Mme Cathy Apourceau-Poly. Exactement !
M. Olivier Rietmann. Monsieur le Premier ministre, loin de moi la volonté d’agiter les peurs, mais je m’interroge aujourd’hui, comme des millions de Français. Pourquoi annoncer le lundi 12 juillet l’application dans des délais très brefs du passe sanitaire avec un parcours vaccinal complet, alors que, voilà à peine quarante-huit heures, les agences régionales de santé communiquaient sur le fait que nous n’avions manifestement pas la capacité de vacciner nos concitoyens ? (Bravo ! et applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)
Mme le président. La parole est à M. le secrétaire d’État chargé de l’enfance et des familles.
M. Adrien Taquet, secrétaire d’État auprès du ministre des solidarités et de la santé, chargé de l’enfance et des familles. Monsieur le sénateur, je rappelle tout d’abord qu’il s’agit bien d’un passe sanitaire et non pas d’un passe vaccinal. (Exclamations sur les travées du groupe Les Républicains.)
M. Laurent Duplomb. C’est pareil !
Mme Marie-Pierre de La Gontrie. Ça commence mal !
M. Adrien Taquet, secrétaire d’État. Vos propos et les raccourcis que l’on peut en faire laissent entendre que la seule solution soit la vaccination.
Je rappelle que le passe sanitaire comprend la vaccination – vous l’avez évoquée et je vais revenir sur la question des doses et des objectifs que nous nous sommes fixés –, mais aussi, vous le savez, la présentation d’un test négatif réalisé dans les dernières quarante-huit heures ou encore d’une attestation donnant la preuve de son immunité dans les six derniers mois.
Une fois cette précision apportée, je rappelle que nous avons atteint l’objectif de 40 millions de primo-injections un mois avant l’objectif que nous nous étions assigné. (Murmures sur les travées du groupe Les Républicains.) Nous pouvons collectivement nous en réjouir. Par ailleurs, le stock de doses disponibles est aujourd’hui de 6 millions, sauf erreur, et nous attendons des approvisionnements de 2 millions de doses par semaine.
L’objectif fixé par le Premier ministre que nous atteignions la primo-injection de 50 millions de nos concitoyens à la fin du mois d’août sera bien atteint, parce que nous disposerons du nombre de doses suffisant et parce que nous avons mis en place des moyens humains. Cette question a été soulevée par l’un de vos collègues tout à l’heure et se pose aussi en effet.
Nous nous organisons aujourd’hui avec l’ensemble des professionnels de santé – je rappelle que le spectre les personnes pouvant vacciner a été élargi –, afin que nous puissions, durant l’été, procéder à l’ensemble de ces primo-injections pour nos concitoyens.
Mme le président. La parole est à M. Olivier Rietmann, pour la réplique.
M. Olivier Rietmann. Monsieur le secrétaire d’État, je vous remercie de votre réponse.
Monsieur le Premier ministre, on ne peut que partager votre volonté enthousiaste et optimiste de vacciner 50 millions de Français. Reste que, pour vacciner, il faut des vaccins.
M. Laurent Duplomb. Eh oui !
M. Olivier Rietmann. Force est de constater le décalage entre vos déclarations, notamment ce midi sur TF1, et la réalité sur le terrain avec les mails des ARS qui ont immédiatement stoppé toute prise de rendez-vous pour la première vaccination. C’est tout à fait irréaliste.
Par pitié, monsieur le Premier ministre, arrêtez de signer des chèques dont vous ne pouvez honorer le paiement. (Bravo ! et applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)
enlèvement d’enfants binationaux à leur père
Mme le président. La parole est à Mme Brigitte Devésa, pour le groupe Union Centriste. (Applaudissements sur les travées du groupe UC.)
Mme Brigitte Devésa. Ma question, à laquelle j’associe Olivier Cadic, sénateur des Français établis hors de France, s’adresse à M. le ministre de l’Europe et des affaires étrangères.
M. Vincent Fichot, un Français originaire de mon département, les Bouches-du-Rhône, et vivant au Japon, est empêché de voir ses enfants depuis leur enlèvement par leur mère japonaise en 2018. Cela fait douze jours qu’il a entamé une grève de la faim dans la gare de Tokyo, à deux pas du stade olympique, et ce à quelques jours de l’arrivée d’Emmanuel Macron au Japon.
