M. le président. La parole est à M. Serge Mérillou, auteur de la question n° 1640, adressée à M. le ministre de l’économie, des finances et de la relance.
M. Serge Mérillou. Monsieur le ministre, la crise que nous traversons depuis mars 2020 est d’une violence inédite pour nos concitoyens, mais aussi pour nos entreprises.
Je sais votre détermination à soutenir notre économie, monsieur le ministre, et je salue les différents dispositifs mis en place. Cependant, ils ne sont pas suffisants, car il subsiste des trous dans la raquette.
Depuis mon élection au Sénat, j’ai été sollicité à différentes reprises par des entrepreneurs périgourdins, qui peinent à garder la tête hors de l’eau.
J’attire votre attention aujourd’hui sur la situation de la société Argicur, dont l’usine est située dans la commune du Buisson-de-Cadouin, dans mon département, la Dordogne. Seule société française spécialisée dans la vente d’argile à destination des établissements thermaux depuis 1985, elle fait aujourd’hui face à une crise sans précédent. Ses clients sont en effet fermés depuis des mois pour des raisons sanitaires évidentes.
Malgré la souscription d’un prêt garanti par l’État et le recours au chômage partiel, la situation est alarmante. Argicur a perdu plus de 50 % de son chiffre d’affaires et enregistré un déficit de 400 000 euros en 2020. La reprise des activités thermales, réduite à une jauge de 50 % de curistes, ne lui permettra pas de se relever.
La responsable du site a tenté d’obtenir une aide en déposant une demande sur la plateforme dédiée, mais il lui a été répondu que son entreprise n’était pas éligible.
Monsieur le ministre, je sais votre attachement au développement économique des zones rurales.
Cette société emploie aujourd’hui de six à huit personnes et elle est une référence dans son secteur. Elle a d’ailleurs récemment réalisé de lourds investissements sur une ligne biosourcée, afin de réduire les déchets de boue thermale.
Monsieur le ministre, est-il possible d’accorder à cette entreprise indirectement affectée par la covid des facilités qui lui permettraient d’éviter la fermeture ? Je pense ainsi à des allégements de cotisations auprès de l’Urssaf ou à des facilités de remboursement du prêt garanti par l’État. Mieux encore : ne pourrait-elle pas être éligible aux aides réservées aux entreprises touchées par la covid-19 ?
M. le président. La parole est à M. le ministre délégué.
M. Olivier Dussopt, ministre délégué auprès du ministre de l’économie, des finances et de la relance, chargé des comptes publics. Monsieur le sénateur Mérillou, la société Argicur, vous l’avez dit, est spécialisée dans la fabrication d’argiles thermales, utilisées par les établissements thermaux dans le cadre des cures qu’ils dispensent. La fermeture des établissements thermaux a entraîné un fort ralentissement de son activité.
Cette société l’a signalé au ministère de l’économie, des finances et de la relance dans des courriers datés de janvier et d’avril 2021.
Je précise que toutes les entreprises de moins de 50 salariés ayant perdu plus de 50 % de leur chiffre d’affaires et qui n’appartiennent pas aux secteurs du tourisme, de l’hôtellerie-restauration, de l’événementiel, de la culture et du sport dits « S1 », ou aux secteurs connexes peuvent bénéficier d’une aide mensuelle égale au montant de la perte de chiffre d’affaires.
Cette entreprise en a bénéficié, pour des montants très certainement inférieurs à son chiffre d’affaires, puisque cette aide est plafonnée, pour les mois de mars et d’avril 2020. Elle n’a pas, en tout cas à ma connaissance, déposé de nouvelles demandes en matière de fonds de solidarité.
D’autres dispositifs ont également été mis en place : l’activité partielle et le soutien à la trésorerie – la société Argicur a contracté un PGE. Nous avons accordé à toutes les entreprises des délais de paiement, voire des exonérations d’échéances de cotisations sociales. Nous travaillons évidemment avec les médiateurs, avec les représentants de la Banque de France et avec l’ensemble des chefs des services financiers mobilisés dans chaque département.
Vous me sollicitez, monsieur le sénateur, pour savoir si cette entreprise peut faire l’objet d’un traitement particulier. Je ne puis vous répondre par l’affirmative ; ce n’est pas une décision discrétionnaire de ma part.
