M. le président. La parole est à Mme Marie-Claude Varaillas, pour la réplique.
Mme Marie-Claude Varaillas. Madame la ministre, vous ne pourrez mettre en œuvre ce changement qu’avec des moyens substantiels. Vous l’avez vous-même défendu à une certaine époque : pour la réussite de nos élèves, il faut plus d’enseignants formés et mieux rémunérés et moins d’élèves par classe. Pourtant, depuis 2017, 8 000 postes d’enseignants ont été supprimés.
À l’heure où nous souffrons d’un cruel manque de mixité sociale, le choc des savoirs va séparer les élèves, les assigner à leur niveau et creuser davantage les inégalités.
La communauté éducative aura connu cinq ministres en moins de deux ans. Elle attend maintenant de vous que vous offriez une boussole à notre école publique. (Applaudissements sur les travées du groupe CRCE-K, ainsi que sur des travées des groupes SER et GEST.)
piratage des numéros de sécurité sociale
M. le président. La parole est à Mme Nathalie Goulet, pour le groupe Union Centriste. (Applaudissements sur les travées du groupe UC.)
Mme Nathalie Goulet. Ma question s’adresse à M. le ministre délégué chargé de la santé et de la prévention, mais concerne tout autant M. le ministre délégué chargé des comptes publics.
Notre base de données des assurés sociaux est peu fiable. Le rapport de l’inspection générale des finances (IGF) et de l’inspection générale des affaires sociales (Igas), qui date du mois d’avril 2003, dénombre 73,1 millions de bénéficiaires pour 67 millions de Français et note que « l’exploration de l’écart entre les deux dénombrements semble aporétique ».
Les organismes de protection sociale font de surcroît l’objet d’un véritable piratage informatique : 33 millions de données relatives à la gestion du tiers payant piratées ; 600 000 comptes piratés à la caisse d’allocations familiales ; 10 millions de personnes piratées à Pôle emploi, devenu France Travail, mais qui subit toujours ce piratage.
Les cybercriminels ont ainsi accès à de multiples données personnelles, dont le fameux NIR, le Numéro d’inscription au répertoire national d’identification des personnes physiques, véritable « Sésame, paie-moi ! » de l’ensemble des prestations. Ces données sont désormais offertes en pâture à tous les arnaqueurs. Fraude, usurpation d’identité, substitution de comptes bancaires : la liste des possibilités de détournement est infinie, sans parler de la marchandisation des données elles-mêmes.
Ma question est simple : quelles mesures comptez-vous prendre pour protéger les assurés sociaux et le contribuable de ces pillages en règle ?
Compte tenu de cette situation apocalyptique, allez-vous abandonner le projet de versement automatique des prestations jusqu’à ce que la base des bénéficiaires soit sécurisée ? (Applaudissements sur les travées du groupe UC, ainsi que sur des travées du groupe Les Républicains.)
M. le président. La parole est à M. le ministre délégué chargé de la santé et de la prévention.
M. Frédéric Valletoux, ministre délégué auprès de la ministre du travail, de la santé et des solidarités, chargé de la santé et de la prévention. Madame la sénatrice Goulet, je vous remercie de votre question. Le sujet que vous évoquez est sensible et il a été de nouveau mis en avant par l’actualité, du fait des cyberattaques dont les opérateurs Viamedis et Almerys, que vous avez cités sans les nommer, ont récemment fait l’objet, conduisant au piratage des comptes des 33 millions d’assurés qui ont contractualisé avec ces opérateurs.
Je précise que ces opérateurs sont des plateformes privées et que seuls ont été piratés l’état civil, la date de naissance, le numéro de sécurité sociale de ces assurés, ainsi que les contrats que ceux-ci ont souscrits auprès d’eux. En aucun cas, les données « larges », celles qui sont notamment liées à la carte Vitale, n’ont été compromises.
Ces opérateurs ont déposé plainte et ont encouragé leurs adhérents à en faire autant.
