compte rendu intégral
Présidence de Mme Laurence Rossignol
vice-présidente
Secrétaires :
Mme Jacqueline Eustache-Brinio,
Mme Martine Filleul.
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Procès-verbal
Mme la présidente. Le compte rendu analytique de la précédente séance a été distribué.
Il n’y a pas d’observation ?…
Le procès-verbal est adopté sous les réserves d’usage.
2
Questions orales
Mme la présidente. L’ordre du jour appelle les réponses à des questions orales.
Mes chers collègues, cet après-midi, le Sénat poursuivra l’examen du projet de loi finances rectificative. Je demande donc à chacun de bien vouloir respecter son temps de parole.
régularisation des étrangers en situation irrégulière
Mme la présidente. La parole est à M. Bernard Fialaire, auteur de la question n° 001, adressée à M. le ministre de l’intérieur et des outre-mer.
M. Bernard Fialaire. Madame la ministre, les articles L. 435-1 à L. 435-3 du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile permettent la régularisation d’étrangers par le travail.
Cependant, les articles L. 8251-1 à L. 8256-8 du code du travail prévoient à l’encontre des employeurs recrutant des étrangers en situation irrégulière de lourdes peines allant jusqu’à cinq ans d’emprisonnement, 100 000 euros d’amende, la suppression d’aides publiques et l’interdiction de certaines activités.
Dans un contexte de tension sur l’emploi et alors que certaines activités, comme le bâtiment, l’hôtellerie-restauration, les transports ou l’aide à la personne, peinent à recruter, n’est-il pas temps de faire évoluer ces règles en permettant un recrutement temporaire plus facile ? Cela permettrait de répondre aux besoins de main-d’œuvre et de contrôler plus facilement les étrangers non régularisés – l’administration aurait ainsi le temps d’instruire leur situation administrative en vue de leur régularisation ou du retour dans le pays d’origine, le cas échéant.
Cela contribuerait à la lutte contre la délinquance de survie – et contre les réseaux qui l’exploitent – et cela redonnerait de la dignité à des personnes, qui, pour certaines, font preuve d’un courage remarquable pour survivre. Entre 600 000 et 700 000 personnes se trouveraient en situation irrégulière sur le territoire, selon les informations communiquées par le ministre de l’intérieur au mois de novembre 2021.
Mme la présidente. La parole est à Mme la ministre déléguée.
Mme Caroline Cayeux, ministre déléguée auprès du ministre de l’intérieur et des outre-mer et du ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires, chargée des collectivités territoriales. Comme vous l’avez souligné, monsieur le sénateur Fialaire, l’embauche de salariés étrangers induit certaines obligations pour l’employeur visant à s’assurer que l’entreprise n’exploite pas de travailleurs migrants.
Conformément au décret du 31 mars 2021, l’entreprise doit notamment déposer une autorisation de travail en ligne sur une plateforme prévue à cet effet. Elle doit également s’acquitter sous certaines conditions d’une taxe à payer dans les trois mois suivant la délivrance de l’autorisation de travail. Les employeurs sont donc tenus de se conformer à leurs obligations légales. Ils acceptent les risques, notamment pénaux, s’ils décident sciemment de contourner la réglementation.
Il peut toutefois arriver que l’entreprise découvre que son salarié est étranger, qu’il a utilisé de faux documents d’identité ou qu’il a présenté un faux titre de séjour l’autorisant directement à travailler. Dans ce cas de figure, l’entreprise peut décider de licencier le salarié en question ou l’aider à obtenir sa régularisation auprès de la préfecture.
Les travailleurs en situation irrégulière peuvent demander une admission exceptionnelle au séjour s’ils justifient de cinq ans de séjour en France et d’une ancienneté de travail de huit mois durant les deux dernières années ou de trente mois durant les cinq dernières années ; ou, à titre exceptionnel, s’ils séjournent depuis seulement trois ans en France, mais y ont travaillé au moins vingt-quatre mois durant les trois dernières années.