En revanche, cette entreprise peut voir sa situation examinée par le comité départemental d’examen des problèmes de financement des entreprises, le Codefi, réunissant l’ensemble des services de l’État, qu’elle doit saisir par l’intermédiaire de la direction départementale des finances publiques. Au sein de ce Codefi, des mesures spécifiques peuvent être prises, d’étalement, mais parfois aussi d’exonération et de suppression de certaines créances publiques.
J’ajoute que ce travail potentiel du Codefi sera complété par les dispositions du plan anti-faillite que nous mettons en place avec Bruno Le Maire, avec notamment la volonté d’apporter une aide en fonds propres aux entreprises qui en ont besoin dans une période de redémarrage de l’activité, plus encore dans une période de redémarrage progressif, puisque vous avez noté que les établissements thermaux étaient ouverts avec une jauge limitée à 50 %.
J’engage l’entreprise, par votre intermédiaire, à se rapprocher de mon cabinet, pour que nous puissions ensemble, avec le préfet du département et le directeur départemental des finances publiques, explorer les voies et les moyens pour l’accompagner.
M. le président. La parole est à M. Serge Mérillou, pour la réplique.
M. Serge Mérillou. Je vous remercie, monsieur le ministre, de votre réponse. Cette société n’arrive pas à accéder aux aides prévues dans le fonds de solidarité pour les entreprises touchées par la covid-19. Je ne manquerai pas de prendre contact avec vos services pour qu’il soit remédié à ce problème.
présence postale dans les territoires
M. le président. La parole est à Mme Cathy Apourceau-Poly, auteure de la question n° 1553, transmise à M. le ministre de l’économie, des finances et de la relance.
Mme Cathy Apourceau-Poly. Monsieur le ministre, le président du groupe La Poste a demandé à l’État d’amender le contrat de présence postale territoriale, sans attendre 2023.
Même si la partie courrier a subi une baisse d’activité en 2020 à cause du covid, le groupe s’en sort toujours très bien, avec un bénéfice net historique de plus de 2 milliards d’euros entre janvier et juin 2020.
Sous prétexte de crise sanitaire et de digitalisation de l’économie, c’est un nouveau pan entier des missions de service public qui risque de disparaître. En effet, derrière cette volonté de revoir le contrat de présence postale territoriale, il y a des fermetures d’agences postales et des guichets de la banque postale. Nous en faisons, comme d’autres, l’amère expérience dans le département du Pas-de-Calais.
Les transferts de compétences aux agences postales communales représentent des charges supplémentaires pour les communes qui souhaitent conserver un service public de proximité. De plus, la compensation accordée par le groupe La Poste n’est souvent pas à la hauteur de la dépense.
Ces communes, souvent rurales dans mon département, engagent des frais pour la rénovation des locaux et embauchent des personnels pour assurer une présence continue pour les administrés. De même, les relais postaux commerçants ne garantissent absolument pas la confidentialité parfois nécessaire aux correspondances écrites, tout en marchandant le service public.
La disparition des guichets de la Banque Postale associée à celle des agences de la Caisse d’Épargne, dont le groupe est en pleine restructuration, et la remise en cause de la présence des distributeurs automatiques de billets, ou DAB, pour des questions de coûts n’augurent pas un avenir sain pour la dispense d’un service public bancaire de proximité.
Or, les activités courriers et bancaires du groupe La Poste, dans des locaux appartenant à ce groupe, restent nécessaires pour nos territoires et nos concitoyens. Dans ce contexte, nous devrions au contraire œuvrer à renforcer le service public et sa proximité.
Monsieur le ministre, que comptez-vous faire pour que le contrat de présence postale territoriale garantisse que les territoires conservent des agences postales et bancaires, mais aussi des DAB du groupe La Poste, afin d’assurer la mission de service public à laquelle nos concitoyens ont le droit de prétendre ?
M. le président. La parole est à M. le ministre délégué.
M. Olivier Dussopt, ministre délégué auprès du ministre de l’économie, des finances et de la relance, chargé des comptes publics. Madame la sénatrice Apourceau-Poly, le maintien d’un maillage fin du territoire par un réseau dense de points de contact postaux est garanti par la loi, qui fixe à La Poste une obligation de maintenir au moins 17 000 points répartis sur le territoire, de sorte que 90 % au moins de la population d’un département ait accès à un point de contact postal à moins de 5 kilomètres ou 20 minutes de trajet automobile.
La Poste traverse des difficultés au sein de ses différentes activités : l’activité courrier connaît une baisse importante de son volume, et nous savons que le développement de la digitalisation est de nature à amoindrir encore le volume de courrier. Nous menons des discussions sur l’activité de service universel dite « courrier », en lien avec la question de la présence postale territoriale.
