compte rendu intégral
Présidence de M. Gérard Larcher
Secrétaires :
M. Pierre Cuypers,
Mme Victoire Jasmin.
1
Procès-verbal
M. le président. Le compte rendu analytique de la précédente séance a été distribué.
Il n’y a pas d’observation ?…
Le procès-verbal est adopté sous les réserves d’usage.
2
Questions d’actualité au Gouvernement
M. le président. L’ordre du jour appelle les réponses à des questions d’actualité au Gouvernement.
Je vous rappelle que la séance est retransmise en direct sur Public Sénat et sur notre site internet.
Chacun de vous, mes chers collègues, veillera au respect des uns et des autres, ainsi que du temps de parole. Il sera également attentif aux gestes prophylactiques, qui sont très importants.
politique de vaccination
M. le président. La parole est à M. Thani Mohamed Soilihi, pour le groupe Rassemblement des démocrates, progressistes et indépendants. (Applaudissements sur les travées du groupe RDPI.)
M. Thani Mohamed Soilihi. Monsieur le président, monsieur le Premier ministre, mesdames, messieurs les ministres, mes chers collègues, hier, l’épidémie de la covid-19 causait 292 décès supplémentaires, nous rapprochant encore davantage de la barre redoutée des 100 000 morts. Mes pensées vont aux familles endeuillées et aux soignants, épuisés.
Un an après, le virus est toujours là, mais la résilience des citoyens, la force de nos professionnels de santé et l’engagement des élus s’efforcent de lui faire face.
Le Premier ministre a ainsi annoncé des mesures spécifiques dans seize départements la semaine dernière. Elles sont nécessaires pour répondre aux appels des professionnels de santé submergés. Elles sont nécessaires, aussi, pour nous adapter à ce virus, qui mute et qui nous impose de modifier nos certitudes.
Toutefois, les mesures de l’année passée ne sont plus celles d’aujourd’hui et ne seront probablement pas celles de demain. Elles peuvent dorénavant être territorialisées, comme à Mayotte, et variées, pour répondre aux besoins sanitaires sans oublier la santé mentale.
Un an après, la covid rythme encore nos journées, mais une certitude est aujourd’hui acquise : la vaccination, sur tout le territoire, dans l’Hexagone comme en outre-mer, est notre unique issue.
En un an, les scientifiques ont réalisé des prouesses, suspendant leurs recherches pour se concentrer sur un seul virus afin de développer des vaccins aux taux d’efficacité inégalés.
Désormais, la vaccination de près de 91 % des résidents en établissements d’hébergement pour personnes âgées dépendantes, les Ehpad, ou en unités de soins de longue durée, les USLD, a permis de diminuer sensiblement les hospitalisations de ces populations.
La vaccination fonctionne ; nous pouvons nous en réjouir. Pour autant, encore trop de personnes âgées ne parviennent pas à trouver de places pour se protéger, et la confiance à l’égard de certains vaccins continue d’être ébranlée par quelques cas isolés, mais inquiétants.
Monsieur le secrétaire d’État, alors que la fatigue prend de plus en plus le pas sur la résilience, les citoyens ont besoin d’un horizon clair vers une sortie de crise.
Quelles perspectives pouvez-vous nous apporter pour assurer la vaccination sécurisée de tous les Français qui le souhaitent, sur l’ensemble du territoire ? (Applaudissements sur les travées du groupe RDPI.)
M. le président. La parole est à M. le secrétaire d’État chargé de l’enfance et des familles.
M. Adrien Taquet, secrétaire d’État auprès du ministre des solidarités et de la santé, chargé de l’enfance et des familles. Monsieur le sénateur Thani Mohamed Soilihi, vous avez commencé par l’essentiel : je m’associe à l’hommage que vous rendez aux dizaines de milliers de familles endeuillées et aux soignants mobilisés depuis maintenant plus d’un an face à cette crise qui met notre système de santé à l’épreuve. Nous saluons de nouveau leur dévouement, ainsi que la résilience, que vous avez évoquée, de l’ensemble de nos compatriotes.
