M. le président. La parole est à Mme Évelyne Renaud-Garabedian, auteur de la question n° 279, adressée à M. le ministre de l’intérieur et des outre-mer.
Mme Évelyne Renaud-Garabedian. Madame la secrétaire d’État, l’article 3 de la Constitution dispose que le suffrage « est toujours universel, égal et secret ».
Dans le cas des élections sénatoriales des Français établis hors de France, l’atteinte que porte le vote par procuration au principe de secret du suffrage est plus que légitime et proportionnée.
L’article 53 de la loi du 22 juillet 2013 relative à la représentation des Français établis hors de France permet le vote par procuration. Son article 51 exige que la liste d’émargement reste déposée sur la table du bureau de vote pendant toute la durée des opérations de vote, mais ne prévoit nullement que ce registre doive être communiqué avant le vote.
Pourtant, le secrétariat de l’Assemblée des Français de l’étranger (AFE), qui organise cette élection, communique aux membres du collège électoral qui en font la demande le registre des procurations, avant le vote.
Ce registre dématérialisé, facilement communicable à des tiers, contient les noms des mandants et de leurs mandataires. Or, si l’on connaît la sensibilité politique du mandataire, qui doit obligatoirement faire partie du collège électoral – rappelons que celui-ci est très limité, puisqu’il n’est composé que de 533 grands électeurs –, il est aisé de deviner pour qui le mandant entend voter.
Il m’a été signalé à de multiples reprises que des reproches avaient été adressés à certains mandants à la suite de la communication de ce registre. Ces commentaires sont même allés jusqu’à provoquer l’établissement d’une nouvelle procuration, certains électeurs ayant eu peur de subir des représailles politiques.
Pour éviter les pressions, il me semble que la loi doit être interprétée strictement.
Ne serait-il pas possible, et même préférable, d’exiger de l’administration qu’elle limite la communication du registre des procurations à une simple consultation de la version imprimée de la liste d’émargement le jour du vote ?
M. le président. La parole est à Mme la secrétaire d’État.
Mme Sonia Backès, secrétaire d’État auprès du ministre de l’intérieur et des outre-mer, chargée de la citoyenneté. Madame la sénatrice Renaud-Garabedian, en 2022, pour les deux tours de l’élection présidentielle, puis des élections législatives, plus de 3,7 millions de procurations ont été établies par les Français.
Le vote par procuration constitue une dérogation, reconnue par le Conseil constitutionnel, au principe du vote secret et personnel. À ce titre, il fait l’objet d’une procédure encadrée et contrôlée, en particulier pour éviter toute fraude électorale.
Dans ce cadre, seul le registre des procurations permet à un électeur doutant de la régularité de l’établissement d’une procuration de soulever ce grief à l’appui d’une saisine du juge électoral.
Afin de garantir l’effectivité du contrôle des procurations par les électeurs, ce registre, désormais extrait du répertoire électoral unique (REU), comprend toujours les noms et prénoms du mandant et du mandataire, ainsi que l’identité et la qualité de l’autorité qui a établi la procuration, la date et le lieu de son établissement, et la durée de validité de la procuration.
Ces éléments sont des garanties tant pour les électeurs qui souhaiteraient introduire un recours que pour les membres du bureau de vote, car ils leur permettent de contrôler la véracité des procurations et ainsi la transparence et la sincérité du scrutin. Le registre est un instrument indispensable pour examiner à la fois les identités des mandants et des mandataires et le respect du plafond des procurations.
Dès lors, la mise à disposition du registre des procurations, même dans le cas que vous évoquez d’un collège électoral peu nombreux, est indispensable.
Néanmoins, pour répondre précisément à votre interrogation, le seul fait de pouvoir identifier le mandant et le mandataire d’une procuration sur le registre des procurations ne saurait constituer une atteinte au secret du vote, dans la mesure où cette identification ne conduit pas à une divulgation réelle du choix de l’électeur.
