M. François Bonhomme. C’est un peu tard !
Mme Olivia Gregoire, secrétaire d’État. Non, ce n’est pas trop tard !
La France conduit un vaste programme de réformes visant à renforcer la place des services financiers en tant que vecteurs de croissance dans notre pays. Nous sommes à l’avant-garde en matière d’innovation dans le domaine des services financiers. Nous sommes aussi à l’avant-garde en matière d’innovation dans le domaine que j’ai le plaisir de traiter pour Bruno Le Maire, la finance verte, la finance durable – c’est un sujet qui nous intéresse pour demain –, ainsi que pour les applications relatives à la blockchain.
Vous l’avez rappelé, monsieur le sénateur, depuis 2019, Paris a cherché et a réussi à attirer des acteurs financiers internationaux. Je pense à la relocalisation des plateformes de négociation de Goldman Sachs et d’Acquis Exchange. Je pense aussi à l’ouverture du nouveau bureau de Citadel et à la création des filiales européennes de Chubb et de Bank of America, qui sont autant d’exemples illustrant concrètement l’attractivité croissante de la place. Paris est ainsi le seul centre financier continental à avoir réussi à capter l’ensemble de l’écosystème des services financiers.
Monsieur le sénateur, vous savez que, depuis le 1er janvier 2021 et à la fin de la période de transition du Brexit, les actions d’entreprises de l’Union européenne échangées en euros ne peuvent plus être échangées sur les plateformes boursières du Royaume-Uni à qui la Commission européenne a décidé de ne pas octroyer d’équivalence. Ce mouvement important de rapatriement des échanges d’actions dans l’Union européenne a conduit à la relocalisation dans l’Union européenne des principales plateformes internationales d’échanges d’actions. Paris, aux côtés d’Amsterdam que vous mentionnez, en a été l’un des deux principaux bénéficiaires en attirant sept plateformes anglo-saxonnes, notamment la plateforme de Goldman Sachs.
En matière d’introduction en Bourse de nouvelles entreprises, Paris bénéficie aussi d’une attractivité renouvelée. Ainsi, elle devrait être dans l’Europe post-Brexit l’une des deux places principales de cotation de l’Union européenne avec Francfort. Nous avons pris ce pari et nous sommes proches du résultat. (M. François Patriat applaudit.)
Mme la présidente. La parole est à M. Philippe Dominati, pour la réplique.
M. Philippe Dominati. Madame la secrétaire d’État, votre réponse est d’autant plus préoccupante que vous êtes une ancienne élue de Paris. Tous les acteurs économiques ont compris que les arguments que vous développez sont les mêmes que ceux de Bruno Le Maire en 2018. Il serait temps de réagir !
Je vous questionnais sur votre réactivité après ce premier échec. Vous répétez les arguments de 2018 ; nous attendions autre chose. Je sais que ce gouvernement ne s’intéresse pas à la région parisienne et au Grand Paris. C’est le premier gouvernement sous la Ve République qui traite aussi mal la région capitale ! (Très bien ! et applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)
instauration d’une « journée de l’agriculture », en remplacement du salon de l’agriculture
Mme la présidente. La parole est à Mme Françoise Férat, pour le groupe Union Centriste. (Applaudissements sur les travées du groupe UC.)
Mme Françoise Férat. Ma question s’adressait à M. le ministre de l’agriculture et de l’alimentation.
En 2018, la « ferme France » a conservé son statut de première puissance agricole européenne, avec une production estimée à 73 milliards d’euros et une contribution au PIB de 6,7 %.
Ces chiffres démontrent la compétitivité et la performance de l’agriculture française. Elle est la meilleure du monde en termes qualitatifs, nutritionnels et environnementaux !
En des temps normaux, nous devrions rencontrer, à cette période de l’année, les agriculteurs de nos territoires au salon de l’agriculture, à la porte de Versailles. À défaut, cette année sont proposées des journées sur tout le territoire ! Les années suivantes ne ressembleront pas à 2021, et c’est heureux.
C’est pourquoi, avec mes collègues du groupe Union Centriste, nous demandons simplement et symboliquement la création d’une journée nationale de l’agriculture. Une date au mois de juin semble convenir, si j’en crois les demandes qui m’ont été faites.
Évidemment et je me permets d’insister sur ce point, cette demande ne doit pas masquer les critiques dirigées contre la mauvaise application de la loi pour l’équilibre des relations commerciales dans le secteur agricole et alimentaire et une alimentation saine, durable et accessible à tous, dite Égalim, ou les dégâts de la grippe aviaire, pour n’en citer que quelques-unes. Il s’agit bien au contraire de valoriser les métiers de l’agriculture !
