Mme Dominique Faure, ministre déléguée. Cet amendement traite de la présidence des Caleol. Il vise à compléter les dispositions adoptées en commission des affaires économiques pour le cas où la Caleol n’est réunie ni à l’échelle de la commune ni à l’échelle de l’EPCI.
Il tend à conserver la présidence du maire, lorsque la Caleol est réunie à l’échelle de la commune, et celle du président de l’EPCI, lorsque l’EPCI a demandé qu’elle soit réunie à son échelle. Ce fonctionnement est celui qu’a introduit la commission des affaires économiques.
Pour les autres cas non traités dans le texte de la commission, l’amendement tend à prévoir une présidence tournante entre les maires. En cas d’absence d’un maire, le président sera choisi, comme aujourd’hui, parmi les membres de la Caleol désignés par le bailleur.
M. le président. L’amendement n° 1, présenté par MM. Buis, Fouassin, Buval, Patriat et les membres du groupe Rassemblement des démocrates, progressistes et indépendants, est ainsi libellé :
Alinéa 5
Remplacer cet alinéa par deux alinéas ainsi rédigés :
« 2° Du maire de la commune où sont implantés les logements attribués ou de son représentant. Il dispose de deux voix lors des délibérations et d’une voix prépondérante en cas d’égalité des voix. Il préside la commission, sauf lorsqu’elle est créée en application du second alinéa du I du présent article ;
« …° De deux membres du conseil municipal élus en son sein, dont au moins un a déclaré ne pas appartenir à la majorité municipale. Ils disposent chacun de deux voix lors des délibérations ; »
La parole est à M. Bernard Buis.
M. Bernard Buis. Par cet amendement, nous proposons une solution qui permettrait de renforcer le rôle des maires et des conseillers municipaux dans l’attribution des logements sociaux, ce qui est l’objectif de ce texte, sans instaurer pour autant un droit de veto. En effet, la rédaction actuelle de la proposition de loi ne permet pas de nous assurer que la mise en œuvre opérationnelle de ce droit de veto ne suscitera pas de nouvelles difficultés pour les maires.
Aussi, nous proposons d’instaurer, pour les trois membres de la Caleol représentant la commune, le principe de deux voix pour chaque représentant.
M. le président. L’amendement n° 7 rectifié bis, présenté par MM. Cabanel et Bilhac, Mme M. Carrère, M. Fialaire, Mme Girardin, MM. Gold, Grosvalet et Guérini, Mme Guillotin, MM. Laouedj et Masset, Mme Pantel et MM. Roux et Daubet, est ainsi libellé :
Alinéa 5
Rédiger ainsi cet alinéa :
« 2° Du maire, ou de son représentant, qui exerce la fonction de président et dispose d’une voix prépondérante en cas d’égalité des voix, et de deux membres représentant la commune où sont implantés les logements attribués. Les deux membres sont élus par le conseil municipal en son sein à la représentation proportionnelle au plus fort reste ; »
La parole est à M. Henri Cabanel.
M. Henri Cabanel. Si vous le permettez, monsieur le président, je défendrai en même temps l’amendement n° 6 rectifié.
Je rappelle que les enjeux de la politique d’attribution des logements sociaux sont un meilleur accès des ménages les plus défavorisés au parc social et une meilleure mixité sociale des villes et des quartiers.
L’habitat et le logement sont au cœur d’un projet de territoire, que ce soit par la production de logements ou par le peuplement. Or, pour que la politique d’attribution des logements sociaux soit partagée et efficace, elle ne peut être définie qu’à l’échelon local, mais aussi sur le fondement d’un cadre national posé par les textes législatifs et réglementaires.
S’il nous revient de définir ces orientations, leur mise en œuvre ne peut se faire sans le partenariat de l’État, des bailleurs sociaux, des réservataires et des associations.
Par ces deux amendements, je souhaite préserver le caractère collégial, républicain et objectif de la mise en œuvre de la politique locale de l’habitat, en particulier en ce qui concerne l’attribution des logements sociaux. En effet, le droit de veto accordé aux maires lors des réunions de la Caleol n’est pas un renforcement de leur pouvoir, comme je l’ai dit lors de la discussion générale.
Ainsi, mon premier amendement vise à renforcer le rôle de la commune au sein de la Caleol et dans le processus de validation.
Le second est un amendement de repli visant à revenir sur le droit de veto tel qu’il a été introduit dans le texte en commission.