La circulaire ministérielle du 28 novembre 2012, dite circulaire Valls, ne crée pas de droits opposables, mais énonce « des orientations générales destinées à éclairer les préfets dans l’exercice de leur pouvoir de prendre des mesures de régularisation, sans les priver de leur pouvoir d’appréciation ». Le préfet tire ainsi les conséquences de la situation personnelle du ressortissant étranger afin de déterminer son droit au séjour.
Mme la présidente. La parole est à M. Bernard Fialaire, pour la réplique.
M. Bernard Fialaire. Contraindre une personne en situation irrégulière à attendre cinq ans pour être recrutée la place dans une situation assez compliquée…
Mme la présidente. Merci de conclure, mon cher collègue.
M. Bernard Fialaire. Il me semble d’ailleurs que les recommandations de M. Attali, qui, je crois, est écouté par le Gouvernement, vont dans le sens de ma question.
permettre à des agents de collectivité à temps partiel d’être recrutés comme sapeurs-pompiers professionnels à temps partiel
Mme la présidente. La parole est à M. Patrice Joly, auteur de la question n° 083, adressée à M. le ministre de l’intérieur et des outre-mer.
M. Patrice Joly. Madame la ministre, avec le réchauffement climatique, le risque d’incendie devrait malheureusement s’intensifier et s’étendre à l’ensemble du territoire national à l’avenir. C’est particulièrement vrai dans le département de la Nièvre, qui comporte de nombreux espaces forestiers, notamment dans le Morvan, dont la surface est couverte à 48 % par la forêt.
De plus, les sapeurs-pompiers – qu’ils soient volontaires ou professionnels – sont largement sollicités pour combler les insuffisances de la prise en charge sanitaire, qui s’expliquent par le manque de professionnels de santé et conduit les établissements hospitaliers à se retrouver en grande difficulté.
Aujourd’hui, le nombre de sapeurs-pompiers professionnels est en hausse et celui des sapeurs-pompiers volontaires est à peu près stable. On observe toutefois une baisse de la disponibilité de ces derniers. Afin de satisfaire les besoins, il convient de trouver des solutions renforçant la capacité opérationnelle des services d’incendie et de secours (SDIS) sur l’ensemble du territoire. L’une d’entre elles consisterait à autoriser les agents des collectivités locales qui le souhaitent à exercer leur activité à temps partiel pour s’engager en tant que sapeurs-pompiers professionnels. Ils auraient alors deux employeurs : leur collectivité et le SDIS. Cela renforcerait le maillage territorial des sapeurs-pompiers disponibles. En dehors de leur activité au sein du SDIS, ces personnes seraient susceptibles de s’engager comme sapeurs-pompiers volontaires.
D’après les échanges que j’ai eus avec eux, cette proposition pourrait recevoir l’aval des sapeurs-pompiers et des élus locaux, qui se préoccupent fortement de trouver la réponse adéquate aux besoins qu’il s’agisse de la lutte contre les incendies ou du secours aux personnes. Madame la ministre, seriez-vous favorable à la création d’un régime juridique favorisant une activité partagée entre les métiers de sapeur-pompier professionnel et d’agent de collectivité ?
Mme la présidente. La parole est à Mme la ministre déléguée.
Mme Caroline Cayeux, ministre déléguée auprès du ministre de l’intérieur et des outre-mer et du ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires, chargée des collectivités territoriales. Monsieur le sénateur Joly, votre question m’offre l’occasion de rendre de nouveau hommage au courage et au professionnalisme de nos soldats du feu, alors que cet été 2022 est particulièrement éprouvant sur le front des incendies. Je me suis déplacée à deux reprises sur le terrain.
De ce point de vue, il est essentiel que les SDIS disposent des ressources humaines nécessaires à l’accomplissement de leurs missions, de plus en plus complexes et nombreuses, et bien souvent extrêmement périlleuses. Le Gouvernement y est attentif, en lien avec les départements et les communes.
