Mme la présidente. La parole est à Mme Marie-Noëlle Lienemann, pour explication de vote.
Mme Marie-Noëlle Lienemann. Une fois n’est pas coutume, je ne suis pas favorable à cet amendement. (Exclamations amusées sur les travées du groupe Les Républicains.)
Tout d’abord, le MIT évoque les États-Unis en général. Or, je le rappelle, l’industrie française connaît un énorme retard concernant la modernisation de son outil de production, avec une durée de vie moindre de dix ans à douze ans par rapport à l’Allemagne. Est-ce donc bien le moment de pénaliser, même modestement, l’effort d’investissement nécessaire pour se mettre a minima au même niveau ?
Ensuite, j’appartiens à un courant de pensée historique pour qui alléger le travail humain de ce qu’il a de pénible et répétitif, grâce, justement, au recours à des robots, constitue un progrès. Depuis les canuts, nous avons appris que ce n’est pas par la non-robotisation que l’humain est valorisé dans son travail.
Toutefois, le fait de moderniser et de robotiser n’exclut pas de repenser notre fiscalité, en particulier en taxant la valeur ajoutée produite dans l’entreprise. Un débat n’a d’ailleurs plus cours, ce que je regrette : une partie des cotisations pourraient être assises sur la valeur ajoutée produite dans l’entreprise, ce qui aurait l’avantage d’avoir un effet redistributif lié moins strictement à l’emploi et plus à la production de richesses.
Certes, il faut taxer la richesse produite par les robots ! Mais il ne s’agit pas d’abonder par ce biais les cotisations sociales.
Mme la présidente. La parole est à Mme Michelle Meunier, pour explication de vote.
Mme Michelle Meunier. Je trouve ce débat sur les robots très intéressant. Il nous emmène loin de la référence par notre collègue Henno à un auteur du XIXe siècle.
Dans certains secteurs, les robots sont une réalité. Je pense par exemple à la manutention. Dans les grandes plateformes, des manutentionnaires ont des oreillettes qui commandent leurs gestes. Et ces robots ne se contentent pas de commander ; ils évaluent, ils contrôlent et ils notent, ce qui crée une concurrence totalement délétère entre les employés. Bien évidemment, cela ne contribue pas à l’épanouissement par le travail !
Par conséquent, je voterai cet amendement.
Mme la présidente. La parole est à M. Guillaume Gontard, pour explication de vote.
M. Guillaume Gontard. Je trouve moi aussi ce débat particulièrement intéressant. Monsieur le ministre, vous ne pourrez pas dire que nous ne décarcassons pas pour trouver des solutions ! (Sourires au banc des commissions.)
Sur la question des robots, derrière le manque d’imagination de vos propos, vous laissez apparaître votre vision de la société.
Pourquoi a-t-on construit des robots ? Pour leur confier des travaux durs, souvent effectués par trois ou quatre personnes qui pouvaient avoir mal au dos ou aux mains. On a donc fait des robots pour mieux vivre ! Tel est le sens, ou alors je n’ai pas bien compris, de la mécanisation et de la robotisation.
Dans le même temps, ces robots créent des richesses. Toute la question est de savoir comment nous faisons retomber ces richesses, pour travailler moins et vivre mieux et plus longtemps en bonne santé.
Par conséquent, à un moment donné, nous devrons réfléchir si le système de retraite nous voulons doit être fondé uniquement sur le travail des gens ou bien s’il peut s’appuyer aussi sur une partie de la richesse fournie par ces robots.
Ce débat est donc particulièrement intéressant, dans la mesure où il révèle votre vision de la société. En effet, si je vous entends, il faut travailler plus, pour finir au service des robots.
Mme la présidente. La parole est à M. Olivier Henno, pour explication de vote.
