M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 232.

(Lamendement est adopté.)

M. le président. L’amendement n° 17 rectifié, présenté par Mme Doineau, MM. Longeot, Détraigne, Louault, Bonnecarrère et Mizzon, Mmes Sollogoub, Saint-Pé, Férat, Vermeillet, Jacquemet, Perrot, Dindar et Gatel, MM. Canevet, Lafon, Delahaye, Folliot, Moga, Vanlerenberghe, Chauvet, Delcros, Kern et Le Nay et Mmes Billon et Catherine Fournier, est ainsi libellé :

Après l’alinéa 209

Insérer un alinéa ainsi rédigé :

Un nouveau programme prioritaire de recherche sur les zoonoses et les maladies vectorielles à tiques sera également créé afin de consacrer des crédits spécifiques à la lutte contre ces maladies infectieuses en pleine expansion.

La parole est à Mme Élisabeth Doineau.

Mme Élisabeth Doineau. Je suis une récidiviste ! La pédagogie est l’art de la répétition…

À l’automne dernier, lors de l’examen du projet de loi de finances, j’ai défendu un amendement visant à octroyer des fonds supplémentaires à la recherche sur la maladie de Lyme. Il a été adopté au Sénat grâce au soutien de cent cinq sénateurs, toutes tendances politiques confondues, mais le Gouvernement et l’Assemblée nationale s’y sont opposés.

Peu avant le confinement, j’ai adressé un courrier cosigné par cent quarante sénateurs à Mme Kyriakídou, commissaire européenne à la santé et à la politique des consommateurs, afin d’obtenir des financements pour soutenir la recherche, notamment en faveur d’un vaccin contre la maladie de Lyme.

L’incidence de la maladie ne cesse d’augmenter : de 26 000 nouveaux cas en 2014, nous sommes passés à 67 000 en 2018 en France.

La crise sanitaire déclenchée par l’épidémie que nous connaissons actuellement nous impose d’accroître en urgence les travaux de recherche sur les zoonoses et les maladies vectorielles à tiques, ainsi que les moyens qui y sont consacrés. Il existe plus de deux cents types connus de zoonoses.

Elles sont un problème majeur de santé publique dans le monde entier, en raison de notre relation étroite avec les animaux dans différents contextes – l’agriculture, les animaux domestiques et notre environnement naturel. Les zoonoses représentent une forte proportion de l’ensemble des maladies infectieuses nouvellement recensées. Certaines d’entre elles, comme le nouveau coronavirus, ont le potentiel de provoquer des pandémies mondiales, dont les conséquences sanitaires, économiques et sociales sont sans précédent, comme on le voit aujourd’hui.

L’amendement que je défends vise donc à créer un nouveau programme prioritaire de recherche sur les zoonoses et les maladies vectorielles à tiques, afin de consacrer des crédits spécifiques à la lutte contre ces maladies infectieuses en pleine expansion.

Si je dépose continuellement ces amendements, c’est que je suis portée par des milliers de malades en souffrance, qui ne comprennent pas non plus que les médecins ne soient pas tous d’accord pour les prendre en charge.

Mes chers collègues, je vous demande donc, comme à mon habitude, d’être solidaires de cet amendement.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

Mme Laure Darcos, rapporteure. Mon avis ne vous surprendra pas, ma chère collègue, car je figure chaque fois parmi les premiers cosignataires de votre amendement. Je soutiens vraiment ce combat.

L’étude des maladies vectorielles à tiques a déjà été introduite à l’Assemblée nationale au paragraphe 75 du rapport annexé. Nous aurions préféré compléter ce paragraphe. Néanmoins, compte tenu de l’importance de cette problématique dans le contexte sanitaire actuel, l’avis de la commission est favorable.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Frédérique Vidal, ministre. Comme l’a dit Mme la rapporteure, l’étude de ces maladies figure déjà dans le rapport annexé, sans qu’il soit néanmoins précisé qu’un programme prioritaire de recherche sera mis en œuvre.

