Mme le président. La parole est à M. Guillaume Chevrollier. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)
M. Guillaume Chevrollier. Madame la présidente, madame la secrétaire d’État, mes chers collègues, « quelle action de la France pour prendre en compte l’enjeu environnemental ? » Vaste programme, aurait dit le Général ! (Sourires.)
À mon sens, il nous faut traduire politiquement l’urgence climatique dont parlent les scientifiques, même si le climat est un objet extrêmement complexe. Cet effort exige de nous, parlementaires, non seulement des actes concrets, mais aussi beaucoup d’humilité.
Notre société est face à un défi environnemental sans précédent et notre capacité à atteindre l’objectif de neutralité carbone issu de l’accord de Paris de 2015, dont nous avons fêté récemment l’anniversaire, est remise en cause.
Cela étant, refusons le pessimisme défaitiste et demandons-nous ce que nous pouvons faire concrètement pour que la situation évolue.
Avec Patrick Chaize, Jean-Michel Houllegatte et de nombreux autres sénateurs, nous avons défendu la proposition de loi visant à réduire l’empreinte environnementale numérique en France. L’adoption de ce texte illustre parfaitement l’enjeu dont il s’agit : faire converger les transitions numérique et écologique. Notre conviction, ici, au Sénat, était qu’il fallait absolument empêcher l’explosion de l’impact du numérique et qu’il s’agissait là d’une priorité de l’action environnementale de la France.
Je sais combien cela paraît immatériel, mais le numérique représente 10 % de la consommation électrique mondiale, soit près de 4 % des émissions globales de gaz à effet de serre. Pis, ce chiffre pourrait doubler d’ici à 2025. La croissance de la pollution digitale est donc exponentielle et nos politiques publiques doivent se mobiliser pour la juguler.
Aux gains environnementaux indéniables du numérique sont associés des impacts directs et quantifiables, qu’il s’agisse des émissions de gaz à effet de serre, de l’utilisation des ressources abiotiques, de la consommation d’énergie ou encore de l’utilisation d’eau douce.
Au sein de la commission de l’aménagement du territoire et du développement durable, nous avons toujours été favorables au déploiement du numérique sur l’ensemble du territoire, mais nous voulons un numérique vertueux du point de vue environnemental.
Les innovations numériques rendent possibles l’amélioration de l’efficacité énergétique et une utilisation plus durable de nos ressources.
Mes chers collègues, à cet égard, je crois profondément au génie humain : c’est lui qui nous permettra de mieux connaître le réchauffement climatique et de lutter efficacement contre lui.
L’innovation jouera un rôle central dans ce combat. On a conscience de la situation, on sait quelles sont les solutions, mais il faut avoir le courage de les mettre en œuvre.
Pendant deux ans, nous avons travaillé pour élaborer un texte, désormais définitivement adopté après son examen par les deux assemblées. Je me félicite que les députés aient accepté la proposition de loi sénatoriale et que la Haute Assemblée l’ait votée dans les mêmes termes en deuxième lecture.
Ce texte crée notamment une formation de sensibilisation à l’impact environnemental du numérique et à la sobriété numérique dans l’enseignement primaire et secondaire : c’était indispensable. Il y a un paradoxe entre l’ambition climatique des jeunes générations et leur consommation compulsive d’internet, qui engendre une grave pollution numérique. Les jeunes, comme les moins jeunes d’ailleurs, ne la comprennent pas, car ils ne la connaissent pas.
Cette loi permet aussi le renforcement du délit d’obsolescence programmée et son extension à l’obsolescence logicielle, ainsi que le verdissement des centres de données, les data centers : il s’agit là d’une véritable nécessité.
Ce texte inédit constitue la première initiative législative complète sur ce sujet. Il tente d’appréhender toute la chaîne de valeur numérique, des terminaux aux centres de données en passant par les réseaux. Il fait de la France un précurseur sur la scène européenne. Il lui permettra de prendre le leadership de la transition écologique et, ce faisant, de renforcer sa légitimité, sa souveraineté et sa compétitivité.
