M. le président. La parole est à Mme la ministre déléguée.
Mme Marie Guévenoux, ministre déléguée auprès du ministre de l’intérieur et des outre-mer, chargée des outre-mer. Monsieur le sénateur Bernard Fialaire, vous l’avez dit, le droit en vigueur ne prévoit que deux modes de sépulture : l’inhumation et la crémation.
L’humusation, qui consiste à transformer les corps en humus, soulève un certain nombre de questions légitimes et nécessite une réflexion et une concertation approfondies, notamment dans ses aspects éthiques, sociétaux et environnementaux.
Le statut juridique des particules issues de l’humusation, et sa compatibilité avec l’article 16-1-1 du code civil – « les restes des personnes décédées, y compris les cendres de celles dont le corps a donné lieu à crémation, doivent être traités avec respect, dignité et décence » –, doivent notamment être étudiés.
Vous souhaitez savoir si le groupe de travail prévu par le Gouvernement a été enterré… J’ai le plaisir de vous dire que tel n’est pas le cas. Il sera constitué avant la fin du premier semestre 2024, sous l’égide du Conseil d’État, afin d’examiner les possibilités d’évolution de la réglementation sur ce sujet. Il réunira des parlementaires, des universitaires, des représentants des collectivités territoriales, des opérateurs funéraires et des familles, ainsi que des personnalités qualifiées et des représentants des administrations concernées.
M. le président. La parole est à M. Bernard Fialaire, pour la réplique.
M. Bernard Fialaire. Je me réjouis que ce dossier sorte de terre et puisse être de nouveau étudié avec humilité… (Sourires.)
premier accueil des personnes primo-arrivantes à paris
M. le président. La parole est à Mme Colombe Brossel, auteure de la question n° 942, adressée à M. le ministre de l’intérieur et des outre-mer.
Mme Colombe Brossel. Madame la ministre, être réfugié à Paris, c’est souvent, trop souvent, arriver sur un bout de trottoir et y rester. C’est faire face immédiatement, dès son arrivée, aux carences d’un État qui a oublié sa mission consistant à garantir l’accès aux droits fondamentaux prévus par la convention de Genève relative au statut des réfugiés.
Les personnes primo-arrivantes sont confrontées à une absence d’organisation pour le premier accueil et à la baisse des moyens que vous y consacrez. Le nombre de personnes prises en charge par l’État dans le cadre des mises à l’abri dédiées aux migrants en rue est passé de 12 154 en 2017 à 4 105 en 2023 à Paris.
Si, en 2015, cette désorganisation pouvait s’expliquer par la hausse rapide des arrivées, depuis neuf ans, la politique mise en place par votre gouvernement n’a jamais permis un premier accueil et une prise en charge digne des personnes arrivées. Elle n’a jamais eu comme ambition de faire disparaître les grands campements, souvent situés dans le Nord-Est parisien.
Deux périodes font exception : lorsque la bulle humanitaire, créée à la demande de la maire de Paris, Anne Hidalgo, a fonctionné et lors de la crise sanitaire et des confinements. C’est la preuve que lorsque la volonté est là, cela fonctionne et que rien n’est inéluctable.
Depuis la fin de la crise covid, des centaines de personnes primo-arrivantes vivent de nouveau dans une extrême précarité. Hier, plus de 400 jeunes, évalués majeurs par le département de Paris et non pris en charge depuis des mois par l’État, ont été expulsés par la préfecture de police, sans aucune solution d’hébergement, même transitoire, malgré les demandes des élus parisiens.
Face aux lacunes de l’État, la Ville de Paris se mobilise et héberge ces familles, ces femmes, ces hommes : 436 personnes dans des gymnases municipaux, début février.
Plus récemment, la municipalité a dû ouvrir un lycée pour héberger des familles, dont les enfants scolarisés dans nos écoles, dormaient, pour beaucoup, également dans des écoles, grâce à la solidarité sans faille des communautés éducatives.
