M. Emmanuel Capus. Très bien !
M. le président. La parole est à Mme Angèle Préville, pour la réplique.
Mme Angèle Préville. Monsieur le ministre, on ne peut pas se satisfaire de la situation, quel que soit ce qui a été engagé.
S’il est vrai que des mesures ont été engagées, nous avons des inquiétudes, par exemple sur les condamnations récurrentes de l’État pour inaction climatique ou non-respect de la qualité de l’air, sur des déclarations évoquant une pause réglementaire ou encore sur les régressions environnementales introduites dans certains textes.
Je partage vos propos, monsieur le ministre, sauf sur un point :…
M. le président. Il faut conclure !
Mme Angèle Préville. … la solution doit prendre en compte la justice sociale, qui seule assurera l’acceptabilité. (Applaudissements sur les travées des groupes SER et GEST.)
rave-party dans l’indre (ii)
M. le président. La parole est à Mme Nadine Bellurot, pour le groupe Les Républicains. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)
Mme Nadine Bellurot. Ma question s’adresse à M. le ministre de l’intérieur et des outre-mer.
La commune de Villegongis, dans l’Indre, 120 habitants, a dû accueillir 30 000 teufeurs (Exclamations amusées sur les travées du groupe Les Républicains.) à l’occasion du trentième Teknival.
Il est compréhensible que les jeunes se retrouvent pour écouter de la musique, mais il est inacceptable de le faire en violation du droit de propriété, en contradiction avec un arrêté préfectoral, en l’absence d’organisateurs identifiables, tout simplement en l’absence d’organisation !
C’est donc la collectivité dans son ensemble qui a organisé la sécurité physique et sanitaire des festivaliers et de la population.
Je veux saluer et remercier les sapeurs-pompiers de l’Indre, les associations de protection civile, les gendarmes, les équipes du service d’aide médicale urgente (Samu), le personnel de santé et les services de l’État et des collectivités, de leur mobilisation vingt-quatre heures sur vingt-quatre durant cinq jours.
Tout cela a un coût et c’est le contribuable qui paiera, même si – et c’est heureux – des confiscations ont eu lieu.
Au-delà de l’aspect financier, il est urgent de réinstaurer un cadre juridique ferme qui permette d’anticiper et de responsabiliser les festivaliers, comme cela était le cas avant 2016. L’illégalité entretient la clandestinité ; or les festivals continueront – ils existent depuis trente ans !
Monsieur le ministre, quelles mesures comptez-vous prendre pour mettre fin à l’impuissance de l’État face à ces situations ? (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)
M. le président. La parole est à M. le ministre de l’intérieur et des outre-mer.
M. Gérald Darmanin, ministre de l’intérieur et des outre-mer. Madame la sénatrice Bellurot, je vous remercie de vos propos sur les services publics, qu’ils relèvent de l’État ou des collectivités locales. Vos propos concernaient également, j’en suis sûr, les gendarmes, ainsi que le préfet qui était particulièrement mobilisé – je l’ai eu de très nombreuses fois au téléphone – et ses équipes.
Vous avez parfaitement raison, il y a eu violation du droit de propriété par plus de 30 000 personnes à l’occasion d’un rassemblement qui n’était pas déclaré. Dès que nous avons eu l’information, soit quelques heures avant que les festivaliers ne se rejoignent sur le site, un arrêté a été pris par M. le préfet. Je tiens évidemment à saluer l’engagement des élus municipaux malgré les difficultés que vous avez citées et les nuisances extrêmement fortes.
Pour autant, madame la sénatrice, comme il s’agissait d’un rassemblement de 30 000 personnes, dont beaucoup étaient très jeunes – la plupart avaient entre 15 ans et 30 ans –, j’ai pris la responsabilité de ne pas demander l’évacuation par la force afin d’éviter des drames. La protection de la jeunesse passait avant les nuisances, même si celles-ci étaient évidemment inacceptables.