Selon moi, la présidence française du Conseil de l’Union européenne (PFUE) peut être une occasion unique de défendre ce sujet avec force et crédibilité lors des négociations, non seulement avec les États membres, mais aussi avec l’Amérique et la Chine, qui doivent faire évoluer leurs façons d’agir dans le secteur du numérique.
En la matière, la réponse doit être européenne, claire et unanime pour que nos pays, nos entreprises, nos investisseurs et les consommateurs s’engagent sur la voie d’une transition numérique écologique.
Mes chers collègues, cinq ans après la COP21, qui a fixé l’objectif de limiter le réchauffement climatique à 1,5 degré Celsius, passons à l’action en déployant notre stratégie nationale bas-carbone ! (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)
M. Vincent Segouin. Excellent !
Mme le président. La parole est à M. Jean-Claude Tissot. (Applaudissements sur les travées du groupe SER.)
M. Jean-Claude Tissot. Madame la présidente, madame la secrétaire d’État, mes chers collègues, le 21 juin 2020, après plusieurs mois de travaux, les membres de la Convention citoyenne pour le climat remettaient au Gouvernement un rapport rassemblant leurs 149 propositions pour « réduire les émissions de gaz à effet de serre d’au moins 40 % d’ici 2030 par rapport à 1990 ».
Dès sa constitution, au mois d’octobre 2019, la Convention citoyenne pour le climat avait un objectif précis : partir des attentes des Français en matière de transition écologique pour construire des réponses adaptées.
Près d’un an après la présentation du rapport, lors de l’ultime session du 28 février 2021, 96 membres de la Convention citoyenne pour le climat ont évalué les décisions du Gouvernement par rapport à leurs propositions et aux objectifs fixés. Avec une moyenne de 3,3 sur 10 pour l’ensemble des questions, le résultat est parfaitement lisible : il atteste de la grande déception des conventionnels face à l’inaction du Gouvernement.
L’examen du projet de loi Climat et résilience n’a malheureusement pas permis de mettre en œuvre les propositions ambitieuses de la Convention citoyenne pour le climat. Malgré un satisfecit permanent du Gouvernement, seules dix propositions des conventionnels ont été pleinement inscrites dans ce texte. Cet outil de démocratie participative était pourtant une occasion unique de traduire dans les faits les attentes et la volonté des Français sur un sujet qui nous concerne tous : la lutte contre le dérèglement climatique.
Alors que la perte de confiance et même la défiance envers nos institutions et la classe politique dans son ensemble ne font que croître, cette première Convention citoyenne pour le climat restera comme un échec.
Le débat que nous consacrons aujourd’hui à l’action de la France face à l’enjeu environnemental doit être l’occasion de nous interroger réellement sur les moyens de mobiliser et d’associer les citoyens.
Nous l’avons constaté au cours des dernières années, avec les « gilets jaunes », qui ont fait reculer une fiscalité environnementale pourtant soutenue par une grande majorité de parlementaires, ou encore avec les nombreuses oppositions locales à des projets d’installations d’énergies renouvelables : l’acceptabilité des décisions est au cœur de cet enjeu.
Or – nous le savons – la guerre des émotions, la menace permanente ou la culpabilité ne sauraient être des solutions viables. Seule une vaste concertation démocratique, éclairée et transparente pourra ouvrir la voie à des solutions ambitieuses pour faire face au dérèglement climatique et à ses conséquences concrètes.
C’est précisément cette approche que nous devrions adopter pour fixer un cap, pour les grandes thématiques de notre société qui ont un impact sur l’environnement. Je pense au premier chef aux choix concernant notre bouquet énergétique.
