M. le président. La parole est à M. Didier Marie, sur l’article.
M. Didier Marie. Le périmètre d’application de cet article nous semble aller totalement à l’encontre de l’intention de favoriser les mobilités pour faciliter et anticiper les transformations professionnelles.
En ne ciblant que les agents dont l’emploi est supprimé, cet article est de nature à créer de l’inquiétude en empêchant toute anticipation et rend le travail des directions des ressources humaines plus compliqué. Tout agent faisant partie d’un service ou d’une direction restructuré doit pouvoir bénéficier d’un accompagnement à la transition professionnelle.
En outre, les dispositifs de prise en charge des agents ayant perdu leur emploi mis en œuvre par les centres de gestion et le CNFPT dans la fonction publique territoriale ne couvrent qu’une partie de l’accompagnement en transition professionnelle.
À cet égard, nous déplorons que tous nos amendements – celui qui visait à étendre le dispositif d’accompagnement à la fonction publique territoriale, celui qui tendait à permettre à tout agent qui en fait la demande, et pas seulement à ceux dont l’emploi est supprimé, comme le prévoit le projet de loi, ainsi qu’à tout fonctionnaire dont l’emploi est supprimé et qui, à cette occasion, démissionne de bénéficier d’une indemnité de départ volontaire, celui qui avait pour objet d’étendre l’IDV, l’indemnité de départ volontaire, aux agents de la fonction publique hospitalière dont l’emploi est supprimé – aient été déclarés irrecevables au titre de l’article 40 de la Constitution et, donc, retoqués, alors qu’ils méritaient, selon nous, un débat.
Nous aurions aimé en lieu et place de cet article une vraie politique de sécurisation des transitions professionnelles dans l’ensemble de la fonction publique,
M. le président. L’amendement n° 42, présenté par Mmes Assassi et Benbassa, M. Collombat et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste, est ainsi libellé :
Supprimer cet article.
La parole est à Mme Éliane Assassi.
Mme Éliane Assassi. Nous nous opposons aux dispositions proposées en raison tant des objectifs politiques que des limites propres au contenu de cet article.
Tout d’abord, ce nouvel aménagement de l’accompagnement des agents dont l’emploi est supprimé est indissociable des vastes plans de suppressions de postes d’agents publics. Les conditions ont déjà été mises en place pour donner suite à la RGPP, la révision générale des politiques publiques, avec la MAP, la modernisation de l’action publique, et, aujourd’hui, le processus CAP 2022.
Accompagner les restructurations, c’est cautionner et anticiper 120 000 suppressions de postes dans la fonction publique, auxquelles, vous le savez, mes chers collègues, nous nous opposons fortement et fermement.
Ensuite, cet article laisse penser que le statut de la fonction publique interdit toute mobilité, toute adaptation. De nombreuses possibilités existent, mais le cadre juridique proposé retient des logiques qui, traditionnellement, n’étaient pas celles des agents publics : elles étendent au secteur public des pratiques et des fonctionnements qui ont fait la preuve de leur injustice et de leur inefficacité dans le secteur privé. En témoigne la possibilité de bénéficier d’une mise à disposition auprès d’un organisme ou d’une entreprise « exerçant son activité dans un secteur concurrentiel conformément aux règles de droit privé », en vue de sa reconversion professionnelle.
À l’heure actuelle, de telles mises à disposition sont possibles, mais seulement auprès d’organismes privés exerçant des missions de service public et uniquement dans le cadre de l’exercice de ces missions. Vider les emplois publics de leur lien indéfectible avec l’intérêt général, tel est, selon nous, l’un des aspects les plus néfastes de l’article 27.
Enfin, aucun accompagnement précis n’est établi au profit des agents publics relevant de la fonction publique territoriale, ce qui constitue une limite évidente aux dispositions de l’article 27.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Loïc Hervé, rapporteur. L’article 27 crée, pour la fonction publique de l’État et la fonction publique hospitalière, des dispositifs d’accompagnement des fonctionnaires dont l’emploi est supprimé. Ceux-ci comprennent un accompagnement en termes de ressources humaines – accompagnement personnalisé, accès prioritaire à la formation, congé de transition professionnelle – et des mesures statutaires, telles que la possibilité de mobilités dans le secteur public, avec des priorités pour le fonctionnaire concerné, ou une passerelle vers le secteur privé.