M. le président. L’amendement n° 6 rectifié, présenté par MM. Cabanel et Bilhac, Mmes M. Carrère et Girardin, MM. Gold, Grosvalet et Laouedj et Mme Pantel, est ainsi libellé :
Alinéa 5
1° Deuxième phrase
Après le mot :
Il
insérer les mots :
dispose d’une voix prépondérante en cas d’égalité des voix et
2° Dernière phrase
Supprimer cette phrase.
Cet amendement a déjà été défendu.
L’amendement n° 12, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :
I. – Alinéa 5, dernière phrase
Supprimer cette phrase.
II. - Après l’alinéa 7
Insérer deux alinéas ainsi rédigés :
…) Après le premier alinéa, sont insérés deux alinéas ainsi rédigés :
« Elle s’appuie sur les demandes et informations enregistrées dans le système national d’enregistrement mentionné à l’article L. 441-2-1, ainsi que, pour ce qui concerne la première mise en service d’un programme, sur le résultat de la concertation que l’organisme d’habitations à loyer modéré organise avec le maire de la commune et l’ensemble des réservataires concernés.
« En cas d’opposition motivée du membre désigné au 2° du II, la commission ne peut pas décider de l’attribution d’un logement. Cette faculté ne peut s’exercer qu’une fois par logement neuf ou libéré. » ;
La parole est à Mme la ministre déléguée.
Mme Dominique Faure, ministre déléguée. Cet amendement a pour objet de limiter à une fois par logement neuf ou libéré le recours au droit de veto du maire introduit par la commission des affaires économiques. Il tend également à préciser que la Caleol doit s’appuyer sur les demandes et les informations enregistrées dans le système national d’enregistrement (SNE) de la demande de logement social.
M. le président. L’amendement n° 3, présenté par M. Gay, Mmes Corbière Naminzo, Margaté et les membres du groupe Communiste Républicain Citoyen et Écologiste – Kanaky, est ainsi libellé :
Alinéa 5, dernière phrase
Supprimer cette phrase.
La parole est à M. Fabien Gay.
M. Fabien Gay. Nous proposons de supprimer le droit de veto, et ce pour deux raisons.
Tout d’abord, comme je l’ai déjà dit en commission, qu’adviendra-t-il d’une famille qui se verra opposer un veto par une Caleol et dont le parcours dans le logement social sera ainsi stoppé net ? Vous imaginez bien qu’il sera compliqué pour une famille ayant fait l’objet d’un veto de la part du maire dans une ville A de demander un logement social dans une ville B, C ou D. Elle sera fichée rouge, ce qui lui fermera tout accès au logement social.
Ensuite, je tiens à revenir sur un débat qui a été ouvert par Yannick Jadot. Pour ma part, je ne pense pas du tout que tous les élus fassent du clientélisme. Personne ne peut dire cela – Yannick Jadot ne l’a d’ailleurs pas dit –, mais il peut exister des dérives partout. Par exemple, dans le logement privé – je ne parle pas du logement social –, un certain nombre d’associations pratiquant le testing ont mis en évidence des pratiques discriminatoires dans 75 % des cas.
Pour nous prémunir contre de tels agissements et de potentielles dérives, même s’ils sont minoritaires, nous proposerons par l’amendement n° 4 d’anonymiser les demandes de logement, comme c’est le cas à Paris depuis 2014.
En conclusion, je le répète, nous sommes totalement opposés au droit de veto.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Dominique Estrosi Sassone, rapporteur. Les deux amendements présentés par le Gouvernement tendent à introduire des précisions utiles, mais nous regrettons, madame la ministre, qu’ils visent également à supprimer un certain nombre d’éléments adoptés en commission. C’est dommage.
Ainsi, l’amendement n° 11 vise à prévoir une présidence tournante de la commission d’attribution des logements et le cas où la commune ne serait pas représentée, ce qui peut parfaitement arriver. Il reviendrait alors au bailleur social de la présider. Cette précision est utile, mais, dans le même amendement, vous supprimez le droit de veto du maire, ce que nous ne pouvons accepter.
De même, l’amendement n° 12 vise à traiter plusieurs sujets différents.
