M. Jean-François Husson. Ne le faites pas à nous !
Mme Sophie Primas. Ne parlez pas d’unité nationale !
M. Jean-Michel Blanquer, ministre. Aujourd’hui, les trois autotests permettent d’aller dans le sens décrit par le Premier ministre, c’est-à-dire celui d’une politique qui permet à la fois d’avoir l’école ouverte et d’avoir une sécurité sanitaire. (Applaudissements sur les travées du groupe RDPI.)
M. le président. La parole est à M. Max Brisson, pour la réplique.
M. Max Brisson. Monsieur le ministre, et si le fiasco généralisé de votre gestion de la crise sanitaire n’était pas plus large ?
M. Max Brisson. Déclassement permanent des résultats de nos élèves dans les enquêtes internationales ; recul des savoirs fondamentaux, du « lire, écrire, compter » ; sortie de route du nouveau baccalauréat, devenu un maquis dans lequel se perdent les élèves ; absurdité du calendrier du contrôle continu, qui soumet les lycéens au stress de l’examen perpétuel ; effondrement de l’enseignement des mathématiques au lycée, dont vous projetiez pourtant le redressement ; circulaires caporalisantes sous lesquelles croulent les établissements, alors qu’il y a cinq ans vous annonciez leur autonomie ; jeunes professeurs toujours aussi mal payés, mal formés, toujours aussi peu considérés et malmenés par un véritable bizutage institutionnel ; démissions en masse et moral au plus bas ! (M. Julien Bargeton proteste.)
L’attractivité du métier n’a jamais été aussi faible.
Ils vont vous le dire demain avec force et avec le soutien des parents et des maires ! (M. Jean-Claude Requier s’exclame.)
M. Julien Bargeton. Pas tous !
M. Max Brisson. Et si, parmi les causes de tout cela, une vous incombait, et à vous seul ?
Celle d’une gestion solitaire, rejetant tout dialogue, agissant sans concertation et faisant finalement apparaître le « blanquerisme » pour ce qu’il est : un autoritarisme esseulé, expliquant largement « l’étrange défaite » dans laquelle sombre ce quinquennat en matière d’éducation ! (Bravo ! et vifs applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains. – Applaudissements sur des travées du groupe SER.)
situation du secteur de la culture
M. le président. La parole est à Mme Sylvie Robert, pour le groupe Socialiste, Écologiste et Républicain. (Applaudissements sur les travées du groupe SER.)
Mme Sylvie Robert. Ma question s’adressait à la ministre de la culture et de la communication.
Annulations de spectacles, reports de dates, arrêts des tournées : telle est la situation difficile du spectacle vivant en ce début d’année.
En plus des conséquences de la cinquième vague, les décisions prises sans concertation et annoncées en décembre dernier, en l’occurrence le rétablissement des jauges et l’interdiction des concerts debout, ont aggravé les perspectives du secteur culturel.
Une relance soutenue était espérée en septembre 2021 ; malheureusement, cette reprise, marquée par un retour plus que timide du public, fut compliquée. La fermeture totale des lieux de culture pendant plusieurs mois n’y est peut-être pas pour rien !
Par-delà la déception ressentie par tous les acteurs culturels – nous la partageons –, il y a une réelle inquiétude pour l’avenir.
Certes, les aides du Gouvernement et leur prolongation permettront au secteur de continuer à résister. Souhaitons-le, en tout cas !
Mais, monsieur le secrétaire d’État, ces lieux ne doivent plus être stigmatisés. Ils ne sont pas des espaces de contamination et les professionnels ont toujours été au rendez-vous, responsables : ils ont proposé et mis en œuvre des protocoles sanitaires renforcés.
Une véritable concertation entre tous les acteurs est attendue. Faisons-leur confiance et donnons-leur enfin la visibilité qu’ils réclament !
Nombre d’artistes et de techniciens sont en grande difficulté aujourd’hui, certains n’ayant pas retrouvé les plateaux depuis plusieurs mois.
Dans ce contexte difficile, l’année blanche des intermittents s’est arrêtée le 31 décembre dernier. Ma question est simple : avez-vous effectué une évaluation, et allez-vous prolonger le soutien jusqu’à l’été prochain ? (Applaudissements sur les travées du groupe SER et sur des travées du groupe CRCE.)