Dans ces conditions, la commission est défavorable à la suppression de ces dispositifs.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Olivier Dussopt, secrétaire d’État. Le Gouvernement est défavorable à la suppression de l’article 27. En réalité, nous voulons donner du sens à la notion de droit à reclassement.
Une décision du Conseil d’État d’octobre ou de novembre 2017 a d’ailleurs souligné que ce droit à reclassement était, d’une certaine manière, carencé par l’absence de textes réglementaires pour la fonction publique hospitalière, la FPH. Il y a malheureusement fort à parier que si la FPE, la fonction publique de l’État, rencontrait le même type de difficulté, une décision similaire serait rendue. La fonction publique territoriale bénéficie de dispositifs spécifiques, notamment celui qui concerne les fonctionnaires momentanément privés d’emploi, avec une prise en charge par les centres de gestion, des dispositifs qui n’existent pas dans la FPE et dans la FPH.
C’est pourquoi nous voulons un dispositif à trois étages.
Tout d’abord, premier étage, ce dispositif tombe sous le sens, mais il est parfois bon de le rappeler : lorsqu’un emploi de la fonction publique de l’État est supprimé, le meilleur reclassement qui soit se trouve dans le service concerné, notamment quand il s’agit d’un service déconcentré.
Ensuite, deuxième étage, le dispositif vise à favoriser les mobilités géographiques, et tel est le sens des textes réglementaires que nous avons déjà publiés, avec, notamment, un arrêté au travers duquel le montant de la prime plafond de restructuration de service est doublé et la part supplémentaire en cas de présence d’un conjoint ou d’une conjointe augmente très fortement. Qui plus est, nous allons créer une agence de mobilité et de reclassement pour accompagner aussi le reclassement des conjoints et des conjointes, car, on le sait, il s’agit parfois d’un frein à la mobilité.
Enfin, troisième et dernier étage, nous voulons créer une forme de priorité d’affectation locale pour permettre à un agent de l’État dont le poste est supprimé de se voir proposer un poste d’agent de l’État dans un autre ministère éventuellement, mais dans le département où il est établi, de manière à préserver sa vie familiale et son ancrage local.
Telles sont les raisons qui nous ont conduits à proposer cet article 27. C’est précisément pour permettre le maintien dans son territoire de vie d’un agent public de l’État dont le poste est supprimé et à condition qu’il accepte d’aller dans un autre ministère que nous prévoyons le congé de transition professionnelle de manière à faire en sorte que cet agent soit formé à un nouveau métier. Il va sans dire qu’il faut évidemment prévoir une certaine proximité entre les métiers : on ne peut exercer certaines professions même avec douze mois de formation. Nous nous appuierons sur les préfets de région pour mettre en place cette priorité d’affectation locale.
M. le président. L’amendement n° 412, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :
Alinéas 4 et 5
Supprimer ces alinéas.
La parole est à M. le secrétaire d’État.
M. Olivier Dussopt, secrétaire d’État. Cet amendement vise à répondre à une interrogation : nous avons une forme de scepticisme à l’égard d’une disposition adoptée par la commission des lois.
Par cet amendement, nous voulons supprimer la priorité de mutation pour le fonctionnaire dont l’emploi est supprimé, car, à notre sens, celle-ci est désormais prévue par le dispositif d’accompagnement dans le cadre des restructurations mises en place à l’article 27.
Cette disposition introduite initialement par la loi relative à la déontologie de 2016 n’a jamais été mise en œuvre ; d’où la modification prévue par le présent projet de loi visant à intégrer cette priorité de mutation dans un cadre plus collectif et plus effectif avec, notamment, la reconnaissance de pouvoirs renforcés au préfet pour favoriser le reclassement d’agents au niveau local, ainsi que je l’ai l’expliqué précédemment.
Tel est l’objet de cet amendement.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Loïc Hervé, rapporteur. Cet amendement du Gouvernement vise à supprimer les priorités d’affectation ou de détachement pour les fonctionnaires dont l’emploi est supprimé hors cas de restructuration.
Ces deux priorités existent actuellement et ont été supprimées dans le cadre du projet de loi initial. Un amendement de la commission les a réintroduites dans le texte de la commission, afin que les fonctionnaires dont l’emploi est supprimé hors cas de restructuration puissent en bénéficier.