La garde partagée des enfants en cas de séparation n’existe pas légalement au Japon. Aussi, l’enlèvement parental est une pratique courante et tolérée par les autorités locales. Il n’existe pas de chiffres officiels, mais des associations estiment que 150 000 mineurs en sont victimes chaque année dans l’archipel.
Parmi eux, nombre de binationaux, dont les parents victimes, après s’être heurtés aux autorités et à la justice japonaises, se sont tournés vers les Nations unies. En 2019, ils ont porté plainte auprès du Conseil des droits de l’homme de l’ONU.
La justice française est également saisie. Une information judiciaire pour soustraction de mineurs visant l’épouse de notre compatriote en grève de la faim a été ouverte à la fin de l’année 2020.
Il y a deux ans, M. Emmanuel Macron s’était engagé à agir en faveur de ces parents français, évoquant des « situations de détresse qui sont absolument inacceptables ». Au cours de sa visite au Japon, nous croyons savoir qu’il consultera le gouvernement japonais sur ce thème. Monsieur le ministre, pouvez-vous nous le confirmer et nous dire quelles actions diplomatiques sont prévues pour mettre fin à ces enlèvements parentaux ? (Applaudissements sur les travées du groupe UC.)
Mme le président. La parole est à M. le ministre de l’Europe et des affaires étrangères.
M. Jean-Yves Le Drian, ministre de l’Europe et des affaires étrangères. Madame la sénatrice, vous soulevez un problème douloureux : quand les enfants sont au cœur d’un conflit familial, c’est toujours difficile, mais ça l’est particulièrement au Japon où, comme vous l’avez dit, le droit familial ne reconnaît pas l’autorité parentale partagée et où la non-présentation d’enfant ne constitue pas une infraction pénale.
Ce sujet, qui concerne aujourd’hui singulièrement M. Fichot, mais qui touche aussi d’autres de nos ressortissants, est régulièrement évoqué par nos soins et par mes soins, auprès des autorités japonaises. Vous avez d’ailleurs rappelé que, lors de sa visite officielle à Tokyo au mois de novembre 2019, le Président de la République avait déjà eu l’occasion d’exprimer nos inquiétudes sur cette situation.
Régulièrement, nos services reçoivent des parents d’enfants franco-japonais qui font des demandes et nous intervenons régulièrement auprès des autorités japonaises, en particulier avec le président du collectif Sauvons nos enfants Japon.
La situation de M. Fichot et très difficile, vous l’avez évoquée : il ne peut plus voir ses enfants depuis trois ans et se heurte à un mur. Notre ambassade est intervenue à plusieurs reprises sur ce dossier et nous sommes aujourd’hui en contact quotidien avec ce père de famille pour assurer un suivi de sa situation, notamment sur le plan médical, et lui apporter toute l’aide possible dans la limite de nos compétences.
Naturellement, nous ne pouvons pas nous immiscer dans des procédures judiciaires qui concernent des conflits familiaux d’ordre privé, a fortiori lorsque ces conflits ont lieu à l’intérieur même du Japon et qu’ils relèvent des seules juridictions locales, mais je peux vous assurer que cette situation fera partie des sujets qu’évoquera le Président de la République lors de son déplacement au Japon. Il l’a déjà fait à plusieurs reprises, singulièrement dans cette configuration.
Nous exprimons toute notre solidarité à M. Fichot et nous essaierons d’agir pour que sa situation s’améliore et qu’il puisse retrouver la garde de ses enfants.
Mme le président. La parole est à Mme Brigitte Devésa, pour la réplique.
Mme Brigitte Devésa. Monsieur le ministre, les solutions ne sont pas simples.
Au nom de tous les sénateurs et sénatrices, j’exprime à M. Fichot tout notre soutien, en espérant qu’il sortira rapidement de ce cauchemar. (Applaudissements sur les travées du groupe UC.)
passe sanitaire
Mme le président. La parole est à M. Alain Houpert, pour le groupe Les Républicains. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)
M. Alain Houpert. Monsieur le Premier ministre, l’une de vos formules favorites pour qualifier votre politique est « agir en responsabilité ». Vous avez eu raison de pointer les outrances et les images abjectes utilisées par certains extrémistes lors des manifestations contre l’obligation vaccinale et le passe sanitaire.