Cette journée permettra aux acteurs de la filière de mettre en valeur la spécificité des territoires et les nouvelles techniques plus durables. Elle doit permettre aux citoyens de connaître les femmes et les hommes passionnés qui nourrissent la population !
Il s’agira d’un geste fort qui sortira le secteur agricole de son sentiment de découragement et marquera la considération que l’ensemble du pays doit montrer à nos paysans. Je compte sur M. le ministre de l’agriculture pour répondre favorablement à cette demande. (Applaudissements sur les travées du groupe UC.)
Mme la présidente. La parole est à M. le secrétaire d’État, porte-parole du Gouvernement.
M. Gabriel Attal, secrétaire d’État auprès du Premier ministre, porte-parole du Gouvernement. Madame la sénatrice Françoise Férat, je vous prie de bien vouloir excuser l’absence de mon collègue Julien Denormandie, ministre de l’agriculture et de l’alimentation, qui est retenu à l’Assemblée nationale pour une audition et qui aurait aimé vous répondre.
Nous devrions en effet en ce moment vivre un très grand moment pour notre pays, qui se reproduit chaque année, je veux parler du salon de l’agriculture. Ce moment manque aux élus, aux responsables politiques, aux agriculteurs, mais il manque aussi à tous les Français, car il permet de rappeler notre attachement et notre soutien à la filière agricole dans notre pays.
Nous aimerions particulièrement qu’il puisse avoir lieu, cette année, car, si depuis un an les Français ont pu traverser la crise et les confinements avec de quoi se nourrir, c’est parce que, dans notre pays, les agriculteurs ne comptent pas leurs heures ni leur mobilisation pour nourrir nos concitoyens.
Oui, nous devons les soutenir ! Nous les soutenons depuis 2017, notamment grâce à la loi Égalim, les circuits courts ou le plan de relance, lequel prévoit 1,2 milliard d’euros pour l’agriculture, ou encore grâce aux négociations à Bruxelles qui permettent maintenant que 99 % des aides de la politique agricole commune, la PAC, soient versées dans les temps.
Néanmoins, vous avez raison, madame la sénatrice, il faut aussi faire connaître nos agriculteurs et leur métier. C’est la raison pour laquelle mon collègue ministre de l’agriculture m’indique plusieurs éléments qui, je le crois, répondront à votre suggestion et proposition.
D’abord, le Centre national des expositions et concours agricoles organisera au printemps prochain la semaine française de l’agriculture, avec des échanges et des conférences.
Ensuite, les journées nationales de l’agriculture se dérouleront au mois de juin prochain. Elles permettront aux Français, comme vous le souhaitez, de visiter des exploitations et de saisir la réalité du métier d’agriculteur.
Enfin, chacune et chacun doit rappeler, comme Julien Denormandie l’a encore fait devant vous la semaine dernière, le rôle absolument essentiel que jouent nos agriculteurs dans notre pays. Je vous remercie, au nom du Gouvernement, de l’avoir fait ici. (M. François Patriat applaudit.)
M. François Bonhomme. C’est un commentaire de commentaire !
Mme la présidente. La parole est à Mme Françoise Férat, pour la réplique.
Mme Françoise Férat. Monsieur le secrétaire d’État, je ne suis pas certaine d’avoir bien compris. Vous parlez de journées de l’agriculture, j’évoquais une journée nationale de l’agriculture… (Applaudissements sur les travées du groupe UC.)
réforme de l’assurance chômage
Mme la présidente. La parole est à Mme Frédérique Puissat, pour le groupe Les Républicains. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)
Mme Frédérique Puissat. Ma question s’adresse à Mme la ministre du travail, de l’emploi et de l’insertion.
Madame la ministre, vous avez fait le choix de poursuivre la discussion avec les partenaires sociaux sur la réforme de l’assurance chômage et nous ne pouvons que vous en féliciter.
La question de la temporalité et des réformes successives sur ce dossier se pose. La crise économique ne gomme pas le contexte dans lequel nous nous trouvons.
Le contexte de gouvernance avec les partenaires sociaux est complexe, cela a été rappelé, non pas du fait de ces derniers, mais bien en raison des négociations désastreuses du gouvernement d’Édouard Philippe sur ce sujet.
Par vos réformes, ce contexte tend à rendre le service public de l’emploi plus dépendant de la conjoncture économique, ce qui dessine des perspectives financières extrêmement incertaines pour Pôle emploi en 2022.
