Mme le président. Les deux amendements suivants sont identiques.
L’amendement n° 185 est présenté par MM. Gontard et Benarroche, Mme Benbassa, MM. Dantec, Dossus, Fernique et Labbé, Mme de Marco, M. Parigi, Mme Poncet Monge, M. Salmon et Mme Taillé-Polian.
L’amendement n° 210 est présenté par M. Cozic, Mme Carlotti, MM. Temal, Kanner, Todeschini et Roger, Mmes Conway-Mouret et G. Jourda, MM. M. Vallet, Vallini, Vaugrenard, Antiste et P. Joly, Mmes Lepage et Monier, MM. Stanzione, Tissot et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
Alinéa 1, seconde phrase
Supprimer les mots :
d’examiner la possibilité
La parole est à M. Guillaume Gontard, pour présenter l’amendement n° 185.
M. Guillaume Gontard. Adopter cet amendement permettrait de concrétiser ce que vous venez d’expliquer, monsieur le ministre. Celui-ci vise en effet à consacrer de manière contraignante la date butoir de 2025 comme horizon définitif pour atteindre la part de 0,7 % du RNB consacrée à l’aide publique au développement.
Cet engagement solennel a été pris par la France à la tribune des Nations unies voilà plus d’un demi-siècle, le 24 octobre 1970, et il n’est toujours pas tenu. Du fait de ce manquement, sur les dix dernières années, ce sont plus de 60 milliards d’euros qui n’ont pas été consacrés au développement. Or, pour les pays bénéficiaires, l’aide est une source de financements essentielle. Ces 60 milliards d’euros sont supérieurs à dix années de budgets cumulés de la santé, de l’agriculture et de l’éducation pour l’ensemble des pays du Sahel. Une telle somme aurait permis de vacciner 1,4 milliard d’enfants, de distribuer au moins 1,5 milliard de traitements préventifs contre la tuberculose et de faire bénéficier 300 millions de personnes d’un traitement antirétroviral pour un an. Que de temps perdu !
Dans ce texte, nous nous flattons d’engagements solennels. Il y est indiqué que la France prend ses responsabilités dans le contexte de la crise sanitaire et redouble d’efforts pour traiter les causes profondes des crises et des fragilités. Comment applaudir une telle déclaration si nous manquons toutes les occasions de prendre de réels engagements ?
Nous ne comprenons pas bien ce qui empêche d’inscrire dans le marbre de la loi un engagement plus ferme, d’autant que cette loi est avant tout déclarative et ne lie pas les mains du futur gouvernement et du futur Parlement. Au demeurant, avec la crise économique qui s’annonce et la probable contraction de notre RNB, cet objectif relatif sera plus facile à atteindre.
Pour toutes ces raisons, nous invitons le Sénat à inscrire un objectif plus ferme à l’horizon 2025, afin de consacrer l’ambition du projet de loi. C’est une occasion unique de poursuivre nos efforts et de revaloriser ce pilier essentiel de notre politique étrangère.
Mme le président. La parole est à M. Thierry Cozic, pour présenter l’amendement n° 210.
M. Thierry Cozic. Il n’y a point de règle sans contrainte. Cet amendement vise à faire du 0,7 % du RNB consacré à l’aide au développement l’objectif de référence à atteindre de manière contraignante en 2025.
L’actualisation de la trajectoire budgétaire en 2023 doit être l’occasion d’évaluer non pas si un tel objectif peut être atteint, mais comment il peut l’être. Il est essentiel de conserver l’ambition de 0,7 % du RNB. Ce projet de loi offre une occasion unique de poursuivre la dynamique enclenchée.
Investir aujourd’hui dans l’aide au développement, c’est s’assurer que celle-ci constitue réellement un outil d’influence et de puissance, alors que le préambule du cadre de partenariat global (CPG) souligne sa complémentarité avec l’action diplomatique et militaire, ainsi que sa contribution à la politique étrangère de la France. Par conséquent, c’est s’assurer qu’elle dispose des moyens nécessaires pour atteindre ses objectifs, mais aussi pour s’adapter aux défis mondiaux actuels.
Mme le président. L’amendement n° 105, présenté par Mme Gréaume, M. P. Laurent et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste, est ainsi libellé :
I. – Alinéa 1, seconde phrase
Remplacer les mots :
d’examiner la possibilité
par les mots :
de planifier les crédits budgétaires et les ressources fiscales permettant
II. – Alinéa 3
Compléter cet alinéa par les mots :
Puis 0,7 % de son revenu national brut en 2025
III. – Alinéa 9
Après l’année :
2022
insérer les mots :
et 0,7 % de son revenu national brut en 2025
La parole est à Mme Michelle Gréaume.