La Commission nationale de l’informatique et des libertés (Cnil) et l’Agence nationale de la sécurité des systèmes d’information (Anssi) mènent par ailleurs une enquête afin d’évaluer la sécurité informatique de ces opérateurs. Le Gouvernement en étudiera précisément les résultats.
En tout état de cause, soyez assurée, madame la sénatrice, que ces attaques nombreuses – vous en avez du reste rappelé quelques-unes – interpellent le Gouvernement, qui ne compte pas rester inactif. Un programme a été lancé au mois de décembre dernier conjointement par le ministère de la santé et des solidarités et la direction interministérielle du numérique afin de réaliser un audit de la sécurité de ces comptes.
Je réponds à votre ultime question : non, le Gouvernement n’a pas l’intention d’abandonner le projet de transferts de charges sur les cotisations sociales. (Applaudissements sur quelques travées du groupe RDPI.)
M. le président. La parole est à Mme Nathalie Goulet, pour la réplique.
Mme Nathalie Goulet. Vous allez donc bien procéder à des paiements directs sans aucune vérification de la base de données… J’avais raison de ne pas être rassurée, monsieur le ministre ! (Applaudissements sur les travées du groupe UC, ainsi que sur des travées du groupe Les Républicains.)
Gabriel Attal, lorsqu’il était ministre délégué chargé des comptes publics, a lancé un ambitieux plan de lutte contre la fraude, affirmant que la fraude sociale, comme la fraude fiscale et la fraude douanière, était une fraude du contribuable. (M. le Premier ministre acquiesce.) Il faut y revenir, d’autant que notre situation budgétaire n’est pas des plus florissantes !
J’estime qu’une nouvelle expertise du Sandia (service administratif national d’identification des assurés) et du NIR s’impose.
La cerise sur le gâteau, c’est l’hébergement des données chez Microsoft, avec ce que l’on sait de l’extraterritorialité américaine ! (Applaudissements sur les travées du groupe UC, ainsi que sur des travées des groupes Les Républicains, GEST et SER.)
M. Mickaël Vallet. C’est une honte !
Mme Nathalie Goulet. Il est difficile de faire pire ! (Nouveaux applaudissements sur les mêmes travées.)
situation à gaza
M. le président. La parole est à M. Akli Mellouli, pour le groupe Écologiste – Solidarité et Territoires. (Applaudissements sur les travées du groupe GEST.)
M. Akli Mellouli. Ma question s’adresse à Mme la secrétaire d’État auprès du ministre de l’Europe et des affaires étrangères, chargée du développement et des partenariats internationaux.
« À Gaza, on ne soigne plus, on ampute. » Lors de mon déplacement au poste frontière de Rafah voilà quelques jours, c’est ainsi que le médecin humanitaire Raphaël Pitti décrivait ainsi l’insoutenable réalité, madame la secrétaire d’État. Lui qui est intervenu en Syrie, en Ukraine et dans bien d’autres zones de conflit me confiait n’avoir jamais vu une telle horreur.
Quelque 10 000 orphelins : derrière ce chiffre transparaît une réalité qui doit interpeller notre humanité.
Quelque 27 000 Palestiniennes et Palestiniens tués : derrière ce chiffre se cache une vérité, la prudence complice de notre pays à condamner le plus grand massacre de ce siècle. (Exclamations sur des travées des groupes Les Républicains et UC.)
Un peu d’humanisme vous fera du bien ! (Nouvelles exclamations sur les mêmes travées.)
Quelque 67 000 blessés qui manquent cruellement de soins : derrière ce chiffre se dessine une évidence, celle du parti pris et du double standard de notre pays, qui lui font perdre désormais toute légitimité à diffuser un message de portée universelle.
Madame la secrétaire d’État, alors qu’une offensive terrestre sur Rafah est annoncée, que comptez-vous mettre en œuvre pour obtenir un cessez-le-feu immédiat et durable, et ainsi prévenir, conformément à nos obligations conventionnelles, ce que la Cour internationale de justice qualifie de « risque génocidaire » ? Comptez-vous par exemple instaurer un embargo sur les armes ?