Les programmes prioritaires de recherche sont des actions financées par le programme d’investissements d’avenir, à l’issue d’un processus d’instruction et de validation ad hoc auquel le rapport annexé ne peut pas se substituer.

J’ai néanmoins pris l’engagement à l’Assemblée nationale de mettre en œuvre un tel programme de recherche sur ce sujet – j’y travaille avec le secrétariat général pour l’investissement, le SGPI –, mais je ne souhaite pas que cela apparaisse dans le rapport annexé. Non seulement cela n’aurait aucune portée. En outre, je ne peux pas m’engager pour le SGPI.

Je demande donc le retrait de cet amendement ; à défaut, j’émettrais un avis défavorable.

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 17 rectifié.

(Lamendement est adopté.)

M. le président. L’amendement n° 58 rectifié, présenté par Mmes S. Robert et Monier, MM. Kanner, Antiste et Assouline, Mme Lepage, MM. Lozach, Magner et Stanzione, Mme Van Heghe, M. Montaugé, Mme Artigalas, MM. Devinaz, Gillé, P. Joly et Merillou, Mme Préville, MM. Redon-Sarrazy, Sueur, Kerrouche, Pla, Michau et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, est ainsi libellé :

Après l’alinéa 232

Insérer deux alinéas ainsi rédigés :

De façon continue depuis les années 1970, la confiance que les Français placent dans la science est élevée. Les études, ponctuelles ou de long terme, convergent vers le même diagnostic : les Français ont une image positive des chercheurs et de la recherche, et estiment qu’il est prioritaire d’investir en la matière. Le pacte républicain avec la science demeure donc solide.

La loi n° 2013-660 du 22 juillet 2013 relative à l’enseignement supérieur et à la recherche appelait, pour la première fois, à promouvoir et développer les « interactions sciences-société » sous toutes leurs formes. Elle reconnaissait que ces interactions couvrent un continuum qui va des actions de diffusion de la culture scientifique vers le grand public jusqu’au développement de recherches participatives associant des chercheurs et des non chercheurs dans une démarche partagée. Il s’agira ainsi, sur la période 2021-2030, de structurer et soutenir l’ensemble de ces interactions.

La parole est à Mme Sylvie Robert.

Mme Sylvie Robert. Les Français font confiance à la recherche, dont ils ont une très bonne image.

La loi de 2013 avait déjà commencé à développer et à promouvoir les interactions sciences-société sous toutes leurs formes. Reconnaissez que ces interactions couvrent un continuum qui va de la diffusion de la culture scientifique auprès du grand public jusqu’au développement de recherches participatives, en associant des chercheurs et des non-chercheurs dans une démarche partagée.

Cet amendement vise à structurer l’ensemble de ces interactions pour la période 2021-2030.

Les Français ont confiance dans la science, ils demandent d’ailleurs que l’État investisse prioritairement dans la recherche. Une politique publique de recherche actualisée du XXIe siècle ne peut donc occulter, aujourd’hui, le fait que la société dans son ensemble est une véritable source de collaboration souhaitée et souhaitable. Une politique publique a vocation à encourager et à soutenir ces coopérations et ces interactions.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

Mme Laure Darcos, rapporteure. On ne peut que partager cet objectif, ma chère collègue. Au terme « interaction », j’aurais toutefois préféré celui, plus neutre, de « relation », comme je vous l’ai dit ce matin lors de la réunion de la commission, car il marque mieux selon moi les liens entre la recherche et la société.

J’émets néanmoins un avis favorable.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Frédérique Vidal, ministre. Madame la sénatrice, je suis quelque peu étonnée que vous considériez que le projet de loi occulte le rapport sciences-société.

Il est en effet évoqué plusieurs fois dans le rapport annexé : aux alinéas 237, 242 et 270, qui traitent de l’innovation, ainsi qu’aux alinéas 39 à 41 et 232 à 260, qui abordent la diffusion de la culture scientifique et technique.