Mme Michelle Gréaume. L’examen de ce projet de loi dans un contexte de pandémie mondiale doit nous inciter à nous poser la question de l’aide publique au développement. La France a un retard de cinquante ans sur un engagement onusien, mais le texte ne prend aucun engagement concret en la matière.
Certes, le projet de loi mentionne l’objectif de 0,7 % du revenu national brut, ce qui est un élément intéressant. On en reste toutefois encore au stade de l’incantation. Or, plus la France prend du retard, plus il lui sera difficile d’atteindre l’objectif.
Il est donc urgent de réunir enfin les conditions de notre ambition. Cela implique un principe simple : la France fera en sorte que, en 2025, 0,7 % du RNB soit consacré à l’aide publique au développement.
Notre amendement s’inscrit en cohérence avec le rapport du député Hervé Berville sur la modernisation de la politique partenariale de développement et de solidarité internationale.
Par ailleurs, comme le rappellent les organisations non gouvernementales, les pays récipiendaires paient aujourd’hui un lourd tribut du fait du manque d’engagement des États. Sur la dernière décennie, ce sont plus de 60 milliards d’euros qui n’ont pas atteint leur cible. Cela représente dix ans de budgets consacrés à l’éducation ou à la santé au Sahel !
Au regard des conséquences à long terme de la crise sanitaire que nous pouvons anticiper, les pays en développement ne peuvent plus se permettre d’attendre.
Oui, il est heureux que le cadre de partenariat global réaffirme avec force l’objectif d’atteindre rapidement le seuil onusien, mais il s’agit d’un véhicule dépourvu de valeur normative, comme l’a rappelé la jurisprudence constitutionnelle. C’est pourquoi il nous semble essentiel d’intégrer une mesure forte dans le projet de loi.
Mme le président. L’amendement n° 37, présenté par M. Yung, Mme Duranton, MM. Gattolin, Haye, Patriat, Bargeton, Buis et Dennemont, Mme Evrard, M. Hassani, Mme Havet, MM. Iacovelli, Kulimoetoke, Lévrier, Marchand, Mohamed Soilihi et Patient, Mme Phinera-Horth, MM. Rambaud, Richard et Rohfritsch, Mme Schillinger et M. Théophile, est ainsi libellé :
Alinéa 1, seconde phrase
1° Remplacer les mots :
d’examiner la possibilité d’
par les mots :
de maintenir les efforts pour
2° Remplacer le mot :
consacrés
par le mot :
consacré
La parole est à M. Richard Yung.
M. Richard Yung. La formulation « s’efforcera d’atteindre 0,7 % [du] revenu national brut en 2025 », adoptée par l’Assemblée nationale, est directement issue de la résolution de l’Assemblée générale des Nations unies de 1970. Une telle inscription dans la loi répond à une demande forte de la société civile, pour laquelle atteindre 0,55 % est une première étape vers 0,7 %.
Cet amendement vise donc à faire en sorte que la France se conforme à la résolution onusienne.
Il s’agit également de garantir une APD à la hauteur des attentes, conformément à la position des rapporteurs.
Mme le président. L’amendement n° 328, présenté par MM. Saury et Temal, au nom de la commission des affaires étrangères, est ainsi libellé :
Alinéa 1, seconde phrase
Remplacer le mot :
consacrés
par le mot :
consacré
La parole est à M. le rapporteur.
M. Hugues Saury, rapporteur. Cet amendement vise à corriger une faute d’orthographe.
Mme le président. L’amendement n° 111, présenté par Mme Gréaume, M. P. Laurent et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste, est ainsi libellé :
I. – Alinéa 1
Compléter cet alinéa par une phrase ainsi rédigée :
Une seconde réactualisation est examinée par le Parlement en 2025 afin de pérenniser ce taux jusqu’en 2030.
II. – Alinéa 3
Compléter cet alinéa par les mots :
et atteindra 0,7 % de ce revenu national brut en 2025 avec l’objectif de pérenniser ce taux jusqu’en 2030
La parole est à M. Pierre Laurent.
M. Pierre Laurent. Cet amendement vient compléter les amendements présentés par Michelle Gréaume.
Nous souhaitons inscrire dans le texte la nécessité d’une réactualisation de la programmation examinée par le Parlement en 2025, afin d’en pérenniser les acquis jusqu’en 2030.