Si un électeur se trouvait être soumis à des pressions, il devrait saisir sans attendre le juge électoral, qui est compétent pour rechercher si d’éventuelles manœuvres ont été de nature à altérer la sincérité du scrutin.
C’est pour ces raisons, madame la sénatrice, que le Gouvernement n’envisage pas de supprimer les mentions relatives aux noms et prénoms des mandataires sur le registre des procurations.
nouvelles mesures pour le financement du permis de conduire
M. le président. La parole est à M. Pascal Martin, auteur de la question n° 090, transmise à Mme la ministre déléguée auprès du ministre du travail, du plein emploi et de l’insertion et du ministre de l’éducation nationale et de la jeunesse, chargée de l’enseignement et de la formation professionnels.
M. Pascal Martin. Madame la secrétaire d’État, comme vous le savez, le permis de conduire est, pour les jeunes, un véritable passeport vers l’autonomie.
Il se révèle vital pour ceux qui résident dans des zones rurales ou périurbaines, là où les Français ne peuvent compter que sur des solutions de transport personnelles pour leur vie sociale, scolaire et professionnelle.
Nous sommes aujourd’hui confrontés à une double réalité : d’un côté, les mesures mises en place pour faire baisser le prix du permis de conduire ne sont pas suffisamment opérantes ; de l’autre, les écoles de conduite voient leurs frais augmenter drastiquement du fait de l’inflation.
Seule une action concrète sur les financements permettrait d’aider les jeunes à accéder à la mobilité et à l’emploi.
Les professionnels proposent de mettre en œuvre une mesure utile, qui profiterait à la grande majorité des jeunes et aurait un impact financier limité pour l’État : la portabilité du compte personnel de formation (CPF) au sein de la cellule familiale.
Ainsi, les parents pourraient utiliser tout ou partie des sommes créditées sur leur compte personnel de formation pour financer la formation de leurs enfants au permis de conduire.
Sur le modèle de la portabilité d’autres droits acquis, tels que les pensions de réversion, ou encore les congés et jours de RTT, on renforcerait ainsi l’efficacité du CPF, qui connaît certes un fort engouement, mais ne bénéficie pas toujours à ceux qui en auraient le plus besoin, notamment les jeunes âgés de 16 à 24 ans.
Cette mesure renforcerait la solidarité intergénérationnelle en concentrant l’allocation des ressources des travailleurs sur un enjeu d’emploi, d’égalité et de justice sociale.
Je vous demande, madame la secrétaire d’État, de bien vouloir me préciser votre position sur ce sujet.
M. le président. La parole est à Mme la secrétaire d’État.
Mme Sonia Backès, secrétaire d’État auprès du ministre de l’intérieur et des outre-mer, chargée de la citoyenneté. Monsieur le sénateur Pascal Martin, le dispositif du compte personnel de formation, tel qu’il est conçu, offre des droits attachés à chaque personne tout au long de sa carrière professionnelle ; il constitue un réel progrès social.
En effet, la loi du 5 septembre 2018 pour la liberté de choisir son avenir professionnel a instauré un droit individuel utilisable par tout salarié, tout au long de sa vie active, y compris en période de recherche d’emploi, pour suivre une formation certifiante. Le CPF est alimenté automatiquement au début de l’année qui suit l’année travaillée et les droits qui y sont afférents restent acquis même en cas de changement d’employeur.
Ces droits sont ainsi rattachés au salarié tout au long de sa vie professionnelle ; à ce titre, ils ne peuvent faire l’objet d’un don. Ils s’appuient sur un fonds mutualisé, issu de la contribution unique à la formation professionnelle et à l’alternance, obligatoirement versée par les entreprises, qui permet aujourd’hui le financement de plus de deux millions de comptes par an.