Face à cette situation changeante, le Gouvernement adapte sa stratégie en concertation avec l’ensemble des acteurs, notamment les élus locaux, avec pour seul objectif de rester le plus efficace dans cette lutte contre l’épidémie et de prendre les bonnes dispositions au bon moment.
Vous avez justement noté que ces mesures sont de plus en plus territorialisées, car si le taux d’incidence et la pression hospitalière sont très élevés à certains endroits du territoire – je pense évidemment à l’Île-de-France et aux Hauts-de-France –, ce n’est heureusement pas le cas dans toutes nos régions.
Nous avons choisi de prendre des mesures de freinage fortes dans seize départements à ce stade. Elles seront peut-être étendues – le Premier ministre y reviendra éventuellement tout à l’heure – à d’autres départements où la situation est critique. Les quatre semaines pour lesquelles ont été décidées ces mesures sont déterminantes, nous le savons tous.
Ces mesures s’articulent à l’effort de vaccination que nous souhaitons tous voir s’intensifier. Les vaccins sont le principal espoir de sortie de crise. Nous le répétons sans cesse : il faut vacciner et il faut se faire vacciner.
Cela vaut pour l’outre-mer, évidemment, et cela vaut pour Mayotte, où 75 % des doses livrées ont été inoculées. Il faut néanmoins accélérer. La mobilisation de tous doit être totale, notamment celle des élus locaux. Je salue d’ailleurs votre engagement, monsieur le sénateur, à cet égard.
Nos objectifs restent inchangés : vacciner 10 millions de Français à la mi-avril et 20 millions à la mi-mai. Le Président de la République, pour ce faire, a annoncé hier, vous l’avez entendu, que dès samedi prochain la vaccination sera élargie aux plus de 70 ans sans comorbidités.
Pour n’oublier personne, l’assurance maladie appellera tous les plus de 75 ans qui ne sont pas encore vaccinés afin de leur proposer un créneau. Des campagnes de vaccination ciblée seront enfin bientôt lancées, en lien avec l’arrivée des nouvelles doses, puisque, évidemment, tout dépend de la disponibilité et de l’arrivée des vaccins.
Je pense également à l’ouverture rapide de trente-cinq vaccinodromes. Une concertation a lieu en ce moment avec les élus locaux pour déterminer les lieux et la répartition de ces centres, ce qui permettra d’optimiser à la fois l’attribution des doses, dont les arrivées vont augmenter à compter de la mi-avril, notamment dans les outre-mer, et la façon dont les professionnels de santé seront mobilisés.
Enfin, comme vous le savez, nous allons également mobiliser l’armée pour accélérer cette phase de vaccination. (Applaudissements sur les travées du groupe RDPI.)
organisation des élections départementales et régionales
M. le président. La parole est à M. Mickaël Vallet, pour le groupe Socialiste, Écologiste et Républicain. (Applaudissements sur les travées du groupe SER.)
M. Mickaël Vallet. Ma question s’adressait à M. le ministre de l’intérieur, visiblement représenté aujourd’hui par Mme la ministre déléguée chargée de la citoyenneté. Elle porte sur la continuité de notre vie démocratique.
Il y a un an, jour pour jour, la France entrait de nouveau dans l’état d’urgence. La soudaineté du premier confinement a pleinement justifié les difficultés d’organisation des élections municipales.
Toutefois, un état d’urgence vise, par définition, à répondre aux urgences. Il ne doit pas affecter de façon déraisonnable des rendez-vous démocratiques planifiés de longue date.
La loi du 22 février 2021 portant report, de mars à juin 2021, du renouvellement général des conseils départementaux, des conseils régionaux et des assemblées de Corse, de Guyane et de Martinique prévoit une clause de revoyure au 1er avril, après avis du conseil scientifique.
Néanmoins, ne nous y trompons pas : le conseil scientifique rendra un avis qui sera fonction des moyens et des innovations mis en œuvre pour permettre le bon déroulement de ces élections.
Ma question est simple, madame la ministre : quelles propositions d’organisation de notre vie démocratique pouvez-vous mettre en avant pour faciliter une réponse positive du conseil scientifique à la tenue de ce temps fort de notre démocratie ? (Applaudissements sur les travées du groupe SER, ainsi que sur des travées du groupe Les Républicains.)