La Ville de Paris ne peut à elle seule assurer l’accueil digne de toutes les personnes primo-arrivantes. Nous avons besoin que l’État prenne enfin ses responsabilités. Que comptez-vous faire, madame la ministre ?
M. le président. La parole est à Mme la ministre déléguée.
Mme Marie Guévenoux, ministre déléguée auprès du ministre de l’intérieur et des outre-mer, chargée des outre-mer. Madame la sénatrice Colombe Brossel, je vous prie de bien vouloir excuser l’absence de Gérald Darmanin, qui m’a chargée de répondre à votre question.
Je me permettrai d’opposer d’autres chiffres à ceux que vous avez cités.
La situation des personnes primo-arrivantes en situation de rue est suivie de près par la préfecture de la région Île-de-France, qui mène régulièrement, en lien avec la préfecture de police de Paris, des opérations de mise à l’abri.
En 2023, 35 opérations ont ainsi pu être conduites, contre 19 en 2022. Ces opérations, qui concernent les personnes en situation de rue, quelle que soit leur situation administrative, ont permis de mettre à l’abri 6 500 personnes.
Pour contrebalancer le regroupement des demandeurs d’asile en Île-de-France, le Gouvernement met en œuvre depuis 2021 une politique d’orientation de ces personnes vers des lieux de prise en charge dans les différentes régions. Plus de 61 000 personnes se sont ainsi vu proposer une orientation vers un hébergement en région par l’Office français de l’immigration et de l’intégration (Ofii) depuis la mise en place du dispositif.
En outre, le Gouvernement a mis en place au mois d’avril 2023 dix sas d’accueil régionaux destinés à accueillir les personnes sans solution d’hébergement à l’issue d’opérations de mise à l’abri, le temps d’examiner leur situation sociale et administrative avant de les orienter vers le dispositif approprié. Ces sas ont d’ores et déjà accueilli plus de 4 000 personnes.
Enfin, je tiens à rappeler que les capacités d’hébergement dédiées aux demandeurs d’asile en Île-de-France n’ont cessé d’augmenter depuis 2017, passant de 10 090 places à 20 151 places en 2023.
bilan et publicité des dispositions adaptant les conditions d’acquisition de la nationalité française à mayotte
M. le président. La parole est à M. Thani Mohamed Soilihi, auteur de la question n° 1108, adressée à M. le ministre de l’intérieur et des outre-mer.
M. Thani Mohamed Soilihi. Madame la ministre, conformément à l’article 73 de la Constitution, qui prévoit la possibilité d’adapter les lois et règlements aux caractéristiques particulières des départements d’outre-mer, la loi du 10 septembre 2018 pour une immigration maîtrisée, un droit d’asile effectif et une intégration réussie a instauré un régime dérogatoire d’acquisition de la nationalité à Mayotte.
Ainsi, pour un enfant né à Mayotte, il est désormais exigé que l’un de ses parents ait, au jour de la naissance, été présent de manière régulière sur le territoire national depuis plus de trois mois. À l’heure où des voix s’élèvent pour durcir ce dispositif, il est impératif d’en connaître au préalable l’efficacité cinq années plus tard.
Un bilan de la mise en œuvre des dispositions relatives aux conditions d’acquisition de la nationalité française à raison de la naissance et de la résidence en France des enfants nés à Mayotte de parents étrangers est-il prévu ?
En outre, dans son avis du 5 juin 2018 sur la proposition de loi tendant à adapter aux caractéristiques et contraintes particulières de Mayotte les règles d’acquisition de la nationalité française par une personne née en France de parents étrangers, dont ce dispositif est issu, le Conseil d’État a souligné l’intérêt d’une campagne d’information à Mayotte et à destination des pays d’origine des personnes y immigrant irrégulièrement sur l’état du droit qui résulterait du vote de ce texte.