En effet, le dispositif d’accompagnement mis en place par l’article 27 s’applique aux fonctionnaires de l’État dont l’emploi est supprimé dans le cadre d’une restructuration. Le périmètre et la période de mise en œuvre de ce dispositif sont déterminés par décret en Conseil d’État. Parmi le grand nombre de suppressions d’emploi prévues d’ici à la fin du quinquennat, certaines d’entre elles pourraient intervenir, nous semble-t-il, alors qu’elles ne sont pas prises en compte dans les périmètres définis par décret.
C’est pourquoi nous souhaitons maintenir ces priorités d’affectation ou de détachement. Il s’agit pour nous d’une véritable garantie pour les fonctionnaires.
Aussi, l’avis de la commission est défavorable.
M. le président. L’amendement n° 89 rectifié, présenté par Mme Conconne, M. Antiste, Mme Jasmin, MM. Lurel, Lalande, Vaugrenard, Tourenne et Daudigny, Mme Artigalas et M. Mazuir, est ainsi libellé :
Alinéa 15
Compléter cet alinéa par les mots :
, à l’exception de celle énoncée au 4° du II du même article 60
La parole est à Mme Catherine Conconne.
Mme Catherine Conconne. J’arrive au bout d’une longue liste d’interpellations au travers d’amendements présentés par mes collègues à la fois de la Guadeloupe et de la Martinique durant toutes ces journées de débat sur la fonction publique, tant la semaine dernière que ces derniers jours.
Nous avons voulu sensibiliser aussi bien la Haute Assemblée que le Gouvernement sur la situation singulière et difficile de deux pays, la Guadeloupe et la Martinique, qui subissent une véritable hémorragie démographique. Pour le pays que je connais le mieux, la Martinique, nous comptons dix habitants de moins chaque jour – je le répète : chaque jour !
Les chiffres de l’Insee sont alarmants : en vingt ans, nous passerons de 400 000 habitants à 280 000 habitants. L’État a pris part à cette saignée, entre 1960 et 1982, en organisant une migration forcée de près de 40 000 jeunes dans la fleur de l’âge qui ont été envoyés vers ladite France métropolitaine pour y travailler. C’était plus facile de mettre la poussière sous le tapis plutôt que de décider de mettre en place des politiques audacieuses et déterminées en matière de développement.
Aujourd’hui, le résultat est là. Nous avons tenté de multiplier à l’endroit de l’État les offensives pour attirer l’attention et dire que nous méritons un traitement particulier, qui devrait être inscrit dans la loi, de la même manière que ces migrations forcées l’avaient été. Rien, rien n’a trouvé grâce à vos yeux ! Pas le moindre amendement ! Et, bien sûr, je ne m’étonne pas du sort qui sera réservé à ce énième amendement portant sur l’article 27.
Que nous dit-on ? Aujourd’hui, le Gouvernement prône la différenciation – un grand mot –, qui sera maintenant appliquée à toute politique publique – c’est un leitmotiv. Mais lorsque nous demandons son application concrète, il n’y a plus personne ! Alors, je formule encore ma demande, tout en étant très résignée à entendre une réponse négative.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Loïc Hervé, rapporteur. L’article 27 prévoit que les priorités d’affectation des fonctionnaires dont le poste est supprimé dans le cadre d’une restructuration prévalent sur celles qui sont notamment accordées aux fonctionnaires justifiant du centre de leurs intérêts matériels et moraux en outre-mer.
Le présent amendement tend à donner aux fonctionnaires originaires d’outre-mer une priorité non seulement sur les fonctionnaires dont le poste est supprimé, mais aussi sur les fonctionnaires qui sont séparés de leur conjoint pour des raisons professionnelles, sur les fonctionnaires en situation de handicap et sur ceux qui exercent dans des quartiers difficiles.
La commission comprend les attentes des fonctionnaires ultramarins, mais cet amendement pose un problème d’égalité vis-à-vis des autres fonctionnaires qui bénéficient d’une priorité de mutation. Nous avons déjà soulevé ce problème d’égalité lors de l’examen d’un amendement similaire à l’article 11 du projet de loi. D’ailleurs, ma chère collègue, c’est dans le cadre de cet article que nous avons adopté des dispositions plus importantes en matière de reconnaissance du critère du centre des intérêts matériels et moraux. (Mme Catherine Conconne fait un signe de dénégation.) Des progrès notoires ont été faits en la matière.