En revanche, nous avons décidé de contrôler l’intégralité des personnes, ce qui représente plus de 30 000 contrôles, et 13 363 véhicules ont été inspectés. Cela a donné lieu à un millier de verbalisations ou d’interpellations pour consommation de stupéfiants ou conduite en état d’ébriété. De très nombreuses sortes de drogue ont été saisies.
Je souligne également que le préfet s’est appuyé sur l’article 40 du code de procédure pénale pour que des poursuites soient engagées et que l’on sache qui est responsable de cette situation et qui a organisé cette fête. Madame la sénatrice, vous comme moi, nous pensons qu’il y a beaucoup d’argent derrière tout cela…
Il est vrai que le droit actuel ne nous permet pas de poursuivre les organisateurs qui ne se déclarent pas. Il nous faut sans doute y travailler avec le Sénat, comme nous le faisons sur d’autres sujets, par exemple en ce qui concerne les gens qui s’installent illégalement sur des aires d’accueil. Le Sénat a formulé des propositions, le Gouvernement, en particulier le ministère de l’intérieur et le ministère de la transition écologique et de la cohésion des territoires, les examinera avec intérêt. (Applaudissements sur les travées du groupe RDPI.)
Mme Marie-Pierre de La Gontrie. Tout s’est finalement bien passé !
M. le président. La parole est à Mme Nadine Bellurot, pour la réplique.
Mme Nadine Bellurot. Monsieur le ministre, vous vous dites prêt au dialogue pour travailler sur cette question.
Je le redis : il faut prévoir des terrains adaptés à de tels rassemblements. Gouverner, c’est prévoir. Il ne faut pas que nous soyons de nouveau mis devant le fait accompli. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)
rapport de la cour des comptes préconisant la diminution du cheptel bovin
M. le président. La parole est à Mme Nadia Sollogoub, pour le groupe Union Centriste. (Applaudissements sur les travées du groupe UC.)
Mme Nadia Sollogoub. Ma question s’adresse à M. le ministre de l’agriculture et de la souveraineté alimentaire.
La Cour des comptes a rendu lundi un rapport sur l’avenir de l’élevage bovin qui a causé sur toutes les travées de cet hémicycle de vives réactions. J’associe d’ailleurs à mon émotion Nathalie Goulet, Anne-Catherine Loisier et tous ceux qui sont élus dans des terres d’élevage bovin, c’est-à-dire nombre de mes collègues.
Monsieur le ministre, Laurent Duplomb vous a interpellé sur ce sujet hier et vous lui avez répondu que vous feriez fermement le choix de la souveraineté nationale en la matière.
Toutefois, le rapport en question préconise clairement de manger et de produire moins de viande et d’être ainsi à l’équilibre. De fait, de cette manière, on assurerait notre souveraineté…
Monsieur le ministre, pouvez-vous me confirmer que vous voulez davantage pour l’élevage bovin, qu’il faut que cette filière d’excellence reste exportatrice et conserve des capacités de production supérieures à notre autosuffisance ? (Applaudissements sur les travées du groupe UC, ainsi que sur des travées du groupe Les Républicains. – M. Daniel Chasseing applaudit également.)
M. le président. La parole est à M. le ministre de l’agriculture et de la souveraineté alimentaire.
M. Marc Fesneau, ministre de l’agriculture et de la souveraineté alimentaire. Madame la sénatrice, votre question fait écho à un rapport de la Cour des comptes et à plusieurs questions qui m’ont été posées.
D’abord, j’invite chacun d’entre vous à lire la totalité du rapport de la Cour des comptes, sans vous limiter à la page 9 et à ses deux recommandations. Il faut rendre justice au travail qui a été accompli.
Ensuite, il est normal qu’un débat puisse avoir lieu, y compris avec la Cour des comptes, sur les équilibres à trouver. Au fond, la Cour des comptes propose la décroissance, c’est-à-dire une décapitalisation, pour répondre à des objectifs carbone que nous avons par ailleurs l’obligation de tenir.
Loin de moi l’idée de dire que l’élevage ne doit pas prendre sa part des efforts qu’il faut consentir en termes de décarbonation. D’ailleurs, les éleveurs se sont lancés dans cette voie. Ainsi, des travaux de recherche et d’innovation portant par exemple sur l’alimentation sont en cours pour tenir cette trajectoire.