Toutefois, il serait bon que vous essayiez de comprendre le bruit de fond de tous les autres, qui sont loin de ces irresponsables minoritaires : ils défilent, ils ont défilé, ils défileront pour une certaine idée de la France, de notre France, où la liberté est assortie de devoirs, mais aussi de droits.
Monsieur le Premier ministre, je vous pose donc la question : est-ce agir en responsabilité de fracturer l’unité du peuple français, qui est consacrée par notre Constitution, en dressant les vaccinés contre les non-vaccinés ? (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)
Mme le président. La parole est à M. le Premier ministre. (Ah ! sur les travées des groupes Les Républicains et UC.)
M. Jean Castex, Premier ministre. Madame la présidente, mesdames, messieurs les sénateurs, j’interviens après une série de questions sur ce sujet. J’ai même entendu une sénatrice me proposer de généraliser la vaccination, alors que, lors de la concertation que j’ai organisée avec tous les groupes politiques à l’Assemblée nationale, son groupe m’a demandé de la limiter au personnel soignant. Comprenne qui pourra… (Protestations sur les travées du groupe SER.)
Mme Laurence Rossignol. C’est un mensonge !
Mme Marie-Pierre de La Gontrie. C’est faux !
M. Jean Castex, Premier ministre. Monsieur le sénateur Alain Houpert, le Gouvernement et le Parlement ici réunis ne cherchent nullement à fracturer.
Mme Marie-Pierre de La Gontrie. C’est raté !
M. Jean Castex, Premier ministre. Vous avez raison, certains entretiennent des fractures de façon artificielle !
Plus que jamais, mesdames, messieurs les sénateurs, notre pays a besoin d’unité. (Exclamations sur les travées du groupe Les Républicains.) Il est fatigué, non pas par le Gouvernement ou le Parlement, mais par l’épidémie.
Le variant delta, dont je rappelle qu’il n’est pas propre à la France, mais qu’il est mondial, vient évidemment accentuer la lassitude de nos concitoyens, eux qui ont consenti – je le dis, monsieur le sénateur, parce que vous ne l’avez pas fait ! – beaucoup d’efforts dans le consensus pendant des mois et des mois. Ce ne sont pas ceux que l’on entend le plus hurler qui représentent l’ensemble du pays ; en tout cas, il ne faut pas le laisser croire !
La situation est marquée par une reprise épidémique, la quatrième vague. Je ne rappelle pas les chiffres, vous les connaissez. En revanche, il est un chiffre qu’il faut mentionner, car il a un lien avec votre question : 96 % des personnes contaminées ces jours derniers par le virus delta n’ont reçu aucune dose de vaccination. (Applaudissements sur les travées du groupe RDSE.)
M. Jean-Claude Requier. C’est vrai !
M. Jean Castex, Premier ministre. C’est dans les territoires ultramarins, où, malheureusement, la vaccination ne prend pas, que l’épidémie explose le plus.
Par conséquent, monsieur le sénateur, il n’y a pas de doute : il faut vacciner, vacciner et encore vacciner.
Mme Laurence Rossignol. On est d’accord !
M. Jean Castex, Premier ministre. Il faut le reconnaître et on peut en rejeter la faute sur le Gouvernement : il y a eu une diminution de la vaccination, en tout cas de son rythme, au cours du mois de juin. Ce n’est pas la faute de Pierre, de Paul ou de Jacques, mais c’est parce que la situation était meilleure et que la pression était moindre. Qui plus est, nous avons fait le choix de ne pas poursuivre la vaccination avec le vaccin AstraZeneca, comme l’ont fait certains pays voisins. Voilà la réalité.
Aujourd’hui, nous reprenons le rythme des vaccinations (Exclamations sur les travées du groupe Les Républicains.) et je me réjouis, sans doute avec vous tous, que l’intervention du Président de la République ait entraîné un nouvel engouement très fort pour la vaccination. Certes, il y a les manifestations dont vous avez parlé, mais, en ce qui me concerne, je constate qu’il y a des demandes de prise de rendez-vous.