Nous vous tendions la main en proposant que le document de cadrage adressé aux partenaires sociaux sur ce sujet fasse l’objet d’une discussion au Parlement, ce qui a été balayé d’un revers de manche par le gouvernement précédent.
Il s’agit enfin d’un contexte incertain sur l’état réel du marché du travail et de certains secteurs.
Mes questions sont donc au nombre de trois.
Pensez-vous que les discussions d’hier vont renouer les liens et faciliter le dialogue entre les partenaires sociaux sur la réforme de l’assurance chômage ?
Ne pensez-vous pas que, pour cette réforme, il faille accepter de travailler davantage avec le Parlement, les régions et les départements, avant la publication d’un décret qui gravera dans le marbre les futures règles d’indemnisation des années à venir ?
Ne faut-il pas, au regard de la conjoncture, envisager des solutions à géométrie variable selon les branches ou les secteurs géographiques, qui seront sans doute touchés de façon différenciée les uns des autres ? (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)
Mme la présidente. La parole est à Mme la ministre du travail, de l’emploi et de l’insertion.
Mme Élisabeth Borne, ministre du travail, de l’emploi et de l’insertion. Madame la sénatrice Frédérique Puissat, comme vous, je suis attachée au dialogue social et je suis convaincue que les partenaires sociaux jouent un rôle essentiel depuis le début de la crise. C’est la raison pour laquelle, au cours des six derniers mois, j’ai écouté les propositions et les observations formulées par les uns et les autres. C’est ainsi que nous avons construit la réforme que j’ai présentée hier.
Par exemple, en réponse aux observations des organisations syndicales, nous avons fait le choix de décaler au 1er juillet prochain la mise en œuvre de cette réforme, au moment où notre stratégie vaccinale sera pleinement montée en puissance, avec des impacts positifs du point de vue économique et social. Nous avons également choisi de maintenir l’ouverture des droits au bout de quatre mois, comme c’est le cas aujourd’hui, tant que la situation du marché du travail n’est pas revenue à la normale.
Ces clauses de retour à meilleure fortune, que nous avons introduites, me semblent constituer une avancée importante. Elles répondent à une considération de bon sens (Exclamations sur les travées du groupe CRCE.), à savoir que les paramètres de l’assurance chômage doivent pouvoir s’adapter pour tenir compte de la situation du marché du travail. En outre, vous l’avez vu, nous avons instauré un plancher pour éviter les allocations trop basses, comme les organisations syndicales nous le demandaient.
Par ailleurs, pour répondre également aux inquiétudes des organisations patronales, nous avons aménagé le dispositif de bonus-malus, afin que les périodes « atypiques » – l’année 2020 et le début de l’année 2021 – n’entrent pas en compte dans le calcul de ce bonus-malus et que les secteurs les plus affectés par la crise ne soient pas concernés.
C’est cette écoute permanente des organisations patronales et syndicales qui nous a permis d’élaborer la réforme présentée hier. Par ailleurs, nous devons ouvrir, avec les partenaires sociaux, une discussion sur la gouvernance de l’assurance chômage, laquelle doit permettre à chacun – État, partenaires sociaux, Parlement – de trouver toute sa place.
Mme la présidente. La parole est à Mme Frédérique Puissat, pour la réplique.
Mme Frédérique Puissat. Madame la ministre, je ne sais pas si vous êtes « une femme de gauche », pour reprendre les termes de Mme Cécile Cukierman (Exclamations sur les travées du groupe CRCE.), mais, en tout état de cause, nous sommes nombreux à considérer que les conditions d’un dialogue serein avec les partenaires sociaux n’ont pas été réunies, du moins sous le gouvernement d’Édouard Philippe. Il est vrai que, pour ce qui vous concerne, vous avez cherché à revoir la copie, mais, sur la forme, cette copie n’était pas la bonne.
Les territoires ne peuvent se satisfaire d’une réforme qui les affectera. Les départements et les régions n’ont pas été associés à cette réforme, non plus que le Parlement. Les partenaires sociaux ont le sentiment d’une réforme excessivement verticale. Bref, le rendez-vous social est manqué.
Il faut dire que le calendrier suivi était peut-être davantage celui de l’élection présidentielle… (Très bien ! et applaudissements sur les travées des groupes Les Républicains et sur quelques travées du groupe SER. – Mme Michelle Gréaume applaudit également.)
fléchage de l’épargne vers la relance de l’économie
Mme la présidente. La parole est à M. Thierry Cozic, pour le groupe Socialiste, Écologiste et Républicain. (Applaudissements sur des travées du groupe SER.)