M. le président. La parole est à M. le secrétaire d’État, porte-parole du Gouvernement.
M. Gabriel Attal, secrétaire d’État auprès du Premier ministre, porte-parole du Gouvernement. Madame la sénatrice Sylvie Robert, je vous prie de bien vouloir excuser l’absence de ma collègue Roselyne Bachelot, retenue dans le cadre d’obligations liées à la présidence française du Conseil de l’Union européenne. Je le sais, vous travaillez avec elle en confiance au quotidien.
Cette crise a très fortement affecté le secteur culturel partout dans le monde. Pour lutter contre le virus, il a fallu et il faut encore, à certains égards, limiter les rassemblements, alors que c’est le rôle et la force de la culture de rassembler, d’unir les Français et, par-delà la France, d’unir dans le monde entier.
La France s’est singularisée par son soutien résolu et continu au secteur culturel. La culture est probablement le premier bénéficiaire du « quoi qu’il en coûte » : 14 milliards d’euros lui ont été consacrés depuis le début de cette crise. Nous n’avons pas à le regretter, ce soutien était nécessaire, et nous avons fait un choix politique majeur pour permettre au secteur de tenir. Grâce à la vaccination et au passe, tous ces lieux ont pu rouvrir !
Il y a un an jour pour jour, alors que notre pays comptait vingt fois moins de cas quotidiens, les théâtres, les cinémas, les musées et tous les lieux culturels étaient fermés. Un an plus tard, tous ces lieux sont ouverts, grâce à la vaccination et au passe !
Nous avons été amenés à prendre des mesures temporaires – j’insiste sur ce mot – de limitation et à établir des jauges dans un certain nombre de lieux, notamment en intérieur, jusqu’à 2 000 personnes.
Nous continuons évidemment à accompagner le secteur, vous l’avez dit, en partie affecté par ces mesures. Roselyne Bachelot et Bruno Le Maire l’ont annoncé : nous maintenons le dispositif « coûts fixes » pour les entreprises qui perdent plus de 50 % de leur chiffre d’affaires, tout comme l’activité partielle sans reste à charge. Les intermittents, dont vous avez parlé, bénéficieront de ce soutien si leurs spectacles sont annulés.
Nos évaluations montrent que la grande majorité des intermittents a pu reconstituer leurs droits à la fin de l’année 2021, mais je vous le dis : tous auront un filet de sécurité durant l’année 2022. Nous réactivons les dispositifs sectoriels.
Vous le voyez, madame la sénatrice : nous tenons à ce que la culture garde sa juste place au cœur de l’âme de notre pays. (Applaudissements sur les travées du groupe RDPI.)
M. le président. La parole est à Mme Sylvie Robert, pour la réplique.
Mme Sylvie Robert. Monsieur le secrétaire d’État, vous n’avez pas complètement répondu à ma question. Je vous demande d’arrêter avec cette politique de stop and go, qui met tout le monde en difficulté, brutalement, et qui nuit à l’efficacité de l’action publique.
Le secteur attend de la visibilité et un grand plan de relance pour les mois à venir. (Applaudissements sur les travées du groupe SER. – M. Gérard Lahellec applaudit également.)
lutte contre la menace terroriste
M. le président. La parole est à Mme Isabelle Raimond-Pavero, pour le groupe Les Républicains. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)
Mme Isabelle Raimond-Pavero. Madame la ministre, début 2015, on évaluait à presque 5 000 le nombre de volontaires européens en Syrie. Le contingent français était malheureusement le plus important d’Europe occidentale : 1 463 individus de nationalité française ou résidents en France avaient rallié la Syrie.
Avec la chute et la déroute du califat autoproclamé, Daech a laissé derrière lui des combattants endoctrinés, des enfants et des adolescents ayant suivi tant des entraînements militaires intensifs qu’une formation aux codes et au discours de l’État islamique.
Ces enfants ont grandi. Selon les services de renseignement, ils représentent une menace réelle et pourraient constituer une nouvelle génération de djihadistes. Plusieurs d’entre eux font l’objet d’une inscription au fichier des personnes recherchées.
Le milieu carcéral constitue également une menace et un défi majeur en matière de radicalisation, de prosélytisme ou de passage à l’acte. Depuis le 26 juillet 2018, 1 976 individus inscrits au fichier de traitement des signalements pour la prévention de la radicalisation à caractère terroriste sont sortis de prison, dont 290 terroristes islamistes.