Je réponds à la précédente question sur le sujet : oui, nous devons tout mettre en œuvre. Le Gouvernement et ses services déconcentrés s’occupent des doses, mais il faut aussi des centres de vaccination et des professionnels de santé, alors même que nous sommes en période estivale. C’est plus difficile, puisque le nombre de personnels soignants disponibles diminue. (Nouvelles exclamations sur les mêmes travées.)
Nous sommes parfaitement mobilisés. Je le dis, car cela n’a peut-être pas été porté à la connaissance de tout le monde : l’erreur de communication de l’agence régionale de santé à laquelle il a été fait allusion dans une précédente question a été corrigée. Oui, nous aurons des doses. Je ne veux pas jeter la pierre à cette ARS : j’assume cette erreur de l’administration centrale et, de toute façon, comme d’habitude, le responsable en dernier ressort, c’est moi !
La vérité, c’est que nous avons vacciné 1,2 million de primo-vaccinés dans les quinze derniers jours de juin – ce chiffre avait baissé. Nous espérons atteindre 2 millions de primo-injections cette semaine. Dans le même temps et c’est heureux, très logiquement, le nombre de deuxièmes injections augmente fortement.
Notre objectif est que, dans les deux prochaines semaines, 7 à 8 millions de personnes supplémentaires soient vaccinées. C’est très ambitieux, inédit, mais nous devons absolument l’atteindre. Ainsi, nous cherchons à avoir 40 millions de primo-vaccinés au 31 juillet, alors qu’ici même j’avais dit que nous devions parvenir à ce chiffre le 31 août – il faut donc que nous ayons un mois d’avance –, et de l’ordre de 50 millions à la fin du mois d’août.
M. Bernard Jomier. Très bien !
M. Jean Castex, Premier ministre. Quant au passe sanitaire, il a fait l’objet de plusieurs questions, qui semblaient négliger le fait qu’il a deux objectifs.
Le premier est d’encourager, indirectement, à se faire vacciner. Vous en débattrez, mais le Gouvernement ne pense pas qu’il soit nécessaire, à ce stade, d’obliger tous les Français à se faire vacciner.
Mme Laurence Rossignol. Ah ! Dans trois mois, alors ?
M. Jean Castex, Premier ministre. Seuls deux pays dans le monde l’ont fait. Nous verrons ce que vous déciderez pour les soignants, entendus au sens large.
Le second objectif du passe sanitaire, face à la reprise épidémique, avec un variant quatre fois plus contagieux, est d’éviter de devoir de nouveau fermer les bars et restaurants, qu’on sait très propices à la contamination, parce qu’on ne peut pas y porter le masque. Vous savez combien de mois nous avons déjà dû les fermer…
Une sénatrice m’a fait observer que le texte avait évolué depuis sa présentation en conseil des ministres. Heureusement ! C’est le rôle du Parlement que de l’améliorer, et j’espère, mesdames, messieurs les sénateurs, que vous parviendrez à un texte satisfaisant, qui nous permettra, tous ensemble, de lutter efficacement contre la résurgence de l’épidémie. (Applaudissements sur les travées des groupes RDPI et INDEP, ainsi que sur des travées du groupe UC.)
Mme le président. La parole est à M. Alain Houpert, pour la réplique.
M. Alain Houpert. Merci d’avoir répondu à une question qui vous était destinée, monsieur le Premier ministre… Vous êtes excellent en marketing vaccinal ! (Rires sur des travées du groupe Les Républicains. – Protestations sur les bancs du Gouvernement et sur les travées du groupe RDPI.) La vaccination est une solution, mais ce n’est pas la seule.