Nous venons d’ailleurs d’inscrire la date de 2030 dans l’article 1er A. C’est un choix logique. Pour des objectifs aussi importants et ambitieux, une période de programmation de dix ans nous paraît raisonnable.
Je sais bien que M. le ministre parle de programmation « dans le rétroviseur ». La référence à l’année 2025 n’a plus de sens. En revanche, la référence à l’année 2030 en a.
Afin de véritablement ancrer nos objectifs, définir un nouveau rendez-vous en 2025 pour pérenniser les acquis jusqu’en 2030 donnerait un sens durable à l’ambition de développement de l’APD française.
Mme le président. L’amendement n° 211, présenté par M. Cozic, Mme Carlotti, MM. Temal, Kanner, Todeschini et Roger, Mmes Conway-Mouret et G. Jourda, MM. M. Vallet, Vallini, Vaugrenard, Antiste et P. Joly, Mmes Lepage et Monier, MM. Stanzione, Tissot et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, est ainsi libellé :
Alinéa 3
Compléter cet alinéa par les mots :
et 0,7 % de son revenu national brut en 2025
La parole est à M. Thierry Cozic.
M. Thierry Cozic. Cet amendement vise à rappeler que l’objectif de 0,55 % en 2022 ne constitue qu’un objectif intermédiaire.
À nos yeux, si l’on veut que l’APD soit réellement audacieuse, il est primordial de garder l’objectif-cible défini par les Nations unies en 1970. En effet, consacrer 0,7 % du RNB à l’aide au développement correspond à un engagement passé lourd de sens.
Nous ne saurions être crédibles en dessous de cette barre. Le monde nous regarde ; soyons à la hauteur !
Mme le président. L’amendement n° 109, présenté par Mme Gréaume, M. P. Laurent et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste, est ainsi libellé :
Alinéa 5, tableau, seconde ligne
1° Deuxième colonne
Remplacer le nombre :
4 800
par le nombre :
5 800
2° Troisième colonne
Remplacer le nombre :
5 617
par le nombre :
6 647
3° Quatrième colonne
Remplacer le nombre :
6 434
par le nombre :
7 388
4° Dernière colonne
Remplacer le nombre :
7 251
par le nombre :
8 166
La parole est à M. Pierre Laurent.
M. Pierre Laurent. Cet amendement vise à traduire en chiffres l’engagement que j’ai évoqué précédemment. Nous proposons une programmation chiffrée pour atteindre les objectifs fixés.
Mme le président. L’amendement n° 187, présenté par MM. Gontard et Benarroche, Mme Benbassa, MM. Dantec, Dossus, Fernique et Labbé, Mme de Marco, M. Parigi, Mme Poncet Monge, M. Salmon et Mme Taillé-Polian, est ainsi libellé :
Alinéa 5, tableau, seconde ligne
1° Deuxième colonne
Remplacer le montant :
4 800
par le montant :
5 800
2° Troisième colonne
Remplacer le montant :
5 617
par le montant :
6 617
3° Quatrième colonne
Remplacer le montant :
6 434
par le montant :
7 434
4° Dernière colonne
Remplacer le montant :
7 251
par le montant :
8 251
La parole est à M. Guillaume Gontard.
M. Guillaume Gontard. Cet amendement vise à rehausser la programmation des crédits annuels de la mission « Aide publique au développement » de 1 milliard d’euros supplémentaires jusqu’en 2025.
Rappelons-le, la plupart des augmentations de l’APD observées depuis 2017 résultent de la comptabilisation de flux qui ne quittent en réalité jamais le territoire français ou, du moins, qui ne représentent pas d’argent additionnel pour les pays en développement.
Selon l’OCDE, l’augmentation de 4,2 % de nos apports d’APD entre 2018 et 2019 résultait de l’augmentation des dons en lien avec une hausse du coût d’accueil des réfugiés et du soutien destiné à des instruments du secteur privé.
Ainsi, en 2018, près de 16 % de notre aide ne quittait pas le territoire français. Elle était dépensée sous la forme de frais d’accueil de réfugiés, de bourses et de frais d’écolage ou d’allégement de dette.