M. le président. La parole est à Mme la ministre déléguée chargée de la citoyenneté.
Mme Marlène Schiappa, ministre déléguée auprès du ministre de l’intérieur, chargée de la citoyenneté. Monsieur le sénateur Mickaël Vallet, je répondrai très clairement à la question que vous posez.
Je le ferai d’autant plus volontiers que j’ai eu le plaisir et l’honneur de représenter le Gouvernement ici même pendant plusieurs heures, quand nous avons débattu, ensemble, de la question de la date des élections départementales et des élections régionales. Le Sénat et l’Assemblée nationale ont acté le fait, lors de l’examen de cette loi de report, que ces élections se tiendraient les 13 et 20 juin prochain.
Le Gouvernement, comme il s’y était engagé, a d’ailleurs immédiatement publié dès le mois de mars le décret de convocation des électeurs pour les 13 et 20 juin prochain.
Dans cette loi que nous avons discutée et que vous avez votée, il est également fait mention du rapport du conseil scientifique, qui doit être présenté et transmis par le Gouvernement au Parlement avant le 1er avril.
À l’heure actuelle, nul ne dispose du contenu du rapport du conseil scientifique, mais finalement c’est bien le Parlement qui aura le dernier mot, puisque, en fonction des résultats de ce rapport, dont il aura eu connaissance, le Parlement sera amené à se prononcer.
Je veux vous dire très simplement, au nom du gouvernement de Jean Castex, que nous souhaitons que les élections régionales, à ce stade, puissent se maintenir le 13 et le 20 juin, comme cela a été voté par le Parlement. (Exclamations sur les travées des groupes SER et Les Républicains.)
M. Rachid Temal. Avec quelles mesures ?
Mme Marlène Schiappa, ministre déléguée. D’ailleurs, je travaille avec Gérald Darmanin, ministre de l’intérieur, auquel je suis rattachée, en lien avec les maires et les collectivités, à un protocole sanitaire strict, qui réponde à toutes les mesures que vous avez votées, notamment la mutualisation des fonctions d’assesseur et de président de bureau de vote.
Il s’agit de faire en sorte que la démocratie continue et que les élections régionales se tiennent bien les 13 et 20 juin prochain,… (Vives exclamations sur les travées du groupe Les Républicains.)
M. Bruno Retailleau. Et les départementales ?
Mme Marlène Schiappa, ministre déléguée. … ainsi que les élections départementales. (Ah ! sur les travées du groupe Les Républicains.)
M. François Bonhomme. Vous vous souvenez enfin des départements !
Mme Marlène Schiappa, ministre déléguée. C’est pourquoi des bureaux de vote seront mutualisés, pour que les deux scrutins puissent bien avoir lieu à ces dates. (Applaudissements sur les travées du groupe RDPI.)
M. le président. La parole est à M. Mickaël Vallet, pour la réplique.
M. Mickaël Vallet. J’entends bien, madame la ministre, que les élections doivent se tenir « quoi qu’il en coûte », selon l’expression consacrée.
Ces six derniers mois, l’Allemagne, les États-Unis, le Kosovo, la Côte d’Ivoire, la Suisse, le Niger et cinquante autres États ont tous fait en sorte que leurs élections se tiennent. Mais la cinquième puissance mondiale demeure dans le doute à trois mois d’un scrutin !
M. François Patriat. Vous n’avez pas écouté la réponse de la ministre !
M. Mickaël Vallet. Ces six derniers mois, sur les différentes travées du Sénat, ont été proposés la double procuration, le vote par correspondance, l’étalement du vote sur trois jours, et j’en passe !
Le Gouvernement a rejeté toutes ces innovations démocratiques, qui valaient pourtant bien les grands débats de 2019 et la Convention citoyenne de 2020. La démocratie aurait gagné à ce que vous vous saisissiez de nos propositions.