M. Olivier Henno. Ce débat sur la taxation des robots est assez intéressant.
Toutefois, depuis tout à l’heure, je me demande où vous avez puisé toute votre créativité en matière fiscale. Tout d’un coup, j’ai trouvé : le sketch des Inconnus intitulé Rap-tout : « Si t’es pas sage, taxe ! » ; « Faut qu’tu craches, faut qu’tu payes ! » ; « Essence, péage, héritage, partage, mariage, concubinage ; on est là à tous les étages ! » (Sourires sur les travées des groupes UC et Les Républicains.)
Très franchement, depuis tout à l’heure, votre créativité en matière de taxes et d’impôts est saisissante. Mais je ne pense pas qu’elle soit très sérieuse de votre part ! Pour moi, il y a surtout une forme de flibusterie parlementaire. Si nous adoptions toutes les taxes que vous proposez, l’économie du pays serait mise à bas. (Applaudissements sur les travées des groupes UC et Les Républicains.)
Mme la présidente. La parole est à M. Jean-Yves Leconte, pour explication de vote.
M. Jean-Yves Leconte. Très honnêtement, je pense que ce débat est intéressant, voire fondamental, dans le cadre d’une réforme des retraites s’appuyant sur des arguments que l’on nous servait déjà à l’époque de M. Balladur. On nous parlait alors d’espérance de vie et de démographie, sans évoquer aucune autre solution.
Sur cet amendement, je suis en total accord avec ma collègue Marie-Noëlle Lienemann. Chers amis écolos, nous affirmons depuis le début que cette réforme n’est pas utile du fait des gains de productivité permis, précisément, grâce aux progrès techniques : puisque chacun produit plus, nous pouvons avoir un système de retraite équilibré.
Cette réforme devrait nous permettre de réfléchir à l’avenir du travail. Mais ce n’est pas le cas. Quels sont les effets du télétravail sur la manière d’assurer la redistribution et la protection sociale ? Quels sont les effets, dans l’industrie, de l’intelligence artificielle ? Quel avenir pour le statut d’autoentrepreneur, de plus en plus répandu dans notre pays ? Aucune de ces questions n’est traitée dans le texte !
Sur l’évolution du travail et la manière dont on le perçoit, la réforme passe totalement à côté des grands enjeux.
Monsieur le ministre, même si je ne voterai pas cet amendement, j’estime que votre réforme est, globalement, une réforme des années 1980. Ce n’est pas une réforme moderne.
Mme la présidente. La parole est à M. Jean-Pierre Sueur, pour explication de vote.
M. Jean-Pierre Sueur. Je veux féliciter nos amis écologistes pour la rédaction de l’objet de cet amendement.
La première phrase est excellente : « La richesse produite par les robots est une chance […] ». Il est hors de question, me semble-t-il, de donner le sentiment qu’on serait contre la modernisation, contre tout ce que la modernité apporte pour rendre le travail plus facile, pour améliorer les conditions de travail et accroître la productivité de la République française.
Je reprends la lecture : « La richesse produite par les robots est une chance et doit être mise au service de l’ensemble de la population. » Il est bien question de la « richesse ». Je suis d’accord avec les propos tenus à l’instant par Marie-Noëlle Lienemann. La mécanisation, la modernisation, la robotisation, c’est ne n’est pas un mal ; c’est un bien. Mais le profit des entreprises qui provient en partie de cette évolution et du travail des êtres humains doit servir à la solidarité, notamment pour ce qui concerne la question des retraites.
Mme la présidente. La parole est à Mme Monique Lubin, pour explication de vote.
Mme Monique Lubin. Depuis bien longtemps, nous sommes pris dans nos propres contradictions. Certes, nous souhaitons que les travaux les plus pénibles disparaissent ; c’est à ce titre que les manutentionnaires d’Amazon ont été évoqués. Ils occupent des emplois particulièrement difficiles et mal payés, dont plus personne ne veut. Nous souhaitons donc une robotisation et une mécanisation maximales pour ces emplois.
D’un côté, certains Français perdent la possibilité de trouver un emploi. De l’autre, la richesse de ne cesse de s’accroître.