M. Thierry Cozic. Ma question s’adresse à M. le ministre de l’économie, des finances et de la relance.
Toutes les guerres ont leur trésor, paraît-il ; 200 milliards d’euros, c’est le montant du surcroît d’épargne qui sera accumulé, à la fin de l’année, dans notre pays, soit près de 8 % du PIB.
Réinjectée dans l’économie, cette épargne inhabituelle permettrait de compenser les effets de la pandémie et d’assurer un véritable rebond de l’activité. Ces sommes portent en elles toute l’iniquité de cette crise : sans surprise, 70 % du surcroît de l’épargne est le fait des 20 % des ménages les plus riches en France.
L’argent n’est pas fait pour être entassé, il est fait pour circuler. Les tergiversations du Gouvernement sur la question coûtent cher à la France !
En matière de libéralisation de l’épargne, la confiance est cardinale. En ce sens, les atermoiements sur la politique vaccinale ne sont malheureusement pas de nature à restaurer cette confiance, dont nous avons tant besoin.
Je n’appelle pas à toucher à l’épargne de précaution accumulée par nos concitoyens les plus modestes, mais je vous demande de mettre à contribution ceux pour qui la crise a permis cette accumulation.
Rétablir l’ISF pour contribuer à l’effort de solidarité ? (Exclamations sur les travées du groupe Les Républicains.) C’est non ! Taxer l’épargne des plus aisés pour relancer l’économie ? (Nouvelles exclamations sur les mêmes travées.) Encore non ! En refusant cela, vous actez votre renoncement à faire contribuer ceux pour qui la crise a été synonyme d’enrichissement. (Voilà ! sur les travées du groupe Les Républicains.) Une mobilisation par l’impôt permettrait d’instaurer une répartition plus égalitaire de l’effort de relance.
Le virus se propage sur un terrain déjà miné par les inégalités ; celles-ci n’ont cessé de se creuser dans des proportions inédites. Comment comptez-vous mobiliser ce fonds de guerre, thésaurisé par les citoyens les plus aisés, afin qu’un embryon de justice fiscale puisse enfin voir le jour dans votre quinquennat ? Il vous reste encore un an. Rien n’est jamais trop tard… (Applaudissements sur les travées du groupe SER.)
Mme la présidente. La parole est à Mme la secrétaire d’État chargée de l’économie sociale, solidaire et responsable.
Mme Olivia Gregoire, secrétaire d’État auprès du ministre de l’économie, des finances et de la relance, chargée de l’économie sociale, solidaire et responsable. Monsieur le sénateur Cozic, vous m’interrogez sur le fléchage de l’épargne vers la relance de l’économie, sujet sur lequel le Gouvernement est mobilisé depuis 2017.
À partir de 2018 – vous vous en souvenez, je n’en doute pas –, Laurent Saint-Martin, Amélie de Montchalin et moi-même avions, à l’Assemblée nationale, lancé le grand rendez-vous de l’investissement productif. Je suis sûre que vous aviez suivi cela de très près.
M. François Bonhomme. C’est sûr !
Mme Olivia Gregoire, secrétaire d’État. Vous l’avez rappelé, aujourd’hui, à peu près 200 milliards d’euros d’épargne sont disponibles. Vous parlez de trésor, mais c’est surtout l’argent des Français. Notre objectif est clair : que cette épargne serve au financement de l’économie réelle, de nos entreprises. C’est dans l’intérêt des épargnants – cela leur rapporte de la rentabilité, dans un contexte de taux bas –, mais aussi, voire surtout, dans celui de nos entreprises, qui ont toujours besoin de ces ressources pour investir, consolider leurs fonds propres et repartir.
Nous visons cet objectif depuis maintenant quatre ans. Nous avons intensifié cette action avec la relance ; le label « relance », que nous avons lancé au mois d’octobre 2020, permet aux épargnants d’identifier les fonds qui ciblent tout particulièrement les investissements en fonds propres et quasi-fonds propres, dans les entreprises françaises, notamment dans les PME et les entreprises de taille intermédiaire.
C’est un véritable succès, avec près de 150 fonds labellisés et une cible de 25 milliards d’euros d’encours, qui seront investis à 70 % dans les entreprises françaises. Par ailleurs, 60 % de ces fonds sont accessibles aux épargnants particuliers qui souhaitent donner du sens à leur épargne ; ils sont de plus en plus nombreux.