L’initiative que vous proposez pourrait être intéressante, mais les droits au CPF reposent sur cette contribution qui vise à couvrir les demandes des bénéficiaires s’inscrivant dans une démarche individuelle de formation ; à ce titre, ils ne peuvent devenir cessibles.
La formation au permis de conduire est aujourd’hui une action éligible au CPF, dans la mesure où elle contribue à la réalisation ou à la sécurisation du projet professionnel du titulaire du compte.
En outre, le Gouvernement a développé plusieurs aides afin d’accompagner les jeunes de 15 à 25 ans, les apprentis d’au moins 18 ans, les demandeurs d’emploi et les personnes en situation de handicap dans le financement de leur permis de conduire.
Par exemple, chaque jeune de 15 à 25 ans peut bénéficier du dispositif « permis à 1 euro par jour », qui permet un échelonnement du paiement de cette formation, sans intérêt et avec des mensualités plafonnées à 30 euros.
M. le président. La parole est à M. Pascal Martin, pour la réplique.
M. Pascal Martin. Madame la secrétaire d’État, le CPF est un progrès social, c’est incontestable. Il conviendrait selon moi d’envisager de le rendre cessible.
En effet, même si des collectivités, et notamment certaines communes, font des efforts d’accompagnement pour les jeunes, il n’en reste pas moins que, pour ceux d’entre eux qui connaissent de vraies difficultés, cette solution serait tout à fait intéressante.
législation sur les forêts cinéraires
M. le président. La parole est à Mme Elsa Schalck, auteure de la question n° 021, adressée à M. le ministre de l’intérieur et des outre-mer.
Mme Elsa Schalck. Madame la secrétaire d’État, je souhaiterais vous interroger sur une évolution de société qu’appellent de leurs vœux de plus en plus de nos concitoyens et d’élus : pouvoir faire de la forêt sa dernière demeure.
Une forêt cinéraire est définie comme un site d’inhumation d’urnes funéraires biodégradables. Elle permet de vivre le deuil différemment, en offrant des lieux de mémoire et de recueillement en pleine nature, qui sont aussi pour les familles des défunts une alternative plus économique et écologique que les cimetières classiques. Cette approche prend également en compte le manque de places dans ces derniers. Comme dans un cimetière, chaque arbre d’une telle forêt devient une concession pérenne.
Les forêts cinéraires existent dans des pays européens voisins, à l’instar de la Suisse, du Luxembourg et de l’Allemagne, où la première forêt cinéraire a été inaugurée il y a déjà vingt et un ans et où l’on en recense actuellement une centaine.
Malheureusement, dans notre pays, la réglementation peut être bloquante, comme a pu nous le montrer l’exemple de la commune d’Arbas, en Haute-Garonne, dont le projet a été arrêté en raison de blocages administratifs dus à des contradictions au sein des services de l’État.
Ces contradictions résultent d’incompatibilités avec le droit funéraire en vigueur : en France, disperser les cendres d’un défunt en pleine nature est autorisé, mais l’opération doit être gratuite. En outre, une urne inhumée doit permettre la conservation des cendres, ce qui interdit en l’état les urnes biodégradables.
En Alsace, les communes sont de plus en plus nombreuses à vouloir disposer d’une forêt cinéraire et trouvent, à cette fin, d’autres solutions. C’est le cas de la commune de Muttersholtz, dans le Bas-Rhin, qui a décidé d’implanter une telle forêt grâce à des urnes fabriquées avec des matériaux naturels, comme le bois ou la pierre.
La commune d’Illkirch-Graffenstaden en fera de même sous peu en créant un jardin des souvenirs, qui permettra d’allier nature et lieu de mémoire.
Madame la secrétaire d’État, comment comptez-vous accompagner les communes qui s’engagent dans un projet de forêt cinéraire ? Envisagez-vous de préciser le cadre juridique pour de tels aménagements ?