Je souhaite savoir pour quelles raisons cette disposition essentielle n’a jamais été mise en œuvre. Elle permettrait pourtant de faire connaître aux candidats à l’immigration clandestine les nouvelles règles d’acquisition de la nationalité sur ce territoire. Elle permettrait aussi aux Français et aux étrangers en situation régulière depuis plus de trois mois de connaître les conséquences juridiques et financières encourues en cas de reconnaissance frauduleuse de paternité.
M. le président. La parole est à Mme la ministre déléguée.
Mme Marie Guévenoux, ministre déléguée auprès du ministre de l’intérieur et des outre-mer, chargée des outre-mer. Monsieur le sénateur Thani Mohamed Soilihi, comme vous l’avez souligné, la loi du 10 septembre 2018 pour une immigration maîtrisée, un droit d’asile effectif et une intégration réussie a instauré un régime particulier pour Mayotte en matière d’acquisition de la nationalité. Cette adaptation a été prise dans le cadre de l’article 73 de la Constitution, qui permet de tenir compte des caractéristiques et contraintes particulières à ces collectivités.
Eu égard à la pression migratoire exceptionnelle que connaît Mayotte depuis plusieurs années, pression qui tient en particulier à l’attractivité de ce territoire d’un point de vue social, économique et sanitaire, il a été décidé par le Président de la République de lutter activement contre l’immigration irrégulière en provenance de l’Union des Comores, laquelle menace de déstabiliser le fragile équilibre de ce territoire de la République.
Il a été jugé que l’un des moyens de rendre moins attractive Mayotte pour les ressortissants comoriens était de limiter l’accès à la nationalité française par le simple fait d’être né en France de parents étrangers. La loi du 10 septembre 2018 a introduit dans le code civil l’article 2493 qui impose la nécessité du séjour régulier d’un des parents, au moment de la naissance, de manière ininterrompue depuis plus de trois mois.
Monsieur le sénateur, vous regrettez que cette disposition n’ait pas fait l’objet d’une évaluation et qu’aucune campagne d’information sur ce nouveau dispositif n’ait été à l’époque organisée à Mayotte et à destination des pays d’origine des candidats à l’immigration.
Comme Gérald Darmanin a eu l’occasion de l’indiquer dans un courrier du 14 février dernier, à la suite du déplacement que nous avons fait ensemble à Mayotte, les engagements du Gouvernement ont été suivis d’effet : depuis l’adoption de la loi Collomb, le nombre d’acquisitions de nationalité française par des mineurs a baissé de moitié.
La pression migratoire toujours plus forte nécessite de prendre des mesures plus ambitieuses, afin de ne pas laisser entrevoir la perspective d’un titre de séjour à des ressortissants étrangers du seul fait que leur enfant est né à Mayotte. Ainsi, les mesures que nous avons annoncées, au nom du Président de la République et du Gouvernement, permettront, après une révision de la Constitution, de ne plus appliquer le droit du sol à Mayotte. Le Gouvernement entend en parallèle renforcer drastiquement la lutte contre les reconnaissances frauduleuses de paternité et communiquer sur ces mesures, monsieur le sénateur.
En revanche, les autres modes d’accès à la nationalité, en particulier celui par décision de l’autorité publique, restent inchangés, permettant aux étrangers souhaitant acquérir la nationalité française de démontrer leur attachement à la communauté nationale et aux valeurs de la République.
perte de financement public de l’association point de contact
M. le président. La parole est à Mme Marie-Do Aeschlimann, auteure de la question n° 1109, adressée à M. le ministre de l’intérieur et des outre-mer.
Mme Marie-Do Aeschlimann. Madame la ministre, premier tiers de confiance en matière de signalement de contenus en ligne illicites, l’association Point de Contact agit, depuis 1998, pour un internet sans crainte. Elle est un acteur reconnu dans la lutte contre les contenus haineux et illicites, en matière de terrorisme, de radicalisation, de harcèlement, de violences sexistes et sexuelles, de pédocriminalité.