Par ailleurs, les articles 12, 16 quinquies et 26 du projet de loi traitent également explicitement de la culture scientifique et du lien sciences-société. L’engagement est pris de consacrer au moins 1 % du budget de l’ANR au partage de la culture scientifique.

Je tenais à préciser que nous avons évidemment traité cette question essentielle, vous avez raison de le dire, pour la complétude du projet de loi. Le rapport annexé précise, me semble-t-il, suffisamment de choses. Je m’en remettrai donc à la sagesse du Sénat sur cet amendement.

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 58 rectifié.

(Lamendement est adopté.)

M. le président. L’amendement n° 200, présenté par Mme de Marco, MM. Dossus et Benarroche, Mme Benbassa, MM. Dantec, Fernique, Gontard, Labbé et Parigi, Mme Poncet Monge, M. Salmon et Mme Taillé-Polian, est ainsi libellé :

Alinéa 235

Supprimer cet alinéa.

La parole est à M. Thomas Dossus.

M. Thomas Dossus. L’alinéa 235 du rapport annexé prévoit la création d’un réseau « Science et médias », destiné à « permettre la mise en contact rapide entre journalistes et chercheurs » dans un but de diffusion de la culture scientifique.

Nous comprenons les ambitions et les objectifs de cette mesure, qui sont louables : il s’agit d’inventer des moyens pour promouvoir la méthode scientifique, de lutter contre les fake news et les théories du complot et de mieux armer intellectuellement la population pour y faire face. Toutefois, c’est la méthode retenue qui nous pose problème.

En effet, de tels centres existent déjà ailleurs dans le monde. Le premier Science Media Centre a ouvert au Royaume-Uni en 2002 et a fait depuis lors des émules en Australie, en Nouvelle-Zélande, au Canada et au Japon.

Le principe est simple : ces centres sont des relais entre la communauté scientifique, d’une part, et les médias et la société civile, d’autre part, pour fournir des éclairages sur certains sujets.

Au Royaume-Uni, ce centre ne fait pas l’unanimité. Un article paru dans Nature en 2013 souligne que de nombreux acteurs considèrent qu’il « favorise une couverture médiatique sans contradiction en fournissant des informations prémâchées aux journalistes », qu’il « promeut la science de manière trop agressive » et qu’il fait souvent « sien les points de vue de l’industrie », au point d’être parfois appelé « l’agence de presse scientifique ».

Mes chers collègues, ce dont la méthode scientifique a besoin dans notre société, c’est du débat et de la coopération, pas de la verticalité.

Ces approches « verticales » de pédagogie forcée et de vulgarisation agressive ne fonctionnent pas avec ceux qui doutent de tout, y compris de la science. Ce n’est pas en apportant la lumière « sacrée » de la vérité de la science, depuis le haut du piédestal d’une énième institution ou d’un mandarin que nous parviendrons à ramener ces personnes dans un débat public raisonnable. C’est d’ailleurs précisément le rejet de tout ce qui provient de l’État, des élites ou des institutions qui conforte ces publics dans leurs positions.

Il nous faut inventer de nouvelles formes de débats scientifiques, et le chemin sera long. Ce dernier passe par l’éducation, par la culture, par la coopération avec nos institutions, par la forme de nos institutions, par la manière dont nous faisons société. Mais il ne passe pas par un Centre de promotion de la science officielle, qui sera plutôt contre-productif.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

Mme Laure Darcos, rapporteure. L’amélioration de la qualité de l’information scientifique est une condition essentielle à la préservation du lien de confiance entre les citoyens et les chercheurs.

Or elle ne sera possible que par une meilleure connaissance réciproque entre les journalistes et les chercheurs. Tel est bien l’objectif du projet sciences et média, qui repose sur une mise en réseau et non sur un système vertical, contrairement à ce que vous affirmez, mon cher collègue, et contrairement à ce qu’indique l’objet de l’amendement.