C’est pourquoi nous demandons le retrait de cet amendement ; à défaut, l’avis de la commission sera défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. La parole est à Mme Catherine Conconne, pour explication de vote.
Mme Catherine Conconne. Nos pays ont besoin d’équité, pas d’égalité. Vous me dites, monsieur le rapporteur, que cet amendement va créer de la disparité entre les fonctionnaires et que vous y êtes défavorable pour des questions d’égalité, mais mesurez bien la différence qui existe entre les mots « égalité » et « équité » !
M. le président. Je mets aux voix l’article 27.
(L’article 27 est adopté.)
Article 28
Après l’article 14 ter de la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires, il est inséré un article 14 quater ainsi rédigé :
« Art. 14 quater. – I. – Lorsqu’une activité d’une personne morale de droit public employant des fonctionnaires est transférée à une personne morale de droit privé ou à une personne morale de droit public gérant un service public industriel et commercial, des fonctionnaires exerçant cette activité peuvent être détachés d’office, pendant la durée du contrat liant la personne morale de droit public à l’organisme d’accueil, sur un contrat de travail conclu à durée indéterminée auprès de l’organisme d’accueil.
« II. – Ce contrat de travail comprend une rémunération au moins égale à la rémunération antérieurement versée par l’administration, l’établissement public ou la collectivité d’origine et qui ne peut être inférieure à celle versée pour les mêmes fonctions aux salariés de la personne morale de droit privé ou aux agents de la personne morale de droit public gérant un service public industriel et commercial.
« Les services accomplis en détachement dans l’organisme d’accueil sont assimilés à des services effectifs dans le corps ou le cadre d’emplois dont relève l’agent.
« III. – Sans préjudice des cas où le détachement ou la disponibilité est de droit, le fonctionnaire peut demander à ce qu’il soit mis fin à son détachement pour occuper un emploi au sein d’une des administrations mentionnées à l’article 2.
« IV. – En cas de renouvellement du contrat liant la personne morale de droit public à l’organisme d’accueil, le détachement du fonctionnaire est renouvelé d’office.
« En cas de conclusion d’un nouveau contrat entre la personne morale de droit public et une autre personne morale de droit privé ou une autre personne morale de droit public gérant un service public industriel et commercial, le fonctionnaire est détaché d’office auprès du nouvel organisme d’accueil. Cet organisme est tenu de reprendre les clauses substantielles du contrat de travail à durée indéterminée du fonctionnaire, notamment celles relatives à la rémunération.
« V. – Lorsque le contrat liant la personne morale de droit public à l’organisme d’accueil prend fin, le fonctionnaire opte soit pour sa radiation des cadres et le versement d’une indemnité prévue par décret s’il souhaite poursuivre son contrat de travail au sein de l’organisme d’accueil, soit pour sa réintégration de plein droit dans son corps ou son cadre d’emplois d’origine.
« Lorsque le fonctionnaire détaché en application du présent article et titulaire d’un contrat de travail à durée indéterminée est licencié par l’organisme d’accueil, il est réintégré de plein droit dans son corps ou son cadre d’emplois d’origine.
« VI. – À tout moment pendant la durée de son détachement, le fonctionnaire peut solliciter sa radiation des cadres et le bénéfice de l’indemnité mentionnée au V.
« VI bis. – En dehors des cas où ils sont mis à disposition, les fonctionnaires, lorsqu’ils exercent leurs missions auprès d’une personne morale de droit privé, peuvent être détachés d’office dans les conditions prévues au présent article auprès de cette personne morale de droit privé.
« VII. – Un décret en Conseil d’État détermine les conditions d’application du présent article. »
M. le président. La parole est à Mme Céline Brulin, sur l’article.
Mme Céline Brulin. Nous proposons la suppression de l’article 28, dans la mesure où il ouvre la voie à des détachements d’office de fonctionnaires auprès du secteur privé. Nous pensons en effet que des missions, aujourd’hui exercées dans le service public, ne doivent pas être transférées au privé.
Nous souhaitons plus particulièrement la suppression de l’alinéa 11, qui a été introduit par l’Assemblée nationale sur proposition du Gouvernement, car il traite du cas des conseillers techniques sportifs, les CTS, sur lequel je voudrais intervenir.