Ces dépenses sont essentielles, mais elles ne relèvent pas de l’aide publique au développement. L’accueil des réfugiés est une obligation de la France au regard du droit international, pas une dépense facultative visant à soutenir le développement des pays bénéficiaires. Les bourses et les frais d’écolage versés pour l’accueil d’étudiants étrangers en France ne contribuent pas au développement des systèmes éducatifs des pays des bénéficiaires de notre aide. Pourtant, ils constituent l’essentiel de notre aide bilatérale à l’éducation. L’éducation de base, qui est pourtant absolument indispensable pour le développement des pays les moins avancés, est quasiment invisible : elle représente 3 % de notre APD totale.
On observe aussi une comptabilisation croissante des financements destinés à soutenir des projets du secteur privé. Ainsi, la comptabilisation depuis 2018 d’une partie des financements de la filiale de l’Agence française de développement (AFD) Proparco est à l’origine d’une augmentation de l’APD en trompe-l’œil d’environ 500 millions d’euros entre 2018 et 2019.
Par conséquent, consacrer 1 milliard d’euros supplémentaires chaque année aux crédits de la mission « Aide publique au développement » permettrait de compenser la comptabilisation de ces flux, qui vont gonfler les chiffres de notre aide sans se traduire par une réelle contribution au développement des pays bénéficiaires. Ce milliard d’euros permet de s’assurer que l’augmentation de l’APD française ne repose pas sur une augmentation des dépenses domestiques.
Mme le président. L’amendement n° 212, présenté par M. Cozic, Mme Carlotti, MM. Temal, Kanner, Todeschini et Roger, Mmes Conway-Mouret et G. Jourda, MM. M. Vallet, Vallini, Vaugrenard, Antiste et P. Joly, Mmes Lepage et Monier, MM. Stanzione, Tissot et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, est ainsi libellé :
Alinéa 5, tableau, seconde ligne
1° Troisième colonne
Remplacer le montant :
5 617
par le montant :
6 647
2° Quatrième colonne
Remplacer le montant :
6 434
par le montant :
7 388
3° Dernière colonne
Remplacer le montant :
7 251
par le montant :
8 166
La parole est à M. Thierry Cozic.
M. Thierry Cozic. Cet amendement vise à donner une traduction financière aux propositions que j’ai formulées dans le cadre des amendements nos 210 et 211.
D’une part, il s’agit d’établir une véritable programmation financière pour les années 2022 à 2025 tout en rehaussant les crédits de la mission « Aide publique au développement » dès 2022. Cette mission gérant la partie « pilotable » de l’APD, nous souhaitons qu’elle représente 50 % de l’APD totale de la France. Le dispositif proposé permet de prolonger la programmation jusqu’en 2025 pour atteindre l’objectif de 0,7 % du RNB.
D’autre part, il convient de donner une traduction chiffrée à cet objectif de 0,7 %, qui a été défini par les Nations unies en 1970 et qui est notamment revendiqué par le Président de la République. La France doit respecter cet objectif : elle l’a pris devant l’ONU, ce qui lui confère une certaine sacralité. Elle doit donc l’atteindre pour respecter le droit international. Il y va de la crédibilité de notre Nation.
Par cohérence, les montants alloués à la mission « Aide publique au développement » sont indiqués dans l’amendement, afin de soutenir cet objectif. Actuellement, celui-ci est systématiquement repris dans les discours. Pour notre part, nous souhaitons qu’il soit retranscrit dans la loi.
Comme dit l’adage, « les paroles s’envolent, les écrits restent ». Faisons en sorte que l’objectif ne s’envole pas.
Mme le président. L’amendement n° 11, présenté par M. Requier, au nom de la commission des finances, est ainsi libellé :
Alinéa 5, tableau, seconde ligne
1° Troisième colonne
Remplacer le nombre :
5 617
par le nombre :
5 300
2° Quatrième colonne
Remplacer le nombre :
6 434
par le nombre :
5 800
3° Dernière colonne
Remplacer le nombre :
7 251
par le nombre :
6 300
La parole est à M. le rapporteur pour avis.
M. Jean-Claude Requier, rapporteur pour avis. Cet amendement de la commission des finances vise à établir une trajectoire budgétaire de 2022 à 2025 et à concilier deux objectifs : proposer une programmation ambitieuse pour continuer l’effort en faveur de la politique de l’aide au développement et avoir une vision réaliste dans un contexte de fortes tensions sur les places publiques.
La commission des finances propose d’augmenter les crédits de paiement de 500 millions d’euros par an de 2022 jusqu’en 2025. C’est un montant qu’elle a toujours avancé.
Voilà qui permettrait de concilier ambition et réalisme !
