M. le président. La parole est à Mme Éliane Assassi, auteure de la question n° 1506, adressée à Mme la secrétaire d’État auprès du Premier ministre, chargée des personnes handicapées.
Mme Éliane Assassi. Madame la secrétaire d’État, depuis quinze ans sont créés dans le département de la Seine-Saint-Denis des postes d’enseignants référents à la scolarisation des élèves en situation de handicap et des postes de conseillers d’aide à la scolarisation des élèves en situation de handicap. Ces derniers sont uniques en France et sont occupés par des enseignants spécialisés qui interviennent au plus près des élèves.
Ce faisant, le nombre d’élèves en situation de handicap scolarisés a presque doublé, et nous nous en félicitons. Pour autant, cette augmentation ne s’est pas accompagnée d’une hausse proportionnelle du nombre de postes de personnels spécialisés.
Lors de la réunion du groupe de travail du 21 janvier 2021, le directeur académique a fait part de son souhait de fermer les 33,5 postes de conseillers et de les transformer en postes d’enseignants référents. Cette suppression signifie la fin des interventions pédagogiques au sein des établissements scolaires : interventions dans les classes auprès des élèves, conseils aux enseignants, formation, prises de poste et accompagnement des AESH, participation aux réunions des directions d’écoles, aide à la constitution des dossiers auprès des MDPH, lesquels nécessitent de nombreux entretiens avec les familles. Cette décision a pu être annulée après une forte mobilisation des personnels, des enseignants, des syndicats et des élus du département.
Il n’en demeure pas moins que l’accueil et le suivi des élèves à besoins particuliers restent problématiques : les personnels sont insuffisants au sein des établissements, les accompagnants ne sont pas assez nombreux et sont mal formés, les postes d’enseignants référents sont en nombre trop faible pour accompagner la hausse du nombre d’élèves scolarisés. Cet état de fait va à l’encontre des politiques ministérielles et à rebours des besoins en Seine-Saint-Denis.
Madame la secrétaire d’État, nous aurons l’occasion d’en discuter ensemble, mais quel bilan faites-vous de l’application des directives gouvernementales en matière d’inclusion scolaire ? Allez-vous vous engager pour que les besoins particuliers de certains des élèves de la Seine-Saint-Denis soient respectés ?
M. le président. La parole est à Mme la secrétaire d’État.
Mme Nathalie Elimas, secrétaire d’État auprès du ministre de l’éducation nationale, de la jeunesse et des sports, chargée de l’éducation prioritaire. Madame la sénatrice, je vous prie d’excuser l’absence de Sophie Cluzel, qui n’a pu se rendre disponible ce matin et qui m’a demandé de répondre à votre question.
Vous nous interrogez sur les moyens mis en œuvre pour permettre la scolarisation des enfants en situation de handicap en Seine-Saint-Denis.
Tout d’abord, les postes de conseillers d’aide à la scolarisation, vous le savez, n’ont pas été supprimés ni transformés en postes d’enseignants référents.
Sur le terrain, les autorités académiques structurent un réseau de professionnels pour accompagner les équipes et les élèves. Il est constitué de coordonnateurs, au nombre de 66 en Seine-Saint-Denis ; de conseillers pédagogiques ; de conseillers d’aide à la scolarisation correspondant à 33,5 équivalents temps plein, soit un par circonscription ; d’enseignants référents à hauteur de 36 équivalents temps plein ; d’AESH référents.
Au regard du nombre croissant d’élèves en situation de handicap que vous soulignez, quatre nouveaux secteurs d’enseignement référent ont été créés pour la rentrée scolaire de 2021. Le nombre de conseillers d’aide à la scolarisation reste inchangé.
Par ailleurs, des AESH référents sont en cours de recrutement pour être des pairs experts dans l’accompagnement de la professionnalisation des AESH, à raison d’un par district, soit huit pour la Seine-Saint-Denis.
Enfin, pour renforcer sur le terrain la coopération entre tous les acteurs autour du parcours des enfants, la politique de l’école inclusive est portée par un service départemental organisé pour répondre aux besoins de tous les professionnels et usagers.