Aujourd’hui, 1 073 individus en suivi actif sont incarcérés ; 71 d’entre eux vont sortir de prison d’ici à la fin de l’année, dont 13 individus condamnés pour terrorisme et 58 radicalisés, sans compter les libérations inopinées pouvant intervenir à tout moment.
Plusieurs années ont passé depuis la défaite militaire de Daech en Irak et en Syrie. L’évolution de la situation de ceux qu’on appelle les « lionceaux du califat » et les sorties de prison des personnes radicalisées font apparaître la permanence d’une menace terroriste d’inspiration islamiste sur notre territoire, à un niveau élevé, selon nos services de renseignement.
Aujourd’hui, quelles mesures le Gouvernement met-il en œuvre pour gérer et anticiper tant ces situations concernant les « lionceaux du califat », restés sur place ou revenus en France, que les sorties de prison, qui font peser sur notre pays un risque terroriste élevé ? (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)
M. Roger Karoutchi. Très bien !
M. le président. La parole est à Mme la ministre déléguée chargée de la citoyenneté.
Mme Marlène Schiappa, ministre déléguée auprès du ministre de l’intérieur, chargée de la citoyenneté. Avant de répondre à votre question, madame la sénatrice, je veux avoir une pensée pour l’ensemble des victimes des attentats terroristes islamistes que la France a eu à déplorer sur son sol. Nous étions d’ailleurs nombreux, dimanche dernier, devant l’Hyper Cacher, à leur rendre ensemble hommage.
Cela étant dit, je veux vous assurer de l’engagement de tout le Gouvernement, avec le Président de la République, pour mieux protéger les Français face à la menace islamiste.
Depuis 2017, plus de 37 attentats terroristes ont été déjoués par nos forces de sécurité intérieure. Je tiens d’ailleurs à saluer l’action permanente des services de renseignement et à rappeler l’engagement du ministère de l’intérieur en la matière, puisque Gérald Darmanin et moi-même avons continué d’accroître les moyens humains alloués aux services spécialisés dans la lutte antiterroriste, au travers d’un effort sans précédent : ainsi, 1 900 postes supplémentaires auront été créés d’ici à la fin du quinquennat.
Nous avons également – vous le savez, mesdames, messieurs les sénateurs, pour y avoir fortement contribué – fait évoluer notre législation afin de l’adapter, notamment pour ce qui a trait au renseignement ; cela répond plus particulièrement à votre question, madame la sénatrice. Je pense ainsi à la loi du 30 juillet 2021 relative à la prévention d’actes de terrorisme et au renseignement, dont nous avons débattu ici même et qui a permis de pérenniser les dispositions de la loi du 30 octobre 2017 renforçant la sécurité intérieure et la lutte contre le terrorisme (SILT) ainsi que la technique de l’algorithme, en les adaptant à l’évolution de la menace. (« La réponse ! » sur les travées du groupe Les Républicains.)
Enfin, l’action de l’État se concentre non seulement sur la question du terrorisme et de la radicalisation violente mais encore sur la lutte contre la radicalisation et le repli communautaire, qui forment le terreau du terrorisme.
Le Gouvernement a ainsi défini une stratégie globale de lutte contre l’islamisme : la loi du 24 août 2021 confortant le respect des principes de la République, que M. le ministre de l’intérieur, M. le garde des sceaux et moi-même avons promue, en constitue la clef de voûte. Je sais l’engagement du Sénat en la matière, notamment celui de Mmes les sénatrices Jacqueline Eustache-Brinio, Dominique Vérien et Agnès Canayer. (Murmures d’impatience sur les travées du groupe Les Républicains.)
Nous avons été guidés par un principe fondamental : pas un euro d’argent public ne doit financer les ennemis de la République. Tel était le sens du contrat d’engagement républicain, que vous avez adopté et qui est entré en vigueur le 1er janvier 2022. Nous avons d’ailleurs signé les premiers de ces contrats à Beauvais, avec Mme la maire de cette commune,…
M. le président. Il faut conclure !
Mme Marlène Schiappa, ministre déléguée. … afin de faire en sorte de toujours mieux lutter contre ce terreau du terrorisme et contre la radicalisation violente. (Exclamations sur des travées du groupe Les Républicains. – M. Ludovic Haye applaudit.)
Plusieurs sénateurs du groupe Les Républicains. Et la réponse ?
M. Marc-Philippe Daubresse. Il fallait prendre des mesures de sûreté. Vous auriez dû nous écouter…
situation au kazakhstan
M. le président. La parole est à M. Hervé Maurey, pour le groupe Union Centriste. (Applaudissements sur les travées du groupe UC.)