Point de Contact analyse et qualifie les informations transmises par les internautes gratuitement et anonymement, avant de transmettre ces signalements, pour retrait et suites éventuelles, soit directement aux hébergeurs et plateformes numériques, soit à la plateforme d’harmonisation, d’analyse, de recoupement et d’orientation des signalements (Pharos), le portail officiel géré par l’office anti-cybercriminalité de la direction nationale de la police judiciaire.
Point de Contact est l’une des neuf hotlines fondatrices de Inhope, le réseau international de lutte contre les contenus pédocriminels en ligne, qui regroupe aujourd’hui plus de cinquante pays.
Les signalements opérés par ce réseau alimentent la base de données d’Interpol sur l’exploitation sexuelle des enfants dans le monde.
Après leur collaboration en 2021 et 2022, le Comité interministériel de prévention de la délinquance et de la radicalisation (CIPDR) n’a pas renouvelé en 2023 la subvention de 225 000 euros allouée à l’association, qui représente un tiers de ses financements.
S’il n’existe aucun droit acquis au maintien d’une subvention, cette rupture brutale des relations établies a précipité l’association dans une impasse financière grave.
Après un plan d’économies drastique, elle est à deux doigts de déposer le bilan. L’association, qui emploie quatre personnes pour éplucher des milliers de contenus illicites, réclame à l’État 41 000 euros pour éviter de mettre la clé sous la porte.
Alors que les menaces terroristes restent à un niveau élevé et que la France est le deuxième pays hébergeur de contenus pédocriminels en ligne au sein de l’Union européenne, comptez-vous prendre en compte ces enjeux et ces risques persistants, madame la ministre ? Estimez-vous opportun d’interrompre aujourd’hui le financement de Point de Contact ?
M. le président. La parole est à Mme la ministre déléguée.
Mme Marie Guévenoux, ministre déléguée auprès du ministre de l’intérieur et des outre-mer, chargée des outre-mer. Madame la sénatrice Marie-Do Aeschlimann, je vous prie de bien vouloir excuser l’absence de Gérald Darmanin, qui m’a chargée de répondre à sa place à votre question.
L’association loi 1901 Point de Contact a été créée en 1998, sur une initiative des acteurs de l’industrie d’internet, afin de permettre le signalement des contenus pédopornographiques et de haine raciale.
L’association a ensuite permis à ces plateformes de répondre, pour un coût modique, aux obligations prévues par la loi du 21 juin 2004 pour la confiance dans l’économie numérique, aux termes de laquelle les hébergeurs et les fournisseurs d’accès à internet sont désormais tenus « de mettre en place un dispositif accessible et visible permettant à toute personne de porter à leur connaissance les contenus illicites », « d’informer promptement les autorités compétentes de toutes les activités illicites » qui leur seraient signalées lorsqu’elles sont hébergées sur leurs serveurs et de « rendre publics les moyens consacrés à la lutte contre ces activités illicites ».
Cette mission demeure l’objet principal de l’association Point de Contact. De nombreuses plateformes privées d’internet, comme Google, Facebook, Twitter, Tik Tok, ainsi qu’OVH, le premier hébergeur de serveurs français, sont aujourd’hui des adhérents de l’association. De grands opérateurs mondiaux occupent ainsi des fonctions éminentes au sein de l’association : un représentant d’OVH en est devenu le vice-président et un représentant de Google, son trésorier.
En 2021, une première subvention de 225 000 euros a été accordée par le CIPDR. L’association déclarait alors un financement global reposant sur une subvention de la Commission européenne et des cotisations de ses adhérents – je viens d’en citer certains –, comprises entre 2 500 euros et 25 000 euros par an.
Une seconde subvention de 225 000 euros a été accordée pour l’année 2022, son versement ayant été achevé le 30 avril 2023.
Une demande de subvention pour l’exercice 2023 a bien été effectuée le 16 mai 2023. Compte tenu du silence gardé par l’administration pendant un délai de deux mois, une décision implicite de rejet est née à compter du 16 juillet 2023.