Le Comité départemental de suivi de l’école inclusive réunit les partenaires – l’ARS, la MDPH, la Fédération des usagers, les services de l’État – pour présenter et étudier de façon partenariale des objectifs partagés.
nécessité de créer une juridiction interrégionale spécialisée en guyane
M. le président. La parole est à Mme Marie-Laure Phinera-Horth, auteure de la question n° 1511, adressée à M. le garde des sceaux, ministre de la justice.
Mme Marie-Laure Phinera-Horth. Ma question, qui s’adresse au garde des sceaux, porte sur la nécessité de créer une juridiction interrégionale spécialisée (JIRS) en Guyane.
Il existe actuellement huit JIRS, lesquelles ont été créées par une loi de 2004. Ces juridictions regroupent des magistrats du parquet et de l’instruction qui disposent d’une compétence et d’une expérience particulières en matière de lutte contre la criminalité organisée et de délinquance financière. Leurs moyens techniques renforcés leur permettent ainsi de mener à bien leurs enquêtes, notamment en matière de trafic de stupéfiants et d’infraction commise en bande organisée.
Actuellement, la JIRS de Fort-de-France est compétente pour les Antilles et la Guyane. Or, outre que le territoire guyanais se trouve dans le bassin amazonien, dont les spécificités sont totalement différentes de celles du bassin caribéen, la Guyane est désormais confrontée à un trafic exponentiel de stupéfiants en provenance des pays voisins, en particulier du Suriname, et à une montée de la délinquance et de la criminalité liée à ce narcotrafic.
La création d’une JIRS amazonienne en Guyane apparaît de plus en plus nécessaire ; celle-ci aurait pour mission de lutter sur le terrain et à l’échelle transfrontalière contre le trafic de stupéfiants, qui détruit la société guyanaise et dont les effets s’exportent vers l’Hexagone, la Guyane étant devenue l’une des grandes portes d’entrée de la cocaïne en Europe. Une telle structure permettrait d’être très efficace sur le terrain, car on déploierait des moyens qui doivent être proportionnels aux défis transfrontaliers qui se posent à notre État au niveau sud-américain.
La situation n’est plus la même qu’en 2004. Le rattachement de la Guyane à la JIRS de Fort-de-France est donc désormais totalement inadapté au regard des mutations survenues dans la grande région amazonienne en termes de trafics transfrontaliers.
Le ministère de la justice sait s’adapter en fonction des évolutions. Il l’a prouvé, par exemple en recréant une cour d’appel de plein exercice à Cayenne en janvier 2012. Je souhaite donc connaître les intentions du Gouvernement sur la possibilité de créer une JIRS en Guyane et sur les moyens judiciaires qui seront mis en œuvre pour lutter contre les narcotrafics.
M. le président. La parole est à Mme la ministre déléguée.
Mme Agnès Pannier-Runacher, ministre déléguée auprès du ministre de l’économie, des finances et de la relance, chargée de l’industrie. Madame la sénatrice, comme vous l’avez parfaitement rappelé, la Guyane, département frontalier du Brésil et du Suriname, est située dans le ressort de la juridiction interrégionale spécialisée de Fort-de-France, compétente pour connaître d’affaires de criminalité organisée et financière de grande complexité, tant dans les Caraïbes qu’en Guyane. Cette organisation se traduit par une prise en charge effective de la délinquance organisée guyanaise, notamment le narcotrafic, dont vous dénoncez à juste titre les ravages.
La lutte contre ces trafics illégaux est une priorité de la politique pénale du ministère de la justice. Le garde des sceaux, au nom de qui je m’exprime ce matin, partage vos légitimes préoccupations.
Très concrètement, vous avez raison : le nombre d’affaires de Guyane suivies par la JIRS de Fort-de-France a nettement augmenté depuis 2004.