M. Hervé Maurey. Monsieur le président, mesdames, messieurs les ministres, mes chers collègues, en tant que président du groupe interparlementaire d’amitié France-Asie centrale, je souhaite interroger le ministre des affaires étrangères à propos de la situation au Kazakhstan.
La forte hausse du prix du carburant a donné lieu, au début de l’année, à un mouvement de contestation sociale de grande ampleur, qui s’est transformé en violentes émeutes, marquées par des échanges de tirs, le saccage de bâtiments publics et des pillages.
Ces événements ont conduit le président Tokaïev à demander le soutien militaire de l’Organisation du traité de sécurité collective, afin de contrer ce que les autorités kazakhes ont qualifié d’« attaque terroriste ». Dans ce cadre, 2 000 hommes, essentiellement russes, ont été déployés dans le pays.
Monsieur le ministre délégué au commerce extérieur, face à cette situation, pouvez-vous, tout d’abord, nous rassurer quant à la sécurité des Français présents sur place et, ensuite, nous faire connaître votre analyse de la situation ? S’agit-il d’une tentative de déstabilisation du pouvoir, comme l’indiquent les autorités du pays, et, si oui, à l’initiative de qui, ou bien d’un mouvement spontané ? Ne faut-il pas se préoccuper de la présence de militaires russes dans ce pays, qui vient de célébrer le trentième anniversaire de son indépendance ? Quelles sont la position et l’action de la France et de l’Union européenne sur ce sujet ?
Par ailleurs, la France est fortement investie dans cette région, comme en témoigne votre récente visite dans le pays, monsieur le ministre. Dans quelle mesure ces événements peuvent-ils affecter nos intérêts dans la région, notamment pour ce qui concerne l’approvisionnement de nos centrales nucléaires en uranium, dont le Kazakhstan est le premier producteur mondial ? (Applaudissements sur les travées du groupe UC et sur des travées du groupe Les Républicains.)
M. le président. La parole est à M. le ministre délégué chargé du commerce extérieur et de l’attractivité.
M. Franck Riester, ministre délégué auprès du ministre de l’Europe et des affaires étrangères, chargé du commerce extérieur et de l’attractivité. Monsieur le sénateur Maurey, nous suivons évidemment avec la plus grande attention les événements qui se déroulent depuis peu au Kazakhstan.
La hausse des prix de l’énergie a provoqué, je le rappelle, un mouvement de protestation sociale d’ampleur dans le pays. Cette crise sociale s’est transformée en crise politique et a provoqué certaines violences très graves ayant entraîné plusieurs victimes. Le bilan provisoire semble lourd et fait notamment état d’un nombre très important de blessés.
Nous avons condamné les violences qui ont eu lieu, en appelant à la désescalade des tensions et au dialogue politique. Nous avons également rappelé, notamment par la voix de M. le ministre Le Drian, la semaine dernière, dès les premiers éléments connus, toute l’attention que nous portions au respect des libertés fondamentales, de la liberté d’expression et de la liberté de la presse. Nous souhaitons que toute la lumière soit faite sur les circonstances ayant conduit à ces événements tragiques.
Par ailleurs, nous sommes attentifs au respect durable de la souveraineté et de l’autonomie d’action des autorités kazakhes, qui ont fait appel, vous l’avez souligné, à l’assistance de l’Organisation du traité de sécurité collective. Un contingent, en grande majorité russe, a donc été déployé dans le pays pour en sécuriser les sites stratégiques.
Il est indispensable que les parties extérieures impliquées temporairement dans cette situation contribuent à la désescalade des tensions puis se retirent, dans le respect du calendrier indiqué publiquement par les autorités du Kazakhstan.
Jean-Yves Le Drian s’est entretenu de cette crise avec Josep Borrell et, en tant que titulaire de la présidence du Conseil de l’Union européenne, la France maintiendra un dialogue étroit avec le Service européen pour l’action extérieure ainsi qu’avec ses partenaires de l’Union. Le Kazakhstan est un partenaire important de l’Union et de la France – vous avez rappelé mon déplacement en mai dernier dans ce pays – et il est un acteur important dans la région, comme nous l’avons vu récemment avec la crise afghane.