Sur le bon déroulement des élections, chacun devra assumer ses responsabilités. Le Sénat, lui, en formulant ses propositions, a déjà pris les siennes ! (Bravo ! et applaudissements sur les travées du groupe SER, ainsi que sur des travées du groupe Les Républicains.)
nouvelles mesures pour lutter contre la pandémie
M. le président. La parole est à M. Jean-Claude Requier, pour le groupe du Rassemblement Démocratique et Social Européen. (Applaudissements sur les travées du groupe RDSE.)
M. Jean-Claude Requier. Monsieur le Premier ministre, lors de la réunion du mercredi 17 mars du comité de liaison parlementaire pour la gestion de la crise sanitaire, qui a rassemblé sous votre présidence plusieurs de vos ministres, le président du Sénat et les présidents des groupes de la Haute Assemblée, je vous ai demandé, au nom du RDSE, de retarder le début du couvre-feu de dix-huit heures à vingt heures, en raison de l’allongement de la durée du jour et de l’arrivée de l’heure d’été.
Vous m’avez répondu que l’heure d’été posait problème et vous avez annoncé le lendemain le décalage du couvre-feu de dix-huit heures à dix-neuf heures, faisant ainsi gagner une heure de jour, de lumière et de liberté à nos concitoyens. Je voudrais vous en remercier.
M. Emmanuel Capus. Très bien !
M. Jean-Claude Requier. Pour les seize départements les plus touchés par la pandémie, vous avez ensuite annoncé une troisième variante de confinement, une troisième voie, à savoir un confinement « moins confiné », toujours vigilant dans l’espace privé, mais plus large dans l’espace public, permettant aux habitants de se déplacer davantage que lors des précédents confinements.
Toutefois, c’était sans compter samedi sur la fameuse attestation dérogatoire de deux pages, avec quinze motifs de déplacements retenus et trois limites fixées à 1 kilomètre, à 10 kilomètres et à 30 kilomètres…
Cette attestation a aussitôt été qualifiée de « chef-d’œuvre bureaucratique ». (Marques d’approbation sur de nombreuses travées.) Vous l’avez supprimée le dimanche, puis ressortie en version simplifiée.
Cette complexité et ces excès de normes contribuent à aggraver la morosité, la lassitude et la fatigue de nos concitoyens, mis à rude épreuve depuis un an.
Monsieur le Premier ministre, en cas d’aggravation de la pandémie, quelles mesures envisagez-vous de prendre dans les seize départements de la zone rouge et dans ceux de la zone verte ? (Applaudissements sur les travées du groupe RDSE, ainsi que sur des travées des groupes UC et Les Républicains.)
M. le président. La parole est à M. le Premier ministre.
M. Jean Castex, Premier ministre. Monsieur le sénateur Requier, je vous remercie, tout d’abord, d’avoir rappelé le processus de concertation que j’organise de manière régulière avec les présidents des différents groupes du Sénat, comme du reste de l’Assemblée nationale, avant toute prise de décision.
Je vous remercie également d’avoir observé que, contrairement à ce que je peux entendre ici ou là, ces concertations sont des exercices extrêmement utiles et que je tiens le plus grand compte des observations formulées lors de ces réunions.
M. Rachid Temal. Cela ne s’est pas vu !
M. Jean Castex, Premier ministre. Vous venez, en particulier, de faire référence à l’heure du couvre-feu. Les arguments que vous avez invoqués, notamment le passage à l’heure d’été, étaient parfaitement pertinents.
En réponse à votre question, monsieur le sénateur, le Gouvernement va continuer dans cette stratégie, qui est d’abord territorialisée. J’y insiste, car il s’agit également d’une demande régulièrement exprimée par le Sénat. Je dois dire ici que nous maintiendrons cette stratégie autant que cela sera possible.
Il n’a échappé à personne, sur aucune travée de cette assemblée, que nous sommes face à une troisième vague particulièrement virulente. (Manifestations de surprise feinte sur les travées des groupes SER et Les Républicains.)
Je sais que vous aimez toutes et tous observer ce qui se passe dans les pays étrangers, en Allemagne, en Italie, etc. Aussi, posons les choses telles qu’elles sont : nous sommes confrontés à une troisième vague extrêmement importante, qui nous conduit à prendre des mesures territorialisées et de freinage les plus adaptées possible.