Vous dites souvent que la liberté des uns s’arrête là où commence celle des autres. Chers collègues, voulons-nous d’une société dans laquelle les droits sont différents selon les choix en conscience des citoyens ? Voulons-nous d’une société dans laquelle chacun pourra surveiller l’autre ? Je répondrai à ces questions par une citation d’un prix Nobel de la paix qui connaît bien le prix de la liberté, Nelson Mandela : « Je ne suis pas vraiment libre si je prive quelqu’un d’autre de sa liberté. L’opprimé et l’oppresseur sont tous deux dépossédés de leur humanité. »
Nous sommes en train de nous attaquer aux fondements de notre société française, de notre trinité républicaine, « Liberté, Égalité, Fraternité », en sapant le premier, essentiel, la liberté. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains. – M. Loïc Hervé applaudit également.)
situation sanitaire dans les outre-mer
Mme le président. La parole est à M. Victorin Lurel, pour le groupe Socialiste, Écologiste et Républicain. (Applaudissements sur les travées du groupe SER.)
M. Victorin Lurel. Monsieur le Premier ministre, comptez-vous répondre à la question de notre collègue Laurence Rossignol ? Allez-vous lever le gage ?
M. Roger Karoutchi. Oh, mais ce n’est pas possible !
M. Victorin Lurel. L’évolution actuelle et prévisible de la situation sanitaire dans les outre-mer inquiète légitimement. Partout, les taux d’incidence et de reproduction sont alarmants, et les capacités hospitalières restent sous-dimensionnées.
Outre-mer, le taux de couverture vaccinale oscille entre 18 % et 32 %, soit trois fois moins que le taux national. La carte des plus faibles vaccinations recouvre parfaitement celle de la pauvreté, de l’accès aux services publics, des inégalités sociales et des fractures territoriales, éducationnelles et générationnelles. Derrière ces fractures, il y a une déficience de politique publique. La lutte contre la pandémie doit donc désormais se conjuguer à une lutte résolue contre ces inégalités.
Si l’on ne peut reprocher au Gouvernement d’être demeuré inerte, il reste manifestement beaucoup à faire. Le passe sanitaire que vous nous imposez n’est pas, dans son économie, dans sa portée et dans son effectivité probable, de nature à endiguer l’épidémie et à nous rapprocher de l’objectif d’immunité collective, si ce n’est au prix de très graves atteintes aux libertés fondamentales et à la vie privée et professionnelle. Sur ces travées, nous pensons que seule la vaccination obligatoire, progressive, universelle et gratuite pour tous les adultes et le maintien de la gratuité des tests sont de nature à concilier les libertés individuelles et la sécurité sanitaire collective.
Face aux réticences et aux oppositions, face à la peur et à la désinformation entretenues, quelles adaptations et quels moyens nouveaux comptez-vous engager pour véritablement aller vers les gens et, enfin, infléchir la mauvaise tendance outre-mer ? (Applaudissements sur les travées des groupes SER et CRCE.)
Mme le président. La parole est à M. le secrétaire d’État chargé de l’enfance et des familles.
M. Adrien Taquet, secrétaire d’État auprès du ministre des solidarités et de la santé, chargé de l’enfance et des familles. Monsieur le sénateur, dans le brouhaha ambiant, je n’ai pas perçu l’ensemble de votre question…
M. Bernard Jomier. Le gage !
M. Adrien Taquet, secrétaire d’État. Il me semblait que la réponse du Premier ministre était assez claire à ce sujet…
Je pensais que vous alliez me parler de l’outre-mer et de la Guadeloupe, mais c’est peut-être ce que vous avez fait au début de votre question. Si vous me le permettez, je vais vous répondre sur cet aspect.
La situation dans les outre-mer est effectivement préoccupante. Vous avez parlé d’inégalités territoriales et sociales face à la vaccination.
Nous avons réinstauré, en Guadeloupe, l’obligation du port du masque en extérieur au sein des zones bâties entre huit heures et vingt-trois heures. Cette obligation ne s’applique pas sur les plages, au bord des rivières ou au sein des espaces naturels.
Il était nécessaire et urgent d’agir. C’est pourquoi le Gouvernement a déposé, au cours des débats à l’Assemblée nationale, un amendement visant à réinstaurer l’état d’urgence sanitaire en Guadeloupe face à la dégradation extrêmement rapide de la situation – si rapide qu’avant même la promulgation de la loi le Gouvernement envisage de prendre un décret qui permettrait l’instauration plus précoce de cet état d’urgence.