Le contrat de présence postale conclu entre l’État, La Poste et l’Association des maires de France précise le cadre dans lequel la mission d’aménagement du territoire est mise en œuvre. Il prévoit que l’État contribue à hauteur de 174 millions d’euros par an, soit 522 millions d’euros sur la période 2020-2022, à la consolidation et à l’adaptation de la présence postale dans les zones rurales, les zones de montagne, les quartiers de politique de la ville et les départements d’outre-mer.
Je suis très attentif à ce que les adaptations menées par La Poste soient conçues et conduites de façon à garantir un haut niveau de qualité de service aux usagers, en concertation avec les élus concernés. Nous y veillons de près avec les instances de gouvernance de la mission d’aménagement du territoire de La Poste, et plus précisément encore avec l’Observatoire national de la présence postale, présidé par le sénateur Chaize.
Le contrat actuel couvrant la période 2020-2022, la prochaine échéance est celle de la négociation du contrat pour la période 2023-2025. Le contenu de ce nouveau contrat et son financement s’appuieront sur une concertation approfondie avec les élus locaux.
Nous menons ces travaux. Nous entendons les demandes formulées aujourd’hui par La Poste du fait de la difficulté rencontrée dans son activité. Nous nous appuierons aussi sur les conclusions du rapport que nous avons demandé à Jean Launay au sujet du service universel postal et des modalités de compensation.
J’ai eu l’occasion d’indiquer hier devant la commission des finances de l’Assemblée nationale que la nature – subvention budgétaire ou recette fiscale – comme le montant de cette compensation nouvelle n’étaient pas arrêtés. En lien avec le Premier ministre, j’aurai l’occasion de m’exprimer et de préciser la position du Gouvernement à la suite de la remise du rapport de Jean Launay, dans les jours à venir.
M. le président. La parole est à Mme Cathy Apourceau-Poly, pour la réplique.
Mme Cathy Apourceau-Poly. Après la réforme des finances publiques, c’est à celle de La Poste que votre Gouvernement s’attelle. Nous constatons, avec les maires et les citoyens, que cela conduit à toujours moins de services publics dans notre pays, et nous le regrettons !
antenne 5g à berre-les-alpes
M. le président. La parole est à Mme Dominique Estrosi Sassone, auteur de la question n° 1681, adressée à M. le secrétaire d’État auprès du ministre de l’économie, des finances et de la relance et de la ministre de la cohésion des territoires et des relations avec les collectivités territoriales, chargé de la transition numérique et des communications électroniques.
Mme Dominique Estrosi Sassone. Monsieur le ministre, ma question porte sur le déploiement d’une antenne 5G dans la commune de Berre-les-Alpes, dans les Alpes-Maritimes.
Le déploiement de la 5G est un enjeu majeur pour la France. Ce déploiement pose toutefois la question du nombre d’antennes nécessaires à la couverture en 5G du territoire, qui est fixé à 10 500 sites d’ici à 2025 par l’Arcep, Autorité de régulation des communications électroniques, des postes et de la distribution de la presse.
Certaines communes, sans contester l’installation de ces antennes devenues indispensables pour la couverture numérique, souhaitent pouvoir les implanter dans la concertation et en adéquation avec l’aménagement de leur territoire.
Depuis la loi du 9 février 2015 relative à la sobriété, à la transparence, à l’information et à la concertation en matière d’exposition aux ondes électromagnétiques, dite « loi Abeille », l’obligation d’information du maire existe. La loi du 23 novembre 2018 portant évolution du logement, de l’aménagement et du numérique, ou loi ÉLAN, a en outre consacré un délai d’un mois entre le dépôt du dossier d’information auprès du maire et la demande d’autorisation d’urbanisme permettant de consulter les habitants.
À Berre-les-Alpes, cette procédure s’est bien déroulée, mais la population, forte d’une pétition recensant plus de 200 signataires sur 1 200 habitants, bien entendu soutenue par le maire et les élus municipaux, demande le déplacement du lieu, initialement prévu à proximité de la nouvelle école qui accueillera des élèves en septembre 2021.