J’ajoute que nous avons été particulièrement vigilants, au cours des derniers jours, à la sécurité de la communauté française au Kazakhstan ; d’ailleurs, une cellule de crise a été mise en place, qui a permis d’informer nos compatriotes et de maintenir un contact étroit avec ceux de nos ressortissants qui le souhaitaient. (Applaudissements sur les travées du groupe RDPI.)
M. le président. La parole est à M. Hervé Maurey, pour la réplique.
M. Hervé Maurey. Je vous remercie de ces éléments, monsieur le ministre, même si je n’ai pas eu de réponse à toutes mes questions.
Après l’épisode ukrainien et biélorusse, nous ne devons plus être naïfs. La France, qui prend la présidence du Conseil de l’Union européenne, doit adresser un message clair à la Russie, afin de garantir l’indépendance des pays de la région et la paix ; elle ne doit pas être une simple spectatrice de ce qu’il s’y passe. (Applaudissements sur les travées du groupe UC et sur des travées du groupe Les Républicains.)
violences à l’encontre des élus
M. le président. La parole est à M. François Bonhomme, pour le groupe Les Républicains. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)
M. François Bonhomme. Madame la ministre, la violence se banalise dans notre pays : parmi les victimes de cette violence en constante augmentation figurent les maires et les élus.
Entre janvier et novembre derniers, 1 186 élus, dont 162 parlementaires et 605 maires et adjoints, ont été victimes d’agressions physiques. Chacun, dans cet hémicycle, connaît dans son département des élus qui ont été insultés ou menacés. Plusieurs élus reçoivent régulièrement des lettres de menaces destinées à les intimider.
Le président Larcher a souhaité que le Sénat se constitue systématiquement partie civile lorsque de tels faits se produisent ; je l’en remercie.
Ce phénomène est d’autant plus grave que ces violences sont tournées vers des dépositaires de l’autorité publique, des titulaires d’un mandat électif. La violence contre les élus a explosé de 47 % par rapport à 2020 ; on a enregistré 30 % d’outrages en plus. À l’heure du bilan, ces chiffres soulignent que celui-ci n’est pas bon : il n’y a jamais eu autant d’élus victimes d’agressions.
Face à cela, l’action du Gouvernement est marquée par une impuissance caractérisée. Les protestations et les circulaires ministérielles semblent sans grand effet, car les poursuites ne sont pas systématiques et bien peu d’élus agressés sont informés des suites réservées aux affaires qui les concernent.
Madame la ministre, quelles mesures concrètes comptez-vous prendre pour faire diminuer le nombre d’agressions et faire en sorte que les statistiques évoluent enfin dans le bon sens ? (Bravo ! et applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains. – Mme Sylvie Vermeillet applaudit également.)
M. le président. La parole est à Mme la ministre déléguée chargée de la citoyenneté.
Mme Marlène Schiappa, ministre déléguée auprès du ministre de l’intérieur, chargée de la citoyenneté. Monsieur le sénateur François Bonhomme, c’est vrai, depuis plusieurs semaines, de nombreux élus sont victimes d’intimidations, de menaces de mort ou d’agressions graves. Ce phénomène inacceptable s’aggrave ; d’ailleurs, en début de semaine, M. le Président de la République s’est lui-même exprimé sur le sujet pour faire part de son indignation et de son soutien à l’ensemble des élus qui ont vécu ces agressions, comme nous l’avions fait nous-mêmes.
Vous avez eu l’amabilité de le rappeler, le Gouvernement a publié un certain nombre de circulaires et a déposé un certain nombre de projets de loi, qui ont été adoptés.
La loi du 27 décembre 2019 relative à l’engagement dans la vie locale et à la proximité de l’action publique permet notamment de renforcer la protection juridique des élus, mais également leur formation, en lien avec les forces de l’ordre. Le ministère de l’intérieur s’est également mobilisé en envoyant un télégramme aux préfets le 29 décembre dernier ; chaque fait sera systématiquement signalé au procureur de la République par les forces de police et de gendarmerie. Cela s’ajoute à la circulaire du garde des sceaux du 7 septembre 2020 relative à une réponse pénale ferme et rapide.
Par ailleurs, en plus de tout cela, les élus peuvent désormais déposer plainte en mairie ou dans tout autre lieu de leur convenance. Policiers et gendarmes devront en outre systématiquement inclure les permanences et les domiciles des députés ou des sénateurs dans leur patrouille.