Alors que ce sujet anime les débats de plateau à l’approche des échéances électorales, il est consternant de voir que nos concitoyens sont mis devant le fait accompli pour des décisions stratégiques qui engagent notre avenir à tous. Tel fut le cas, par le passé, avec la privatisation des acteurs historiques de l’énergie. Aujourd’hui, on annonce une mobilisation considérable en faveur du nucléaire, alors que des enjeux cruciaux ne sont pas traités, qu’il s’agisse de la gestion des déchets nucléaires ou de la provenance de l’uranium, qui sont tout sauf neutres pour notre environnement.
Ces grands enjeux sont devenus des sujets de société : ils exigent donc d’organiser des concertations et d’associer les uns et les autres à la prise de décision. Cela ne signifie pas pour autant qu’il faut tomber dans une démocratie contournant le Parlement et les corps intermédiaires. À l’inverse, nous avons besoin d’une grande discussion réunissant toutes les parties prenantes.
Nous le constatons à l’échelon local, particulièrement dans le domaine de l’énergie : seuls les projets coconstruits aboutissent et apportent de véritables bénéfices aux territoires.
Dans mon département de la Loire, le projet d’installation d’éoliennes « Les Ailes de Taillard » en est un bel exemple. L’ensemble des collectivités territoriales concernées, les habitants des communes, les associations de protection de l’environnement et des animaux ainsi que les entreprises privées se sont rassemblés pour élaborer un projet respectueux de toutes les attentes et produisant de l’électricité pour 26 000 personnes grâce à la puissance du vent.
De telles concertations permettront également de prendre en compte les spécificités de chaque territoire. Ces différences, qu’elles soient météorologiques ou démographiques, doivent être prises en considération dans une logique de juste répartition des efforts entre les territoires.
Il est de notre responsabilité, en tant que parlementaires, de veiller à la bonne tenue de cette concertation des citoyens tout en nous assurant que l’écologie ne soit jamais dissociée de la justice sociale.
Madame la secrétaire d’État, à quelques mois de la fin de ce quinquennat, je vous pose deux questions plus directes pour animer notre débat d’aujourd’hui. D’une part, quel bilan tirez-vous objectivement de la Convention citoyenne pour le climat ? D’autre part, ne pensez-vous que notre bouquet énergétique mérite une grande concertation, pour que notre pays ait enfin une vision de long terme sur cet enjeu de souveraineté énergétique et de lutte contre le dérèglement climatique ? (Applaudissements sur les travées des groupes SER et GEST. – Mme Marie-Noëlle Lienemann applaudit également.)
Mme le président. La parole est à M. François Calvet. (Applaudissements sur des travées du groupe Les Républicains.)
M. François Calvet. Madame la présidente, madame la secrétaire d’État, mes chers collègues, dans le cadre des travaux que j’ai consacrés, en tant que rapporteur pour avis, aux crédits relatifs à la transition énergétique et au climat, j’ai pu constater les graves retards qu’accuse la France sur un certain nombre d’axes de notre politique environnementale.
Pour ce qui concerne le développement des énergies renouvelables, ce retard est particulièrement criant. Nous ne pouvons pas nous satisfaire de voir notre pays en queue de peloton européen, d’autant plus que le dernier rapport de Réseau de transport d’électricité (RTE) montre que nous aurons nécessairement besoin d’importantes sources d’énergies renouvelables, même en relançant notre programme nucléaire.
Madame la secrétaire d’État, si la France veut se donner une chance de combler son retard dans le domaine des énergies renouvelables, elle devra mobiliser de nouveaux leviers. Je pense notamment à la chaleur : il semble essentiel d’accroître largement les moyens du fonds Chaleur dès 2022. Cette piste est-elle envisagée par le Gouvernement ?
En matière de lutte contre la pollution de l’air, nous ne sommes pas non plus à la hauteur. Je ne reviens pas en détail sur les diverses procédures contentieuses engagées contre notre pays – les précédents orateurs l’ont fait.