Aux termes des budgets prévisionnels annexés aux conventions entre l’association et le fonds interministériel de prévention de la délinquance (FIPD) pour les années 2021 et 2022, les crédits du FIPD ont financé à 100 % l’action de traitement des signalements répondant aux dispositions légales. Selon les budgets prévisionnels de l’association, joints à sa demande de subvention pour l’exercice 2023, aucune part des cotisations versées par les acteurs de l’internet, soit 154 000 euros au total, n’est affectée à cette action. Celle-ci est donc, de fait, supportée intégralement par le FIPD, à hauteur de 225 000 euros.
M. le président. Votre temps de parole est épuisé, madame la ministre.
Mme Marie Guévenoux, ministre déléguée. Je m’en tiens donc là, monsieur le président.
insécurité aux abords de la prison de la santé dans le xive arrondissement de paris
M. le président. La parole est à Mme Marie-Claire Carrère-Gée, auteure de la question n° 1119, adressée à M. le ministre de l’intérieur et des outre-mer.
Mme Marie-Claire Carrère-Gée. Madame la ministre, cela fait cinq ans que la prison de la Santé, dans le XIVe arrondissement de Paris, a été rénovée, cinq ans que les riverains vivent un enfer !
Chaque nuit, ils sont réveillés par des cris, des hurlements, des bagarres. Dans la journée, des jeunes filles, qui se pressent de rentrer chez elles, se font interpeller.
En fin de journée et la nuit se déroulent des scènes étranges, des livraisons de colis en tout genre vers l’intérieur de la prison. Les colis sont hissés par-dessus les murs de la prison au moyen de cordelettes munies de crochets, puis rattrapés depuis les fenêtres. Au début, il n’y avait qu’une seule corde ; il y en a désormais des dizaines, accrochées en permanence.
Ces livraisons illicites, certains tiennent d’ailleurs à les maintenir. Leur solution : l’intimidation des riverains. J’ai en main un tract menaçant, comportant la photo et le nom du président de l’association des riverains. (Mme Marie-Claire Carrère-Gée brandit le document.) Il a été placardé sur les murs de la rue Jean-Dolent, et des individus se sont introduits dans les immeubles pour les glisser dans les boîtes aux lettres.
Il fut un temps où, tout autour de cette prison située en pleine ville, des rondes permanentes et des gardes statiques étaient assurées vingt-quatre heures sur vingt-quatre.
Madame la ministre, ma question est simple : quand ces gardes et ces rondes perpétuelles pourront-elles être remises en place ? Actuellement, le ministère de l’intérieur, le garde des sceaux et la Ville de Paris se renvoient la balle. Nous ne voulons plus de cela ! Ces gardes et ces rondes sont indispensables pour rétablir la tranquillité du quartier et assurer la sécurité de ses habitants.
M. le président. La parole est à Mme la ministre déléguée.
Mme Marie Guévenoux, ministre déléguée auprès du ministre de l’intérieur et des outre-mer, chargée des outre-mer. Madame la sénatrice Carrère-Gée, je vous remercie de votre question, qui porte sur le centre pénitentiaire de Paris-La Santé, secteur très sensible du XIVe arrondissement, que vous connaissez bien.
Il convient avant tout de souligner l’engagement des agents du commissariat de police de cet arrondissement, ainsi que de la compagnie de sécurisation et d’intervention de Paris, qui y réalisent quotidiennement de très nombreuses rondes, patrouilles et contrôles, de jour comme de nuit. Les retours de détenus réintégrant le centre de semi-liberté pouvant être source de nuisances, il a été décidé de renforcer les rondes aux heures correspondant à ces réintégrations, en lien avec les agents de la police municipale ; ces rondes assurent une meilleure protection que les gardes statiques.