Comme vous l’avez dit, on constate un déficit de vaccination dans les outre-mer, notamment en Guadeloupe : si 80 % des médecins hospitaliers sont vaccinés, seuls 20 % des professionnels paramédicaux le sont ; au sein de la population, le taux de couverture vaccinale des personnes de plus de 18 ans est uniquement de 26 %.
Nous devons véritablement développer la stratégie « Aller vers », en nous appuyant notamment sur les collectivités locales, qui participent activement à cette tâche, tout comme leurs élus – vous avez d’ailleurs été l’un des premiers à vous faire vacciner sur l’île. Nous devons tout mettre en œuvre afin que la population puisse se vacciner et se protéger contre la propagation extrêmement rapide du virus sur le territoire. (M. François Patriat applaudit.)
Mme le président. La parole est à M. Victorin Lurel, pour la réplique.
M. Victorin Lurel. Je regrette, monsieur le secrétaire d’État, que vous ne répondiez à aucune de nos questions. Tôt ou tard, vous allez rejoindre notre position sur l’obligation vaccinale. En attendant, je vous demande de changer de braquet outre-mer et d’aller vers les gens. (Applaudissements sur les travées du groupe SER.)
sécurité à cavaillon
Mme le président. La parole est à M. Jean-Baptiste Blanc, pour le groupe Les Républicains. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)
M. Jean-Baptiste Blanc. Ma question s’adresse à M. le ministre de l’intérieur.
Des scènes d’une violence inouïe se sont déroulées samedi soir dans le quartier du Docteur-Ayme à Cavaillon, ville dont je suis l’élu. Nous avons assisté à une véritable guerre urbaine – vous avez sans doute vu les vidéos, virales, monsieur le ministre – dans une petite ville provençale habituellement paisible. Nous avons atteint là un point de non-retour, dans un département toujours traumatisé par la mort d’Éric Masson.
Avec Gérard Daudet, maire de Cavaillon, nous vous demandons que des mesures soient prises rapidement pour faire face au quotidien, marqué par des affrontements liés au trafic de stupéfiants : 600 clients par jour dans ce quartier, 80 000 euros par jour de chiffre d’affaires, et même 100 000 euros quand tout va bien !
La lutte contre ce trafic a enregistré de très bons résultats, puisque 30 kilos ont été saisis à Cavaillon, grâce au travail réalisé dans des conditions difficiles par les équipes de police, nationale comme municipale, sur le terrain – hommage leur soit rendu. Mais, sans moyens ni effectifs suffisants, nos policiers ne peuvent pas agir avec efficacité.
Vous avez annoncé au printemps l’affectation de cinq personnels au commissariat de Cavaillon. En réalité, cela correspond à des remplacements de fonctionnaires détachés ou déjà partis. Vous avez aussi affecté un véhicule, mais tout cela est insuffisant. Je rappelle que ce commissariat n’a plus de BAC de nuit depuis deux ans.
De quoi avons-nous le plus besoin ? Dans l’immédiat, d’une BAC de nuit, autrement dit de la création d’un groupe de sécurité de proximité, ce qui permettrait aux policiers de travailler en soirée et la nuit, et d’un renforcement significatif de l’investigation. Faudra-t-il un jour des véhicules blindés ? Honnêtement, la question se pose, quand on voit de tels tirs.
Dans le département de Vaucluse, à Cavaillon, tout le monde craint que nous ne devenions la base arrière d’Avignon et de Marseille. Nous ne le voulons pas ! C’est pourquoi nous attendons beaucoup de vous : les Cavaillonnais veulent des actes forts et le retour de l’ordre républicain ! (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)
Mme le président. La parole est à M. le ministre de l’intérieur.
M. Gérald Darmanin, ministre de l’intérieur. Monsieur le sénateur, comme vous, samedi, j’ai vu ces images. J’ai reçu les rapports de M. le préfet et des services de police, qui font état d’un règlement de comptes sur un point de deal. Trois personnes ont été interpellées par les services de police, arrivés très rapidement sur les lieux. Elles ont été déférées.
Le Gouvernement mène une lutte implacable, avec les forces de police – que je tiens moi aussi à saluer, tout comme les élus qui installent des caméras de vidéoprotection ou qui aident avec leur police municipale –, contre ces points de deal, qui suscitent de tels règlements de comptes, inacceptables. À Cavaillon, des armes ont été saisies.