M. le président. La parole est à Mme la secrétaire d’État.
Mme Sonia Backès, secrétaire d’État auprès du ministre de l’intérieur et des outre-mer, chargée de la citoyenneté. Madame la sénatrice Schalck, les projets de forêt cinéraire constituent des sites cinéraires dits « isolés », car ils sont situés hors d’un cimetière et ne sont pas contigus à un crématorium. La création et la gestion de ces sites reviennent exclusivement aux communes et aux établissements publics de coopération intercommunale (EPCI) à fiscalité propre.
Les projets que vous évoquez ne peuvent être mis en œuvre car ils sont incompatibles avec le droit funéraire en vigueur. En effet, l’inhumation d’une urne biodégradable dans ce type de site, après réservation d’un emplacement, revient à faire payer aux familles des prestations qui doivent être gratuites.
En l’état actuel du droit, la dispersion des cendres à l’issue de la crémation est notamment autorisée « en pleine nature ». Cette opération, qui peut par exemple s’effectuer au sein d’un espace naturel forestier, est gratuite, mais ne peut donner lieu à la matérialisation d’une sépulture.
Le Gouvernement reste toutefois attentif à cette situation et aux attentes des élus locaux souhaitant s’engager dans ces projets. Afin de les accompagner, les services de l’État demeurent à la disposition des collectivités qui souhaitent, dans le respect du droit en vigueur et en veillant à la protection des intérêts des familles et de la dignité des défunts, créer un site cinéraire isolé, à l’esthétique et au fonctionnement plus écologiques que les cimetières et les sites cinéraires traditionnels.
nécessaire réaffectation dans le nord-pas-de-calais d’un hélicoptère de la sécurité civile dragon 62
M. le président. La parole est à M. Jean-François Rapin, auteur de la question n° 123, adressée à M. le ministre de l’intérieur et des outre-mer.
M. Jean-François Rapin. Madame la secrétaire d’État, en 2015, les moyens de la sécurité civile du Pas-de-Calais se sont vus amputés par le transfert de l’hélicoptère Dragon 62, qui opérait sur le département, vers la Guyane. Je ne conteste pas ce transfert, la Guyane ayant besoin de moyens complémentaires de sécurité civile.
Néanmoins, le département du Pas-de-Calais revêt en ce moment un caractère particulier, notamment dans la zone du Touquet, où l’hélicoptère Dragon 62 était implanté.
En effet, vous le savez, sur ce littoral, plusieurs questions importantes se posent.
Tout d’abord, le tourisme évolue énormément : la fréquentation augmente de façon exponentielle. Or la confluence de trois estuaires implique des dangers substantiels, notamment liés aux marées montantes.
Par ailleurs, nous sommes confrontés au problème migratoire, dont l’enjeu est à la fois la surveillance des côtes et les interventions pour secours aux personnes.
Madame la secrétaire d’État, les élus du Pas-de-Calais, mais aussi les services de secours, qui le réclament souvent, souhaitent que soit de nouveau envisagée la réimplantation de cet hélicoptère sur l’aéroport du Touquet, au mieux sur une période annuelle, au pire sur une période estivale.
Dans le contexte de la renégociation du schéma d’implantation, que compte faire le Gouvernement pour ce département ?
M. le président. La parole est à Mme la secrétaire d’État.
Mme Sonia Backès, secrétaire d’État auprès du ministre de l’intérieur et des outre-mer, chargée de la citoyenneté. Monsieur le sénateur Rapin, la flotte d’hélicoptères de la direction générale de la sécurité civile et de la gestion des crises (DGSCGC) compte actuellement 35 hélicoptères – nombre qui sera porté à 37 d’ici à quelques jours.
L’acquisition de nouveaux appareils – deux en 2021 et deux en 2022 – a ainsi permis, dans un temps court, de résoudre en partie les difficultés liées aux défaillances du prestataire logistique et au vieillissement du parc d’hélicoptères EC145.