Dans son rapport sur le déploiement de la 5G, l’Anses, l’Agence nationale de sécurité sanitaire de l’alimentation, de l’environnement et du travail estime « peu vraisemblable, à ce stade, que le déploiement de la 5G dans la bande de fréquence autour de 3,5 gigahertz constitue un nouveau risque pour la santé ». Elle estime toutefois nécessaire de poursuivre les recherches. Enfin, en septembre 2020, le secrétaire d’État chargé du numérique avait déclaré : « Je suis totalement prêt à discuter avec les maires pour qu’ils sachent quand une antenne va arriver chez eux ».
Aussi, monsieur le ministre, le Gouvernement est-il prêt à ouvrir le dialogue avec les élus de Berre-les-Alpes et l’opérateur SFR, afin de revoir le lieu d’implantation de cette antenne 5G et de pouvoir ainsi rassurer la population ?
M. le président. La parole est à M. le ministre délégué.
M. Olivier Dussopt, ministre délégué auprès du ministre de l’économie, des finances et de la relance, chargé des comptes publics. Madame la sénatrice Estrosi Sassone, Cédric O vous prie de bien vouloir l’excuser, il est mobilisé ce matin au sujet des difficultés rencontrées hier dans le domaine des télécommunications. Nous sommes également convaincus que le déploiement de la 5G est un enjeu majeur pour notre pays, et nous avons fait le choix d’une feuille de route ambitieuse, puisque l’objectif est de couvrir notre territoire en réseau 5G.
Dans ce cadre, l’un des chantiers porte sur la transparence et le dialogue au sujet du déploiement de la 5G et l’exposition du public. Nous avons considéré, et peut-être anticipé, que le succès de ce déploiement réside d’abord dans la confiance que leur accorde le public, confiance – ou méfiance, pour le coup – qui est au cœur de votre question.
Nous sommes convaincus que nous devons assurer collectivement la transparence totale sur ces déploiements. C’est en ce sens que nous avons saisi au début de 2019 l’Anses d’une demande d’expertise sur les effets sanitaires éventuels de la 5G.
Les conclusions de cette expertise ont été publiées en avril dernier. Vous les mentionnez en indiquant que « les niveaux d’exposition seront vraisemblablement comparables entre la 5G et les technologies précédentes » et qu’il est « peu vraisemblable que le déploiement de la 5G […] constitue un nouveau facteur de risque pour la santé ».
Nous souhaitons bien évidemment suivre les préconisations de l’Agence et poursuivre les efforts de recherche sur l’identification et l’analyse d’éventuels effets sanitaires, notamment pour ce qui concerne la bande de 26 gigahertz plusieurs fois citée.
Nous avons engagé un plan de renforcement des mesures de l’exposition aux ondes prévoyant un triplement pour 2021 des contrôles réalisés par l’Agence nationale des fréquences. La moitié sera consacrée à des mesures spécifiques de la puissance d’émission des antennes avant et après le déploiement de la 5G dans des configurations diverses.
Nous considérons comme vous que la 5G ne peut se faire sans les élus locaux, qui sont au cœur de la stratégie de déploiement et doivent disposer d’informations de qualité.
Nous examinons le dispositif dit « de la loi Abeille », que vous avez évoqué et que nous trouvons utile. Les maires peuvent demander une simulation de l’exposition et solliciter l’Agence nationale des fréquences pour la réalisation de mesures de terrain. Il existe aussi des instruments de concertation à destination des élus, avec le comité de transparence 5G et les dispositions de la loi ÉLAN que vous avez rappelées.
Dès lors que l’installation respecte les seuils d’émission autorisés, la seule voie est celle de la médiation et du dialogue, puisque nous ne pouvons pas contraindre un opérateur sur le choix du site si celui-ci est respectueux des dispositions en vigueur.
Cédric O m’a chargé de vous dire qu’il est évidemment à la disposition des élus de la commune et que le préfet du département est missionné pour ouvrir un dialogue, afin d’améliorer la confiance et l’acceptabilité, mais aussi de voir avec l’opérateur concerné si une solution de substitution reste possible, dans le respect de la loi et des prérogatives et des droits de chacun.
M. le président. La parole est à Mme Dominique Estrosi Sassone, pour la réplique.
Mme Dominique Estrosi Sassone. Je vous remercie, monsieur le ministre, de votre réponse.
Sur ces sujets, nous le savons, l’irrationnel l’emporte bien souvent. Il est donc important, vous l’avez rappelé, de privilégier le dialogue et la concertation entre les élus, les habitants et bien entendu le Gouvernement, via les services de l’État. Aujourd’hui, ces derniers ont la main sur de telles décisions, et le maire ne peut pas refuser l’implantation d’une antenne 5G.