Loin de moi aussi l’idée de dire qu’il ne faut pas tenir compte des évolutions de consommation depuis vingt ou trente ans. On sait que la consommation connaît une baisse structurelle et qu’il existe un report de la viande rouge vers la viande blanche. Il faut examiner cette tendance avec lucidité.
En revanche, ce qui est choquant, c’est de proposer comme seule perspective à un éleveur de ne plus être éleveur ! Or c’est bien l’objet de l’une des recommandations.
Mme Françoise Gatel. Eh oui !
M. Marc Fesneau, ministre. Voilà qui ne me semble pas acceptable. Ce n’est pas acceptable non seulement humainement, mais aussi au regard de certains territoires, en particulier ceux sur lesquels se trouvent les bovins allaitants, où il n’y a pas d’autre solution que de faire de l’élevage.
D’ailleurs, dans son rapport que je vous invite de nouveau à consulter, la Cour des comptes insiste sur la façon de mieux prendre en compte les autres services que rend l’élevage, en plus de celui, primordial, qui consiste à nous alimenter.
Nous devons réfléchir non seulement à la quantité de viande qu’il nous faut produire en France pour répondre aux besoins de consommation, mais aussi aux aménités qu’apporte l’élevage : les haies, le maintien des paysages ouverts, la lutte contre les incendies de forêt, le maintien des prairies, la préservation de la biodiversité… Tout cela a de la valeur et il faut en tenir compte dans les soutiens financiers qui sont apportés à l’élevage.
Ne caricaturons pas les positions des uns et des autres. Nous avons besoin d’avoir une trajectoire carbone à l’échelon national, mais nous avons aussi besoin de respecter les éleveurs dans leur travail et dans les différentes aménités que leurs élevages apportent à la société française tout entière. (Applaudissements sur les travées du groupe RDPI.)
M. le président. La parole est à Mme Nadia Sollogoub, pour la réplique.
Mme Nadia Sollogoub. Monsieur le ministre, je savais déjà, mais vous me le prouvez une nouvelle fois, que vous connaissez le monde de l’élevage. Monsieur le président du Sénat le connaît très bien également et moi un petit peu. (Exclamations ironiques sur les travées des groupes CRCE, SER et GEST.)
On avait un peu l’impression que des experts s’étaient rendus dans une prairie pour mesurer le méthane émis… Vous qui vous y connaissez, vous savez qu’une vache qui pète au Brésil ou au Canada a exactement le même effet sur la planète que si elle le fait en France ! (Rires et applaudissements sur les travées des groupes UC, INDEP et Les Républicains.) Blague à part, monsieur le ministre, vous avez compris mon propos.
Si les politiques publiques et les experts de la Cour des comptes doivent maintenant tenir compte du bilan carbone dans les évaluations des politiques publiques, il va falloir cesser de soutenir le pouvoir d’achat des ménagères qui mettent dans leurs caddies des bananes ou du café, qui sont autant de produits au bilan carbone déplorable. (Applaudissements sur les travées des groupes UC, INDEP et Les Républicains.)
production de cidre
M. le président. La parole est à M. Pascal Allizard, pour le groupe Les Républicains. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)
M. Pascal Allizard. « Mangez des pommes ! » (Exclamations amusées sur les travées du groupe Les Républicains.) Ce slogan sympathique est bien connu.
M. Roger Karoutchi. Très bien !
M. Pascal Allizard. De la pomme, il se trouve que l’on peut aussi en boire. Vous l’aurez compris, j’évoquerai l’avenir du cidre français. (Nouvelles exclamations sur les mêmes travées.)
L’activité cidricole crée de nombreux emplois et représente une filière économique importante dans certains territoires ruraux. C’est notamment le cas en Normandie, mais aussi dans d’autres régions françaises.
Les cidres français sont des productions de qualité, souvent valorisées sous label. Ils sont fabriqués à partir de 100 % de jus de pomme ou de moût concentré de pommes fraîches.