Mais l’équilibre reste fragile, entre la ressource humaine disponible et une ressource technique qui n’est pas encore optimale, à tel point qu’un détachement permanent est actuellement fermé depuis plus d’un an.
Dans le cadre du projet de loi d’orientation et de programmation du ministère de l’intérieur (Lopmi), ont été actés le renouvellement de la flotte actuelle et l’atteinte d’un objectif cible de 40 appareils, objectif qui permettra de remplir le contrat opérationnel d’ouverture des bases et détachements existants en lien avec les ressources humaines disponibles.
Une étude sur l’implantation et la répartition actuelle des bases pourra alors être conduite, en lien avec les implantations des hélicoptères de la gendarmerie nationale et de celles des HéliSmur du service mobile d’urgence et de réanimation (Smur). Elle concernera bien entendu la faisabilité de l’ouverture d’une base dans la zone de défense nord.
Dans cette attente, je rappelle que la région Hauts-de-France dispose de sept hélicoptères, dont trois d’État. Ainsi, quatre HéliSmur sont implantés respectivement à Amiens, Arras, Laon et Lille, un EC135 et un Écureuil de la gendarmerie nationale sont implantés à Amiens et un Dauphin de la marine nationale au Touquet.
Ces implantations permettent donc de couvrir actuellement les besoins en l’absence d’hélicoptère de la sécurité civile.
M. le président. La parole est à M. Jean-François Rapin, pour la réplique.
M. Jean-François Rapin. Merci de votre réponse, madame la secrétaire d’État. Je m’attendais à ce que vous dressiez un panel de ce qui existe dans les Hauts-de-France, mais, vous le savez, les interventions du service d’aide médicale urgente (Samu) ne sont pas les mêmes que celles de la sécurité civile.
Vous avez cité le Dauphin de la marine nationale : j’en suis heureux, mais je vous signale qu’il est actuellement impossible de coordonner les actions de la sécurité civile, du Samu et de la marine nationale. En effet, les heures d’intervention de cette dernière étant limitées, l’hélicoptère ne peut pas être mobilisé à tout instant.
situation de l’agence nationale du traitement informatisé des infractions
M. le président. La parole est à M. Didier Marie, auteur de la question n° 236, adressée à M. le ministre de l’intérieur et des outre-mer.
M. Didier Marie. Madame la secrétaire d’État, je souhaite attirer l’attention du Gouvernement sur le problème rencontré par la ville de Rouen dans le cadre de la dépénalisation du stationnement payant.
La collectivité fait usage de véhicules à lecteur automatique de plaques d’immatriculation pour sanctionner le non-paiement du stationnement. Elle a conclu une convention avec l’Agence nationale de traitement automatisé des infractions (Antai), qui est chargée de l’envoi du forfait de post-stationnement à l’adresse de la carte grise des propriétaires de véhicules en défaut de paiement.
Si ce forfait de post-stationnement n’est pas acquitté dans les délais, la direction générale des finances publiques (DGFiP) adresse un avertissement avec une majoration à hauteur de 50 euros. Or c’est à cette étape de la procédure qu’un grand nombre d’usagers indiquent n’avoir pas reçu ce forfait de post-stationnement. Ceux-ci saisissent alors la commission du contentieux du stationnement payant (CCSP), qui interroge à son tour l’Antai sur la preuve de l’envoi de ce forfait à l’adresse référencée sur la carte grise du requérant.
L’Agence n’apportant jamais la preuve demandée, la CCSP annule systématiquement la majoration et demande à la collectivité d’adresser à l’Antai cette décision d’annulation. Quand la CCSP annule la majoration ou la somme du forfait et de la majoration, l’Agence doit alors prévenir la DGFiP pour procéder au remboursement.
Toutefois, la collectivité a constaté que la décision d’annulation n’est pas systématiquement transmise à la DGFiP, car les requérants qui n’ont pas obtenu remboursement sollicitent la CCSP pour faire exécuter les décisions. La collectivité regrette l’illisibilité du processus et craint donc que cela n’aboutisse à des condamnations pécuniaires à son encontre.