Comme vous le savez, un agent public doit consacrer l’intégralité de son activité professionnelle aux tâches qui lui sont confiées. Il ne peut pas exercer, à titre professionnel, une activité lucrative. Le cumul simultané de deux emplois publics permanents à temps complet est, en principe, interdit.
Un fonctionnaire peut toutefois occuper plusieurs emplois publics permanents à temps non complet, dès lors que la durée totale de service qui en résulte n’excède pas de plus de 15 % celle d’un emploi à temps complet. Il est également possible pour un agent de cumuler un emploi permanent à temps non complet avec un emploi permanent à temps complet, en respectant toujours cette limite de 15 %.
Je rappelle cependant qu’un emploi à temps non complet n’est pas un emploi à temps partiel, dont la durée du temps de travail est réduite à la demande de l’agent, pour une période limitée qui peut être renouvelée. Cette demande ne peut être acceptée que sous réserve des nécessités de service.
Or, compte tenu des exigences et des sujétions associées à l’emploi de pompier professionnel, l’exercice d’un temps partiel ou d’un temps non complet ne paraît pas approprié aux nécessités des SDIS, ne serait-ce qu’au regard des contraintes de gestion de l’urgence, inhérentes à ce type de mission et de formation en continu.
Mme la présidente. Veuillez conclure, madame la ministre déléguée.
Mme la présidente. Oui, mais vous avez épuisé votre temps de parole, madame la ministre déléguée.
Mme Caroline Cayeux, ministre déléguée. Avec l’adoption de la loi Matras du 25 novembre 2021, le volontariat et l’engagement citoyen sont encouragés : ces dispositions paraissent plus adaptées pour satisfaire la viabilité du fonctionnement des SDIS et, plus globalement, de notre dispositif de prévention et de secours.
Mme la présidente. La parole est à M. Patrice Joly, pour la réplique.
M. Patrice Joly. Il faut essayer de sortir des cadres habituels pour renforcer ce maillage territorial. Il convient d’examiner la solution consistant à ce qu’un agent partage son temps entre une collectivité et le SDIS dans les territoires peu denses. J’entends bien que certaines catégories ne seraient pas satisfaites de cette décision. Pourtant, il me semble urgent de trouver une solution pour empêcher l’émergence de déserts de sécurité civile, comme il existe déjà des déserts sanitaires.
Madame la ministre, je vous demande de saisir ce problème à bras-le-corps.
saturation du dispositif de délivrance des titres d’identité et conséquences pour les mairies
Mme la présidente. La parole est à Mme Elsa Schalck, auteure de la question n° 020, adressée à M. le ministre de l’intérieur et des outre-mer.
Mme Elsa Schalck. Madame la ministre, je souhaite vous interroger sur la saturation des dispositifs de délivrance des titres d’identité.
La délivrance d’un passeport ou d’une carte d’identité est devenue un véritable casse-tête pour les Français et pour les mairies. Dans le département du Bas-Rhin, certains délais avoisinent les six mois d’attente, auxquels il faut ajouter le temps d’instruction et de fabrication.
En 2017, le Gouvernement réduisait considérablement le nombre de communes pouvant établir des titres d’identité. Aujourd’hui, le système est saturé, alors même qu’il s’agit d’une compétence dévolue à l’État !
Nous nous retrouvons face à un système « perdant-perdant » : pour nos concitoyens, qui perdent en proximité et en simplicité, pour les communes qui en ont la charge, car le coût du dispositif n’est absolument pas compensé, et pour les communes qui ne proposent plus ce service, car elles font face aux mécontentements de leurs administrés. C’est un nouveau coup dur pour la ruralité !
Votre plan d’urgence, annoncé au mois de mai, a révélé le manque d’anticipation. Surtout, il s’avère insuffisant. La situation est toujours aussi difficile dans nos mairies. Je voudrais ici saluer le travail des élus locaux et des agents, qui agissent au mieux pour parvenir à répondre aux nombreuses demandes.
Il faut davantage de lieux d’enregistrement. Il faut également équiper de nouvelles communes, ce qui limiterait les déplacements de nos concitoyens.