D’autres États européens produisent eux aussi une boisson également appelée cidre, dont la teneur en jus de pommes est bien plus faible, de l’ordre de 5 %, 10 % ou 25 %. Elle contient en plus de l’eau et du sucre en quantité, voire des exhausteurs de goût.
M. Mickaël Vallet. Scandaleux !
M. Pascal Allizard. Devant ces disparités, la Commission européenne souhaite, semble-t-il, harmoniser la définition des cidres commercialisés. Les professionnels s’inquiètent d’une harmonisation par le bas, qui serait préjudiciable à la filière.
Monsieur le ministre, où en sont réellement les travaux sur ce sujet ? Comment le Gouvernement entend-il préserver le cidre français et ses spécificités à l’échelon européen ? (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)
M. le président. La parole est à M. le ministre de l’agriculture et de la souveraineté alimentaire.
M. Marc Fesneau, ministre de l’agriculture et de la souveraineté alimentaire. Monsieur le sénateur, vous m’interrogez sur la filière du cidre. Nous sommes nombreux, y compris la Première ministre, à être sensibles à cette question, certains ici étant de bons Normands.
Mme Marie-Pierre de La Gontrie. Fayot !
M. Marc Fesneau, ministre. Votre question porte principalement sur l’harmonisation de la législation et sur l’étiquetage du cidre.
La vérité, c’est que, aujourd’hui, il n’y a pas de règle. Chacun peut dénommer cidre, ou cider dans certains pays, des produits qui ne satisfont pas tous aux mêmes exigences. Vous l’avez rappelé, le cidre que l’on boit en France est constitué à 100 % de pommes ; elles ne sont pas mélangées à autre chose.
Dans ce contexte, la France défend une harmonisation vers le haut. Alors que nos frontières sont ouvertes et qu’il est possible de dénommer « cidre » un produit qui n’en est pas vraiment un, notre objectif est de mieux valoriser la qualité du cidre français, en particulier celui qui provient de la région que vous connaissez bien. Nous travaillons sur cette base avec la Commission européenne.
À l’échelon européen, ce qui compte, c’est non pas d’avoir raison ou de défendre une position, c’est de trouver une majorité et pour cela de parvenir à convaincre ses collègues. C’est le travail que nous menons afin que la dénomination « cidre » soit réservée aux produits composés à 100 % de pommes. Les autres produits pourraient être appelés comme on veut, mais en aucun cas « cidre », si l’on parvenait à une telle harmonisation européenne.
Tels sont les éléments dont je peux vous faire part aujourd’hui. Le processus sera assez long, mais il n’est pas acceptable pour la France de dégrader la qualité du cidre français, laquelle est appréciée par les Français, mais aussi au-delà de nos frontières. Nous avons besoin de mieux la faire reconnaître. À cet égard, l’étiquetage est un élément important. (M. François Patriat et Mme Françoise Gatel applaudissent.)
Mme Françoise Gatel. Tous nos encouragements, monsieur le ministre !
M. le président. La parole est à M. Pascal Allizard, pour la réplique.
M. Pascal Allizard. La Commission européenne précise que le rapport qu’elle a réalisé sur cette question « ne conduira pas forcément à une proposition législative ». Or, nous le savons, la pomme ne tombe jamais bien loin de l’arbre : la méfiance et la vigilance sont donc de mise.
On connaît le zèle de certains « normateurs », ainsi que leur capacité à prendre le bon sens à contre-pied. Vous l’avez compris, monsieur le ministre, nous comptons sur vous ! (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains. – M. Daniel Chasseing applaudit également.)
mixité sociale dans les écoles privées
M. le président. La parole est à M. Yan Chantrel, pour le groupe Socialiste, Écologiste et Républicain. (Applaudissements sur les travées des groupes SER et GEST.)