Dans ce contexte, nous le savons, les dix-neuf associations agréées de surveillance de la qualité de l’air (Aasqa) jouent un rôle tout à fait primordial, mais ces structures sont touchées par la baisse tendancielle des contributions des entreprises et, parfois, par le désengagement des collectivités territoriales. Cet état de fait peut nuire à leur indépendance. Nous avons proposé de relever le plafond de déductibilité au profit des entreprises, pour les inciter à augmenter leurs versements, mais cette piste n’est pas acceptée par le Gouvernement. Madame la secrétaire d’État, que proposez-vous, concrètement, pour assurer le financement des Aasqa tout en maintenant leur autonomie ?
En outre, j’estime que nous ne sommes pas à la hauteur en matière de gouvernance de la transition énergétique et climatique. Les moyens confiés au Haut Conseil pour le climat demeurent insuffisants, en dépit de la légère augmentation de crédits prévue par le projet de loi de finances pour 2022.
Le recours à un cabinet de conseil privé pour analyser le projet de loi Climat et résilience, en début d’année, est tout bonnement scandaleux. Non seulement on peut douter de l’indépendance de l’étude réalisée, mais surtout cette mission aurait dû être confiée au Haut Conseil pour le climat, précisément créé à cette fin par le Président de la République.
Le Sénat réclame aussi que les régions et les intercommunalités soient mieux accompagnées dans la transition, par un fléchage d’une part de la taxe intérieure de consommation sur les produits énergétiques (TICPE). Là aussi, le Gouvernement nous oppose un refus catégorique. Comment peut-on espérer mener des politiques écologiques territorialisées sans mettre en face le financement adéquat ?
Ces écarts entre le verbe et l’action, entre le « Make our planet great again » et l’incapacité à respecter nos propres engagements climatiques, affaiblissent la voix de la France sur la scène internationale. C’est fort dommage, car, pour que l’on puisse résoudre les crises environnementales auxquelles nous faisons face, il faudrait que notre pays soit en mesure de défendre sa vision singulière et universelle ! (Applaudissements sur les travées du groupe GEST.)
Mme le président. La parole est à Mme la secrétaire d’État.
Mme Bérangère Abba, secrétaire d’État auprès de la ministre de la transition écologique, chargée de la biodiversité. Madame la présidente, mesdames, messieurs les sénateurs, avant tout, je vous remercie de nous donner une nouvelle occasion de débattre de ces sujets, qui sont aujourd’hui au cœur de toutes nos politiques publiques.
En effet, l’urgence climatique et la nécessité de lutter contre l’érosion de la biodiversité s’imposent à nous. Ces phénomènes s’accélèrent sans cesse et exigent, de notre part, des moyens démultipliés.
Le réchauffement climatique est d’ampleur mondiale. En parallèle, un grand nombre d’espèces disparaissent et nous assistons à des événements climatiques extrêmes, chaque année plus nombreux et plus violents. Ce sont là autant de symptômes incontestables des maux dont souffre notre planète.
Dans ce moment critique pour la planète, la France place l’environnement au cœur de son action nationale, européenne et internationale. Ce faisant, elle agit à la fois avec responsabilité et avec ambition : en témoignent les efforts accomplis au cours de ce quinquennat, que je vais vous détailler.
Nous avons franchi un cap en inscrivant l’enjeu écologique dans l’ensemble de nos politiques publiques comme dans le quotidien de nos concitoyens.
Au cours des derniers mois, et même des derniers jours, le Parlement a consacré de nombreux débats à ces sujets. Il fait ainsi preuve de sa mobilisation. À cet égard, ce qui me frappe d’abord, c’est le consensus qui se dégage de vos interventions d’aujourd’hui. Vous le soulignez tous, il y a urgence à agir. C’est déjà un signal très fort.
La société civile a elle aussi pris conscience de cette nécessité, malgré l’ampleur des transformations que cela implique pour nos manières de vivre, de produire et de consommer.
Je le répète : sur toutes les travées de cet hémicycle, vous insistez sur cet impératif et nous pouvons nous en féliciter.