Après des déclarations et des révélations parues dans la presse, nous avons effectivement appris que 1 600 CTS seraient transférés vers les fédérations sportives, ce que ces dernières ne désirent pas ou ne peuvent pas assumer. Beaucoup d’entre elles n’ont pas les reins suffisamment solides pour accueillir ces personnels ou franchiraient un seuil de salariés qui impliquerait la mise en place d’instances de dialogue social, ce qui les ferait entrer dans un tout autre dispositif.
Par ailleurs, aucune garantie relative à la pérennité des compensations financières n’est à l’ordre du jour. Je relève à cet égard que le coût de ce transfert pour la collectivité au sens large serait élevé : le montant de la prise en charge des CTS atteint actuellement environ 120 millions d’euros pour l’État et passerait à 152 millions d’euros si ces conseillers étaient sous statut privé, ce qui serait le cas s’ils entraient dans le giron des fédérations sportives.
Certains CTS nous ont expliqué que cette mesure pourrait les pousser à offrir leurs services à des nations étrangères, ce qui serait quand même un comble au moment où nous préparons les prochains jeux Olympiques, notamment ceux de Paris de 2024.
Les conseillers techniques sportifs sont des agents du ministère des sports qui assurent par là même une politique publique dans le domaine du sport. Or, dans quelques jours, nous examinerons ici même un texte relatif à l’organisation des jeux Olympiques, qui devait initialement être purement technique, mais dans lequel le Gouvernement a fini par introduire de manière extrêmement cavalière la création de l’agence nationale du sport, ce qui conduit à une modification assez profonde du modèle sportif français.
Nous avons le sentiment que c’est ce modèle qui est en cause, pierre après pierre, et que ces questions de fond sont traitées sans véritable débat.
M. le président. Il faut conclure !
Mme Céline Brulin. Enfin, la ministre nous a elle-même dit que nous pouvions voter le texte en l’état, puisqu’elle ne l’appliquerait pas. Cela me semble une raison suffisante pour rejeter l’article 28.
M. le président. La parole est à M. Michel Savin, sur l’article.
M. Michel Savin. Avec l’alinéa 11 de l’article 28 que nous allons examiner, le Gouvernement a souhaité créer un mécanisme de détachement automatique pour les fonctionnaires concernés par l’externalisation de leur activité. Cette disposition vise à faciliter les opérations de transfert d’activité vers une personne morale de droit privé ou de droit public gérant un service public industriel et commercial.
Le dispositif de cet alinéa fait l’objet d’une controverse qui n’a échappé à personne. En effet, le mouvement sportif y voit un moyen détourné pour le Gouvernement de forcer le détachement automatique des conseillers techniques sportifs auprès des fédérations.
Par ailleurs, les acteurs du monde sportif se sentent trahis par le Gouvernement, car l’alinéa en question a été adopté, comme ma collègue vient de le préciser, alors même que des discussions avaient commencé au sujet de l’avenir des CTS entre les fédérations, les syndicats et le ministère des sports.
La ministre des sports, au vu de la polémique suscitée par l’alinéa 11, a promis qu’elle n’appliquerait pas cette disposition aux CTS. Toutefois, nous estimons au Sénat que cette promesse orale n’est pas suffisante. Nous ne mettons pas en cause l’honnêteté de la ministre, mais sa promesse n’engage qu’elle-même. Comment s’assurer que le détachement d’office, s’il est inscrit dans la loi, ne s’appliquera pas aux CTS à l’avenir ?
J’entends par avance l’argument du Gouvernement selon lequel l’alinéa 11 vise non seulement les CTS, mais aussi d’autres professionnels, notamment ceux qui exercent dans le cadre des maisons de services au public dont la gestion est confiée à des mutuelles. C’est la raison pour laquelle l’amendement que je présenterai à l’article 28 tend non pas à supprimer l’alinéa 11, mais à spécifier que ledit alinéa ne s’applique pas aux CTS.
Mon amendement a pour objet de rétablir un climat propice à une discussion apaisée, de redonner confiance aux acteurs du monde sportif, afin que des négociations sereines sur l’avenir des CTS soient ouvertes.
En effet, si l’application de l’alinéa 11 aux CTS en l’absence de concertation préalable n’est pas souhaitable, le statu quo ne l’est pas davantage. Les questions du nombre de CTS, de leur formation, de leur répartition au sein des fédérations et de leurs missions doivent être débattues et tranchées. Il ne faudrait pas non plus oublier le cas des conseillers d’animation sportive et des formateurs.