Alors que l’aide humanitaire est bloquée, que compte faire la France pour éviter ce que Josep Borrell, chef de la diplomatie de l’Union européenne, qualifie de « catastrophe humanitaire indescriptible » à venir à Rafah ? (Applaudissements sur les travées du groupe GEST, ainsi que sur des travées des groupes SER et CRCE-K.)
M. le président. La parole est à Mme la secrétaire d’État chargée du développement et des partenariats internationaux.
Mme Chrysoula Zacharopoulou, secrétaire d’État auprès du ministre de l’Europe et des affaires étrangères, chargée du développement et des partenariats internationaux. Monsieur le sénateur Mellouli, ne pouvant être présent, Stéphane Séjourné, ministre de l’Europe et des affaires étrangères, m’a chargée de vous répondre et d’exprimer de nouveau notre grande inquiétude face aux frappes israéliennes à Rafah.
La catastrophe humanitaire qui se déroule à Gaza doit cesser. Le ministre de l’Europe et des affaires étrangères l’a clairement indiqué au Premier ministre israélien à plusieurs reprises depuis le début de ce mois.
Rafah est le refuge de plus de 1,3 million de personnes. Une offensive israélienne créerait une situation intenable. Cela donnerait une nouvelle dimension à une crise humanitaire déjà injustifiable.
Pour éviter un désastre, nous appelons de nouveau à un arrêt des combats et nous appelons Israël à prendre des mesures concrètes pour protéger les civils.
Cela nous concerne aussi directement. Nous nous mobilisons pour faciliter l’évacuation de nos ressortissants et des personnes qui ont travaillé pour la France. Dimanche dernier, quarante-deux personnes ont ainsi pu quitter Gaza.
Je tiens enfin à rappeler que l’avenir des Gazaouis ne pourra s’écrire que dans un État palestinien vivant en paix et en sécurité aux côtés d’Israël. La détermination de la France est totale, comme le montrent les actions prises hier contre vingt-huit colons violents.
Un cessez-le-feu est indispensable pour la libération des otages à Gaza, parmi lesquels se trouvent encore trois de nos compatriotes ; il est également nécessaire pour acheminer davantage d’aide aux populations civiles. Nous ne pouvons plus attendre. (Applaudissements sur les travées du groupe RDPI.)
M. le président. La parole est à M. Akli Mellouli, pour la réplique.
M. Akli Mellouli. Commençons par reconnaître l’État de Palestine, madame la secrétaire d’État !
À l’instar des ONG, des journalistes, des médecins, nous ne cessons de vous alerter sur la tragédie que vivent les Palestiniens. Après le temps médiatique viendra tôt ou tard celui du jugement implacable de l’Histoire. Vous ne pourrez pas dire que vous ne saviez pas ! (Applaudissements sur les travées du groupe GEST, ainsi que sur des travées du groupe CRCE-K.)
carte scolaire
M. le président. La parole est à M. Stéphane Sautarel, pour le groupe Les Républicains. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)
M. Stéphane Sautarel. Monsieur le Premier ministre, c’est à vous que ma question s’adresse, puisque, comme vous l’avez indiqué, vous avez emporté à Matignon la cause de l’école, qui dépasse de loin la seule question pédagogique, quand bien même celle-ci est essentielle.
La réussite scolaire et l’égalité des chances données à tous les enfants de notre pays revêtent aussi une dimension d’aménagement du territoire, de prise en compte de nos provinces et de notre ruralité, qui, comme on le sait – la crise agricole en est du reste un nouveau symptôme –, se sent oubliée, ignorée, abandonnée, bien souvent, hélas ! à juste titre.
Cette dimension rejoint d’ailleurs la question de l’intérêt de l’enfant, notamment quant au temps de transport et à l’offre éducative.
Le dispositif France Ruralités devait permettre d’instaurer un réel dialogue avant toute suppression de classe dans nos écoles à petits effectifs. En ruralité, supprimer un poste, c’est en effet supprimer une classe et, partant, fragiliser directement l’école qui se veut le premier des services publics.