Vous souhaitez limiter l’exercice du droit de veto à une fois par logement, ce qui reviendrait à restreindre et à dénaturer complètement ce droit. Nous prendrions alors le risque d’en faire un sabre de bois, facilement contournable. Il suffirait en effet de représenter le dossier auquel il a été opposé un veto lors de la réunion suivante de la commission d’attribution pour qu’il soit retenu, et ce contre l’avis du maire, qui ne pourrait plus utiliser son droit de veto.
Vous souhaitez ensuite que la commission s’appuie sur les demandes inscrites dans le système national d’enregistrement, ce qui me semble être une précision utile et bienvenue. Malheureusement, cette disposition figure dans un amendement auquel nous ne pouvons être favorables, puisque, je le répète, nous voulons maintenir le droit de veto du maire.
Nous sommes donc défavorables à ces deux amendements.
L’amendement n° 1 de M. Buis tend à proposer une solution de remplacement au droit de veto créé par la commission, à savoir une représentation par le maire et deux délégués du conseil municipal.
Nous sommes défavorables à cette solution parce que nous pensons qu’en sollicitant fréquemment les élus, on créerait une forme d’inégalité entre les communes, en fonction de leur taille. Il est en effet plus facile pour le maire d’une grande commune que pour celui d’une petite commune de se faire représenter.
Aussi, votre proposition n’apporterait qu’une réponse partielle et poserait le problème de la disponibilité des élus locaux et du maire, sachant qu’il arrive désormais fréquemment que des commissions d’attribution se réunissent tous les quinze jours. Elle risquerait dès lors de poser des problèmes de quorum. Vous imaginez bien le type de problèmes qui pourraient en résulter : les commissions seraient reportées et les logements ne seraient pas attribués dans les délais impartis.
L’amendement n° 7 rectifié bis de M. Cabanel se différencie de l’amendement de M. Buis : le maire ou son représentant ne disposerait pas de deux voix lors des délibérations et le troisième représentant de la commune ne serait pas nécessairement membre de l’opposition municipale. Nous y sommes défavorables.
L’amendement de repli n° 6 rectifié se distingue des deux précédents : il tend à prévoir la suppression du droit de veto et le rétablissement de la voix prépondérante du maire. Or, je l’ai déjà dit, nous souhaitons conserver le droit de veto et nous pensons que la voix prépondérante n’est pas de nature à redonner de la confiance aux maires, car elle est très peu utilisée. Quand elle l’est, elle n’est même pas justifiée, alors que le recours au droit de veto devra être dûment motivé. Avis défavorable.
Enfin, je suis également défavorable à l’amendement n° 3 de M. Gay, qui tend aussi à supprimer le droit de veto. Je ne pense pas que le demandeur qui se sera vu opposer un veto de la part du maire, sur le fondement d’un ou plusieurs critères de qualification, qui sont tout à fait républicains et qui figurent dans un vade-mecum rédigé par l’Union sociale pour l’habitat, sera disqualifié pour obtenir un autre logement social.
Je le répète, le veto porte sur un logement donné, ce qui signifie que le demandeur pourra en solliciter un autre. Le premier veto pourra être justifié par la composition de la famille du demandeur, par la stabilité de la résidence où se situe le logement ou par le quartier dans lequel il se trouve, en bref par des critères qui ne seront peut-être pas applicables pour l’attribution d’un autre logement au même demandeur. Avis défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Dominique Faure, ministre déléguée. Par cohérence avec les deux amendements que j’ai présentés, je demande aux auteurs des amendements nos 1, 7 rectifié bis et 6 rectifié de bien vouloir les retirer au profit de l’amendement n° 11 du Gouvernement.
Enfin, je demande au sénateur Gay, qui a présenté l’amendement n° 3, de bien vouloir le retirer au profit de l’amendement n° 12 du Gouvernement.
M. le président. La parole est à M. Lucien Stanzione, pour explication de vote.
M. Lucien Stanzione. Cela fait une dizaine d’années que le législateur régule l’organisation et la gouvernance des commissions d’attribution des logements. Les acteurs de la chaîne d’attribution sont dotés d’outils, même si ceux-ci restent perfectibles, mais l’objectif est bien de favoriser la concertation en amont entre les acteurs et d’assurer l’impartialité des commissions.
Pour notre part, nous ne souhaitons pas retirer la présidence des commissions d’attribution aux organismes d’HLM. Vous l’aurez compris, nous voterons contre l’ensemble de ces amendements.