Le nombre total de dossiers guyanais traités ou en cours de traitement par cette juridiction depuis 2004 s’élève au nombre de vingt-sept – dix-huit dossiers de criminalité organisée et neuf dossiers économiques et financiers –, soit 14 % de son portefeuille. Les dossiers guyanais en cours représentent aujourd’hui 21 % de l’ensemble du portefeuille de cette juridiction, soit quinze dossiers : huit dossiers de criminalité organisée et sept dossiers économiques et financiers. Le nombre de dossiers en provenance de la Guyane donnant lieu à saisine de la juridiction est passé d’une moyenne de 1,25 entre 2004 et 2017 à une moyenne de 4,3 au cours de la période 2018-2020.
Cette évolution de la délinquance apparaît toutefois correctement prise en charge à ce stade par la juridiction interrégionale spécialisée de Fort-de-France, qui a su s’adapter aux défis que connaît la Guyane en matière de criminalité organisée. En effet, la Guyane bénéficie de l’expertise spécifique et des moyens, renforcés depuis 2019, de la JIRS de Fort-de-France – affectation supplémentaire d’un magistrat du parquet, d’un juge d’instruction et d’un assistant spécialisé douanier –, laquelle définit sa politique pénale en prenant précisément en compte les spécificités de la criminalité organisée guyanaise et en s’attachant à renforcer la coopération internationale sur la zone, grâce, notamment, à l’appui du magistrat de liaison basé au Brésil, compétent sur le Suriname.
Enfin, le périmètre de compétence d’une juridiction interrégionale spécialisée s’inscrit, par construction, sur un espace interrégional. Une création se limitant au seul département de la Guyane serait donc contradictoire avec l’objet même de cette organisation judiciaire, qui vise à mutualiser les moyens en donnant une taille critique au ressort de chaque juridiction afin d’en améliorer l’efficacité.
Pour toutes ces raisons, il n’est pas, à ce stade, envisagé de créer une telle juridiction spécifique en Guyane, qui viendrait amoindrir la juridiction interrégionale spécialisée de Fort-de-France, laquelle est compétente en Guyane et dans les Antilles françaises. Toutefois, vous le savez, le ministère de la justice reste vigilant à toutes les évolutions de la délinquance qui nécessiteraient une adaptation de son organisation judiciaire dans les territoires, en outre-mer comme en métropole.
M. le président. La parole est à Mme Marie-Laure Phinera-Horth, pour la réplique.
Mme Marie-Laure Phinera-Horth. Je vous remercie de votre réponse, madame la ministre, mais j’estime qu’une réflexion doit être menée : nous ne sommes pas sur le même continent. Quand les Guyanais vont-ils donc obtenir une certaine autonomie afin de lutter contre ce narcotrafic ?
conséquences de la pandémie du covid-19 sur les finances des communes du golfe de saint-tropez, dans le var
M. le président. La parole est à Mme Françoise Dumont, auteure de la question n° 1444, adressée à M. le ministre de l’économie, des finances et de la relance.
Mme Françoise Dumont. Madame la ministre, je souhaite appeler votre attention sur les conséquences que la pandémie de la covid-19 a pu avoir sur les finances des communes touristiques, en particulier sur celles des communes du golfe de Saint-Tropez, dans le Var. En effet, les douze communes qui le composent ont la particularité d’être des localités à fort potentiel touristique. Cette donnée est donc un facteur prédominant dans le calcul des recettes desdites communes.
La crise sanitaire a eu et a encore un effet ciseau pour ces collectivités : une forte baisse des recettes touristiques et une augmentation des dépenses, notamment liées au soutien à l’économie locale. Or les communes doivent adopter des budgets en équilibre réel. Elles sont donc contraintes de réaliser des coupes dans leurs budgets d’investissement. Des projets et des investissements souvent majeurs ont dû être repoussés, les travaux étant étendus sur un plus grand nombre d’exercices.