Mme le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Rachid Temal, rapporteur. Je formulerai quelques remarques avant de me prononcer sur les différents amendements.
L’article précédent portait sur les objectifs. Chacun a pu s’exprimer à cet égard. À présent, nous devons faire preuve de réalisme et déterminer comment agir. Deux options se présentaient, ainsi qu’en atteste ce débat.
Le Gouvernement et certains intervenants considèrent qu’il faut faire preuve de générosité et que l’objectif de 0,7 % du RNB peut être atteint. Ils préfèrent toutefois ne pas avancer de chiffres, car d’aucuns pourraient avoir de la « mémoire » – je reprends votre terme, monsieur le ministre. Cela permet d’affirmer que l’on tient l’objectif, même s’il n’y a aucune garantie en loi de programmation. Or le principe même, c’est la programmation.
Je rappelle d’ailleurs que certaines lois de programmation vont au-delà de 2022. Il n’y a donc pas de date intangible, sauf à faire une loi de programmation jusqu’à la prochaine élection présidentielle, mais ce n’est pas le sujet du jour. Il nous semble donc compliqué d’être sur cette ligne.
Certes, du point de vue de l’affichage, il sera toujours possible d’expliquer aux associations que c’est le méchant Sénat qui aura reculé sur l’objectif de 0,7 % du RNB. La vérité, c’est que le Sénat aura simplement vérifié si les moyens existaient en face ou non.
D’autres veulent aller encore plus loin, mais leur volonté se heurte à la difficulté que nous connaissons.
La commission a donc fait le choix, et c’est ce qui motivera sa position sur les différents amendements, de trouver une voie d’équilibre, et il lui semble l’avoir trouvée avec la commission des finances. Je vous renvoie aux déclarations de mon collègue sur les montants. Je rappelle également l’avancée significative sur la taxe sur les transactions financières (TTF), qui passera de 30 % à 60 %. C’était, je le crois, une demande majeure de la commission. Cela permettra aussi une avancée substantielle sur les moyens qui seront attribués à l’APD.
Par conséquent, la commission émet un avis défavorable sur l’amendement n° 324, sur l’amendement n° 107, sur les amendements identiques nos 185 et 210 et sur l’amendement n° 105, qui ne correspondent pas à ses propositions en termes de trajectoire budgétaire.
Il en est de même pour l’amendement n° 37, qui vise en plus à revenir sur la clause de réexamen, comme pour les amendements nos 111, 211, 109, 187 et 212, pour les raisons que j’ai déjà indiquées.
En revanche, la commission émet un avis favorable sur l’amendement n° 11, qui a été déposé par la commission des finances. Comme je l’ai évoqué, le dispositif proposé permet d’avoir à la fois une évolution significative sur les montants et le maintien de la TTF. Au demeurant, j’ai oublié de préciser que l’amendement du Gouvernement tend à retirer cette évolution significative sur les montants : il y aurait donc un « double effet Kiss Cool » ne permettant pas d’avancer.
Mme le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Jean-Yves Le Drian, ministre. J’ai exprimé un avis général tout à l’heure.
Le Gouvernement émet un avis défavorable sur l’ensemble des amendements qui viennent d’être présentés par le Sénat, à l’exception de l’amendement n° 328, qui est rédactionnel.
Mme le président. La parole est à M. Jean-Marc Todeschini, pour explication de vote.
M. Jean-Marc Todeschini. Monsieur le ministre, je souhaite réagir à votre propos liminaire.
Vous parlez de responsabilité, mais il n’y a pas de programmation.
Vous parlez de détermination, mais vous vous gardez bien de vous engager sur des objectifs chiffrés, que d’aucuns ne manqueraient évidemment pas de vous rappeler dans quelque temps…
En tant que membre de la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées du Sénat – ce n’est pas son président qui me contredira –, j’ai l’impression que cela devient une habitude de votre gouvernement. Les lois de programmation s’arrêtent à 2022, même si l’on nous dit que tout est prévu jusqu’à 2025, voire au-delà.
Sur la loi de programmation militaire (LPM), c’est pire ! Il est prévu que le Gouvernement revienne devant le Parlement, alors même qu’il ne le fera pas. Nous sommes alors obligés, avec le président de la commission des affaires étrangères, M. Christian Cambon, de faire un travail d’inventaire.
Je remercie les rapporteurs de notre commission et le rapporteur pour avis de la commission des finances d’avoir, eux, formulé des propositions permettant une visibilité au-delà de l’élection présidentielle de 2022. (Très bien ! sur les travées des groupes SER et CRCE.)