Cette pétition a été adressée à M. le préfet des Alpes-Maritimes, mais il importe aussi d’écouter les habitants et de voir ce qui peut être mis en place, en concertation avec l’opérateur, afin de permettre une meilleure couverture numérique du territoire, mais aussi de rassurer les parents inquiets que l’antenne puisse être installée à proximité de l’école.
participation des employeurs territoriaux à la prévoyance
M. le président. La parole est à Mme Élisabeth Doineau, auteure de la question n° 1541, adressée à Mme la ministre de la transformation et de la fonction publiques.
Mme Élisabeth Doineau. Monsieur le ministre, je souhaite attirer votre attention sur la participation des employeurs territoriaux à la prévoyance. Dans le cadre de la loi du 6 août 2019 de transformation de la fonction publique, une ordonnance relative à la protection sociale complémentaire des agents publics devrait être présentée au conseil des ministres.
Au travers du principe d’une participation obligatoire et progressive des employeurs publics au financement de la complémentaire de santé de leurs agents, le projet d’ordonnance actuel marque une avancée pour la protection des agents territoriaux, qui, comme les données publiques l’attestent, connaissent une dégradation progressive de leur état de santé depuis plusieurs années.
Cependant, cette réforme ne saurait être efficace auprès des agents territoriaux sans intégrer la question de la prévoyance. En effet, en cas d’arrêt long, un agent territorial sur deux n’est pas couvert en prévoyance. Cela signifie qu’après trois mois d’arrêt maladie, il ne percevra plus que 50 % de son traitement. Cela entraîne aujourd’hui des situations de grande précarité, étant donné que 75 % des agents territoriaux sont issus de la catégorie C et disposent donc de salaires très peu élevés.
Finalement, une partie des agents territoriaux en arrêt long renonce à cotiser à leur complémentaire santé, quand bien même leur collectivité la finance déjà à 50 %.
Pour éviter qu’une partie des agents ne soit pas en mesure de souscrire une complémentaire de santé, il est donc indispensable que le dispositif mis en œuvre par le Gouvernement permette une amélioration sensible de la protection des agents sur le risque prévoyance. Pour ce faire, la participation des employeurs en prévoyance devrait être au même niveau que celle qui concerne la santé, dès 2022.
C’est d’autant plus important que le risque en prévoyance est encore plus sensible au phénomène d’anti-sélection. Cette mesure permettrait par ailleurs une meilleure mutualisation du risque sur un socle minimal de garanties incapacité-invalidité, dont les bases doivent être définies.
Aussi, quelles mesures comptez-vous mettre en œuvre, monsieur le ministre, afin de prévenir le phénomène de précarisation des agents territoriaux lié aux arrêts longs ?
M. le président. La parole est à M. le ministre délégué.
M. Olivier Dussopt, ministre délégué auprès du ministre de l’économie, des finances et de la relance, chargé des comptes publics. Madame la sénatrice Doineau, la protection sociale complémentaire des agents publics est un sujet majeur.
J’ai eu l’honneur de porter devant vous la loi de transformation de la fonction publique, et je connais, en tant qu’ancien maire, les disparités de protection entre les agents, notamment les plus précaires, en matière de santé et de prévoyance.
La loi du 6 août 2019 prévoit une habilitation à légiférer par ordonnance sur le sujet. Depuis lors, Amélie de Montchalin, ma collègue chargée de la fonction publique, a mené toutes les concertations nécessaires.
Je tiens à signaler, pour ce qui concerne la fonction publique territoriale, que les associations représentant les employeurs territoriaux réunies autour de Philippe Laurent dans le comité de liaison des employeurs territoriaux se sont unanimement accordées sur leur intérêt pour ce sujet et sur leur volonté de participer au financement de la protection sociale complémentaire des agents publics.
Les situations sont disparates : certaines collectivités la financent déjà à hauteur de 50 %, d’autres ont des contrats collectifs, d’autres encore ne font rien. La situation au sein des administrations de l’État est tout aussi disparate.
Une ordonnance du 17 février dernier fixe l’obligation de financement de la protection sociale complémentaire. Concrètement, après une montée en charge progressive commençant en 2022, tous les agents publics bénéficieront en 2026 d’une prise en charge par leur employeur de 50 % du coût de la complémentaire de santé.