J’émets donc un avis défavorable.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Frédérique Vidal, ministre. Je précise que l’objectif est bien d’avoir sur tous les territoires – je pense que c’est important et que le Sénat l’appréciera particulièrement – des ressources au sein des enseignants-chercheurs, auxquels les médias pourraient s’adresser pour nourrir le débat public, pour lutter contre le désordre informationnel et pour permettre à chacun de comprendre le monde qui l’entoure et d’y prendre part.

Participer à ces réseaux pourra faire partie de ce qui permettra aux chercheurs et aux enseignants-chercheurs de progresser dans leur carrière.

Je rejette complètement le qualificatif de « vertical », puisque cela sera construit avec les chercheurs et les enseignants-chercheurs et les usagers sur le terrain.

J’ajoute que cette initiative ne relève en rien d’une pédagogie d’État. Mon ministère n’est pas le ministère de la propagande, c’est celui des chercheurs, c’est celui qui fait du doute méthodique et de la démarche scientifique leur boussole quotidienne.

Enfin, je suis surprise que vous vous fassiez le porte-voix d’une association qui a refusé d’être auditionnée par l’Assemblée nationale au mois d’août dernier.

Le Gouvernement émet donc un avis défavorable.

M. le président. La parole est à M. Pierre Ouzoulias, pour explication de vote.

M. Pierre Ouzoulias. J’aimerais présenter une solution alternative qui devrait être soutenue par votre ministère ; je veux parles du média en ligne The Conversation, que je vous invite à lire comme je le fais tous les matins.

C’est un média totalement libre, gratuit, sans aucune publicité et qui fonctionne grâce aux subventions de soixante établissements d’enseignement supérieur et de recherche. Sa caractéristique, c’est que ce sont des chercheurs qui écrivent les articles, donc des chercheurs qui deviennent journalistes et qui, chaque matin, vous expliquent l’actualité de leurs recherches avec des mots très simples. Je pense que ce type d’initiative devrait être soutenu par votre ministère.

Ainsi, je regrette que, pour ce média, les subventions publiques ne représentent que 10 % des frais de fonctionnement. Madame la ministre, il faudrait faire quelque chose pour les aider. J’invite mes collègues à aller voir ce média : c’est quelque chose de tout à fait exceptionnel et qui doit être encouragé.

M. le président. La parole est à M. Joël Labbé, pour explication de vote.

M. Joël Labbé. Cher Pierre Ouzoulias, je ne connais pas encore ce média, mais je vais m’y intéresser dès demain matin au plus tard.

Madame la ministre, il ne s’agit pas de vous faire un procès d’intention. Justement, les intentions affichées via la création de ce Science Media Centre paraissent louables en ces temps de crises multiples. La nécessité de penser la médiation scientifique paraît en effet très urgente, alors que nos sociétés sont face à des choix techniques de plus en plus nombreux et complexes.

Toutefois, la solution de centres science et médias, proposée dans le texte de loi, n’est pour nous pas la bonne. On peut malheureusement craindre, avec le dispositif prévu par le texte, une instrumentalisation de la science, car la référence dans le texte de loi aux exemples étrangers est particulièrement malvenue, notamment la référence au Science Media Centre du Royaume-Uni, est éminemment problématique.

Une enquête fouillée retracée dans le livre Les Gardiens de la raison de Stéphane Foucart sur le Science Media Centre du Royaume-Uni montre les processus de désinformation scientifique dont se rend coupable l’agence, au bénéfice, entre autres, de certains de ses donateurs. Ainsi, les experts mis en avant par cette agence avaient pour certains des conflits d’intérêts avérés. De plus, une large partie d’entre eux n’était même pas des scientifiques de profession.

Citer ici cet exemple est-il une maladresse ? On peut l’espérer, mais la rédaction de l’article ne permet pas de lever les doutes.

Le risque est ici la création d’un groupe d’experts garants de la « bonne science », en capacité d’instrumentaliser les discours et l’autorité scientifique dans l’espace public.