Enfin, nous avons mis en œuvre des mécanismes pour flécher l’épargne vers des entreprises à impact et nous incitons de plus en plus chaque Français à mettre son « trésor », son épargne, au service du développement de cette économie d’avenir. (M. François Patriat applaudit.)
Mme la présidente. La parole est à M. Thierry Cozic, pour la réplique.
M. Thierry Cozic. Madame la secrétaire d’État, les bas de laine et les matelas de certains de nos concitoyens sont remplis. De grâce, épargnez-nous vos dispositifs incantatoires, qui ne touchent qu’une infime partie de nos concitoyens…
Mme Sophie Primas. Les « riches » ?
M. Thierry Cozic. … et libérez équitablement l’épargne dans notre économie !
lutte contre les violences entre bandes rivales dans l’Essonne
Mme la présidente. La parole est à M. Jean-Raymond Hugonet, pour le groupe Les Républicains. (Applaudissements sur les travées des groupes Les Républicains.)
M. Jean-Raymond Hugonet. Ma question s’adresse à M. le ministre de l’intérieur.
Lillibelle et Toumani, 14 ans, sont morts dans l’Essonne, lundi et mardi derniers, respectivement à Saint-Chéron et à Boussy-Saint-Antoine, deux charmantes et paisibles bourgades, à la suite d’affrontements entre jeunes. C’est l’horreur absolue…
« Rien de bien nouveau », me direz-vous, puisque l’amnésie collective ou le parfum de bonne conscience nous font par exemple passer sous silence le meurtre du jeune Romuald, 14 ans lui aussi, lâchement abattu en pleine rue, à Courcouronnes, le 8 novembre 2000, victime gratuite d’une vieille histoire d’impayé entre deux familles sur fond de rivalités entre quartiers.
Notre pays regorge de sociologues éminemment compétents. Nous croulons sous les analyses pertinentes et détaillées du phénomène de violences en bandes, gangs ou autres tribus. Bien sûr, le sujet est extrêmement complexe ; bien sûr, la prévention ; bien sûr, l’accompagnement…
Cependant, quand répondrez-vous enfin à l’appel de détresse des élus de l’Essonne, obligés, par exemple, de quémander les crédits de leur plan de prévention spécialisée ? Quand donnerez-vous enfin aux communes les moyens de recomposer des quartiers à vivre, plutôt que de les matraquer aveuglément avec l’article 55 de la loi SRU, la loi relative à la solidarité et au renouvellement urbains ?
Mme Sophie Primas. Absolument !
M. Jean-Raymond Hugonet. Quand calquerez-vous enfin l’évolution des effectifs de police et de gendarmerie sur la croissance démographique exponentielle d’un département comme le nôtre, ce que nous demandons en vain depuis des années ? J’en veux pour preuve la demande, le 26 janvier 1989, du sénateur communiste Robert Vizet, auquel je veux rendre hommage ici,…
Mme Cécile Cukierman. Bravo !
M. Jean-Raymond Hugonet. … qui attirait déjà l’attention du ministre de l’intérieur de l’époque, comme je le fais aujourd’hui, sur l’insuffisance des effectifs de police et de gendarmerie dans le département de l’Essonne ! C’était il y a trente-deux ans ! (Bravo ! et applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)
Mme la présidente. La parole est à Mme la ministre déléguée chargée de la citoyenneté. (Ah ! sur les travées du groupe Les Républicains.)
Mme Marlène Schiappa, ministre déléguée auprès du ministre de l’intérieur, chargée de la citoyenneté. Monsieur le sénateur Jean-Raymond Hugonet, je représente le ministre de l’intérieur, Gérald Darmanin, que vous interrogez.
Vous dressez un constat important sur la question des violences, notamment en bandes, dans l’Essonne. Ce constat de violences inacceptables, nous le partageons évidemment, et le Gouvernement est à pied d’œuvre pour y répondre.
Vous évoquiez certains faits de violence dans l’Essonne. Je veux le rappeler, dans l’année écoulée, quatre-vingt-onze événements de cet ordre, liés à des questions de violence et à des bandes, ont eu lieu dans l’Essonne. Sans doute, tous n’ont pas le même écho médiatique – j’adresse d’ailleurs mes pensées aux familles des victimes –, mais, pour autant, aucun de ces événements n’est acceptable.