Les interventions de police sont par ailleurs facilitées par la présence de trois sites de vidéoprotection quadrillant le secteur. Les vidéopatrouilles effectuées permettent en particulier de repérer, en amont, les comportements suspects et d’envoyer rapidement un équipage sur les lieux. Il convient de noter le lancement du projet d’installation d’une nouvelle caméra de vidéoprotection à l’angle du boulevard Arago et de la rue de la Santé.
Ces dispositifs ont permis de réduire les rassemblements de personnes aux abords du centre pénitentiaire et d’augmenter le nombre d’interpellations : 182 personnes ont été interpellées en 2023, 36 depuis le début de l’année 2024, pour des jets de colis dans l’enceinte de l’établissement pénitentiaire.
Le commissariat du XIVe arrondissement maintient un lien permanent avec les habitants et les professionnels du secteur pour une réactivité maximale des agents sur le terrain. Les policiers ont été requis à 71 reprises en 2023 et à 31 reprises depuis le début de l’année 2024.
Par ailleurs, un numéro spécialement dédié aux riverains est également expérimenté depuis le 19 février dernier, leur permettant de prévenir rapidement les policiers en cas de nuisances. Il convient de souligner que ce numéro ne se substitue pas au 17, qui reste le numéro à utiliser pour les situations d’urgence.
Afin de répondre de manière efficace aux problématiques rencontrées sur le secteur, un groupe de partenariat opérationnel (GPO) a été mis en place pour l’est de l’arrondissement ; il regroupe notamment la direction du centre pénitentiaire et les bailleurs et syndics de copropriété, ainsi que les services de la préfecture de police, de la Ville de Paris et de la mairie d’arrondissement.
Comme vous le voyez, madame la sénatrice, l’État est pleinement mobilisé sur cette question, au travers de ces différents dispositifs et dans un cadre partenarial, afin d’aboutir à des solutions opérationnelles pour la sécurité et la tranquillité des riverains de la prison.
M. le président. La parole est à Mme Marie-Claire Carrère-Gée, pour la réplique.
Mme Marie-Claire Carrère-Gée. Je ne doute nullement de la mobilisation et de l’engagement des policiers du commissariat du XIVe arrondissement, que je connais bien, mais ce n’est pas le sujet ! Certes, c’est très bien qu’il y ait une vidéosurveillance et un numéro de contact, et je sais que des rondes sont faites de temps en temps, mais ce que nous voulons, c’est que les rondes soient faites en permanence !
Madame la ministre, dans les colis livrés illicitement, chaque nuit, au moyen de cordelettes fixées en permanence, il y a de la nourriture, des téléphones, mais aussi de la drogue. Un jour, il y aura des armes blanches, voire des armes à feu. Quand surviendra un drame, une mutinerie dans la prison, on ne pourra pas dire qu’on ne savait pas !
Il faut prévenir cela par des gardes statiques, vingt-quatre heures sur vingt-quatre, et des rondes permanentes autour de la prison. Cela existait autrefois et il y avait alors beaucoup moins de problèmes ; la sécurité du quartier était assurée.
mise en place de la zone à trafic limité dans le centre de paris
M. le président. La parole est à Mme Catherine Dumas, auteure de la question n° 1121, adressée à M. le ministre de l’intérieur et des outre-mer.
Mme Catherine Dumas. Madame la ministre, depuis 2020, la mairie de Paris envisage de créer en plein centre de la capitale une zone à trafic limité (ZTL), dans laquelle le trafic de transit serait interdit.
Ce projet a été maintes fois reporté, en raison d’un calendrier irréaliste, d’une impréparation et, surtout, de l’accumulation d’obstacles juridiques et pratiques. Il semble pourtant que la maire de Paris veuille profiter des jeux Olympiques et Paralympiques pour l’imposer aux Parisiens à l’automne 2024.
Dans la mesure où il concerne un secteur où la compétence en matière de circulation est partagée, la préfecture de police a émis de nombreuses réserves au regard de l’impact de ce projet sur la circulation des véhicules prioritaires, comme sur les services d’urgence, mais aussi de la complexité des modalités de contrôle qu’il faudrait mettre en place.