Rallonger la durée des travaux ou en réduire le nombre est particulièrement dommageable pour le tissu économique local et français dans son ensemble, notamment pour les entreprises du BTP, qui ont besoin de la commande publique. Cela est tout particulièrement préjudiciable pour des communes qui se battent au quotidien pour rester attractives sur les marchés nationaux et internationaux. Il serait donc opportun de prévoir une exception comptable afin que les communes puissent étaler les dépenses liées à la crise sanitaire sans avoir à rogner sur des dépenses de fonctionnement et d’investissement.
Aussi, madame la ministre, pourriez-vous nous préciser quelles mesures le Gouvernement entend mettre en œuvre pour permettre aux collectivités territoriales, en particulier aux communes touristiques comme celles du golfe de Saint-Tropez, de lisser, peut-être sur plusieurs années, leurs dépenses liées à la covid-19 et ne pas mettre en péril leurs investissements, si essentiels pour l’attractivité de leurs territoires et de la France en général ?
M. le président. La parole est à Mme la ministre déléguée.
Mme Agnès Pannier-Runacher, ministre déléguée auprès du ministre de l’économie, des finances et de la relance, chargée de l’industrie. Madame la sénatrice Dumont, votre question porte sur les difficultés financières rencontrées par les communes touristiques, en particulier par celles du golfe de Saint-Tropez, dans le Var, dans le contexte de la présente crise sanitaire.
Je tiens tout d’abord à rappeler les engagements pris par le Gouvernement pour faire face, grâce à de multiples dispositifs de soutien, aux conséquences de cette crise, tant pour les acteurs de la sphère privée que pour ceux de la sphère publique.
Ainsi, en collaboration avec la ministre de la cohésion des territoires et des relations avec les collectivités territoriales, le ministère de l’économie, des finances et de la relance s’est tout particulièrement mobilisé, depuis le printemps 2020, pour accompagner les collectivités locales dans la gestion de cette crise sanitaire sans précédent.
Au-delà du nécessaire assouplissement du calendrier de reddition des comptes de l’exercice 2019, les conditions de l’équilibre des budgets des collectivités locales ont été, comme vous le soulignez à juste titre, au cœur des préoccupations du Gouvernement, tout au long de l’année 2020, et le sont encore, naturellement, en 2021.
Cette mobilisation s’est tout d’abord traduite par la mise en œuvre de dispositifs visant à garantir, sous certaines conditions, le niveau des ressources allouées aux collectivités locales. Les pertes liées à l’activité touristique font ainsi l’objet d’une attention particulière dans le dispositif de garantie des recettes communales prévu à l’article 21 de la loi du 30 juillet 2020 de finances rectificatives pour 2020. En effet, les pertes liées à la baisse des recettes de taxe de séjour sont prises en compte, et dans des conditions plus favorables que les autres taxes figurant dans le panier de recettes, car la perte de taxe de séjour est estimée par rapport aux recettes de la seule année 2019 et non par rapport à la moyenne des recettes des années 2017, 2018 et 2019. Cette garantie a été reconduite en 2021, comme vous le savez, par l’article 74 de la loi de finances pour 2021, avec la même référence à l’année 2019.
Par ailleurs, le traitement budgétaire et comptable des dépenses liées à la gestion de la crise sanitaire du covid-19 a fait l’objet d’une attention toute particulière. Ainsi, la circulaire interministérielle du 24 août 2020 a prévu des mesures spécifiques d’adaptation du cadre budgétaire et comptable des collectivités territoriales et de leurs établissements publics. Cette circulaire vise à préserver les équilibres budgétaires tout en assurant la traçabilité des dépenses mobilisées pour faire face à la crise.
À cet égard, et pour répondre à votre demande et à celle des collectivités locales, les dépenses engagées par les collectivités locales peuvent être étalées sur une durée maximale de cinq ans.
Parmi les dépenses concernées, on peut citer les dépenses directement liées à la gestion de la crise sanitaire, le soutien au tissu économique, dès lors que les règles de compétence et de marchés publics sont respectées, ou encore les subventions d’équilibre aux budgets annexes, ainsi que les subventions, contributions ou participations à différentes structures résultant des effets de la crise sanitaire.