On en est loin ! La méthode reste brutale, l’approche exclusivement quantitative et le résultat, traumatisant pour tous, enfants, parents, enseignants et élus.
Pour la rentrée prochaine, les cartes scolaires du premier degré du Cantal et de l’Allier, et plus largement de toute la ruralité, sont les pires que l’on ait jamais vues. Elles répondent aux seules logiques verticale et quantitative. Les engagements ne sont pas tenus et les délais ne sont pas respectés.
La parole publique a pourtant encore de la valeur, notamment dans un département comme le Cantal, dont le sens civique développé est, hélas ! rarement récompensé. Pour combien de temps encore ? Monsieur le Premier ministre, entendez l’appel de notre ruralité avant que le lien ne soit rompu !
M. Bruno Belin. Très bien !
M. Stéphane Sautarel. Allez-vous tenir les engagements de France Ruralités ? Allez-vous surseoir à toute fermeture de classe rurale à la rentrée prochaine, en particulier dans le Cantal, et mettre en place un moratoire de trois ans, le temps de construire un cadre de confiance pluriannuel avec les maires ? (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains, ainsi que sur des travées du groupe UC.)
M. le président. La parole est à Mme la ministre de l’éducation nationale et de la jeunesse. (Marques de déception sur les travées du groupe Les Républicains.)
Mme Nicole Belloubet, ministre de l’éducation nationale et de la jeunesse. Je suis désolée que ma réponse suscite déjà des regrets… (Sourires.)
Monsieur le président, mesdames, messieurs les sénateurs, monsieur le sénateur Sautarel, pour avoir été rectrice de l’académie de Limoges, je suis consciente que la carte scolaire est un sujet sensible dans les départements ruraux et j’aurai à cœur de travailler en amont avec les élus pour prendre en compte les réalités des territoires.
Depuis le mois de décembre 2023, une instance de concertation a été mise en place, notamment dans les territoires ruraux, pour donner à la carte scolaire de la visibilité à trois ans. (Marques de contestation sur les travées des groupes Les Républicains et UC.)
Un sénateur du groupe Les Républicains. Non, c’est faux !
Mme Nicole Belloubet, ministre. Je veillerai personnellement à évaluer l’efficacité de ce dispositif qui vient d’être déployé. Nous verrons au printemps prochain comment il s’est déroulé.
Comme vous le savez, monsieur le sénateur, la carte scolaire est le résultat d’un travail qui vise à répondre aux évolutions des effectifs scolaires et à la réalité des territoires.
Dans le Cantal, il nous faut prendre en compte la baisse démographique que nous constatons. Certes, le taux d’encadrement n’est qu’un chiffre abstrait, mais, dans le Cantal, son niveau, qui est déjà l’un des meilleurs de notre pays, va continuer à s’accroître, puisqu’il passera de 7,88 à 7,89. (Marques d’ironie sur les travées des groupes Les Républicains et UC.)
M. Mathieu Darnaud. C’est Byzance !
Mme Nicole Belloubet, ministre. Cela indique une tendance, mesdames, messieurs les sénateurs.
Je vous rejoins toutefois sur le fait que l’on ne peut pas se satisfaire de chiffres et que nous devons élaborer des réponses qui soient mieux adaptées aux territoires, notamment une allocation progressive des moyens qui prenne en compte à la fois l’indice d’éloignement et ce que l’on appelle le dispositif territoires éducatifs ruraux au bénéfice des écoliers.
M. Laurent Burgoa. Gabriel, reviens !
Mme Nicole Belloubet, ministre. Je crois savoir que celui-ci fonctionne parfaitement dans le Cantal.
Nous allons également labelliser des places supplémentaires en internats d’excellence, ce qui constituera un élément d’attractivité pour nos étudiants.
M. le président. Veuillez conclure, madame la ministre !
Mme Nicole Belloubet, ministre. En tout état de cause, mesdames, messieurs les sénateurs, vous pouvez compter sur moi pour être très attentive à la question de la ruralité. (Applaudissements sur les travées du groupe RDPI. – Exclamations ironiques sur les travées du groupe Les Républicains.)