Mme le président. La parole est à M. Pierre Laurent, pour explication de vote.
M. Pierre Laurent. Je souhaite également formuler quelques observations.
D’abord, sur la question de l’objectif de 0,7 % et du caractère contraignant ou non de la loi, voilà cinquante ans que cela dure ! (Mme Marie-Arlette Carlotti acquiesce.) Il y a toujours une bonne raison de ne pas inscrire l’objectif dans la loi. En l’occurrence, d’aucuns nous diront qu’il est inscrit dans ce texte, mais c’est hypothétique. Combien de temps cela va-t-il encore durer, alors que tout le monde reconnaît qu’il faut absolument mettre le paquet pour réduire les inégalités dans le monde ?
Ensuite, plusieurs intervenants arguent de « contraintes budgétaires ». Certes, il en existe toujours, mais de quelles contraintes budgétaires parle-t-on ? Des contraintes budgétaires qui existaient avant la pandémie ? La règle des 3 % de déficit public, qui était un tabou – aucun débat sur le sujet n’était autorisé –, a volé en éclats ! On parle aujourd’hui de « déficit acceptable ». Qui l’a fixé ? Le Parlement a-t-il débattu du budget d’après-pandémie ? C’est le moment de nous donner des objectifs.
La question posée est simple : l’APD va-t-elle rester une variable d’ajustement soumise à d’autres contraintes dans les choix politiques ou l’augmentation jusqu’à 0,7 % va-t-elle devenir l’un des repères de la construction budgétaire ? Nous discutons d’un projet de loi de programmation : c’est donc le moment de prendre une telle décision. Donnons-nous des repères pour la construction budgétaire dans les choix politiques que nous aurons à faire.
Or, compte tenu des enjeux mondiaux et de la pandémie, l’augmentation régulière de l’APD pour atteindre le plus vite possible le taux de 0,7 % doit faire partie de ces repères. Sinon, ce serait se moquer du monde une fois de plus.
Cela dure depuis cinquante ans. Cela peut donc durer encore autant…
Mme le président. Je mets aux voix les amendements identiques nos 185 et 210.
(Les amendements ne sont pas adoptés.)
Mme le président. L’amendement n° 131, présenté par Mme Gréaume, M. P. Laurent et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste, est ainsi libellé :
Alinéa 10, après la première phrase
Insérer une phrase ainsi rédigée :
Dans une logique de lisibilité et de cohérence, l’impact des contrats de désendettement et de développement n’est pas comptabilisé dans la répartition de l’aide publique au développement française.
La parole est à M. Pierre Laurent.
M. Pierre Laurent. Nous abordons le premier amendement relatif aux contrats de désendettement et de développement (C2D). Cet amendement est un peu technique, mais, à nos yeux, il est absolument essentiel.
Rappelons tout d’abord que les C2D constituent une opération de retraitement des dettes : une fois que le pays endetté a remboursé sa dette, la France réalloue le remboursement des créances bilatérales sous forme de dons.
Entrons dans le détail.
Le remboursement des échéances implique une écriture en APD négative équivalente au remboursement du capital et une écriture en APD positive lors du versement du don, qui comprend le capital et les intérêts. Le solde positif pour le calcul de l’APD française équivaut donc au seul montant des intérêts payés par le pays débiteur. En revanche, les refinancements par dons ont un effet significatif sur les composantes de l’APD, puisqu’ils en réduisent la composante par prêts en écriture négative du montant du capital remboursé, tout en augmentant sa composante par dons par l’écriture positive précédemment évoquée. Je le disais, c’est un peu technique…
Ce jeu d’écriture a des conséquences très importantes. En effet, sur la période 2012-2019, les C2D augmentent ainsi de 8,9 % en moyenne le volume des dons comptabilisés en APD française tous bénéficiaires confondus, tandis qu’ils réduisent de 10 % en moyenne le volume des prêts nets de cette même APD.
Les contrats de désendettement et de développement ont ainsi contribué à ce que la composante par dons atteigne un niveau historique en euros courants à la fin de la décennie 2010, alors que, hors C2D, elle resterait inférieure à ce qu’elle était en 2006-2007.
Pour mettre un terme à cet effet de gonflement artificiel, nous demandons que l’impact des contrats de désendettement et de développement sur la répartition de l’aide publique au développement française ne soit pas comptabilisé.