M. le président. Il faut conclure !
Mme Agnès Pannier-Runacher, ministre déléguée. Ces mesures budgétaires et comptables dérogatoires ont été étendues par circulaire interministérielle du 15 février 2021 aux dépenses engagées au cours du premier semestre de 2021.
Enfin, je tiens à souligner que la mise en œuvre de ces mesures s’est inscrite dans le cadre d’une étroite concertation avec les représentants des associations d’élus.
Vous pouvez compter sur le Gouvernement pour continuer de suivre de très près cette situation.
M. le président. La parole est à Mme Françoise Dumont, pour la réplique.
Mme Françoise Dumont. Madame la ministre, je vous remercie de votre réponse. Reste que près de la moitié des communes françaises ont subi le double effet d’une diminution de recettes liée à la crise sanitaire et de la baisse de leurs dotations.
Sans préjuger l’avenir, je vous invite à la plus grande vigilance sur le montant des dotations allouées aux collectivités et sur celui des pénalités pour carences qui pourraient leur être infligées, comme celles que prévoit la loi SRU, un dispositif particulièrement complexe à mettre en place dans des zones touristiques comme le littoral varois.
classement de l’agence pour l’enseignement français à l’étranger parmi les organismes divers d’administration centrale
M. le président. La parole est à M. Jean-Yves Leconte, auteur de la question n° 1516, adressée à M. le ministre de l’économie, des finances et de la relance.
M. Jean-Yves Leconte. Je souhaite interroger le Gouvernement sur la présence de l’Agence pour l’enseignement français à l’étranger sur la liste des organismes divers d’administration centrale, dits ODAC, ayant interdiction de contracter auprès d’un établissement de crédit un emprunt dont le terme est supérieur à douze mois.
L’inscription de l’AEFE sur cette liste l’empêche d’accompagner la croissance du réseau des établissements d’enseignement français à l’étranger, alors que celui-ci prévoit de doubler le nombre des élèves qu’il scolarise d’ici à 2030.
De nombreux établissements scolaires en gestion directe sont bloqués dans leurs projets immobiliers, faute pour l’AEFE d’une capacité d’emprunt. Pourtant, ces EGD sont largement financés par les frais de scolarité payés par les familles ; les emprunts qui pourraient être contractés seraient donc remboursés grâce à l’augmentation des recettes engendrée par les investissements qu’ils auront rendus possibles.
Rendre à l’AEFE sa capacité d’emprunt permettrait aussi de mieux étaler dans le temps les augmentations de frais de scolarité des EGD provoquées par les investissements immobiliers, celles-ci étant aujourd’hui brutales puisque l’investissement doit être très vite remboursé.
L’attribution de cette capacité d’emprunt a été demandée par le directeur de l’AEFE lors d’un comité interministériel en janvier 2021. Elle faisait aussi partie des principales recommandations du rapport conjoint des inspections des affaires étrangères et de l’éducation nationale remis au Gouvernement au printemps 2019. Ce rapport rappelait d’ailleurs que plusieurs établissements publics avaient été radiés de la liste des ODAC, comme Mines ParisTech, le CNED ou l’IGN.
Il convient aussi de constater que la subvention publique est de plus en plus minoritaire dans les recettes de l’Agence pour l’enseignement français à l’étranger. En effet, ses ressources propres, qui proviennent, d’une part, des frais de scolarité payés par les familles dans les établissements en gestion directe et, d’autre part, de la facturation des personnels et des services rendus aux établissements conventionnés, sont en constante augmentation depuis plusieurs années.
Le Gouvernement envisage-t-il vraiment de donner à l’AEFE la capacité de participer à la croissance du réseau de l’enseignement français à l’étranger ?