Au contraire, les sciences doivent être plurielles, comme on l’a dit, madame la ministre. Plutôt que de créer un réseau d’experts, supposés légitimes, il convient de laisser s’exprimer une diversité de points de vue scientifique, permettant aux citoyens de se faire une opinion éclairée, par le biais de journalistes d’investigation qui sont aussi des professionnels et que l’on doit reconnaître.

On connaît les stratégies des grandes entreprises pour fabriquer du doute dans l’esprit des citoyens sur les sujets comme les OGM, ou le glyphosate.

M. le président. Mon cher collègue, il faut conclure !

M. Joël Labbé. Je termine, monsieur le président !

Dans ce contexte, le fait que le projet de loi proposé ici n’apporte aucune garantie sur le financement de ce réseau ni sur la gestion des conflits d’intérêts est éminemment problématique.

À l’heure où l’on traite d’« Amish »…

M. le président. Il faut vraiment conclure !

M. Joël Labbé. … et où l’on taxe d’obscurantistes les opposants à la 5G, nous soutenons avec force la suppression de ce dispositif.

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 200.

(Lamendement nest pas adopté.)

M. le président. L’amendement n° 155, présenté par M. Hingray et les membres du groupe Union Centriste, est ainsi libellé :

Alinéa 247

Supprimer les mots :

du type « Tous chercheurs »

La parole est à M. Jean Hingray.

M. Jean Hingray. Il s’agit d’un amendement de cohérence.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

Mme Laure Darcos, rapporteure. Favorable.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Frédérique Vidal, ministre. Favorable.

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 155.

(Lamendement est adopté.)

M. le président. L’amendement n° 64 rectifié, présenté par Mme Paoli-Gagin, MM. Guerriau, Chasseing, Capus, A. Marc, Menonville, Wattebled et Decool, Mme Mélot et MM. Lagourgue et Malhuret, est ainsi libellé :

I. – Alinéa 270, deuxième à dernière phrase

Supprimer ces phrases.

II. – Alinéa 342, première phrase

Supprimer les mots :

mise en place de « pôles universitaires d’innovation » performants,

La parole est à M. Jean-Pierre Decool.

M. Jean-Pierre Decool. Cet amendement vise à supprimer la création des pôles universitaires d’innovation. Il s’agit d’un ajout de complexité, certainement pas d’une simplification culturelle.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

Mme Laure Darcos, rapporteure. Le label « Pôle universitaire d’innovation » doit permettre de fluidifier sur un territoire donné les relations entre les acteurs de la recherche publique et ceux du monde économique, sans création de structure nouvelle.

La commission émet donc un avis défavorable.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Frédérique Vidal, ministre. Même avis.

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 64 rectifié.

(Lamendement nest pas adopté.)

M. le président. Je mets aux voix, modifié, l’ensemble constitué de l’article 1er et du rapport annexé.

(Larticle 1er et le rapport annexé sont adoptés.)

Rapport annexé
Dossier législatif : projet de loi de programmation de la recherche pour les années 2021 à 2030 et portant diverses dispositions relatives à la recherche et à l'enseignement supérieur
Article 2 bis

Article 2

I. – Les crédits de paiements des programmes budgétaires « Recherches scientifiques et technologiques pluridisciplinaires » (programme 172), « Recherche spatiale » (programme 193) et « Formations supérieures et recherche universitaire » (programme 150), hors contribution du titre 2 au compte d’affectation spéciale « Pensions » et déduction faite, pour le programme 193, du remboursement de la dette française à l’Agence spatiale européenne, évolueront comme suit entre 2021 et 2027, à périmètre constant, en écart par rapport aux montants inscrits en loi de finances initiale pour 2020 et indépendamment de l’accélération de la trajectoire prévue dès 2021 au bénéfice de l’Agence nationale de la recherche dans le cadre du plan de relance :

 

(En millions deuros courants)