M. le président. La parole est à M. Stéphane Sautarel, pour la réplique.
M. Stéphane Sautarel. Madame la ministre, au-delà des intentions, nous attendons des actes. À ce titre, je puis vous assurer que, contrairement aux engagements qui ont été pris, la concertation que vous évoquez n’a pas eu lieu.
C’est la raison pour laquelle nous demandons qu’un moratoire soit instauré pour la rentrée prochaine, non pas seulement pour le Cantal, mais pour l’ensemble des territoires ruraux concernés. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.) On ne peut en effet faire entrer des communes dans le programme Villages d’avenir et en même temps y fermer des classes. (Nouveaux applaudissements sur les mêmes travées. – M. Olivier Cigolotti applaudit également.)
fermeture de classes
M. le président. La parole est à Mme Annie Le Houerou, pour le groupe Socialiste, Écologiste et Républicain. (Applaudissements sur les travées du groupe SER.)
Mme Annie Le Houerou. Madame la ministre, dès votre prise de fonction, vous êtes allée sur le terrain pour mesurer les préoccupations de nos écoles. Curieusement, vous n’évoquez pourtant pas les fermetures de classes qui constituent le principal sujet d’inquiétude et suscitent des manifestations de parents d’élèves et d’enseignants soutenus par leurs élus.
Dans les Côtes-d’Armor, 45 classes sont menacées de fermeture, pour une baisse de 125 élèves.
Dans nos départements, à Pléguien, Penvénan, Lannion, Flavignac, Aurillac, Châteldon, les fermetures sont dénoncées. Elles conduisent à dépasser les moyennes nationales d’élèves par classe, souvent même à plusieurs niveaux par classe, notamment dans les regroupements pédagogiques intercommunaux (RPI).
« Le réarmement de nos services publics, c’est le réarmement de notre école », clamait Gabriel Attal dans cet hémicycle le 31 janvier dernier. Quel réarmement, monsieur le Premier ministre, quand vous demandez à vos services de fermer des classes pour rendre des postes ?
L’école est le socle de nos communes, qui investissent dans des équipements de qualité. La vie sociale se crée autour de l’école, qui est gage d’emploi local, d’installation d’entreprises et de médecins, ainsi que d’un moindre isolement de nos agriculteurs.
L’autorité ne se décrète pas, elle se construit dans cette cohésion sociale !
Madame la ministre, pour la réussite scolaire de tous nos enfants, pour une école inclusive, pour répondre aux enseignants qui crient leur colère et leur épuisement, pour rassurer les élus, les moyens – vous en convenez – sont insuffisants. Allez-vous donc revenir sur ces suppressions de postes ? (Applaudissements sur les travées du groupe SER, ainsi que sur des travées des groupes GEST et CRCE-K.)
M. le président. La parole est à Mme la ministre de l’éducation nationale et de la jeunesse.
Mme Nicole Belloubet, ministre de l’éducation nationale et de la jeunesse. Madame la sénatrice, vous êtes dans un département rural…
Mme Silvana Silvani. Il n’y a pas que le rural ! Vous fermez partout !
Mme Nicole Belloubet, ministre. Comme je l’ai indiqué en réponse à la question précédente, nous suivons avec attention les questions de la ruralité. Dans les départements urbains, les problématiques qui se posent sont un peu différentes, même si elles méritent également d’être prises en compte.
Si, dans le département des Côtes-d’Armor, nous constatons en effet une baisse du nombre d’élèves relativement limitée, je rappelle qu’un effort a été fait pour maintenir le taux d’encadrement des élèves à 5,85.
Contrairement à ce que vous avez indiqué, madame la sénatrice, nous avons fermé, non pas 45 classes, mais 19. (Mme Annie Le Houerou s’exclame.) Le bilan est bien celui-ci.