Madame la ministre, il est nécessaire que les maires puissent disposer de moyens financiers et humains à la hauteur de cette mission, ce qui n’est pas le cas actuellement. Il est urgent d’entendre les élus locaux et le mécontentement de nos concitoyens.
Aussi, ma question est simple : comment envisagez-vous de soutenir de manière pérenne les mairies et les élus locaux afin que cette mission de service public soit accessible à tous et puisse être exercée de nouveau efficacement, en tenant compte de la proximité ?
Mme la présidente. La parole est à Mme la ministre déléguée.
Mme Caroline Cayeux, ministre déléguée auprès du ministre de l’intérieur et des outre-mer et du ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires, chargée des collectivités territoriales. Madame la sénatrice Schalck, le 4 mai dernier, le ministre de l’intérieur et des outre-mer a décidé d’instaurer un plan d’urgence, que vous considérez comme insuffisant. Pourtant, celui-ci contribue à réduire des délais anormalement longs.
Les communes sont désormais accompagnées par l’État. Le projet de loi de finances rectificative, en cours d’examen par le Parlement, prévoit une dotation pour les titres sécurisés, d’un montant de 10 millions d’euros.
En complément des deux fractions actuelles de la dotation annuelle, et si le Parlement vote cette disposition, une première part forfaitaire, d’un montant de 4 000 euros, serait attribuée pour tous les nouveaux dispositifs de recueil entre le 1er avril et le 31 juillet 2022. Une seconde part serait attribuée aux dispositifs déjà installés dont les taux d’utilisation ont fortement progressé – plus de 40 % – entre le 1er avril et le 31 juillet 2022.
L’Agence nationale des titres sécurisés (ANTS) versera pour sa part une prime d’installation forfaitaire de 4 000 euros pour l’ouverture d’un centre temporaire et continuera de verser la prime d’installation de 4 000 euros qui accompagne tout déploiement d’un nouveau dispositif fixe à titre pérenne dans un nouveau site.
Avec près de 350 nouveaux dispositifs de recueil d’ici au mois d’octobre, 160 nouveaux collaborateurs affectés dans les préfectures depuis le début de l’année et le développement de la prédemande en ligne, près de 40 000 demandes supplémentaires peuvent d’ores et déjà être traitées chaque semaine.
législation en matière de cumul des mandats
Mme la présidente. La parole est à Mme Cécile Cukierman, auteure de la question n° 052, adressée à M. le ministre de l’intérieur et des outre-mer.
Mme Cécile Cukierman. Madame la ministre, la loi organique du 14 février 2014 a encadré le cumul des mandats, tant en ce qui concerne le nombre de mandats exercés que leur nature : un député ou un sénateur peut exercer un mandat au sein d’un conseil municipal, départemental ou régional, sans toutefois disposer de fonction exécutive. Il ne peut exercer plus d’un mandat local parallèlement à sa fonction parlementaire.
L’article L.O. 141 du code électoral précise que « le mandat de député est incompatible avec l’exercice de plus d’un des mandats énumérés ci-après : conseiller régional, conseiller à l’Assemblée de Corse, conseiller départemental, conseiller de Paris, conseiller à l’assemblée de Guyane, conseiller à l’assemblée de Martinique, conseiller municipal d’une commune soumise au mode de scrutin prévu au chapitre III du titre IV du présent livre ».
Or la métropole de Lyon ne fait l’objet d’aucune mention. Dans ces conditions, une double incohérence demeure. Premièrement, il est possible pour un député ou un sénateur d’exercer un mandat de conseiller métropolitain et un autre mandat local. Deuxièmement, au sein d’un même territoire métropolitain, des élus peuvent cumuler trois mandats et d’autres deux. À titre d’exemple, un parlementaire de la métropole peut être à la fois conseiller municipal et conseiller métropolitain, alors qu’un conseiller régional doit choisir entre son mandat de conseiller municipal et celui de conseiller métropolitain.