Le paradoxe est que les entreprises qui employaient une main-d’œuvre nombreuse, mais produisaient une faible valeur ajoutée étaient plus taxées que celles qui employaient peu de main-d’œuvre, mais produisaient une valeur ajoutée plus importante.
C’est la raison pour laquelle la discussion sur les robots me paraît intéressante. Taxer la richesse produite pourrait nous permettre de financer non seulement la protection sociale, mais aussi la recherche. Cela nous aiderait à créer d’autres emplois, pour continuer à faire travailler nos concitoyens.
Monsieur Henno, il s’agit non pas de flibusterie parlementaire, mais de travail parlementaire ! Nous vous proposons ce soir un panel de solutions. Nous n’avons jamais dit qu’il fallait tout prendre ! Simplement, vous pourrez y trouver quelques idées. Surtout, les Français pourront se rendre compte qu’on peut proposer autre chose que la solution que vous avez la paresse de présenter ! (Applaudissements sur les travées des groupes SER et CRCE.)
Mme la présidente. La parole est à M. Victorin Lurel, pour explication de vote.
M. Victorin Lurel. Quand le sujet est traité avec telle qualité, on ne peut pas ne pas intervenir !
Sur ce point, deux visions s’opposent. Je rejoins totalement M. Jean-Yves Leconte lorsqu’il dénonce l’absence de modernité de cette réforme. En effet, on refuse de prendre en compte le fait que la nature du travail a fondamentalement changé. C’est plus qu’un changement technique : c’est presque un changement anthropologique.
En fait, Benoît Hamon avait raison avant tout le monde lorsqu’il préconisait de taxer les robots et d’instaurer un revenu universel. On retrouve aujourd’hui cette très vieille idée de Thomas Paine. Le travail, y compris celui des machines, est créateur de toutes les richesses. Ce n’est pas moi qui le dis ; c’est Marx ! Il parlait de travail mort.
Monique Lubin a raison de dire que ce que nous faisons ici, c’est du travail, au sens noble du terme. Le jour où on prendra en compte cet aspect, vous comprendrez mieux Le Droit à la paresse de Paul Lafargue. Il s’agit du droit au loisir, au fait d’avoir une vie après le travail. Ce n’est pas de la fainéantise ! Il n’y a pas ici des besogneux et là des gueux qui ne voudraient pas travailler !
Nous avons donc deux visions philosophiquement différentes de la vie en société et de la société que nous voulons construire. (Applaudissements sur les travées du groupe SER.)
Mme la présidente. Les amendements nos 3695, 3696 rectifié, 3692 et 3693 sont présentés par Mme de Marco, M. Gontard, Mmes Poncet Monge et M. Vogel et MM. Benarroche, Breuiller, Dantec, Dossus, Fernique, Labbé, Parigi et Salmon.
L’amendement n° 3695 est ainsi libellé :
Après l’article 2 ter
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Le chapitre 7 du titre III du livre I du code de la sécurité sociale est complété par une section … ainsi rédigée :
« Section …
« Soutien à la Caisse nationale d’assurance vieillesse
« Art. L. 137-42. – Il est créé une contribution sur les robots industriels.
« Son taux mensuel est fixé, pour chaque robot industriel, à 6,9 % de la valeur brut produite et pour un maximum de 103 euros par mois.
« La contribution est affectée à la Caisse nationale d’assurance vieillesse telle que mentionnée à l’article L. 222-1 du code de la sécurité sociale. »
L’amendement n° 3696 rectifié est ainsi libellé :
Après l’article 2 ter
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Le chapitre 7 du titre III du livre I du code de la sécurité sociale est complété par une section … ainsi rédigée :
« Section …
« Soutien à la caisse nationale d’assurance vieillesse
« Art. L. 137-…. – Il est créé une contribution sur les robots agricoles.
« Son taux mensuel est fixé, pour chaque robot agricole, à 6,9 % de la valeur brut produite et pour un maximum de 103 euros par mois.