M. Yan Chantrel. Ma question s’adresse à M. le ministre de l’éducation nationale et de la jeunesse.
Le 1er mars dernier, sur l’initiative de notre groupe, un débat a été organisé sur la mixité sociale à l’école. Le constat, implacable, était partagé sur l’ensemble de nos travées : alors que la proportion d’élèves issus de milieux défavorisés est en moyenne de 42,6 % dans le public, elle est de seulement 18 % dans le privé.
Mme Sophie Primas. Cherchez l’erreur !
M. Yan Chantrel. Ces écarts ne cessent de se creuser depuis vingt ans. Nous allons vers un système scolaire à deux vitesses : une école privée réservée aux enfants privilégiés et une école publique pour tous les autres.
Mme Sophie Primas. Et pourquoi ?
M. Yan Chantrel. Voilà le véritable séparatisme à l’œuvre dans notre pays !
Lors de ce débat du 1er mars, le ministre de l’éducation nationale a déclaré : « Parce que l’argent public finance l’enseignement privé sous contrat » – à hauteur de 73 %, je le rappelle –, « il est normal d’exiger de ce dernier qu’il favorise aussi la mixité des élèves. »
Il parlait alors de moyens de pression sur les établissements privés sous contrat et envisageait notamment de moduler leur subvention, sous forme de bonus-malus, mais aussi de jouer sur les allocations de postes. Il avait même abordé la question de la sectorisation, qui, selon lui, avait donné « des résultats probants ».
Nous attendions donc avec impatience des annonces fortes de la part du Gouvernement pour mettre fin à cette ségrégation scolaire qui mine notre pacte social et fait de notre pays l’un des plus inégalitaires de l’OCDE.
Or le protocole d’accord qui a été dévoilé le 17 mai, après deux reports, a fait pschitt ! Il ne prévoit ni exigences contraignantes, ni modulation des subventions ou des allocations de postes, ni bonus-malus, encore moins de sectorisation !
Nous comprenons donc que ce gouvernement, qui défend toujours les plus privilégiés, n’agira pas pour accroître la mixité scolaire.
Quand le Gouvernement prendra-t-il la mesure du problème ? Quand prendra-t-il…
M. le président. Il faut conclure !
M. Yan Chantrel. … des mesures fortes et contraignantes afin de rétablir la mixité scolaire dans les écoles de France ? (Applaudissements sur les travées du groupe SER. – M. Fabien Gay et Mme Marie-Noëlle Lienemann applaudissent également.)
Mme Sophie Primas. Ce n’est pas la bonne question !
M. le président. La parole est à Mme la ministre déléguée chargée de l’enseignement et de la formation professionnels.
Mme Carole Grandjean, ministre déléguée auprès du ministre du travail, du plein emploi et de l’insertion et du ministre de l’éducation nationale et de la jeunesse, chargée de l’enseignement et de la formation professionnels. Monsieur le sénateur Yan Chantrel, je vous prie tout d’abord de bien vouloir excuser l’absence de M. le ministre de l’éducation nationale, Pap Ndiaye, qui est retenu pour la remise des prix « Non au harcèlement ».
Vous le savez, notre ambition est de mener une action résolument concrète de réduction de la ségrégation sociale au sein de nos établissements scolaires. En effet, nous ne pouvons pas nous satisfaire de la situation actuelle. Vous l’avez rappelé, l’écart de composition sociale entre élèves des établissements du public, mais aussi entre établissements du public et du privé, se creuse depuis les années 2000.
Pour remédier à cette situation, le ministre de l’éducation nationale a d’abord voulu agir sur les établissements publics, qui rassemblent, je le rappelle, 90 % des élèves. C’est pourquoi il a demandé à l’ensemble des recteurs de s’emparer de différents leviers, l’objectif étant de faire progresser de 20 % la mixité sociale dans les établissements publics d’ici à 2027.
Ensuite, le ministre a souhaité privilégier la concertation plutôt que la contrainte avec les établissements d’enseignement privés, d’autant que les acteurs de l’enseignement catholique se préoccupent de la mixité sociale et scolaire et qu’ils ont très vite montré leur volonté de s’engager sur ce sujet. (Mme Monique Lubin s’esclaffe.)