Vous le savez bien, votre commune de Cavaillon est déjà l’arrière-cour des trafiquants de Marseille depuis un certain temps. Il en va de même à Avignon, où le policier Éric Masson a été assassiné.
Les chiffres de la police nationale montrent l’extraordinaire efficacité de nos services : au cours des six premiers mois de l’année, les gardes à vue ont augmenté de 50 % par rapport à l’année dernière, les constatations, notamment en lien avec le trafic de stupéfiants, de 70 %, et les saisies réalisées correspondent aux deux tiers des saisies réalisées les deux dernières années.
Sachez que quarante policiers nationaux supplémentaires ont été déployés entre Avignon et Cavaillon et que les cinq policiers affectés au commissariat de Cavaillon sont bien des effectifs en plus. Il est normal que vous ne l’ayez pas encore constaté, puisque les mutations ont lieu en septembre. À ce moment-là, il y aura bien cinq policiers supplémentaires, rien que cette année.
J’ai entendu votre demande et celle de M. le préfet de Vaucluse de recréer une BAC de nuit et d’avoir cinq policiers supplémentaires. Je l’examinerai pour l’année 2022. Les départements qui connaissent des augmentations d’effectifs de quarante, cinquante ou soixante policiers sont ceux qui sont particulièrement regardés par l’État.
Aux élus de Cavaillon et à l’ensemble des élus de France, je veux dire que la lutte contre la drogue, contre les points de deal, se fait grâce au courage des policiers – je sais que nous les soutenons unanimement – et qu’elle produit des résultats. (Applaudissements sur les travées du groupe RDPI.)
Mme le président. La parole est à M. Jean-Baptiste Blanc, pour la réplique.
M. Jean-Baptiste Blanc. Je vous remercie, monsieur le ministre, de ces précisions.
La chaîne police-justice fonctionne très bien localement, mais il faut cette BAC de nuit, avec un groupe de sécurité de proximité, dès septembre. Nous attendons donc votre décision rapidement.
passe sanitaire pour les français de l’étranger
Mme le président. La parole est à M. Christophe-André Frassa, pour le groupe Les Républicains. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)
M. Christophe-André Frassa. Ma question s’adresse à M. le secrétaire d’État chargé des Français de l’étranger.
C’est peu de dire que les Français de l’étranger ont été gâtés en matière d’annonces, de démentis ou de tweets contradictoires ces dernières semaines : couacs sur la gratuité des tests, incertitudes sur le passe sanitaire ou le QR code… Il aura fallu qu’avec mes collègues, Jacky Deromedi et Ronan Le Gleut notamment, nous intervenions encore et encore pour que les Français de l’étranger ne soient pas une énième fois traités comme des étrangers en France.
Finalement, comme d’habitude, on bricole : un arrêté du 6 juillet a rendu les tests payants pour tous les non-résidents sur le territoire national ; puis, il y a eu votre tweet, monsieur le secrétaire d’État ; puis, une instruction qui a les faits redevenir gratuits pour les Français de l’étranger. Peine perdue : à ce jour, beaucoup de Français de l’étranger payent encore leur test en France. Les tweets, c’est bien, se faire obéir, c’est mieux !
Quant au passe sanitaire, vous avez annoncé le 13 juillet aux élus consulaires travailler à des solutions techniques afin d’obtenir un certificat pour tous les Français de l’étranger disposant d’un schéma vaccinal complet effectué avec un vaccin homologué ou un équivalent. Mais qu’entendez-vous par « un équivalent » ? Je vous ai écouté sur Public Sénat vendredi dernier. Le seul équivalent serait le Covishield. Quid du Sinopharm, du Spoutnik et de bien d’autres ? Quid de cette troisième dose que vous envisageriez ?
L’été est déjà bien entamé, et beaucoup de nos compatriotes, début août, se verront appliquer des mesures encore plus contraignantes. Nous ne pouvons plus attendre, il faut des réponses concrètes et des solutions pour chacun. Alors, ma question est simple, vraiment simple : quand et comment allez-vous faire des Français de l’étranger des Français à part entière, pour reprendre l’un de vos hashtags ? (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)