Depuis le début de ce quinquennat, le Gouvernement a mobilisé des investissements absolument sans précédent pour adapter notre économie à l’urgence environnementale et la rendre plus compatible avec le respect de l’environnement.
Vous le savez, 30 milliards d’euros des 100 milliards d’euros du plan de relance ont été consacrés à la croissance verte. Aujourd’hui, nous allons plus loin encore avec le plan d’investissement France 2030, qui est largement dédié aux enjeux environnementaux. À ce titre, 8 milliards d’euros sont fléchés vers le secteur de l’énergie, notamment pour développer la filière de l’hydrogène vert et décarboner notre industrie, et 4 milliards d’euros sont destinés aux transports du futur. Il s’agit de produire des véhicules électriques hybrides et, nous l’espérons, les premiers avions bas-carbone.
La France s’est également dotée de lois ambitieuses – loi relative à l’énergie et au climat, loi d’orientation des mobilités, loi relative à la lutte contre le gaspillage et à l’économie circulaire… Pas plus tard que l’été dernier a été adoptée la loi Climat et résilience. Les villes françaises sont mobilisées : elles sont déjà moins polluées qu’hier et elles veulent l’être moins encore demain. En particulier, les villes de plus de 150 000 habitants créeront un certain nombre de zones à faibles émissions (ZFE) d’ici à 2024.
De surcroît, nous réduisons nos émissions dans les transports de longue distance. Ainsi, les vols intérieurs seront limités lorsque le train permet d’effectuer le même trajet en moins de deux heures trente.
Prendre en compte l’enjeu environnemental, c’est aussi, très concrètement, préserver nos espaces naturels et agricoles. Tous les dix ans, c’est l’équivalent d’un département de la taille des Yvelines qui disparaît sous le béton. Avec la loi Climat et résilience, nous empêcherons la construction de nouveaux centres commerciaux sur des terres agricoles.
Ce texte nous a aussi permis d’inscrire dans le code de l’environnement l’objectif de protection de 30 % de notre espace terrestre et maritime. Cette mesure est la traduction de la stratégie pour les aires protégées, que je vous ai présentée en début d’année.
Nous avons également codifié de manière durable la stratégie nationale de lutte contre la déforestation importée. À chaque instant, les achats des distributeurs et des consommateurs, ici, en France, peuvent avoir des conséquences à l’autre bout du monde. Avant tout, nous devions donc faire connaître l’impact de nos modes de consommation tout en accompagnant des filières plus durables sur l’ensemble de la planète.
Face au déclin de la biodiversité, la limitation des déchets, notamment plastiques, est un cheval de bataille du Gouvernement. Ainsi, nous avons réduit drastiquement les emballages. La loi Climat et résilience impose 20 % de vrac et, il y a quelques semaines, nous avons pris un décret interdisant les emballages plastiques pour un grand nombre de fruits et de légumes.
Au-delà de ces exemples emblématiques, vous vous souvenez des dispositions de la loi relative à la lutte contre le gaspillage et à l’économie circulaire, dite AGEC, qui, à ce titre, nous place dans une véritable dynamique. Elle fait même de la France le chef de file de la mobilisation contre les plastiques à usage unique.
La protection de l’environnement a été renforcée dans notre droit interne. En effet, si le rôle des pouvoirs publics est d’inciter et d’accompagner, il est aussi parfois de sanctionner.
Comme vous le savez, nous avons instauré des dispositions en matière de justice environnementale, notamment la création du délit de mise en danger de l’environnement et, pour les atteintes plus graves, la création du délit d’écocide. Nous avons également renforcé l’échelle des peines.
La loi Climat et résilience a été l’occasion de lancer une transformation profonde, au travers de ses 300 articles. Chacun peut constater qu’elle a été largement étoffée pour avoir des effets sur nos manières de consommer, de produire ou de nous déplacer, sur notre justice et notre droit, voire sur notre façon d’appréhender l’urbanisme et l’aménagement du territoire. Il s’agit là d’avancées majeures.
