et doit être poursuivi. C’est le sens de la loi de programmation militaire pour les années 2024-2030, que nous mettrons en œuvre.

« Poursuivre l’effort de défense, c’est aussi exprimer la reconnaissance de la Nation aux militaires, en pensant aux 26 000 hommes et femmes déployés sur tous les théâtres d’opérations.

« Nous n’oublions aucun des militaires morts ou blessés en opérations. Ayant évoqué le Liban il y a un instant, j’ai une pensée particulière pour les 58 parachutistes français tués il y a quarante et un ans à Beyrouth.

« Voilà la feuille de route que je vous propose pour les deux années et demie qui sont devant nous. »

M. Didier Marie. C’est optimiste !

M. Didier Migaud, garde des sceaux. « J’ai conscience des difficultés qui se dressent ici et là. (Murmures sur les travées des groupes SER, CRCE-K et GEST.) Mais j’ai confiance en notre capacité collective à franchir les obstacles et, si vous le souhaitez, à avancer pas à pas pour apaiser les tensions et redonner espoir aux Françaises et aux Français.

« J’en appelle à toutes les formations politiques qui composent cette assemblée et à chacune et chacun d’entre vous, qui représentez le peuple français. Devant l’urgence de la situation, et pour l’avenir, recherchons des chemins communs. Dégageons des compromis. Relevons la ligne d’horizon ! (M. Mickaël Vallet sexclame.)

« Pour terminer, prenons soin de la République : elle est fragile.

« Prenons soin de l’Europe : elle est nécessaire.

« Prenons soin de la France et des Français : ils nous demandent de dépasser nos divisions et nos querelles et d’agir pour l’intérêt supérieur du pays. Oui, les Français méritent notre engagement ! » (Applaudissements sur les travées des groupes Les Républicains, UC, RDSE, RDPI et INDEP.)

M. le président. Acte est donné de la déclaration de politique générale dont il vient d’être donné lecture au Sénat.