Comme vous le savez sans doute, des suppressions de classe ont été annulées, ce qui est de nature à répondre aux préoccupations que vous avez exprimées. Je pense notamment aux RPI de Lohuec-Calanhel, ainsi qu’aux nouvelles classes que nous avons ouvertes dans un RPI de Plusquellec. Tout cela prouve que nous prenons en compte le terrain.
Ma préoccupation est que nous puissions disposer, en amont et si possible de manière pluriannuelle, d’une prévision de l’évolution des classes et d’une projection, si ce n’est budgétaire, du moins d’engagement réciproque. Je crois que c’est cela qu’attendent les élus et nos concitoyens. Soyez assurée que je vais m’y atteler, madame la sénatrice.
Pour le reste, je veillerai à ce que soient préservées à la fois la vie de nos villages et de nos cantons et la qualité pédagogique, qui est essentielle à mes yeux. (Applaudissements sur les travées du groupe RDPI.)
M. le président. La parole est à Mme Annie Le Houerou, pour la réplique.
Mme Annie Le Houerou. Madame la ministre, les fermetures de classes concernent, non seulement les territoires ruraux, mais aussi les zones urbaines. Votre rôle n’est pas d’organiser le déclin de nos communes rurales ou urbaines, il est de promouvoir leur attractivité.
L’école est à ce titre la mère des batailles ; or les effectifs des classes françaises sont les plus élevés d’Europe, les remplacements ne sont pas assurés, provoquant la fuite vers le privé. Le point d’alerte est franchi dans nos écoles. Voilà ce que nous disent les enseignants, motivés, mais frustrés de la dégradation des conditions de travail et de la violence qui se traduit dans les fiches d’incident qui remontent au ministère.
L’inclusion suppose des moyens et des classes moins chargées. Nous refusons l’école du tri social !
Si l’école est votre priorité, annulez les suppressions de postes et ne diminuez pas des moyens que vous estimez déjà insuffisants ! (Applaudissements sur les travées des groupes SER et CRCE-K, ainsi que sur des travées du groupe GEST.)
pêche dans le golfe de gascogne
M. le président. La parole est à M. Alain Cadec, pour le groupe Les Républicains. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)
M. Alain Cadec. Ma question s’adressait à M. le secrétaire d’État chargé de la mer et de la biodiversité, qui devait être absent, mais qui vient de nous rejoindre. Peut-être me répondra-t-il, plutôt que M. le ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires, qui était prévu pour répondre à sa place. Quoi qu’il en soit, ce sera parfait ! (Sourires.)
Je souhaite interpeller le Gouvernement sur la fermeture spatiotemporelle de certains métiers de la pêche dans le golfe de Gascogne pendant un mois, fermeture du reste théoriquement reconductible dès l’année prochaine.
Cette fermeture a été obtenue par certaines ONG devant le Conseil d’État, alors même que le Gouvernement avait décidé de surseoir à cet oukase.
Si nous sommes tous convaincus, les pêcheurs les premiers, que nous devons protéger les cétacés, nous devons aussi la protection à l’espèce en voie de disparition que sont les pêcheurs eux-mêmes. (Très bien ! sur quelques travées du groupe Les Républicains. – Exclamations ironiques sur des travées du groupe GEST.)
Après le plan de sortie de flotte post-Brexit, cette interdiction spatiotemporelle contraint notre capacité à produire.
Certes, l’État indemnisera les marins à hauteur de 80 % de leurs pertes, soit environ 80 millions d’euros, mais avec quel argent ? En appliquant une fois de plus le principe du « quoi qu’il en coûte », vous creusez le déficit, messieurs les ministres !
Je rappelle par ailleurs que le domaine maritime européen est déjà le plus réglementé du monde et que nous importons 70 % des produits de la mer que nous consommons. Cette fermeture, qui affecte 450 navires et 1 500 marins, aura pour conséquence d’amoindrir de 8 000 tonnes l’apport de nos criées, qui sont déjà dans le rouge. Où est la souveraineté alimentaire que vous brandissez comme un étendard ?
Dans le même temps, les observations réalisées ces dernières années par les scientifiques européens démontrent que la population de cétacés dans le golfe est au moins stable, et sans doute en hausse.