« La contribution est affectée à la caisse nationale d’assurance vieillesse telle que mentionnée à l’article L. 222-1 du code de la sécurité sociale. »
L’amendement n° 3692 est ainsi libellé :
Après l’article 2 ter
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Le chapitre 7 du titre III du livre I du code de la sécurité sociale est complété par une section … ainsi rédigée :
« Section …
« Soutien à la Caisse nationale d’assurance vieillesse
« Art. L. 137-42. – Il est créé une contribution sur les robots réalisant des tâches de manutention dans les entreprises.
« Son taux mensuel est fixé, pour chaque robot, à 6,9 % de la valeur brut produite et pour un maximum de 103 euros par mois.
« La contribution est affectée à la Caisse nationale d’assurance vieillesse telle que mentionnée à l’article L. 222-1 du code de la sécurité sociale. »
L’amendement n° 3693 est ainsi libellé :
Après l’article 2 ter
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Le chapitre 7 du titre III du livre I du code de la sécurité sociale est complété par une section … ainsi rédigée :
« Section …
« Soutien à la Caisse nationale d’assurance vieillesse
« Art. L. 137-42. – Il est créé une contribution sur les robots conversationnels utilisés par les entreprises.
« Son taux mensuel est fixé, pour chaque robot, à 6,9 % de la valeur brut produite et pour un maximum de 103 euros par mois.
« La contribution est affectée à la Caisse nationale d’assurance vieillesse telle que mentionnée à l’article L. 222-1 du code de la sécurité sociale. »
La parole est à Mme Monique de Marco, pour présenter ces quatre amendements.
Mme Monique de Marco. La richesse produite par la robotisation est une chance et doit être mise au service de l’ensemble de la population.
L’amendement n° 3695 concerne les robots industriels. Sachant qu’il existe 177 robots pour 10 000 employés, le potentiel est intéressant. Avec plus de 500 000 robots installés en France, nous avons de quoi renforcer le budget de la Caisse nationale d’assurance vieillesse, d’autant que la robotisation de notre économie ne fait que commencer.
Si nous n’anticipons pas ce virage technologique, nous perdrons des milliards d’euros de cotisations sociales. Chaque salarié remplacé par un robot représente plusieurs centaines d’euros par mois en moins.
Je ne pense pas que le Conseil d’orientation des retraites soit décroissant. Pourtant, après s’être penché sur cette question en 2019, il affirme : « […] si les robots deviennent substituables aux humains, certains redoutent le développement d’un chômage de masse et la raréfaction des prélèvements sociaux assis sur le travail. D’où l’idée avancée d’une “taxation” des robots. »
Aussi, je vous propose de taxer la richesse produite par les robots industriels, afin de financer nos retraites. Le plafond de cette contribution pourrait être fixé à 103 euros par mois. Il ne s’agit pas d’une charge supplémentaire pour nos entreprises, puisque ce montant correspond à la cotisation vieillesse moyenne payée par l’employeur pour un salarié en début de carrière. Finalement, c’est gagnant-gagnant : nos finances publiques seraient renflouées, et les Français ne perdraient pas deux ans de retraite dans le cadre d’une réforme purement idéologique.
L’amendement n° 3696 rectifié concerne les robots agricoles. Vendredi dernier, j’étais au Salon international de l’agriculture. Entre deux échanges et quelques dégustations, j’ai visité le stand de la ferme digitale. Chaque année, ce stand s’agrandit, et pour cause ! Plus de 9 milliards de robots agricoles seraient aujourd’hui en circulation dans le monde, et le secteur devrait représenter 35 milliards d’euros d’ici à 2030.
Robots planteurs, capteurs intelligents ou tracteurs autonomes sont autant de bijoux technologiques qui colonisent nos champs. Ces engins peuvent être une chance pour nos agriculteurs, puisqu’ils facilitent le travail agricole, réduisent les intrants et répondent au manque de main-d’œuvre.