M. le président. La parole est à Mme la ministre déléguée.
Mme Agnès Pannier-Runacher, ministre déléguée auprès du ministre de l’économie, des finances et de la relance, chargée de l’industrie. Monsieur le sénateur Leconte, vous m’interrogez sur l’inscription de l’Agence pour l’enseignement français à l’étranger sur la liste des organismes divers d’administration centrale, les fameux ODAC, qui ne l’autorise pas à s’endetter auprès d’un établissement de crédit sur une durée supérieure à douze mois ou d’émettre un titre de créance dont le terme excéderait cette durée. Cette interdiction, décidée par le législateur, vise à mieux maîtriser la dette publique et les dépenses associées à sa charge et à mieux maîtriser la dissémination de l’endettement public entre les différents organismes.
La qualification en ODAC est établie tous les ans par l’Insee de manière indépendante à la suite d’une étude approfondie de chaque entité. Cela ne se décrète donc pas. Plusieurs critères sont pris en compte lors de cette étude, tels que le poids de l’État dans la gouvernance et les modalités de financement de l’organisme, en particulier sa part respective des ressources propres et des financements publics.
Ces éléments sont pris en compte de manière globale. Une seule variation ne conduit pas à remettre en question cette classification. Le ministère chargé des comptes publics adopte un arrêté qui ne fait que reprendre, en pratique, les classifications opérées par le comptable national. C’est une question de crédibilité, notamment à l’endroit de nos financeurs.
Toutefois, l’attention de l’Insee pourra être attirée sur une éventuelle révision de la qualification de l’AEFE, décidée chaque année. Toute évolution ne pourra résulter que de changements significatifs et objectifs dans le modèle économique de l’AEFE par rapport à la situation antérieure qui avait conduit à sa qualification en ODAC.
Indépendamment d’une éventuelle requalification, des solutions substitutives à l’endettement, qui reposeraient en particulier sur la trésorerie abondante de l’AEFE, peuvent être mises en œuvre pour répondre à l’objectif, parfaitement légitime, de lui donner les moyens de son développement. Cette trésorerie atteint, en 2020, environ 300 millions d’euros, dont environ 150 millions d’euros pour les établissements en gestion directe. Mis en commun, ces montants permettraient d’absorber largement les besoins d’investissement immobilier du réseau de ces établissements en gestion directe.
Le nouveau contrat d’objectifs et de moyens, en cours d’élaboration, doit être l’occasion de normaliser les modalités de financement de l’immobilier des établissements en gestion directe en mettant fin aux avances dérogatoires de l’Agence France Trésor et en actant une évolution dans le sens d’une mise en commun de la trésorerie de ces établissements.
M. le président. La parole est à M. Jean-Yves Leconte, pour la réplique.
M. Jean-Yves Leconte. Il est totalement inexact de dire que l’AEFE a aujourd’hui les moyens de financer les investissements immobiliers des établissements en gestion directe. Des investissements sont bloqués, des projets sont arrêtés, faute de financement.
En outre, depuis une dizaine d’années, l’Agence voit progressivement la part de ses ressources propres augmenter structurellement et dépasser largement les 50 %.
Si une baisse a pu être constatée en 2020, elle est conjoncturelle, liée à la crise sanitaire mondiale. L’évolution depuis dix ou quinze ans va dans le sens d’une autonomisation progressive et d’une baisse de la part de l’État, qui atteint maintenant largement moins de 50 % de ces recettes.
aide financière pour les pâtisseries-salons de thé
M. le président. La parole est à Mme Elsa Schalck, auteure de la question n° 1577, adressée à M. le ministre de l’économie, des finances et de la relance.
Mme Elsa Schalck. Je voudrais relayer au Sénat le cri de désespoir des salons de thé-pâtisseries-boulangeries, qui se trouvent dans une situation dramatique depuis le début de la crise de la covid-19. Depuis le décret du 29 octobre 2020, leurs espaces de salon de thé sont à nouveau fermés, au même titre que les restaurants, ce qui représente une perte de plus de 70 % de leur chiffre d’affaires. Or ces entreprises ne perçoivent aucune aide sur la partie salon de thé.
Par une question écrite en décembre dernier, puis par un courrier en date du 25 janvier, resté malheureusement sans réponse à ce jour, j’avais déjà alerté le Gouvernement sur cette situation. J’associe à cette question orale mon collègue du Haut-Rhin, le sénateur Christian Klinger, qui a, lui aussi, été interpellé à ce sujet dans son département.