Nos pêcheurs, pas plus que nos agriculteurs, ne demandent l’aumône, messieurs les ministres : ils veulent simplement pouvoir exercer leur métier et en vivre.
Quelle drôle de démocratie que la nôtre, quand le Conseil constitutionnel et le Conseil d’État décident en lieu et place du Gouvernement et du Parlement ! (Bravo ! et applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)
Prenez vos responsabilités, messieurs les ministres ! Allez-vous mettre en œuvre tout ce que vous pouvez pour que cette fermeture arbitraire ne soit pas reconduite en 2025 ? (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)
M. Philippe Mouiller. Très bien !
M. le président. La parole est à M. le ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires. (Ah ! sur diverses travées.)
M. Christophe Béchu, ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires. Monsieur le sénateur Cadec, si le règlement intérieur de cette maison le permettait, c’est non pas un ministre, mais un duo de ministres qui vous répondrait, d’autant qu’il faudrait à la fois répondre au sénateur des Côtes-d’Armor que vous êtes, mais aussi à l’ancien président de la commission de la pêche du Parlement européen – trop peu le savent dans cet hémicycle –, qui connaît à ce titre parfaitement les politiques de décarbonation, d’électrification des bateaux et d’accompagnement de la pêche.
Mme Audrey Linkenheld. Quel flatteur ! (Sourires sur les travées du groupe SER.)
M. Christophe Béchu, ministre. Comme vous l’avez rappelé, monsieur le sénateur, le point de départ est, non pas la position du Gouvernement, mais la décision du Conseil d’État du 22 décembre dernier, dont l’effet se termine le 20 février prochain, c’est-à-dire dans quelques jours.
Face à cette situation, qu’a fait le Gouvernement ?
Nous nous sommes tout d’abord assurés que cette décision d’une juridiction française s’appliquerait à tous les navires étrangers. Nous avons donc contrôlé cette fermeture spatiotemporelle. Je tiens à saluer le ministre des armées pour la participation de la marine nationale et de nos patrouilleurs à ces contrôles. Je puis du reste vous assurer, monsieur le sénateur, même si tel n’était pas l’objet de votre question, qu’à cette heure aucun manquement à cette fermeture n’a été constaté.
Je ne peux pas imaginer, ensuite, que vous opposiez les dauphins et les pêcheurs ni que vous considériez qu’il ne convienne pas de les accompagner à la hauteur de leur préjudice.
M. Rachid Temal. Les dauphins ? (Sourires sur les travées du groupe SER.)
M. Christophe Béchu, ministre. Après la tenue du Comité national des pêches le 1er février dernier, nous avons obtenu l’accord de la Commission européenne le 5 février, de sorte que la plateforme qui permettra aux pêcheurs d’être indemnisés à hauteur de 80 % à 85 % de leurs pertes sera ouverte dès la semaine prochaine. J’ajoute que, comme cela a été demandé, les mareyeurs, les ports et les criées seront également accompagnés.
Enfin, dès la semaine prochaine, Hervé Berville, qui est pleinement mobilisé sur cette question, et moi-même irons à la rencontre des pêcheurs pour tirer le bilan de cette année et réfléchir aux moyens d’éviter que l’on ne se retrouve dans la même situation l’année prochaine.
Le Gouvernement ne conteste pas que, avec près de 2 500 échouages, nous avons un niveau de capture élevé, même si cela peut par ailleurs faire débat. Les estimations selon lesquelles entre 5 000 et 10 000 dauphins communs ont été capturés de manière accidentelle nous interpellent sur la survie de l’espèce.
En tout état de cause, dès la semaine prochaine, la fin de cette fermeture sera l’occasion de regarder ensemble vers l’avenir. En effet, nous croyons à la filière de la pêche et à sa participation pleine et entière à la souveraineté alimentaire de notre pays. Alors même que la surpêche reflue, nous devons aller encore plus loin pour accompagner la reconstitution des stocks. (Applaudissements sur les travées du groupe RDPI.)
sauvetage d’atos