Malgré leurs nombreux avantages, ces robots feront baisser le nombre de salariés agricoles et les cotisations sociales qui vont avec. Aussi, je vous propose de faire contribuer les robots agricoles au financement de notre système de retraite. Il ne s’agit nullement de dénoncer la robotisation ou de pénaliser nos agriculteurs, puisque le montant de cette contribution correspond à la cotisation vieillesse moyenne d’un salarié agricole. Il s’agit simplement, conformément au rapport de Mady Delvaux-Stehres – certainement une grande décroissante ! – au Parlement européen, d’imposer les robots au même niveau que les salariés qu’ils remplacent.
Un autre décroissant, Michel-Édouard Leclerc, a annoncé sur France Inter voilà trois jours ne pas se reconnaître dans cette réforme et vouloir faire payer les robots.
J’en viens à l’amendement n° 3692. La robotisation est une chance pour toutes et tous si elle est mise au service de l’ensemble de la population.
Ainsi, dans le cas des tâches de manutention, les robots permettent d’augmenter la rentabilité tout en réduisant la pénibilité du travail. Mais, comme dans tous les domaines, la robotisation du travail des manutentionnaires a des conséquences sur l’emploi et sur le volume des cotisations sociales.
Aussi cet amendement propose-t-il de faire contribuer les robots manutentionnaires au financement de notre système de retraite. Il est légitime qu’une petite partie des richesses produites en économisant sur le coût du travail soit prélevée pour contribuer. Une fois de plus, cet amendement visant à créer une taxe « robot » montre que nous ne sommes pas obligés de reculer l’âge de départ à la retraite à 64 ans. Nous pouvons par exemple rééquilibrer notre système de retraites en prélevant des cotisations sociales sur ces robots.
Mes chers collègues, connaissant vos inquiétudes concernant le financement de notre système de retraite, je sais que vous voterez cet amendement, qui permet d’apporter une réponse, tout en préservant les deux plus belles années de retraite des Français.
J’en viens à l’amendement n° 3693. Connaissez-vous les chatbots ? Ce sont de petites fenêtres de discussion qui s’affichent fréquemment lorsque vous naviguez sur le site internet d’une entreprise. Vous vous demandez certainement quel rapport ces chatbots entretiennent avec nos retraites. En réalité, il s’agit de la partie émergée de la robotisation du métier de téléconseiller, qui représente près de 300 000 emplois en France.
Aujourd’hui, plus d’un tiers des entreprises françaises sont équipées de chatbots ou, en français, d’« agents conversationnels », qui sont disponibles vingt-quatre heures sur vingt-quatre pour traiter des demandes sans temps d’attente. Ils permettent bien sûr de faire des économies sur le coût du travail.
Mais chaque nouveau robot représente des cotisations sociales moindres pour nos retraites. Aussi, je vous propose d’imposer les robots conversationnels au profit de la Cnav. Cette proposition est notamment soutenue par le rapport du Parlement européen, qui indique : « L’éventuelle application d’un impôt sur le travail réalisé par des robots doit être réexaminée, afin de maintenir la cohésion sociale et le bien-être social. »
Mes chers collègues, après la présentation de ces cinq propositions visant à créer une taxe « robot », vous aurez compris que des solutions alternatives à cette réforme existent. Si vous les refusez, cela nous permettra de comprendre votre position : vous, vous n’êtes pas là pour débattre, mais pour valider le projet du Gouvernement ! (Applaudissements sur les travées du groupe GEST.)
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Élisabeth Doineau, rapporteure générale de la commission des affaires sociales. Avis défavorable.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme la présidente. La parole est à Mme Marie-Noëlle Lienemann, pour explication de vote.
Mme Marie-Noëlle Lienemann. Je veux me faire bien comprendre.
Tout d’abord, je souhaite le développement des robots, mais, bien évidemment, pas à n’importe quelle condition ; madame Meunier, vous avez raison. La robotisation n’est pas là pour déroger au droit du travail et organiser la pression sur les salariés. Ce sont nos lois qui doivent encadrer le secteur d’intervention de l’intelligence artificielle ou des robots. Mais ce n’est pas en taxant ces derniers qu’on empêchera Amazon de doter ses salariés d’oreillettes.