Quant à la politique énergétique, elle est l’un des leviers phares de notre action. Les énergies fossiles représentent aujourd’hui les deux tiers de notre consommation énergétique, soit 63 % en 2020, pour être exacte. Notre production d’électricité est essentiellement décarbonée, grâce à notre compétence dans le domaine nucléaire.
Des travaux inédits, extrêmement approfondis, de Réseau de transport d’électricité (RTE) ont été rendus à la fin du mois d’octobre dernier, qui ont abouti à un constat très clair : dans tous les scénarios, la neutralité carbone suppose une sortie des énergies fossiles d’ici à 2050.
Je sais que nous partageons cet objectif premier de sobriété énergétique et de réduction de notre consommation d’énergie. C’est l’un des leviers essentiels de notre action qui s’applique par exemple dans notre politique de soutien à la rénovation énergétique des logements, avec le dispositif MaPrimeRénov’ qui rencontre un succès inattendu, puisque plus de 700 000 demandes, que nous entendons valider, ont été reçues cette année.
Le Gouvernement a également renforcé les exigences pour les bâtiments neufs, en matière de consommation d’énergie, dans la nouvelle réglementation environnementale dite RE2020.
Notre deuxième priorité est, bien évidemment, de verdir le mix énergétique en développant les énergies renouvelables et en le complétant par le nucléaire. Nous avons déjà avancé dans cette voie, dans le cadre de la programmation pluriannuelle de l’énergie. Aujourd’hui, 25 % de notre électricité est produite grâce aux énergies renouvelables, contre 21 % en 2018. Nous poursuivrons le développement de ces énergies en l’accélérant, qu’il s’agisse de l’éolien, terrestre et marin, du photovoltaïque ou du biogaz.
Quant à l’industrie, nous mobilisons quelque 7 milliards d’euros dans le cadre du plan France Relance pour développer l’hydrogène décarboné. Des financements complémentaires sont également prévus dans le cadre du plan France 2030 à hauteur de 1,9 milliard d’euros, conformément aux annonces du Président de la République, à Béziers, le 16 novembre dernier. Personne ne peut minimiser cet effort sans précédent, qui est considérable en matière de décarbonation.
Mesdames, messieurs les sénateurs, vous le voyez, qu’il s’agisse de l’énergie ou de nos manières de produire et de consommer, nous accélérons la transition écologique non seulement à l’intérieur de nos frontières, mais aussi à l’échelon tant européen qu’international, par la promotion de nos objectifs.
La France exercera à partir du mois de janvier prochain la présidence du Conseil de l’Union européenne, ce qui devrait nous permettre d’accentuer nos efforts pour accélérer la mise en œuvre du Pacte vert européen et du paquet Fit for 55. L’objectif est de tirer parti de la présidence française pour faire aboutir ces textes, a minima pour les défendre et faire avancer le plus possible les négociations.
L’un des chantiers prioritaires, vous le savez, sera de renforcer le marché carbone européen, essentiel pour réduire nos émissions de gaz à effet de serre. Nous voulons également avancer sur le verdissement des transports.
Au début de ce quinquennat, la France a été l’un des premiers pays au monde à fixer une date pour la fin des ventes de véhicules thermiques, alors prévue à l’horizon de 2040. Nous partageons désormais avec la Commission européenne l’objectif fixé à 2035. Il faudra bien évidemment rester attentifs à la liste des véhicules concernés et prévoir un accompagnement des sous-traitants et des salariés. La filière de l’automobile s’engage déjà dans cette voie. L’évolution des choix de consommation des Français l’incite à le faire et nous invite à renforcer cet accompagnement plutôt que de rester dans des schémas qui n’ont plus lieu d’être.
Pour que cette transition soit juste, il est nécessaire que nous proposions des solutions à tous et que nous donnions des réponses à chacun. Dans la mesure où la prise de conscience est partagée, nous ne pouvons pas laisser les Français sans ressource ni solution. Il faut donc absolument que nous poursuivions cet effort d’accompagnement dans la transition.