M. le président. La parole est à M. Fabien Gay, pour explication de vote.
M. Fabien Gay. En préambule, madame la ministre, sachez que nous ne retirerons pas notre amendement au profit du vôtre, qui n’est pas tout à fait de même nature.
Madame la rapporteure, j’ai compris que le recours au droit de veto devra être motivé. Ces critères seront-ils discrétionnaires, propres à chaque maire, ou en existera-t-il une liste ?
Mme Dominique Estrosi Sassone, rapporteur. Bien sûr !
M. Fabien Gay. J’imagine que seront pris en compte les revenus, la composition du ménage, le fait que le demandeur habite ou non déjà dans la commune. Nous n’avons pas eu le temps d’évaluer les effets concrets du dispositif introduit en commission. Soyez plus précise sur ce que vous voulez faire, madame la rapporteure : critères discrétionnaires, ce qui ouvre la porte à des abus, ou critères objectifs et motivés ?
Pouvez-vous nous éclairer ? Cela ne changera pas notre vote – nous voterons contre le droit de veto –, mais nous en saurons un peu plus sur votre projet.
M. le président. La parole est à Mme le rapporteur.
Mme Dominique Estrosi Sassone, rapporteur. Je pensais avoir été assez claire…
Un document existe aujourd’hui. (Mme le rapporteur exhibe un document en direction des travées du groupe CRCE-K.) Il est à la disposition de tous les maires et élus locaux, quel que soit leur territoire, et s’intitule La qualification du parc social et de son occupation : éléments de méthode et retours d’expérience. Les différents critères qui permettent de motiver un refus figurent à la fin de ce document : peuvent ainsi être pris en compte le niveau de revenu, la composition du foyer – famille monoparentale ou personne seule par exemple –, le montant du loyer, les données de cadrage, les activités des majeurs, le montant de l’aide au logement.
Le maire pourra s’appuyer sur ces critères et indicateurs prioritaires pour motiver le recours à son droit de veto et justifier l’inadaptation du logement concerné aux caractéristiques de la famille ou du ménage demandeur, ou encore l’inadéquation de son niveau de revenu au montant du loyer.
Tout cela est très clair et il est important que tous les élus locaux connaissent ce document établi par l’Union sociale pour l’habitat – je ne suis pas sûre que ce soit le cas –, qui est la référence pour motiver le recours au droit de veto par le maire.
M. le président. La parole est à M. Bernard Buis, pour explication de vote.
M. Bernard Buis. Je retire l’amendement n° 1 au profit de celui du Gouvernement.
M. le président. L’amendement n° 1 est retiré.
Je mets aux voix l’amendement n° 11.
(L’amendement n’est pas adopté.)
M. le président. L’amendement n° 2 rectifié, présenté par MM. Fouassin, Buis, Buval, Patriat et les membres du groupe Rassemblement des démocrates, progressistes et indépendants, est ainsi libellé :
Après l’alinéa 6
Insérer un alinéa ainsi rédigé :
…) Il est ajouté un alinéa ainsi rédigé :
« …) Un représentant du conseil départemental élu en son sein où sont implantés les logements attribués. » ;
La parole est à M. Stéphane Fouassin.
M. Stéphane Fouassin. Nous proposons d’intégrer à la commission d’attribution des logements et d’examen de l’occupation des logements, la fameuse Caleol, un conseiller départemental élu au sein du conseil départemental avec voix consultative.
Il s’agit ici de prendre en compte l’expertise des départements en matière d’accompagnement social, ainsi que leur connaissance pratique des difficultés que peuvent rencontrer les demandeurs au sein de la Caleol.
Il s’agit également de reconnaître le rôle de soutien des départements dans la construction des logements sociaux, par exemple au travers la délégation de compétence pour l’attribution des aides à la pierre, ainsi que leur rôle direct de soutien aux populations en difficulté dans leur logement via les fonds de solidarité pour le logement.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Dominique Estrosi Sassone, rapporteur. L’avis est favorable.
Même si les services sociaux départementaux peuvent d’ores et déjà être largement consultés aujourd’hui, la participation d’un représentant du conseil départemental à la Caleol avec voix consultative ne me paraît pas inutile.
La collectivité départementale est aussi partie prenante dans la construction de logements sociaux et dans la politique de l’habitat. Elle est notamment chargée de la définition du plan départemental d’action pour le logement et l’hébergement des personnes défavorisées (PDALHPD).