Programme budgétaire

Crédits de paiement

2021

2022

2023

2024

2025

2026

2027

Programme 72

+ 700

+ 1400

+ 2000

+ 2500

+ 2900

+ 3300

+ 3755

Programme 193

+ 50

+ 100

+ 150

+ 210

+ 280

+ 330

+ 372

Incidence des mesures de la présente loi sur le programme 150

+ 350

+ 700

+ 1050

+ 1300

+ 1500

+ 1650

+ 1709

II. – Les financements de projets de recherche attribués par l’Agence nationale de la recherche bénéficieront d’un niveau d’engagement évoluant comme suit, en écart par rapport au montant inscrit en loi de finances initiale pour 2020 :

 

(En millions deuros courants)

2021

2022

2023

2024

2025

2026

2027

Autorisations d’engagement de l’Agence nationale de la recherche

+149

+293

+435

+577

+717

+859

+1 000

III. – Le Gouvernement présente chaque année au Parlement, préalablement au débat d’orientation des finances publiques, un rapport sur l’exécution du présent article, en vue, le cas échéant, de l’actualisation de cette programmation.

M. le président. La parole est à Mme Marie-Pierre Monier, sur l’article.

Mme Marie-Pierre Monier. Cet article planifie l’augmentation des crédits alloués au financement de la recherche jusqu’en 2027.

Comme toujours dans notre Haute Assemblée, le travail en commission a été intéressant et productif : je me réjouis, comme mes collègues du groupe socialiste, que nous ayons réduit la période de planification à une durée raisonnable, et l’augmentation des budgets prévus par l’article 2 peut être saluée, même si elle pourrait être plus importante, nous y reviendrons tout à l’heure.

Toutefois, avant d’examiner cet article dans le détail, je voulais vous faire part de mon sentiment global et de mon inquiétude.

Ce dont la recherche française a besoin, c’est avant tout de financements pérennes. La part de l’ANR et son augmentation sont importantes : elles annoncent un recours sans cesse plus important au financement par le biais d’appel à projets. En soi, le financement par appel à projets présente parfois des avantages, mais il ne peut pas devenir la règle : c’est un modèle incertain, insécurisant et trop chronophage pour nos chercheurs.

Pour reconstruire un service public fort de la recherche française, il faut sortir nos chercheurs de la quête perpétuelle de financement, en donnant des moyens pour la recherche fondamentale, en créant davantage de postes de titulaires en veillant à l’égalité de traitement entre toutes nos universités, nos laboratoires et nos centres de recherches, où qu’ils soient situés sur le territoire.

Nous avons les moyens de briller dans de nombreux domaines. Notre pays ne manque pas de femmes et d’hommes capables d’être à la pointe de la recherche, que ce soit en sciences physiques, en mathématiques, en biologie, en médecine, en philosophie, en histoire, en littérature, en sociologie ou en économie.

En outre, comment espérer que nos chercheurs puissent trouver des idées nouvelles pour répondre aux enjeux écologiques, économiques et sociaux auxquels nous devons faire face ?

Hier soir, dans cet hémicycle, nous avons eu des échanges animés pour savoir si nous devions ou non réintroduire les néonicotinoïdes dans le secteur de la betterave. Mais nous savons tous que l’une des parties du problème, c’est que nous n’avons pas suffisamment financé la recherche pour trouver des alternatives ! Et ce n’est qu’un exemple.

Le prix à payer pour retrouver le chemin de l’excellence et inventer des solutions nouvelles pour construire notre avenir, c’est de leur donner du temps. Nous savons, dans notre société en perpétuelle accélération, que cela a un coût important, mais le jeu en vaut la chandelle ! Et je crains, malheureusement, que ce texte ne suffise pas à atteindre cet objectif.

M. le président. La parole est à Mme Marie-Noëlle Lienemann, sur l’article.

Mme Marie-Noëlle Lienemann. Dans ce débat sur notre trajectoire budgétaire, je crois qu’il est important de souligner la nécessité d’accroître la trajectoire de création d’emplois, et d’emplois statutaires, c’est-à-dire stables.