En outre, nous renforçons la veille sur les réseaux sociaux pour mieux signaler les messages haineux. Je remercie à cet égard les services de Pharos, la plateforme d’harmonisation, d’analyse, de recoupement et d’orientation des signalements, de leur mobilisation. Les réseaux sociaux sont, hélas, devenus un vecteur majeur de violences et d’insultes envers les élus. Nous travaillons en ce moment même avec les plateformes pour que celles-ci assument pleinement et plus rapidement leur rôle de modération.
Enfin, je salue l’initiative du président de l’Assemblée nationale, Richard Ferrand, qui a réaffirmé avec tous les présidents de groupe constitué qu’aucun débat démocratique ne pouvait se dérouler sous la menace. M. le président Gérard Larcher ici présent et vous tous partagez pleinement cette volonté d’apaisement du débat public, je le sais. Le Gouvernement y adhère également et sera toujours aux côtés des élus, quels qu’ils soient, pour les soutenir face à cette violence et à ces menaces. (M. Julien Bargeton applaudit.)
M. le président. La parole est à M. François Bonhomme, pour la réplique.
M. François Bonhomme. Madame la ministre, s’agissant des questions au Gouvernement, j’aimerais que vous répondiez à la question qui vous est posée ; on a l’impression que, quelle que soit la question, vous lisez vos fiches de manière mécanique !
M. François Bonhomme. C’est fort désagréable. Je vous parle des agressions dont sont victimes les élus et vous m’égrenez un chapelet de platitudes et de choses que l’on sait déjà parfaitement !
M. François Bonhomme. Les agressions se poursuivent, madame la ministre, et les élus locaux n’ont que faire de vos mots de réconfort dès lors que la situation s’aggrave !
Du reste, tout cela ne sert à rien, parce que cela finit par démasquer l’impuissance du Gouvernement à juguler ce phénomène.
Mme Marlène Schiappa, ministre déléguée. Pas du tout, je viens de vous présenter des éléments nouveaux !
M. François Bonhomme. Quoi que vous en disiez, le sentiment d’impunité se répand. En la matière, le seul critère de l’efficacité de votre politique publique, c’est le résultat. Or, malheureusement, ce résultat est aujourd’hui inexistant. (Bravo ! et vifs applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains. – Mme Nadia Sollogoub et M. Alain Marc applaudissent également.)
politique budgétaire européenne
M. le président. La parole est à M. Patrice Joly, pour le groupe Socialiste, Écologiste et Républicain. (Applaudissements sur les travées du groupe SER.)
M. Patrice Joly. Monsieur le ministre, l’effondrement de la biodiversité et le réchauffement climatique deviennent des sources majeures d’instabilité, dans un contexte de montée des inégalités et d’effritement de la cohésion sociale.
Il devient, en conséquence, impératif d’accélérer les transitions. L’objectif a été clairement défini : il nous faut baisser d’ici à 2030 nos émissions de gaz à effet de serre de 55 % par rapport à 1990.
Cela ne se fera pas par magie. Il est demandé des efforts d’investissements massifs tant aux entreprises qu’aux ménages, en vue de décarboner le mode de vie de notre société et de réduire notre dépendance aux énergies fossiles, au moment où l’inflation pèse lourdement sur le pouvoir d’achat des ménages et asphyxie nombre de nos entreprises.
Monsieur le ministre, le remboursement des emprunts réalisés pour financer les plans de relance et les dizaines, ou plutôt les centaines, de milliards d’euros d’investissements indispensables pour relever les défis climatiques et numériques en mettant en œuvre des transitions socialement justes et soutenables requièrent des moyens importants, qui ne seront pas couverts par les nouvelles ressources propres de l’Union européenne. En effet, ces trois nouvelles ressources ne devraient produire en moyenne que 17 milliards d’euros par an d’ici à 2030 ; on est donc loin du compte…
Cela doit conduire à revenir sur les règles budgétaires européennes. Je pense aux référentiels relatifs à l’endettement – les fameux 3 % et 60 % du PIB issus du pacte de stabilité et de croissance –, qui ont fait leur temps, montré leurs limites et sont incompatibles avec l’urgence à investir massivement.
Le Président de la République a semblé s’inscrire, un temps, dans cette perspective. Qu’en est-il aujourd’hui, monsieur le ministre, car, lors de la présentation des priorités de la présidence française du Conseil de l’Union européenne, son propos à ce sujet a paru très évasif ? (Applaudissements sur les travées du groupe SER.)
M. le président. La parole est à M. le ministre délégué chargé des comptes publics.