Je considère que cette participation avec voix consultative ne modifie pas les équilibres décisionnels de la Caleol et n’est pas de nature à alourdir son fonctionnement.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Dominique Faure, ministre déléguée. Actuellement, le président de la Caleol peut déjà appeler à siéger à titre consultatif un représentant du service chargé de l’action sanitaire et sociale du conseil départemental, en application de l’article R. 441-9 du code de la construction et de l’habitation.
Le présent amendement vise à faire de ce représentant un membre à part entière de la Caleol disposant d’un droit de vote. Cette proposition est cohérente avec le rôle de chef de file du conseil départemental en matière d’action sociale et avec son rôle en matière d’élaboration et de mise en œuvre du plan départemental d’action pour le logement et l’hébergement des personnes défavorisées. C’est pourquoi le Gouvernement émet un avis favorable sur cet amendement.
M. le président. La parole est à M. Denis Bouad, pour explication de vote.
M. Denis Bouad. Pour exercer depuis de nombreuses années et exercer encore un rôle de conseiller départemental, je serais plutôt favorable à cet amendement, mais je suis tout de même gêné à la lecture de son objet : « Il s’agit également de reconnaître au département son rôle de soutien dans la construction de logements sociaux » – c’est très bien ! –, « par exemple à travers la délégation de compétence pour l’attribution des aides à la pierre, ainsi que son rôle direct de soutien aux populations en difficulté… » On aurait pu ajouter les garanties d’emprunt, qui représentent un investissement énorme pour les départements.
Madame la rapporteure, madame la ministre, comment peut-on imaginer de demander à un conseiller départemental de siéger deux fois par semaine dans une commission – c’est le cas dans mon département –, voire une fois de plus dans d’autres organismes, tout en n’ayant qu’une voix consultative, sachant que le département qu’il représente a apporté financements, garanties d’emprunt et soutien aux plus défavorisés ?
Pour cette raison-là, et avec beaucoup de regrets, le groupe SER votera contre cet amendement.
M. le président. L’amendement n° 4, présenté par M. Gay, Mmes Margaté, Corbière Naminzo et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste – Kanaky, est ainsi libellé :
Après l’alinéa 7
Insérer un alinéa ainsi rédigé :
…) Au premier alinéa, le mot : « nominativement » est remplacé par le mot : « anonymement » ;
La parole est à M. Fabien Gay.
M. Fabien Gay. Nous demandons d’étendre l’expérimentation que nous avons évoquée précédemment sur l’anonymisation.
Cette anonymisation, qui n’empêchera pas de connaître la composition des ménages et leurs revenus, leurs besoins et leurs moyens, permettra d’effectuer un choix et de garantir au demandeur qu’il ne subira pas de discrimination, quelle qu’elle soit. Même si les cas sont rares, ils existent.
Cet amendement sera très vraisemblablement rejeté, mais nous y reviendrons à l’occasion d’un débat plus large sur le logement.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Dominique Estrosi Sassone, rapporteur. Bien vu, monsieur Gay : la commission émet un avis défavorable sur cet amendement.
L’anonymisation existe déjà pour les demandeurs avant la réunion de la commission, les éléments personnels n’étant pas transmis. En revanche, les caractéristiques socio-économiques, les motivations de la demande et les éléments relatifs à l’identité du demandeur et à la composition familiale sont logiquement examinés par la commission.
Vous relayez des craintes de discrimination dans l’accès au logement fondée sur le nom du demandeur. J’ose penser que ces pratiques n’ont plus ou quasiment plus cours aujourd’hui.
Si une certaine anonymisation est souhaitable en amont, il est bien que les membres de la commission d’attribution disposent de l’ensemble des éléments leur permettant de prendre la décision la plus adéquate possible en fonction du logement proposé.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Dominique Faure, ministre déléguée. Le Gouvernement est lui aussi très inquiet par le constat établi par SOS Racisme, qui fait état de l’existence d’une discrimination en raison de la consonance étrangère des noms pour l’attribution des logements sociaux.
Il s’agit d’un sujet très sérieux et différentes analyses sont en cours avec l’USH et le GIP-SNE, le groupement d’intérêt public qui gère le système national d’enregistrement des demandes de logements sociaux, afin de mieux le comprendre et d’essayer d’y apporter les meilleurs remèdes.