En réalité, vous prévoyez, madame la ministre, 5 200 emplois sous plafond supplémentaires d’ici à 2030. Vous avez raison, c’est bien créer des emplois. Le seul problème, c’est qu’il y a eu tellement de reculs s’agissant des emplois de la recherche que cela ne compensera pas !

À titre d’exemple, au cours des dix dernières années, le CNRS a perdu à lui seul 3 000 emplois. Et, en sept ans, entre 2010 et 2018, le nombre d’enseignants-chercheurs a stagné, passant d’un peu plus de 50 000 à 50 700. Les effectifs d’étudiants et à l’université ont pendant ce temps-là augmenté de 14 %.

Vous le voyez bien, nous sommes dans une situation où, déjà, globalement, le nombre de chercheurs et d’enseignants-chercheurs a tellement diminué que l’accroissement que vous prévoyez ne nous remet pas à flot, sans compter que s’y ajoute toute une série de contractuels, qui développent une précarité qui ne nous paraît pas de bon augure pour faire de bons chercheurs.

J’entends bien l’argument selon lequel vous faites des efforts, alors que les autres n’en ont pas fait. Je suis d’accord, madame la ministre, mais la question centrale, c’est : « Est-ce qu’on remet la France à flot en capacité de recherche ou est-ce qu’on limite la casse en continuant le déclin ? » Car c’est cela, le risque qui nous menace !

Je ne dis pas que c’est écrit d’avance, mais, ce qui est clair, c’est que sans un sursaut aujourd’hui sur les trajectoires d’emplois et sur les moyens budgétaires, il y a des risques de déclin pour notre nation, alors même que l’on a les moyens d’un sursaut.

J’entends bien les problèmes budgétaires, mais j’observe que, dans certains secteurs, il n’y a pas de problème – j’ai parlé de certains avantages fiscaux ici ou là – et que dans d’autres, ce serait irréaliste, pas raisonnable. Pour ma part, je crois que ce qui serait irréaliste et pas raisonnable, ce serait de ne pas donner le coup de collier qui s’impose, en termes d’emplois et de budget, au profit de la recherche nationale.

M. le président. La parole est à M. Julien Bargeton, sur l’article.

M. Julien Bargeton. Premièrement, oui, nous assumons de défendre un modèle mixte. Le financement pérenne des structures de laboratoire n’est pas contradictoire avec le modèle de l’appel à projets.

C’est un choix, et Mme la ministre a rappelé les proportions. Nous sommes tout de même très loin d’avoir une proportion énorme d’appels à projets, qui deviendraient soudain majoritaires… En revanche, nous, nous assumons un modèle qui soit mixte, sans approche idéologique de ce sujet.

L’appel à projets, en soi, n’est pas délétère ; le partenariat public-privé, en soi, n’est pas néfaste. Évidemment, il ne doit pas être l’alpha et l’oméga et il faut augmenter les moyens, d’ailleurs, pour les deux, puisque du retard a été accumulé, comme nous ne cessons de le dire.

Deuxièmement, comme vous avez eu d’ailleurs l’honnêteté de le dire, en matière d’emploi, de mauvaises décisions ont été prises, que l’on ne peut pas rattraper rapidement, même si vous voulez aller plus loin.

On est sans cesse dans ce paradoxe de reprocher un état de fait précisément au moment où le Gouvernement cherche à le combler. Certes, peut-être ce rattrapage ne va-t-il pas assez rapidement selon vous. Mais vous avez reconnu qu’il y avait eu des coupes dans les effectifs de la recherche et que, aujourd’hui, c’est l’inverse qui se produisait.

Ne reprochons pas ce qui s’est produit au moment où l’on veut transformer la trajectoire. C’est un paradoxe qui va être rappelé à plusieurs reprises dans ce débat, et j’en suis désolé, mais je dois tout de même le dire, comme je l’ai dit pour la partie budgétaire, ce n’est pas au moment où l’on veut corriger le tir que l’on doit revenir sur quelque chose qui n’avait pas été dénoncé avec assez de force à ce moment-là.