S’il ne s’agit pas de commenter le bien-fondé de la limitation du cumul des mandats, je souhaite connaître les mesures que le Gouvernement entend prendre afin de faire respecter une égalité entre tous les élus et faire ainsi entrer la métropole de Lyon dans le droit commun.
Mme la présidente. La parole est à Mme la ministre déléguée.
Mme Caroline Cayeux, ministre déléguée auprès du ministre de l’intérieur et des outre-mer et du ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires, chargée des collectivités territoriales. Madame la sénatrice Cukierman, vous avez raison : l’article L.O. 141 du code électoral fixe la liste des mandats locaux incompatibles avec celui de député, au nombre desquels ne figure effectivement pas celui de conseiller de la métropole de Lyon.
Il ressort des travaux parlementaires préparatoires à la loi de ratification de l’ordonnance du 19 décembre 2014 relative à l’élection des conseillers métropolitains de Lyon que la nécessité d’une législation ultérieure avait été identifiée par les parlementaires.
Cette ordonnance précisait les modalités d’élection des conseillers métropolitains, en application de la loi du 27 janvier 2014 de modernisation de l’action publique territoriale et d’affirmation des métropoles, dite loi Maptam, qui a créé la métropole de Lyon.
En particulier, le rapport de la commission des lois de l’Assemblée nationale du 10 juin 2015 consacré au projet de loi précise bien que le mandat de conseiller de la métropole de Lyon n’a pas pu être ajouté à la liste prévue par l’article L.O. 141 du code électoral, dès lors que cette liste est fixée par une loi organique répondant à une procédure d’adoption spécifique – c’est bien là que réside le problème. Comme vous l’avez souligné, madame la sénatrice, cette situation devra être rectifiée à l’occasion de l’examen d’une prochaine loi organique contenant des dispositions de nature électorale ou institutionnelle.
Mme la présidente. La parole est à Mme Cécile Cukierman, pour la réplique.
Mme Cécile Cukierman. J’ajoute que les députés européens ne sont pas dans la même situation que les parlementaires nationaux.
Madame la ministre, vous l’aurez compris : ma question va au-delà de la problématique du nombre de mandats pouvant être détenus par les élus de la métropole de Lyon, et s’inscrit dans le cadre plus général de l’évaluation de la métropole de Lyon engagée par le Sénat. Si cette collectivité perdure, faisons-la revenir dans le droit commun.
hausse des prix à la consommation et évolution de l’accord annuel de modération de prix aux antilles
Mme la présidente. La parole est à M. Dominique Théophile, auteur de la question n° 067, adressée à M. le ministre délégué auprès du ministre de l’intérieur et des outre-mer, chargé des outre-mer.
M. Dominique Théophile. Monsieur le ministre, au mois de juin dernier, j’interrogeais votre prédécesseur sur le nécessaire élargissement de la liste des produits concernés par le bouclier qualité-prix créé pour lutter contre la vie chère durant le quinquennat du président Hollande.
Le succès relatif de ce dispositif et la hausse récente et continue des prix à la consommation appelaient en effet une réaction forte des pouvoirs publics. Avec des prix à la consommation de 7 % à 13 % plus élevés que dans l’Hexagone, et des produits alimentaires plus chers de 19 % à 38 %, nos compatriotes d’outre-mer subissent de plein fouet l’inflation actuelle. C’est beaucoup pour des territoires dont vous n’ignorez pas les difficultés du point de vue de l’emploi et de la pauvreté.
Lors de votre déplacement à la Réunion au début du mois de juillet, puis à l’Assemblée nationale, vous avez indiqué vouloir étendre le bouclier qualité-prix à « beaucoup plus de produits dont le prix serait bloqué, voire diminué ». À cette occasion, vous avez indiqué votre ambition d’appliquer ce dispositif à 5 % des produits de consommation courante.
Dans le même temps, vous avez affirmé vouloir organiser à Paris un « Oudinot contre la vie chère » pour l’ensemble des territoires ultramarins. Les entreprises nationales et internationales, les grandes surfaces, les compagnies maritimes et les fournisseurs devraient ainsi se réunir à Paris pour trouver des solutions et s’entendre sur de nouveaux objectifs.