Dans l’immédiat, il nous semble que la solution que vous proposez n’atteindra pas sa cible. En effet, ce n’est pas l’attribution, d’après nous, monsieur le sénateur, qui doit être rendue anonyme. Je ne pense pas que l’on puisse attribuer un logement à quelqu’un sans le nommer. Il faut bien un dossier, qui sera proposé par le réservataire ou le bailleur, d’abord, puis examiné par la Caleol ensuite. Or le bailleur a une obligation de vérification et d’instruction du dossier après que la candidature a été présentée par le réservataire. Bien souvent, il organise même une visite des lieux pour minimiser les risques de refus.
Dans ce contexte, l’anonymisation ne peut intervenir que très tardivement dans le processus et garantir réellement l’anonymat ne peut être qu’une gageure.
À ce stade, et même si nous sommes conscients qu’il existe des expériences d’anonymisation des dossiers présentés en Caleol, nous ne sommes pas certains que la pratique puisse être généralisée sans un énorme travail en amont avec les représentants de la profession.
C’est pourquoi, malgré toute l’importance du sujet que vous soulevez et la nécessité d’un débat, je vous suggère de retirer votre amendement.
M. Pascal Savoldelli. Sagesse ? (Sourires.)
Mme Dominique Faure, ministre déléguée. Si tel n’était pas le cas, le Gouvernement émettrait un avis défavorable.
M. le président. La parole est à M. Fabien Gay, pour explication de vote.
M. Fabien Gay. Soit il y a un problème, soit il n’y en a pas… (Exclamations sur les travées du groupe Les Républicains.)
Madame la ministre, vous venez d’avouer qu’il y a un problème, ce que reconnaissent les associations. Très bien ! Nous vous faisons donc une proposition.
L’anonymisation, par définition, ne concerne que le nom, pas la composition du ménage, ses revenus. Je suis en désaccord avec Mme la rapporteure : le nom n’apporte rien, à moins de connaître tous les demandeurs de logement social de sa commune… Bon courage ! Pour ma part, je ne connais pas les prénoms de mes 347 collègues sénateurs, alors s’il faut que j’apprenne les noms des 8 000 demandeurs de logement social de ma ville, je vais y passer du temps !
Le nom, nous sommes d’accord, n’est pas déterminant pour l’attribution d’un logement, puisque l’on ne connaît pas le demandeur personnellement. Qu’il s’appelle Pascal Savoldelli, Pierre Barros ou Fabien Gay, cela n’a aucune conséquence. Sauf pour Pascal, bien sûr … (Rires sur les travées du groupe CRCE-K.)
Plus sérieusement, seuls importent la composition du ménage, les revenus et d’autres éléments. Le débat mérite d’être poussé. Vous ne pouvez pas reconnaître qu’il y a un problème et l’évacuer de notre discussion, sauf à être en contradiction avec vous-même.
Examinons donc ce problème sérieusement de près. Notre proposition est inspirée de ce que fait déjà la mairie de Paris.
Mme Sophie Primas. Ce n’est pas notre référence !
M. Fabien Gay. Nous sommes d’accord, madame la ministre, et nous poursuivrons ce débat.
M. le président. La parole est à Mme Nathalie Goulet, pour explication de vote.
Mme Nathalie Goulet. Je voterai cet amendement. L’un de nos collègues, lorsqu’il est devenu sénateur, a rencontré des problèmes de racisme lorsqu’il a voulu louer un appartement près du Sénat. On a refusé de lui en louer un en raison de son nom, ce qui a provoqué des remous.
Votre solution me semble donc très bonne.
M. le président. La parole est à Mme Sophie Primas, pour explication de vote.
Mme Sophie Primas. Comme je l’ai dit précédemment, je ne vois pas cette discrimination, en tout cas pas dans la Vallée de la Seine, où j’habite. La mixité y est très importante dans un certain nombre de communes. On dénombre ainsi 32 nationalités dans ma commune.
J’entends bien que des associations dénoncent ce problème. Il y a peut-être un sujet, mais je ne suis pas sûre que votre amendement apporte la bonne solution. Je voterai évidemment contre, comme nous y invitent Mme la rapporteure et Mme la ministre.
Pour finir, je rappelle à Mme Goulet que notre ami sénateur qui a connu une forme de racisme en raison de son nom cherchait un appartement dans le parc privé. L’amendement de notre collègue Fabien Gay n’aurait eu aucun effet dans ce cas malheureux.