Madame la secrétaire d’État, que compte entreprendre le Gouvernement pour simplifier les échanges entre l’ensemble de ces administrations et la commune ?
M. le président. La parole est à Mme la secrétaire d’État.
Mme Sonia Backès, secrétaire d’État. Monsieur le sénateur Marie, l’Antai a été sollicitée, dès 2018, lors de la mise en place de la réforme du stationnement payant, pour proposer plusieurs services aux collectivités sur leur territoire.
L’Agence joue ainsi un rôle double : d’une part, elle assure, pour les collectivités qui en font le choix, l’édition et l’envoi des avis de paiement des forfaits de post-stationnement (FPS) ; d’autre part, elle émet le titre permettant la majoration de 50 euros pour le compte de l’État, si l’avis de paiement de FPS n’a pas été réglé dans un délai de trois mois.
En 2021, l’Agence a ainsi adressé plus de 11 millions d’avis de paiement de FPS pour le compte de différentes collectivités locales, dont environ 132 000 pour la ville de Rouen – chiffre à mettre en perspective avec les 52 millions de courriers traités annuellement par l’Antai.
Elle apportait jusqu’à présent les informations relatives à l’envoi des avis de paiement aux collectivités locales qui le lui demandaient ; charge à celles-ci de les relayer devant la CCSP pendant l’instruction des requêtes. Toutefois, la jurisprudence de cette juridiction administrative tend à ne pas reconnaître à ces informations la valeur de preuve de la notification.
Afin de trouver une solution à ce problème, l’Agence développe, depuis 2021, une interconnexion informatique avec la CCSP qui devrait permettre, à terme, la transmission des éléments de preuve quant à la notification des avis de paiement de FPS.
En ce qui concerne les décisions rendues par la CCSP, et contrairement à ce qui a pu être indiqué, l’Antai transmet systématiquement à la DGFiP les messages d’annulation de FPS envoyés par les collectivités.
Néanmoins, l’augmentation du nombre de requêtes déposées devant la CCSP au fil des ans – plus de 150 000 en 2021 – a mécaniquement allongé les délais de traitement des dossiers. Il peut se passer un délai important entre la contestation du FPS majoré et la prise de décision de la CCSP, pendant lequel des dossiers peuvent avoir été sortis pour archivage dans les trésoreries locales.
Par conséquent, les trésoreries doivent alors passer d’un traitement rapide et automatisé du remboursement à un traitement manuel qui allonge, par définition, les délais de remboursement.
transformation en projet de loi de la proposition de loi constitutionnelle visant à protéger et à garantir le droit fondamental à l’interruption volontaire de grossesse
M. le président. La parole est à Mme Mélanie Vogel, auteure de la question n° 307, transmise à M. le garde des sceaux, ministre de la justice.
Mme Mélanie Vogel. Madame la secrétaire d’État, vous le savez, lors d’un vote historique à l’Assemblée nationale le 24 novembre dernier, les députés ont adopté une proposition de loi constitutionnelle visant à introduire le droit à l’avortement dans la Constitution.
Cette proposition de loi, qui était portée par Mathilde Panot, a été adoptée grâce à des votes émanant de tous les groupes, validant une proposition de formulation commune à une écrasante majorité.
Le Gouvernement s’est déclaré, depuis la réélection d’Emmanuel Macron, favorable à cette modification de la Constitution – sa position ayant été contraire durant le premier mandat, je m’en félicite !
Ma question est la suivante : le Gouvernement compte-t-il déposer un projet de loi visant à inscrire le droit à l’avortement dans la Constitution ?
En effet, il s’agirait du véhicule législatif le plus approprié, car le chemin parlementaire d’une proposition de loi ne nous permet pas d’adopter celle-ci en Congrès, et nous impose de passer par un référendum.