Vous confondez la taxation de ce qui produit la richesse et la taxation de la richesse produite. Pour ma part, je demande qu’on taxe la richesse produite.
La taxation de la richesse produite doit-elle intégralement être dirigée vers les retraites ? Nous avons aussi besoin d’argent pour les services publics et de nombreux autres besoins humains. D’ailleurs, je vous le rappelle, en 1945, les usines n’ont pas été taxées, alors qu’un mouvement liant la modernisation à la baisse du nombre d’emplois existait déjà.
Toutes les études le montrent, la numérisation et la robotisation ne réduisent pas massivement les emplois sur la moyenne durée. Notre chômage, même lorsqu’il a été très élevé, ne trouve pas son origine dans la modernisation. C’est même l’inverse ! En effet, le retard industriel français est justement lié à l’absence, dans les temps, d’une robotisation suffisante.
Permettez-moi de citer Henri Emmanuelli, président de la commission des finances de l’Assemblée nationale pendant de très nombreuses années.
Mme la présidente. Vous avez dépassé votre temps de parole, ma chère collègue !
Mme Marie-Noëlle Lienemann. Je parlerai donc de M. Henri Emmanuelli plus tard !
Mme la présidente. La parole est à M. Guy Benarroche, pour explication de vote.
M. Guy Benarroche. Ces débats montrent une seule chose : nous attendions aujourd’hui une réponse à un besoin devenu essentiel en raison de l’évolution des processus et des modes de travail dans nos sociétés. Monsieur le ministre, ce que nous attendions, c’est une loi sur le travail que nous attendions ; pas une loi sur les retraites !
Une loi sur le travail, dans toutes ses acceptions actuelles, avec toutes les modifications que les process de travail subissent depuis des années, nous aurait effectivement permis d’envisager tous ces problèmes, y compris celui de la retraite et de son financement. C’est, certes, un sujet complexe, mais cela n’a rien d’étonnant au vu de la complexité du phénomène.
Je profite de mon intervention pour féliciter ma collègue Monique de Marco pour la leçon de maïeutique pure qu’elle nous donne au travers de ces exemples frappants. Qu’est-ce que la maïeutique ? J’en rappelle la définition précise : c’est une méthode suscitant la mise en forme de pensées confuses par le dialogue. C’est exactement ce que nous faisons. Nous ne sommes pas des flibustiers ; nous suscitons la mise en forme de pensées confuses, du moins dans l’esprit de certains, voire dans l’esprit des ministres par le dialogue. Nous aimerions dialoguer avec vous parce que nous sommes adeptes de la maïeutique.
M. Jean-François Husson. Pour l’instant, c’est entre vous que vous dialoguez !
M. Gérard Longuet. Faites un colloque de votre côté !
Mme la présidente. La parole est à Mme Marie-Noëlle Lienemann, pour explication de vote. (Marques d’impatience sur les travées du groupe Les Républicains.)
Mme Marie-Noëlle Lienemann. Je parlais d’Henri Emmanuelli, qui a proposé une réforme du financement de la protection sociale fondée sur la valeur ajoutée dans l’entreprise. Un des arguments donnés à l’époque, c’est que cela pouvait être considéré comme une remise en cause du concept de salaire différé, qui était, pour une large part, un des piliers de notre protection sociale.
Je défends l’idée suivante : la retraite, comme les allocations chômage, procède à l’évidence du salaire différé. La santé et les allocations familiales sont devenues, au cours du temps, des droits universels. Ils doivent être les mêmes pour tous et chacun doit y contribuer à proportion de sa faculté propre.
Il ne me paraîtrait donc pas absurde qu’une des parties de la valeur ajoutée créée dans l’entreprise soit justement la base de calcul pour les cotisations santé et les cotisations d’allocations familiales. Je crois très fondamentalement nécessaire de lier la retraite au financement de la masse salariale et du travail.