C’est bien grâce à cette concertation, fruit d’un travail de plusieurs mois, que nous avons pu signer mercredi dernier un protocole d’engagement commun avec le secrétaire général de l’enseignement catholique. Cela n’avait pas été fait depuis plus de trente ans, cela mérite d’être souligné.
Ce protocole prévoit notamment un suivi, au moyen d’indicateurs précis, des effets des actions engagées sur l’évolution de la mixité sociale et scolaire au sein des établissements privés sous contrat. C’est une avancée importante, qu’il faut souligner.
Nous pensons que, pour mettre en œuvre une politique en faveur de l’égalité des chances et pour que tous les élèves réussissent, il faut convaincre et non contraindre. (Applaudissements sur des travées du groupe RDPI.)
atteintes à la laïcité à l’école
M. le président. La parole est à M. Pierre Charon, pour le groupe Les Républicains. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)
M. Pierre Charon. Ma question s’adresse à M. le ministre de l’éducation nationale et de la jeunesse, même s’il est toujours désagréable de s’adresser à un absent…
En 2022, pour faire face à la hausse continue du nombre d’atteintes à la laïcité, le ministre a élaboré un plan. Depuis sa publication, que constate-t-on ?
Au mois d’octobre dernier, le nombre de signalements avait atteint 720, soit une hausse de 130 % par rapport au mois précédent. Au mois de mars, il a encore dépassé 500.
Comme l’a déclaré M. le ministre, la hausse du mois d’octobre est liée à la commémoration de l’assassinat de Samuel Paty. Les 500 cas du mois de mars correspondent, selon lui, à une « remontée chaque année au moment du ramadan ». Ses explications très catégoriques ont d’ailleurs eu pour seul effet de susciter une polémique, notamment avec la Grande Mosquée de Paris.
Les données communiquées par les services du ministère concernant le mois d’avril, dans l’académie de Paris, ne sont pas bonnes. Je laisse au ministre le soin de les annoncer… Ce sont les chiffres les plus élevés depuis la rentrée de septembre.
À cela s’ajoutent les signalements d’actes d’antisémitisme, qui, eux, ne constituent pas des atteintes à la laïcité, mais relèvent de procédures pénales.
Ces statistiques sont-elles fiables ? La réponse est non ! Ces chiffres sont manifestement sous-estimés ! Pour le principal syndicat des personnels de direction des collèges et lycées, les tenues litigieuses, les contestations d’enseignement ou même les difficultés lors des sorties scolaires ne font pas l’objet de signalements de manière systématique.
Ces statistiques sont-elles utiles ? La réponse est encore non ! Les atteintes à la laïcité ne font l’objet d’aucune réponse.
Les chefs d’établissement se sentent bien seuls. Ils attendent des réponses concrètes. Ils demandent des outils réglementaires pour mieux gérer ces situations. L’absence de fermeté du ministre sur tous ces sujets laisse la porte ouverte à toutes les revendications communautaires.
Ma question est simple : le ministre va-t-il se contenter mois après mois de recenser les atteintes à la laïcité et de les commenter, ou va-t-il enfin donner aux responsables d’établissement des directives claires ? (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains. – M. Pascal Martin applaudit également.)
M. le président. La parole est à Mme la ministre déléguée chargée de l’enseignement et de la formation professionnels.
Mme Carole Grandjean, ministre déléguée auprès du ministre du travail, du plein emploi et de l’insertion et du ministre de l’éducation nationale et de la jeunesse, chargée de l’enseignement et de la formation professionnels. Monsieur le sénateur Charon, avant de répondre à votre question, permettez-moi de rappeler plusieurs actions engagées par M. le ministre de l’éducation nationale et de la jeunesse, absent aujourd’hui, car il remet les prix « Non au harcèlement ».
Le ministre de l’éducation nationale et de la jeunesse a demandé la publication du nombre mensuel d’atteintes à la laïcité. Vous avez rappelé ces chiffres, qui sont désormais disponibles sur le site du ministère de l’éducation nationale, afin de favoriser la transparence, d’améliorer le suivi et de mieux organiser la mobilisation contre les atteintes à la laïcité.