Ma question est très simple : sans préjuger bien sûr des échanges qui se tiendront à la rentrée prochaine, pouvez-vous nous dire concrètement à quoi pourraient bien ressembler les prochains paniers du bouclier qualité-prix ? Le ministre Gérald Darmanin a par ailleurs précisé que les collectivités territoriales seraient associées aux discussions en raison de leur pouvoir d’action sur la fiscalité locale. Que pouvez-vous nous dire des pistes aujourd’hui à l’étude ?
Mme la présidente. La parole est à M. le ministre délégué.
M. Jean-François Carenco, ministre délégué auprès du ministre de l’intérieur et des outre-mer, chargé des outre-mer. Monsieur le sénateur Théophile, la lutte contre la vie chère est évidemment l’une des priorités du Gouvernement.
Comme vous l’avez indiqué, monsieur le sénateur, nous connaissons actuellement une inflation mondiale inédite qui pèse plus encore sur les territoires ultramarins, non pas parce que l’inflation y augmente plus vite, mais parce qu’elle s’exerce sur une population dont le niveau de vie est largement inférieur à celui de la France hexagonale.
Face à cette situation, et avant même les mesures modifiant le bouclier qualité-prix, le Gouvernement a prévu un certain nombre de mesures d’urgence au niveau national, telles que la remise de 15 centimes d’euros par litre de carburant, l’augmentation de 4 % des prestations sociales et des retraites, le plafonnement des loyers de référence et l’aide exceptionnelle de 100 euros, majorée de 50 euros par enfant, qui sera versée au mois de septembre aux ménages modestes. Bien évidemment, ces mesures s’appliquent à l’ensemble des territoires ultramarins. J’ajoute que le Gouvernement vient de décider d’octroyer une subvention spécifique au territoire de Saint-Pierre-et-Miquelon pour faire face à l’inflation touchant le fioul domestique – un sujet éminemment sensible dans ce territoire.
Mais nous devons aller plus loin. C’est pourquoi le Gouvernement a soutenu deux propositions que vous connaissez : la limitation de la hausse des loyers de référence à 2,5 % dans les départements et régions d’outre-mer (DROM), contre 3,5 % dans l’Hexagone et le financement d’une aide supplémentaire de 15 millions d’euros pour prendre en compte le nombre élevé de nos concitoyens ultramarins modestes qui ne bénéficient pas des minima sociaux. J’ajoute que 4 millions d’euros ont été réservés aux territoires du Pacifique.
Au-delà de ces mesures d’urgence, Gérald Darmanin et moi-même avons lancé l’initiative d’un Oudinot du pouvoir d’achat – je préfère cette dénomination à celle d’Oudinot de la vie chère. Cette initiative vise à étendre le bouclier qualité-prix à davantage de produits. Ce panier, qui sera spécifique à chaque territoire, comprendra entre 250 et 300 produits. Il s’agit d’approfondir le dispositif au moins pour un an et de bloquer les prix, voire d’aller plus loin. Des négociations sont conduites par les préfets dans chaque territoire, puisque le contenu des paniers différera selon les lieux. Elles regroupent des opérateurs de la logistique, des distributeurs, des observatoires des prix des marques, mais aussi – et c’est une nouveauté…
Mme la présidente. Veuillez conclure, monsieur le ministre délégué.
M. Jean-François Carenco, ministre délégué. … les collectivités locales. Au mois de septembre prochain, nous recevrons à Paris l’ensemble des acteurs pour lutter contre la vie chère.
indemnisation des artistes lors de l’annulation d’un spectacle pour cause d’alerte météo
Mme la présidente. La parole est à M. Yves Détraigne, auteur de la question n° 058, adressée à Mme la ministre déléguée auprès du ministre de l’intérieur et des outre-mer et du ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires, chargée des collectivités territoriales.