Le choix a été fait, à l’issue des concertations, de commencer par le chantier, passez-moi l’expression, de la complémentaire de santé. Celui de la complémentaire prévoyance devra aussi être abordé. Toutefois, les organisations syndicales et les représentants des employeurs publics ont choisi de différer la mise en œuvre de ces deux aspects.
L’amélioration de la couverture santé est de nature à limiter les risques et à participer à une forme de prévention, mais elle ne ferme pas ce sujet majeur de la prévoyance que vous avez évoqué.
Il faut préciser que cette réforme représentera, pour l’ensemble des employeurs publics, un coût de 500 millions d’euros en 2022, pour atteindre 1 milliard d’euros en 2024, au rythme de la montée en charge du dispositif d’accompagnement.
Nous aurons l’occasion, dans les mois et les années à venir, d’ouvrir le chantier de la prévoyance. Pour les raisons indiquées, le choix a été fait de séquencer les chantiers, mais aussi, par cette ordonnance, de rétablir une forme d’égalité : une égalité de droits pour les agents publics de bénéficier d’une participation de l’employeur à hauteur de 50 % ; une égalité de devoirs pour les employeurs publics, puisque, sur ce sujet comme sur d’autres – je pense à la prime de précarité pour les contrats courts –, les employeurs publics, dans leur collégialité, s’étaient exonérés des obligations pesant sur les employeurs privés. Ainsi, l’équité est rétablie.
M. le président. La parole est à Mme Élisabeth Doineau, pour la réplique.
Mme Élisabeth Doineau. Je remercie M. le ministre, qui a beaucoup travaillé sur le sujet. Je serai très attentive à l’équité qui est nécessaire pour les complémentaires de santé comme pour la prévoyance des agents territoriaux.
reconduction du dispositif « vacances apprenantes »
M. le président. La parole est à M. Jean-Jacques Michau, auteur de la question n° 1587, adressée à M. le ministre de l’éducation nationale, de la jeunesse et des sports.
M. Jean-Jacques Michau. Madame la secrétaire d’État, j’attire votre attention sur le dispositif « Vacances apprenantes », lancé par le ministère de l’éducation nationale, de la jeunesse et des sports dans le cadre du plan d’urgence face à la crise sanitaire et inscrit dans la loi de finances rectificative du 30 juillet 2020.
Ce dispositif s’est révélé d’une utilité cruciale et décisive dans le secteur des accueils collectifs de mineurs à but non lucratif et à caractère éducatif que sont les colonies de vacances, les camps de scoutisme et les accueils de loisirs.
Créé à la fin du premier confinement, il a été conçu comme une double réponse publique et d’intérêt général au problème récurrent d’accès aux vacances et aux loisirs collectifs et au contexte de rupture de continuité pédagogique lié au confinement.
Mis en place dans des délais très courts, qui ont, de fait, limité sa portée, il a cependant permis aux communes, aux organisateurs d’accueils collectifs de mineurs et aux parents de proposer aux enfants et aux jeunes des activités éducatives et collectives, complémentaires des apprentissages scolaires.
Quelque 125 000 enfants et jeunes ont été concernés. Valorisant notamment la découverte du patrimoine et l’éducation à l’environnement, les centres de loisirs et les colonies apprenantes ont été une source de dynamisme pour leur territoire d’implantation. Grâce à ce dispositif, des centres d’accueil à caractère éducatif ont pu rouvrir l’été dernier et limiter la dégradation de la situation précaire pour des milliers d’enfants et de jeunes.
Ce dispositif a mis en exergue l’importance et la nécessité d’améliorer l’accès aux vacances et aux loisirs collectifs, vecteur de construction de l’individu et de cohésion sociale et nationale. Alors que 4 millions d’enfants sont privés chaque année de vacances et que la crise économique et sociale s’aggrave, la pérennité des actions en faveur des vacances et loisirs éducatifs relève de l’utilité publique.
De même, l’instauration d’un « pass colos » doté d’un montant de 300 euros pour tous les enfants de CM2, à l’instar de ce qui existe déjà pour la culture ou le sport, doit être envisagée pour remédier aux difficultés que connaissent trop d’enfants.
Madame la secrétaire d’État, je souhaite donc connaître les intentions du Gouvernement en ce qui concerne la reconduction de ce dispositif pour l’année 2021 et au-delà, et savoir si le principe d’une pérennisation des différentes actions relatives aux « Vacances apprenantes » est envisagé, afin de permettre une véritable politique nationale de soutien à l’accès aux vacances et aux loisirs collectifs pour tous.