Nous faisons face à une véritable usine à gaz qui va compliquer la vie quotidienne des Parisiens ! Des questions demeurent aussi sur l’accessibilité des entreprises, des restaurants ou des hôtels de cette zone. Je n’oublie pas non plus les personnes âgées ou en situation de handicap, les familles, les artisans et les commerçants, tous ceux qui font vivre notre capitale.
Aussi, madame la ministre, pouvez-vous nous préciser la position du Gouvernement vis-à-vis de ce projet qui risque de congestionner Paris ?
Pouvez-vous également nous préciser si la préfecture de police compte participer à la mise en œuvre et au contrôle effectif de ce dispositif ?
M. le président. La parole est à Mme la ministre déléguée.
Mme Marie Guévenoux, ministre déléguée auprès du ministre de l’intérieur et des outre-mer, chargée des outre-mer. Madame la sénatrice Dumas, je vous remercie de votre question.
Dans la capitale, la compétence de droit commun en matière de police de la circulation et du stationnement appartient à la mairie de Paris, tandis que le préfet de police dispose, sur un certain nombre de sites, voies ou portions de voies, du pouvoir de réglementer de manière permanente les conditions de circulation.
Sur d’autres axes structurants de la capitale, ainsi que sur ceux qui sont empruntés dans le cadre du déclenchement des plans de secours prévus par le décret du 18 juillet 2017, le préfet de police dispose d’un rôle prescriptif pour les aménagements de voirie projetés par la Ville de Paris.
La zone à trafic limité prévue par cette dernière est un dispositif permettant de réserver certaines zones du centre de Paris aux piétons, aux vélos, aux transports en commun, aux taxis et à certaines catégories d’usagers. Le trafic de transit y sera interdit, mais le trafic de destination restera autorisé pour les usagers qui travaillent, résident ou interviennent dans le périmètre de la ZTL.
Au cours de nombreux échanges, particulièrement étroits, avec la Ville de Paris, le préfet de police a indiqué à la maire de Paris que le périmètre de la ZTL ne saurait intégrer la rive gauche de la Seine, ce qui conduirait à une dégradation des conditions de circulation, avec un risque de blocage de carrefours majeurs ; ne pourraient non plus y être intégrés les quais de la Seine dans leur partie haute, ni les îles Saint-Louis et de la Cité, auxquelles la maire de Paris souhaitait élargir le dispositif.
S’agissant du calendrier de déploiement de cet aménagement, le préfet de police a indiqué à la maire de Paris que la feuille de route initiale, prévoyant une mise en place au premier semestre de l’année 2024, donc avant les jeux Olympiques et Paralympiques, semblait prématurée au vu du manque de lisibilité du dispositif, notamment pour ce qui est des modalités de contrôle. Au cours de la dernière réunion du Conseil de Paris de l’année 2023, la maire a confirmé se ranger à la version du calendrier que l’État soutenait, sans que la question du périmètre de la ZTL soit pour autant tranchée.
Par ailleurs, la préfecture de police s’interroge sur les modalités de mise en œuvre de la ZTL, notamment en matière de contrôle de la zone ; celui-ci nécessite en effet la mise en place d’une signalisation adaptée et une large communication sur la mesure. Tant que ces modalités ne seront pas clairement définies, le dispositif ne sera vraisemblablement ni compris ni accepté par les usagers, situation qui risque d’entraîner la congestion de certaines voies.
À ce jour, le préfet de police n’a pas été destinataire du dossier complet relatif à la ZTL. Par conséquent, il ne peut pas, pour le moment, arrêter d’avis définitif sur ce sujet.
En tout état de cause, la mise en œuvre du contrôle des accès à la ZTL, mesure dont la Ville de Paris est à l’origine, relève de la responsabilité de celle-ci. Il lui appartiendra donc de clarifier et de rendre publiques les dispositions qu’elle prendra à cette fin.