On observe, année après année, que les « belligérants » sont de plus en plus jeunes : nous avons maintenant affaire à des jeunes âgés, en moyenne, de 13 à 17 ans, qui causent parfois des blessures très graves, entraînant des effets irréversibles.
Il arrive souvent que ces drames soient évités de peu, grâce à l’intervention des forces de sécurité intérieure, qui – vous avez raison de le rappeler – accomplissent un travail difficile, notamment dans certains quartiers ; je veux les en remercier.
Face à ce constat, le Gouvernement agit : un certain nombre de dispositifs ont été mis en œuvre, de façon opérationnelle. Pour ma part, monsieur le sénateur, je ne veux pas opposer la prévention à la répression ou à l’action. Notre action se compose, de manière indissociable, de prévention et de répression.
D’abord, il y a une action répressive et judiciaire, grâce au travail de coopération instauré avec le parquet d’Évry, au sein de la cellule de lutte contre les trafics et avec le référent de lutte contre les bandes, nommé sous l’autorité du parquet dans chaque circonscription de sécurité. Grâce à cela, des procédures judiciaires pour participation à un attroupement armé ont été lancées, comme le recours systématisé à l’exploitation vidéo.
Par ailleurs ont été mis en place des dispositifs d’alerte précoce, pour assurer une intervention rapide des forces de sécurité intérieure. Cette procédure a été déployée et donne d’ores et déjà des résultats probants, notamment dans le secteur de Corbeil-Essonnes où, très récemment, certains affrontements ont pu être évités grâce à des interpellations préventives d’acteurs qui s’apprêtaient à « en découdre ».
En outre, la logique de prévention est évidemment renforcée en amont, avec les acteurs locaux, les élus, les chefs d’établissement scolaire.
Mme la présidente. Veuillez conclure, madame la ministre.
Mme Marlène Schiappa, ministre déléguée. En ce sens, en lien avec le garde des sceaux et le ministre de l’éducation nationale et sous l’autorité du Premier ministre, un travail a été lancé. Ainsi, au mois de mai 2021, le nouveau plan de lutte contre les bandes sera annoncé par le ministère de l’intérieur. (M. François Patriat applaudit.)
Mme la présidente. La parole est à M. Jean-Raymond Hugonet, pour la réplique.
M. Jean-Raymond Hugonet. Encore un plan, madame la secrétaire d’État ! Encore des confettis de paroles ! Nous ne nous satisfaisons plus des mots, nous voulons des actes, nous voulons des agents supplémentaires, que nous demandons depuis trente-deux ans ! Réveillez-vous ! (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)
utilisation d’une onzième dose possible avec les flacons des vaccins moderna
Mme la présidente. La parole est à M. Jean-François Longeot, pour le groupe Union Centriste. (Applaudissements sur les travées du groupe UC.)
M. Jean-François Longeot. Ma question s’adresse à M. le ministre des solidarités et de la santé.
Si, à mesure qu’elle dure, la crise sanitaire soulève chaque jour son lot de questions, une question essentielle se pose : comment rattraper notre cap vaccinal ? Alors que l’on cherche à accélérer la campagne de vaccination en France, je tiens à vous interroger sur les doses fantômes dont notre pays semble se priver.
En effet, selon de nombreux professionnels de santé, alors que seules dix doses sont initialement prévues dans les flacons des vaccins Moderna, il serait possible d’en tirer très facilement une onzième dose. Il en allait d’ailleurs de même pour le vaccin Pfizer, pour lequel une sixième dose a finalement été autorisée, tandis que cinq doses seulement étaient prévues.
Ainsi, sous réserve de certaines précautions, il serait possible de vacciner plus de personnes avec la même quantité de vaccin. Dans une commune de 4 000 habitants – j’ai fait le tour de certaines communes de mon département pour voir comment se passaient les vaccinations –, cela correspond à environ trois doses par jour, soit quinze par semaine. Après des tensions d’approvisionnement, on imagine aisément le gaspillage que cela représente à l’échelle nationale et le potentiel inutilisé qui pourrait profiter à cette stratégie de vaccination.
Les autorités médicales évoluent sans cadre et risquent parfois des poursuites si elles utilisent cette onzième dose. Aussi, quelle réponse leur apporter face à ce paradoxe insupportable ? Pourquoi ne pas utiliser ces doses supplémentaires pour des patients ayant déjà été infectés par le virus et pour lesquels la Haute Autorité de santé recommande l’utilisation d’une seule dose ? (Applaudissements sur les travées du groupe UC.)
Mme la présidente. La parole est à Mme la ministre déléguée chargée de l’autonomie.