M. Yves Détraigne. Madame la ministre, je souhaite vous interroger sur une question qui m’est remontée du terrain et qui concerne l’indemnisation des artistes en cas d’annulation d’un spectacle par la commune lorsqu’une tempête est annoncée.
En effet, lorsqu’une commune passe commande auprès d’un groupe de musique pour la tenue d’un concert et que, le matin de l’événement, la préfecture relaye un bulletin d’alerte météorologique orange ou rouge, la municipalité décide alors d’annuler la représentation pour des raisons de sécurité. Plusieurs questions se posent alors.
Si l’événement météorologique a effectivement lieu, le groupe est-il fondé à réclamer des indemnités à la commune ? Le cas échéant, celles-ci diffèrent-elles selon que l’événement a été qualifié, ou non, de cas de force majeure ?
Si l’événement météorologique n’a finalement pas lieu, le groupe est-il tout de même fondé à réclamer des indemnités à la commune qui a agi dans le cadre de ses pouvoirs de police au titre des informations reçues des services de l’État ou de Météo-France ?
Existe-t-il un fonds gouvernemental pour indemniser les entrepreneurs de spectacle dans ces circonstances et, à défaut, est-il envisageable d’en créer un ?
La seule alerte orange ou rouge constitue-t-elle en elle-même un cas de force majeure, que l’événement météorologique ait finalement lieu ou non ? Est-ce à la commune organisatrice ou au groupe d’artistes de contracter une assurance pour faire face à cette situation ?
Enfin, lorsque la commune interdit…
Mme la présidente. Veuillez conclure, mon cher collègue.
M. Yves Détraigne. … un événement sans en être l’organisatrice, pouvez-vous m’indiquer quelles sont les règles d’indemnisation des artistes ou de l’association organisatrice qui a acquis des biens en vue de la manifestation annulée ?
Mme la présidente. La parole est à Mme la ministre déléguée.
Mme Caroline Cayeux, ministre déléguée auprès du ministre de l’intérieur et des outre-mer et du ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires, chargée des collectivités territoriales. Monsieur le sénateur Détraigne, lorsque le spectacle est organisé par la commune, de telles conséquences n’engagent pas l’État, mais la seule commune ayant contracté avec le prestataire chargé de la représentation en cause.
Dans cette hypothèse, les conséquences de l’annulation du spectacle sont régies par les stipulations contractuelles qui auront été prévues pour l’événement, notamment les conditions d’indemnisation.
Dans le cas où l’événement météorologique n’aurait finalement pas lieu, la commune, après avoir indemnisé le prestataire, peut, dans un deuxième temps, envisager de mettre en cause la responsabilité de l’État ; toutefois, à moins d’une faute caractérisée commise dans la diffusion des bulletins météorologiques, celle-ci ne paraît pas pouvoir être engagée.
Par ailleurs, un événement est qualifié de cas de force majeure en raison de son caractère imprévisible et irrésistible. En matière de marchés publics, cette hypothèse est prévue par l’article L. 2195-2 du code de la commande publique qui prévoit que ce motif justifie la résiliation du contrat par l’acheteur.
S’agissant des phénomènes météorologiques, la jurisprudence considère que des intempéries ou une tempête d’une intensité exceptionnelle constituent des cas de force majeure, ce qui permet, a priori, d’exclure des phénomènes d’intensité modérée.
En revanche, si le spectacle n’est pas organisé par la commune et que celle-ci met en œuvre ses pouvoirs de police administrative pour l’interdire au regard des risques météorologiques, le prestataire de spectacle pourra chercher à mettre en cause la responsabilité de la commune. Celle-ci ne pourra être engagée que si une faute a été commise dans l’évaluation du risque météorologique.
S’agissant des indemnités liées à l’annulation de la représentation, celles-ci seront déterminées par les clauses du contrat prévoyant la représentation ainsi que, le cas échéant, par le contrat d’assurance souscrit par l’organisateur et le prestataire.
Telles sont les informations que je souhaitais vous communiquer, monsieur le sénateur.
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