Comme je l’ai indiqué précédemment, la robotisation de la société ne réduit globalement pas la masse salariale ni le nombre d’emplois, surtout si le salaire est renforcé par le fait que l’on y gagne en termes de productivité.
Mme la présidente. Je suis saisie de trois amendements faisant l’objet d’une discussion commune.
L’amendement n° 2031 rectifié bis, présenté par MM. Bilhac et Artano, Mme N. Delattre, MM. Gold, Guérini et Guiol, Mme Pantel et MM. Requier et Roux, est ainsi libellé :
Après l’article 2 ter
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Après l’article L. 137-26 du code de la sécurité sociale, est inséré un article L. 137-… ainsi rédigé :
« Art. L. 137-…. – Il est institué au profit de la Caisse nationale d’assurance vieillesse, une taxe spéciale sur les caisses de paiement automatiques :
« 1° Les distributeurs automatiques de billets installés dans les communes de plus de 20 000 habitants ;
« 2° Les cabines de péages autoroutiers ;
« 3° Les caisses automatiques de parking ;
« 4° Les caisses automatiques de supermarchés ;
« 5° Les caisses automatiques des stations-services.
« Le montant de cette taxe est fixé à 20 000 € par an par machine, montant calculé par rapport aux charges et cotisations sociales qui devraient être payées en cas d’affectation d’un salarié au poste occupé par la machine et rémunéré au salaire minimum de croissance. »
La parole est à Mme Guylène Pantel.
Mme Guylène Pantel. Cet amendement vise à instaurer une taxe sur les distributeurs automatiques de billets et autres caisses automatiques, comme les péages autoroutiers, les parkings, les supermarchés.
Cette taxe versée par les entreprises permettrait de financer la Caisse nationale d’assurance vieillesse et contribuerait ainsi à la solidarité nationale.
Pour ne pas pénaliser les petites communes, qui n’ont bien souvent qu’un seul distributeur de billets ou qu’un supermarché, il est proposé de ne cibler que les communes de plus de 20 000 habitants.
Le montant de 20 000 euros annuels par machine correspond schématiquement aux charges et cotisations sociales qui devraient être payées en cas d’affectation d’un salarié au poste occupé par la machine et rémunéré au salaire minimum de croissance.
Mme la présidente. L’amendement n° 140 rectifié quater, présenté par Mme Noël, MM. Somon et Joyandet, Mmes Belrhiti et Joseph, MM. B. Fournier et Sido et Mme Bonfanti-Dossat, est ainsi libellé :
Après l’article 2 ter
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Après l’article L. 221-2 du code du travail, il est inséré un article L. 221-2- … ainsi rédigé :
« Art. L. 221-2-…. – Il est instauré une taxe spéciale sur :
« 1° Les distributeurs automatiques de billets de banque installés dans les communes de plus de 20 000 habitants ;
« 2° Les cabines de péages autoroutiers ;
« 3° Les caisses automatiques de parking ;
« 4° Les caisses automatiques des supermarchés dont la surface est supérieure à 400 mètres carrés.
« Pour les distributeurs de billets de banque, le montant de cette taxe est fixé à 20 000 euros par an par machine, montant calculé par rapport aux charges et cotisations sociales qui devraient être payées en cas d’affectation d’un salarié au poste occupé par la machine et rémunéré au salaire minimum de croissance.
« Pour les caisses et cabines de péage, le taux est fixé pour chacune, dès le premier euro, à 3 % sur la valeur brute produite par celle-ci et pour un maximum de 103 euros. Les modalités de recouvrement sont réalisées dans les conditions déterminées par l’article 750 ter du code général des impôts.
« La présente cotisation est affectée à la Caisse nationale d’assurance vieillesse telle que mentionnée à l’article L. 222-1 du code de la sécurité sociale. »
La parole est à M. Laurent Somon.