Or un référendum ne paraît ni nécessaire ni justifié sur le plan démocratique, pour plusieurs raisons.
Tout d’abord, 86 % de la population se déclare favorable à cette modification. Nous ne voyons donc pas pourquoi il serait absolument nécessaire d’organiser un référendum.
Par ailleurs, l’organisation d’un référendum coûte des dizaines de millions d’euros. À un moment où les finances publiques sont, nous dit-on, sous tension, pourquoi dépenserions-nous une telle somme pour poser aux Françaises et aux Français une question à laquelle nous connaissons déjà la réponse ?
Enfin, la tenue d’un référendum implique une campagne référendaire. Celle-ci se tiendrait alors pendant des mois, durant lesquels toutes les personnes qui s’opposent au droit à l’avortement disposeraient d’une tribune pour s’opposer à un droit pourtant défendu par une écrasante majorité des Françaises et des Français.
Je le redis, ma question est très simple : le Gouvernement déposera-t-il un projet de loi ? Attendez-vous un vote favorable du Sénat ou comptez-vous agir avant ? Surtout, si vous ne voulez pas agir en ce sens, pouvez-vous nous expliquer pourquoi car personne n’en comprend les raisons ?
M. le président. La parole est à Mme la secrétaire d’État.
Mme Sonia Backès, secrétaire d’État auprès du ministre de l’intérieur et des outre-mer, chargée de la citoyenneté. Madame la sénatrice Vogel, le droit à l’interruption volontaire de grossesse (IVG) pour nos concitoyennes est l’un de nos droits fondamentaux les plus absolus.
Nul – je dis bien nul – ne doit pouvoir retirer aux femmes le droit de disposer de leur corps. C’est pourquoi le Président de la République a annoncé, dès janvier dernier, vouloir l’inscrire dans la Charte des droits fondamentaux de l’Union européenne.
La décision choquante et incompréhensible de la Cour suprême outre-Atlantique n’a fait que renforcer notre volonté en ce sens. Certains diront que l’exemple américain n’a pas sa place en France. Certes, nos institutions fonctionnent différemment ; le droit à l’IVG est ici mieux protégé. Mais, de grâce, ne prenons pas de risque, car il suffira d’une crise pour que le droit des femmes soit remis en cause !
C’est pourquoi, comme l’ont annoncé la Première ministre et le garde des sceaux, le Gouvernement appuiera toutes les initiatives parlementaires engagées sur cette question. C’est d’ailleurs ce qu’il a fait le 19 octobre dernier en soutenant avec force votre proposition de loi, madame la sénatrice. Malheureusement, ce texte, qui évoquait également la contraception, a été rejeté de seulement 17 voix – nous le regrettons.
Vous le savez, le 24 novembre dernier, le garde des sceaux a de nouveau répondu présent en soutenant la proposition de loi de la présidente Panot qui a, elle, été largement adoptée à l’Assemblée nationale, ce dont le Gouvernement se félicite.
Je note d’ailleurs que, pour concentrer nos efforts, la majorité et la présidente Aurore Bergé ont retiré leur proposition de loi.
Il revient désormais au Sénat de se prononcer sur la nouvelle version adoptée, qui est selon nous plus à même de faire consensus en ce qu’elle ne mentionne pas la contraception et renvoie à la loi.
En effet, je rappelle que, en matière de révision constitutionnelle, quel que ce soit le véhicule législatif – que ce soit une proposition de loi ou un projet de loi –, la règle est la même : il faut que les deux chambres donnent leur accord. Or cela ne semble pas être acquis à ce stade, en particulier en ce qui concerne la chambre dans laquelle nous nous trouvons.
Le Parlement est dans son rôle, le Gouvernement est dans le sien pour soutenir ces initiatives, qui sont engagées et cheminent, afin que le droit à l’IVG soit enfin protégé dans notre norme suprême.
situation de la filière gras périgourdine