Toutefois, nous pourrions effectivement, monsieur le sénateur, être conduits à les durcir, en fonction de l’évolution de la pandémie, car nous avons le devoir de nous adapter, comme nous l’avons toujours fait !
Nous tenons également compte de ce que nous avons appris l’année dernière et lors des mesures de freinage antérieures.
M. Bruno Retailleau. Bravo ! (Sourires sur les travées du groupe Les Républicains.)
M. Jean Castex, Premier ministre. Effectivement, les retours d’expérience montrent que les lieux de contamination clos sont beaucoup plus dangereux que l’espace extérieur.
M. Bernard Jomier. Ah bon ? (Sourires sur les travées du groupe SER.)
M. Jean Castex, Premier ministre. Par conséquent, nous avons intégré cette considération dans les mesures prises, ce qui ne signifie pas, je le dis de façon très solennelle devant le Sénat, qu’à l’extérieur on puisse faire n’importe quoi ! (Marques d’ironie sur les travées des groupes SER et Les Républicains.)
C’est pourquoi nous avons clairement défini dans l’attestation ce qu’il est possible de faire et ce qu’il n’est pas possible de faire ! (M. François Patriat applaudit.)
M. le président. La parole est à M. Jean-Claude Requier, pour la réplique.
M. Jean-Claude Requier. Monsieur le Premier ministre, dans la gestion de cette crise, continuez à associer les élus locaux à votre réflexion et à leur faire confiance.
Par ailleurs, pour rédiger une attestation simple, fonctionnelle et applicable, vous pourriez peut-être demander un avis à un maire expérimenté, à un conseiller départemental chevronné ou peut-être même à un sénateur ! (Rires et applaudissements sur les travées du groupe RDSE, ainsi que sur des travées des groupes SER, INDEP, UC et Les Républicains.)
vaccination dans les écoles
M. le président. La parole est à Mme Sophie Taillé-Polian, pour le groupe Écologiste – Solidarité et Territoires.
Mme Sophie Taillé-Polian. Ma question s’adresse à M. le ministre de l’éducation nationale, de la jeunesse et des sports.
Je souhaite lui faire part d’une remontée de terrain et citer les propos des responsables de l’académie de Créteil : « Il y a eu un véritable tsunami de remontées de cas positifs par les écoles à traiter cette dernière semaine. Tous les médecins de l’éducation nationale du département sont sur le pont, mais, compte tenu du nombre très important de cas positifs signalés dans les écoles du département, il n’est pas possible de répondre dans des délais satisfaisants. »
Un médecin du Val-de-Marne le confirme : il y a plus de 600 situations de retard – soit autant d’écoles que dans le département ! – pour traiter les demandes qui se multiplient, eu égard à l’augmentation des cas positifs. Voilà la réalité du terrain !
Dans les écoles, vous êtes aujourd’hui débordés. Il n’y a pas de réponse dans les temps pour décider des éventuelles fermetures ou pour mettre en œuvre avec rigueur le « tester, isoler, tracer ». Cela suscite de la confusion et de mauvaises décisions.
Il n’y a pas de remplaçants en nombre suffisant, donc on mélange les élèves pour poursuivre l’accueil, au mépris du protocole sanitaire.
Il n’y a pas de moyens de protection des personnels enseignants ou éducatifs pourtant en première ligne. Certes, il est question de leur ouvrir un accès à la vaccination, comme ils le demandent, mais donnez-leur déjà des masques ! Ces derniers n’ont pas été remplacés depuis le mois de septembre et les personnels se contentent des masques en tissu distribués, qui ne sont même pas de catégorie 1 !
Il n’y a pas de réponse pour les collèges qui demandent à faire des rotations, comme dans les lycées, pour limiter l’accès à la restauration scolaire.
Enfin, il n’y a pas d’anticipation pour utiliser, quitte à les prolonger un peu, les prochaines vacances, afin que celles-ci soient l’occasion d’un freinage puissant.