Le Gouvernement prévoit une grande loi relative au sport pour le premier trimestre 2020. Fixons-nous cette échéance, monsieur le secrétaire d’État, pour permettre à votre collègue, la ministre des sports, de trouver un accord et d’intégrer dans cette future loi la nouvelle organisation et le nouveau fonctionnement des CTS.
M. le président. La parole est à M. Jean-Jacques Lozach, sur l’article.
M. Jean-Jacques Lozach. Mon intervention concerne également l’alinéa 11 de l’article 28, c’est-à-dire ce transfert particulier des conseillers techniques sportifs de l’État vers les fédérations sportives, et ce dans des conditions particulières et très contraignantes.
Si un très fort mécontentement est exprimé à ce sujet, c’est parce que la situation est jugée très préoccupante, voire inacceptable par tout le monde sportif eu égard au nombre des CTS concernés : 1 600 conseillers, c’est-à-dire la moitié des effectifs du ministère. D’où les pétitions, les manifestations et un mouvement social émanant de concitoyens qui ne sont pas véritablement rebelles ou revendicatifs d’habitude.
Ce mécontentement va de la base au sommet, tout simplement parce que les CTS concernent l’ensemble du modèle sportif français. Ils sont la pierre angulaire, la cheville ouvrière, la colonne vertébrale de ce modèle sportif depuis la base, c’est-à-dire les clubs, avec notamment les conseillers d’animation sportive et les conseillers techniques départementaux, les CTD, jusqu’à la préparation olympique, autrement dit la haute performance.
Quels moyens humains conservera le ministère pour appliquer une politique sportive ambitieuse ? Après le départ d’environ 1 600 personnes du giron de l’État pour les fédérations et d’une soixantaine d’agents pour l’agence nationale du sport, il reste les services déconcentrés de l’État.
Mais, d’ores et déjà, avec le rapprochement entre les Direccte, les directions régionales des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l’emploi, et les DRJSCS, les directions régionales de la jeunesse, des sports et de la cohésion sociale, avec la mise sous autorité des recteurs, avec la création d’un pôle éducatif et sportif, on aura des agents qui seront prioritairement affectés à la montée en puissance du SNU, le service national universel. Que restera-t-il alors des missions traditionnellement exercées par ces agents de l’État ?
Et n’oublions pas l’enjeu financier. En effet, les fédérations n’ont pas les moyens de supporter ce qui les attendrait à terme : une compensation financière partielle de l’État. On a déjà connu une expérience malheureuse de ce type après les jeux Olympiques d’Atlanta.
Il y a donc un enjeu de faisabilité, notamment en matière de gestion et de ressources humaines.
Enfin, quelle contradiction par rapport aux ambitions affichées, c’est-à-dire 80 médailles aux jeux Olympiques de 2024 ! On commence par déstabiliser la préparation olympique, puisque ces CTS ont une véritable épée de Damoclès au-dessus de leur tête, en particulier au moment de la préparation des jeux Olympiques de Tokyo de 2020. On veut augmenter de 3 millions le nombre de pratiquants, mais, pour ce faire, il faut augmenter le nombre d’équipements comme le nombre d’encadrants.
M. le président. Il faut conclure !
M. Jean-Jacques Lozach. Or on supprime dès cette année le concours de recrutement. Il faut savoir que si cette suppression est confirmée, on aura 25 % de CTS en moins d’ici à cinq ans.
M. le président. Mes chers collègues, il est minuit vingt-cinq ; la commission souhaiterait que soit examinée la totalité des douze amendements déposés à l’article 28. Si chacun fait un effort, nous pourrions y parvenir avant une heure. (Protestations sur les travées du groupe communiste républicain citoyen et écologiste.)
Je suis saisi de deux amendements identiques.
L’amendement n° 43 est présenté par Mmes Assassi et Benbassa, M. Collombat et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste.
L’amendement n° 162 rectifié bis est présenté par MM. Marie, Durain, Kanner et Jacques Bigot, Mme de la Gontrie, M. Fichet, Mme Harribey, MM. Kerrouche, Leconte, Sueur, Sutour, Tourenne, Antiste, Bérit-Débat, Montaugé, Temal et Raynal, Mme Monier et les membres du groupe socialiste et républicain.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
Supprimer cet article.
La parole est à M. Fabien Gay, pour présenter l’amendement n° 43.