Il a par ailleurs renforcé, là où c’est nécessaire, les équipes académiques Valeurs de la République et étendu la formation sur ce sujet à tous les personnels de l’éducation nationale. Je rappelle que le plan qu’il a annoncé en novembre 2022 a déjà permis à 300 000 personnels d’éducation, dont 5 000 chefs d’établissement et adjoints, d’être ainsi formés. Cette formation concrète permet aux uns et aux autres d’être mieux accompagnés et de disposer d’outils efficaces pour lutter contre les atteintes à la laïcité.
Le ministre de l’éducation nationale a également renforcé les mesures disciplinaires en cas d’atteinte au principe de laïcité et diffusé une circulaire très claire aux chefs d’établissement, pour qui, jusqu’à présent, les procédures à mettre en œuvre étaient floues.
Enfin, il a institutionnalisé le Conseil des sages de la laïcité et des valeurs de la République en complétant sa composition, cinq ans après la création de cette instance. Ses membres historiques ont d’ailleurs tous été confirmés dans leurs fonctions.
Monsieur le sénateur, l’engagement du Gouvernement, en particulier celui du ministre de l’éducation nationale, dans la lutte contre les atteintes à la laïcité est sans faille. Plus que des mots, la situation requiert des actions fortes : l’accompagnement des personnels, ainsi que des mesures disciplinaires, lesquelles relèvent du domaine réglementaire. (Applaudissements sur des travées du groupe RDPI.)
décès de policiers dans le nord
M. le président. La parole est à Mme Brigitte Lherbier, pour le groupe Les Républicains. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)
Mme Brigitte Lherbier. Ma question s’adresse à M. le ministre de l’intérieur et des outre-mer.
Dimanche matin, au commissariat de Roubaix, une équipe de policiers qui prenait la relève de l’équipe de nuit a répondu à l’appel de détresse d’une jeune fille. Une patrouille de jeunes policiers s’est vue confier la mission de recueillir une mineure présumée violée afin de la protéger et de la conduire à l’hôpital.
Cette intervention au service des autres aura été la dernière pour Paul, Steven et Manon. Ce matin-là, ils sont partis de chez eux heureux, ignorant qu’ils ne reverraient jamais leurs proches.
À Roubaix, il existe une véritable solidarité entre la police nationale, la police municipale et les pompiers. C’est une ville méritante.
À l’École nationale de police de Roubaix, la directrice, la commissaire Kichtchenko, apprend aux nouvelles recrues les difficultés de la profession. Il leur faudra faire preuve de beaucoup de professionnalisme et de rigueur pour exercer ce métier. Manon, stagiaire, était prête à entrer dans cette grande famille.
Abdelkader Haroune, le commissaire principal de Roubaix, dirige le commissariat avec bienveillance et fermeté. Il dit toujours à ses agents combien la police est un réel ascenseur social pour tous ceux qui ont à cœur de défendre les valeurs de la République.
Monsieur le ministre, vous êtes fier de vos hommes ; vous avez bien raison de les défendre.
La mort de ces trois jeunes policiers de Roubaix démontre encore une fois les risques de ce métier. Ces jeunes ont été tués par un chauffard ivre, sous l’emprise de stupéfiants, roulant à grande vitesse et à contresens, un récidiviste connu des services de police.
Leur décès est un choc immense pour tous leurs collègues, leurs proches, le Nord et, plus largement, notre pays tout entier. Ce qui s’est produit est inacceptable.
Au nom de tous mes collègues, j’adresse mes sincères condoléances aux familles et aux proches de ces jeunes. Aujourd’hui, l’heure est au recueillement, monsieur le ministre, mais que pourrons-nous faire dès demain pour mettre fin à ce fléau ?
Le Gouvernement entend-il prendre des mesures pour intensifier la lutte contre les conducteurs dangereux, sous l’emprise de drogue ou d’alcool ? Envisage-t-il de durcir les peines encourues en pareil cas ? (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains et sur des travées du groupe UC. – M. Alain Richard applaudit également.)