Comme vous, monsieur le ministre de l’éducation nationale, nous voulons que les écoles restent ouvertes, mais pas n’importe comment ! Quand allez-vous prendre les mesures fortes qui sont nécessaires pour que la situation revienne sous contrôle ? (Applaudissements sur les travées du groupe GEST.)
M. le président. La parole est à Mme la secrétaire d’État chargée de l’éducation prioritaire.
Mme Nathalie Elimas, secrétaire d’État auprès du ministre de l’éducation nationale, de la jeunesse et des sports, chargée de l’éducation prioritaire. Madame la sénatrice, en cette période si particulière, nous avons deux responsabilités. La première est d’assurer la protection de nos élèves et de nos personnels. La seconde est de garantir la réussite scolaire.
Afin de garantir la protection de nos élèves et de nos personnels, je vous rappelle que nous avons déployé des protocoles sanitaires que nous ne cessons d’adapter.
Vous avez évoqué, madame la sénatrice, la question des remplacements. Oui, il y a des remplaçants dans nos écoles : 2 200 d’entre eux ont été affectés dans le premier degré et 2 700 assistants d’éducation, ou AED, ont été affectés dans le second degré. Nous déployons également des tests antigéniques et salivaires : 320 000 tests ont été proposés… (Exclamations sur les travées des groupes CRCE et SER.)
M. Fabien Gay. Où ça ?
M. Rachid Temal. Où sont-ils ?
Mme Nathalie Elimas, secrétaire d’État. … et 200 000 tests ont été réalisés, avec un taux de positivité dans nos établissements qui oscille entre 0,3 % et 0,5 %.
Comme je l’ai rappelé, notre second objectif est de garantir la réussite de nos élèves. Avec Jean-Michel Blanquer et l’ensemble des membres du Gouvernement, j’ai une conviction : l’école, c’est important, notamment pour nos élèves les plus fragiles. Il faut lutter contre le décrochage scolaire !
Il suffit d’observer, madame la sénatrice, le résultat des évaluations nationales et de comparer les résultats de septembre avec ceux de janvier. Et c’est parce que nos écoles sont ouvertes, c’est parce qu’il y a cette exception française qui fait notre fierté que nous sommes parvenus à rattraper les différences et que nous avons résorbé l’écart qu’il y avait entre les zones d’éducation prioritaire et les autres.
Le Président de la République a annoncé hier l’élargissement de la politique vaccinale, notamment le déploiement d’une campagne ciblée. Madame la sénatrice, nos professeurs pourront en bénéficier d’ici à quelques semaines ! (Applaudissements sur les travées du groupe RDPI.)
M. le président. La parole est à Mme Sophie Taillé-Polian, pour la réplique.
Mme Sophie Taillé-Polian. Madame la secrétaire d’État, il n’y a pas que les professeurs à vacciner. Il y a toute la communauté éducative et tous les personnels !
À l’école Hautes Bruyères de Villejuif, pour obtenir des remplaçants, les parents ont été obligés de se mobiliser, de menacer et même d’occuper l’établissement ! Si vous pensez être à la hauteur de la situation, vous vous trompez. Il faut des moyens supplémentaires, notamment des remplaçants, pour mettre un terme à l’actuel brassage des élèves ! (Applaudissements sur les travées du groupe GEST.)
situation préoccupante de la filière viande
M. le président. La parole est à M. Franck Menonville, pour le groupe Les Indépendants – République et Territoires. (Applaudissements sur les travées du groupe INDEP.)
M. Franck Menonville. Ma question s’adresse au ministre de l’agriculture et porte sur les difficultés rencontrées actuellement par la filière de viande bovine.
En 2020, alors même que les ventes de viandes bovines françaises ont progressé, le prix payé aux éleveurs n’a cessé de chuter, pour aboutir à un résultat particulièrement alarmant. Selon la Fédération nationale bovine, les éleveurs ont dû vivre avec moins de 700 euros par mois l’année dernière.
La France est pourtant le premier producteur européen de viande bovine, avec 485 000 emplois qui contribuent à l’animation de nos territoires et façonnent nos paysages. La viande rouge représente 63 % de la viande consommée en France et fait partie intégrante de notre patrimoine gastronomique.