En Alsace, les salons de thé-pâtisseries font partie de notre tradition. Nous y sommes fortement attachés. À l’heure actuelle, leurs pertes financières s’élèveraient à 170 000 euros ; qui plus est, disposer d’un espace de salon de thé en plus de la surface de vente conduit à payer un loyer et des charges plus importants. Des pâtisseries-salons de thé craignent de devoir licencier ou fermer. Je me fais ici l’écho du président de la chambre de métiers d’Alsace : « Si l’on ne fait rien, ces entreprises, symbole de notre art de vivre alsacien, vont tout simplement disparaître. »
Depuis un an, les salons de thé-pâtisseries demandent à bénéficier des mêmes aides que les restaurateurs. Certes, des aides économiques existent, mais ces dispositifs ne tiennent pas compte de l’activité de salon de thé. J’ai notamment pu échanger avec les gérants d’une pâtisserie strasbourgeoise, qui m’ont indiqué perdre de l’argent à chaque fois qu’ils ouvraient leur commerce.
Il est urgent de les entendre et de répondre à cette forte inquiétude, relayée par toute une profession, et d’apporter une lueur d’espoir, dans ce contexte ô combien compliqué, aux 400 professionnels alsaciens qui correspondent à ce cas de figure.
Madame la ministre, comment comptez-vous prendre en compte cette situation particulière – ô combien importante ! – des salons de thé-pâtisseries-boulangeries ?
M. le président. La parole est à Mme la ministre déléguée.
Mme Agnès Pannier-Runacher, ministre déléguée auprès du ministre de l’économie, des finances et de la relance, chargée de l’industrie. Madame la sénatrice Schalck, vous appelez mon attention sur la situation des entreprises multi-activités, notamment sur celle des pâtisseries-salons de thé, qui réalisent 75 % de leur chiffre d’affaires grâce au salon de thé.
Au titre de l’aide du mois de février 2021, toutes les entreprises, quels que soient leur chiffre d’affaires et leur secteur d’activité, sont susceptibles de bénéficier du fonds de solidarité.
Aujourd’hui, l’activité principale détermine le régime d’aide dont peut bénéficier une entreprise ayant plusieurs activités, définie comme celle qui contribue le plus au chiffre d’affaires de référence, indépendamment du code NAF de l’entreprise. Pour calculer le montant de l’aide, la perte de chiffre d’affaires est déterminée à partir du chiffre d’affaires de référence, toutes activités confondues.
Prenons le cas d’une pâtisserie-salon de thé : si l’activité de salon de thé est celle qui génère le plus de chiffre d’affaires, alors que l’accueil du public est interdit, l’entreprise peut directement bénéficier du régime d’aide pour les entreprises fermées administrativement. L’aide pour ces entreprises peut aller jusqu’à 200 000 euros. En revanche, si le principal chiffre d’affaires est réalisé par l’activité de pâtisserie, qui continue de fonctionner, l’entreprise pourra néanmoins bénéficier du régime d’aide des entreprises des secteurs dits S1 bis dont la pâtisserie fait partie, conformément à l’annexe 2 du décret relatif au fonds de solidarité.
Toutefois, si les conditions d’accès au fonds de solidarité sont différentes pour ces deux régimes d’aide – les entreprises des secteurs S1 bis doivent subir une perte de plus de 50 % de leur chiffre d’affaires, ainsi qu’une perte de 10 % sur l’année 2020 –, les niveaux d’aide pour ces deux régimes sont désormais quasiment alignés. Là encore, les pâtisseries-salons de thé pourront bénéficier d’un appui si elles font valoir qu’elles ont perdu plus de 50 % de chiffre d’affaires au cours du mois.
Vous pouvez compter sur la mobilisation totale du Gouvernement et d’Alain Griset, ministre délégué chargé des petites et moyennes entreprises, pour soutenir et accompagner l’ensemble des entreprises tout au long de cette crise.