La présidence française du Conseil de l’Union européenne sera également l’occasion de célébrer cette mobilisation à l’échelon européen comme international. Nous fêterons, par exemple, les trente ans du réseau Natura 2000 et nous pourrons engager les premières discussions sur le projet de règlement européen pour lutter contre la déforestation importée de pays hors de l’Union européenne. Nous attendons également une proposition législative importante de la Commission européenne sur la restauration des écosystèmes.
Tous ces sujets sont essentiels tant, vous le savez, les luttes contre le réchauffement climatique et contre l’érosion de la biodiversité sont jumelles. Nous devons donc accroître nos moyens en renforçant nos différentes politiques.
Dans ce cadre, l’adoption d’un mécanisme d’ajustement carbone aux frontières est fondamentale pour éviter les risques de fuite carbone et pour que la protection de l’environnement soit un atout et une opportunité tant pour nos industries que pour les travailleurs européens. Nous considérons donc qu’il est nécessaire que nous portions les voix française et européenne pour défendre ces nouveaux outils.
Notre engagement se joue également à l’échelon international. C’est pourquoi l’environnement est au cœur de la diplomatie française, telle que l’a voulue le Président de la République. Nous en avons fait une priorité lors du One Planet Summit, où les chefs d’État et de gouvernement se sont mobilisés sur ces enjeux. Les engagements n’ont pas seulement été que des mots, mais ils se sont traduits dans des objectifs concrets définis en termes financiers et budgétaires. Des points de rendez-vous ont été fixés pour vérifier le suivi des trajectoires.
S’agissant du climat, la COP26 qui s’est tenue à Glasgow au mois de novembre dernier nous a permis d’aboutir sur certains points de négociation, tandis que d’autres ont suscité la déception. Nous pouvons nous féliciter des moments très fédérateurs qui ont eu lieu, notamment lors des discussions sur le marché mondial du carbone. Il s’agit là d’une première historique, puisque le dispositif prévoit des outils de transparence pour vérifier la réalité des engagements pris, ainsi qu’un calendrier resserré pour les suivre dans le temps.
Aux côtés de l’Union européenne et des États-Unis, la France a également conclu un accord unique en son genre, qui prévoit 8 milliards de dollars pour aider l’Afrique du Sud à sortir du charbon.
S’agissant de la biodiversité, des engagements très forts ont été pris pour lutter contre la déforestation.
Les grandes manifestations internationales se poursuivront, à la suite des deux événements majeurs qui ont été engagés par la France, en 2021, à la sortie de la crise sanitaire, à savoir le One Planet Summit entièrement dédié à la biodiversité et le Congrès mondial de la nature que nous avons accueilli à Marseille, au mois de septembre dernier.
Les engagements pris lors de ces événements nous permettent de travailler pour renforcer la COP15 sur la biodiversité à l’occasion de négociations internationales. Nous souhaitons que cette COP15 soit pour la biodiversité ce que la COP21 et l’accord de Paris ont été pour le climat, c’est-à-dire un moment fédérateur de la mobilisation internationale. La France y sera un chef de file d’autant plus observé que nous porterons non seulement la voix française, mais aussi la voix européenne, dans le cadre de la présidence française du Conseil de l’Union européenne.
Il s’agit d’un triple enjeu de cohérence : cohérence d’abord entre nos différentes politiques publiques – un important travail interministériel est mené en ce sens –, cohérence ensuite entre ce que nous développons à l’échelon national et ce que nous défendons à l’échelon international, car c’est la clé de notre légitimité dans ces négociations, cohérence enfin entre les objectifs, nos ambitions et les moyens que nous leur dédions. À cet égard, les moyens sont sans précédent. Les investissements prévus dans les lois de finances et le projet de loi de finances pour 2022, dans le plan France Relance et dans le plan France 2030 montrent que nous sommes au rendez-vous de l’urgence.
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