Nous ne pouvons pas regarder sans réagir nos éleveurs disparaître en raison de prix inexplicablement bas, à l’image du cours des jeunes bovins.
Nous ne pouvons pas laisser les éleveurs continuer de vendre leurs animaux à un prix inférieur d’environ un euro du kilogramme à leur coût de production, un coût de production qui ne cesse d’ailleurs de croître.
La crise des éleveurs est accentuée par l’augmentation des prix des matières premières nécessaires à l’alimentation du bétail, ravivant ainsi des tensions sur le partage de la valeur ajoutée.
La loi du 30 octobre 2018 pour l’équilibre des relations commerciales dans le secteur agricole et alimentaire et une alimentation saine, durable et accessible à tous, dite loi Égalim, porteuse d’espoirs, censée rééquilibrer les relations commerciales entre agriculteurs, transformateurs et grande distribution, tarde à porter ses fruits. En pleine négociation de la politique agricole commune, la PAC, les inquiétudes se font grandes.
Monsieur le ministre, que comptez-vous faire pour soutenir concrètement et dans la durée l’élevage français, pour lui redonner de nouvelles perspectives ?
Au-delà des aides déjà annoncées, les éleveurs ont besoin de soutiens structurels. Quelles mesures comptez-vous prendre pour rendre la loi Égalim efficiente ? (Applaudissements sur les travées du groupe INDEP.)
M. Emmanuel Capus. Très bien !
M. le président. La parole est à M. le ministre de l’agriculture et de l’alimentation.
M. Julien Denormandie, ministre de l’agriculture et de l’alimentation. Monsieur le sénateur, votre question porte sur la loi Égalim et la rémunération de nos agriculteurs.
Je vous parlerai avec beaucoup de franchise : la situation actuelle demeure inacceptable. (M. Bruno Sido applaudit.) La loi Égalim a permis de faire bouger les lignes, mais force est de constater que certains, dans l’industrie et la grande distribution, ne respectent ni l’esprit ni parfois même la lettre de ce texte.
Certes, nos agriculteurs ont, chevillée au corps, la volonté de nourrir le peuple. (Marques d’ironie sur les travées du groupe SER.) Mais on ne peut pas leur demander de le faire, avec des produits dont la qualité est toujours plus élevée, en laissant dans le même temps s’organiser cette guerre des prix.
La montée en qualité est incompatible avec la guerre des prix. Face à une telle situation, nous devons faire preuve de fermeté et aller plus loin par rapport à la loi Égalim. (Exclamations sur les travées du groupe SER.)
Les négociations commerciales sont un rapport de force. Je l’ai toujours dit, l’État est entré dans ce rapport de force. Songez, monsieur le sénateur, qu’en l’espace de six semaines nous avons réalisé l’équivalent de six mois de contrôles. Je le dis avec fermeté, dans notre République, la loi doit être appliquée. La direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes, la DGCCRF, a donc démultiplié les contrôles. (Marques d’ironie sur les travées du groupe SER.)
Au-delà de ce rapport de force, il nous faut aller plus loin sur la loi Égalim, comprendre ce qui ne fonctionne pas et déterminer ce qu’il nous faut modifier. C’est tout le sens des travaux que j’ai confiés à Serge Papin, l’ancien président de Système U, qui me remettra ses recommandations demain.
Il s’agit d’aller plus loin dans la voie de la contractualisation et de la transparence, pour, finalement, trouver des solutions – probablement législatives, d’ailleurs –, afin de mettre un terme à cette contradiction entre la loi du 4 août 2008 de modernisation de l’économie, que vous connaissez bien et qui était une loi de déflation, et la loi Égalim, qui vise à mieux rémunérer.
Ces deux lois doivent être mieux coordonnées. Des avancées sont nécessaires en ce sens, je m’engage à tenir cet objectif, sous l’autorité du Premier ministre, car c’est une question de souveraineté ! (Applaudissements sur les travées du groupe RDPI.)
situation de l’unef